universite paris val-de-marne faculte de medecine de creteil

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UNIVERSITE PARIS VAL-DE-MARNE
FACULTE DE MEDECINE DE CRETEIL
******************
ANNEE 2004-2005
N°
THESE
POUR LE DIPLOME D’ETAT
DE
DOCTEUR EN MEDECINE
Discipline : Médecine Générale
-----------
Présentée et soutenue publiquement le
A CRETEIL (PARIS XII)
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Par Mlle FERREIRA Sandra
Née le 29 Octobre 1976 à Sistelo (Portugal)
-----------
TITRE : Le syndrome de Willi-Prader : ses caractéristiques, sa prise en charge et son suivi.
DIRECTEUR DE THESE :
Mr Le Docteur GUILLOT François
LE CONVERSATEUR DE LA
BIBLIOTHEQUE UNIVERSITAIRE
REMERCIEMENTS
A Monsieur le Docteur François GUILLOT
Pour son enseignement de la médecine Pédiatrique,
Pour avoir accepté de diriger cette thèse,
Pour sa patience, son soutien et sa gentillesse tout au long de la rédaction de ce travail.
A Madame le Docteur Florence BLANC,
A Madame le Docteur Marie-José BOIVIN,
A Madame le Docteur Anne CHACE,
A Madame le Docteur Danièle DUBREZ,
A Madame le Docteur Rosita WISNEWSKY,
A Monsieur le Docteur Halim BECKRI,
A Monsieur le Docteur Romain GIRE,
A Monsieur le Docteur Philippe TREVISE,
Pour leur présence,
Pour leurs conseils avisés et leur apprentissage pendant mon stage.
A tous les membres du service de Pédiatrie de l’hôpital Intercommunal de
Villeneuve-Saint-Georges,
Pour leur disponibilité et leur écoute,
Pour m’avoir soutenue pendant mes six mois de stage.
A Anne et à Françoise
Pour leur aide précieuse à nos recherches d’archives,
Pour leur accueil et leur sourire.
A mes parents et à mon frère Paulo,
Pour leur écoute attentive,
Pour leur soutien et leur patience tout au long de mes études,
Pour m’avoir toujours encouragé.
A Arthur,
Pour son amour, sa gentillesse,
Pour sa collaboration à ce travail,
Pour sa présence tout simplement.
Aux membres de ma famille qui m’ont soutenu, à tous mes ami(e)s,
A André.
TABLE DES MATIERES
INTRODUCTION……………………………………………………………....... 11
PREMIERE PARTIE :
GENETIQUE ET SYNDROME DE WILLI-PRADER…….
12
A. NOTIONS DE GENETIQUE………………………………………… 13
I. LA CELLULE EUCARYOTE………………………………………………. 14
II. LE MATERIEL GENETIQUE…………………………………………….. 16
II.1. Les chromosomes…………………………………………………… 16
II.1.a. Définition et structure……………………………………….. 16
II.1.b. Technique d’analyse des chromosomes……………………… 16
II.1.c. Le caryotype………………………………………………….. 17
II.2. L’ADN (Acide désoxyribonucléique)………………………………. 19
II.2.a. Définition et structure de l’ADN…………………………….. 19
II.2.b. Un dogme : ADN ARN protéine………………………… 19
III. LA DIVISION CELLULAIRE : TRANSMISSION DU MATERIEL
GENETIQUE………………………………………………………………….. 20
III.1. La mitose…………………………………………………………… 20
III.1.a. Les quatre stades de la mitose……………………………… 20
III.1.b. Le rôle de la mitose chez l’humain………………………….. 21
III.2. La méiose………………………………………………………….. 23
III.2.a. La division réductionnelle………………………………….. 23
III.2.b. La division équationnelle…………………………………… 24
III.2.c. Le rôle de la méiose chez l’humain…………………………. 24
IV. LES « ACCIDENTS GENETIQUES » RESPONSABLES
DU SWP ……………………………………………………………………….. 26
IV.1. Les délétions……………………………………………………….. 26
IV.1.a. Généralités………………………………………………….. 26
IV.1.b. Délétions et SWP……………………………………………. 27
IV.2. La disomie uniparentale (DUP)……………………………………29
IV.2.a. Généralités.............................................................................. 29
IV.2.b. Disomie uniparentale et SWP………………………………. 30
IV.3. La mutation du centre d’empreinte………………………………. 32
IV.3.a. Empreinte génomique parentale…………………………… 32
IV.3.b. Le centre d’empreinte……………………………………… 34
V. LES METHODES D’EXPLORATION…………………………………. 36
V.1. L’étude du profil de méthylation…………………………………... 36
V.2. Le caryotype à haute résolution et méthode de FISH…………….. 40
V.3. L’analyse par microsatellites………………………………………. 42
VI. LE CONSEIL GENETIQUE……………………………………………... 45
VI.1. Le risque de récurrence en fonction du mécanisme…………………. 45
VI.2. Les voies de la recherche…………………………………………….... 46
DEUXIEME PARTIE :
DESCRIPTION CLINIQUE
ET
PRISE EN CHARGE DU SWP ……………. 48
B.DESCRIPTION DU SWP………………………………………………. 49
I. L’HYPOTONIE NEONATALE…………………………………………….. 49
I.1. Développement psychomoteur et tonus normal chez le nouveau-né et le
nourrisson……………………………………………………………. 49
I.2. Diagnostic d’une hypotonie néonatale……………………………… 54
I.3. Enquête paraclinique face à une hypotonie………………………… 59
I.4. Caractéristiques de l’hypotonie dans le SWP………………………. 61
I.5. Les diagnostics différentiels………………………………………… 62
I.5.a. L’atteinte centrale……………………………………………. 64
I.5.b. L’atteinte périphérique………………………………………... 66
I.5.c. Conclusion…………………………………………………….. 70
II. LES TROUBLES DU COMPORTEMENT ALIMENTAIRE………. 72
II.1. L’obésité infantile…………………………………………………... 73
II.1.a. Définition et prévalence…………………………………….. 73
II.1.b. Facteurs de risque et étiologies de l’obésité………………… 78
II.1.c. Conséquences de l’obésité infantile…………………………. 92
II.1.d. Approche thérapeutique de l’obésité infantile………………. 94
II.2. L’obésité infantile dans le SWP……………………………………. 100
II.2.a. Pathogénie de l’obésité et caractéristiques…………………. 100
II.2.b. Prise en charge et thérapeutique de l’obésité infantile
dans le SWP………………………………………………….. 102
III. LES TROUBLES DU COMPORTEMENT DANS LE SWP………. 105
III.1. Identification des différents symptômes…………………………… 106
III.1.a. Par ordre de fréquence……………………………………… 106
III.1.b. En fonction de l’âge…………………………………………. 107
III.1.c. En fonction de l’anomalie génétique…………………………109
III.2. Description des troubles du comportement……………………….. 112
III.2.a. Les troubles des fonctions cognitives……………………….. 112
III.2.b. Les troubles obsessionnels et compulsifs…………………… 113
III.2.c. L’hyperphagie………………………………………………. 116
III .2.d. Les autres symptômes……………………………………….. 118
III.2.e. La crise………………………………………………………. 118
III.3. Quelques pistes sur les mécanismes physiopathologiques des troubles
comportementaux………………………………………………….. 120
III.4. Prise en charge et traitement des troubles du comportement……… 124
IV. DESCRIPTION CLINIQUE DU SWP………………………………….. 130
V. DE L’ANNONCE DU DIAGNOSTIC A LA PRISE EN CHARGE.. 135
V.1. L’annonce de la maladie…………………………………………… 135
V.1.a. L’annonce vue par les parents……………………………… 135
V.1.b. L’annonce vue par le médecin……………………………… 135
V.2. La prise en charge et le suivi du patient atteint du SWP………….. 136
TROISIEME PARTIE :
ANALYSE ET REFLEXION SUR LES DOSSIERS
MEDICAUX................................................................................................... 153
A. HISTOIRES VRAIES…………………………………………………… 154
I. L’histoire de Tony................................................................................... 155
II. L’histoire de Christophe……………………………………………… 167
III. L’histoire de Perrine…………………………………………………. 177
IV. L’histoire de Juliette………………………………………………….. 187
V. L’histoire de Chelcy…………………………………………………… 196
VI. L’histoire de Christine……………………………………………….. 206
B. DISCUSSION ET REFLEXION A PARTIR DES DOSSIERS
DES ENFANTS……………………………………………………………. 215
I. AVANT LE DIAGNOSTIC DE SWP ……………………………………... 215
I.1. Sur le plan clinique………………………………………………….. 215
I.2. La prise en charge et le suivi………………………………………... 218
I.3. Sur le plan paraclinique…………………………………………….. 220
II. APRES LE DIAGNOSTIC DE SWP........................................................... 224
II.1.La prise en charge…………………………………………………… 224
II.2. Le médecin généraliste dans le SWP………………………………. 230
CONCLUSION……………………………………………………………………. 232
BIBLIOGRAPHIE……………………………………………………………….. 234
ANNEXE 1………………………………………………………………………… 242
ANNEXE 2………………………………………………………………………… 242
DEFINITIONS………………………………………………………….. 243
SERMENT D’HIPPOCRATE………………………………………………… 246
SOMMAIRE DES ILLUSTRATIONS ET TABLEAUX
Figure I : Schéma de l’archétype d’une cellule eucaryote. ……………………….. 15
Figure II : Caryotype humain. ……………………………………………………… 18
Figure III : Les différentes étapes de la mitose. ……………………………………. 22
Figure IV : Les différentes étapes de la méiose. …………………………………… 25
Figure V : Région chromosomique impliquée dans la survenue du SWP. ………. 28
Figure VI : Les différents mécanismes conduisant à une disomie uniparentale. ... 31
Figure VII : Exemple de la mutation du centre d’empreinte dans le SWP. ……… 35
Figure VIII : La méthode de Southern-Blot. ……………………………………….. 37
Figure IX : Résultat d’une autoradiographie obtenue par Southern-Blot avec la
sonde SNRPN. ………………………………………………………….. 38
Figure X : Analyse de méthylation par PCR-méthylspécifique. …………………. 39
Figure XI : Hybridation in situ par fluorescence. ………………………………… 42
Figure XII : L’analyse par microsatellites sur le chromosome 15. ………………. 43
Figure XIII : L’arbre décisionnel de la stratégie diagnostique du SWP. ………… 44
Tableau 1 : Fréquence et risque de récurrence, selon les mécanismes génétique mis en
jeu dans le SWP. ……………………………………………………….. 46
Tableau 2 : Principales étapes du développement de l’enfant. ……………………50
Tableau 3 : Caractéristiques principales des hypotonies centrales et périphériques.
…………………………………………………………………………………………58
Tableau 4 : Les différentes étiologies des hypotonies (centrales et périphériques).
…………………………………………………………………………………………63
Tableau 5 : Nouvelles bornes internationales de l’indice de masse corporelle (IMC)
pour définir le surpoids et l’obésité chez l’enfant entre 2 et 18 ans. ... 77
Tableau 6 : Besoins énergétiques moyens des enfants normaux de 1 à 18 ans. ….. 97
Tableau 7 : Les principaux troubles du comportement et leur pourcentage dans une
population de 100 patients âgés de 4 à 46 ans atteints du SWP. ……. 106
Tableau 8 : Les critères de diagnostic du syndrome de Prader-Willi. ……………134
Tableau 9 : Récapitulatif des critères MAJEURS et MINEURS de diagnostic du SWP
chez les 6 enfants. ……………………………………………………… 214
L’idée de ce travail est venue de l’observation d’un nouveau-né hospitalisé pour
hypotonie immédiate et difficultés d’alimentation dans l’unité de Néonatologie du service
de Pédiatrie Générale de l’hôpital Intercommunal de Villeneuve-Saint-Georges (94).
L’inquiétude suscitée par l’état clinique de cette petite fille, âgée de quelques jours, a
attiré mon attention.Ce tableau d’hypotonie néonatale provoquait une anxiété sous-jacente
perceptible au sein de l’équipe médicale.Quelle était donc l’origine de cette hypotonie ?
Parmi les multiples causes, il existe le syndrome deWilli-Prader (ou Prader-Willi).
Décrit en 1956, le syndrome de Willi-Prader (SWP) est une maladie génétique affectant le
chromosome 15, caractérisée par une évolution biphasique : une période d’hypotonie
sévère néonatale avec difficultés d’alimentation suivie d’une phase d’obésité avec
hyperphagie après l’âge de 2 ans. La prise en charge et le suivi de ces enfants restent, en
Médecine Générale, peu développés.
La volonté des équipes médicales est de les améliorer par une meilleure coopération entre
les médecins généralistes, les pédiatres, les psychologues et les diététiciennes car le
contrôle de l’obésité reste très difficile et requiert des mesures diététiques et
comportementales, associées à un soutien psychologique.
Depuis 1999, six cas ont été diagnostiqués dans le service dont quatre de diagnostic
récent et un suivi actuellement au Centre d’Action Médico-Social Précoce (CAMSP) de
Choisy-le–Roi (94). Des nouvelles récentes d’une jeune femme, née en 1980, ont permis
de savoir qu’elle était atteinte du syndrome de Willi-Prader.
Finalement, une meilleure connaissance de ce syndrome permet une prise en charge
précoce et spécifique tant sur le plan diététique, comportemental et psychologique.
Outre un soutien moral, des structures médico-sociales telles que les CAMSP et les
SESSAD (Service d’Education Spéciale et de Soins à Domicile) participent au
développement psychomoteur et orthophonique de ces enfants. Elles contribuent
également à la socialisation, l’intégration, et l’orientation de ces petits patients, aidant les
parents dans un parcours quelquefois long et compliqué.
PREMIERE PARTIE :
GENETIQUE
ET
SYNDROME DE WILLI-PRADER
A. NOTIONS DE GENETIQUE
Science de l’hérédité, la Génétique s’intéresse à la transmission et à la variation des
caractères observés dans tous les organismes vivants (72).
Les observations effectuées au 19ème siècle (1865) par le moine Autrichien, Gregor
Mendel, en ce qui concerne la transmission héréditaire de caractères simples, tels que la
couleur des pois, ont donné naissance aux lois fondamentales de l’hérédité, en découvrant
l’existence de traits héréditaires transmis de façon préalable par chacun des parents sur le
mode récessif ou dominant (8).
Cependant, un examen minutieux de certaines maladies rares et l’analyse des mutations
au niveau moléculaire ont montré qu’il existe des exceptions à l’hérédité Mendélienne.
Ces exceptions comprennent : l’hérédité mitochondriale, le mosaïcisme, l’empreinte
génomique et la disomie uniparentale, ces deux dernières étant impliquées dans la
survenue du SWP (73).
Après quelques rappels sur la cellule eucaryote et le cycle cellulaire (mitose et méiose),
nous développerons les « accidents » génétiques à l’origine du SWP.
Les mécanismes responsables de l’affection : délétion d’origine paternelle, disomie
uniparentale d’origine maternelle et plus rarement, mutation du centre d’empreinte sont
maintenant bien connus. Des techniques récentes de génétique moléculaire permettent de
nos jours, l’identification des divers mécanismes et seront abordées en fin de première
partie.
Leur intérêt réside dans la possibilité d’un conseil génétique et de l’évaluation du risque
de récurrence dans la descendance ou lors d’une grossesse ultérieure.
I. LA CELLULE EUCARYOTE (8) (51) (53)
La cellule, unité fondamentale du monde vivant, représente la forme de vie la plus simple,
capable de croître de façon autonome. Parmi les cellules, on distingue les cellules
eucaryotes (présence d’un noyau cellulaire) et les cellules procaryotes (absence de
noyau).
La cellule eucaryote est formée d'un cytoplasme et d’un noyau. Elle est entourée d’une
membrane plasmique (figure I).
-
la membrane cytoplasmique est formée d’une double couche lipidique, contenant
des canaux protéiques, permettant le transport de substances vers l’intérieur ou
l’extérieur de la cellule.
-
le matériel intracellulaire ou cytoplasme contient de nombreux organites facilement
identifiables et responsables de fonctions cellulaires bien précises :
o les mitochondries produisent l’énergie requise pour des réactions chimiques, la
locomotion et la croissance cellulaire.
o le réticulum endoplasmique et l’appareil de Golgi assurent le transport de
molécules d’un site cellulaire en un autre et leur sécrétion dans l’espace
extracellulaire.
o le cytosquelette, constitué de différentes protéines fibrillaires, confèrent sa
stabilité à la cellule.
o les centrioles sont de petites particules microtubulaires cylindriques jouant un
rôle important dans la division cellulaire.
o les ribosomes sont le siège de la synthèse protéique.
-
le noyau de la cellule eucaryote (nucleus) contient l’information génétique. Les
membranes interne et externe du noyau renferment des pores permettant le transport
de substances entre le noyau et le cytoplasme :
o le noyau contient un nucléole et les chromosomes, non individualisables et à
l’état diffus (chromatine). Les gènes se trouvent sur les chromosomes.
Figure I : Schéma de l’archétype d’une cellule eucaryote.
Extrait de : Petit Jean-Michel, Maftah Abderrahman, Julien Raymond. Cellules de
procaryotes et d’eucaryotes dans. Petit Jean-Michel, Maftah Abderrahman, Julien
Raymond. Biologie Cellulaire, Paris : Dunod, 2002 : 9-26.
II. LE MATERIEL GENETIQUE
II.1. Les chromosomes
II.1. a. Définition et structure (70) (75)
Les chromosomes sont les supports cellulaires de l’information génétique. Au nombre de
46, ils constituent le génome humain. Il existe donc 23 paires de chromosomes. De ces 23
paires, 22 sont identiques chez l’homme et la femme et sont appelées autosomes. La paire
restante comprend les chromosomes sexuels : XX chez la femme et XY chez l’homme.
Les membres d’une paire, qualifiés de chromosomes homologues, portent une information
génétique homologue, c'est-à-dire que la position des « loci » est identique sur les deux
chromosomes. Cependant, à chaque locus, il peut y avoir des formes, soit identiques, soit
légèrement différentes d’un même gène, appelées allèles.
Chaque chromosome humain est formé de deux chromatides reliées entre elles au niveau
du centromère.Chaque chromatide contient une double hélice d’ADN associée à des
protéines qui leur sont solidement liées : les histones et les protéines non histoniques.
II.1.b. Techniques d’analyse des chromosomes (70)
Les chromosomes ne sont individualisables que pendant la métaphase de la mitose
(mécanisme de la division cellulaire des cellules somatiques).
A ce stade, les chromosomes apparaissent au microscope sous la forme d’une préparation
microscopique étalée. Celle-ci est réalisée à partir d’une culture de lymphocytes et colorée
au Giemsa (coloration standard).
Le centromère, point de fusion des deux chromatides, est un point de repère cytologique
classique, permettant de diviser les chromosomes en deux bras, désignés par « p » pour le
bras court et « q » pour le bras long.
En fonction de la position du centromère, on distingue:
- les chromosomes métacentriques (le centromère est placé en position centrale et les
bras chromosomiques sont donc à peu près de longueur égale)
- les chromosomes submétacentriques (le bras « q » est d’une longueur supérieure à
celle du bras « p » du fait de la position non centrale du centromère)
- les chromosomes acrocentriques (le centromère est situé à l’extrémité du
chromosome et le bras court « p » est quasi-inexistant)
Grâce à l’analyse microscopique et à la position du centromère, les chromosomes sont
identifiables et l’on peut réaliser la carte chromosomique d’un individu donné (caryotype).
II.1.c. Le caryotype (70)
Le caryotype est la description du nombre et de la morphologie des chromosomes,
caractéristique d’un sujet (figure II). Par définition, un caryotype comporte 22 paires
d’autosomes numérotées de 1 à 22 et une paire de chromosomes sexuels (XX ou XY).
Les colorations usuelles et la position du centromère permettent d’établir le caryotype.
La technique des bandes G est la méthode de routine la plus fréquemment utilisée pour
l’identification et l’analyse de la structure des chromosomes : après dénaturation des
chromosomes par la trypsine et coloration au Giemsa, chaque paire chromosomique
possède une distribution caractéristique de bandes claires et sombres (bandes G) assurant
leur reconnaissance.
Des techniques spéciales de coloration (technique de bandes C, en haute résolution) sont
parfois utilisées lors de la recherche d’anomalies structurelles spécifiques.
Figure II : Caryotype humain.
Extrait de : Passage Eberhard. Chromosomes dans. Passage Eberhard. Atlas de poche de
Génétique. Paris : Flammarion Médecine-Sciences, 1995 : 172-173.
II.2. L’ADN (acide désoxyribonucléique) (75)
II.2.a. Définition et structure de l’ADN
La double hélice est la structure caractéristique de l’ADN. Découverte par James Watson
et Francis Crick en 1953, la structure ressemble à un escalier en colimaçon dans lequel les
deux chaînes polynucléotidiques sont orientées dans des directions opposées et sont
maintenues par des liaisons hydrogènes entre les paires de bases : ainsi, A (adénosine)
d’une chaîne s’apparie avec T (thymine) de l’autre et G (guanine) avec C (cytosine).
Par conséquent, selon le principe de complémentarité des bases, la connaissance de la
séquence des bases nucléotidiques sur un brin permet de déterminer automatiquement la
séquence des bases sur l’autre brin.
II.2.b. Un dogme : ADNARN protéine
L’information génétique est contenue dans l’ADN des chromosomes à l’intérieur du
noyau cellulaire mais la synthèse protéique, au cours de laquelle l’information contenue
dans l’ADN est utilisée, prend place dans le cytoplasme. Le lien moléculaire entre ces
deux types d’informations (l’ADN des gènes et les acides aminés des protéines) est l’ARN
(acide ribonucléique). La structure chimique de l’ARN est semblable à celle de l’ADN
excepté que chaque nucléotide dans l’ARN possède un sucre ribose au lieu d’un
désoxyribose : l’uracile (U) remplace la thymine (T). De plus, dans la plupart des
organismes, l’ARN existe sous forme d’une molécule simple brin, tandis que l’ADN
existe sous la forme d’une double hélice.
En ce qui concerne l’information, la relation entre l’ADN, l’ARN et la protéine est la
suivante : l’ARN est synthétisé à partir de l’ADN au moyen d’un processus appelé la
transcription. L’ARN qui contient l’information codée dans l’ADN est appelé ARN
messager. Défini par une succession de nucléotides groupés par trois en codon, l’ARN
messager est transporté du noyau jusque dans le cytoplasme où la séquence d’ARN est
décodée ou traduite (il s’agit du processus de traduction) aboutissant à la synthèse d’une
protéine donnée.
III. LA DIVISION CELLULAIRE : TRANSMISSION DU MATERIEL
GENETIQUE (70)
On distingue les cellules somatiques (elles correspondent aux cellules des eucaryotes) et
les cellules germinales (ou cellules sexuelles) principalement de par leur mode de division
cellulaire. Les cellules somatiques des eucaryotes se divisent selon le mécanisme de la
mitose afin de donner naissance à deux cellules-filles identiques entre elles et à la cellule
mère, portant les mêmes informations génétiques. En revanche, les cellules germinales se
divisent selon le mécanisme de la méiose, qui aboutit à quatre cellules-filles portant
chacune la moitié du matériel génétique de la cellule-mère.
Chaque être humain commence son existence sous la forme d’un œuf fertilisé (zygote)
c’est à dire une cellule diploïde à partir de laquelle toutes les cellules du corps (estimées à
1014 ) vont dériver par une série de plusieurs douzaines ou même centaines de mitoses. Les
cellules diploïdes de la lignée germinale (spermatocytes primaires ou ovocytes primaires)
dérivent du zygote après une longue série de mitoses.
III.1. La mitose (53) (70)
III.1.a. Les quatre stades de la mitose
Lorsqu’une cellule entre en mitose, chacun de ces chromosomes est formé d’une paire de
chromatides sœurs, réunies au niveau du centromère. La duplication de l’ADN a eu lieu
entre deux mitoses, au cours de la période nommée interphase du cycle cellulaire. Le
matériel génétique est dupliqué et donc chaque chromosome possède deux chromatides
identiques.
Au cours de la mitose, chacune des deux cellules-filles reçoit une seule chromatide de
chaque chromosome, le résultat étant l’obtention de deux cellules-filles génétiquement
identiques entre elles et à la cellule-mère.Le mécanisme de duplication préalable est donc
indispensable au bon déroulement de la mitose.
On distingue quatre grandes étapes (figure III) :
- LA PROPHASE : A l’intérieur du noyau cellulaire, les chromosomes se contractent et
deviennent plus courts et plus épais. Une hypercondensation de la chromatine apparaît au
niveau du centromère. De part et d’autre de chaque centromère, se forment deux masses
discoïdales : ce sont les kinétochores. Ils assurent l’adhésion des chromosomes aux
microtubules du fuseau mitotique. Au stade tardif de la prophase, l’enveloppe nucléaire
disparaît et il n’y a plus de séparation entre le cytoplasme et le noyau.
- LA METAPHASE : Tous les chromosomes ont leurs deux kinétochores liés aux
microtubules du fuseau et se trouvent alignés au niveau équatorial de la cellule (formation
de la plaque métaphasique). A ce stade, les chromosomes atteignent leur condensation
maximale.
- L’ANAPHASE : Les chromosomes se séparent au niveau du centromère, permettant
aux deux chromatides de chaque chromosome de migrer aux pôles opposés de la cellule.
- LA TELOPHASE : Les chromosomes se décondensent. Le cytoplasme se divise
(cytodiérèse) donnant naissance à deux cellules-filles identiques. La membrane nucléaire
se reforme autour des deux nouveaux noyaux. Finalement, à la fin de la télophase, les
deux cellules-filles ont reçu chacune la même quantité de chromosomes et reçoivent ainsi
la même information génétique.
III.1.b. Le rôle de la mitose chez l’humain
Dès la fécondation de l’ovule par le spermatozoïde, l’œuf ainsi formé débute sa division.
Toutes les cellules de l’organisme y compris les cellules germinales dérivent d’une longue
série de mitoses, préambule indispensable à la formation de l’individu.
Figure III : Les différentes étapes de la mitose.
Extrait de : Thompson W Margaret, Mc Innes R Roderick, Willard F Huntington. Base
chromosomique de l’hérédité dans. Thompson W Margaret, Mc Innes R Roderick,
Willard F Huntington. Génétique Médicale. Paris : Flammarion Médecine- Sciences,
1995 : 13-30.
III.2. La méiose (49) (70)
La méiose est une division cellulaire grâce à laquelle les cellules diploïdes de la lignée
germinale donnent naissance aux gamètes haploïdes.
La méiose se divise en deux étapes (figure IV) :
-
la méiose I ou division réductionnelle (c’est au cours de cette division que le nombre
diploïde des chromosomes est réduit à un nombre haploïde).
-
la méiose II ou division équationnelle (cette deuxième division méiotique ressemble
à une mitose classique et suit la première sans réplication de l’ADN).
III.2.a. La division réductionnelle
Comme dans la mitose, on distingue quatre stades :
- LA PROPHASE I : Les chromosomes se condensent de façon continue et deviennent
plus petits et plus épais. Les chromosomes homologues s’apparient entre eux et
l’enveloppe nucléaire disparaît.
- LA METAPHASE I : Les chromosomes homologues de chaque paire se disposent de
part et d’autre du plan équatorial. L’appariement « intime » au cours de la prophase, est le
point de départ d’un possible échange génétique entre les chromatides d’une paire de
chromosomes homologues. On parle de crossing-over. Le résultat du crossing-over, en fin
de métaphase, est un échange de matériel génétique entre deux chromatides de
chromosomes homologues (recombinaison génétique). C’est pourquoi, contrairement à la
mitose, les cellules-filles ne sont pas identiques génétiquement aux cellules parentales.
- L’ANAPHASE I : Les chromosomes homologues de chaque paire se séparent et migrent
vers un pôle opposé de la cellule.
- LA TELOPHASE I : L’enveloppe nucléaire se reconstitue autour de chaque nouveau lot
de chromosomes. Chaque nouvelle cellule-fille contient un lot de chromosomes haploïdes
soit 23 chromosomes à 2 chromatides.
III.2.b. La division équationnelle
La seconde division méiotique ressemble beaucoup à une mitose classique, mais le
nombre de chromosomes des deux cellules-filles entrant en deuxième division méiotique
est haploïde. La méiose II comprend la séparation longitudinale des chromatides de
chaque chromosome, avec au total, la naissance de quatre cellules haploïdes, chacune
contenant 23 chromosomes à une chromatide.
III.2.c. Le rôle de la méiose chez l’humain
Chez l’homme, les deux divisions méiotiques sont successives, sans intervalle. Les
spermatogonies issues de cellules germinales au terme de mitoses répétées, évoluent en
spermatocytes primaires qui initient la méiose dès le début de la puberté. Les cellules
résultant de la méiose sont les spermatides contenant 23 chromosomes, qui sans division
aucune, vont se différencier en spermatozoïdes.
Chez la femme, l’ovogenèse est un phénomène discontinu. Dérivées également des
cellules germinales, les ovogonies se différencient, au cours de la vie intra-utérine, en
ovocytes primaires bloqués en prophase I de la méiose. Ceux-ci restent quiescents à ce
stade jusqu’à l’ovulation. La méiose se poursuit au moment de l’ovulation avec formation
d’un ovule et d’un globule polaire et ne s’achève que s’il y a fécondation.
Figure IV : Les différentes étapes de la méiose.
Extrait de : Thompson W Margaret, Mc Innes R Roderick, Willard F Huntington. Base
chromosomique de l’hérédité dans. Thompson W Margaret, Mc Innes R Roderick,
Willard F Huntington. Génétique Médicale. Paris : Flammarion Médecine-Sciences,
1995 : 13-30.
IV. LES « ACCIDENTS GENETIQUES »RESPONSABLES DU SWP (31)
Des anomalies dans la méiose aboutissent soit à des anomalies du nombre de
chromosomes, soit à des anomalies de la qualité des chromosomes, voire à des anomalies
qui sont variables selon l’origine parentale de certains chromosomes (notion d’empreinte
parentale). Sur le plan génétique, le syndrome de Willi-Prader est la conséquence de la
perte de fonction ou de l’absence de la région 15q11-13 d’origine paternelle.
Trois types d’anomalies conduisent à l’absence d’expression du ou des gènes du SPW :
•
Microdélétion cytogénétique de la région q11-13 du chromosome 15 d’origine
paternelle. 70% des patients atteints présentent cette anomalie.
•
Disomie uniparentale d’origine maternelle. 25 à 30% des patients sont concernés.
Le patient hérite de deux chromosomes 15 provenant de sa mère (absence du
chromosome 15 paternel).
•
Mutation du centre d’empreinte. Situé à proximité de la région q11-13 du
chromosome 15, la mutation du centre d’empreinte entraîne une anomalie du profil de
méthylation et par conséquent de l’expression génique du locus impliqué dans la
survenue du SWP. Rare, elle concerne 1% des patients.
IV.1. Les délétions
IV.1.a. Généralités
La délétion est une perte d’un segment chromosomique conduisant à un déséquilibre
chromosomique. Un individu porteur d’une délétion (avec un chromosome homologue
normal et un homologue délété) est hémizygote pour le segment correspondant au
chromosome homologue normal. Les conséquences cliniques dépendent de la taille du
segment délété, du nombre et de la fonction des gènes qu’il contient (71).
La cassure d’un ou plusieurs fragments d’un même chromosome est le mécanisme
principal de la délétion.Celle-ci peut être terminale ou interstitielle.
Lorsque la délétion se situe en position terminale, on parle de déficience. Dans ce cas, il
n’y a qu’une seule cassure chromosomique et le segment ne comportant pas de centromère
est perdu. S’il y a deux cassures chromosomiques, on parle de délétion segmentaire ou
interstitielle. Il y a alors perte du fragment situé entre les deux cassures. Les deux
fragments chromosomiques restants se rejoignent en excluant le segment intermédiaire
(32).
Le centromère étant indispensable à la fonction chromosomique, les seuls chromosomes
présentant une délétion interstitielle viable sont ceux pour lesquels la délétion est
restreinte à l’un des bras chromosomiques (centromère conservé). Les fragments délétés
ne présentant pas de centromère (ou acentriques) sont ensuite perdus lors de la division
cellulaire suivante. Au total, le chromosome, amputé de son segment, poursuit son cycle
sauf si la délétion emporte le centromère et le chromosome n’est alors plus viable (65).
Un crossing-over inégal entre des chromosomes homologues mal alignés ou des
chromatides sœurs peut produire une délétion dans certains cas.
Enfin, les délétions peuvent également être produites par une ségrégation anormale
d’une translocation équilibrée ou d’une inversion (71).
IV.1.b. Délétions et SWP
De nombreuses délétions ont été identifiées au cours des investigations portant sur des
patients dysmorphiques et au cours du diagnostic prénatal. Le SWP en est un exemple
(71).
Les techniques actuelles de génétique moléculaire ont permis d’identifier la région
chromosomique délétée dans le SWP. Etendue sur 4000 à 5000 kilobases, la région
délétée la plus commune est l’intervalle entre les sondes D15S11 et GABRD3 qui
contient, entre autre, les, deux loci suivants (figure V) :
- le locus D15S63
- le locus du gène SNRPN (small ribonuclear protein)
Ce dernier représente le gène candidat pour le SWP. Il code pour une protéine impliquée
dans l’épissage des transcrits. Son expression est préférentielle au niveau du cerveau, mais
aussi au niveau du cœur et du foie. Seul le transcrit d’origine paternelle est fonctionnel et
son « absence » se traduit par l’apparition de la maladie (50).
Figure V : Région chromosomique impliquée dans la survenue du SWP.
Extrait de : Passage Eberhard. Exemples d’empreinte parentale dans. Passage Eberhard.
Atlas de poche de Génétique. Paris : Flammarion Médecine-Sciences, 1995 : 340-341.
Or la même région chromosomique est à l’origine d’un autre syndrome génétique
dysmorphique particulier nommé syndrome d’Angelman. Décrit en 1965, le syndrome
d’Angelman (ou syndrome de la poupée joyeuse) est caractérisé par un trouble important
du développement psychomoteur avec retard mental et surtout du langage, troubles de
l’humeur (faciès hilare et rire paradoxal) associés à une épilepsie dans 90% des cas.
Si les phénotypes cliniques diffèrent, la même région chromosomique est à l’origine des
deux maladies. Comme pour le SWP, il existe, dans le syndrome d’Angelman, un gène
candidat, situé sur le locus D15S10. Seul le transcrit maternel est fonctionnel. En son
absence, survient un syndrome d’Angelman.
Ainsi, deux loci très proches, situés sur le même chromosome, sont à l’origine de deux
pathologies différentes. Cette différence d’expression phénotypique fait référence au
concept d’empreinte génomique parentale que nous étudierons ultérieurement.
L’absence de contribution du génome paternel à une portion du chromosome 15 entraîne
l’apparition d’un SWP, l’absence de contribution du génome maternel est à l’origine d’un
syndrome d’Angelman. Dans tous les cas, les délétions sont la cause la plus fréquente de
ces deux syndromes (50).
IV.2. La disomie uniparentale (DUP)
La DUP est impliqué dans la survenue du SWP dans 1/3 des cas environ.
IV.2.a. Généralités (70)
La DUP est définie par la présence de deux chromosomes (ou de segments
chromosomiques) homologues d’un même parent et l’absence du chromosome
correspondant de l’autre parent.Si le même chromosome est présent en double exemplaire,
on parle d’isodisomie. Si les deux homologues d’un même parent sont présents, on parle
d’hétérodisomie. Jusqu’à la fin des années 80, la DUP était inconnue. Les avancées de la
génétique moléculaire permettent aujourd’hui d’identifier l’origine parentale des
chromosomes et une DUP a pu être démontrée dans plusieurs syndromes cliniques.
IV.2.b. Disomie uniparentale et SWP (31) (65)
Trois mécanismes sont à l’origine de la DUP présente dans le SWP (figure VI) :
1. La complémentation gamétique
La fécondation d’un gamète femelle disomique comportant deux chromosomes 15
homologues (issus d’une erreur méiotique par non-disjonction) par un gamète mâle
nullosomique pour le même chromosome entraîne la formation d’un œuf hétérodisomique
atteint du SWP.
2. La correction d’une trisomie
La fusion d’un gamète femelle disomique (deux chromosomes 15) et un mâle unisomique
(un chromosome 15) conduit à la formation d’un zygote trisomique. La correction, au
hasard, de cette trisomie (perte de l’un des chromosomes) restaure le nombre normal de
chromosomes. Si le risque de perte de l’une des trois copies est le même, dans 2/3 des cas,
la perte du chromosome supplémentaire entraîne une constitution chromosomique
normale et dans le 1/3 restant, les deux homologues gardés proviennent du même parent,
donc la mère dans le cas du SWP.
3. La duplication chromosomique
Elle résulte d’une pression de sélection sur un embryon monosomique (nullosomie
d’origine paternelle) pour devenir euploïde par duplication sélective du chromosome
monosomique. Le nombre total de 46 chromosomes est respecté.
L’hétérodisomie uniparentale est la conséquence des deux premiers mécanismes. Dans le
SWP, sa fréquence est largement supérieure à celle de l’isodisomie qui fait suite au
phénomène de duplication sélective.
Figure VI : Les différents mécanismes conduisant à une disomie uniparentale.
IV.3. La mutation du centre d’empreinte
IV.3.a. Empreinte génomique parentale
Le préambule nécessaire à la compréhension du fonctionnement du centre d’empreinte
passe par la définition de l’empreinte parentale. Qu’est-ce que l’empreinte parentale ?
Quels sont son mécanisme, son rôle et ses conséquences sur la diversité des individus?
C’est un concept qui fait exception au dogme de l’hérédité Mendélienne. Au sens général,
il s’agit d’un gène, d’une région chromosomique, d’un trait ou d’une maladie dont le
mode d’expression dépend de l’origine parentale du fragment d’ADN. En effet, selon
l’origine maternelle ou paternelle d’une mutation, le phénotype sera différent. Cela traduit
une différence fonctionnelle entre loci homologues selon l’origine parentale (1).
Ce phénomène non équivalent d’un gène selon son origine est nommé empreinte
parentale. Un des allèles du gène soumis à empreinte parentale est fonctionnellement
silencieux et a donc une expression monoallélique. On parle d’hémizygotie fonctionnelle
(maternelle ou paternelle) (31). Le mécanisme d’empreinte parentale s’expliquerait par
des modifications épigénétiques (c’est-à-dire des modifications entraînant des variations
phénotypiques sans perturbations de la séquence primaire d’ADN) permettant à la cellule
de différencier le génome paternel du génome maternel. Ainsi, une méthylation de l’ADN
au niveau des cytosines des dinucléotides CG situés dans les régions promotrices en
amont des gènes soumis à empreinte régulent leur expression, ces promoteurs étant euxmêmes contrôlés par le centre d’empreinte (64).
La fonction biologique de l’empreinte est d’assurer la constitution normale du zygote.
Ainsi, si deux lots haploïdes paternels fusionnent au cours de la fécondation, les annexes
fœtales se développent de manière anarchique, sans embryon visible. On parle de môle
hydatiforme.La situation réciproque est le tératome ovarien, c’est-à-dire la fusion des deux
noyaux d’origine maternelle. L’embryon se développe sans annexes et ne se survit pas.La
complémentarité fonctionnelle des génomes parentaux est donc indispensable à la
formation de l’individu.
Un génome d’origine paternelle favorise la croissance des annexes tandis qu’un génome
d’origine maternelle favorise la croissance du fœtus. Les génomes maternels et paternels
ne sont donc pas équivalents et ce, du fait du phénomène d’empreinte parentale.
Celle- ci ne se transmet pas d’une génération à l’autre selon les lois de Mendel, tels un
trait dominant, récessif ou lié à l’X. Cette marque génétique, représentée par l’empreinte
parentale, est effacée pendant la gamétogenèse. Qu’il s’agisse ensuite d’une
spermatogenèse ou d’une ovogenèse, l’empreinte parentale est apposée avant la
fertilisation pour qu’on puisse reconnaître l’origine parentale des chromosomes.
Ainsi, un gène soumis à empreinte maternelle transmis par une mère à son fils, ne sera pas
transcrit puisqu’il provient de sa mère. En revanche, à la génération suivante, l’effacement
de la marque maternelle et l’apposition sur le zygote en formation d’une nouvelle marque
d’origine paternelle (le gène, hérité de sa mère est transmis par le fils à sa descendance)
entraîne l’expression du gène. En conséquence, le même gène, d’une génération à l’autre,
peut être ou non transcrit (figure VII).
La contribution au développement harmonieux de l’individu et son mode de transmission
particulier caractérisent donc l’empreinte parentale. En pratique, seuls une quinzaine de
gènes seraient concernés dont le gène SNRPN dans le SWP. La connaissance du
phénomène d’empreinte parentale est un substrat indispensable à la compréhension d’un
certain nombre de maladies génétiques échappant à l’hérédité Mendélienne.
A l’état normal, chez l’humain, sur le chromosome 15 paternel, l’empreinte génétique
porte sur le locus du gène responsable du syndrome d’Angelman qui n’est donc pas
transcrit. Le gène SNRPN, situé dans la même région chromosomique, est exprimé et
participe au développement normal des fonctions cérébrales, cardiaques et hépatiques de
l’individu. Sa non-expression, en cas de délétions ou DUP d’origine maternelle (par
absence de la région 15q11-13 d’origine paternelle) est à l’origine de la survenue du SWP.
La mutation du centre d’empreinte a les mêmes conséquences (1).
IV.3.b. Le centre d’empreinte
Il s’agit d’une séquence active, analogue à la région de contrôle du locus du gène de la
globine qui gouverne la méthylation parentale spécifique et donc l’expression génique
d’une région soumise à empreinte (64). Ainsi, le centre d’empreinte, situé en amont du
gène SNRPN, régule la méthylation des régions promotrices de nombreux gènes de la
région 15q11-13 (dont le gène SNRPN), méthylation différente en fonction de l’origine
parentale du chromosome 15. Les gènes dont les promoteurs sont ainsi différemment
méthylés en fonction de l’origine parentale, sont dits « soumis à empreinte génomique »
(11) (20). Un gène hypométhylé est actif et un gène hyperméthylé est inactif (34).
En clair, une mutation du centre d’empreinte (des cas de microdélétions ont été
rapportées) entraîne une anomalie de méthylation des régions promotrices régulant
l’expression des gènes soumis à empreinte sur le chromosome 15, avec pour conséquence
des perturbations de l’empreinte génomique, donc du profil d’expression des gènes en
fonction de leur origine parentale.
En pratique, cette anomalie se caractérise par une fixation de la marque génétique
transmise par l’un des deux parents à la descendance, quelque soit le résultat de la
fertilisation (spermatogenèse ou ovogenèse).
Par exemple, en l’absence de modification de la marque génétique au moment de la
gamétogenèse (par anomalie du profil de méthylation), un père transmet à sa descendance
une copie parfaite du chromosome homologue hérité de sa mère. Ses enfants reçoivent
donc deux copies du même chromosome (un chromosome normal d’origine maternelle et
un chromosome paternel anormal par mutation du centre d’empreinte). Cette situation est
similaire à celle observée dans une DUP et explique donc la survenue du SWP dans un
faible nombre de cas (1) (figure VII).
Extrait de : Anselem S. Empreinte parentale différentielle ou empreinte génomique dans.
Anselem S. Ronéo de Génétique tome 1. Créteil : A.L.U, 1996 : 27-40.
V.LES METHODES D’EXPLORATION
Les outils au diagnostic du SWP sont nombreux. Leur utilisation coordonnée et
« hiérarchique » permet de porter un diagnostic de certitude et de dresser un arbre
décisionnel dans la stratégie diagnostique du syndrome (figure XIII).
V.1. L’étude du profil de méthylation
L’étude moléculaire débute par l’étude du profil de méthylation au locus SNRPN chez
l’enfant. En effet, le profil de méthylation étant perturbé quelque soit le mécanisme
génétique en cause, cette analyse permet d’affirmer le diagnostic de SWP.
Plusieurs techniques peuvent être utilisées :
- Southern Blot (22) (66) (74): Développée au milieu des années 70, la méthode Southern
Blot est la méthode classique d’analyse de l’ADN clivé par des enzymes de restriction
(il s’agit d’enzymes bactériennes qui reconnaissent des séquences spécifiques dans l’ADN
double brin et clivent l’ADN à un endroit précis).
Son principe est le suivant (figure VIII):
- L’ADN cible double brin (donc contenant le ou les gènes responsables de la maladie) est
d’abord isolé, puis digéré par une ou plusieurs enzymes de restriction, dont l’une est
sensible à la méthylation.
- Les multiples fragments d’ADN génomique obtenus sont séparés selon la taille des
fragments par une électrophorèse en gel d’agarose.
- Après électrophorèse, l’ADN ainsi digéré est marqué avec un colorant fluorescent
(habituellement, le bromure d’éthidium) ; les fragments d’ADN apparaissent alors sous la
forme d’un long ruban de matériel fluorescent.
- Les fragments sont ensuite dénaturés à l’aide de concentrations alcalines afin de séparer
les deux brins d’ADN
- Le gel d’agarose étant fragile, on transfère les échantillons d’ADN dénaturés sur un
papier filtre de nitrocellulose ou une membrane de nylon. La position des fragments
d’ADN ainsi immobilisés reflète parfaitement la taille obtenue après électrophorèse.
- Les séquences d’ADN simples brins ainsi immobilisés sont ensuite mises en présence
d’une sonde d’ADN simple brin radioactive spécifique du locus SNRPN (PW 71).
- Après lavage de l’excès de sonde d’ADN (non hybridé), le support (papier filtre ou
membrane de nylon) est exposé à un film sensible aux rayons X afin de révéler la position
des fragments auxquels la sonde s’est hybridée.
- Après exposition, le film autoradiographique révèle l’existence de deux bandes de taille
différente chez un individu normal, l’une correspondant à l’allèle d’origine paternelle et
l’autre, à l’allèle maternel. Chez un sujet atteint de SWP, seule la bande correspondant à
l’allèle maternel est présente (figure IX).
Figure VIII : La méthode de Southern-Blot.
Extrait de : Strachan Tom, Read P Andrew. Techniques d’hybridation de l’ADN dans.
Strachan Tom, Read P Andrew. Génétique Moléculaire Humaine. Paris : Flammarion
Médecine- Sciences, 1998 : 107-128.
Figure IX : Résultat d’une autoradiographie obtenue par Southern-Blot avec la
sonde SNRPN.
Extrait de : Dupont J, Cuisset L. Bases génétiques des syndromes de Prader-Willi et
d’Angelman : implications pour la conduite du diagnostic biologique. Arch Ped. 1998 ; 5 :
418-424.
- Méthylation-Specific PCR (MS-PCR) (78) : Un traitement de l’ADN par le bisulfite de
sodium convertit toutes les cytosines non méthylées en uracile, puis est réalisé au locus
SNRPN :
- une amplification au moyen d’amorces spécifiques du brin méthylé et spécifique de
l’allèle maternel, générant un produit de 174 pb,
- une amplification au moyen d’amorces spécifiques du brin non méthylé et spécifique
de l’allèle paternel, générant un produit de 100 pb.
Après migration sur gel d’agarose, la visualisation de deux bandes à 100 et 174 pb
permet d’exclure le diagnostic de SWP. En revanche, l’existence d’une bande unique à
174 pb conduit à affirmer le diagnostic de SWP (figure X).
Figure X : Analyse de méthylation par PCR-méthylspécifique.
Extrait de : Verdeil Laetitia. Syndrome de Prader-Willi : étude de six cas et proposition de
prise en charge des enfants et adolescents. 82 f. Th.: Méd : Rouen : 2001 : 92.
L’étude du profil de méthylation permet de poser le diagnostic de SWP, quelque soit le
mécanisme génétique en cause. Cependant, parce que le risque de récurrence de
l’affection est très différent en fonction du mécanisme génétique, il est essentiel de
poursuivre les investigations et de déterminer le mécanisme impliqué.
V.2. Le caryotype à haute résolution et méthode de FISH
Par rapport à un caryotype classique, qui reste utile pour rechercher de rares remaniements
chromosomiques tels qu’une translocation ou une inversion (22), le caryotype à haute
résolution se distingue par la présence de 23 chromosomes métaphasiques avec plus de
1000 bandes visibles versus 350 à 500 bandes observées au maximum sur un caryotype
standard. On rappelle que chaque chromosome possède une distribution caractéristique de
bandes claires et de bandes sombres assurant leur reconnaissance. L’amplification du
nombre de bandes visibles augmente la résolution du caryotype et permet donc l’étude
d’un certain nombre de pathologies. Les délétions, et en particulier, les microdélétions
peuvent ainsi être identifiées (74). Ainsi, si une délétion (telle que dans le SWP) est
suspectée, le caryotype à haute résolution localise la région impliquée dans la survenue de
la maladie de manière plus fine que le caryotype standard.
Le caryotype à haute résolution est obtenu à partir d’une culture de cellules récoltées à un
moment où un très grand nombre de cellules sont en prophase tardive ou en métaphase
précoce, c’est-à-dire avant que la condensation maximale des chromosomes ne soit
atteinte. Cet état de condensation relative accroît la visibilité des chromosomes et leurs
éventuelles anomalies également (2).
La méthode de FISH (Fluorescence In Situ Hybridization) (22) est une étape
supplémentaire dans l’analyse d’un fragment délété. Ainsi, dans le SWP, un clone d’ADN
spécifique de la portion délétée du chromosome 15 sert de sonde d’hybridation.
Marquée par un fluorochrome, elle est mise en contact avec une préparation de
chromosomes métaphasiques en haute résolution.Une deuxième sonde, située en dehors
de cette zone, marquée par un deuxième fluorochrome, permet de repérer les deux
chromosomes 15.
A l’état normal, une sonde hybridée à partir d’une région chromosomique précise, produit
un signal fort sur les deux homologues dans chaque chromosome. En cas de délétion,
comme dans le SWP, la sonde marquée, spécifique de la zone délétionnelle, ne s’hybride
qu’avec un seul des deux chromosomes 15 identifiables grâce à la deuxième sonde. La
région chromosomique porteuse de la délétion n’est pas hybridée ; un seul spot de la
sonde spécifique est visible et fait le diagnostic de SWP (figure XI).
Technique fiable et rapide, le caryotype à haute résolution permet, entre autre, d’identifier
une éventuelle région chromosomique délétée. Si la délétion est connue pour être à
l’origine d’un syndrome génétique particulier, la méthode de FISH confirme le lien de
causalité. Ainsi, en cas de délétion paternelle sur le chromosome 15, la méthode de FISH
suffit à elle seule pour poser le diagnostic de SWP. Si les résultats sont normaux, d’autres
examens à la recherche d’une DUP ou d’une mutation du centre d’empreinte sont
nécessaires.
Figure XI : Hybridation in situ par fluorescence.
Extrait de : Verdeil Laetitia. Syndrome de Prader-Willi : étude de six cas et proposition
de prise en charge des enfants et adolescents. 82 f. Th.: Méd : Rouen : 2001 : 92.
V.3. L’analyse par microsatellites
Les microsatellites sont constitués de séquences répétées d’ADN de 2 à 10 paires de
bases. Ils représentent la forme la plus abondante d’ADN répétitif et sont très
polymorphes. Le nombre de répétitions variant et générant des polymorphismes
multialléliques très informatifs, les microsatellites sont d’importants marqueurs
génotypiques. Ainsi, les microsatellites les plus fréquemment explorés dans le SWP sont
localisés aux loci D15S11 et GABRD3 (figure V) situés dans la région chromosomique à
l’origine du SWP (51).
L’analyse des microsatellites (22) est réalisée chez l’enfant et ses parents. Grâce au
polymorphisme des marqueurs génétiques, il est possible de suivre la ségrégation des
chromosomes et de déduire de quel chromosome 15 l’enfant a hérité, celui de son père ou
de sa mère. L’absence de contribution paternelle confirme le SWP sans en identifier le
mécanisme.
En effet, celle-ci peut résulter à la fois d’une microdélétion ou d’une DUP. C’est pour cela
qu’il est essentiel de pratiquer en premier lieu une analyse par FISH afin d’exclure le
mécanisme délétionnel et affirmer ainsi la DUP dans le SWP.
Enfin, la présence d’une mutation du centre d’empreinte est évoqué devant un profil de
méthylation anormal, une absence de microdélétion par FISH et une contribution
biparentale objectivée par l’étude des microsatellites.
Finalement, ces études sont réalisées, non seulement pour confirmer le diagnostic, mais
surtout pour délivrer un conseil génétique.
Figure XII : L’analyse par microsatellites sur le chromosome 15.
Extrait de : Verdeil Laetitia. Syndrome de Prader-Willi : étude de six cas et proposition
de prise en charge des enfants et adolescents. 82 f. Th.: Rouen : 2001 : 92.
Cas index
Caryotype et
Analyse de méthylation
(Southern Blot ou MS-PCR)
FISH
Si FISH normale, recherche DUP ou
mutation du
centre d’empreinte
absence de
contribution paternelle
Diagnostic SWP
confirmé (délétion)
Diagnostic SWP exclu
Diagnostic SWP confirmé
Analyse parents-enfant de microsatellites du 15
pour déterminer le mécanisme en cause et estimer le risque de récurrence
Figure XIII : L’arbre décisionnel de la stratégie diagnostique du SWP.
VI. LE CONSEIL GENETIQUE
VI.1. Le risque de récurrence en fonction du mécanisme (12)
La connaissance du mécanisme responsable de la maladie chez le cas index est importante
pour évaluer le risque de récidive. En effet, le risque de récurrence est différent selon qu’il
s’agisse d’une délétion, d’une DUP ou d’une mutation de l’empreinte. Le diagnostic
anténatal (DAN) est justifié dans certaines situations.
- Dans les cas de microdélétions, il est impératif d’étudier le père pour distinguer le
caractère hérité ou de novo de l’anomalie.
Quand la maladie est secondaire à une microdélétion de novo, le risque de récidive est très
faible, estimé à moins de 1% (tableau 1). Il est d’usage cependant, en cas d’antécédent
d’anomalie chromosomique, d’accéder à la demande de DAN des parents (caryotype avec
FISH et microsatellites) afin de rassurer les parents (22).
Si la délétion est héritée du père, le risque de récurrence est majeur, de l’ordre de 50%. Le
DAN est réalisé le plus précocement possible, sur biopsie de trophoblaste.
- En cas de DUP survenues de novo, le risque de récurrence est faible (<1%) mais on
propose habituellement aux parents un DAN sur amniocentèse s’ils souhaitent, afin de les
rassurer (caryotype, analyse de méthylation et étude des microsatellites).
Les DUP associées à un remaniement chromosomique chez le père du cas index
présentent un risque de récurrence variable, en fonction de la nature et de la taille du
remaniement (tableau 1). Il conviendra donc de réaliser un DAN, après amniocentèse,
comprenant un caryotype standard, une analyse de méthylation et une étude de
microsatellites.
- Lorsqu’une mutation du centre d’empreinte est responsable de la maladie, le risque de
récidive est de 50% pour le couple (tableau 1).
Deux stratégies de DAN peuvent être alors discutées :
-
un diagnostic d’exclusion sur biopsie de trophoblaste par analyse des
microsatellites.Si le fœtus n’a pas reçu le même allèle paternel que le cas index, il peut
être déclaré sain. S’il partage le même allèle paternel que le cas index, il convient alors de
réaliser une étude de méthylation sur liquide amniotique.
- un DAN sur liquide amniotique, avec d’emblée l’étude de la
méthylation et des microsatellites permettant le diagnostic.
chiffres
FREQUENCE
RISQUE DE RECURRENCE
Mécanisme
DELETION
70 %
DISOMIE UNIPARENTALE
25 – 30 %
MUTATION D’EMPREINTE
1%
De novo <1 %
Héritée 50 %
Sans anomalie parentale <1 %
Avec anomalie parentale risque variable
50 %
Tableau 1: Fréquence et risque de récurrence, selon les différents mécanismes
génétiques mis en jeu dans le SWP.
VI.2. Les voies de la recherche (12)
Des découvertes importantes ont été réalisées ces dernières années. De nombreux gènes
soumis à empreinte dans la région chromosomique impliquée dans la survenue du SWP,
hormis le gène candidat SNRPN, ont été identifiés : ZNF 127, IPW, PAR-1 et PAR-5, P,
NDN (necdin) etc. Leur rôle respectif n’est pas toujours clair et reste à établir.
Cependant, pour certains d’entre eux, leur fonction et leur implication dans le SWP sont
maintenant connues. Par exemple, la délétion du gène P entraîne une hypopigmentation
présente chez 1/3 des patients atteints du syndrome.
On peut donc espérer qu’une progression des connaissances sur ces gènes (et d’autres,
encore inconnus) et leurs fonctions aboutissent à une meilleure compréhension de la
maladie, tant sur le plan génétique que clinique, ouvrant la voie à des perspectives
thérapeutiques.
ANNEXES
ANNEXE 1 : SCORE D’APGAR
FREQUENCE
CARDIAQUE
Absence
<100/min
>100/min
MOUVEMENTS
RESPIRATOIRES
TONUS
MUSCULAIRE
REACTIVITE
COLORATION
COTATION
absents
flasque
pas de
réponse
cyanose pâleur
0
irréguliers
léger tonus en
flexion
léger
mouvement
corps rose
(extrémités
cyanosées)
1
réguliers
bon tonus en
flexion
cri
complètement
rose
2
Le score normal est de 10 points. Un score d’Apgar < 7 signe une souffrance fœtale aigue
lorsqu’il est associé à une anomalie du rythme cardiaque fœtal et à un liquide amniotique
teinté.
ANNEXE 2 : COORDONNEES UTILES
- ASSOCIATION PRADER-WILLI FRANCE
Mme Nicolette PONSART : 29, Avenue Miltrat 06100 NICE-France
04 93 84 88 54
E-mail : [email protected]
http://perso.wanadoo.fr/pwillifr
- APAC-ASSOCIATION DE PORTEURS D’ANOMALIES CHROMOSOMIQUES
Mme le Dr Isabelle MARCHETTI-WATERNAUX
Eragny-France
DEFINITIONS
Allèle : une ou plusieurs versions alternatives d’un même gène, situées au niveau d’un
même locus.
Arthrogrypose : contracture avec ankylose permanente d’une articulation en flexion.
Bradymétacarpie : brièveté anormale des métacarpiens.
Cellule diploïde : cellule possédant deux jeux de chromosomes homologues, l’un
d’origine paternelle et l’autre d’origine maternelle.
Codon : triplet de trois bases dans une molécule d’ADN ou d’ARN spécifiant un seul
acide aminé.
Crossing-over : échange réciproque entre les chromatides des chromosomes
homologues au cours de la prophase de la première division méiotique.
Diplégie faciale : paralysie bilatérale et symétrique de la face.
Dolichocéphalie : crâne dont le diamètre occipito-frontal (longueur) est supérieur au
diamètre bipariétal (largeur).
Epicanthus : repli semi-lunaire que forme la peau au devant de l’angle interne de l’œil.
Epissage : maturation des transcrits primaires (ARN pré-messager) par incision des
introns et raboutage (épissage) des exons situés de part et d’autre de chaque intron excisé.
Exon : segment d’ADN codant.
Génome : ensemble du matériel génétique d’une cellule ou d’un individu.
Génotype : constitution génétique d’une cellule ou d’un individu.
Genu varum : Jambe en forme de O ; déformation du membre inférieur consistant en
une incurvation de la cuisse et de la jambe, à concavité interne, avec saillie du genou en
dehors.
Globule polaire : cellule formée pendant l’ovogenèse qui ne se transforme pas en ovule
mais dégénère.
Intron : séquence d’ADN non codante située dans un gène.
Inversion : anomalie de la structure chromosomique résultant de deux cassures se
produisant dans des régions chromosomiques différentes d’un même chromosome, avec
changement d’orientation du segment intercalaire puis recollement de ce segment.
Kinétochore : structure du centromère à laquelle les fibres du fuseau sont attachées.
Locus : position d’un gène sur un chromosome.
Macroglossie : hypertrophie congénitale ou acquise de la langue.
Myotonie : contracture lente, suivie d’une décontracture lente, lors de mouvements
volontaires, dues à une excitabilité et à une contractilité musculaires anormales.
Néphroblastome : adénosarcome du rein à cellules de type embryonnaire. Tumeur
hautement maligne observée presque exclusivement chez le jeune enfant.
Nucléotide : élément constitutif des acides nucléiques. Il s’agit d’un ester phosphorique
constitué d’une base purique ou pyrimidique, d’un pentose (ribose ou désoxyribose) et
d’un radical phosphate.
Ophtalmoplégie : paralysie des muscles de l’œil.
Pénétrance : fréquence avec laquelle un gène ou une combinaison de gènes se
manifestent dans le phénotype des porteurs.
Phénotype : caractéristique biochimique, physiologique ou morphologique d’un
individu, déterminée par son génotype et l’environnement dans lequel il est exprimé.
Polydactylie : anomalie congénitale caractérisée par la présence de doigts ou d’orteils
surnuméraires.
Quotient intellectuel global (QIG): évaluation du fonctionnement intellectuel global
par des tests psychométriques standardisés. Le QIG est composé du quotient intellectuel
verbal (QIV) et du quotient intellectuel de performance (QIP) (QIG = QIV+QIP). 100 est
la moyenne statistique du QIG.
Quotient intellectuel verbal (QIV) : évaluation spécifique du fonctionnement et des
capacités verbales d’un individu par de subtests standardisés.
Quotient intellectuel de performance (QIP) : évaluation spécifique du
fonctionnement et des capacités adaptatives (exemples : capacités de mémorisation,
praxiques…) d’un individu par des subtests standardisés.
Tibia vara : Incurvation du tibia à convexité externe.
Translocation : transfert d’un segment de chromosome à un autre chromosome.
SERMENT D’HIPPOCRATE
En présence des maîtres de cette faculté,
De mes chers condisciples
Et devant l’effigie d’Hippocrate,
Je promets et je jure d’être fidèle aux lois de l’honneur
Et de la probité dans l’exercice de la médecine.
Je donnerai mes soins gratuits à l’indigent,
Et n’exigerai jamais un salaire au dessus de mon travail.
Je ne participerai à aucun partage clandestin d’honoraires.
Admis à l’intérieur des maisons, mes yeux ne verront pas ce qui s’y passe,
Ma langue taira les secrets qui me seront confiés
Et mon état ne servira pas à corrompre les mœurs ni à favoriser le crime.
Je ne permettrai pas que des considérations
De religion, de nation, de race, de parti ou de classe sociale
Viennent s’interposer entre mon devoir et mon patient.
Je garderai le respect absolu de la vie humaine.
Même sous la menace, je n’admettrai pas de faire usage
De mes connaissances médicales contre les lois de l’humanité.
Respectueuse et reconnaissante envers mes maîtres,
Je rendrai à leurs enfants l’instruction que j’ai reçue de leurs pères.
Que les hommes m’accordent leur estime si je suis fidèle à mes promesses.
Que je sois couverte d’opprobre et méprisée de mes confrères si j’y manque.
ANNEE : 2004-2005
NOM ET PRENOM DE L’AUTEUR : FERREIRA Sandra
DIRECTEUR DE THESE : Docteur GUILLOT François
TITRE DE LA THESE : Le syndrome de Willi-Prader : ses caractéristiques, sa prise en charge
et son suivi.
Le syndrome de Willi-Prader est une maladie génétique rare due à une anomalie du
chromosome 15 et qui atteint environ 1 nouveau-né sur 15000. Le diagnostic est souvent fait
devant un tableau néonatal évocateur : hypotonie et troubles de la succion-déglutition.
Ce syndrome dysmorphique associe ensuite une polyphagie avec obésité et des troubles
comportementaux d’intensité variable.
Six observations ont été rapportées dans cette thèse : cinq enfants ont bénéficié d’un
diagnostic précoce entraînant une prise en charge globale et un suivi au long cours modifiant
favorablement l’évolution de la maladie. Les conséquences d’un diagnostic tardif (à l’âge
adulte) pour l’un d’entre eux, reflètent la nécessité d’un repérage précoce du syndrome et
d’une prise en charge adaptée.
Il faut donc insister sur l’importance d’un diagnostic précoce, afin d’orienter les familles et
mettre en place une prise en charge dynamique, multidisciplinaire, accompagnée par les
parents, en collaboration avec le médecin traitant.
Mots-clés:
- SYNDROME DE WILLI-PRADER
- PRISE EN CHARGE
ADRESSE DE L’UFR : 8, Rue du Général SARRAIL
94010 CRETEIL CEDEX
DEUXIEME PARTIE :
DESCRIPTION CLINIQUE
ET
PRISE EN CHARGE DU SWP
B. DESCRIPTION DU SWP
Caractérisé par une hypotonie néonatale, le SWP évolue secondairement vers une obésité
infantile dont le contrôle est rendu difficile par des difficultés comportementales de degrés
variables selon les enfants.
Cette triade clinique (hypotonie- obésité- troubles comportementaux) est toujours présente
dans le SWP. L’analyse de chacun de ces items permet, non seulement, une meilleure
connaissance de l’affection mais également des autres syndromes qu’il faut savoir évoquer
face à des tels symptômes (diagnostics différentiels).
La prise en charge d’une hypotonie néonatale, d’une obésité infantile ou encore de
troubles du comportement chez l’enfant nécessite une bonne connaissance des étapes du
développement psychomoteur et du tonus normal chez le nouveau-né et le nourrisson,
ainsi que des besoins nutritionnels et des comportements pathologiques chez le jeune
enfant.
Un examen clinique régulier et rigoureux permet au médecin spécialiste comme au
médecin généraliste le dépistage d’une anomalie chez le nourrisson et la prise en charge
précoce d’une éventuelle affection.
I. L’HYPOTONIE NEONATALE
I.1. Développement psychomoteur et tonus normal chez le nouveau-né et le
nourrisson
Afin d’identifier une anomalie du développement d’un enfant, il est nécessaire de rappeler
l’évolution classique des acquisitions psychomotrices en fonction de l’âge.
Ces paramètres sont présentés sous forme d’un tableau pour permettre une recherche
visuelle rapide d’un élément particulier de l’examen clinique, qui interpelle (tableau 2).
AGE
DEVELOPPEMENT
PREHENSION
MOTEUR
GRAPHISME
LANGAGE
OCULOMOTRICITE
COMPORTEMENT
RELATIONNEL
Naissance
1 mois
Hypertonie périphérique
avec membres en flexion.
Hypotonie axiale avec tête
instable.
Gesticulation
spontanée
symétrique.
Réflexes
archaïques présents
Sur le ventre, soulève la
tête.
Serre le doigt ;
introduit la main
Pas de
langage.
Bruits de
gorge ; se
calme au son
de la voix.
Orientation vers la lumière
douce.
Rythme veille-sommeil 20h
sur 24h.
Fixe son regard sur
l’examinateur et suit des
yeux transitoirement.
2 mois
3-4 mois
6-7 mois
8-9 mois
12 mois
Maintien de la tête net et
bref.
Maintien de la tête. Sur le
ventre, s’appuie sur les
avant-bras.
Position assise stabilisée
avec appui des membres
supérieurs.
Se retourne du dos sur le
ventre.
Station debout quelques
instants avec appui, les
fesses en arrière.
Station debout définitive ;
marche seul ou tenu par la
main.
2 ans
Court sans tomber ; monte
les escaliers.
Coups de pieds.
3 ans
Descend les escaliers ; fait
du tricycle.
Mains ouvertes,
début des
mouvements
volontaires pour
saisir les objets.
Passe un objet
d’une main à
l’autre.
Porte ses pieds à la
bouche.
Préhension fine
pouce-index.
Rire aux
éclats.
Vocalises
Sourires à l’examinateur ;
tourne la tête quand on
l’appelle et tend les bras.
Vocalise
plusieurs
syllabes.
Répète « mama ».
Acquisition du
« non ».
Reconnaît les visages
familiers et s’inquiète
devant l’étranger.
Lance et empile les
objets.
Donne un objet sur
ordre.
Dit 3 mots
dont 1
différent de
« papamaman ».
Imite « au
revoir ».
Tourne les pages
Comprend
d’un livre.
parfaitement.
Gribouillis et traits. Phrases de 2 à
Perception de
3 mots.
l’objet et de sa
Montre les
parties du
permanence
corps sur une
poupée
Acquisition du
Raconte une
« je » et phrases
petite histoire
complètes
Aide à l’habillage. Répète
ce qui fait rire.
Autonomie alimentaire ;
aide à ranger ses affaires.
Joue en compagnie des
autres enfants.
Prête ses jouets et joue avec
ceux des autres
Tableau 2 : Principales étapes du développement de l’enfant.
Extrait de Capute AJ, Biehl RF. Principales étapes du développement psychomoteur de
l’enfant. Pediatr Clin North Am. 1973 ; 20(1): 8-16.
En ce qui concerne le nouveau-né et le nourrisson, l’évaluation des performances est à
moduler en fonction de l’âge gestationnel. En cas de prématurité, il faut considérer l’âge
corrigé (il y a un décalage entre l’âge réel c'est-à-dire le jour de naissance du prématuré et
l’âge corrigé, âge théorique par rapport à la date prévue de l’accouchement).
On étudie ainsi (7) :
•
la gesticulation spontanée
Elle est asymétrique, anarchique, caractérisée par une alternance de mouvements de
flexion et d’extension, d’ouverture et de fermeture des mains.
•
les réflexes archaïques
Au niveau de la tête :
- le réflexe de succion et déglutition
- la stimulation du pourtour de la région péribuccale occasionne un
mouvement de l’orbiculaire des lèvres vers le doigt de l’examinateur
(on parle de points cardinaux)
Au niveau des membres supérieurs :
-
le réflexe de Moro l’extension du cou entraîne une extension
abduction des deux membres supérieurs, puis une ouverture des mains,
dans un mouvement d’embrassement avec un cri.
-
le grasping il s’agit de la flexion des doigts à la stimulation
palmaire.
Au niveau des membres inférieurs :
-
la marche automatique elle correspond au réflexe d’enjambement
au contact de la plante du pied sur un plan dur ou d’un obstacle.
-
l’allongement croisé la stimulation de la plante du pied entraîne une
flexion-extension et adduction du membre inférieur controlatéral.
-
le grasping il s’agit de la flexion des orteils à la stimulation
plantaire.
Ces réflexes archaïques existent de la naissance à l’âge de 3-5 mois ; leur absence est un
signe d’immaturité cérébrale. En revanche, leur persistance au-delà de 5 mois doit être
considéré comme pathologique, le dernier à disparaître étant le grasping des pieds.
•
le tonus
Identifier une hypotonie et chiffrer son importance nécessite de connaître la définition et
les variations physiologiques du tonus.
Le tonus correspond aux contractions musculaires permanentes qui existent à l’état de
repos, avant toute stimulation et notamment avant toute mobilisation passive (46).
Le principal facteur de variation est la maturation du système nerveux qui s’achève à
l’égard de cette fonction, entre 18-24 mois. Cependant, on prendra également en compte,
surtout chez le tout-petit, d’autres facteurs de variation tels les états de vigilance, de
satiété et d’agitation : on prendra le soin d’examiner le jeune nourrisson, si cela est
possible, lorsqu’il est bien réveillé, calme, ni trop près ni trop loin d’un repas, sans hésiter
à recommencer l’examen plus tard si les conditions d’examen cliniques ne sont pas
optimales (40).
On distingue le tonus axial et le tonus périphérique (40) :
* le tonus axial normal
Il s’apprécie à travers la qualité de tenue de la tête et du tronc, laquelle se traduira par les
acquisitions posturales.
- les acquisitions posturales
Un tonus normal de l’axe permet :
la tenue de la tête dans l’axe en position verticale, quelques instants à terme, de
façon durable entre 4 et 8 semaines.
la tenue assise avec appui à 6 mois, sans appui à 8 mois, seule à 9 mois.
la station debout avec appui à 10 mois, sans appui à 12 mois.
la marche autonome avant 18 mois (en moyenne 12 mois), parfaitement stable dans
les semaines qui suivent.
Les dates de ces différentes acquisitions psychomotrices sont variables en fonction
de chaque enfant et correspondent à des données anamnestiques recherchées par
l’interrogatoire des parents, d’où l’intérêt majeur de les avoir systématiquement
consignées dans le carnet de santé, notamment au cours des examens obligatoires du 8ème
jour, des 4ème, 9ème et 24ème mois.
- l’examen clinique
Il apprécie le tonus de la musculature axiale, d’une part au niveau du plan antérieur,
d’autre part au niveau du plan postérieur. Cette appréciation est importante car certaines
circonstances pathologiques affectent ces deux secteurs différemment.
Le tonus de la nuque est étudié par la manœuvre du tirer-assis :
- une tonicité correcte du plan antérieur permet à la tête de venir vers l’avant
lorsqu’on tire l’enfant à soi, et freine sa chute en arrière lorsqu’on repose l’enfant
sur le plan du lit.
- une tonicité correcte du plan postérieur permet à la tête de venir aisément
lorsqu’on tire l’enfant à soi et lui permet de redresser la tête lorsqu’on le penche
en avant.
* le tonus périphérique normal (tonus des membres)
Le tonus des membres assure le maintien des attitudes et permet la gesticulation. On
l’étudie au repos (tonus passif) et au cours de l’activité musculaire (tonus actif).
- le tonus passif au repos
Il est à l’origine, chez le nouveau-né à terme, de l’attitude en quadriflexion ; puis, le tonus
va progressivement se répartir sur les systèmes fléchisseur et extenseur, et atteindre une
harmonie parfaite vers 18 mois.
Cette évolution aboutit à la notion d’angle d’ouverture des articulations lors de la
manipulation, passive et douce, des segments de membres chez le nourrisson en décubitus
dorsal.
- Ainsi, au niveau de la cuisse, l’angle poplité d’une valeur de 90° à la naissance, s’ouvre
ensuite progressivement pour atteindre 180° vers 18 mois.
- Au niveau de la hanche, l’angle d’abduction est de 30° à la naissance et de 70 à 80° en
fin de maturation.
- Au niveau du coude, l’angle est inférieur à 90° à la naissance pour atteindre 180° dans le
second semestre.
- Enfin, au niveau de l’épaule, l’angle d’adduction du bras sur le thorax est de quelques
degrés à la naissance puis s’élargit, le coude dépassant la ligne mamelonnaire
controlatérale vers 18 mois.
On peut également tester les angles de fermeture aux membres supérieurs (flexion du
poignet sur l’avant-bras) et aux membres inférieurs (manœuvre talon-fesse).
Là encore, il est essentiel de suivre l’évolution naturelle de cette extensibilité et d’en noter
les données dans le carnet de santé.
- le tonus actif au cours de l’activité musculaire
La gesticulation d’un nourrisson est riche, vive, puissante et affecte harmonieusement les
quatre membres lorsqu’il est bien réveillé et sollicité par le maternage.
I.2. Diagnostic d’une hypotonie néonatale
La mise en évidence d’une hypotonie néonatale constitue un élément majeur de la
sémiologie neurologique pédiatrique. Ses causes sont très diverses et son pronostic très
variable. On distingue les hypotonies axiales et périphériques.
En cas d’hypotonie axiale (40):
Outre le retard des acquisitions posturales, une hypotonie axiale va se traduire à l’examen
par :
- au niveau de la nuque, une mauvaise tenue de la tête qui dodeline en position verticale,
ne passe pas vers l’avant lorsqu’on assied l’enfant ou du moins passe mal. En décubitus
ventral, l’enfant redresse mal la tête. En décubitus dorsal, il se tient le tête tournée de côté
et ne la passe que difficilement d’un côté à l’autre.
- au niveau du tronc, en appui plantaire, le très jeune nourrisson se redresse mal sur ses
pieds, ne tend pas les genoux et ne verticalise pas le tronc (ou seulement sa partie
lombaire), ne redresse pas la tête. Chez le nourrisson plus âgé, la station maintenue assise
se fait au prix d’une importante gibbosité dorsale avec bascule du bassin en avant.
En cas d’hypotonie périphérique (40):
- au repos : à l’inspection, l’attitude peut déjà être évocatrice chez le nouveau-né et le
nourrisson en décubitus dorsal si l’hypotonie est suffisamment marquée. Les membres
reposent sur le plan du lit, les bras en extension, les cuisses semi-fléchies en abduction et
rotation externe, les jambes semi-fléchies et les pieds en équin.
à l’examen, l’augmentation de la passivité se traduit par une augmentation
du ballant des pieds et des mains. L’augmentation de l’extensibilité se traduit par
l’exagération des angles d’ouverture pour les fléchisseurs et des angles de fermeture pour
les extenseurs. La consistance des muscles est habituellement diminuée à la palpation
(ceci n’est pas toujours facile à apprécier en raison de l’abondance du tissu adipeux à cet
âge).
- lors de l’activité musculaire : la gesticulation est pauvre, lente, difficile à solliciter,
malgré les efforts répétés de l’entourage.
A ce stade de l’examen, l’hypotonie est affirmée, son intensité et surtout sa topographie
précisées : elle peut prédominer au niveau de l’axe ou à l’inverse, au niveau des membres.
Lorsqu’elle est globale et massive (intéressant l’axe et les membres), la manipulation de
l’enfant évoque celle d’une poupée de chiffon.
Au terme de cette enquête, en fonction des signes cliniques de l’hypotonie, on distingue
les hypotonies d’origine centrale (neurologique) ou périphérique (il s’agit d’une atteinte
neuromusculaire). La recherche de signes associés neurologiques et extraneurologiques
est indispensable afin d’étayer le diagnostic étiologique.
Les hypotonies d’origine centrale (3)
Ce sont les plus courantes. La mère attire l’attention de son médecin sur ce symptôme qui
la frappe. Son discours est toujours le même : « il ne tient pas sa tête…il est mou…il l’a
toujours été…il ne sourit pas ou peu…il n’attrape pas les objets…il est trop sage…ou
pleure sans raison…il ne gazouille pas » et ajoute t-elle « je ne suis pas certaine qu’il voit
bien ou qu’il me suit du regard ».
Assis, l’enfant est tassé sur lui-même, sa mère s’arrangeant pour lui soutenir la tête.
L’enfant est peu ou pas éveillé (sourire-réponse faible, poursuite oculaire absente voire
très labile).
L’examen met en évidence une hypotonie qui prédomine sur le tronc, la nuque et moins
souvent les membres inférieurs, associée à une hyperextensibilité. Contrastant avec cette
hypotonie axiale majeure, les membres sont certes comparativement moins atteints mais
peuvent l’être.
Il n’y a pas toujours des paralysies évidentes et les muscles ne sont pas atrophiés. Les
réflexes rotuliens sont habituellement vifs. Il peut exister, déjà, un syndrome pyramidal
qui deviendra net entre 7 et 12 mois.
Les signes associés tels que : - retard mental
- cécité corticale
- syndrome dysmorphique
- nanisme
- surdité centrale, etc.
sont à rechercher afin d’identifier une étiologie particulière.
Une fois le diagnostic d’hypotonie centrale posé, il est très important de préciser s’il s’agit
d’une hypotonie fixée, qui a toujours existé, ou d’apparition progressive après un
intervalle libre normal de 3, 6 ou 12 mois.
Dans le premier cas, l’enquête étiologique s’oriente vers la recherche des
encéphalopathies prénatales (exemples : malformation cérébrale, aberration
chromosomique, embryofoetopathie…) alors que dans le second cas, il faut plutôt
rechercher une encéphalopathie progressive de caractère génétique. L’association d’une
hypotonie fixée à un syndrome dysmorphique est très évocatrice du SWP.
Les hypotonies d’origine périphérique (3)
Les hypotonies du premier âge peuvent être d’origine périphérique, c'est-à-dire liées soit à
une atteinte du neurone moteur périphérique, soit à une atteinte musculaire. Elles sont
diffuses, atteignant le tronc, les membres et la nuque.
Elles entraînent des paralysies flasques évidentes (diminution nette de la force musculaire)
avec atrophies musculaires très prononcées. Les réflexes rotuliens sont diminués, voire
abolis.
Là encore, en fonction des signes associés, on s’oriente soit vers une pathologie
neuromusculaire (exemple : amyotrophie spinale infantile) ou musculaire pure (telle que
le syndrome de Duchenne) (tableau 3).
Type
d’hypotonie
HYPOTONIE
HYPOTONIE
CENTRALE
PERIPHERIQUE
Caractéristiques
Clinique
- Hypotonie prédominante
- Hypotonie diffuse atteignant le
au niveau du tronc et de la nuque ;
tronc, les membres et la nuque.
atteinte variable des membres
- Hyperextensibilité marquée au
inférieurs.
niveau des membres inférieurs avec
-Hyperextensibilité (surtout au
exagération des angles d’ouverture
niveau de la tête et du cou).
pour les fléchisseurs et des angles de
fermeture pour les extenseurs).
Atteinte
musculaire
- Pas de paralysies musculaires
- Paralysies flasques évidentes
évidentes.
(diminution de la force musculaire)
- Pas d’atrophie musculaire ni de
- Atrophies musculaires prononcées
douleur à la palpation.
avec douleurs, d’intensité variable à
la palpation.
Réflexes
- Présents, ils sont habituellement
- Les réflexes rotuliens sont diminués,
rotuliens
vifs (présence d’un syndrome
voire abolis.
pyramidal net entre 7 et 12 mois).
Signes
Parmi les signes les plus fréquents,
Les signes d’orientation sont
associés
on retrouve (en fonction de
variables en fonction de la
l’étiologie) :
topographie lésionnelle
- un retard mental
(neuromusculaire ou musculaire pure)
- une cécité corticale
- difficultés respiratoires majeures
- un syndrome dysmorphique
- troubles de la marche
- un nanisme
- anomalies oculaires, etc.
- une surdité centrale, etc.
Tableau 3 : Caractéristiques principales des hypotonies centrales et périphériques.
I.3. Enquête paraclinique face à une hypotonie (40)
Au terme de l’interrogatoire et de l’examen clinique, le diagnostic étiologique est le plus
souvent déjà largement orienté et va permettre de sélectionner les examens
complémentaires visant à le confirmer.
* Si l’enfant présente des éléments d’atteinte périphérique (neuromusculaire ou
musculaire) :
Le diagnostic est ici à l’exploration électrophysiologique, comprenant l’EMG
(électromyogramme), la mesure des vitesses de conduction nerveuse sensitive et motrice,
l’étude des PES (potentiels évoqués somesthésiques), complété ensuite, selon les cas, par
le dosage des enzymes musculaires, voire la biopsie neuromusculaire.
- Les explorations électrophysiologiques
Elles confirment l’atteinte périphérique et précisent sa topographie.
a. L’électromyogramme (EMG) : il s’agit de l’enregistrement, à l’aide d’aiguilles
électrodes implantées dans différents muscles, de l’activité électrique musculaire. Il
différencie le processus myogène (atteinte musculaire pure) du processus neurogène
(trouble de l’innervation du muscle).
La mise en évidence d’un EMG myogène oriente vers une myopathie et doit être
complété, outre par le dosage des enzymes musculaires, par l’étude de la biopsie
musculaire qui seule confirmera le diagnostic et permettra la classification de la
myopathie.
Un tracé neurogène signe l’existence d’une atteinte du neurone moteur (soit au niveau
de la corne antérieure de la moelle, soit au niveau axonal).
b. La mesure des vitesses de conduction nerveuse sensitive et motrice : elles consistent à
stimuler un nerf au niveau de la face palmaire des doigts, pour la mesure de la vitesse
de conduction nerveuse sensitive ou au niveau d’un membre, comme le SPE (il s’agit
du nerf sciatique poplité externe), pour la mesure de la vitesse de conduction motrice,
et à recueillir la réponse du muscle distal innervé par ce tronc nerveux.
Ces mesures dépendent directement de l’épaisseur et de la qualité de la gaine de
myéline autour des axones : leur ralentissement signe l’existence d’une neuropathie
myélinique.
c. L’études des PES (potentiels évoqués somesthésiques) : la stimulation d’un nerf au
niveau du poignet ou de la cheville permet le recueil, en aval, au niveau du système
nerveux périphérique, des réponses évoquées dont on mesure l’amplitude et la latence.
L’amplitude dépend essentiellement de l’activité axonale : sa diminution signe
l’existence d’une neuropathie sensitive axonale.
- le dosage des enzymes sériques
Il s’agit non pas tant des transaminases et de la lacticodéshydrogénase (LDH) que de
l’aldolase et la créatine phosphokinase (CPK) plus spécifiques de l’activité musculaire.
Le prélèvement doit être effectué sans garrot, à distance d’un effort musculaire et en
particulier, de l’exploration électromyographique.
Seule une élévation importante est significative d’une lésion musculaire. Il n’y a pas de
parallélisme entre l’importance de l’élévation des enzymes et la gravité de la myopathie.
D’autre part, un taux normal n’élimine pas le diagnostic, surtout si l’enfant est très jeune.
- la biopsie musculaire
Elle seule permet la confirmation de l’atteinte musculaire après confrontation avec les
données cliniques, biologiques et génétiques.
L’examen histologique permet d’apprécier les modifications morphologiques :
•
une atteinte neurogène se traduit par l’existence de fibres atrophiques et d’images
de « recaptation » (les fibres musculaires dénervées vont être récupérées par des
filets axonaux voisins encore sains).
•
une atteinte myogène se traduit par des lésions non systématisées des fibres
musculaires (inégalité de calibre des fibres sans regroupement fasciculaire, lésions
de nécrose, etc).
Là encore, surtout en cas d’atteinte myogène, une biopsie musculaire normale n’élimine
pas une myopathie, surtout d’expression clinique récente. On peut alors, réitérer l’examen
quelques mois ou quelques années plus tard, de façon à détecter l’apparition de l’atteinte
dégénérative ou de signes permettant une classification spécifique.
- la biopsie d’un nerf sensitif périphérique
Elle est indiquée lorsque les données électrophysiologiques orientent vers une neuropathie
périphérique sensitive ou sensitivo-motrice et que la clinique ne permet pas à elle seule de
classer.
* Si l’enfant ne présente pas d’éléments orientant vers une atteinte périphérique
musculaire :
L’atteinte est ici centrale. En fonction des données de l’anamnèse et de la clinique, de
l’évaluation du quotient intellectuel, une batterie d’examens complémentaires est à
réaliser afin d’étayer le diagnostic étiologique : fond d’œil, scanner cérébral, IRM,
échographie transfontanellaire…. Divers dosages biologiques en découleront alors dans
un second temps : caryotype, sérologies, ponction lombaire et étude du LCR….
La distinction entre hypotonie centrale et périphérique est essentielle, afin de guider la
réalisation des examens complémentaires et effectuer un diagnostic le plus précoce
possible.
I.4. Caractéristiques de l’hypotonie dans le SWP (31)
Chez un enfant atteint du SWP, l’hypotonie néonatale est d’origine centrale.
Les premiers signes de développement du syndrome se retrouvent en moyenne dès la
naissance (on signale même, une diminution des mouvements fœtaux pendant la grossesse
dans 75% des cas).
Il existe, chez le nouveau-né et le nourrisson, une absence de mouvements spontanés et de
réponse à la stimulation, une inexpressivité du visage et un cri faible.
L’hypotonie sévère entrave la succion et la déglutition au point d’imposer fréquemment
l’alimentation par gavage pour nourrir ces enfants au cours des premières semaines de vie.
Une amélioration globale, lente, s’effectue dans les trois premiers mois tant sur le plan
moteur et alimentaire.
Un bilan paraclinique minimal normal (échographie transfontanellaire, scanner cérébral,
enzymes musculaires, EMG) associé à un tableau d’hypotonie centrale et à des troubles de
l’alimentation et de la succion dès la période néonatale, doivent faire évoquer le
diagnostic de SWP d’autant plus s’il existe des anomalies des organes génitaux externes
et/ou un syndrome dysmorphique particulier (cf chapitre V).
Finalement, l’hypotonie est un « signe d’alerte » pour tout médecin, généraliste ou
spécialiste, et mérite notre attention afin de poser un diagnostic et proposer, si possible,
une prise en charge précoce et adaptée.
I.5. Les diagnostics différentiels
Si le SWP est l’une des causes d’hypotonie (centrale) chez le nouveau-né et le nourrisson,
elle est loin d’être la seule. Les différentes étiologies, sources d’hypotonie, varient en
fonction de la topographie lésionnelle (périphérique ou centrale). La présence d’un ou
plusieurs symptômes « dominants » et/ou de signes associés orientent le diagnostic.
Ces étiologies sont résumées sous forme d’un tableau (tableau 4).
HYPOTONIES
HYPOTONIES
CENTRALES
PERIPHERIQUES
Atteintes du système nerveux central
Atteintes du neurone moteur périphérique
* causes toxiques
* au niveau de la corne antérieure
- chez la mère : prise de sédatifs, injection
-maladie de Werdnig-Hoffmann (amyotrophie
d’anesthésiques, analgésiques durant la
spinale infantile type I, II, III)
grossesse ou l’accouchement ; alcool ; autres
- autres pathologies : poliomyélite, etc.
intoxications (brome, mercure ; très rares)
* au niveau des nerfs périphériques
- chez le nouveau-né : anticonvulsivants
- maladie de Dejerine-Sottas, etc.
- dysautonomie familiale, etc.
* causes « traumatiques »
- hémorragie intracrânienne
Atteintes de la jonction neuromusculaire
- syndrome ischémie-hypoxie
- myasthénie et syndrome myasthénique
(suite à un traumatisme obstétrical)
-botulisme, hypermagnasémie, antibiotiques
(causes exceptionnelles)
* causes constitutionnelles
- avec anomalie chromosomique : trisomie 21,
Atteintes musculaires
etc.
- myopathies congénitales (myopathies à
- avec syndrome dysmorphique : SWP, etc.
inclusions, etc)
- avec anomalie métabolique :
- dystrophie myotonique néonatale
aminoacidopathies, hypothyroïdie, etc.
-dystrophies musculaires congénitales (myopathie
de Duchenne, etc)
Atteintes du tissu conjonctif
* syndrome de Marfan
- myopathies métaboliques (glycogénoses,
lipidoses, myopathies mitochondriales)
* syndrome d’Ehlers-Danlos
* autres atteintes génétiques du collagène
Tableau 4 : Les différentes étiologies des hypotonies (centrales et périphériques).
Extrait de Perelman R, Amiel-Tison CL, Desbois JC. Période néonatale. Maladies du système
nerveux et des muscles dans. Perelman R, Amiel-Tison CL, Desbois JC. Paris : Editions
Maloine, 1985 : 1513-1683.
I.5.a. L’atteinte centrale (40)
L’atteinte centrale constitue la cause la plus fréquente des hypotonies chroniques du
nouveau-né et du nourrisson. Elle peut ne toucher que le secteur moteur (retard pur des
acquisitions posturales) ou concerne également le développement intellectuel.
Parmi les atteintes du système nerveux central
* les atteintes toxiques
L’interrogatoire de la mère à la recherche de prises médicamenteuses devra être soigneux,
ainsi que l’examen précis de la composition des médicaments.
Si les analgésiques et/ou les anesthésiques sont volontairement administrés à la patiente
par l’équipe médicale en pré ou per-partum, l’hypotonie de l’enfant est alors
habituellement transitoire et régresse en quelques heures.
En cas d’intoxication alcoolique maternelle, l’hypotonie s’associe volontiers à des
éléments dysmorphiques (petites fentes palpébrales et hypoplasie de la moitié moyenne de
la face) et à des malformations du système nerveux, cardiaque et squelettique (69).
Quelque soit le type d’intoxication, après l’hypotonie, il apparaît un syndrome
d’hyperexcitabilité chez l’enfant par sevrage.
* les atteintes « traumatiques »
Il s’agit de la survenue d’une hypotonie sur une hémorragie intracrânienne suite à un
traumatisme obstétrical. Le syndrome ischémie-hypoxie résulte de séquelles de
perturbations de perfusion à la période prénatale ou périnatale (exemples : séquelles de
leucomalacie périventriculaire ou d’hémorragie intraventriculaire chez le prématuré…)
avec pour conséquence, une hypotonie centrale. Le diagnostic est à l’anamnèse et à
l’imagerie cérébrale.
* les atteintes constitutionnelles
avec anomalie chromosomique : La trisomie 21 (ou syndrome de Down) est la cause
génétique la plus fréquente du retard mental modéré. Dans 95% des cas, elle est le résultat
d’une non-disjonction méiotique de la paire du chromosome 21.
L’hypotonie peut être la première anomalie notée chez le nouveau-né. Cependant, le
syndrome de Down est habituellement diagnostiqué à la naissance, ou très rapidement
après, en raison des signes dysmorphiques caractéristiques qui y sont associés (on note un
visage rond et plat, des yeux bridés avec un épicanthus développé, des anomalies buccales
avec un palais arqué et une langue épaisse et plissée, des mains courtes avec un seul pli
palmaire) (32).
avec syndrome dysmorphique : le SWP dont nous développerons la clinique
ultérieurement, fait partie des anomalies constitutionnelles associées à un syndrome
dysmorphique.
avec anomalie métabolique : les amino-acidopathies sont des maladies métaboliques
dues à des anomalies enzymatiques génétiquement transmises. Les principaux signes
cliniques sont les suivants :
- une détresse neurologique sévère accompagnée d’une hypotonie centrale
- une hépatomégalie franche et croissante (trouble de la néoglucogènèse)
- rarement, une odeur particulière de la peau, de l’haleine et des urines.
Des examens biologiques de débrouillage seront pratiqués en première intention
(ionogramme sanguin, dosage sanguin de la glycémie, des lactates, de l’ammoniémie et
des pyruvates). En fonction de leurs résultats (acidose, cétose, hypoglycémie,
hyperlactacidémie, hyperammoniémie), on peut alors demander des examens plus
spécialisés : chromatographie des acides aminés sanguins et urinaires, chromatographie
des acides organiques, dosages spécifiques notamment enzymatiques, dès que
l’orientation diagnostique est suffisante et si possible guidée par les conseils des services
spécialisés, afin d’identifier le système enzymatique perturbé.
Le diagnostic d’hypothyroïdie doit être fait dans la période néonatale (dépistage
systématique). Le pronostic est lié à la précocité de la thérapeutique supplétive.
Parmi les atteintes du tissu conjonctif
* le syndrome de Marfan est une maladie du tissu conjonctif fibreux dans laquelle il y a des
anomalies caractéristiques des trois systèmes (squelettique, cardiovasculaire et oculaire).
Dans cette maladie, les patients peuvent n’avoir aucune anomalie dans un ou deux des
trois systèmes habituellement atteints. L’hypotonie, en rapport avec une atteinte d’origine
squelettique (il n’y a pas de déficit musculaire mais les mouvements sont diminués par des
déformations du squelette) est inconstante.
* le syndrome d’Ehlers-Danlos est un groupe de maladies du tissu conjonctif caractérisées
par une fragilité cutanée, une hypermobilité des articulations et une hyperlaxité cutanée.
Un enfant hypotonique et hyperlaxe, à la naissance, doit faire évoquer ce diagnostic.
I.5.b. L’atteinte périphérique (40)
Parmi les causes les plus fréquentes d’hypotonie périphérique, on distingue donc :
Les atteintes du neurone moteur périphérique
* l’amyotrophie spinale infantile (ASI) est une maladie génétique transmise sur le mode
autosomique récessif. Elle se caractérise par une dégénérescence des motoneurones de la
corne antérieure médullaire (essentiellement, moelle cervicale et lombaire). Le gène est
localisé sur le chromosome 5 depuis 1990 et identifié en CR5q13 depuis 1995.
L’évolution est toujours redoutable mais varie dans sa gravité en fonction de la forme
clinique d’ASI (trois types) (46).
L’ASI de type I : c’est la forme la plus grave, aboutissant le plus souvent au décès de
l’enfant au cours de la première année de vie. L’incidence de cette affection est de l’ordre
de 1 pour 25000 naissances et constitue la deuxième ou la troisième cause de mortalité par
maladie récessive.
CLINIQUE
- L’atteinte débute dans le premier trimestre, parfois dès la naissance. Il apparaît une
diminution symétrique de la motilité des racines aux membres inférieurs, puis plus
discrètement aux membres supérieurs.
Au bout de quelques mois, il existe une hypotonie majeure, une mobilité restreinte à
quelques mouvements fins des extrémités. Cette atteinte motrice grave contraste avec un
regard vif, un éveil normal.
- L’atteinte des muscles abdominaux et des intercostaux contraste avec le respect du
diaphragme qui assure l’essentiel de la mécanique ventilatoire ; la respiration est
paradoxale. Le cri est faible et court, la toux inefficace.
- Pendant longtemps, la mimique est préservée et l’oculomotricité est toujours normale.
Les troubles de la déglutition sont le plus souvent tardifs.
PARACLINIQUE
Les examens nécessaires au diagnostic sont :
- l’EMG qui montre un tracé neurogène.
-
la biopsie neuromusculaire : le muscle a un aspect d’atrophie
neurogène fasciculaire. Le nerf sensitif est normal.
-
la biologie moléculaire est maintenant réalisée de première intention.
En effet, depuis la localisation génique de la maladie, il est possible d’affirmer le
diagnostic à partir d’un simple prélèvement sanguin. Les résultats sont assez longs à
obtenir (3 mois). Aussi, il est encore justifié de faire une biopsie neuromusculaire lorsque
le risque vital est en jeu à court terme, ou s’il existe un doute diagnostique.
EVOLUTION ET TRAITEMENT
L’évolution est fatale avant 12 à 18 mois par insuffisance respiratoire chronique,
précipitée par les infections pulmonaires récidivantes et les fausses routes. Le traitement
n’est que symptomatique : kinésithérapie motrice avec prévention des rétractions
tendineuses, corrections orthopédiques, prévention et traitement des infections
respiratoires. Il n’y a pas actuellement de traitement spécifique.
Il existe maintenant la possibilité de faire un diagnostic anténatal par la biologie
moléculaire à partir d’une biopsie de trophoblaste réalisée à 11 semaines d’aménorrhée.
Cela n’est possible qu’à la condition d’avoir pu prélever du sang ou du muscle du sujet
atteint dans la famille.
L’ASI de type II : le début est plus tardif et survient avant l’âge de la marche, le plus
souvent entre 6 et 12 mois. Le motif de la consultation est :
- le plus souvent, une absence d’acquisition de la position assise seule.
- parfois, une absence d’acquisition de la marche, alors que la station
assise seule et la station debout ont été acquises à l’âge normal.
Le tableau clinique est proche du type I : hypotonie avec quadriparésie flasque,
symétrique, prédominant aux racines et aux membres inférieurs. On note, cependant, une
déglutition normale, l’atteinte des intercostaux est absente dans près de la moitié des cas.
L’intelligence est parfaitement préservée, comme dans le type I.
Il semble que le processus dégénératif de la corne antérieure s’arrête au bout de quelques
années et permet une stabilisation des paralysies. Des phénomènes complexes de
suppléance neurologique pourraient même donner l’impression d’une amélioration.
Ces enfants restent, néanmoins, des grands infirmes moteurs, avec des rétractions
tendineuses, des déformations osseuses secondaires, difficilement prévenues malgré des
interventions orthopédiques précoces. Une prise en charge globale (kinésithérapeutique,
orthopédique et respiratoire) permet d’assurer à ces handicapés moteurs sévères une
qualité de vie optimale au cours de leurs 10, voire 20 ou 30 ans de survie.
L’ASI de type III : Les premières étapes du développement psychomoteur sont
normales. La marche est acquise sans retard. Les difficultés motrices apparaissent au
cours de la deuxième décade. Elles s’aggravent progressivement et la perte de la marche
survient généralement au cours de la troisième décade.
Les atteintes de la jonction neuromusculaire
* Syndromes myasthéniques
la myasthénie néonatale : elle résulte du transfert maternofoetal d’anticorps
antirécepteurs de l’acétylcholine provenant d’une mère myasthénique, mais parfois très
discrètement atteinte. L’apparition de l’hypotonie et du déficit musculaire est très précoce,
le plus souvent dans les premières heures de vie. Les troubles fonctionnels régressent
entre 4 et 6 semaines.
la myasthénie congénitale : elle est rare ; il n’y a pas d’atteinte maternelle. Il n’est pas
retrouvé d’anticorps antirécepteurs de l’acétylcholine chez le nouveau-né. L’hypotonie et
le déficit musculaire sont ici moins nets, alors que les autres signes (ophtalmoplégie et
diplégie faciale) sont presque constants. Ces symptômes ne régressent pas, certaines
formes s’exprimant par des épisodes récurrents de détresse respiratoire et de déglutition
pouvant conduire à la mort.
Les atteintes musculaires
* La dystrophie musculaire congénitale (type Duchenne de Boulogne) est une affection
génétique transmise sur le mode récessif lié au sexe (localisé au Xp 21). C’est la plus
fréquente des affections musculaires et touche 1 garçon sur 2500 à la naissance. Le début
se situe entre l’âge de18 mois et 3 ans mais peut atteindre l’enfant très jeune. La faiblesse
musculaire est le signe majeur, elle gêne la marche et s’extériorise par la difficulté à se
relever. L’hypotonie, toujours présente, passe souvent au second plan. Un déficit
intellectuel modéré est fréquemment associé.
Le diagnostic est confirmé par l’élévation importante des enzymes musculaires (CPK),
l’aspect myogène de l’EMG et les résultats de la biopsie musculaire. De plus, l’absence ou
la faible présence de la dystrophine en analyse immunohistochimique est un argument
majeur en faveur du diagnostic.
La délétion du gène codant pour la dystrophine est responsable du syndrome dans 60%
des cas (à l’état normal, cette protéine assure le maintien de l’intégrité de la membrane
plasmique des cellules musculaires).
L’évolution à long terme conduit au décès de par l’atteinte des muscles axiaux, cardiaque
et respiratoires (46).
Il n’existe pas de traitement curatif et tous les espoirs de guérison reposent sur la thérapie
génique depuis que le gène de la dystrophine a été isolé. Le premier essai de thérapie
génique, soutenu par l’ASSOCIATION FRANCAISE CONTRE LES MYOPATHIES
(AFM) a été lancé en Septembre 2000 en France sur neuf patients auxquels le gène de la
dystrophine a tété injecté. Cet essai de phase I doit évaluer la faisabilité d’une telle
thérapie (33).
La dystrophie de Becker est une forme atténuée de la maladie. La dystrophine est présente
mais en quantité insuffisante ou est de structure anormale. Les symptômes apparaissent
plus tardivement que dans le cas de la myopathie de Duchenne, vers l’âge de 5-15 ans, et
la maladie présente une évolution plus lente.
* la dystrophie myotonique de Steinert touche habituellement le jeune adulte. Il s’agit
d’une affection autosomale dominante impliquant le chromosome 19.
Parfois, elle se révèle dès la naissance par une hypotonie majeure intéressant aussi bien
l’axe que les membres. L’aspect du visage est typique (diplégie faciale, rétraction de la
lèvre supérieure en accent circonflexe). L’existence de troubles de la déglutition et de
troubles respiratoires peut mettre en jeu le pronostic vital dès les premières heures de vie.
Passée la période néonatale, l’évolution est le plus souvent favorable sur le plan moteur ;
en revanche, un retard intellectuel non évolutif de gravité moyenne est fréquente. Ce n’est
qu’ultérieurement, vers 6 à 10 ans, qu’apparaissent les signes caractéristiques de la forme
classique (myotonie, atteinte oculaire et endocrinienne).
* les myopathies métaboliques sont dues à des déficits enzymatiques qui affectent les
voies métaboliques permettant au muscle de produire de l’énergie. Le métabolisme du
glucose, en particulier, peut être touché. La glycogénose de type II (maladie de Pompe)
correspond à un déficit en maltase acide et celle de type V en phosphorylase. Ces deux
maladies sont autosomiques récessives et se caractérisent par une hypotonie diffuse
associée à divers signes extraneurologiques en fonction de l’étiologie.
I.5.c. Conclusion
Finalement, une bonne connaissance des nombreuses étiologies, sources d’hypotonie chez
le nouveau-né et le nourrisson, permet à tout praticien (généraliste ou spécialiste) qui
examine et/ou qui suit l’enfant, d’apprécier le retentissement psychomoteur de l’affection,
d’évaluer ses progrès éventuels (ou malheureusement, dans certains cas, une régression
des acquisitions) et enfin, de proposer une prise en charge précoce et adaptée, afin
d’accompagner le jeune patient et ses parents dans un parcours quelquefois long et
douloureux.
De plus, le médecin généraliste, au cours du suivi de l’enfant, est souvent le premier
interlocuteur des parents, qui consultent pour un trouble de l’évolution (quelque soit sa
nature) chez leur enfant.
Le rôle du médecin généraliste est donc primordial dans l’étape du « dépistage » de ces
affections (en particulier, pour les formes à révélation différée ou tardive) et passe donc
par une bonne connaissance biomédicale de l’hypotonie et de ses étiologies, afin
d’informer les parents et les orienter vers les services spécialisés, toujours dans le souci
d’optimiser la prise en charge de l’enfant malade.
II. LES TROUBLES DU COMPORTEMENT ALIMENTAIRE
Si le diagnostic de SWP n’est pas porté en période néonatale, l’apparition d’une obésité
aux alentours de deux ans d’âge, est un signe d’alerte qui doit attirer l’attention du
médecin. Il apparaît une hyperphagie excessive et insatiable, avec le risque de développer
une obésité sévère si aucune mesure n’est prise. L’association à une dysmorphie
caractéristique du SWP oriente vers le diagnostic qui sera alors confirmé par des études
génétiques moléculaires.
Pour sensibiliser l’enfant, ses parents et leur entourage, le médecin doit informer sur les
risques et les conséquences, à court et à long terme, de l’obésité, contrôlables par une
prise en charge précoce et pluridisciplinaire.
Si les causes génétiques sont à l’origine de 5% des obésités (dont le SWP), l’obésité
commune, responsable de 95% des cas, est une dérive génétique de la physiologie révélée
par l’exposition à des conditions propices (facteurs environnementaux, psychologiques et
socioculturels) (9). Une meilleure connaissance des facteurs influençant la survenue d’une
obésité infantile, quelque soit son origine (génétique ou non), doit permettre aux différents
acteurs de soins, dont les médecins de famille, de développer une stratégie de lutte contre
cet excès pondéral (30).
A l’échelon individuel, la prévention de l’obésité nécessite le dépistage des enfants à
risque par les médecins traitants. La présence de signes associés tels qu’un retard statural
et/ou un syndrome dysmorphique incite à la recherche d’une étiologie endocrinienne ou
malformative (d’origine génétique), permettant une prise en charge et/ou un traitement
spécifique, si cette recherche s’avère positive (38). Le même souci de prise en charge doit
s’appliquer à l’obésité commune, même si elle ne relève pas d’une seule étiologie mais
d’un ensemble de facteurs, sur lesquels des actions de prévention sont envisageables.
Nous allons consacrer un chapitre sur les données actuelles concernant l’obésité infantile
puis de manière spécifique, sur l’obésité caractéristique du SWP.
II.1. L’obésité infantile
L’alerte est donnée ! Les médias ont largement diffusé le cri d’alarme de l’Organisation
Mondiale de la Santé : l’obésité envahit le continent au point de devenir un fléau dont les
conséquences à long terme égalent les méfaits du tabac (39).
En France, il existe déjà plus d’un million d’enfants en surcharge pondérale, et ce nombre
ne cesse de croître depuis plusieurs décennies, laissant craindre une véritable épidémie si
des mesures efficaces ne sont pas prises (77).
Il faut prendre en charge le plus tôt possible, d’autant plus que l’obésité s’accompagne
d’une morbimortalité accrue à l’âge adulte. L’obésité de l’enfant et de l’adolescent est
associée à des facteurs de risque (FDR), contemporains de son état (pression artérielle
élevée, lipides augmentés, intolérance glucidique, problèmes orthopédiques…) et à des
FDR futurs (obésité à l’âge adulte, maladies cardiovasculaires…) qui en font un réel sujet
de préoccupation en terme de Santé Publique (30).
II.1.a. Définition et prévalence
D’une façon générale, l’obésité correspond à un excès de masse grasse, qui peut se
mesurer selon différentes méthodes (27). Actuellement, l’OMS recommande d’utiliser
l’indice de masse corporelle (IMC) ou indice de Quételet pour estimer la masse grasse.
Cet indice est le rapport du poids (en kilogrammes) sur le carré de la taille (exprimée en
mètre) (54).
Chez l’adulte, l’obésité est définie par un IMC supérieur ou égal à 30 Kg/m².
Chez l’enfant, les variations biologiques de corpulence au cours de la croissance
nécessitent l’utilisation de courbes de référence (figures XIV et XV). Sur les courbes
établies par Mme Rolland-Cachera, en France, en 1991, présentes dans les carnets de
santé les plus récents, on parle d’obésité pour un IMC supérieur ou égal au 97ème
percentile de la distribution pour un âge donné, et de surpoids pour un IMC supérieur
ou égal au 90ème percentile (54) (cf pages 74 et 75).
Courbe de croissance staturo-pondérale chez les filles
Courbe de croissance staturo-pondérale chez les garçons
L’utilisation de l’IMC pour définir l’excès de poids présente de nombreux avantages :
- obtention à partir de mesures simples
- prise en compte simultanée de trois variables (poids, taille et âge)
- détermination simple du rebond d’adiposité : au cours de la première année de
vie, l’IMC augmente, puis il diminue jusqu’à l’âge de 6 ans environ. A cet âge, la courbe
augmente à nouveau. Cette remontée de la courbe est appelée rebond d’adiposité. Or, plus
il est précoce, plus le risque d’obésité à l’âge adulte est élevé. L’âge du rebond d’adiposité
peut donc être utilisé comme indicateur prédictif de l’évolution de la corpulence (54).
L’évolution de l’indice de corpulence traduit donc le développement du tissu adipeux.
Deux types de variation apparaissent au cours de la vie de l’enfant (27):
la première année de vie, la taille des adipocytes augmente puis diminue jusque vers 4
ans. Elle augmentera, à nouveau, lentement, à partir de 6 ans.
le nombre des adipocytes augmente progressivement jusqu’à l’âge de 8 ans, plus
rapidement ensuite.
Les variations du tissu adipeux dans les premières années de vie reflètent donc surtout les
variations de la taille des adipocytes. La deuxième augmentation, qui débute vers 6-8 ans,
témoigne de leur multiplication. Une obésité transitoire avec un rebond tardif pourrait être
associée à une hypertrophie des adipocytes. Une obésité persistante avec un rebond
précoce pourrait être due à une multiplication des adipocytes.
L’âge avancé du rebond d’adiposité ne s’explique pas plus, à l’heure actuelle, par des
facteurs génétiques que par des facteurs environnementaux. L’apparition d’une obésité est
généralement le résultat de ces deux facteurs (54).
En pratique, le rebond prématuré de cet indice est un signal d’alerte qui justifie une prise
en charge préventive, afin de modifier l’hygiène de vie et les comportements alimentaires
et ce, avant qu’il ne soit trop tard…
Malgré son incontestable utilité, l’IMC a cependant des limites. Il ne fait pas la part de la
masse grasse et de la masse maigre. Une nouvelle définition internationale de l’obésité a
été élaborée, en 2000, par le « Childhood Obesity Working Group » de l’ « International
Obesity Task Force », groupe de travail sous l’égide de l’OMS.
Cette définition s’appuie sur des courbes de centile de distribution de l’IMC réalisées à
partir de données de six pays. Les seuils sont constitués par les valeurs de l’IMC égales à
25 et 30 kg/m² à 18 ans, correspondant aux degrés 1 (surpoids) et 2 (obésité) chez l’adulte.
Ces nouvelles références internationales sont particulièrement utiles pour comparer
différentes études et différents pays (tableau 5) (54).
Tableau 5 : Nouvelles bornes internationales de l’indice de masse corporelle (IMC)
pour définir le surpoids et l’obésité chez l’enfant entre 2 et 18 ans.
Extrait de : Inserm (expertise collective). Obésité : dépistage et prévention chez l’enfant.
www.inserm.fr
En terme de prévalence, aucun pays à niveau de vie élevé, n’est épargné par l’obésité
infantile, qui -tous critères confondus- concerne de 1 à 25% de la population d’âge
pédiatrique. En 10 ans, l’obésité infantile a augmenté de 53% au Japon, de 21 à 65% en
Grande-Bretagne, selon le sexe et la tranche d’âge considéré, de 60% aux Etats-Unis, de
75 à 110% à Singapour entre 1975 et 1983 pour finalement y être multiplié par un facteur
10 sur 20 ans.
En France, 12% d’enfants sont obèses avec une augmentation de l’obésité modérée
(entre le 90ème et le 97ème percentile) de 17% et une augmentation de l’obésité majeure
(supérieur au 97ème percentile) de 28%.
Le seul pays à avoir stabilisé ses chiffres est celui qui a mis en place un programme de
prévention ciblé sur l’enfant : la Finlande.
La prévalence de l’obésité infantile est certes, plus faible en France qu’aux Etats-Unis,
souvent « pays de référence », mais l’évolution dans le temps pourrait être au moins aussi
importante. La tendance actuelle laisse présager une accentuation du nombre d’obèses
adultes dans les années futures (27).
II.1.b. Facteurs de risque et étiologies de l’obésité
La prise en charge d’un enfant obèse doit commencer par une étude clinique complète
comportant interrogatoire, examen clinique et courbe de croissance staturo-pondérale.
Cette dernière est un élément-clé dans la réflexion puisque tout enfant qui grossit en
restant petit est suspect (à noter que les enfants présentant une obésité commune sont
souvent plus grands que la moyenne). Cette étape (interrogatoire, clinique et analyse de la
courbe staturo-pondérale) est indispensable et parfois suffisante pour décider de la
conduite à tenir ultérieure.
L’obésité n’est pas une maladie en soi, mais un symptôme complexe dépendant de
facteurs génétiques et environnementaux. Elle est parfois l’un des signes d’une pathologie
endocrinienne ou d’un syndrome malformatif. Le médecin doit savoir le dépister. Une
anomalie de la croissance staturale (ralentissement voire arrêt de la courbe de croissance)
et/ou un syndrome dysmorphique sont alors recherchés (38).
Causes organiques (38)
* les anomalies endocriniennes
Face à un enfant obèse, il faut se poser la question d’un éventuel dérèglement hormonal.
Si tel est le cas, ce diagnostic va faire voler en éclats la culpabilité du malade et ouvrir des
possibilités thérapeutiques au médecin. La question mérite donc d’être posée. L’excès
pondéral, l’évolution staturale et les éventuels signes cliniques orientent le diagnostic.
•
Syndrome de Cushing
L’obésité est le maître symptôme, avec le défaut de croissance (la croissance est très
ralentie voire nulle). Le diagnostic peut être évident des l’observation de l’aspect de
l’enfant, qui a une surcharge pondérale facio-tronculaire. Le faciès est érythrosique avec
de grosses joues. La graisse s’accumule dans l’abdomen et en haut du dos (bosse de
bison).
Cela contraste avec les membres qui restent minces, amyotrophiés. La peau est fine et les
vergetures nombreuses (flancs, lombes et cuisses). La pilosité constitutionnelle est
excessive, avec apparition d’un duvet visible, notamment sur le visage sous forme de
moustache et de favoris. L’enfant est fatigué et la tension artérielle peut être élevée.
Le tableau typique d’un syndrome de Cushing se constitue progressivement à bas bruit, et
atteint des degrés variables, ce qui entraîne un diagnostic retardé. Pour le dépister de façon
simple, un dosage du cortisol libre sur les urines de 24h avec cortisolémie de base peut
suffire, éventuellement complété par un cycle nycthéméral du cortisol.
Le syndrome peut être induit par une corticothérapie, surtout lorsqu’elle est prolongée :
corticoïdes par voie systémique mais aussi inhalés (asthme). Les autres étiologies
(corticosurrénalome, adénome hypophysaire) sont exceptionnelles : bilans hormonaux et
imagerie en préciseront l’origine.
•
Hypothyroidie
Le dépistage systématique a permis de traiter dès la naissance les hypothyroïdies
congénitales. Les faux négatifs restent exceptionnels. Restent encore les hypothyroïdies
acquises (le plus souvent d’origine auto-immune), dont les symptômes sont plus discrets,
d’où le risque d’un diagnostic plus tardif.
La prise de poids avec ralentissement de la vitesse de croissance et de la maturation
osseuse s’accompagne des signes suivants : surpoids diffus avec infiltration des téguments
qui sont froids et secs, visage bouffi et pâle, nez épaté, doigts boudinés.
Le comportement de l’enfant a changé ; il est devenu lent, apathique, réussit moins bien
en classe et dort beaucoup. Constipation et frilosité sont souvent retrouvées. La recherche
d’un goitre est un geste obligatoire. Le dosage de base de TSHus et de T4 libre ôtera tout
doute de dysthyroïdie devant un enfant gros et un peu paresseux.
•
Déficit en GH (Growth Hormone ou hormone de croissance)
L’hormone de croissance (GH) étant lipolytique, il est logique de constater une surcharge
graisseuse en cas de déficit. Outre le ralentissement de la vitesse de croissance, qui reste
au premier plan, un aspect juvénile avec petit visage aux traits fins, contrastant avec un
front haut et bombé, caractérise ces enfants. Leurs membres sont graciles, les mains et les
pieds trop petits pour l’âge. En revanche, l’abdomen est rebondi par augmentation du
pannicule adipeux, et on note fréquemment, un micropénis chez le garçon.
Il existe une homologie avec le SWP puisque 50% des enfants atteints du syndrome
présentent un déficit en GH. Les caractéristiques et les nouvelles avancées thérapeutiques
concernant le déficit en GH dans le SWP seront abordées ultérieurement.
•
Lésions hypothalamo-hypophysaires
Qu’elles soient tumorales (craniopharyngiomes), traumatiques ou dans les suites d’une
intervention neurochirurgicale, ces lésions peuvent se révéler par une obésité rapidement
évolutive et difficile à contrôler, d’où l’importance des mesures préventives dans de telles
situations.
•
Pseudohypoparathyroïdies (maladie d’Albright)
Il s’agit d’une affection hétérogène due à un syndrome de résistance hormonale à la PTH.
Selon les différents types, l’obésité est présente dans 13 à 66% des cas et s’accompagne
d’un syndrome dysmorphique : petite taille, faciès lunaire, cou bref, calcifications souscutanées, bradymétacarpie et parfois, retard mental. Le taux élevé de PTH contraste avec
l’hypocalcémie et l’hyperphosphatémie.
•
Il existe une maladie rare (sans étiquette), à transmission autosomique récessive
associant acanthosis nigricans, hyperandrogénie et hyperinsulinisme.
* Les syndromes malformatifs
La méconnaissance de ces affections explique peut-être la rareté avec laquelle elles sont
rapportées.
Parmi les plus connues, on cite :
•
Le syndrome de Willi-Prader (ou Prader-Willi)
Il figure au premier rang des syndromes malformatifs associés à une obésité. Nous en
détaillerons la clinique ultérieurement.
•
Le syndrome de Moon Barbet-Biedl
C’est une maladie à transmission autosomique récessive, caractérisée par une obésité
généralisée associée à une petite taille post-natale, de petites extrémités, une polydactylie,
un hypogénitalisme et un retard mental. Il existe une rétinite pigmentaire responsable de
nystagmus puis de cécité vers 30 ans. Une atteinte rénale et hépatique est fréquente.
•
Le syndrome de Beckwith-Wiedemann
Soumis au phénomène d’empreinte parentale, ce syndrome est autosomique dominant à
pénétrance variable. Le gène responsable (MIM 130650) est exprimé uniquement par les
sujets qui l’héritent de leur mère. Sur le plan clinique, il existe une obésité et une
dysmorphie faciale (yeux proéminents, hypoplasie de l’étage moyen, prognathisme). La
macrosomie néonatale entraîne une grande taille à l’âge adulte, avec macroglossie et
grandes oreilles. Les hernies (ombilicale et inguinale) sont fréquentes et il existe un risque
élevé de néoplasies (néphroblastomes).
Obésité commune (constitutionnelle)
L’obésité commune est d’origine multifactorielle, résultant de l’expression d’une
susceptibilité génétique sous l’influence de facteurs environnementaux avec au premier
rang, la diététique et le comportement alimentaire, ainsi que le mode de vie et la
sédentarité (54).
Dans la survenue de cette obésité chez l’enfant, quelle est la part du déterminisme
génétique et celle de l’environnement ?
* Le déterminisme génétique
- L’obésité parentale est un facteur de risque d’obésité infantile très important. On a pu
montrer que par rapport à un enfant dont aucun des deux parents n’est obèse, le risque est
multiplié par trois si un parent est obèse, par cinq si les deux parents le sont (54).
- Des études Américaines (1974) et Scandinaves (Suède) sur les vrais jumeaux, séparés et
élevés dans des familles différentes, ont montré que leur évolution était semblable et plus
proche des parents génétiques que des parents adoptifs. Cependant, selon les études, les
valeurs d’héritabilité de l’obésité varient de 10 à 80%, ce qui illustre l’imprécision de cette
approche (9).
- L’obésité commune relève d’un polymorphisme multigénique soumis aux facteurs
d’environnement. Il existe, cependant, des obésités d’origine génétique, monogéniques
(atteinte d’un gène unique) dont les gènes candidats ont été identifiés chez l’animal et/ou
chez l’homme.
Ce type d’obésité se distingue de l’obésité commune, mais également de l’obésité présente
dans les syndromes malformatifs (SWP, syndrome de Beckwith-Biedemann…) entraînant
également une obésité monogénique. Les syndromes malformatifs sont associés à des
anomalies du développement (musculaire, mental, pubertaire, comportemental, etc…)
tandis que la nature des gènes impliqués dans les obésités monogéniques a été déterminée
sur la base d’anomalies endocriniennes associées (insuffisance corticotrope et anomalie
du gène POMC, hypogonadisme et anomalie du gène LEP codant pour la leptine…) (9).
Concernant ces obésités monogéniques « pures » (n’entrant pas dans le cadre d’un
syndrome malformatif) :
Elles sont sévères et débutent dès l’enfance. Rares, leur transmission est récessive. La
caractéristique des gènes mutés dans ces obésités est leur implication dans le contrôle
pondéral et la régulation de l’homéostasie énergétique chez l’homme. En fonction du
gène, coexistent des troubles endocriniens d’intensité variable (9).
Parmi eux, on décrit (21) (29) :
-
Le gène OB ou LEP, selon les pays, identifié en 1994, code pour la leptine.
Il s’agit d’une cytokine de 16 KD (Kilodaltons) sécrétée principalement par les cellules
adipeuses.
Des travaux récents démontrent que la leptine est également produite par le placenta dans
l’espèce humaine et par les cellules de la muqueuse fundique de l’estomac chez les
rongeurs. Sa production et sa concentration plasmatiques sont strictement corrélées à la
quantité de masse grasse, d’où une quantité de leptine circulante correspondante à celle
des réserves énergétiques.
La leptine agit au niveau du noyau arqué de l’hypothalamus par l’intermédiaire de son
récepteur LEP-R, de la famille des récepteurs aux cytokines. Les deux formes principales
de récepteurs de la leptine sont la forme dite « courte » et la forme dite « longue » qui
diffèrent uniquement par la longueur du domaine intracellulaire.
Alors que la leptine est produite quasi-exclusivement par le tissu adipeux, ses récepteurs
sont présents dans de nombreux tissus. La forme « courte » apparaît comme la plus
ubiquiste, la forme « longue » n’est exprimée à des niveaux élevés que dans
l’hypothalamus. Nous verrons que la mutation du gène codant pour le récepteur de la
leptine est également à l’origine d’une obésité.
A l’état normal, la leptine influence la prise alimentaire en modulant les taux de plusieurs
neuropeptides hypothalamiques (diminution de l’expression des neuropeptides orexigènes
tels que NPY et augmentation de l’expression des neuropeptides anorexigènes tels que
α-MSH). La leptine agit donc comme une véritable hormone qui joue un rôle dans la
régulation de la satiété et du bilan énergétique.
En conséquence, l’absence de leptine, interprétée par le système nerveux central comme
une absence de réserves énergétiques, conduit à une hyperphagie majeure et à une
extinction de l’axe gonadotrope (hypogonadisme).
Un effondrement des concentrations plasmatiques de leptine, via la mutation du gène OB
(ou LEP), semble donc être l’un des mécanismes impliqués dans la survenue d’une obésité
infantile massive.
Or, chez l’humain, il est actuellement bien établi que les concentrations plasmatiques de
leptine sont augmentées chez l’obèse comparé au sujet de poids normal. La leptinémie est
ainsi fortement et positivement corrélée à la corpulence, évaluée par l’IMC et, de façon
plus étroite, à la masse grasse corporelle.
Compte-tenu du rôle « satiétogène » potentiel de la leptine, l’augmentation de la leptine
plasmatique chez la majorité des patients obèses a conduit à envisager l’existence d’un
phénomène de « résistance » à l’action de la leptine endogène dans l’obésité. Cette notion
de résistance à la leptine est issue de l’étude de certains modèles animaux d’obésité,
porteurs de mutations invalidantes sur le gène du récepteur de la leptine et qui présentent
une leptinémie très élevée.
Etudions ces mutations du gène de la leptine ou de son récepteur :
Deux modèles animaux d’obésité monogénique ont joué un rôle central pour la découverte
du système leptine : la souris OB/OB (le gène OB codant pour la leptine) et la souris
DB/DB (le gène DB code pour le récepteur à la leptine). Les phénotypes de ces deux types
de mutants sont identiques, associant le développement précoce d’une obésité majeure
avec hyperphagie et diminution des dépenses énergétiques, des anomalies de la
glycorégulation avec hyperinsulinisme et infertilité.
Des expériences déjà anciennes de mise en circulation croisée entre animaux (parabiose)
conduisaient à l’hypothèse suivante : la souris OB/OB manquait d’un facteur circulant
satiétogène, alors que la souris DB/DB possédait un tel facteur en abondance mais était
résistante à son action.
Le clonage des gènes OB et DB a confirmé cette hypothèse. Les souris OB/OB portent
une mutation invalidante dans le gène OB et ne produisent pas de leptine fonctionnelle.
Au contraire, les souris DB/DB sont hyperleptinémiques et possèdent un récepteur non
fonctionnel, le récepteur de la leptine étant codé par le gène DB.
Malgré une recherche intensive chez l’homme, seuls quelques cas très rares d’obésité
importante chez des individus appartenant à des familles à fort degré de consanguinité se
sont révélés être porteurs homozygotes de mutations sur le gène OB (5 patients déficients
en leptine dans l’étude de Montagne et coll., 1997 et l’étude de Strobel et coll., 1998) ou
DB (3 patients hyperleptinémiques dans l’étude de Clément et coll., 1998).
Le déficit congénital en leptine circulante est associé à une obésité massive infantile. De
poids normal à la naissance, ces enfants développent une obésité sévère à début précoce
avec hyperphagie et faim permanente. La leptine sérique se situe à des niveaux très bas,
proches de la limite de détection des dosages, avec une déviation marquée par rapport à la
relation habituelle entre leptine et masse grasse corporelle. Deux patients, parmi ceux
déficients en leptine, présentent de plus un hypogonadisme.
Trois sœurs porteuses d’une mutation dans le gène du récepteur de la leptine ont
également été identifiées. Contrairement aux sujets déficients en leptine, leur obésité
massive et précoce (avec anomalies hypothalamo-hypophysaires et hypogonadisme) est
associée à une hyperleptinémie majeure. Il a été montré que la mutation affectant le gène
du récepteur de la leptine chez ces sujets génère une forme tronquée du récepteur. Cette
forme soluble ne peut s’intégrer dans la membrane et transmettre le signal leptinique, mais
elle est capable de lier la leptine circulante.
Finalement, l’administration de leptine recombinante aux sujets déficitaires en leptine
serait une solution thérapeutique intéressante…Si les premiers résultats d’une injection
quotidienne de leptine recombinante semblent concluants sur des modèles animaux, les
résultats préliminaires chez l’homme sont plus incertains. Cependant, la recherche se
poursuit à un rythme extrêmement rapide et d’autres voies de traitement sont également
ouvertes, en particulier la recherche d’agonistes leptiniques, qui pourraient être plus
efficaces que l’hormone elle-même.
-
Le gène codant pour le récepteur β 3-adrénergique des adipocytes, à l’état muté,
pourrait être responsable d’un accroissement du gain de poids chez les sujets obèses par
diminution de la lipolyse (à l’état physiologique, l’activation de ce récepteur stimule la
lipolyse) (27).
-
Des chercheurs Français et Américains ont identifié un nouveau gène, en 1999 : le
gène UCP2 qui en agissant sur l’équilibre énergétique, interviendrait dans le contrôle du
poids corporel. Cette découverte pourrait ainsi ouvrir la voie à de nouvelles approches
thérapeutiques de l’obésité. Etudions en le mécanisme (27) :
Il est incontestable que bon nombre d’obésités sont liées à une prise alimentaire excessive.
Celle-ci n’est toutefois pas seule en cause ; la dépense énergétique est un autre facteur qui
intervient également dans la genèse de l’obésité et dont le rôle est souvent négligé.
On sait que chez un sujet adulte, lorsque l’énergie contenue dans les aliments ingérés est
supérieure à celle nécessaire au fonctionnement de l’organisme et au maintien de la
température corporelle, cet excédent d’énergie est conservé sous forme de graisses.
Un tel phénomène répété quotidiennement peut conduire à une obésité. Cependant, on sait
aussi que les individus ne sont pas égaux face à la prise de poids et qu’à prise alimentaire
égale, un sujet qui dépense moins d’énergie pour fonctionner sera plus gras qu’un autre
brûlant davantage d’énergie. Ainsi, une faible dépense énergétique facilite également la
genèse d’une obésité.
La dépense énergétique totale est la somme de l’énergie dépensée pour le métabolisme de
repos, la thermorégulation, l’activité musculaire et les besoins liés à la croissance. La
thermogenèse en réponse au froid ou celle qui suit un repas semble réduite chez certains
obèses. Une étude de 1992 (Girardet et coll.) montre que le métabolisme énergétique de
certains enfants obèses diffère de celui des enfants témoins du même âge. La dépense
énergétique de repos est primitivement plus basse chez 22% des enfants obèses et la
thermogenèse « post-prandiale » est réduite. C’est à ce niveau de l’équilibre énergétique
qu’intervient le gène UCP2.
Présent dans le noyau de toutes les cellules des mammifères, ce gène a été isolé et
introduit dans les levures. Il a été montré, en faisant produire la protéine UCP2 par le gène
correspondant dans les levures, que le gène modifiait la respiration cellulaire et stimulait
la perte d’énergie. Ainsi, UCP2 favorise la dissipation d’énergie sous forme de chaleur.
S’il y a peu de protéine UCP2, l’énergie dépensée est moindre et une plus grande part de
l’énergie apportée par les aliments est conservée sous forme chimique et stockée sous
forme de graisses. Le gène UCP2 pourrait donc intervenir dans le contrôle du poids
corporel et apparaît ainsi comme un gène candidat pour l’obésité.
L’étude du gène UCP2 sur de nombreux patients devrait permettre de vérifier son lien
avec certaines pathologies et en particulier, avec l’obésité. La confirmation de ce lien
ouvrirait la voie à de nouvelles stratégies de traitement de l’obésité (et d’une façon plus
générale, des troubles du poids corporel comme les maigreurs et les cachexies) par des
molécules modifiant l’activité du gène ou de la protéine UCP2. Dès à présent, de
nombreuses firmes pharmaceutiques s’intéressent à ces perspectives d’applications
thérapeutiques du gène et de la protéine UCP2. Toutefois, la mise au point de tels
médicaments nécessitera encore certainement plusieurs années de recherche.
-
La mutation du gène codant pour la POMC (propiomélanocortine) entraîne une
absence de précurseurs de l’ACTH (hormone adrénocorticotrophique), d’où l’insuffisance
corticotrope associée et de l’α-MSH, peptide anorexigène et catabolique (9).
-
L’invalidation du gène codant pour le récepteur aux mélanocortines de type 4
(MC4-R) (récepteur du peptide α-MSH) chez la souris mais aussi chez l’homme, entraîne
une obésité sévère d’expression variable. Les mutations de MC4-R affectent 1 à 3% des
enfants obèses (36).
Finalement, ces défauts monogéniques concernent tous le comportement alimentaire. Les
gènes mutés codent tous, en effet, pour une protéine impliquée dans la régulation de
l’appétit ou de la satiété. Pour mieux comprendre la fonction respective de ces protéines,
nous achèverons cette synthèse par les grandes lignes des mécanismes physiologiques
régulateurs de l’homéostasie énergétique.
Plusieurs hormones renseignent le cerveau sur l’état des réserves énergétiques, mais
l’hormone principale dans ce contrôle est la leptine. Elle agit par l’intermédiaire de son
récepteur (LEP-R), présent à la surface de deux types distincts de populations neuronales
(POMC/CART et AGRP/NPY) au niveau du noyau arqué de l’hypothalamus. Le signal
hormonal est converti par ces neurones spécialisés en signal nerveux, avec production de
neuropeptides modulateurs de l’appétit. En effet, les neurones POMC/CART produisent
deux peptides : α-MSH et Cart, tous deux anorexigènes et cataboliques. Ils entraînent
donc une diminution de la prise alimentaire. A l’inverse, les neurones AGRP/NPY ont une
fonction anabolique et orexigène. Leurs deux peptides (dénomination commune à celle
des neurones : AGRP et NPY) entraînent une augmentation de la prise alimentaire, le
NPY étant d’ailleurs le plus ancien et le plus puissant neuropeptide orexigène connu.
La leptine a donc un effet positif sur les neurones anorexigènes POMC/CART et un effet
inhibiteur sur les neurones NPY/AGRP. La diminution du signal leptinique en cas de
baisse des stocks adipeux provoque une réponse coordonnée conduisant à une
augmentation de la prise alimentaire (21).
- Si le déterminisme génétique semble bien établi pour les obésités monogéniques, il n’en
va pas de même pour l’obésité commune ou constitutionnelle. La génétique de l’obésité
commune n’a rien de pathologique en soi. Elle ne correspond pas à des erreurs de la
nature ayant endommagé le produit de gènes essentiels.
L’obésité commune fait appel à une génétique de prédisposition. Aucun gène n’est à lui
seul nécessaire ni suffisant. Certains gènes ou régions chromosomiques différant dans leur
séquence d’un homme à l’autre, prédisposent certains individus à stocker plus de graisse
que les autres.
Ces gènes sont naturels, leurs « variations » sont normales. Leurs allèles ont été
sélectionnés au cours du temps, lors de périodes où les hommes, confrontés à des
conditions alimentaires difficiles et imprévisibles, devaient stocker efficacement les
calories qu’ils ingéraient. Bonus hier, malus aujourd’hui ?
Le « malus » actuel, sous forme d’engraissement excessif avec ses complications, vient de
l’environnement moderne, avec un accès facile à des sources de calories alimentaires et
une dépense énergétique effondrée par la sédentarité croissante. Les gènes de stockage,
hérités tels quels de nos ancêtres, s’expriment bruyamment par une épidémie d’obésité.
Le phénomène est global, sans doute parce que les allèles favorisant le stockage sont très
répandus dans l’espèce humaine.
Un exemple de tels gènes est fourni par le gène de l’insuline, dont une forme (appelée
VNTR1) est associée à une production accrue d’insuline. Cette forme est présente à l’état
homozygote dans la moitié de la population Européenne. Il ne s’agit pas d’une forme
anormalement mutée, mais d’un polymorphisme qui augmente la transcription du gène.
Environ 75% des enfants normaux héritent cette forme de leur père. Seul l’allèle paternel
du gène de l’insuline est exprimé au cours de la vie fœtale (phénomène d’« empreinte
parentale »). Près de 3/4 des fœtus expriment donc cette forme associée à une sécrétion
accrue d’insuline. Ces enfants naissent avec un risque d’obésité multiplié par 2 environ,
probablement amplifié par l’alimentation moderne des enfants où les glucides, qui
stimulent l’insuline, composent une partie importante des calories ingérées.
L’obésité commune pourrait ainsi dépendre de formes fréquentes de plusieurs gènes
modifiant très modérément la fonction de leur produit ou sa quantité. Ces variants
génétiques sous-tendent les différences entre les individus pour de nombreux traits, qu’il
s’agisse de leur capacité à stocker plus ou moins facilement les calories, de leur taille, de
leur pression artérielle, etc. Ils constituent le fondement de la génétique « quantitative »
qui cherche à expliquer les variations physiologiques « normales » entre les hommes. Il y
a probablement un nombre conséquent de gènes différents qui concourent à la régulation
d’un trait comme l’adiposité. On parle pour cette raison de trait polygénique. D’un groupe
humain à l’autre, d’un patient à l’autre, ce ne sont pas obligatoirement les mêmes gènes
qui prédisposent à l’obésité (9).
Le nombre d’études portant sur la génétique de l’obésité croit de manière exponentielle.
Cependant, le déterminisme génétique n’est pas la seule composante impliquée dans la
survenue d’une obésité. Les facteurs environnementaux jouent un rôle primordial et
méritent donc d’être étudiés.
* Le rôle de l’environnement
Parmi les facteurs environnementaux, on distingue :
- L’alimentation (27) (54) : celle-ci a un caractère à la fois héréditaire et environnemental.
Il y a probablement des comportements qui s’héritent : l’hyperphagie aux repas, le fait de
manger très vite ou d’avoir des goûts très sélectifs pour les sucres ou les graisses qui
plaisent d’ailleurs à tous les enfants, obèses ou non. Une alimentation hyperlipidique
favorise aussi l’excès pondéral. Les protéines pourraient accélérer l’apparition du rebond
d’adiposité en stimulant la production de l’IGF (Insulin-like Growth Factor 1) qui joue un
rôle clé dans la multiplication des adipocytes.
L’alimentation s’inscrit également dans un cadre plus général de rythme de vie : une
répartition journalière de l’apport énergétique déséquilibré, avec un repas du soir souvent
trop copieux, un petit déjeuner souvent absent, et des grignotages tout au long de la
journée, sont des comportements fréquemment retrouvés chez l’enfant obèse par rapport à
l’enfant de poids normal.
- La sédentarisation (30) : Une diminution importante de l’activité physique, avec une
sédentarisation excessive de l’ensemble de la société, mais encore plus des enfants,
contribue au développement de l’obésité. Le nombre d’heures passées quotidiennement à
regarder la télévision et à jouer aux jeux vidéo entretient, chez les plus jeunes, ce
phénomène de sédentarisation.
En effet, la télévision est identifiée comme une sollicitation quasi-permanente vers
l’inactivité physique. Une étude menée dans la province du Luxembourg a montré que
l’inactivité physique estimée par la consommation de télévision (nombre d’heures par
semaine passées devant le petit écran) était corrélée à l’indice de masse corporelle de
façon plus prédictive que le taux d’activité physique.
- Le milieu socio-économique (27) : il influe sur le niveau de consommation énergétique.
En France, dans une étude chez des enfants Français âgés de 7 à 12 ans, la prévalence de
l’obésité était quatre fois plus élevée chez les enfants d’ouvriers que chez ceux des cadres.
La ration énergétique des enfants d’ouvriers était plus élevée que celle des enfants de
cadres.
La structure de la famille entre également en ligne de compte : les enfants uniques
présentent plus souvent un surpoids, de même que les derniers des familles nombreuses.
Au Danemark, Lissan et ses collaborateurs ont montré, lors d’un suivi longitudinal, que
les enfants négligés ayant souffert de carences affectives parentales devenaient plus
souvent obèses que les autres.
Au total, ces facteurs difficilement « quantifiables » (mauvaise hygiène de vie sur le plan
alimentaire, sédentarisation excessive, structure intrafamiliale, environnement et milieu
socio-économique…) participent à l’évidence au problème de l’obésité mais également à
d’autres problèmes de santé associés dont les conséquences à court et à long terme
peuvent être importantes.
II.1.c. Conséquences de l’obésité infantile
L’excès de masse grasse est associé chez l’enfant et l’adolescent à des complications
présentes à court terme et qui peuvent aussi s’avérer des facteurs de risque à long terme
(54).
* Sur le plan psychologique (54)
Les conséquences sont le plus souvent d’ordre social, avec en particulier, une mauvaise
estime de soi, une diminution des performances scolaires et un rejet social. Dès le plus
jeune âge, l’enfant est fréquemment isolé et victime de moqueries de la part de ses
camarades. A l’adolescence, cette discrimination s’amplifie avec une image de soi
négative, un risque accru de dépression et une insertion sociale future plus difficile dans
nos sociétés modernes.
* Persistance de l’obésité à l’âge adulte (54)
16 études menées de 1971 à 1997, avec des méthodologies et des définitions diverses de
l’obésité, ont évalué le risque de persistance d’une obésité à l’âge adulte.
Les principaux résultats que l’on a pu dégager de ces études sont les suivants :
- la probabilité qu’un enfant obèse le reste à l’âge adulte varie de 20 à 50% avant la
puberté à 50-70% après la puberté.
- la présence d’une obésité parentale accroît fortement ce risque chez le jeune enfant, alors
que plus l’enfant est âgé, plus son propre degré d’obésité devient déterminant.
- enfin, chez les femmes (mais pas chez les hommes), la classe sociale basse des parents
augmente le risque d’obésité à l’âge adulte et donc, la probabilité de persistance d’une
obésité constituée dans l’enfance.
La persistance d’une obésité infantile à l’âge adulte dépend donc de divers facteurs tels
que :
- l’âge de l’apparition de l’excès pondéral
- la sévérité de l’excès
- une histoire familiale d’obésité (un ou deux parents obèses)
* Complications à court terme de l’obésité infantile
Pathologies associées (36) (77)
Parmi ces pathologies, les complications respiratoires (syndrome d’apnées du sommeil en
particulier) ou anomalies respiratoires, ont été retrouvées lors de l’enregistrement
systématique pendant le sommeil chez 33% des enfants présentant une obésité sévère.
Les apnées du sommeil, essentiellement d’origine obstructive, sont une complication dont
la fréquence est probablement sous-estimée chez ces enfants ; leur gravité potentielle est
liée à la réduction des capacités d’apprentissage et de mémorisation qu’elles peuvent
entraîner. L’existence de ronflements nocturnes peut être un signe d’appel justifiant un
enregistrement polygraphique ventilatoire nocturne, examen de référence dans le
dépistage des apnées ou hypopnées chez ces enfants.
Certaines pathologies orthopédiques pédiatriques se retrouvent en majorité chez les
enfants obèses : ils représentent 80% des enfants atteints de genu varum ou tibia vara et
50-70% de ceux présentant une épiphysiolyse fémorale. Ces complications sont
heureusement rares mais nécessitent parfois une cure chirurgicale.
Les anomalies de la statique vertébrale peuvent être aggravées par une surcharge
pondérale et doivent également être recherchées.
Les anomalies endocriniennes comme la puberté précoce, une oligoménorrhée voire une
aménorrhée, sont plus fréquemment retrouvées chez l’adolescente obèse.
Enfin, d’autres complications comme la lithiase biliaire (l’obésité serait responsable de 8
à 33% des cas chez l’enfant, surtout après la puberté), la stéatose hépatique (25% des
enfants obèses), l’hypertension intracrânienne idiopathique (90%), la cardiomyopathie et
la pancréatite ont également été décrites.
Apparition du DNID (diabète non insulinodépendant) chez l’adolescent (36)
L’augmentation récente et importante de la prévalence de l’obésité semble à l’origine de
l’émergence, chez l’adolescent, du DNID (ou diabète de type II), une pathologie autrefois
nommée diabète de la maturité, tant on la croyait réservée à l’adulte.
Une étude menée aux Etats-Unis, dans la communauté de Cincinnatti, en 1994, a révélé
que 1/3 des nouveaux cas de diabète entre les âges de 10-19 ans étaient de type II, pour un
IMC de 38 kg/m². Un antécédent de premier degré de diabète de type II était retrouvé dans
65% des cas. Il constitue donc un facteur de risque de développement d’un DNID chez un
enfant obèse, de même que la surcharge pondérale, surtout abdominale, associée à la
sédentarité, entraîne parfois un hyperinsulinisme et une résistance à l’insuline, favorisant
l’apparition secondaire d’un DNID.
Anomalies métaboliques et facteurs de risques vasculaires (36)
Bien que dans la grande majorité des cas, les enfants obèses n’expriment aucune plainte
d’ordre médical, un certain nombre d’anomalies infracliniques se retrouvent plus
fréquemment dans les groupes d’enfants obèses. Ces anomalies sont de différents types :
1. augmentation de la pression artérielle
2. augmentation du cholestérol total, du LDL-cholestérol et des triglycérides
3. intolérance au glucose ; hyperinsulinémie avec insulinorésistance comme nous
l’avons déjà évoqué.
La plupart des anomalies régressent à la faveur d’une perte partielle de l’excès pondéral.
Néanmoins, certaines d’entre elles restent associées à un risque accru au long terme.
* Complications à long terme de l’obésité infantile
Mortalité (30) (36)
De nombreuses études épidémiologiques sont concordantes pour conclure que l’obésité
dans l’enfance est associée à une augmentation du risque de mortalité à l’âge adulte de 50
à 80%. L’excès de mortalité est surtout d’origine cardiovasculaire.
Des autopsies réalisées chez des jeunes adultes décédés accidentellement ou pour fait de
guerre ont permis d’établir une corrélation significative entre le degré d’adiposité et les
lésions athéromateuses au niveau coronarien.
Morbidité (54) (36)
Dans les deux sexes, une morbidité accrue par pathologie cardiovasculaire est retrouvée. Il
apparaît, à la lumière de plusieurs études épidémiologiques, que l’obésité de l’enfant
constitue un facteur de risque indépendant de maladies cardiovasculaires ultérieures.
Une étude de cohorte (suivi de 500 adolescents de 13 à 18 ans pendant 60 ans environ) a
démontré que l’existence d’une obésité au moment de l’adolescence multipliait par 2 le
risque de maladies coronariennes et par plus de 7 le risque d’athérosclérose à l’âge adulte,
et cela indépendamment du niveau socio-économique, de l’existence d’autres facteurs de
risque cardiovasculaire et surtout de l’évolution pondérale.
Une étude Américaine, dirigée par Must et ses collaborateurs, en 1992, a retrouvé un
risque de maladies coronariennes, de diabète, de goutte et de cancer du côlon, augmenté
chez les hommes âgés qui avaient été en surpoids à l’adolescence. Parallèlement, chez les
femmes (en surpoids à l’adolescence), un excès de pathologies articulaires et une
diminution de la qualité de vie étaient notées par rapport au groupe témoin.
Le devenir social (36)
Les seules données concernant le devenir social des obèses nous viennent des Etats-Unis
et reposent sur un échantillon représentatif national de plus de 10 000 sujets âgés de 16 à
24 ans, auquel un questionnaire annuel a été envoyé pendant 7 ans.
Les filles obèses avaient, en moyenne, sept ans plus tard, un taux de mariage, un nombre
d’années d’études et un revenu annuel inférieurs. Une tendance similaire, mais moins
marquée, était notée chez les garçons.
Compte-tenu de l’augmentation constante de la prévalence de l’obésité infantile et de ses
conséquences à plus ou moins long terme, on comprend la nécessité de mettre en place
des moyens de prise en charge de cette obésité dès le plus jeune âge.
D’un point de vue de Santé Publique, on peut considérer que la prévention et la prise en
charge thérapeutique de l’obésité chez l’enfant constituent, à terme, une prévention de
l’obésité adulte et ainsi, de l’ensemble des facteurs de risque qui lui sont associés. La
prévention de l’obésité dans l’enfance représente donc un enjeu majeur, non seulement
pour les populations pédiatriques, mais aussi pour la santé des populations adultes (30).
II.1.d. Approche thérapeutique de l’obésité infantile
Le principe du traitement de l’obésité est de parvenir à un bilan énergétique négatif en
réduisant les apports et en augmentant les dépenses. Ce principe est beaucoup plus facile
à énoncer qu’à faire accepter, surtout à long terme.
Cependant, l’intervention nutritionnelle isolée n’est pas suffisante à elle seule. Il faut y
associer une pratique régulière de l’activité physique et le plus souvent, un soutien
psychologique.
La motivation de l’enfant et de sa famille est un des points les plus importants de la prise
en charge tant pour l’initier que pour maintenir à long terme l’envie de poursuivre les
efforts (27).
* Mesures diététiques (27) (77)
La prise en charge diététique débute toujours par un interrogatoire détaillé, éventuellement
réalisé avec l’aide d’une diététicienne, afin de déterminer le régime spontané de l’enfant,
puis d’y apporter les corrections quantitatives et qualitatives nécessaires (tableau 6).
Tranche d’âge
Garçons
Filles
(de 1 à 18 ans)
(Kilocalories/joules)
(Kilocalories/joules)
1 – 2 ans
1150
1150
2 – 3 ans
1350
1350
3 – 5 ans
1550
1550
5 – 7 ans
1850
1750
7 – 10 ans
2100
1800
10 – 12 ans
2200
1950
12 – 14 ans
2400
2100
14 – 16 ans
2650
2150
14 – 18 ans
2850
2150
Tableau 6 : Besoins énergétiques moyens des enfants normaux de 1 à 18 ans.
Extrait de : Tounian Patrick. Attitude pratique devant un enfant obèse. Le Concours
Médical 2002 ; 124-05 : 305-309.
- Les corrections quantitatives ont pour but de rétablir des apports normocaloriques pour
l’âge et le sexe. Un tel régime permet à la fois de diminuer les apports énergétiques en
fonction des apports spontanés, qui sont augmentés chez l’enfant obèse, et d’assurer les
besoins minimaux nécessaires à la croissance. Cette réduction, cependant, ne doit pas
excéder plus de 30% des apports habituels. Pour cette raison, les régimes hypocaloriques
sévères n’ont pas lieu d’être chez l’enfant.
- L’aspect qualitatif du régime a deux objectifs : d’une part, réduire les apports lipidiques
au profit des glucides complexes, la négativation du bilan lipidique étant indispensable
pour obtenir une perte de masse grasse ; d’autre part, corriger la répartition des repas sur
le nycthémère au profit de la première partie de la journée. Cela revient en pratique à
accroître la consommation énergétique au cours du petit déjeuner, à abolir le grignotage et
à réduire les ingesta en fin de journée.
Enfin, les produits allégés et les édulcorants doivent être évités, car un des buts du régime
est de rééduquer le goût de l’enfant, et notamment le déshabituer du goût sucré, alors que
ces produits auraient plutôt tendance à pérenniser ces mauvaises habitudes.
Il faut leur apprendre à ne boire que de l’eau en dehors ou pendant les repas. Quand la
perte de poids sera estimée suffisante, il faudra veiller à ce que l’enfant conserve de
bonnes habitudes concernant le choix des aliments.
* Activité physique (27) (54)
Il est nécessaire d’augmenter l’activité physique et de lutter contre la sédentarité (réduire
le temps consacré à la télévision, aux jeux vidéo, à l’ordinateur…). L’exercice physique
semble n’avoir que peu d’effets sur la réduction pondérale mais entraîne souvent, une
réduction de la masse grasse.
Au départ, le sport est souvent mal accepté par l’enfant, qui souffre à la fois de son image
au sein du groupe et des difficultés à se mouvoir. L’exercice physique peut s’effectuer
dans le cadre sportif ou dans le cadre de la vie courante (se déplacer à pied le plus souvent
possible ; se promener ; en bus, descendre à la station précédant son arrêt).
De plus, il a été montré que l’association d’un régime et d’une activité physique améliore
non seulement la forme physique et la composition corporelle des enfants obèses, mais
présente également un bénéfice en terme de risque cardiovasculaire à l’âge adulte.
Offrir à l’enfant un pôle d’intérêt autre que la nourriture, par le biais du sport ou d’une
activité physique quotidienne, est indispensable au bon équilibre nutritionnel, mais
également psychologique, en favorisant son intégration auprès des autres enfants, du jeune
patient obèse.
* Prise en charge psychologique (27) (54)
La consultation psychologique permet d’évaluer la structure psychologique de l’enfant, la
signification symbolique de l’obésité et son retentissement social et psychologique.
Elle permet d’accompagner l’enfant tout au long de sa prise en charge et d’évaluer sa
motivation personnelle.
La difficulté et l’intensité des conflits familiaux peuvent amener à proposer une thérapie
familiale. L’enfant, comme les parents, doivent adhérer au projet thérapeutique afin de
comprendre les causes et les conséquences de cette obésité.
Sur le plan individuel, les thérapies comportementales visent à modifier les
comportements relatifs à l’alimentation et à l’activité physique des enfants obèses. Le but
est de déconditionner l’enfant pour transformer un comportement pathologique acquis
(alimentation excessive et/ou déséquilibrée) en une conduite adaptée.
Malgré toutes ces mesures, les résultats de la prise en charge thérapeutique de l’obésité
sont inquiétants, qu’ils soient évalués à court, ou surtout, à long terme. En effet, environ
2/3 des enfants obèses ayant bénéficié d’une prise en charge thérapeutique restent en
surcharge pondérale à l’âge adulte. Il est donc nécessaire d’insister sur la prévention à
l’échelon de la population générale et à l’échelon individuel (77).
Au vu des risques et des complications inhérentes à l’obésité infantile, inévitable dans le
SWP, il est indispensable que la prise en charge soit précoce, adaptée et pluridisciplinaire,
afin d’en limiter les conséquences…
Elle ne peut se faire que par le biais d’une bonne connaissance de la physiopathologie de
l’obésité infantile et de sa « iatrogénie » par les professionnels de santé, avec dans le
SWP, une association à divers troubles de degrés variables (retard mental, troubles
comportementaux…) majorant la difficulté de la prise en charge globale.
II.2. L’obésité infantile dans le SWP
Inutile d’en rappeler les conséquences, il s’agit plutôt de s’intéresser à la pathogénie, aux
caractéristiques et aux moyens de prise en charge de l’obésité chez ces enfants plus
difficilement compliants qu’un enfant obèse normal.
II.2.a. Pathogénie de l’obésité et caractéristiques
Il existe, chez environ 50% des enfants présentant un SWP, un déficit en hormone de
croissance, suspecté devant un ralentissement de la courbe de croissance associé à un
retard statural . La GH (hormone de croissance) étant une hormone lipolytique, son
absence dans le SWP est à l’origine d’une modification de la composition corporelle avec
apparition d’une obésité dès le plus jeune âge. Elle entraîne également un hypogonadisme
avec des anomalies génitales telles que micropénis, cryptorchidie chez le garçon ou
hypoplasie des organes génitaux externes chez la petite fille. Comme dans l’insuffisance
somatotrope, on note un abdomen rebondi par augmentation du pannicule adipeux. La
répartition des graisses est similaire avec une augmentation de la masse grasse et une
diminution de la masse maigre. Les taux de leptine, dans le SWP, sont parfaitement
corrélés à la masse grasse, comme dans le déficit en hormone de croissance (67).
Finalement, les similitudes entre les deux tableaux cliniques sont nombreuses, malgré
l’absence de lien clairement établi entre l’anomalie génétique (quelle qu’elle soit) dans le
SWP et le déficit en GH observé chez ces mêmes patients.
En revanche, les conséquences d’un tel déficit sont bien connues et afin de mieux en
comprendre les mécanismes, nous allons effectuer un bref rappel sur l’hormone de
croissance (76) : L’hormone de croissance ou hormone somatotrope (GH) est secrétée par
les cellules de l’antéhypophyse.Sa sécrétion est pulsatile et régulée par divers
neuromédiateurs chimiques : la GH-RH (hormone d’origine hypothalamique), les
hormones thyroïdiennes, les corticoïdes, augmentent la transcription du gène de la GH
situé sur le chromosome 17 tandis que l’IGF-1 (Insulin Growth Factor 1), synthétisé par le
foie via la fixation de la GH sur des récepteurs-cibles hépatiques, inhibent sa transcription.
L’hormone de croissance se lie donc à des récepteurs membranaires spécifiques, au niveau
des cellules-cibles. La répartition des récepteurs est très large : principalement le foie, puis
le tissu adipeux, le rein, les gonades, les cellules de l’immunité, le chondrocyte et enfin
l’ostéoblaste ont des sites de liaison pour la GH.
L’effet le plus spectaculaire de la GH est celui de la stimulation de la croissance
squelettique et tissulaire. Cet effet « croissance » est un effet indirect puisqu’il est médié
par des substances appelées somatomédines, qui sont des facteurs de croissance, tout
particulièrement par la somatomédine dépendante de la GH : la somatomédine-C ou IGF1.
L’hormone de croissance stimule directement la production d’IGF-1 par le foie, induisant
une augmentation de la concentration plasmatique de ce peptide (cette augmentation est
un témoignage de l’efficacité globale du système) et permettant son action au niveau
tissulaire et squelettique. Elle augmente également la production « personnelle » d’IGF-1
dans nombre de tissus qui possèdent des récepteurs pour la GH et qui sont les cibles de
l’activité de croissance de la GH. Ces tissus sont, en particulier, le rein, les os, les gonades
et les cellules immunocompétentes.
Il apparaît donc clairement que la GH exerce son action par l’intermédiaire de la
stimulation de la production hépatique d’IGF-1 qui agit sur un mode endocrine au niveau
des tissus et par la stimulation de la production tissulaire d’IGF-1 qui agit sur un mode
autocrine sur le tissu qui le produit.
Après la fin de la période de croissance, la GH exerce de multiples actions. Elle contribue
à l’équilibre de la balance azotée, à la composition corporelle en augmentant la masse
maigre et en réduisant la masse grasse musculaire. Elle majore les capacités d’adaptation à
l’exercice. Parmi ses multiples actions, on cite également l’augmentation de la
contractilité myocardique, de la différenciation des cellules-souches de l’hémopoïèse en
érythrocytes et granulocytes et de la sensibilité aux hormones gonadotropes. Enfin, elle
exerce des effets sur les métabolismes glucidiques et lipidiques qui ne sont pas médiés par
IGF-1 et sont de ce fait considérés comme des effets directs. L’hormone de croissance est
hyperglycémiante et lipopytique (avec augmentation des acides gras circulants).
La synthèse de ces données sur les effets physiologiques de l’hormone de croissance nous
éclaire sur les conséquences d’un déficit en GH, dont les principaux symptômes sont le
retard statural, une obésité et une insuffisance gonadique de degré variable selon les
patients. Il doit être confirmé par une exploration somatotrope (deux tests de stimulation
pharmacologique avec un pic abaissé de GH< 10 ng/ml et un taux bas d’IGF-1) (15).
L’intérêt de l’identification de ce déficit repose sur l’éventualité d’une thérapeutique.
Dans le SWP, la présence d’un tel déficit n’est cependant pas une condition obligatoire à
la mise en route d’un traitement par GH. En effet, en Europe, les enfants atteints du SWP
peuvent être traités par GH sans qu’ils aient un déficit biologique avéré et sans qu’ils aient
un retard de taille (l’autorisation Américaine de mise sur le marché est uniquement axée
sur les effets de la croissance ; le déficit doit donc être confirmé) (67). Ceci s’explique par
les résultats de plusieurs équipes qui ont évalué les bénéfices d’une thérapie substitutive
par la GH chez les patients atteints du SWP. Les études ont démontré les effets bénéfiques
du traitement, non seulement en ce qui concerne le retard statural, mais également pour
améliorer la force musculaire et la répartition masse musculaire/grasse. Il semblerait que
les effets soient maximaux au cours de la première année de traitement (77).
Le traitement par l’hormone de croissance est maintenant officiellement autorisé depuis
l’obtention de l’autorisation de mise sur le marché Français le 19 Février 2001 dans cette
indication et selon les modalités de prescription de « médicaments d’exception » (77).
L’arrêté de remboursement du traitement, en France, dans le cadre du SWP, est paru au
Journal Officiel le 27 Avril 2002 (4).
II.2.b. Prise en charge et thérapeutique de l’obésité infantile dans le SWP
Comme dans l’obésité commune, la prise en charge comporte plusieurs volets (57) :
- Un régime alimentaire est à mettre en place, avec un médecin nutritionniste et/ou une
diététicienne, dès l’apparition de la prise pondérale. Ce régime doit être adapté à l’enfant,
permanent et compris de tout l’entourage du patient.
L’enfant doit être constamment suivi par une diététicienne et/ou un médecin nutritionniste
afin de contrôler la prise de poids et le comportement alimentaire hyperphagique.
Si le régime alimentaire est bien suivi, il apparaît efficace de le féliciter et de récompenser
régulièrement ses efforts. Mais la récompense ne doit en aucun cas être un bonbon ou un
gâteau…
- Une activité physique doit être associée au régime (natation, vélo, ski…). Il n’est pas
nécessaire de pratiquer cette activité dans un club…d’autant plus que l’intégration et
l’adaptation des enfants atteints du syndrome n’est pas toujours aisée. Elle peut être faite
en famille, au moins trois fois par semaine, ce qui contribue à maintenir le poids et à
prévenir l’hyperinsulinisme.
- Un soutien psychologique est indispensable car leur quête de nourriture permanente et
obsessionnelle est à l’origine de troubles du comportement à type d’instabilité, difficultés
de concentration et d’acceptation des frustrations. Lorsqu’ils sont encouragés à développer
un intérêt pour des activités sportives, mais également culturelles et/ou artistiques, les
personnes atteintes du SWP ressentent moins les frustrations liées à leur maladie, leur
comportement s’améliore et les contraintes de leur régime hypocalorique passent au
second plan.
- Enfin, comme nous l’avons précédemment cité, il existe un traitement par hormone de
croissance dans de syndrome. Il s’agit de la somatropine (Genotonorm et Genotonorm
Miniquick). Elle est indiquée dans le SWP (confirmé par des analyses génétiques) afin
d’améliorer la croissance et la composition corporelle. Le traitement nécessite des
injections sous-cutanées quotidiennes au long cours à la posologie de 0,035 mg/kg de
poids corporel soit 1 mg/m² de surface corporelle par jour (il est nécessaire d’augmenter
les doses en cas d’obésité car la dose quotidienne de GH est calculé en fonction du poids
théorique pour la taille). L’enfant doit donc être capable d’accepter les contraintes du
traitement. De plus, la prise de somatropine a été associée à un risque accru de diabète de
type II, risque déjà majoré par la présence d’une obésité. Quelques cas d’hypertension
intracrânienne ont également été décrits (56).
En pratique, son intérêt n’est donc pas négligeable mais la somatropine ne peut pas être
administrée à tous les enfants du SWP. Une évaluation au cas par cas doit être effectuée
en tenant compte de la balance bénéfices/risques et des difficultés d’acceptation du
traitement chez ces jeunes patients.
Dans tous les cas, les mesures diététiques, psychologiques et les activités sportives
doivent être régulièrement suivies et encouragées. Elles représentent l’un des volets
fondamentaux de la prise en charge du SWP, avec les troubles comportementaux qui
émaillent souvent l’évolution et fragilisent une prise en charge globale.
III. LES TROUBLES DU COMPORTEMENT DANS LE SWP
Les problèmes de comportement sont variables d’un enfant à l’autre atteint du SWP.
Ils varient considérablement en fonction de leur âge, leur environnement et leurs capacités
individuelles (15). Divers traits comportementaux sont possibles chez ces enfants, allant
de la dépression, en passant par les troubles obsessionnels et compulsifs (TOC), jusqu’aux
épisodes psychotiques. D’autres comportements, ne relevant pas du domaine
psychiatrique, coexistent chez ces patients.
Certains de ces troubles sont bien documentés chez l’enfant en bonne santé qui ne
présente pas de retard mental. Ainsi, la dépression chez l’enfant a fait l’objet d’une
conférence de consensus le 14 et le 15 Décembre 1995 à Paris avec la participation de
l’Agence Nationale d’Accréditation et d’Evaluation de la Santé (ANAES) et la Fédération
Française de Psychiatrie (14). Les TOC, qui affecte 2% de la population en France,
bénéficient maintenant de traitements reconnus comme efficaces par l’Organisation
Mondiale de la Santé (OMS) (1991) et la Conférence de consensus Américaine (1988) : la
psychothérapie comportementale et cognitive et les inhibiteurs de la recapture de la
sérotonine (IRS) (62).
Dans le SWP, les troubles varient en fonction d’un certain nombre de facteurs endogènes
(âge, mécanisme génétique responsable de l’affection…) et exogènes (environnement
familial, social…). Cependant, un profil de comportement caractéristique devient évident
dès la prime enfance chez 70 à 90% des patients avec accès de colère, entêtement,
difficulté de contrôle des émotions et d’acceptation des frustrations, tendances
obsessionnelles et compulsives en partie liées au désir continuel de manger, et enfin, une
automutilation non spécifique au syndrome, probablement accentuée par une tolérance
augmentée à la douleur. Ces signes sont assez spécifiques du syndrome, au point que l’on
peut parler de phénotype comportemental dans le SWP (12).
La multiplicité et la diversité des troubles psychopathologiques chez l’enfant sont telles
que nous allons cibler ce chapitre sur les comportements les plus caractéristiques du SWP.
Reconnaître ces troubles, c’est assurer un diagnostic et une prise en charge précoce,
parallèlement à l’émergence d’autres problèmes tels que l’obésité d’apparition souvent
concomitante.
III.1. Identification des différents symptômes
III.1.a. Par ordre de fréquence
Une étude menée sur 100 patients âgés de 4 à 46 ans atteints du SWP a permis à Dikens et
Cassidy, en 1995, d’identifier un certain nombre de comportements marquants et d’en
évaluer leur fréquence (tableau 7) (26).
% de
COMPORTEMENT
patients
% de
COMPORTEMENT
patients
Hyperphagie
98%
Logorrhée
74%
Automutilation cutanée
97%
Compulsions
71%
Opiniâtreté
95%
Anxiété
70%
Obsessions
94%
Isolement
67%
Accès de colère
88%
Taquin
65%
Désobéissance
78%
Rejet d’autrui
60%
Impulsivité
76%
Tendance à l’accumulation
55%
Labilité
76%
Tendance au vol, mensonge
54%
Hypersomnie (diurne)
75%
Tristesse
51%
Tableau 7 : Les principaux troubles du comportement et leur pourcentage dans une
population de 100 patients âgés de 4 à 46 ans atteints du SWP.
Extrait de : Dykens E, Shah B. Psychiatric disorders in Prader-Willi syndrome : epidemiology
and management. CNS Drugs. 2003 ; 17 (3):167-178.
- L’hyperphagie est en tête présente chez la quasi-totalité des patients (98%). Associée à
l’automutilation cutanée (97%) et à l’entêtement (95%), ces trois comportements sont les
plus fréquemment retrouvés dans cette étude.
- On note, également, une fréquence non négligeable des accès de colère (88%) et des
troubles obsessionnels et compulsifs (94% et 71% respectivement).
Bien que la prévalence exacte du TOC dans le SWP soit inconnue, il semblerait que celleci soit supérieure à celle des sujets présentant un retard mental hétérogène et un TOC (de
l’ordre de 1 à 3%).
- Il existe une labilité émotionnelle chez 76% des patients, avec un pourcentage similaire
d’impulsivité. On retrouve une logorrhée (74%) ainsi qu’une hypersomnie diurne (75%).
Celle-ci est liée aux éventuelles apnées du sommeil avec réveil précoce le matin (entre
4h30 et 6h) (78).
- L’anxiété et l’isolement sont présents chez 2/3 des patients.
- Enfin, on note une tendance à l’accumulation, au vol et au mensonge chez la moitié des
sujets, avec en dernier lieu, la souffrance et la tristesse chez 51% d’entre eux.
Au total, l’hyperphagie, l’opiniâtreté, les tendances obsessionnelles et compulsives ainsi
que l’automutilation cutanée sont les troubles comportementaux les plus fréquemment
identifiés dans une population d’individus, de la prime enfance à l’âge adulte, atteints du
SWP. Cependant, cette étude ne précise pas à quel moment de la vie apparaissent ces
divers troubles. Or, l’âge d’apparition de ces comportements semble assez stéréotypé,
avec des variations interindividuelles non négligeables.
III.1.b. En fonction de l’âge
Lellweger, en 1988, considère que le SWP évolue en trois phases distinctes et successives,
chacune correspondant à une tranche d’âge défini (16).
* la première phase (ou phase hypotonique)
Du point de vue comportemental, durant la première année de vie, les enfants atteints du
SWP sont décrits comme étant attachants, affectueux et gentils.
* au cours de la deuxième phase (ou phase hyperphagique)
Elle débute habituellement entre l’âge de 1 à 2 ans. Parallèlement au désir continuel de
manger, surviennent les troubles comportementaux précédemment cités dans l’étude de
Dickens.
* la troisième phase (ou phase adolescente et adulte)
Celle-ci est dominée par les conséquences organiques à court et à long terme de l’obésité,
et l’émergence de certains nouveaux comportements psychopathologiques (tendance à
l’isolement, diminution de l’activité et asthénie). Environ 10% des adolescents et des
adultes développeront des troubles psychiatriques majeurs, allant de la dépression à la
psychose (12).
A partir de ce modèle, l’équipe multidisciplinaire de Leuven, en Belgique, a fait état de
son expérience à propos de l’apparition de troubles comportementaux et en particulier, de
troubles psychiatriques chez 53 patients atteints du SWP (23 femmes et 30 hommes âgés
de 1 à 4 ans) avec un suivi rétrospectif de 15 ans.
Les résultats de l’étude, au terme du suivi, ont confirmé la présence de troubles
comportementaux chez tous les patients. Cependant, 8 des 53 patients ont développé des
troubles psychiatriques authentiques à type de troubles de l’humeur bipolaire (4 patients)
ou d’épisodes psychotiques (4 patients) (19).
En analysant le développement comportemental durant l’enfance et l’adolescence de
chacun des sous-groupes respectifs (4 patients bipolaires et 4 patients souffrant de
psychose), deux profils se distinguent dès l’enfance :
-
les patients psychotiques à l’âge adulte présentent un comportement autistique durant
l’école primaire, actif et extraverti à l’adolescence. Leur retard mental est modéré à
sévère.
-
s’il s’agit d’un trouble bipolaire, on note moins de troubles du comportement à l’école
avec en revanche, une attitude passive et introvertie à l’adolescence. Il n’y a pas ou
peu de retard mental.
D’autres études sont nécessaires pour confirmer ces données. Cependant, cette étude est à
ce jour, la seule ayant permis un suivi aussi long sur le développement psychique et
comportemental des enfants et adultes atteints du SWP.
Concernant l’âge d’apparition des troubles, une étude Américaine (2001), qui comparait
l’émergence des accès de colère et des comportements compulsifs chez 105 sujets atteints
du SWP, 66 du syndrome de Down et 76 enfants au développement normal, est en faveur
d’une fréquence accrue de ces symptômes particulièrement chez les enfants atteints du
SWP, avec une apparition aux alentours de 2 ans d’âge et une présence quasi-complète
après l’âge de 4 ans. De plus, ces accès de colère et troubles compulsifs, ainsi que
l’automutilation sont d’autant plus évidents après l’âge de 3 ans (19).
Finalement, l’identification des divers troubles comportementaux et leur âge d’apparition
devraient permettre au médecin et à la famille de l’enfant, un dépistage précoce et une
gestion plus efficace des situations de crise comportementales.
III.1.c. En fonction de l’anomalie génétique
Ce paragraphe introduit la notion de corrélation entre génotype et phénotype. En effet, en
fonction du mécanisme responsable du SWP : délétion paternelle ou DUP maternelle,
certains traits et comportements sont plus caractéristiques. Ils constituent donc un outil
supplémentaire dans la reconnaissance des troubles comportementaux.
Concernant la DUP :
Une étude datant de 1996 a comparé le phénotype des sujets atteints du SWP en fonction
des deux anomalies génétiques les plus fréquentes (délétion et DUP).
79 cas de DUP et 43 cas de délétion, confirmés par analyse cytogénétique, ont été suivis.
Au terme de l’étude, tous âges et sexes confondus, il n’y avait pas de différence
significative entre les deux groupes (41).
Comparativement, les résultats de l’équipe de Bottani en 1994 et Gillesen-Kaesbach, en
1995, étaient en faveur d’un phénotype atténué du syndrome d’Angelman (tant sur le plan
physique que comportemental) chez les patients porteurs d’une délétion maternelle versus
la DUP d’origine paternelle (qui sont les deux mécanismes les plus fréquents dans cette
affection).
Or, les précédentes études sur le SWP, analysant la relation entre phénotype et
mécanismes génétiques n’ont pas tenu compte du sexe des patients. Ainsi, cette même
étude de 1996, subdivisant les groupes en fonction du sexe, a révélé chez les patientes
porteuses d’une DUP maternelle, une diminution de la durée du gavage à la naissance et
une apparition plus tardive de l’hyperphagie par rapport aux patientes porteuses d’une
délétion paternelle.
D’autres études ont confirmé ces résultats (10) (24), mais sans distinction entre les sexes,
en soulignant une moindre sévérité de l’obésité, des troubles alimentaires associés et par
conséquent, des troubles obsessionnels et compulsifs liés au désir continuel de manger, en
présence d’une DUP maternelle.
Par ailleurs, dans ces études, Cassidy en 1997, et Dikens en 1999 ont répertorié un certain
nombre d’autres traits caractéristiques aux enfants porteurs d’une DUP maternelle
(par rapport au mécanisme délétionnel) :
-
une diminution du prurit cutané (donc une diminution du risque d’automutilation)
avec un seuil de résistance à la douleur abaissé.
-
des anomalies modérées de l’articulation verbale et un Quotient Intellectuel (QI)
verbal légèrement plus élevé. En effet, une étude menée en Angleterre a évalué les
quotients intellectuels et les capacités des personnes atteintes du SWP, ainsi que
leurs acquisitions. La comparaison effectuée avec un groupe de contrôle de
personnes souffrant de déficience intellectuelle n’a pas constaté de différence de
QI global entre les sujets qui présentent une microdélétion et ceux dont le
syndrome résulte d’une disomie maternelle. En revanche, le QI verbal de ceux qui
ont une disomie maternelle est plus élevé, alors que le QI de performance est plus
élevé chez ceux qui ont une délétion (13).
-
peu ou pas d’hypopigmentation et un syndrome dysmorphique moins marqué.
Globalement, dans le SWP, la DUP maternelle semble engendrer une forme « moins
sévère » de la maladie. Une fois confirmée par analyse cytogénétique, on peut espérer sur
le plan comportemental, un développement moindre des troubles obsessionnels et
compulsifs et du risque d’automutilation. Cependant, la DUP n’est pas le mécanisme
génétique le plus fréquemment responsable de l’affection (environ 30%) et des troubles
psychopathologiques à type de psychoses peuvent émailler l’évolution.
Une étude longitudinale en Belgique et en Grande-Bretagne suggère un taux élevé de
psychoses chez les patients porteurs d’une DUP maternelle par rapport à la délétion
paternelle. 5 jeunes adultes atteints du SWP et de psychose ont été identifiés après
screening de 8 provinces Anglaises. Tous étaient porteurs d’une DUP maternelle (26).
Ce mécanisme semble donc être associé à des troubles comportementaux moins sévères
sur le plan alimentaire et relationnel, mais avec un risque ultérieur de psychoses, dont la
prise en charge et le traitement sont souvent rendus difficiles chez ces patients, peu
compliants et dont les thérapeutiques actuelles contribuent à l’excès de prise de poids
(neuroleptiques).
Concernant la délétion :
Le mécanisme délétionnel a également fait l’objet de nombreuses études. Un article
résumant les troubles psychopathologiques dans le SWP fait état d’une étude réalisée par
Dykens et son équipe, comparant 23 individus porteurs d’une DUP et 23 autres d’une
délétion paternelle.
Les troubles obsessionnels et compulsifs sont prédominants en cas de délétion paternelle.
De plus, ces patients sont plus renfermés, plus anxieux (ils se rongent davantage les
ongles), très « hyperphages » avec une tendance à l’isolement et à la bouderie. Enfin, on
note une hypopigmentation plus marquée, un petit poids de naissance plus fréquent et un
syndrome dysmorphique plus net (26).
L’identification des troubles comportementaux pour chacune des anomalies génétiques
devrait là encore permettre un repérage et une prise en charge précoce de ces symptômes.
Qu’en est-il en cas de mutation du centre d’empreinte ? Une étude réalisée en 2002 a
comparé l’influence des trois mécanismes, à l’origine du SWP, sur le phénotype.
La délétion ou la DUP entraîne un phénotype clinique et comportemental d’autant plus
caractéristique qu’en présence d’une anomalie du centre d’empreinte (79). Cependant, sa
prévalence est bien plus faible dans le SWP (<1%) et d’autres études sont nécessaires pour
corroborer ces résultats, et peut-être identifier des traits plus spécifiques en présence d’une
mutation du centre d’empreinte.
Nous allons maintenant étudier, un à un, les troubles du comportement (troubles des
fonctions cognitives, troubles obsessionnels et compulsifs, hyperphagie et autres) les plus
fréquemment retrouvés chez les patients atteints du SWP.
III.2. Description des troubles du comportement
III.2.a. Les troubles des fonctions cognitives
En moyenne, les individus atteints du SWP ont un QI aux alentours de 65 à 70
(généralement supérieur au QI des personnes atteintes d’autres syndromes d’origine
génétique). Malgré ce déficit, il n’a pas été trouvé de corrélation entre le QI et le poids, les
problèmes de comportement, la nature de l’anomalie génétique, ce qui est rassurant car
ces enfants continuent à apprendre tout au long de la vie (45).
Cependant, quelque soit le QI (il existe une grande variabilité interindividuelle), des
troubles des fonctions cognitives semblent bien identifiés. L’immaturité émotionnelle de
ces enfants empêche l’utilisation appropriée d’un savoir dans des situations sociales et de
travail (15) :
-
la mémoire immédiate est moins bonne que la mémoire lointaine (en particulier, la
mémoire auditive d’où la répétition des questions).
-
l’information visuelle est mieux retenue que l’information orale.
-
on constate des faiblesses relatives en arithmétique et des forces en lecture et
compréhension de la lecture, repérages spatiaux et visuels et enfin, réalisation de
puzzles. En effet, Dykens, en 2002, fait état d’une étude révélant une capacité audessus de la moyenne, de ces enfants, à résoudre des puzzles (23).
-
le traitement des informations et l’élaboration de réponses à ces informations
s’effectuent mal : décoder, comprendre, interpréter et répondre à des consignes
multiples est pour eux un exercice difficile. Une certaine lenteur dans la
réalisation des tâches est retrouvée. Bien que leur mémoire à long terme soit très
bonne, ils parviennent mal à la retrouver rapidement et à l’exprimer avec des
mots.
-
Ces enfants sont très communicatifs, mais ils éprouvent de la difficulté à expliquer
leur comportement ce qui engendre des frustrations. Si le repérage spatio-visuel
est bon, le repérage temporel l’est beaucoup moins avec difficulté de respect et de
conformité des horaires. Enfin, ils sont souvent excessivement rigides, incapables
de changer le cours de leurs actions avec accès de colères.
-
Parce qu’ils ne comprennent qu’un nombre limité d’émotions (très heureux ou très
triste) et ont du mal à décoder les comportements, les émotions et le point de vue
des autres, ils paraissent souvent très égocentriques. Cela pose problème dans les
relations sociales : ils ne savent pas prendre leur tour. Pour éviter cela, il est
souhaitable de leur apprendre à enregistrer et utiliser les informations avec des
supports visuels.
Une série de tests de langage sur 7 enfants ont démontré de nombreux points communs
avec l’autisme dans sa forme la moins sévère (syndrome d’Asperger) : déficits de langage
non verbal, éventail d’intérêts réduits, peu d’utilisation du langage dans les relations
sociales (45).
III.2.b. Les troubles obsessionnels et compulsifs
Le désir continuel de manger évolue à des degrés variables selon les individus atteints du
SWP.
Cependant, d’autres domaines, hormis la nourriture, entraînent un véritable comportement
obsessionnel et compulsif, à l’origine d’une grande souffrance chez le jeune patient et son
entourage.
* SUR LE PLAN ALIMENTAIRE (15) (26)
Le besoin perpétuel de s’alimenter s’expliquerait par le dysfonctionnement du centre
hypothalamique de la satiété. Les patients semblent ne pas connaître la satiété.
La quête de nourriture peut être permanente et obsessionnelle et explique alors bien des
comportements : irritabilité, difficultés à se concentrer.
Parmi les troubles obsessionnels et compulsifs rattachés à l’alimentation, on note la
présence d’un certain nombre de rituels et/ou de règles qui gouvernent leurs conduites
alimentaires. Ils peuvent manger en fonction :
-
des couleurs (par exemple : en premier, les aliments de couleur brunâtre)
-
de la catégorie alimentaire (exemple : la viande puis les légumes)
-
de ses préférences (du plus au moins apprécié des aliments)
-
de la valeur calorique (du plus au moins calorique)
Enfin, d’autres disposent leurs couverts dans une position bien précise, préambule
indispensable à la prise du repas.
* LES AUTRES TROUBLES OBSESSIONNELS ET COMPULSIFS (25) (26)
D’autres comportements stéréotypés sont retrouvés chez ces enfants. Lors d une étude de
l’équipe de Dikens, en 1996, au sujet de 91 enfants et adultes pour le diagnostic de TOC et
atteints du SWP, 45 à 80% d’entre eux présentaient des symptômes évocateurs.
La prévalence exacte du TOC dans le SWP n’est pas connue. Il semblerait, tout de même,
que cette prévalence soit supérieure à celle des individus présentant un retard mental,
quelle qu’en soit l’origine, et un TOC associé : 1-3%.
En revanche, il n’a pas été mis en évidence de différence significative entre les adultes
atteints du SWP et ceux souffrant de TOC sans retard mental (taux semblable de
compulsions et de sévérité des symptomes).
Parmi les troubles les plus fréquemment retrouvés, les parents et les proches des malades
retiennent :
- le stockage excessif d’objets
- l’attachement à des rites
- la séquence de tâches immuables
- une logorrhée relative
- une automutilation cutanée (surtout au niveau du front et des jambes) ;
c’est le signe le plus fréquemment décrit.
Les sujets au développement intellectuel normal avec un TOC ont des obsessions qui
portent sur des domaines bien identifiés. Il s’agit d’obsessions :
- de souillure
- d’erreur et de désordre
- d’agressions
- de malheur et de superstition
A ces obsessions répondent un certain nombre de compulsions définies (par exemple,
excès de lavage des mains par peur d’une contamination dans le cadre des obsessions de
souillure, etc) (62).
Dans le SWP, il ne semble pas que ces obsessions et compulsions soient liées à une peur
ou à une crainte particulière. Elles sont inhérentes au syndrome.
Ainsi, concernant les questions répétitives, elle s’explique par le fait que les personnes
atteintes du SWP ont du mal à assimiler les informations orales qu’elles reçoivent. Il est
préférable d’éviter les discussions et leur donner l’information sous forme visuelle :
dessin, calendrier, graphique.
Les grattages intempestifs de la peau sont la conséquence d’une altération des perceptions
sensorielles combinée à un seuil élevé de résistance à la douleur. Il faut tenter d’éviter ce
qui les déclenche : ennui, anxiété et s’orienter vers des activités de remplacement (boules
anti-stress, sport) (13).
Une étude comparant un groupe de sujets atteints du SWP à un groupe de contrôle
(patients présentant une obésité, un retard mental et des troubles du comportement mais
génétiquement indemne du SWP) révèle un taux plus élevé de compulsions et
d’automutilation cutanée. Le génotype semble donc intervenir dans la survenue des TOC
dans le SWP (26).
III.2.c. L’ hyperphagie (58)
Le syndrome hyperphagique apparaît en moyenne vers l’âge de 2-3 ans, voire un peu plus
tôt ou un peu plus tard. Ceci représente pour les parents une transformation radicale de ce
qu’a été leur vécu jusque là (hypotonie avec difficultés d’alimentation), et un temps
d’adaptation est nécessaire pour prendre en compte cette nouvelle réalité.
Les particularités cliniques de l’hyperphagie dans le SWP ont été étudiées en 1995 par
l’équipe du Professeur Holland de Cambridge (Grande-Bretagne). Une étude à la
méthodologie simple a confirmé ce que les parents savaient, en mesurant l’ampleur du
phénomène. 13 sujets adultes atteints du SWP ont été comparés à des sujets témoins. Ces
sujets regroupés dans une pièce avaient libre accès à la nourriture pendant une heure. Les
patients et les sujets témoins avaient à remplir des échelles (échelles de faim, de satiété) et
la quantité ingérée était notée.
Cette expérience a permis de voir quelle était la consommation spontanée des sujets : il a
été facilement montré que le seuil de satiété était plus élevé chez les sujets atteints du
SWP (nombre de sandwichs consommés en une heure pour arriver à un état de satiété
équivalent à celui des sujets contrôle plus élevé pour la majeure partie d’entre eux).
De plus, le niveau de satiété est beaucoup moins durable (en moyenne, un patient atteint
du SWP absorbe 1290 calories en une heure contre une moyenne de 396 calories chez les
témoins).
Si l’on comprend facilement les risques d’obésité liés à ce phénomène et l’effort de
privation qui sera nécessaire pour ne pas grossir, on doit aussi mesurer la nature de
l’expérience vécue par les enfants, surtout dans nos univers d’abondance de la nourriture,
déjà favorable à la constitution de surpoids dits « psychosociaux ».
La satiété est un état d’apaisement d’une tension qui nous permet de nous consacrer à
d’autres activités. Cette liberté dure au plus quelques heures, après quoi nous perdons
rapidement nos capacités de concentration si nous ne mangeons pas.
Imaginons que le cerveau ne reçoive pas ou ne comprenne pas les messages de
l’organisme signalant un apport suffisant de nourriture. Le cerveau se comporte alors
comme si le corps n’était pas encore rassasié.
C’est ce qui se passe dans le SWP : la personne ressent presque en permanence une envie
de s’alimenter, avec des difficultés importantes pour se consacrer à autre chose ou se
concentrer sur une idée.
La préoccupation peut être si intense qu’elle empêche de contrôler le comportement en
fonction des attentes sociales et peut entraîner des situations de crise.
La psychopathologie de l’hyperphagie s’apparente à celle des personnes atteintes de
troubles addictifs dépendantes d’une substance ou de comportements spécifiques (jeu
pathologique, kleptomanie…) avec pour caractéristiques communes :
•
un état de tension qui ne cesse qu’avec la satisfaction de la tendance
(s’alimenter en cas d’hyperphagie)
•
des pensées centrées sur l’objet de la dépendance
•
une perte du contrôle du comportement avec des troubles des conduites pour
parvenir au but (vols, fugues, crises de colère) comme dans un état de manque.
L’analogie peut surprendre mais elle est à comprendre à un niveau neurobiologique.
L’alimentation est fondamentalement une passion associée aux états de plaisir. La
disparition ou l’atténuation de la satiété normale peut transformer n’importe qui, en
« addictif de la nourriture ».
Le syndrome hyperphagique s’associe parfois dans le SWP à des tendances spécifiques du
tempérament (TOC, obstination, débordements émotionnels…).
III.2.d. Les autres symptômes (26)
- Les accès de colère et l’entêtement font partie de ces autres symptômes fréquemment
retrouvés dans le SWP. Présents dans le profil de comportement caractéristique du
syndrome, leur intensité est variable et leur fréquence ne semble pas diminuer avec l’âge.
- Des troubles psychiatriques apparaissent également. Ainsi, Clarke fait état de son étude
menée sur 95 sujets adultes atteints du SWP. 6,3% des patients ont présenté des
symptômes psychotiques au cours du mois précédent (la liste des symptômes était fourni,
au préalable, aux parents afin d’observer et de confirmer leur présence).
Stein et ses collègues mentionnent la survenue d’hallucinations visuelles ou auditives dans
12,1% d’une population de 347 patients atteints du syndrome. Ces taux sont élevés,
surtout lorsqu’on les compare à la prévalence des épisodes psychotiques chez les sujets
souffrant d’un retard mental.
- La dépression peut aussi affecter ces patients, en particulier à l’âge adulte. L’asthénie,
l’anxiété et la tendance à l’isolement s’installent. Une prise en charge est indispensable.
En 1995, les résultats de l’étude de Dykens et Cassidy sont en faveur d’une majoration de
la détresse et des signes dépressifs avec l’âge.
Finalement, identifier et reconnaître précocement ces symptômes permet de mieux gérer,
au quotidien, ces troubles du comportement et d’éviter si possible, à l’extrême, les
situations de crise.
III.2.e. La crise (44)
Qu’est-ce qu’une situation de crise chez un enfant atteint du SWP ? On pourrait la décrire
comme une rupture d’équilibre.
L’entourage proche de ces jeunes patients est régulièrement confronté, si ce n’est habitué,
à ces manifestations de colère, d’impulsivité, d’entêtement, de résistance, de contestation
qui affluent périodiquement et peuvent s’amender aussi rapidement qu’elles sont
apparues.
Cependant, parfois, ces troubles caractériels peuvent s’amplifier et se transformer en
réactions menaçantes : fugues, conduites de mise en danger, ruptures, recrudescence des
passages à l’acte, agressions…autant de comportements qui, de manière récurrente,
menacent un équilibre qui nécessite en permanence beaucoup d’énergie pour être
maintenu.
Outre leur dangerosité intrinsèque propre, ces comportements peuvent régulièrement
remettre en cause les projets établis et constituer une entrave à l’autonomisation.
Ces régulières menaces de rupture d’équilibre tiennent l’entourage dans un état d’alerte et
de veille permanent. La crise crée un effet de surprise. Lorsque les crises se répètent, à cet
effet de surprise s’ajoute l’effet d’attente. La répétition des crises amplifie probablement
la crainte qu’on en a. Les moments les plus difficiles pour l’entourage se situent souvent,
entre les crises, avec toute la difficulté du « Comment programmer l’imprévu ? Comment
anticiper l’inattendu ? ».
En situation avérée de crise, les manifestations extériorisées et bruyantes sont celles que
l’on voit et qui nous envahissent. Cependant, toute crise a des composantes souterraines.
Ainsi, la crise commence souvent bien avant qu’on ne la perçoive, entraînée par une
accumulation de divers facteurs.
Ces facteurs sont multiples mais peuvent être schématiquement distingués en facteurs
internes et externes. Parmi les composantes externes (plus aisément repérables), les
situations de changement comme la mise en appartement, les orientations scolaires, etc,
nécessitent d’une part, effort et énergie pour s’adapter, mais elles mobilisent d’autre part
beaucoup d’anxiété, de remise en cause de soi, de confrontation à ses limites, source d’une
véritable souffrance psychique qu’il est parfois difficile de reconnaître et encore plus de
dire.
Les passages à l’acte extériorisés, peuvent pour certains constituer une voie d’issue à ces
tensions intérieures.
A ces facteurs s’ajoutent les déterminants biologiques propres au SWP (facteurs internes).
On sait que l’hypothalamus, dont le rôle a été mis en évidence pour les troubles des
conduites alimentaires, intervient également dans le contrôle des émotions, les conduites
instinctuelles de fuite ou d’agression. Les jeunes atteints du SWP peuvent donc présenter
des dysrégulations dans ce domaine qui viennent précipiter certaines situations de crise.
Il est donc important de tenir compte de cette intrication facteurs internes et externes afin
de mieux comprendre la dimension de la crise et la gérer dans les meilleures conditions.
La gestion de la crise sera abordée dans le cadre du traitement et de la gestion des troubles
du comportement.
III.3. Quelques pistes sur les mécanismes physiopathologiques des troubles
comportementaux
Parmi les diverses molécules impliquées, on retient :
LA GHRELINE (28)
Il s’agit d’une hormone dérivée de l’estomac qui stimule l’appétit et contrôle la sécrétion
d’hormone de croissance. Des études cliniques ont montré un taux anormalement élevé de
ghreline dans le plasma de personnes atteintes du SWP.
Elle pourrait donc jouer un rôle dans l’hyperphagie ou le déficit d’hormone de croissance
du SWP. L’hyperphagie, avec son cortège de troubles comportementaux, pourrait donc
être liés à l’action de cette hormone.
Les chercheurs se posent de nombreuses questions :
- Pourquoi y a-t-il un taux élevé de ghreline dans le sang ?
- Est-ce qu’un médicament qui diminuerait le taux de ghreline diminuerait l’appétit ?
- Les récepteurs à la ghreline sont-ils fonctionnels ?
Des études sont en cours en Floride grâce à des dons de tissus de l’hypothalamus postmortem.
L’OCYTOCINE (18) (19)
Neuropeptide synthétisé par l’hypothalamus, une diminution de 42 à 54% du nombre de
neurones sécréteurs d’ocytocine, dans le noyau paraventriculaire de l’hypothalamus
(centre de la satiété), a été retrouvé chez 5 adultes atteints du syndrome lors d’une étude
comparative avec 27 sujets témoins.
L’équipe de Martin, en 1998, a mis en évidence une élévation de la concentration
d’ocytocine dans le liquide céphalorachidien (lieu de résorption) d’adultes atteints du
SWP (des femmes, en particulier) par rapport à un groupe de sujets indemnes.
Or, ce neuropeptide a été clairement impliqué dans la survenue des compulsions dans
l’autisme et le TOC. Les anomalies de la sécrétion d’ocytocine seraient également
responsables de la dysrégulation de la satiété.
Finalement, la cohésion de ces données pourrait expliquer l’émergence de ces mêmes
symptômes dans le SWP ; des études sont nécessaires, le rôle de l’ocytocine, mal élucidé,
reste à démontrer.
LE RECEPTEUR A DU GABA (19)
Le GABA est un neurotransmetteur intervenant dans la régulation des sécrétions
adrénergiques hypothalamiques.
Il existe plusieurs récepteurs GABAergiques (GABA-A et B, en particulier). Le gène
codant pour la sous-unité β3 du récepteur GABA-A est localisé sur la région du
chromosome 15, déletée chez les sujets atteints du SWP. Il en est de même pour les deux
autres sous-unités constituant le récepteur GABA-A : les sous-unités α5 et γ3.
Un nombre élevé de récepteurs GABA-A est retrouvé dans l’hypothalamus
paraventriculaire (centre de la satiété) et anormalement bas dans l’hypothalamus latéral
(centre de la faim) dans le SWP.
A l’état normal, l’inhibition GABAergique, au niveau du centre de la satiété, intervient
tant que le sujet a faim et n’est pas rassasié, réduisant les sécrétions de Dopamine et de
Sérotonine dont le rôle physiologique commun est la diminution de la prise alimentaire.
On comprend dès lors qu’une inhibition excessive, par excès de récepteurs GABA-A dans
cette région, entraîne une diminution franche des sécrétions, à la fois, dopaminergiques et
sérotoninergiques réduisant la satiété et plongeant l’organisme dans un état de faim quasipermanente.
Au niveau du centre de la faim (hypothalamus latéral), à l’état normal, l’inhibition
GABAergique agit comme un frein, en augmentant les concentrations de Dopamine et de
Sérotonine et donc en restreignant la prise alimentaire.
Or, l’absence ou la faible inhibition GABAergique au niveau du centre de la faim réduit
les sécrétions de ces deux neuropeptides et majorent le risque de « surconsommation »
alimentaire.
Au total, l’action conjuguée de ces deux mécanismes (réduction de la satiété et absence de
freinage de la prise alimentaire) pourrait expliquer l’hyperphagie dans le SWP.
L’absence d’inhibition GABAergique des neurones dopaminergiques et sérotoninergiques
du cortex frontal semblent être responsables des symptômes compulsifs retrouvés dans le
SWP. Cette hypothèse est compatible avec les récentes découvertes neuroradiologiques :
l’échec de l’inhibition GABAergique des neurones glutaminergiques, dopaminergiques et
sérotoninergiques entre le cortex frontal et ses connexions sont impliqués dans la survenue
des troubles obsessionnels et compulsifs chez les patients psychiatriques indemnes de
toute autre affection. Il pourrait en être de même dans le SWP.
LA SEROTONINE (19)
Akefeldt et ses collègues, en 1998, ont rapporté un taux élevé du principal métabolite de la
Sérotonine : le 5-HIAA dans le liquide céphalorachidien de sujets atteints du SWP,
suggérant un métabolisme accéléré de ce neuropeptide et par conséquent, une diminution
de l’action de la Sérotonine sur ses principaux effecteurs (« turn-over » excessif).
Finalement, les facteurs neurochimiques semblent jouer un rôle prépondérant dans la
genèse des troubles obsessionnels et compulsifs ainsi que les troubles des conduites
alimentaires dans le SWP. Les études, en cours et à venir, permettront d’explorer ces voies
de recherche et, peut-être, contribuer à l’émergence de nouvelles thérapeutiques.
III.4.Prise en charge et traitement des troubles du comportement
Quelque soit le trouble, la prise en charge est psychologique (individuelle et/ou familiale)
et parfois, médicamenteuse.
De manière générale, l’influence de l’environnement, des apprentissages semble
prépondérante dans la prise en charge. Un environnement adapté pour une personne
atteinte du SWP doit être structuré et prévisible. Il faut décider avec elle des règles et s’y
tenir.
L’accès à la nourriture doit être en permanence contrôlé ou supervisé, l’insertion sociale
encouragée, avec le soutien de la famille, des médecins, des enseignants et des éducateurs.
C’est le meilleur moyen de lutter contre l’hyperphagie et les troubles du comportement
qui y sont associés.
Comment agir ? Souvent, les parents et les proches exigent d’eux trop de « bons
comportements » ; or, ils ont besoin certes, d’une vie structurée, mais presque tout dans
leur vie est soumis à contrôle, ce qui génère de grandes frustrations (45) :
- il faut leur laisser leur liberté sur un maximum de petites choses, les
responsabiliser et les laisser s’occuper des autres.
- il est nécessaire de leur donner un nombre restreint de choix (2 ou 3) et de
décider à l’avance de ce qui est négociable ou pas.
- il ne faut pas les affronter lorsqu’ils sont en colère et ne pas réagir devant des
excès de langage (mots grossiers).
Ces quelques points suffisent souvent à limiter les troubles du comportement et nos
réactions excessives, en tant que parent, éducateur, médecin, etc, face à ces jeunes
patients. Nous allons à présent aborder les différents moyens de prise en charge en
fonction des troubles les plus fréquemment retrouvés.
Troubles des fonctions cognitives (45)
Dans ce domaine, les enseignants, surtout, doivent être informés des difficultés
d’apprentissage des enfants atteints du SWP. Ils doivent s’assurer qu’ils leur donnent des
consignes de manière claire, en leur demandant de répéter si nécessaire. Leur mémoire
visuelle étant supérieure à leur mémoire auditive, les supports visuels sont préférables aux
longs discours :
•
Ces enfants peuvent apprendre quelque chose et le faire correctement, puis
tout à coup ne plus savoir ; il faut alors prendre le temps de réexpliquer.
•
Comment arrêter les questions répétitives ? Il faut répondre puis mettre des
limites « Je te réponds encore une dernière fois » ou bien leur demander de
répéter eux-mêmes la réponse.
•
Il faut leur laisser du temps pour eux.
Ces quelques règles sont essentielles pour une bonne compréhension et acquisition des
connaissances scolaires ainsi que pour leur intégration future dans la vie professionnelle et
sociale en tant qu’adulte.
TOC et hyperphagie (26) (45)
Une prise en charge psychologique individuelle, familiale et/ou de groupe est toujours
envisageable. Sur le plan médicamenteux, les IRS semblent les plus indiqués. En effet,
nous l’avons vu, la sérotonine diminue la prise alimentaire au niveau de l’hypothalamus
régulant le mécanisme de la satiété. Un « turn-over » excessif et/ou un dysfonctionnement
de la sécrétion sérotoninergique (dans le sens d’une diminution) semblent être les
mécanismes responsables des TOC et de l’hyperphagie.
Une première étude de Dech et Budow, en 1991, chez une jeune fille de 17 ans présentant
un retard mental dans le cadre d’un SWP, traitée par fluoxétine (Prozac), a mis en
évidence une amélioration significative du contrôle pondéral et une certaine régression des
comportements compulsifs.
En 1992, Hellings et Warnock constatent une diminution remarquable de la fréquence de
l’automutilation cutanée chez 2 patients atteintes du syndrome et traités par fluoxétine
(on rappelle que l’automutilation est le TOC le plus fréquemment retrouvé chez ces
sujets).
Enfin, Benjamin et Buot-Smith rapportent le cas d’un jeune garçon de 9 ans atteint du
SWP, dont les symptômes se sont largement amendés lors d’un traitement associant la
fluoxétine et la naltrexone (Narcan).
Ces résultats sont certes encourageants, mais ils nécessitent cependant d’être l’objet
d’autres études contrôlées.
De plus, comme le souligne le Dr C. Recasens, médecin psychiatre à l’hôpital Albert
Chenevier de Créteil (94), il reste encore beaucoup à faire, à commencer par la formation
des médecins, psychiatres ou non, et psychologues, face aux problèmes spécifiques des
troubles du développement de l’enfant. En effet, la recherche passe par le biais d’une
meilleure connaissance, par les praticiens, de ces troubles comportementaux (19).
Les autres symptômes
- Troubles bipolaires de l’humeur et comportements agressifs (26)
Les thymorégulateurs tels le Lithium et les antiépileptiques comme la carbamazépine
(Tégrétol) sont les médicaments de choix dans le traitement des troubles bipolaires et
parfois les comportements agressifs.
Un patient atteint du syndrome et de trouble bipolaire a bénéficié d’un traitement par
Lithium. On a constaté une amélioration notable des troubles sous traitement.
Deux essais avec la carbamazépine se sont révélés également concluants sur les
comportements agressifs.
L’effet adverse de ces thérapeutiques est la prise de poids dont le contrôle est déjà rendu
difficile dans le SWP.
- La dépression et les psychoses (26)
Les IRS sont indiqués dans la dépression. De plus, le contrôle pondéral et la régression
des TOC, via les IRS, contribuent à une meilleure image de soi-même. La rispéridone
(Risperdal), neuroleptique, a été proposé comme traitement dans le cadre d’épisodes
psychotiques dans le SWP.
Une étude a été menée sur 3 patients atteints du syndrome, âgés de 18 à 21 ans, présentant
des troubles psychotiques et traités par une dose journalière de 1 à 2 mg de rispéridone.
Les résultats sont encourageants avec diminution des symptômes. Cependant, comme tout
neuroleptique, il existe un risque non négligeable de prise de poids (variable en fonction
de la classe pharmacologique, de la dose prescrite et de la durée du traitement).
La crise (44)
Les symptômes précédemment étudiés ont un substrat physiopathologique qui explique la
nécessité pour les chercheurs d’expérimenter les médicaments actuels en fonction du
mécanisme identifié (exemples : pour les psychoses : neuroleptiques, les troubles de
l’humeur : thymorégulateurs, TOC et dépression : IRS…).
Les déterminants de la crise sont à la fois psychologiques et biologiques. L’utilisation de
médicaments est rarement nécessaire et face à une crise, deux niveaux de réactions, si ce
n’est de réponse, peuvent être envisagés.
1/ Poser des mesures concrètes
La crise se manifeste souvent par l’agir. Il est donc important de poser des limites
cadrantes, plus dans un but de contenance et de protection que de sanction.
Ce n’est jamais facile car la ou les personnes confrontées à ces crises ont souvent
l’impression de « passer en force », de prendre des mesures qui sont désagréables (pour le
patient et soi-même). Ces limites nous interrogent sur notre pouvoir et son éventuel abus.
(restriction financière, contrôle des fréquentations…). La remise en place des repères peut
transitoirement exacerber les symptômes mais à terme, a un effet rassurant et apaisant.
2/ Réfléchir et parler
Ce deuxième niveau, plus intrapsychique, consiste à essayer de favoriser la verbalisation
des émotions et de comprendre les différents facteurs personnels, familiaux et contextuels
qui ont précédé la crise. Dire son anxiété, ses craintes, sa fatigue, dire tout simplement son
« trop plein » permet d’avoir moins besoin de recourir à la décharge motrice et aux
passages à l’acte. Tenter d’analyser les éléments qui ont sous-tendu la crise permet de
redonner un sens à ce qui parait parfois ne plus en avoir.
Ces deux niveaux de réponse ne s’effectuent pas forcément en même temps mais peuvent
se chevaucher ; ils se complètent en tout cas toujours.
Comment prévenir la crise ? Anticiper la crise permet de s’y préparer et si possible de
l’éviter, mais il faut néanmoins être vigilant pour ne pas l’induire. On connaît la
persévération dans une idée que peuvent avoir les jeunes atteints du SWP. Sans doute
faut-il veiller à ne pas présenter les mêmes persévérations en regard.
C’est en se situant dans l’entre-deux entre rigidité et permissivité que l’on peut tenter de
réduire les crises. Poser des limites contenantes plus que frustrantes, préparer les
changements, les accompagner en douceur, etc…tout cela peut aider, mais est plus facile à
dire qu’à faire.
Il est aussi important d’être convaincu qu’on ne peut pas tout prévenir et que la recherche
d’autonomisation ne se fait jamais sans risque. Ceci est vrai tant pour les sujets atteints du
SWP que pour tous les autres adolescents.
Il y a des crises salutaires. Ainsi, certaines, parfois les plus bruyantes, permettent des
réaménagements tant personnels que familiaux. La crise peut alors prendre sa valeur
positive, maturative, certes de rupture d’équilibre mais au profit d’un nouvel équilibre
plus serein que le précédent.
Et le traitement par l’hormone de croissance ? (80)
Il semble améliorer les troubles du comportement dans un certain nombre de domaines.
Ainsi, une étude contrôlée sur 2 ans incluant 54 patients âgés de 4-16 ans atteints du SWP
et traités par GH a conclu aux résultats suivants :
- dans le domaine des performances scolaires, les résultats sont variables.
- concernant les TOC, aucun changement notable n’a été noté, de même que pour les
réactions agressives et les psychoses.
- en revanche, dans le cadre des performances physiques et de l’humeur, on a constaté
une amélioration de la composition corporelle et des capacités individuelles contribuant
à une image plus sereine et plus positive de soi-même.
Cette étude est en accord avec celle dirigée par Lindgren et son équipe, en 1998. Cependant,
cette modification apparente pourrait être liée à une amélioration de la composition
corporelle et donc du reflet de soi-même, sans action réelle sur l’humeur.
La GH agit-elle vraiment sur la composante comportementale ? Des études GH versus
placebo pourront répondre à cette question sur laquelle se penche déjà de nombreux
scientifiques.
Au total, la prise en charge et le traitement des troubles du comportement chez les sujets
atteints du SWP reste encore mal codifiés. Un soutien psychologique s’avère souvent
nécessaire. L’intérêt d’une thérapeutique médicamenteuse doit être évaluée au cas par cas
(en raison, surtout, du risque de prise de poids).
Grâce à la recherche, on peut espérer que les médicaments actuels (IRS, neuroleptiques,
thymorégulateurs…) seront bientôt accessibles à un plus vaste échantillon de la population
atteinte du syndrome (parce que leur efficacité aura été prouvée dans cette affection) et l’on
espère que de nouvelles molécules (neuropeptides en particulier) viendront compléter
l’éventail thérapeutique afin de gérer au mieux les troubles du comportement chez les
patients atteints du SWP.
IV. DESCRIPTION CLINIQUE DU SWP
L’hypotonie, l’obésité et les troubles du comportement sont indissociables du SWP, dont
la prévalence est de l’ordre de 1/10 000 à 15 000 naissances (31).
Cependant, les étiologies sont nombreuses et souvent, les manifestations cliniques
orientent le diagnostic. Il existe des éléments morphologiques et des symptômes
particuliers propres au syndrome qu’il est important de connaître pour le diagnostic et la
surveillance ultérieure.
Si le syndrome dysmorphique est immuable (bien que toutes les caractéristiques physiques
ne soient pas nécessairement présentes chez le sujet atteint), d’autres symptômes varient
dans leur apparition et leur intensité en fonction de l’âge et du retard psychomoteur de
l’enfant.
Nous allons donc développer les manifestations cliniques et les symptômes particuliers
selon l’âge (depuis la grossesse jusqu’à l’âge adulte).
Au cours de la grossesse (31) (52)
On note : - une réduction de l’activité fœtale (76%)
- une naissance prématurée (41%)
- une présentation du nouveau-né par le siège (26%)
De 0 à 2 ans (31)
La période néonatale est dominée par l’hypotonie. Il existe :
- une hypotonie centrale sévère
- une succion faible ou absente
- une absence de mouvements spontanés
- une inexpressivité du visage
- une absence de réponse à la stimulation
- une peau fine
- un cri faible
- enfin, une petite taille des mains et des pieds à la naissance et des anomalies
des organes génitaux externes
- Chez le garçon, on retrouve un micropénis, une hypoplasie scrotale et/ou une
cryptorchidie (uni ou bilatérale) présente dans 80 à 90% des cas.
- Une hypoplasie des grandes lèvres avec absence de petites lèvres est fréquente chez les
petites filles.
Ce tableau d’hypogonadisme est à l’origine de troubles du développement pubertaire avec
pour principale conséquence une infertilité.
Le syndrome dysmorphique peut être évident dès la naissance (il est souvent plus net à
partir de l’âge de 2 ans) :
- dolichocéphalie
- diamètre bifrontal étroit
- yeux en amande
- petite bouche
- lèvre supérieure mince
- commissures tombantes
Cet aspect caractéristique du visage est considéré comme l’un des critères majeurs de
diagnostic du SWP dont nous reparlerons ultérieurement (tableau 8).
Un retard du développement moteur et intellectuel entraîne un retard des acquisitions.
Face à un tel retard, une anamnèse des antécédents obstétricaux et de la période néonatale
associée à des éléments dysmorphiques évocateurs peut orienter le diagnostic, passé
inaperçu à la naissance.
On retrouve :
- une station assise vers 12-13 mois
- une marche à l’âge de 24-30 mois
- des difficultés dans la motricité fine et dans l’apprentissage de la parole
(du fait de la petitesse de la bouche et de l’hypotonie des muscles articulatoires)
De 2 à 12 ans
Les risques majeurs sont la boulimie et l’obésité aggravées par les difficultés
comportementales (31) :
La boulimie avec recherche compulsive et constante de la nourriture entraîne une
obésité majeure, essentiellement abdominale, dont les principales complications sont le
diabète et les évènements cardiovasculaires.
On note un retard mental modéré, avec une scolarisation en maternelle et à l’école
primaire le plus souvent possible. Presque tous les enfants peuvent apprendre à lire et à
écrire. L’acquisition de l’écriture peut toutefois être retardée par l’hypotonie et l’étroitesse
de la main.
Le syndrome dysmorphique est plus net.
Les problèmes de comportement sont très variables d’un enfant à l’autre. Une prise en
charge et un suivi psychologique, voire psychiatrique, dès l’âge de 3-7 ans permet de
dépister les problèmes spécifiques et d’aider les familles.
On relève (15) :
- des difficultés de contrôle des émotions et d’acceptation des frustrations avec
crises de colère et accès de violence
- un comportement compulsif et obsessionnel, essentiellement centré sur la
nourriture. D’autres tendances obsessionnelles (attachement à des rites,
stockage d’objets, séquence de tâches immuables) sont présentes chez les
patients atteints du SWP.
- une tendance au vol et au mensonge existe également.
- les jeunes patients ont parfois des troubles du sommeil (à type d’apnées ou
dérèglement des cycles du sommeil). Irritabilité et somnolence en résultent.
Parmi les autres problèmes, il est important de savoir que (57) :
* sur le plan cutané
Ces enfants ont une peau fine et sensible qui cicatrise mal. Il existe un prurit fréquent avec
risque de lésions de grattage. Ce prurit peut être prolongé et intense car ces enfants ont un
seuil élevé de résistance à la douleur.
* sur le plan ophtalmologique
Le strabisme et la myopie sont fréquents et nécessitent une surveillance régulière.
* sur le plan dentaire
Ces enfants ont une salive plus épaisse que la normale. De plus, il existe un risque
d’encombrement dentaire lors de l’apparition des dents définitives en raison de la petite
taille de la mâchoire.
* sur le plan orthopédique
Les cyphoses et les scolioses doivent être recherchées systématiquement, surtout si le
surpoids est important.
A l’adolescence (57)
Les problèmes hormonaux sont au premier plan :
- ralentissement de la croissance staturale avec un développement pubertaire
tardif et incomplet.
- les situations de crise (prise de poids importante, troubles graves du comportement)
sont exacerbées à l’adolescence.
A l’âge adulte (57)
Il n’y pas de nouvel élément clinique mais plutôt une amélioration des troubles
comportementaux si les individus atteints sont placés dans un cadre adapté et
suffisamment protecteur, leur permettant d’exprimer leurs possibilités.
CRITERES MAJEURS
CRITERES MINEURS
(valeur : 1 point chacun)
(valeur : ½ point chacun)
1. Hypotonie centrale néonatale et infantile entraînant
une difficulté à téter, s’améliorant progressivement
avec l’âge.
2. Chez le nourrisson, difficulté à s’alimenter entraînant
le recours au gavage et une prise de poids médiocre.
3. Prise de poids excessive entre 1 et 6 ans ; obésité
centrale si aucune mesure n’est prise.
4. Aspect caractéristique du visage : dolichocéphalie
chez le nourrisson, visage ou diamètre bifrontal étroits,
yeux en amande ; la bouche paraît petite, la lèvre
supérieure est mince, les commissures tombantes (au
moins trois de ces caractéristiques sont nécessaires).
5. Hypogonadisme correspondant à l’une des
caractéristiques selon l’âge :
- hypoplasie génitale (chez les garçons : hypoplasie
scrotale, cryptorchidie, pénis et/ou testicules de petite
taille ; chez les filles, absence ou hypoplasie sévère des
petites lèvres et/ou du clitoris)
- maturation gonadique incomplète ou tardive ;
apparition tardive des signes de puberté après 16 ans
(chez les garçons : gonades de petite taille, pilosité
faciale ou corporelle peu abondante, pas de mue de la
voix ; chez les filles, menstruation irrégulière ou
absente)
6. Retard global du développement avant 6 ans ; chez
les enfants plus âgés, difficultés d’apprentissage ou
retard mental léger à modéré.
7. Hyperphagie (appétit excessif)- recherche constante
de nourriture- obsession pour la nourriture
8. Délétion 15Q11-13 (> 650 bandes, confirmée de
préférence par le test de FISH ou autre anomalie
moléculaire appropriée dans cette région du
chromosome, notamment une disomie maternelle.
1. Diminution des mouvements foetaux ou léthargie
infantile ou faiblesse du cri chez le nourrisson,
s’améliorant avec l’âge.
2. Problèmes de comportement caractéristiques : crises de
colère, accès de violence, persévération, comportement
obsessif/compulsif, tendance à ergoter, à faire de
l’opposition systématique, à se montrer rigide,
manipulateur, possessif et entêté, à voler, à mentir (au
moins 5 de ces traits sont nécessaires).
3. Trouble du sommeil ou apnée nocturne.
4. Petite taille à l’âge de 15 ans, comparée aux autres
membres de la famille (en l’absence de traitement par
l’hormone de croissance).
5. Hypopigmentation : teint et cheveux clairs comparés à
ceux des autres membres de la famille.
6. Mains petites (<25ème percentile) et/ou pieds petits
(<10ème percentile) pour la taille.
7. Mains étroites à la tranche droite.
8. Anomalies oculaires (myopie, ésotropie).
9. Salive épaisse et visqueuse ayant tendance à sécher aux
commissures des lèvres.
10. Langage : des problèmes d’articulation.
11. Tendance à se gratter.
Indices supplémentaires
1. Seuil de tolérance à la douleur élevé
2. Moins de vomissements que le normale
3. Nourrisson : instabilité de la température corporelle
4. Scoliose ou cyphose
5. Développement précoce de la pilosité pubienne ou axillaire (avant 6 ans)
6. Ostéoporose
7. Capacité inhabituelle à assembler des puzzles
8. Investigations neuromusculaires normales
Tableau 8 : Les critères de diagnostic du syndrome de Prader-Willi.
Extrait de : Rappaport, Tauber, Postel-Vinay, Bonnefont, Nolen. Association Prader-Willi
France : Les principaux éléments du diagnostic.
http://perso.wanadoo.fr/pwillifr/pwpage41.htm
V. DE L’ANNONCE DU DIAGNOSTIC A LA PRISE EN CHARGE
V.1. L’annonce de la maladie (61)
V.1.a. L’annonce vue par les parents
L’annonce d’un handicap (maladie, malformation de quelque nature que ce soit) reste
toujours un moment très éprouvant pour les parents. Apprendre que leur enfant est ou sera
très différent de ce à quoi ils s’attendent, provoque beaucoup d’émotions.
Après une phase initiale de sidération, de pleurs voire de révolte, la plupart des parents
finissent par assumer leur enfant tel qu’il est avec sa maladie et ses contraintes, et très peu
vont au bout d’une démarche d’abandon réel.
Certes, la souffrance parentale ne peut être évitée mais il faut accompagner le lent
processus d’adaptation des parents à la maladie de leur enfant, en respectant leur rythme.
Il est important de suivre les recommandations de la circulaire du 29 Novembre 1985,
modifiée en 2002 (18 Avril 2002). Cette circulaire, relative à la sensibilisation des
personnels de maternité à l’accueil des enfants nés avec un handicap et de leur famille fait
référence à l’accompagnement des parents et à l’accueil de l’enfant lors de l’annonce pré
et postnatale d’une maladie ou d’une malformation : donner l’information aux deux
parents en même temps, ne pas en dire trop pour leur laisser le temps de poser à leur
rythme les questions qui les préoccupent, travailler avec des sujets compétents par rapport
à la maladie, autant de points primordiaux car l’annonce du diagnostic est le point de
départ de la prise en charge.
V.1.b. L’annonce vue par le médecin
Il n’existe pas de « mode d’emploi ». L’expérience du médecin est un facteur déterminant
dans la qualité de l’annonce faite à des parents. Dans tous les cas, il ne faut ni minimiser
ni dramatiser la situation.
Pour le médecin hospitalier qui annonce le diagnostic, il est souhaitable de recevoir les
parents ensemble dans un bureau isolé, en faisant rapidement intervenir les autres
membres de l’équipe de prise en charge (diététicienne, kinésithérapeute, etc). Expliquer
aux parents le rôle respectif de chacun des membres permet une meilleure compréhension
des conséquences et des complications liées au syndrome.
Le médecin généraliste doit travailler en lien avec l’équipe de Pédiatrie, pour être informé
de ce qui s’est déjà dit entre les parents et les médecins hospitaliers. S’il reste isolé, il va
prendre de plein fouet l’angoisse des parents sans être préparé.
Il ne doit pas hésiter à joindre l’équipe hospitalière et cette mise en contact des équipes
médicales avec le médecin traitant a généralement un effet très rassurant sur les familles,
quasiment psychothérapeutique. Ce lien valorise leur enfant : ils voient que l’on continue
à s’intéresser à lui et à eux, malgré les difficultés.
Face à la maladie, pour pouvoir être « soutenant », il faut soi-même être en sécurité. Une
bonne connaissance biomédicale du syndrome est indispensable mais les médecins
généralistes doivent également apprendre à maîtriser leurs émotions. Des programmes de
formations autour de l’annonce du handicap, réunissant tous les acteurs y compris les
médecins généralistes existent déjà dans certaines régions.
Le médecin généraliste comme le médecin hospitalier doivent savoir écouter et
accompagner ces parents dans le parcours long et douloureux de la maladie.
V.2. La prise en charge et le suivi du patient atteint du SWP
La prise en charge est globale, multidisciplinaire et s’articule autour de quelques axes
principaux.
La diététique
Il ne s’agit pas de répéter la prise en charge et la thérapeutique de l’obésité infantile dans
le SWP, précédemment décrit.
Nous allons cependant apporter quelques précisions sur l’alimentation et le régime en
fonction de l’âge de l’enfant.
- Dans la prime enfance, l’enfant hypotonique présente des difficultés d’alimentation. Un
gavage à la sonde en milieu hospitalier s’avère souvent nécessaire au cours des trois
premiers mois. Ensuite, il est conseillé d’utiliser des biberons avec des tétines usagées et à
larges trous ou des biberons cuillères prévues pour les fentes palatines (cf. annexe pour les
adresses de deux établissements en ville) (57). Le contact avec une diététicienne peut
paraître prématuré dès les premiers jours de vie, mais il s’agit de ne pas commettre
d’erreur dès le départ. En particulier, il est indispensable de ne pas donner à l’enfant le
goût du sucré (par exemple : éviter les jus d’orange). D’un autre côté, on va expliquer les
risques aux parents d’une « sous-alimentation » car ils auraient tendance à trop restreindre
l’apport calorique pour éviter la surcharge pondérale et ses conséquences (68).
- A partir de 2 ans, l’obésité s’installe en l’absence de traitement. Un régime
hypocalorique, adapté et équilibré, compris par toute la famille et l’entourage doit être
entrepris avec l’aide d’un médecin nutritionniste et/ou une diététicienne, si la prise en
charge par ces intervenants n’a pas encore été effectuée (57).
L’activité physique doit être associé au régime. Il existe d’ailleurs un programme sportif
nommé le « Special Olympics » qui a été crée en 1968 par Eunice Kennedy Sriver, sœur
de John Fitzgerald Kennedy et qui permet aux adultes et enfants de plus de 8 ans ayant un
handicap mental de suivre toute l’année des entraînements et compétitions. Sa mission est
de donner la possibilité à toute personne handicapée mentale, quelque soit son niveau
pratique, de connaître la joie de participer à une compétition.
En marge de ce programme sportif, « Special Olympics » a souhaité apporter une aide
concrète en soutenant les parents confrontés aux problèmes posés par le handicap de leur
enfant. Ce programme offre la possibilité aux parents d’enfants handicapés de se réunir et
d’échanger entre eux leurs expériences face aux difficultés rencontrées. Toutes les
prestations sont gratuites : soutien psychologique, création de réseaux d’entraides, espaces
de parole, conférences à thème, forum familial…
Leur devise est la suivante : « Je veux gagner, mais si je ne peux pas, je ferai preuve de
courage dans mes efforts ». Une récente lettre adressée à l’association Prader-Willi France
par une mère dont la petite fille est atteinte du SWP et ayant participé à ce programme
sportif, exprime la joie et le soutien procurés à l’enfant et à son entourage.
La Fédération Française de Sport adapté (au handicap) et « Special Olympics » ont
reconnu leur complémentarité et leurs spécificités dans une convention leur permettant
d’unir leurs efforts pour promouvoir à l’avenir la pratique du sport au sein des
établissements ou associations sportives qui accueillent des handicapés mentaux (42).
- C’est à l’adolescence, que les problèmes sont les plus aigus, avec les accès de boulimie.
Le maintien du régime est indispensable pour prévenir l’apparition des complications de
l’obésité à l’âge adulte (57).
La kinésithérapie
Elle doit être instituée précocement afin de lutter contre l’hypotonie majeure chez ces
enfants.
On distingue la kinésithérapie d’éveil et motrice (63) :
La kinésithérapie d’éveil
L’évolution de la locomotion dépend à la fois de la potentialité cérébromotrice et des
expériences rencontrées par l’enfant pour permettre les apprentissages. La potentialité
cérébromotrice comprend un ensemble de mécanismes régulateurs de la motricité
s’exprimant dans :
- la fonction posturale
- la fonction antigravitaire
- la fonction de locomotion
- le pouvoir de sélectivité de la commande volontaire.
Chez l’enfant atteint du SWP, avec l’hypotonie et l’absence de réflexes archaïques, il est
nécessaire plus de rééduquer, d’éduquer toutes ces fonctions composant la potentialité
cérébromotrice.
Habituellement, un grand nombre de schèmes neuromoteurs, nécessaires à l’organisation
motrice, sont présents à la naissance. Un schème neuromoteur est un ensemble de
constructions organisées prévisible dans l’espace, mettant en jeu les chaînes musculaires
telles que l’axe corporel et/ou les membres. Dans le cas d’un nourrisson atteint du
syndrome, il faut l’éduquer à ces schèmes neuromoteurs, lui montrer ce qu’il peut faire
puis le stimuler.
Il s’agit d’un travail précoce, dès le premier mois, portant essentiellement sur cette
hypotonie. Deux séances par semaine sont recommandées pour encourager l’enfant à se
mouvoir. La stimulation visuelle, tactile et auditive par les parents est importante, mais
doit rester ludique.
La kinésithérapie motrice
Elle doit être régulière, passive, motrice, et poursuivie à la même fréquence. Les
acquisitions locomotrices de l’enfant se réalisent par étapes successives, appelées les
niveaux d’évolution motrice.
Ceux-ci représentent les enchaînements de mouvements conduisant l’enfant de la position
allongée à la position assise, puis debout et enfin à la marche libre.
La progression du contrôle du corps se fait du haut vers le bas : tenue de la tête, contrôle
du bassin puis celui des jambes.
- La première étape est la tenue de la tête ; elle va être travaillée en suspension ventrale et
latérale, en position allongée (ou semi-allongée) et ventrale (position très inconfortable
chez ces enfants, les muscles des bras ayant une force insuffisante pour leur permettre de
se redresser). La première étape est achevée lorsque l’enfant tient sa tête bien droite, la
tourne sans difficulté à droite et à gauche à la recherche d’un objet, d’un son ou d’une
personne qu’il a vu ou entendu. L’apprentissage du retournement se fait à ce stade.
- La deuxième étape est celle de la station assise. Elle s’obtient progressivement par un
renforcement du tonus des muscles du dos puis des cuisses. Le kinésithérapeute va insister
sur la fonction « parachute » et sur l’équilibre en appui assis, sur une fesse puis sur les
deux.
La fonction « parachute » consiste à éduquer l’enfant sur la position de ses bras afin
d’éviter la chute lorsqu’il est en position assise. Concernant l’appui sur une fesse, la
réponse en balancier du membre inférieur du côté opposé à l’appui n’étant pas présente
chez ces enfants, il est nécessaire de leur montrer de la main le mouvement, à plusieurs
reprises, en leur soulevant le membre du côté opposé à l’appui afin de développer la
sensation et obtenir la bonne réponse.
- La troisième étape repose sur la séquence de redressement de la position allongée à la
position debout : sur le dos retournement sur le ventre position du sphinx (le but de
cet exercice est que l’enfant en position sur le ventre se redresse en appui sur ses mains)
marche à quatre pattes position du lapin position du chevalier servant (il s’agit de
faire sentir à l’enfant l’appui sur un pied au sol, l’autre appui est sur le genou) et enfin
la position debout.
- La quatrième étape est la station debout et son corollaire : la marche. L’enfant joue en
passant de la position assise à debout, en tournant autour d’une table avec appui, en se
lâchant entre deux chaises. Ensuite, l’étape de la marche est très personnelle, comme pour
tous les autres enfants. L’enfant décide du moment opportun : il a tout en main. Pour le
SWP, l’âge moyen de la marche se situe entre 18 et 24 mois, avec des extrêmes pouvant
aller jusqu’à 4 ans ; mais sauf exception, tous les enfants arrivent à marcher.
La psychomotricité
Elle est d’autant plus importante qu’il existe souvent des problèmes d’équilibre et de
motricité fine. Parallèlement à la kinésithérapie,elle facilite l’acquisition de la marche(57).
En général, le rythme le plus adapté à ces enfants correspond à deux séances d’une demiheure par semaine. En effet, il existe des troubles de l’attention, une certaine fatigabilité
associée à l’hypotonie. La prise en charge reste individuelle, adaptée aux besoins de
l’enfant mais peut s’établir dès les premiers mois.
Selon les intervenants, la présence des parents au cours de la séance est primordiale ;
ainsi, certains gestes simples et non contraignants pourront être reproduits à domicile et
favoriser les progrès (par exemple : comment relever un nourrisson de la table à langer en
améliorant son tonus musculaire mais aussi en ménageant le dos de sa maman) (78).
Les exercices et les objectifs sont différents en fonction de l’âge de l’enfant : au début, le
travail est plutôt basé sur le renforcement du tonus, puis sur la concentration, l’attention.
Ensuite, les efforts portent sur la structuration spatiale (en haut, en bas, à gauche, à droite,
dessous, dessus), temporelle, sur la structuration conceptuelle (sériation, couleur) puis sur
la préparation à l’écriture (l’acquisition de la préhension fine est nécessaire à la tenue du
crayon avant même d’envisager l’apprentissage du graphisme). Divers objets (ballons,
puzzles, boulier, perles, cubes, briques, etc) vont aider l’enfant à progresser. Il est curieux
de constater que souvent, l’enfant est attiré par le jeu qui est le plus adapté à son handicap.
Cette prise en charge va permettre de guider l’enfant dans les apprentissages de la vie
quotidienne et de la vie sociale en collectivité.
Si elle apparaît primordiale, la psychomotricité n’est cependant pas prise en charge en
libéral dans le cadre du SWP, et les parents doivent alors s’adresser à un CAMSP, un
SESSAD (Service d’éducation spéciale et de soins à domicile) ou à un CMPP (Centre
Médico-Psycho-Pédagogique) qui assurent une prise en charge à 100%, à raison de deux
séances par mois en moyenne, à partir de 18-24 mois.
En revanche, si les consultations ont lieu en libéral, il n’y a pas de prise en charge et la
fréquence est à fixer en fonction de l’enfant et de la disponibilité du psychomotricien qui
s’en occupe (78).
Concernant les structures d’aides aux enfants porteurs d’un handicap, on distingue (37) :
-
Les CAMSP accueillent les enfants de l’âge de 0 à 6 ans. Ils sont soit polyvalents, soit
spécialisés dans certains handicaps.
Il existe des kinésithérapeutes, des psychomotriciens et des orthophonistes sur place
qui travaillent en collaboration avec l’équipe médicale et qui assurent la prise en
charge et le suivi des enfants atteints du SWP.
-
Les SESSAD sont prévus pour les patients de 0 à 20 ans. Leur fonction est similaire à
celle des CAMSP, avec des séances à domicile ou sur le lieu d’intégration.
-
Les CMPP accueillent les enfants atteints de déficience intellectuelle associée ou non
à des troubles neuropsychiques. Ces structures peuvent comprendre soit un IMP
(Institut Médico-Pédagogique) de 3 à 14 ans ou un IMPro (Institut MédicoProfessionnel) de 14 à 20 ans. En fonction de leur âge, les jeunes patients sont pris en
charge, comme dans les CAMSP ou les SESSAD. Il existe des externats médicopédagogiques dont la fonction est semblable à celle des CMPP.
Pour le praticien hospitalier comme le médecin généraliste, il est important de connaître
l’existence et le fonctionnement de ces structures afin d’orienter les parents et assurer une
prise en charge polyvalente de ces enfants et ce dès le plus jeune âge.
L’orthophonie et la phoniatrie
Pour tous ces enfants, le suivi orthophonique s’effectue à trois niveaux (60) :
-
mécanique : développement physiologique et organique (déglutition, respiration,
position de la langue par rapport aux dents et au palais…)
-
cognitif : connexions au niveau du cerveau
-
communicatif : usage de la parole. Le babillage en est la première manifestation.
Le développement mécanique (orthophonie bucco-faciale) (17)
Le fait de manger précède celui de parler. Il y a d’abord l’organisation de la succion, puis
l’organisation du mode de déglutition, et enfin l’organisation de la mastication.
Stimuler la sensibilité et la motricité bucco-faciale du tout petit a pour but de faciliter son
alimentation et de préparer l’acquisition du langage parlé.
C’est pour cela que l’orthophonie peut être débutée dès le premier mois, à la fréquence
d’une consultation par semaine, soutenue par l’accompagnement des parents (6).
Le matériel de déglutition et d’alimentation est composé des lèvres, des joues et de la
langue et l’enfant utilise ces trois éléments pour organiser la succion. Ceci est difficile à
réaliser pour un enfant hypotonique. Il existe plusieurs façons d’aider ces bébés : par le
matériel (tétine, biberon coudé, épaississement du lait) et par la position (assise, tête
inclinée en avant) permettant ainsi d’éviter les fausses routes favorisées par la non tenue
de la tête. La succion et la déglutition sont alors améliorées.
Au moment de la diversification, il faut une bonne organisation de la langue, des dents et
des muscles. Les enfants hypotoniques vont avoir du mal à gérer avec la langue ce qui leur
est donné ; il faut commencer très tôt à stimuler les côtés de la bouche au lieu de leur
donner la nourriture de face.
Pour assurer l’étape suivante de la mastication, il faut que les prémolaires soient en place
et que la langue se déplace. Pour cela, il va y avoir un guidage, un apprentissage et un
renforcement chez l’enfant pendant ces séances d’orthophonie. La mastication a une
importance évidente parce qu’elle va permettre une meilleure digestion, une meilleure
utilisation des nutriments et par là même jouer sur les problèmes de poids (en effet, si la
mastication est mal effectuée, seuls les lipides seront absorbés).
Très tôt, il faut encourager ces enfants à boire à la paille pour stimuler les muscles du
pourtour de la bouche et aider à la fermeture de celle-ci. Combiné à une bonne déglutition,
cet exercice permet d’éviter le « bavage » excessif.
Le développement communicatif (17)
Pour la mise en place de l’articulation, de la parole et du langage, ces enfants ont besoin
de souffle. Ce souffle est géré par des muscles qu’il faut stimuler, notamment ceux de la
sangle abdominale.
L’orthophoniste travaille alors en premier lieu au niveau de la respiration, puis élabore
avec l’enfant des techniques de communication par le jeu, par des mots, des pictogrammes
ou bien par l’éveil musical (la musique peut être un soutien de la parole). Il essaie de
progresser en sollicitant les cinq sens de l’enfant (la vision, le toucher, l’audition, l’odorat
et le goût) pour obtenir un maximum de stimulations.
La prise en charge cible également des problèmes spécifiques propres à ces patients
comme par exemple (6) : une articulation imprécise, des insuffisances grammaticales,
l’acquisition des phonèmes, la pauvreté du vocabulaire, les difficultés mnésiques et
syntaxiques, les persévérations ou encore les difficultés en logique mathématique, en
graphisme et dans l’acquisition des concepts abstraits.
La compréhension est généralement bonne chez ces enfants mais la plupart du temps sousestimée, du fait d’un retour médiocre de l’information.
Le rythme des séances doit rester soutenu, plutôt en séances courtes mais répétées (2 fois
par semaine) afin de ne pas fatiguer ni lasser l’enfant.
Le développement cognitif s’élabore progressivement et participe au bon déroulement des
deux étapes (prise en charge bucco-faciale et acquisition de la parole et du langage).
Finalement, au terme de la rééducation orthophonique, l’enfant aura travaillé sur des
notions spatiales, une bonne acuité visuelle, la mémorisation dans le temps, une bonne
perception auditive et une pensée bien organisée qui sont toutes des notions capitales pour
les futurs apprentissages abstraits que sont la lecture et l’écriture.
Dès 5/6 ans, on peut encourager le contact avec le langage écrit et la lecture, le langage
oral continuera de se construire en parallèle. L’enfant reconnaît d’abord des formes
générales, des sigles et comprend la correspondance entre un sigle et un mot. Il reconnaît
la forme des lettres, compare et reconnaît ce qui est pareil. Il apprend ensuite les
correspondances entre les lettres et les sons, et parvient enfin à reconnaître un mot puis
progressivement, un dictionnaire interne se met en place dans son cerveau.
Il est important que l’orthophoniste et les parents travaillent en coordination avec
l’instituteur ou l’institutrice, informé(e) du handicap, afin de progresser au rythme de
l’enfant (59).
Du milieu scolaire au milieu professionnel
Malgré les difficultés d’apprentissage et de langage, ces enfants tirent un grand bénéfice
d’une scolarisation en école maternelle dès 3 ans (57). Ils y feront des progrès comme et
avec les autres enfants. L’intégration dans des classes ordinaires peut prendre plusieurs
formes (37):
- une intégration individuelle sans soutien spécialisé
- une intégration individuelle avec le soutien spécialisé
•
d’un réseau d’aide aux enfants en difficulté (aide individuelle
pédagogique et rééducative)
•
d’un CAMSP, d’un CMPP ou d’un SESSAD.
Il existe également une scolarisation dans un circuit particulier de l’Education Nationale :
o les classes d’intégration scolaire (CLIS) qui accueillent les enfants dans le
primaire,
o les sections d’enseignement général et professionnel adapté (SEGPA) qui
accueillent les jeunes de 12 à 15 ans d’un niveau de CE2 ; le travail scolaire est
associé à un travail en atelier (CAP),
o les établissements régionaux d’enseignement adapté (EREA) ou les lycées
d’enseignement adapté (LEA) qui accueillent des jeunes de 12 à 16 ans ayant un
niveau permettant la préparation d’un BEP ou d’un baccalauréat professionnel.
Il existe une commission départementale d’éducation spéciale (CDES) chargée des
enfants handicapés de moins de 20 ans et qui intervient pour apprécier le handicap en vue
de l’attribution d’aide financière et pour orienter le jeune vers un établissement scolaire ou
spécialisé.
Elle transmet le dossier et ses pouvoirs à la commission de circonscription pour
l’enseignement préscolaire et scolaire (CCPE), concernant les élèves du primaire. Elle fait
appel à la commission de circonscription pour l’enseignement du second degré (CCSD),
concernant les élèves du second degré (37).
Les enfants qui ne peuvent intégrer une CLIS (en raison de troubles majeurs de la
communication, du comportement ou encore parce que le nombre de places est limité)
peuvent bénéficier, dans certaines régions (comme à Grenoble), d’une structure récente
baptisée SASSE (Service d’Accueil Scolaire et de Soutien Educatif) qui s’occupe de ces
enfants handicapés en attente d’une orientation vers un établissement spécialisé,
parallèlement au suivi dans les autres structures (CAMSP, SESSAD, CMPP …).
Un enseignant et un éducateur spécialisé plein temps travaillent au sein du SASSE et
ciblent ensemble les problèmes spécifiques à chaque enfant afin de lui permettre de
progresser et de réintégrer ensuite le circuit scolaire.
Cette structure rend de grands services à des familles confrontées à l’impossibilité
d’inscrire leur enfant à l’école ou bien au fait que l’accueil proposé étant trop réduit, ces
parents préfèrent garder leur enfant à la maison (47).
Conjointement aux enseignants et aux éducateurs, les auxiliaires d’intégration ou
auxiliaires de vie scolaire (AVS), de création également très récente, accompagnent les
enfants qui ont besoin de leur contribution pour la mise en œuvre de leurs projets
individuels de scolarisation et de socialisation. Cela permet aux jeunes patients de
développer leurs capacités d’autonomie, de socialisation et d’apprentissage (47).
Les SASSE et les AVS évitent « l’exclusion » scolaire, sociale de ces enfants handicapés
et l’on ne peut qu’espérer un développement de ces structures sur l’ensemble du territoire.
En fonction des aptitudes et des progrès, chaque enfant atteint du SWP bénéficiera de la
structure scolaire la mieux adaptée, propice à son épanouissement et à la réalisation d’un
projet professionnel.
A l’âge adulte, ces patients doivent être placés dans un cadre adapté et suffisamment
protecteur leur permettant d’exprimer leurs possibilités. L’intégration professionnelle
revêt alors plusieurs formes. Il peut s’agir (57) :
- d’un emploi protégé en milieu ordinaire de travail avec service d’accompagnement
- d’un atelier protégé ou d’un CAT avec foyer d’hébergement et avec un régime
alimentaire adapté
- d’un foyer de vie en cas d’autonomie réduite.
Les autres problèmes (57)
* sur le plan cutané : la tendance excessive au prurit favorise le risque de plaie et de
surinfection qu’il faut dépister et traiter précocement.
* sur le plan orthopédique : Une recherche systématique annuelle de scoliose est
souhaitable. Une surveillance spécialisée avec le recours à la chirurgie peut s’avérer
nécessaire.
A noter, l’existence de sièges orthopédiques conçus pour prévenir l’apparition d’une
déformation scoliotique. Le médecin de famille établit une prescription ALD de : « Bon
pour un siège moulé remboursé sur socle inclinable à roulette ». L’orthopédiste effectue
les mesures et envoie la demande de prise en charge à la Sécurité Sociale (5).
* sur le plan ophtalmologique : En raison des risques de myopie et de strabisme, un suivi
régulier est indispensable.
* sur le plan dentaire : Pour prévenir l’apparition de caries, il faut, très tôt, aider les
enfants à se brosser les dents.Un bilan bucco-dentaire annuel (avec détartrage) est
indispensable dès l’âge de 2-3 ans.
Cette prise en charge, par différents intervenants, est onéreuse. Heureusement, diverses
aides financières permettent à l’enfant atteint du SWP (et à ses parents) d’accéder aux
soins et aux structures spécialisées dans le handicap.
Parmi ces aides (37):
- La prise en charge à 100% ou l’exonération du ticket modérateur
Elle peut être obtenue pour les maladies génétiques nommément inscrites sur la liste des
30 maladies de longue durée (ALD 30) qui bénéficient d’une prise en charge systématique
(par exemple : hémophilie) ou par une maladie dont les conséquences figurent sur cette
liste (par exemple : cardiopathie congénitale mal tolérée).
Elle peut être également obtenue pour toute « forme évolutive et invalidante d’une forme
grave ne figurant pas sur la liste » (tel que le SWP).
Le médecin doit en faire la demande auprès de la Caisse Primaire d’Assurance Maladie
dont dépend l’enfant par un formulaire spécifique.
- Les prestations extralégales
Certains matériels, comme les poussettes pour enfant handicapé, ne sont pas pris en
charge dans le cadre de prestations légales, mais on peut faire une demande d’aide
spéciale auprès de la CPAM.
- Les allocations en cas d’enfant handicapé
* L’allocation d’étude spéciale (AES) est destinée à aider les familles pour compenser une
partie des dépenses supplémentaires qu’occasionne l’éducation d’un enfant handicapé.
Elle est attribuée à un enfant de moins de 20 ans, atteint d’une incapacité permanente d’au
moins 80%, ou de 50 à 80%, s’il est pris en charge dans un établissement d’éducation
spéciale ou de soins à domicile.
Il existe trois catégories d’AES selon la dépendance de l’enfant :
-
1ère catégorie si l’enfant a besoin d’une aide discontinue ou si son handicap entraîne
des dépenses équivalentes.
-
2ème catégorie si l’enfant a besoin d’une aide continue pour tous les gestes de la vie
quotidienne ou si son handicap entraîne des dépenses équivalentes.
-
3ème catégorie lorsque deux conditions sont satisfaites : une condition médicale
lorsque la gravité du handicap nécessite des soins de « haute technicité » ou entraîne
une totale dépendance et une condition administrative qui implique la cessation
d’activité d’un des parents ou le recours à une tierce personne rémunérée.
La demande est à faire auprès de l’organisme qui verse les prestations familiales ou par
l’intermédiaire du Centre Communal d’Action Sociale (CCAS). La décision est prise par
la CDES pour une période de 1 à 5 ans.
* Les aides de garde d’enfant se présentent sous deux formes : allocation de garde
d’enfant à domicile ou aide à l’emploi d’une assistante maternelle agrée.
* Les bourses d’enseignement d’appoint et d’adaptation sont destinées aux familles dont
l’enfant handicapé demeure en milieu scolaire. Elles sont accordées par le service des
bourses du rectorat, mais la situation financière de la famille est prise en compte, et elle ne
peut être cumulée à l’AES.
- La carte d’invalidité
Elle est attribuée pour un taux d’incapacité égal ou supérieur à 80%. Elle peut être
accompagnée d’un macaron automobile de grand invalide civil (GIC). La demande est à
adresser à la CDES dans les 3 mois suivant la constatation de l’incapacité. Cette carte
octroie des avantages dans les transports, la réduction du calcul de l’impôt…
- La prise en charge des transports
Elle s’applique pour les transports :
* sanitaires dans le cadre d’hospitalisation ou d’examens rentrant dans le cadre de
l’ALD (100%)
* scolaires ou universitaires si l’incapacité est égale ou supérieure à 80%.
- La prolongation du congé parental est possible jusqu’à un an au-delà du troisième
anniversaire de l’enfant, si le handicap ouvre droit à l’AES.
Ces aides financières assurent à l’enfant atteint du SWP une prise en charge optimale et
un suivi régulier indispensables au bon épanouissement de l’enfant et de son entourage.
Les troubles du comportement (57)
Précédemment décrits, ces troubles du comportement, très variables d’un enfant à l’autre,
nécessitent une prise en charge et un suivi psychologique (parfois, psychiatrique) dès le
plus jeune âge.
Toutefois, il faut souligner l’importance de l’environnement. Ces enfants ont besoin de se
sentir aimés et reconnus. Ils supportent mal le bruit, l’agitation et l’agressivité, même
lorsque celle-ci n’est pas dirigée contre eux.
A l’adolescence, période où les troubles comportementaux semblent être les plus violents,
un cadre clair, sécurisant et stable associé au suivi psychologique et/ou psychiatrique leur
est bénéfique.
Dans le cadre d’un accompagnement psychothérapeutique, la rencontre avec d’autres
jeunes atteints du syndrome, en particulier ceux qui, un peu plus âgés, « s’en sortent
plutôt bien » peut être très positif, car souvent ces jeunes patients souffrent de ne pas
avoir de modèle auquel s’identifier. Finalement, la poursuite d’un cadre adapté à l’âge
adulte semble même diminuer les troubles du comportement.
Le traitement hormonal (67)
Nous avons vu que le traitement par hormone de croissance (GH) augmente la vitesse de
croissance et améliore la composition corporelle au profit de la masse musculaire
(indépendamment de la présence ou non d’un déficit en GH).
Dans le cadre du bilan pré et per-thérapeutique :
•
Il semble logique, mais non nécessaire, de réaliser une exploration de l’axe
somatotrope avant la mise en route du traitement (au moins un test de stimulation
de la sécrétion de GH et un dosage d’IGF1). Des radiographies du rachis sont
réalisées systématiquement afin de vérifier l’absence de déformation scoliotique.
Un bilan thyroïdien (T4L et T3, TSHus) et un test d’hyperglycémie provoquée par
voie orale (HGPO) sont également effectués (il existe un déficit hypothalamique
central associé dans 30% des cas et rappelons également que la GH est une
hormone hyperglycémiante).
•
Sur le plan clinique, une fois le traitement instauré, la surveillance repose sur :
- l’étude des données anthropométriques (taille, poids et IMC) à chaque
consultation (environ tous les 3-6 mois). Les signes pubertaires sont surveillés.
- la recherche systématique de scoliose à chaque consultation. Le suivi
orthopédique est indispensable.
•
Sur le plan radiologique :
- des radiographies du rachis sont régulièrement effectuées en fonction des signes
d’appel cliniques (douleurs, apparition d’une gibbosité, etc).
- une étude de la composition corporelle par absorptiométrie biphotonique aux
rayons X est réalisée une fois par an (avec mesure de l’âge osseux).
•
Sur le plan biologique, les paramètres surveillés dans le cadre de tout traitement
par GH sont évalués en moyenne une fois par an :
- hormones thyroïdiennes, dosage de TSHus et bilan phosphocalcique.
- bilan d’une anomalie lipidique (cholestérol total, triglycérides, LDL et HDL
cholestérol) et bilan glucidique (glycémie et insulinémie à jeun, HBA1C).
Un examen clinique standard à chaque consultation (pression artérielle, pouls,
auscultation cardiopulmonaire…) complète le suivi global des ces enfants traités par GH.
L’intérêt du traitement doit être réévalué tous les ans, en tenant compte à la fois des
bénéfices attendus sur la croissance et la composition corporelle et des résultats
biologiques et paracliniques.
Le traitement est stoppé en cas (4) :
- d’apparition ou d’évolution d’un processus tumoral
- après l’âge de 14 ans ou une vitesse de croissance sous traitement
inférieure à 3 cm par an (quelque soit l’âge).
Utilisé seul, le traitement par GH n’est que d’une efficacité modérée. Il est indispensable
de continuer à observer le régime et d’encourager au maximum la pratique du sport.
Au-delà des bénéfices sur le plan statural et corporel, on s’attend à ce que les enfants
traités se sentent mieux dans leur peau, moins « différents » ce qui ne peut que faciliter
leur intégration sociale et scolaire, et par là même atténuer les troubles du comportement
qui accompagnent souvent le syndrome (4).
Le traitement par GH est instauré à l’hôpital par des spécialistes en pédiatrie et/ou en
endocrinologie, généralement dans le cadre de la consultation multidisciplinaire, créé en
1999 (55). Elle a pour but d’améliorer la prise en charge des enfants atteints du SWP en
réunissant lors d’une seule consultation les divers intervenants médicaux et paramédicaux
impliqués dans cette pathologie. La consultation est organisée en fonction des besoins et
des priorités de l’enfant car souvent, il est difficile de voir tous les spécialistes et
paramédicaux le même jour.
Par ailleurs, cette consultation est aussi l’occasion de faire le point non seulement sur
l’aspect médical (en initiant, par exemple, un traitement par GH) mais aussi sur l’aspect
de prise en charge médico-sociale, médico-éducative et rééducative (55).
Finalement, le traitement par GH est une avancée majeure à la fois pour la prise en charge
de ces enfants (il s’intègre dans une démarche de consultation multidisciplinaire), pour la
connaissance de la physiopathologie du syndrome et pour la motivation de l’équipe
soignante et des familles.
Au total, le suivi au long cours, coordonné, mettant en étroite collaboration les médecins
spécialistes (pédiatres, endocrinologues), les acteurs paramédicaux, socio-éducatifs et le
médecin traitant est le princeps indispensable à l’épanouissement physique, moteur,
intellectuel et social de l’enfant atteint du SWP.
Le médecin généraliste, informé sur la maladie et sur son évolution naturelle, est à même
de dépister et de prévenir l’obésité (surveillance des courbes poids/taille et IMC sur le
carnet de santé, bilan glucidique et lipidique annuel, surveillance de la TA). Il oriente les
parents vers les structures de prise en charge spécialisés (prise en charge kinésithérapique,
orthophonique et en psychomotricité ; orientation scolaire) et reste, parallèlement au suivi
psychologique et/ou psychiatrique, un interlocuteur de première intention en cas de
situation de crise.
Il ne s’agit pas d’incomber toutes les tâches et le mérite au médecin généraliste mais
plutôt de renforcer sa place dans la prise en charge du patient atteint du SWP, afin de
modifier et d’optimiser la présentation et l’évolution de la maladie.
TROISIEME PARTIE
ANALYSE ET REFLEXION SUR LES
DOSSIERS MEDICAUX
A. HISTOIRES VRAIES
La prise en charge globale et multidisciplinaire autour de l’enfant atteint du SWP vise à
prévenir l’obésité et à favoriser le développement des fonctions psychomotrices,
cognitives et intellectuelles. L’évolution et les progrès s’apprécient sur le long terme.
Un suivi au long cours, régulier et coordonné, le plus précoce possible, réévalue à chaque
consultation, les besoins médicaux de l’enfant et facilite son intégration en milieu scolaire
puis dans la vie professionnelle.
C’est l’occasion au cours de ce suivi, de dialoguer et d’écouter les parents, et leur
proposer une prise en charge psychologique, si elle s’avère nécessaire.
En pratique, nous avons analysé six dossiers médicaux de patients atteints du SWP et
suivis à l’hôpital de Villeneuve-Saint-Georges (VSG) dans le service du Dr Guillot.
Il s’agit d’une étude rétrospective avec comparaison des cas avec la littérature.
Ces histoires sont à la fois toutes semblables et différentes. Elles impliquent de nombreux
acteurs de santé, dont le médecin généraliste que nous avons contacté pour chacun d’entre
eux. Nous résumerons leur rôle, leurs attentes et leurs réponses pour chaque histoire
respective.
I. L’HISTOIRE DE TONY F.
Tony est né le 26 Mars 1999 à la Maternité de l’hôpital privé Claude Galien à Quincysous-Sénart (91).
Dans les antécédents familiaux, on note une trisomie 21 chez un grand-oncle maternel.
Les parents, d’origine Portugaise, sont issus de germains (leurs pères respectifs sont
cousins au premier degré). Tony est le 2ème enfant du couple. Kevin, l’aîné, né en 1994 est
bien portant.
La grossesse a été marquée par l’existence d’un retard de croissance intra-utérin (RCIU)
diagnostiqué à 31 semaines d’aménorrhée. Mme F. est hospitalisée pour surveillance à
partir de 35 semaines.
L’accouchement a lieu le 26 Mars 1999, par césarienne, au terme de 36 semaines
d’aménorrhées et 6 jours en raison de la stagnation de la croissance fœtale et un rythme
cardiaque anormal. Le score d’Apgar est à 9 à 1 minute puis à 10 dès la 3ème minute de
vie. Tony pèse 1840g, il mesure 45 cm et son périmètre crânien est de 31,3 cm.
L’examen clinique à une heure de vie trouve un enfant hypotonique, peu réactif. Il est
transféré à l’hôpital de Villeneuve-Saint-Georges pour prématurité, RCIU et hypotonie.
A son arrivée, l’examen est marqué par l’existence d’une hypotonie massive associée à
une hyporéactivité et une mobilité spontanée extrêmement faible. La succion est quasinulle et les autres réflexes ne sont pas (ou peu) retrouvés (Moro incomplet, grasping
discret et pas de réflexe de marche). Il n’y a pas de dysmorphie faciale évidente mais des
anomalies au niveau des organes génitaux externes : micropénis avec ectopie testiculaire
bilatérale. Le reste de l’examen clinique est sans particularité.
L’évolution, sur le plan neuromoteur, est très lente, avec une mobilité spontanée plus riche
et une diminution progressive de l’hypotonie au cours du premier mois de vie (surtout au
niveau périphérique). On note un contact oculaire avec ébauche de poursuite à partir de 3
semaines.
Sur le plan digestif, en l’absence d’autonomie alimentaire, l’enfant sera mis en gavage
gastrique continu puis discontinu, avec alimentation au biberon à partir du 17 Avril 1999
devant la présence d’un réflexe de succion débutant. Le gavage est ensuite définitivement
stoppé avec alimentation exclusive au biberon à partir de l’âge de 1 mois.
Un bilan étiologique est effectué comprenant la recherche du SWP : l’hypotonie massive
avec difficultés alimentaires et l’hypogénitalisme évoquent fortement le diagnostic dès la
période néonatale.
Le caryotype en haute résolution avec méthode de FISH confirme le diagnostic suspecté
et la maladie est annoncée aux parents alors que Tony est âgée de 1 mois.
L’enfant quitte le service quinze jours plus tard avec retour au domicile. Son poids de
sortie est de 2600g. Il sera régulièrement suivi en consultation par le Dr Dubrez puis le
Dr Guillot.
Le bilan paraclinique :
Seront réalisés les examens suivants :
- une échographie transfontanellaire (hémorragie ventriculaire gauche minime avec
cervelet hyperéchogène)
- un scanner cérébral à 5 jours de vie (absence d’élément hémorragique, cavités
ventriculaires de taille normale, cervelet normal)
- un électroencéphalogramme
- un bilan ophtalmologique (fond d’œil)
- un bilan endocrinien (dosage du cortisol et de la 17α- hydroxy-progestérone)
- une recherche exhaustive de pathologie infectieuse
- une recherche de cytomégalovirus (virémie et virurie)
- un caryotype en haute résolution avec méthode de FISH
Le diagnostic sera finalement porté par le caryotype avec présence d’un signal
d’hybridation (pour les sondes D15S11 et SNRPN) sur un seul des deux chromosomes 15
affirmant l’existence d’une microdélétion 15q11-13 chez l’enfant.
Les caryotypes parentaux sont normaux. Il s’agit donc d’une anomalie sporadique, sans
risque ultérieur en principe pour la descendance.
Le suivi et la prise en charge
Les différents axes de prise en charge et de l’évolution de la maladie chez Tony sont les
suivants :
* sur le plan psychomoteur
- à 2 mois : l’hypotonie axiale persiste mais la mobilité spontanée est bien meilleure. On
note une ébauche de sourire avec un bon contact et une poursuite oculaire.
L’enfant ne sera pas revu durant plusieurs mois (malgré les rendez-vous et probablement,
devant l’angoisse et la « fuite » des parents face au diagnostic d’anomalie génétique).
- à 7 mois : malgré des progrès, le retard de Tony est évident. L’hypotonie axiale demeure
et la tenue de la tête n’est pas acquise. Il semble attentif à la voix avec une discrète
ébauche de sourire-réponse.
Etant donné les difficultés de l’enfant (et de ses parents), un soutien psychomoteur et
psychologique est proposé. Tony est vu pour la première fois au CAMSP de Choisy-leRoi pour évaluation et bilan des acquisitions alors qu’il est âgé de 9 mois.
- à 9 mois (au CAMSP) : on note la persistance d’une grande hypotonie globale (surtout
axiale). La tenue de la tête est encore très en retard ; il y a peu de mouvements actifs.
Tony attrape les objets avec la main droite, il les porte à la bouche et change de main.
Il n’y a aucun redressement sur le ventre et le dos mais une ébauche de retournement
lorsque l’enfant est sur le dos. Le contact oculaire est excellent, Tony babille et sourit sans
problème.
Au terme de cette consultation, une prise en charge hebdomadaire en kinésithérapie et en
psychomotricité est mise en place, toujours poursuivie à ce jour.
- à 12 mois : on note une bien meilleure tenue de l’axe en position assise. Tony se tient
assis avec appui. Sur les genoux de son père, il peut maintenant bien redresser son tronc.
Sur le plan de la communication, l’enfant gazouille et rit aux éclats.
- à 18 mois : la station assise sans appui n’est pas acquise. Tony ne se redresse absolument
pas le long des meubles et la station debout n’est permise que brièvement avec appui. Le
retournement dos/ventre et ventre/dos est difficile. Les acquisitions verbales sont pauvres.
- à 20 mois : les progrès moteurs sont lents mais présents. L’enfant tient debout et marche
maintenant avec appui.
- à 24 mois : la marche est acquise.
- à 26 mois : Tony commence à courir, il joue beaucoup avec son frère et monte les
escaliers à quatre pattes.
- à 2 ans ½ : il descend et monte les escaliers seul en se tenant à la rampe.
- à 3 ans ½ : Tony se déplace seul. Il persiste, cependant, une hypotonie et une instabilité
pour lesquelles l’enfant a mis en place tout un système efficace de compensation par des
prises d’appuis, motivant la poursuite de la rééducation en psychomotricité et en
kinésithérapie.
* sur le plan orthophonique
Devant un langage pauvre (jargon et quelques onomatopées), une prise en charge
orthophonique est débutée au CAMSP de Choisy-Le-Roi à partir de l’âge de 2 ans ½ à
raison d’une séance par semaine. La verbalisation est lente avec 10 à 15 mots repérables
(papa, maman, chien, etc) à 3 ans. L’enfant comprend deux langues (le Français et le
Portugais) et exécute des ordres simples.
Tony se fait bien comprendre malgré un retard net d’acquisitions verbales et la
scolarisation en maternelle est possible à partir de 3 ans ½.
On note une meilleure prononciation des mots avec une large utilisation de la gestuelle
comme outil de communication à l’âge de 4 ans. Cependant, les difficultés verbales
persistent (langage réduit, pas ou peu de phrases). On augmente le nombre de séances
d’orthophonie à 2 par semaine avec poursuite de la prise en charge au CAMSP puis en
libéral.
Tony est maintenant âgé de 5 ans. Il commence à construire des « petites » phrases avec
augmentation du vocabulaire et poursuite de la gestuelle encore très développée.
Actuellement, le travail porte surtout sur l’élaboration et la construction de phrases. La
concentration est possible, mais brève.
A l’école, Tony recherche le contact, il joue avec les autres enfants et se fait aisément
comprendre. Il présente une facilité particulière pour la réalisation de puzzles. Les progrès
sont lents mais certains et le travail orthophonique est toujours poursuivi à ce jour.
* sur le plan alimentaire et comportemental :
L’alimentation au biberon à partir de 1 mois puis le début de la diversification à 4 mois se
déroule sans problème. La prise pondérale est satisfaisante (cf courbe staturo-pondérale p.
166).
La courbe de poids s’accélère entre 12 et 18 mois avec franchissement rapide des
déviations standard (+ 2 DS à 18 mois avec un poids de 12 kgs). Parallèlement, apparaît le
comportement hyperphagique avec recherche compulsive de la nourriture. Les parents et
surtout, sa grand-mère paternelle (qui s’occupe de Tony durant la semaine, excepté le
week-end) cèdent souvent aux caprices de l’enfant.
Une prise en charge diététique est alors rapidement mise en place (avec la diététicienne de
l’hôpital de Villeneuve-saint-Georges). Les erreurs alimentaires sont repérées, des
conseils diététiques proposés et on explique les enjeux de la nécessité d’un régime bien
particulier qui doit être appliqué par les parents et l’entourage.
Quelques mois plus tard, au décours d’une consultation au CAMSP, les parents décrivent
à la maison une recherche compulsive persistante de la nourriture. Tony va vers le
réfrigérateur qui est fermé. Le plus souvent, il s’en va puis revient comme s’il s’agissait
d’un jeu. Parfois, il se fâche et crie pour qu’on lui donne à manger.
Ce pendant, les parents ne cèdent pas, de même que la grand-mère paternelle, qui a bien
investi son rôle et surveille de près l’alimentation de son petit-fils. D’ailleurs, la 2ème
consultation diététique (Tony est alors âgé de 2 ans ½) confirme les efforts de l’entourage,
avec une prise pondérale inférieure à 2 kgs en un an. Le régime doit donc être poursuivi
avec une coopération permanente de la famille afin de limiter la survenue d’une obésité.
Les parents limitent la prise de poids jusqu’à 4 ans mais au prix d’énormes efforts (poids=
19 kgs soit une perte de 3 kgs en un an).
A partir de 4 ans ½, le poids augmente de manière régulière mais constante (poids= 21 kgs
à 4 ans ½ ; poids= 22,7 kgs à 5 ans) de même que les troubles comportementaux associés
s’accentuent.
Tony réclame de la nourriture entre les repas et a tendance à « chaparder » ce qui a
conduit les parents à rendre la cuisine inaccessible. Les colères autour des problèmes
alimentaires sont fréquentes.
A ce jour, le régime alimentaire est maintenu avec mise en route du traitement par
hormone de croissance en Février 2004 étant donné l’évolution de la surcharge pondérale
et des troubles comportementaux (poids= 22,7 kgs à 5 ans soit + 3 DS ; taille=102,5 cm).
Nous rediscuterons de ce traitement lors de la synthèse du bilan multidisciplinaire.
Parmi les autres troubles du comportement, on note que Tony est opiniâtre, entêté, en
relation avec les autres mais il ne veut pas partager (exemple : un jouet, un crayon, etc). Il
n’y a pas de problèmes de sommeil.
* sur le plan relationnel et scolaire :
La scolarisation en maternelle en septembre 2002 (à 3 ans ½) s’est déroulée sans
difficulté. Tony est en contact avec les autres enfants, il joue avec eux malgré un retard
d’acquisitions verbales et motrices. Il ne partage pas (ou peu) et est colérique à la
frustration. Tony est scolarisé tous les matins puis déjeune chez sa grand-mère qui le
garde l’après-midi. Du fait de ses difficultés comportementales, le temps de scolarité est
réduit de 10 h à 11h30 au cours de la 2ème année de maternelle. L’enfant progresse à son
rythme et participe aux différentes activités de la classe (dessins, puzzles, etc).
* sur le plan socio-familial :
- L’angoisse et la « fuite » des parents face au diagnostic d’anomalie génétique sont
perceptibles dès les premiers mois de vie de l’enfant étant donné la difficulté du suivi
médical initial.
La mère, démonstratrice en linge de maison, reprend son travail à plein temps alors que
Tony est âgé de 2 mois. Son père, mécanicien automobile, est très occupé par son travail.
Suite à un accident de la voie publique en vacances au Portugal en Août 1999, Mr F. est
en arrêt pendant plusieurs mois et s’occupe alors de Tony, avec l’aide de la grand-mère
paternelle. L’enfant est revu en consultation à partir de l’âge de 7 mois puis régulièrement
suivi.
Après la reprise du travail de Mr F., c’est la grand-mère qui garde Tony durant la semaine
(sauf le week-end où il retourne chez ses parents) et qui l’emmène en consultation.
Malgré des difficultés initiales (stimulation faible sur le plan psychomoteur, peu ou pas de
résistance aux sollicitations alimentaires de son petit-fils) la grand-mère, les parents et
l’entourage comprennent rapidement les enjeux d’une prise en charge adaptée et
coordonnée au long cours. Tony est vu à intervalle régulier, sans rupture du suivi.
Les parents et l’entourage sont investis et tentent de faire face à l’évolution de cette
maladie. Mr et Mme F. ont refusé une prise en charge psychologique. Il leur a été
conseiller de contacter l’association Prader-Willi France afin de pouvoir rencontrer
d’autres parents, d’autres enfants et membres de l’association, vivant la même expérience.
- Sur le plan financier, une prise en charge en ALD et une AES ont été attribuées.
* sur le plan médical :
Tony a été hospitalisé à l’âge de 8 mois dans le service de Pédiatrie du Dr Guillot pour
bronchiolite d’évolution favorable en une semaine sous aérosols, kinésithérapie
respiratoire et antibiothérapie (foyer pulmonaire périhilaire droit radiologique).
Finalement, selon la classification de Holms, Tony présente avant l’âge de 3 ans, tous les
critères majeurs et 3 critères mineurs avec un indice supplémentaire (la capacité
inhabituelle à réaliser des puzzles) soit un total de 9 points et demi amplement suffisant
pour porter le diagnostic de SWP (cf tableau 8 p.134) (cf tableau 9 p. 214).
Le bilan multidisciplinaire à l’hôpital Necker (Paris 15ème) :
- Lors du premier bilan multidisciplinaire (le 30/04/2002), Tony est âgé de 3 ans. Il
mesure 91,4 cm (- 1 DS), son poids est de 18 kgs (+ 2,5 DS) et son périmètre crânien est
de 51 cm.
Sur le plan clinique, on note une adiposité diffuse avec quelques lésions de grattage
(poussées urticariennes itératives avec mise en évidence d’une allergie à la Josacine, à la
poussière et aux acariens). La dysmorphie faciale est évidente avec une relative brièveté
des extrémités (mains et pieds). Le reste de l’examen clinique est sans particularité
excepté les anomalies des organes génitaux externes repérées dès la période néonatale.
La verge est de petite taille (3x1,5 cm) et fine avec une ectopie testiculaire bilatérale. Les
testicules sont en position inguinale basse, non abaissable à gauche mais facilement
abaissable à droite. Le scrotum est assez bien développé.
Sur le plan biologique, les résultats sont normaux (ionogramme sanguin, dosage de TSHus
et T4) excepté un taux d’IGF1 un peu abaissé (à 58 ng/ml pour une normale >80 ng/ml).
La croissance est cependant régulière et le poids assez bien contrôlé, il n’y a donc pas
d’indication immédiate à un traitement par hormone de croissance.
La prise en charge globale de l’affection est adaptée. La rééducation en psychomotricité et
en kinésithérapie ainsi que le travail orthophonique sont à poursuivre. L’alimentation est
bien cadrée, le régime bien compris par les parents et l’entourage. Il faut encore limiter les
laitages et les boissons sucrées trop importantes. Enfin, il n’y a pas de scoliose mais une
discrète inflexion latérale à la radiographie du rachis (à contrôler dans un an). La prise
pondérale, un peu excessive au cours des derniers mois, est à surveiller. La rentrée
scolaire en maternelle est prévue en Septembre 2002.
En présence de l’ectopie testiculaire bilatérale avec micropénis, un traitement médical par
HCG (hormone choriogonadotrophique) (6 injections de 1500 UI) est réalisé. Le dosage
de la testostérone, à la fin du traitement, est correct (taux=1,6 ng/ml à 3 ans ½). On note
une augmentation du volume de la verge et de la pilosité pubienne à distance du traitement
mais des testicules toujours en position inguinale.
Finalement, en accord avec les parents, Tony est opéré le 24 Septembre 2003 pour ectopie
testiculaire bilatérale dans le service de chirurgie infantile de l’hôpital de Villeneuvesaint-Georges. Les testicules, de très petite taille, sont abaissés en position scrotale. Les
suites opératoires sont marquées par un épisode de fièvre et de ballonnement abdominal
rapidement résolutif. Tony quitte le service après une semaine d’hospitalisation. La
cicatrice est propre et les testicules palpables.
- Le deuxième bilan multidisciplinaire (le 27/06/03) est réalisé alors que Tony est âgé de
4 ans. Sa taille est de 100,5 cm (-0,5 DS), il pèse 19 kgs (+ 2 DS) et son PC est de 52 cm.
L’examen clinique est inchangé. Les radiographies de contrôle du rachis sont normales.
Le taux d’IGF1 est à 57 ng/ml. Un premier test de stimulation de l’hormone de croissance
par Glucagon, au début du mois de Juin 2003 révèle un pic insuffisant de GH à 2,4 ng/ml
(pour une normale >10 ng/ml) en rapport avec une sécrétion insuffisante de GH.
Les parents sont très demandeurs d’un traitement par hormone de croissance car, si la
croissance est satisfaisante, la courbe pondérale ne cesse d’augmenter malgré de gros
efforts.
Finalement, après un deuxième test de stimulation par l’Ornithine en Septembre 2003
avec un pic de GH à 3,9 ng/ml, confirmant l’existence d’un déficit partiel en hormone de
croissance (en effet, ce test, comme le test au glucagon, évalue la capacité sécrétoire de
l’hypophyse en hormone de croissance ; à l’état normal, après injection d’Ornithine, on
observe un pic de GH pouvant atteindre jusqu’à 30 fois les valeurs normales ; en cas de
carence en GH, il n’y a pas de pic), le traitement est débuté en Février 2004 à la dose de
0,7 UI /kg/semaine de GH pour une durée prévue de 10 ans. Les autres paramètres
nécessaires à la mise en route du traitement sont évalués : HGPO (test d’hypoglycémie
provoquée par voie orale), bilan phosphocalcique et thyroïdien, analyse de la composition
corporelle (les données anthropométriques et la mesure de la densité osseuse). Les
résultats sont normaux (on rappelle que les radiographies du rachis sont normales).
Tony sera revu en consultation d’endocrinologie à l’hôpital Necker avec le Dr P. à 3 mois
puis tous les 6 mois afin d’évaluer les bénéfices du traitement tout en maintenant une
surveillance clinique et paraclinique rapprochée.
Le médecin généraliste (Dr F. à Brunoy) (91) :
Le SWP est une maladie génétique que connaît le Dr F. mais la prise en charge de Tony
lui a permis d’approfondir ses connaissances et de s’impliquer dans l’évolution et le suivi
de cette affection.
Il assure toujours le suivi de l’enfant à ce jour sur le plan ambulatoire (épisodes infectieux,
calendrier vaccinal, etc) et surtout, de soutien sur le plan familial. Après une phase initiale
de sidération et d’angoisse, les parents ont fini par accepter leur fils tel qu’il est avec son
handicap et ont participé, au mieux, à son développement en le stimulant et en assurant un
suivi régulier auprès des médecins spécialistes.
En effet, la prise en charge de Tony ne peut être assuré par le médecin généraliste seul,
m’explique le Dr F., il peut cependant pleinement y participer lorsqu’il connaît les
particularités de cette maladie. Ainsi, après évaluation progressive des acquisitions
psychomotrices de l’enfant, il veille actuellement, à chaque consultation, à la bonne
observance des règles hygiéno-diététiques et à l’évolution des mesures anthropométriques.
Tony est un enfant calme et souriant, en consultation, ce qui ne dispense pas son médecin
traitant de noter les troubles du comportement signalés par les parents.
Le Dr F. insiste sur la nécessité d’une prise de contact entre l’hôpital (qui ne se limiterait
pas au courrier médical) et le médecin traitant dès le diagnostic afin de définir des
objectifs de suivi (avec les médecins spécialistes référents) et réaliser un travail conjoint
dans le but d’améliorer la prise en charge et le suivi de ces enfants.
La synthèse :
Les manifestations neurologiques précoces (hypotonie globale avec absence de succion)
associées aux anomalies génitales (micropénis avec ectopie testiculaire bilatérale) ont
permis, chez Tony un diagnostic de SWP dès la période néonatale.
L’annonce de la maladie, difficilement vécue par les parents et l’entourage, a entraîné une
prise en charge globale multidisciplinaire, retardée de quelques mois, avec cependant un
suivi ambulatoire par le médecin généraliste. Informé du diagnostic de l’enfant, il a
encouragé son apprentissage et sa prise en charge conjointe avec les spécialistes, en
soutenant les parents dans cette épreuve douloureuse. Il assure toujours le suivi de Tony.
A ce jour, l’évolution est lentement favorable. La rééducation en psychomotricité et en
kinésithérapie est à poursuivre. Le travail orthophonique est essentiel étant donné les
difficultés majeures de langage chez l’enfant. La surcharge pondérale et les troubles
comportementaux, dès l’âge de 18 mois, ont conduit à une prise en charge diététique
immédiate avec encadrement de Tony et de sa famille.
Les efforts sont initialement récompensés puis face à la reprise de poids, à partir de 3 ans,
avec accentuation des troubles du comportement (liés à la nourriture, mais pas seulement)
se pose l’éventualité d’un traitement par hormone de croissance, finalement débuté en
Février 2004. On espère que les résultats seront aussi encourageants que le traitement
médical par HCG (hypogénitalisme) qui a permis chez Tony, un développement des
caractères sexuels secondaires, traitement complété par une intervention chirurgicale
(ectopie testiculaire bilatérale).
Finalement, Tony a bénéficié d’un diagnostic précoce, d’une prise en charge spécifique
(un peu retardée) avec acquisition lente mais régulière des fonctions psychomotrices et
langagières.
Les parents et l’entourage ont à présent, bien compris la maladie et leur rôle dans les
progrès et la surveillance de l’enfant. C’est ce suivi régulier qui a permis de nouer avec les
parents une relation de confiance, de soutien et de permettre un épanouissement le plus
favorable à Tony.
Les dernières nouvelles, par le Dr Guillot, sont rassurantes : depuis l’instauration du
traitement, on note une amélioration de la composition corporelle avec amincissement et
prise de taille. Le comportement est plus « facile » avec une diminution des crises de
colère et l’hyperphagie.
Courbe staturo-pondérale de Tony
II. L’HISTOIRE DE CHRISTOPHE M.
Christophe M. est né le 09 Juin 1998 à la Clinique Juliette de Wils à Champigny (94).
Les antécédents familiaux sont sans particularité. Il s’agit du 3ème enfant de la fratrie de
parents d’origine Srilankaise, non consanguins (deux soeurs de 7 et 9 ans en bonne santé).
La grossesse s’est déroulée normalement avec cependant une hypomobilité fœtale
importante (absence quasi-totale de mouvements fœtaux jusqu’au 8ème mois de grossesse).
L’accouchement a lieu le 09 Juin 1998 par voie basse au terme de 37 semaines
d’aménorrhée. Le score d’Apgar est à 10 dès la première minute de vie. Christophe pèse
2420g, sa taille est de 45 cm et son périmètre crânien est de 33 cm.
Il apparaît immédiatement une détresse respiratoire associée à une hypotonie globale
motivant le transfert dans l’unité de néonatalogie de l’hôpital de Villeneuve-SaintGeorges puis en Réanimation Infantile au centre hospitalier intercommunal de Créteil
(CHIC) devant l’aggravation respiratoire.
L’évolution :
Finalement, après cet épisode de détresse d’évolution favorable en quelques jours, l’enfant
est à nouveau réhospitalisé dans le service de Pédiatrie. Il persiste une hypotonie diffuse,
massive, prédominante sur le plan axial.
Une succion faible entraîne un gavage pendant 2 mois puis une alimentation au biberon
dès l’amélioration du réflexe de succion. Des difficultés persistent (Christophe a du mal à
téter) et dès le retour à domicile, l’enfant mange à la cuillère.
L’évolution motrice est progressivement favorable avec la récupération partielle du tonus
passif, le développement d’une motricité spontanée et un bon contact oculaire.
Cette hypotonie est associée à une ectopie testiculaire et à un lipome sacré latéral. Les
investigations, pour le lipome (IRM cérébrale et médullaire) mettent en évidence une
moelle basse insérée, sans anomalie morphologique cérébrale. La surveillance est
clinique, comme pour la cryptorchidie.
Christophe quitte le service après 2 mois et demi d’hospitalisation (le 31 Août 1999). Il
pèse 4040g, sa taille est de 55,5 cm et son périmètre crânien est de 38 cm.
Malgré un bilan d’hypotonie, l’étiologie reste indéterminée. L’enfant sera revu
régulièrement en consultation avec le Dr Janaud (chef de service du service de Pédiatrie à
l’hôpital Intercommunal de Créteil).
Le bilan étiologique :
Seront réalisés les examens suivants :
- un scanner cérébral
- une IRM cérébrale et médullaire
- un électroencéphalogramme
- un bilan ophtalmologique (fond d’œil)
- un électromyogramme (des muscles faciaux, linguaux et du voile du palais)
- une recherche de pathologie infectieuse
- une recherche de pathologie métabolique
- un caryotype en haute résolution avec méthode de FISH (absence de microdélétion sur le
chromosome 15)
Le tableau clinique (hypotonie et hypogénitalisme) fait évoquer le diagnostic de SWP.
Le caryotype, avec technique de FISH, normal, n’exclut pas ce diagnostic et c’est ainsi,
grâce au suivi, que le SWP est confirmé à l’âge de 2 ans, devant l’apparition d’une
surcharge pondérale et après discussion avec le Dr Gérard, généticienne à l’Hôpital
Intercommunal de Créteil (94) : les examens effectués révèlent une anomalie de
méthylation sur l’un des chromosomes 15 de l’enfant avec identification d’une DUP
d’origine maternelle (analyse de microsatellites).
L’annonce du diagnostic a été assez difficile car les parents ont une représentation
-au moins en Français- assez fruste de ce que peut être la génétique.
Le Dr Janaud a insisté sur la nécessité d’un suivi régulier et le risque de survenue d’une
obésité en soulignant la possibilité de contacter l’association Prader-Willi France ce qui a
particulièrement intéressé les parents (l’analyse du dossier ne permet pas de savoir si les
caryotypes parentaux ont été réalisés).
Le suivi et la prise en charge :
* sur le plan psychomoteur
- à 3 mois : la tenue de la tête n’est pas acquise. Il demeure une hypotonie axiale passive.
La mobilité spontanée est plus active mais parait peu déliée et non dirigée. Les réflexes
rotuliens sont normaux. Le contact oculaire est bon, l’enfant réagit à son prénom et sourit.
Une prise en charge hospitalière avec la psychomotricienne du CHIC est mise en place
dès l’âge de 3 mois.
- à 4 mois : Christophe est très réactif, il gesticule et rampe malgré la persistance d’une
grande hypotonie axiale encore très inquiétante.
- à 5 mois : la psychomotricienne oriente les parents et l’enfant vers le CAMSP de
Choisy-le-Roi pour la poursuite de la prise en charge rééducative.
- à 6 mois : la tenue de la tête est acquise.
- à 9 mois : Christophe se retourne du dos sur le ventre ; il se redresse sur les avant-bras et
a une préhension volontaire bilatérale de type un peu dystonique. Il n’a pas encore acquis
l’opposition du pouce. La station assise seule est incertaine mais l’enfant tient assis en
trépied avec un effondrement discret en cyphose.
Il n’y a pas de trouble du comportement, Christophe est sociable et souriant. On remarque
un aspect court des membres avec une bouche légèrement entrouverte en « chapeau de
gendarme ».
- à 12 mois : malgré une hypotonie encore importante, l’enfant est actif, tient bien assis et
rampe. Il a une excellente relation avec sa mère.
- à 20 mois : la marche est acquise.
- à 30 mois : Christophe commence à courir, monter sur une chaise et les marches de
l’escalier avec appui sur les 2 mains. Il s’intéresse aux jeux d’encastrement, aux jeux
d’imitation avec un certain décalage par rapport à la moyenne. Il jargonne avec mimiques,
gestes éloquents et dit quelques mots (papa, maman, etc).
- à 4 ans : l’enfant conserve une hyperlaxité et une discrète hypotonie de l’axe avec une
force musculaire un peu diminuée aux membres. Il commence à sauter à deux pieds sans
appui et est capable de marcher sans s’arrêter pendant 200 mètres environ.
- à 5 ans ½ : Le développement psychomoteur est globalement satisfaisant. Christophe a
fait des progrès dans la motricité fine (habillage). Il persiste des difficultés dans certains
gestes courants tels que couper la viande. Une certaine hypotonie demeure, en particulier,
au niveau facial.
La psychomotricité (de Novembre 1998 à Mars 2000) à raison de une séance par semaine
est relayée par une prise en charge en petit groupe au sein du CAMSP jusqu’en Juin 2003.
Il s’agit de stimuler et de favoriser le développement moteur et intellectuel et la
socialisation d’enfants porteurs de difficultés du développement similaires.
* sur le plan orthophonique
On note l’apparition des premiers mots à partir de 2 ans ½. Si les capacités de
compréhension sont bonnes, il n’en est pas de même pour l’expression et la prononciation
qui sont faibles. L’intégration scolaire se fait, cependant, sans difficulté avec une bonne
communication avec ses petits camarades. La gestuelle est très développée.
A 4 ans, sur le plan verbal, l’expression est encore décalée puisque limitée à quelques
mots compréhensibles qui semblent correctement prononcés. Les mots en relation avec les
usages sociaux sont bien acquis. Sur le plan non verbal, Christophe a des capacités
visuelles (reconnaissance d’images) et de tri (entre deux consignes, etc).
Malgré des progrès, les difficultés langagières persistent surtout sur le versant expressif
d’où la mise en place d’une rééducation orthophonique (deux séances hebdomadaires) au
CAMSP à partir de Septembre 2003 (Christophe est âgé de 5 ans et scolarisé en grande
section de maternelle).
L’enfant investit beaucoup ces séances et progresse en expression. Malgré une
dissociation persistante entre l’acquisition de vocabulaire et ses capacités d’expression, on
relève une certaine autonomie sur le plan verbal à partir de 5 ans ½.
Sur le plan non verbal, Christophe est capable de s’intéresser à des consignes spatiales, à
un tri selon deux consignes, à la reconnaissance des couleurs. Il présente des difficultés de
graphisme qui s’intègrent dans des éléments de dyspraxie visuo-spatiale. Cependant, ses
capacités de concentration sont de courte durée et l’enfant est fatigable, élément à prendre
en compte dans les exigences à son égard.
A ce jour, la rééducation orthophonique se poursuit au rythme de deux séances par
semaine. Un bilan neuropsychologique incluant la WIPPSI (test psychométrique de
Wechsler pour les enfants de 3 à 6 ans) est prochainement prévu pour une évaluation plus
précise des capacités et des difficultés de l’enfant.
* sur le plan alimentaire et comportemental
- Après gavage en période néonatale, l’alimentation au biberon, puis à la cuillère, se fait
sans problème. La croissance staturo-pondérale est satisfaisante (cf courbe staturopondérale p.176) avec apparition d’une surcharge pondérale à partir de 2 ans environ.
Dès l’annonce du diagnostic, les parents sont informés du risque de la survenue d’une
obésité et des règles hygiéno-diététiques à respecter.
L’évolution est correcte ; Christophe a certes beaucoup d’appétit mais le surpoids est
acceptable et il n’y a pas de troubles du comportement liés à l’alimentation (il n’y a pas
d’hyperphagie, pas de trouble obsessionnel-compulsif, pas de « chapardage » de la
nourriture).
Le ralentissement de la croissance staturale avec une prise pondérale nette, au cours des
derniers mois, a posé l’éventualité d’un traitement par hormone de croissance. Il s’agit
d’améliorer la croissance staturale mais également pondérale de Christophe avec une
meilleure répartition des masses maigre et grasse et un bénéfice en terme d’acquisition et
de développement psychomoteur.
Les parents ont besoin de réfléchir et seront prochainement revus en consultation à
l’hôpital Trousseau avec le Dr Esteva (endocrinologue).
- Sur le plan comportemental, les « crises de colère » apparaissent à partir de 20 mois.
Christophe est exigeant, obstiné et tyrannise beaucoup sa mère lorsqu’il est seul avec elle.
Par ailleurs, ses capacités d’attention sont labiles. Il s’agit néanmoins d’un enfant gai,
volontaire, très actif, en relation avec les autres enfants, malgré un décalage. Il témoigne
d’une certaine intolérance à la frustration. Il n’y a pas de problèmes de sommeil ou
d’endormissement.
* sur le plan relationnel et scolaire
L’intégration scolaire (en petite section de Maternelle) en 2001 se déroule sans difficulté,
malgré un retard de langage et des acquisitions.
Christophe va avec plaisir à l’école toute la journée. Il déjeune le midi chez ses parents.
L’évolution est similaire au cours de la 2ème année avec mise en place d’une rééducation
orthophonique et présence d’une auxiliaire de vie scolaire à partir de Septembre 2003
(c'est-à-dire lors de la rentrée en grande section).
L’auxiliaire accompagne Christophe pour compenser les inconvénients liés à son handicap
et contribue à la mise en route de son projet de scolarisation et de socialisation.
* sur le plan médical
L’enfant est suivi par son médecin traitant le Dr M. et le médecin du centre de PMI
(protection maternelle et infantile) d’Orly. Le dossier ne mentionne aucune
hospitalisation.
Finalement, selon la classification de Holms, avant l’âge de 3 ans, il y a 6 critères majeurs
et 3 critères mineurs de diagnostic du SWP chez Christophe soit un total de 7 points et
demi ce qui est suffisant pour porter le diagnostic (cf tableau 8 p.134) (cf tableau 9 p.214).
Le bilan multidisciplinaire
Celui-ci a lieu le 10 Septembre 2002 à l’hôpital Trousseau.
Il s’agit d’un enfant de 4 ans et 3 mois qui pèse 16,5 kgs (+1 DS) et mesure 94 cm
(-2 DS). La dysmorphie est nette avec des membres un peu courts, une petite bouche aux
commissures tombantes. Au niveau des organes génitaux, le scrotum est très peu
développé avec des testicules difficilement palpables (surtout à gauche). Le reste de
l’examen clinique est sans particularité.
La prise en charge en psychomotricité puis en orthophonie au CAMSP doit être
poursuivie. Le langage n’est pas encore parfaitement acquis et la construction de phrases
complètes et compréhensibles est quasi-inexistante.
Malgré un excès pondéral (relatif au regard de l’insuffisance staturale), l’absence de
troubles graves du comportement et le respect des règles hygiéno-diététiques par
l’entourage ne nécessitent pas, pour l’instant, une prise en charge spécifique diététique.
Cependant, face au ralentissement de la croissance staturale avec prise de poids régulière,
on discute de l’éventualité d’un traitement par hormone de croissance. Le Dr Esteva
s’entretient avec les parents de Christophe sur la possibilité d’un traitement hormonal par
GH en leur expliquant les bénéfices attendus de cette thérapeutique.
Un bilan paraclinique complet, à l’âge de 5 ans, est effectué dans la perspective de la mise
en route de ce traitement.
Il comporte :
- un test de stimulation de l’hormone de croissance par l’Ornithine révélant un pic
insuffisant de sécrétion de GH (indétectable à T0 ; GH = 4 ,4 ng/ml à 30 minutes pour une
normale supérieure à 10 ng/ml).
- un dosage d’IGF1 à 55 ng/ml (pour une normale supérieure à 80 ng/ml)
- un dosage de TSHus à 2,02 UI/ml et T4 à 8 ,67 UI/ml (résultats normaux)
- un test d’hyperglycémie provoquée par voie orale normal
- un bilan hématologique (numération formule sanguine, plaquettes, vitesse de
sédimentation) et métabolique (bilan à la recherche d’une anomalie lipidique ; glycémie à
jeun ; transaminases ASAT et ALAT) normal
- un bilan phosphocalcique normal
Ce bilan est en faveur d’un déficit partiel en hormone de croissance. Les résultats
permettent donc d’envisager le traitement chez Christophe. Les parents réfléchissent à
cette éventualité et le sujet sera réabordé lors du prochain bilan multidisciplinaire qui aura
lieu à la fin de l’année 2004.
Par ailleurs, sur le plan génital, l’ectopie testiculaire gauche est opérée le 07 Août 2000
par le Dr Jaby à l’hôpital intercommunal de Créteil. Les suites opératoires sont simples et
le testicule gauche est abaissé en position scrotale (testicule droit en place).
Sur le plan neurologique, pour son lipome sacré latéral, Christophe est suivi par le
Professeur Zerah, neurochirurgien à l’hôpital Necker. Une seconde IRM lombosacrée, à
l’âge de 2 ans, confirme la présence d’une moelle attachée basse sur un lipome du cône
(pas de cavité syringomyélique).
Une échographie vésicale et rénale ainsi qu’un bilan urodynamique normaux, témoignent
de l’absence d’anomalies morphologiques des voies urinaires et d’un éventuel
dysfonctionnement vésico-sphinctérien fréquemment associé au lipome. Devant la
normalité des résultats, il n’y a pas d’indication immédiate à une intervention chirurgicale
et une surveillance clinique en milieu spécialisé (tous les 6 mois à 1 an) suffit.
La prise en charge est donc globale et adaptée. Les efforts portent sur le langage et la
surveillance des troubles comportementaux. Le traitement par hormone de croissance sera
initié après accord des parents.
Le médecin généraliste (le Dr M. à Orly) (94) :
Le DR M. suit Christophe comme n’importe quel autre enfant avec bien sûr des
particularités liées à l’affection. Christophe est son seul patient atteint du SWP. Depuis, il
s’est informé sur la maladie et son évolution et connaît les principaux risques liés à cette
pathologie.
Son médecin m’explique que Christophe est également suivi au centre de Protection
Maternelle et Infantile (PMI) à Orly et qu’il voit donc l’enfant de manière épisodique pour
les affections intercurrentes.
Il insiste sur la nécessité d’un suivi hospitalier indispensable en coordination avec le
médecin généraliste.
La synthèse :
Christophe a bénéficié d’un suivi régulier et pluridisciplinaire ayant permis de
diagnostiquer le SWP devant l’apparition de la pléthore chez un enfant aux antécédents
d’hypotonie néonatale avec difficultés d’alimentation et hypoplasie génitale.
Le diagnostic, évoqué dès les premiers jours de vie, ne pouvait être formellement exclu
sur la seule négativité du caryotype en haute résolution avec technique de FISH.
La présentation et l’évolution biphasique de la maladie incitent à la recherche d’une DUP
d’origine maternelle, qui s’avère positive. Le diagnostic est porté alors que Christophe est
âgé de 2 ans.
Comparativement à la littérature, chez les enfants porteurs d’une DUP dans le cadre du
SWP, le signe présent chez Christophe est l’apparition « tardive » de l’hyperphagie
puisqu’elle n’est pas mentionnée au moins jusqu’à l’âge de 5 ans ½. Les autres
caractéristiques phénotypiques (durée de gavage courte à la naissance, dysmorphie
minime, diminution du prurit cutané et anomalies modérées de l’articulation verbale)
fréquentes mais non spécifiques de la DUP dans ce syndrome, ne sont pas ou très peu
retrouvés chez Christophe.
Sur le plan global, la prise en charge en psychomotricité est adaptée et poursuivie en petit
groupe jusqu’à 4 ans ; la rééducation orthophonique est en cours.
L’insuffisance staturale et la surcharge pondérale posent aujourd’hui l’éventualité d’un
traitement par hormone de croissance qui sera probablement débuté avant la fin de
l’année.
Certains troubles comportementaux « propres » au SWP apparaissent : obstination, crises
de colère, intolérance à la frustration, et sont à surveiller (on rappelle le risque de
développer une psychose à l’adolescence ou à l’âge adulte d’après une étude Belge et
deux études Anglaises (26)).
Enfin, l’orientation scolaire est aujourd’hui au premier plan :
-
faut-il maintenir Christophe en grande section de maternelle puis envisager une
intégration à l’école primaire ?
-
ou doit-on l’orienter d’emblée vers un établissement spécialisé (CLIS, etc) ?
L’évolution et des tests psychométriques approfondis permettront, avec les parents, de
décider de la solution la plus adéquate à l’épanouissement intellectuel et social de l’enfant.
Courbe staturo-ponderale de Christophe
III. L’HISTOIRE DE PERRINE P.
Perrine est née le 30 Mai 2001 à la clinique des Mousseaux à Evry (91).
Dans les antécédents familiaux, on note une hypertension artérielle limite non traitée chez
le père et une thalassémie mineure chez la mère. Ses parents sont d’origine Antillaise, non
consanguins.
Perrine est la troisième enfant de la fratrie, elle a un frère et une sœur, nés d’une grossesse
gémellaire en 1997 (au terme de 37 semaines d’aménorrhée) en parfaite santé.
Au cours de la grossesse, survient un diabète insipide gestationnel traité par Minirin
(antécédent similaire au cours de la grossesse gémellaire d’évolution favorable sous
traitement), suivi par le Dr R. à la clinique des Mousseaux.
A partir du septième mois de grossesse, on surveille un hydramnios nécessitant une
hospitalisation en Maternité à l’hôpital Port-Royal (Paris) du 06 au 15 Mai 2001. Une
amniocentèse et un caryotype sont alors effectués : ils sont normaux. Une recherche de
cytomégalovirus (CMV) et parvovirus s’avère négative.
Mme P. est admise à la clinique des Mousseaux le 25 Mai 2001 pour surveillance du
diabète insipide.
L’accouchement a lieu le 30 Mai 2001 par césarienne en urgence pour rythme cardiaque
fœtal (RCF) peu oscillant et notion de décollement placentaire au terme de 37 semaines
d’aménorrhée.
Une détresse respiratoire majeure (score d’Apgar à 2 à une minute de vie) entraîne une
intubation immédiate avec transfert dans le service de Réanimation néonatale et
Pédiatrique de l’hôpital du Kremlin-Bicêtre (Paris). Perrine pèse 2600g, son périmètre
crânien est de 31,5 cm (taille ?).
L’évolution est lentement favorable :
- sur le plan respiratoire, l’extubation est réalisée avec succès à 3 semaines de vie. Perrine
est uniquement soutenue par l’apport de 0,25 litres d’oxygène aux lunettes nasales.
- sur le plan dysmorphique, on note la présence d’une fente gingivale de 3 millimètres
(mm), avec un palais discrètement ogival. Il n’y a pas d’autre malformation visible.
- sur le plan neurologique, on remarque une hypotonie périphérique et axiale très
importante des quatre membres avec aréflexie et hypotrophie musculaire diffuses. La
gesticulation spontanée est très pauvre, le faciès peu expressif. Une arthrogrypose est
présente au niveau des deux poignets.
- sur le plan trophique, la prise pondérale est satisfaisante (poids= 2690g le 26 Juin 2001),
le PC augmente de manière régulière. Cependant, Perrine est perfusée et alimentée par
gavage, la succion étant quasi-inexistante.
- sur le plan biologique, il n’y a pas de souffrance fœtale aigue sévère (pas de cytolyse
significative, lactates : 1,5 millimoles/litre, glycémie : 8 millimoles/litre, CRP <6 et
plaquettes : 223000). Il existe, en revanche, une anémie normocytaire à 7,2 g/dl
nécessitant la transfusion de 2 culots globulaires.
Finalement, après un mois d’hospitalisation, Perrine est transférée dans le service de
Neurologie de l’hôpital du Kremlin-Bicêtre pour suite de prise en charge de cette
hypotonie (le bilan étiologique, débuté en Réanimation, sera complété lors de son séjour
en Neurologie).
On observe, alors, une amélioration lente et progressive du tonus musculaire, surtout
périphérique avec un éveil correct (ouverture spontanée des yeux et poursuite du regard).
Il existe une hypoplasie des organes génitaux de type féminin. Par ailleurs, Perrine est
enfin autonome sur le plan respiratoire. Les gavages se poursuivent avec début
d’alimentation à la seringue. En effet, la succion est toujours très faible, avec une bonne
déglutition sans fausse route (confirmée par une consultation de « succion-déglutition »).
L’hémoglobine de contrôle est aux alentours de 11 g/dl.
Perrine est transférée le 16 Juillet 2001 dans le service de Pédiatrie de l’hôpital de
Villeneuve-Saint-Georges pour rapprochement du domicile parental. Son poids de sortie
est de 3005g.
Lors du séjour dans le service, l’hypotonie persiste, globale et massive (plus nette sur le
plan axial). Les réflexes archaïques ne sont pas retrouvés hormis le grasping des membres
supérieurs et inférieurs. La motricité spontanée est pauvre. On retrouve les mêmes
anomalies dysmorphiques. Le reste de l’examen clinique est sans particularité.
L’évolution est lentement favorable en 15 jours avec poursuite de la récupération du tonus
musculaire, mais sans autonomisation sur le plan alimentaire. L’alimentation à la seringue
est encouragée, avec toujours le complément en gavage.
Perrine quitte le service le 28 Juillet 2001 avec une hospitalisation à domicile (HAD). Son
poids de sortie est de 3370g (- 3 DS) sa taille est de 55 cm (-1 DS) et son PC est de 36 cm
(+1 DS).
Face à cet hypogénitalisme associé à une hypotonie globale et à des difficultés
alimentaires, le diagnostic de SWP est évoqué. Dans l’attente des résultats (recherche du
SWP effectué à l’hôpital du Kremlin- Bicêtre), Perrine sera régulièrement suivie en
consultation par le Dr Guillot.
Le bilan paraclinique étiologique :
Seront réalisés face à cette hypotonie globale les examens suivants :
- un électromyogramme
- une biopsie musculaire
- plusieurs électroencéphalogrammes (5 au total)
- une IRM cervicomédullaire
- une ponction lombaire avec analyse bactériologique du LCR
- une échographie abdominale et pelvienne
- une recherche d’anticorps anti-récepteurs à l’acétylcholine
- un test à la Prostigmine
- une recherche de maladie de Steinert
- une recherche de pathologie métabolique ou de pathologie infectieuse
- chez la maman de Perrine : recherche de la maladie de Steinert et d’une myotonie.
- un dosage de TSHus et T4.
- une recherche du SWP.
Au total, tous ces examens s’avèreront normaux excepté l’étude du caryotype en haute
résolution (par méthode de Fish) avec la mise en évidence d’une microdélétion sur le
chromosome 15, confirmant le SWP.
Le diagnostic est annoncé aux parents par le Dr Guillot alors que Perrine est âgée de 2
mois. Une prise en charge et un suivi spécifiques sont débutés et les parents prennent
contact avec l’association Prader-Willi France.
Le suivi et la prise en charge :
Nous allons étudier les différents axes de prise en charge de l’enfant, en résumant les
principales acquisitions et les difficultés rencontrées par Perrine, mais aussi ses parents au
cours du suivi.
* sur le plan psychomoteur
La kinésithérapie motrice débute à partir de l’âge de 4 mois, à raison de 1 à 2 séances
hebdomadaires, en libéral. Les progrès de l’enfant sont constants.
A partir de 7 mois, la prise en charge en psychomotricité relaie la kinésithérapie
(3 séances par semaine). L’évolution, favorable, permet un rythme de 2 séances
hebdomadaires, réalisées au domicile, à partir de l’âge de 16 mois. Après bilan
multidisciplinaire à l’hôpital Necker (Paris 15ème), une séance hebdomadaire de
psychomotricité est maintenue (Perrine est alors âgée de 2 ans).
Les principales acquisitions psychomotrices sont les suivantes :
- à 7 mois : l’enfant commence à tenir sa tête et se redresse légèrement sur ses avant-bras
en position ventrale. Elle tend la main pour attraper un objet.
- à 8 mois : la tenue de la tête est acquise. Perrine répond au « tiré-assis ». Elle commence
à se retourner.
- à 10 mois : elle passe seule de la position couchée à assise et tient assise quelques
instants.
- à 12 mois : Perrine imite les mimiques du visage, rampe, s’assoie et se maintient seule.
- à 16 mois : elle tient debout et se déplace avec appui le long des meubles. La marche a
lieu à « quatre pattes ».
- à 20 mois : la station debout sans appui est acquise. Perrine se lâche pour aller d’un
appui à l’autre. Elle empile et encastre des cubes.
- à 21 mois : la marche est acquise. L’enfant désigne les parties de son corps. Elle dessine
et reconnaît le rond.
- à 23 mois : Perrine commence à courir. Elle est capable de monter et descendre seule
une petite marche, de même que des escaliers en se tenant à la rampe. La gesticulation
fine se précise (elle commence à enfiler des grosses perles et empile 7 à 8 cubes).
Pour toutes ces acquisitions, l’enfant a besoin d’être stimulée car elle explore peu d’ellemême. Il est souvent nécessaire de lui faire la démonstration pour qu’elle apprenne à
maîtriser ses gestes.
Au niveau de la communication, Perrine comprend parfaitement les consignes, sa relation
à l’autre est adaptée ; elle sait exprimer son accord ou son désaccord et commence à
répéter quelques mots.
A ce jour, la prise en charge se poursuit. Le travail concerne, aujourd’hui, la coordination
manuelle, la motricité fine, l’équilibre et la coordination dynamique.
* sur le plan orthophonique
La prise en charge, en libéral, débute à partir de l’âge de 18 mois (1 séance par semaine).
Perrine est une enfant sociable, coopérante mais qui opte parfois pour un comportement
de refus ce qui peut rendre difficile l’appréciation de ses réelles capacités.La concentration
est possible mais souvent brève.
Au niveau langagier, Perrine communique essentiellement par un comportement gestuel,
mimiques et babillage. Le langage oral n’est pas encore construit et seuls quelques sons ou
quelques mots (papa, maman, chat…) sont reproduits.
Les notions concernant le schéma corporel sont acquises, l’exécution de tâches motrices
et/ou de jeux langagiers est plus aléatoire (exemple : reboucher une bouteille est possible,
la visser et la dévisser ne l’est pas).
Il persiste une légère hypotonie musculaire au niveau de la sphère orofaciale, limitant
parfois la réalisation de praxies (exemple : le gonflement des joues).
Perrine progresse, mais de façon très lente. Suite à la consultation multidisciplinaire à
Necker, on augmente le nombre de séances à 2 par semaine.
* sur le plan alimentaire et comportemental
- On note une augmentation progressive des quantités bues à la seringue puis au biberon (à
partir de 2 mois) grâce à l’amélioration de la succion et la stimulation active par sa
maman.
A 4 mois, on débute l’alimentation à la cuillère poursuivie sans aucune difficulté. Le
gavage est totalement supprimé à l’âge de 7 mois.
La prise pondérale est satisfaisante avec accélération de la courbe de poids à partir de 20
mois (cf courbe staturo-pondérale p.186) (poids= 4750g à 6 mois, 6840g à 12 mois, 9800g
à 2 ans et 3 mois).
- L’hyperphagie et ses difficultés comportementales apparaissent à partir de 16 mois.
Alors qu’elle a déjà mangé, Perrine se fâche et réclame de la nourriture lorsqu’elle voit ses
parents et son frère ou sa sœur à table ! Elle a une préférence pour le goût sucré et
subtilise la nourriture dès qu’elle le peut. En dehors du domaine alimentaire, Perrine est
une enfant plutôt calme (à noter, l’absence de troubles du sommeil).
La prise en charge par la diététicienne de l’HAD est mise en place dès Septembre 2002
(date d’apparition des troubles comportementaux liés à l’hyperphagie) relayée par la
diététicienne de la consultation multidisciplinaire.
Le régime alimentaire est bien compris et appliqué par les parents et l’entourage (il faut
éviter les aliments et les boissons sucrées ainsi que les produits riches en amidon) et la
maman ne cède pas aux caprices de Perrine !
* sur le plan relationnel et scolaire
L’intégration au CAMSP de Choisy-Le-Roi à 16 mois puis la halte-garderie
(3 heures/semaine) à 20 mois se déroule sans difficultés majeures.
Perrine est une enfant souriante, attachante, en quête de contact et de communication avec
les autres enfants. Nous l’avons vu, les problèmes relationnels concernent surtout la
nourriture.
* sur le plan socio-familial
- Une prise en charge psychologique est proposée à Mme P. alors que Perrine est âgée de
8 mois. Sa maman a totalement stoppé son activité professionnelle afin de pouvoir se
consacrer pleinement à sa petite fille. Cependant, la lourdeur de la prise en charge, ajoutée
aux tâches quotidiennes, génère chez la mère (et l’entourage) une angoisse et une
incertitude sur les capacités d’évolution et les perspectives d’avenir de Perrine. Le suivi
psychologique est satisfaisant et toujours suivi à ce jour.
- Par ailleurs, Perrine bénéficie toujours actuellement de l’AES de 3ème catégorie et de la
prise en charge en ALD.
* sur le plan médical
Perrine a été hospitalisée à deux reprises dans le service de Pédiatrie de l’hôpital de
Villeneuve-Saint-Georges pour bronchiolite (à l’âge de 5 mois et 1 an) d’évolution
favorable sous traitement et kinésithérapie respiratoire. La dernière hospitalisation dans le
service date de Mai 2003 avec survenue d’une diarrhée à Campylobacter Jejuni résolutive
sous traitement antibiotique (Josacine).
Finalement, selon la classification de Holms, Perrine présente 7 critères majeurs de
diagnostic de SWP et 1 critère mineur soit un total de 7 points et demi (on rappelle qu’un
score de 5 points dont 4 provenant des critères majeurs est nécessaire afin d’établir le
diagnostic) (cf tableau 8 p.134) (cf tableau 9 p.214).
Le bilan multidisciplinaire à l’hôpital Necker (Paris) le 07 Août 2003 :
- Le premier bilan a eu lieu en Août 2003 alors que Perrine est âgée de 2 ans et 2 mois.
C’est une enfant menue, sans adiposité abdominale. Elle pèse 9670g (3ème percentile), sa
taille est de 83,5 cm (-1DS) et son périmètre crânien est de 47 cm (moyenne). L’examen
clinique est sans particularité (pas de scoliose, pas de lésions de grattage).
Les examens complémentaires sont normaux (ionogramme sanguin, anticorps antigliadine négatifs, radiographies du rachis normales), excepté un taux bas d’IGF1 (le taux
est à 33 ng/ml pour une normale > 80 ng/ml).
Il évoque l’existence d’un éventuel déficit en hormone de croissance mais ceci peut être
aussi lié à l’hypotrophie (en effet, on note une meilleure prise pondérale depuis 2-3 mois
chez une enfant auparavant plutôt hypotrophique).
La croissance staturale étant régulière sur -1DS, sans prise pondérale excessive, il n’y a
pas d’indication à un traitement par hormone de croissance. Les parents de Perrine sont
tout à fait d’accord pour attendre.
La prise en charge spécifique (psychomotricité, orthophonie, etc) et le suivi proposé, suite
au bilan, sont détaillés dans les paragraphes correspondants.
Le médecin généraliste (le Dr M. à Montgeron) (91) :
Lorsque j’ai contacté le Dr M. au sujet de son rôle dans la prise en charge et le suivi du
SWP chez Perrine, il a insisté sur sa position en tant que médecin généraliste, médecin
traitant avant tout. Il faut assurer son suivi comme celui de tout autre enfant (courbe de
croissance, vaccinations, certificats médicaux, traitement des épisodes infectieux…) avec
bien sûr des spécificités liées à cette maladie. Pour les connaître, le médecin généraliste
doit vouloir s’impliquer dans cette prise en charge et le suivi. L’information passe alors
par la littérature médicale et la communication auprès des spécialistes qui travaillent avec
l’enfant. Le Dr M. me rappelle que c’est une maladie rare et que les rôles entre les
différents médecins doivent être bien partagés. En ce qui concerne Perrine, la prise en
charge et le suivi ambulatoire se poursuivent, le Dr M. étant informé de l’évolution et des
projets pour sa jeune patiente par le biais des courriers médicaux.
La synthèse :
Perrine est une enfant actuellement âgée de 3 ans, atteinte du SWP, diagnostiqué à l’âge
de 3 mois, grâce au caryotype en haute résolution par méthode de FISH.
Une prise en charge globale et immédiate a permis à Perrine de bénéficier des soins et du
suivi nécessaires en rapport avec son handicap. A ce jour, l’évolution est satisfaisante sur
le plan psychomoteur et orthophonique avec une enfant autonome en progrès constants.
Les troubles alimentaires et comportementaux associés au syndrome commencent à
apparaître (à partir de 16 mois) et sont déjà pris en charge.
Il n’y a pas d’indication immédiate à un traitement par GH. Le médecin généraliste assure
le suivi en ambulatoire en collaboration avec les autres professionnels de santé médicaux
et paramédicaux. Il ne se substitue pas au pédiatre mais il a un rôle de coordinateur entre
l’enfant et le milieu hospitalier.
La prochaine étape pour Perrine est son intégration en milieu scolaire, les efforts destinés
à lutter contre l’hyperphagie et donc contre l’obésité, devant être poursuivis (informer
l’institution de la maladie, gérer la composition des repas si elle déjeune à la cantine et ses
éventuelles réactions agressives, centrées ou non sur la nourriture, envers ses petits
camarades). Cette rentrée, qui s’est déroulée en Septembre 2004, s’est passée sans
difficulté et Perrine semble s’intégrer parfaitement à ce nouvel environnement.
Finalement, grâce à un « dépistage » et un suivi précoce de la maladie, Perrine est
aujourd’hui une enfant autonome, épanouie, bien entourée sur le plan médical et familial.
Courbe staturo-pondérale de Perrine
IV. L’HISTOIRE DE JULIETTE L.
Juliette est née le 13 Septembre 1999 à la maternité de l’hôpital de Villeneuve-SaintGeorges (94).
Les antécédents familiaux sont sans particularité. Les parents sont d’origine Française,
non consanguins. Juliette est la deuxième enfant de la fratrie : elle a un frère né en 1996
(à 39 semaines d’aménorrhée) en bonne santé.
Au cours de la grossesse, une amniocentèse est proposée devant la découverte d’un
épaississement de la nuque et les parents s’inquiètent d’un enfant possiblement
trisomique. Le caryotype est normal (46 XX).
A partir du 7ème mois de grossesse, on surveille un hydramnios. La maman constate une
diminution des mouvements fœtaux (par rapport à l’aîné) au cours du 8ème mois de
grossesse.
L’accouchement est réalisé par voie basse au terme de 41 semaines d’aménorrhée et 1 jour
avec présentation par le siège. Le score d’Apgar est à 7 puis à 9 à 5 minutes. Juliette pèse
3670g, sa taille est de 53 cm et son PC est de 35,5 cm.
Dès sa cinquième heure de vie, l’examen clinique révèle une hypotonie globale très
importante sans aucun réflexe de succion et il faut démarrer un gavage gastrique pour
l’alimenter.
La motilité spontanée est très faible en dehors des extrémités. La mimique du visage est
conservée, la sensibilité nociceptive est présente. Les réflexes rotuliens ne sont pas
retrouvés, le cri est faible.
Sur le plan dysmorphique, on note un microrétrognatisme et des yeux « en amande ».
Le reste de l’examen clinique est sans particularité.
Face à cette hypotonie avec absence totale de succion, Juliette est hospitalisée dans l’unité
de Néonatalogie le 14 Septembre 1999.
L’évolution est plutôt favorable avec une amélioration du tonus périphérique, plus discrète
au niveau axial. Une ébauche de succion à une semaine de vie motive un début
d’alimentation au biberon complété par le gavage. Juliette boit bien sans fausse route.
Au 10ème jour, elle ouvre les yeux et suit du regard. Un bilan étiologique exhaustif est
effectué.
L’enfant quitte le service le 05 Octobre 1999 avec HAD (pour prise en charge du gavage)
de courte durée car l’autonomie alimentaire au biberon est complète dès la mi-Octobre.
Son poids de sortie est de 3750g. Juliette sera suivie régulièrement en consultation par le
Dr Guillot.
Le bilan étiologique :
Les examens effectués sont :
- un scanner cérébral
- une échographie transfontanellaire
- un électroencéphalogramme
- une ponction lombaire (3 éléments ; protéinorachie=1,55g/l ; glycorachie= 2,80 mmol/l
et cultures stériles)
- un électromyogramme
- un dosage de LDH et CPK
- une recherche de pathologie infectieuse
- une recherche de pathologie métabolique (acide pyruvique, acide lactique, ammoniémie)
- une recherche de toxiques
- un dosage de TSHus
- une radiographie du bassin (nette excentration des 2 têtes fémorales par rapport à l’axe)
- un caryotype en haute résolution avec technique de FISH suivie d’une analyse de l’ADN
avec recherche d’une anomalie de méthylation
Finalement, tous ces examens s’avèrent normaux excepté :
- la radiographie du bassin qui confirme la présence d’une luxation bilatérale (suspectée
en raison de la présence d’un ressaut intermittent au niveau des 2 hanches) avec mise en
route d’un traitement fonctionnel d’évolution favorable à 6 semaines.
- le caryotype en haute résolution avec méthode de FISH est normal. Etant donné la
suspicion diagnostique de SWP, une analyse de méthylation de l’ADN est effectuée. Son
résultat révèle une anomalie de méthylation avec la sonde SNRPN spécifique du
chromosome 15 caractéristique du SWP.
Le résultat est annoncé aux parents par le Dr Guillot. Juliette est alors âgée de 1 mois. Le
mécanisme le plus probable à l’origine de l’anomalie est une disomie uniparentale
d’origine maternelle ou, plus rarement, une mutation du centre d’empreinte.
Afin de trancher entre ces 2 mécanismes, 6 mois plus tard, des prélèvements sanguins
(chez Juliette et ses parents) sont réalisés : ils confirment la DUP d’origine maternelle, de
forme sporadique, sans risque pour la descendance.
Le suivi et la prise en charge :
Nous allons résumer l’évolution de la maladie et sa prise en charge chez Juliette au cours
du suivi par le Dr Guillot et les différents acteurs de santé.
* sur le plan psychomoteur
La kinésithérapie motrice et positionnelle débute dès l’âge de 1 mois (une séance par jour
sauf le dimanche) en libéral.
A partir de 3 ans et face aux progrès constants de Juliette, le rythme est alors de 3 séances
par semaine associé à une séance hebdomadaire de psychomotricité également en libéral.
- à 3 mois : l’hypotonie axiale persiste mais Juliette est plus active. Le contact oculaire est
excellent. Elle commence légèrement à tenir sa tête.
- à 5 mois : la tenue de la tête est acquise. Sur le ventre, elle redresse bien la tête et
commence à ramper. Elle attrape les objets quand ils sont à sa portée, sans changer de
main. Juliette sourit et commence à gazouiller.
- à 8 mois : elle tient assise sans appui. On observe une ébauche de retournement du
ventre sur le dos, mais pas l’inverse. Elle passe les objets d’une main à l’autre.
- à 12 mois : le retournement ventre/dos et dos/ventre est acquis. Juliette se met debout en
se tenant aux meubles et se déplace sur les fesses. Elle gazouille et redouble les syllabes.
- à 18 mois : la marche est acquise.
- à 21 mois : elle monte et descend les escaliers debout en se tenant aux barreaux. Juliette
jargonne et 5 à 10 mots sont repérables (papa, maman, donne, etc).
A ce jour, la prise en charge en kinésithérapie et en psychomotricité se poursuit,
parallèlement à la rééducation orthophonique.
* sur le plan orthophonique
Un bilan orthophonique est réalisé au CAMSP de Choisy-Le-Roi alors que Juliette est
âgée de 21 mois. La rééducation débute à l’âge de 2 ans.
A 2 ans ½, Juliette commence à associer deux mots. Elle répète et comprend les ordres
simples. A 3 ans, elle associe franchement les mots avec des phrases complètes bien
prononcées à 4 ans. Au niveau du graphisme, le travail actuel porte surtout sur le trait, le
rond et l’acquisition d’un graphisme satisfaisant.
Juliette est une enfant agréable, capable de se concentrer sur une activité. Elle s’intéresse
à son environnement et aux autres enfants.
* sur le plan alimentaire et comportemental
- Le diagnostic précoce a permis d’expliquer aux parents (et à l’entourage) la nécessité
d’une hygiène alimentaire rigoureuse et d’un régime équilibré. Dès le début de la
diversification, l’alimentation est contrôlée par la mère qui exclue les sucres et donne le
minimum de graisses nécessaire. L’enjeu diététique est bien compris par les parents et la
croissance pondérale satisfaisante jusqu’à l’âge de 1 an. Elle augmente ensuite
régulièrement (cf courbe staturo-pondérale p.195) avec franchissement des déviations
standards pour le poids (+ 2DS à 2 ans ½). Depuis, le poids de Juliette s’est stabilisé sur
cette déviation avec un poids à 21,1 kgs lors de la dernière consultation avec le Dr Guillot.
Une prise en charge diététique est initiée dès le début de l’accélération de la prise
pondérale. Quelques erreurs sont corrigées : régime riche en protéines et alimentation
lactée trop importante, en insistant sur la nécessité de poursuivre les activités physiques
(en effet, Juliette va à la piscine une fois par semaine depuis l’âge de 5 mois et prend des
cours de danse).
A 4 ans, elle a manifestement une surcharge pondérale qui est peut-être en rapport avec
une alimentation lactée encore trop importante. On ne note cependant ni hyperphagie, ni
gourmandise, ni même une attitude compulsive vis-à-vis de la nourriture. Il n’y a pas de
« chapardage » et Juliette ne réclame pas entre les repas. Elle est un peu frustrée par la
restriction du sucre, surtout lorsqu’elle voit son frère en manger.
- Sur le plan comportemental, Juliette est une enfant plutôt calme et opiniâtre et sa relation
avec les autres enfants est de bonne qualité. Elle est très fusionnelle avec sa mère qu’elle
tyrannise beaucoup. Elle commence à être têtue et colérique à la frustration.
Par ailleurs, l’endormissement est ritualisé (comme son frère) sans problème par la suite
(pas de réveils nocturnes).
* sur le plan relationnel et scolaire
Avant sa première rentrée scolaire, Juliette fréquente la halte-garderie à partir de Juin
2001. Elle est très en contact et s’entend bien avec les autres enfants.
L’intégration scolaire en 1ère puis en 2ème année de maternelle se fait sans difficultés. Elle
va à l’école tous les matins puis est gardée, à domicile, l’après-midi, par une assistante
maternelle ou par sa mère. Juliette déjeune donc à la maison, les plats étant cuisinés par sa
maman.
* sur le plan psycho-familial
- Afin de pouvoir s’occuper de sa petite fille, la mère de Juliette travaille à temps partiel
dès Décembre 1999 (elle est hôtesse de l’air). Le vécu du handicap est très difficile pour
les parents et pour son grand frère Gaël.
Une prise en charge psychologique familiale est poursuivie pendant quelques mois en
libéral. Par la suite, les parents contactent l’association Prader-Willi France et assistent à
des réunions associatives deux fois par mois.
- Sur le plan financier, une prise en charge de l’affection à 100% ainsi qu’une AES sont
attribués.
* sur le plan médical
Il n’y a pas eu d’hospitalisation. Juliette est initialement suivie en ville par son médecin
traitant (le Dr H. à Villeneuve-Le-Roi) puis son pédiatre (le Dr L. à Athis-Mons).
Finalement, selon la classification de Holms, avant l’âge de 3 ans, Juliette présente 5
critères majeurs de diagnostic et 2 critères mineurs (cf tableau 8 p.134) (cf tableau 9
p.214) soit un total de 6 points suffisant pour établir le diagnostic de SWP.
Le bilan multidisciplinaire à l’hôpital Trousseau (Paris 12ème)
A 4 ans, Juliette pèse 21,1 kgs (+ 2 DS) et sa taille est de 98 cm (moyenne). L’examen
clinique est sans particularité hormis une surcharge pondérale nette (pas de scoliose, pas
de lésions de grattage).
La prise en charge globale (kinésithérapie puis psychomotricité, orthophonie) est adaptée
et à poursuivre.
Les examens biologiques sont normaux excepté un taux d’IGF1 abaissé à 57 ng/ml
(normale supérieure à 80 ng/ml). L’évolution staturo-pondérale étant satisfaisante, il n’y a
pas pour l’instant d’indication immédiate à un traitement par hormone de croissance. Un
contrôle biologique est prévu dans un an.
Par ailleurs, l’intégration scolaire est bonne (2ème année de maternelle), il n’y a pas de
problèmes de comportement avec ses petits camarades.
Le souci réside actuellement dans le contrôle pondéral. Le régime doit être maintenu,
renforcé si besoin, les activités physiques sont à poursuivre ainsi que le suivi diététique
(tenue d’un carnet alimentaire hebdomadaire afin de repérer les erreurs alimentaires et
équilibrer la ration calorique quotidienne).
L’évolution est donc globalement favorable et autorise à revoir Juliette dans un an.
Le médecin généraliste (le DR H. à Villeneuve-Le-Roi) :
J’ai contacté le médecin généraliste de Juliette, le Dr H., qui ne l’a pas revu depuis l’âge
de 6 mois. Régulièrement suivie en consultation au cours des premiers mois de vie (suivi
de l’hypotonie, du calendrier vaccinal et traitement des épisodes infectieux), la prise en
charge ambulatoire s’est poursuivie avec le Dr L., pédiatre à Athis-Mons (il s’agit
également du pédiatre de Gaël, le frère de Juliette).
Le médecin généraliste souligne qu’il est informé de l’évolution de l’enfant via les
courriers médicaux hospitaliers et la correspondance du pédiatre.
J’ai également contacté le pédiatre de Juliette. Lors de la dernière consultation, cette petite
patiente était en constante progression sur le plan moteur mais avec une surcharge
pondérale manifeste. Les conseils hygiéno-diététiques ont été réitérés.
Le Dr L. a insisté sur la nécessité d’un suivi régulier (tous les 6 mois en ville) et
pluridisciplinaire en relation avec l’hôpital et le médecin traitant, car c’est certainement lui
qui prendra, à nouveau, le relais à l’adolescence.
Le courrier assure le lien entre les divers acteurs de santé, avec ici, le médecin généraliste,
transitoirement au « second plan », mais qui sera probablement sollicité dans quelques
années, à une période charnière, avec des situations de crise, des troubles
comportementaux d’intensité variable (risque de psychose plus élevé en cas de DUP
maternelle) et où le maintien du régime est indispensable.
Le Dr H. doit donc se tenir informé de l’évolution de Juliette, du suivi et des institutions
assurant sa prise en charge afin d’aider les parents et l’enfant dans le parcours de cette
maladie chronique.
La synthèse :
Le diagnostic précoce de SWP (à l’âge de 1 mois) chez Juliette a permis, non seulement,
une prise en charge immédiate et adéquate, mais également l’identification du mécanisme
génétique quelques mois plus tard : disomie uniparentale d’origine maternelle.
Dans la littérature, la DUP maternelle est associée à une forme moins sévère de la maladie
par rapport aux enfants porteurs d’une délétion paternelle (diminution de la durée du
gavage à la naissance, apparition plus tardive de l’hyperphagie, dysmorphie minime,
diminution du prurit cutané et anomalies modérées de l’articulation verbale) :
- chez Juliette, le gavage a été stoppé rapidement (1 mois après la naissance).
- à partir de 2 ans, apparaît la prise pondérale sans troubles du comportement associés à
type d’hyperphagie ou d’obsessions-compulsions.
- l’enfant présente par ailleurs, peu de signes dysmorphiques (yeux « en amande ») et il
n’est pas mentionné de lésions de grattage.
- ses performances verbales sont limitées et nécessitent une rééducation orthophonique à
partir de l’âge de 21 mois, avec des phrases complètes, compréhensibles à l’âge de 4 ans.
Juliette semble globalement présenter une forme « atténuée » de la maladie. Son
diagnostic précoce ainsi que l’identification de l’anomalie causale sont un élément
important dans la prise en charge : les variations phénotypiques peuvent être expliquées
aux parents sans oublier néanmoins que les études soulignent un risque plus important à
l’adolescence et à l’âge adulte de développer une psychose. Il faudra donc être
particulièrement attentif à tout signe évocateur (et ce d’autant plus que ce sont souvent les
parents qui sont témoins des premiers signes).
Le suivi au long cours permet ainsi aux médecins de réévaluer régulièrement l’évolution
de la maladie chez Juliette. A ce jour, l’excès pondéral est au premier plan. Le reste de la
prise en charge est adaptée (pas d’indication immédiate à un traitement par hormone de
croissance). Quelques troubles du comportement commencent à apparaître (accès de
colère, obstination…) sans répercussion actuelle sur ses qualités relationnelles.
Le suivi ambulatoire pédiatrique est régulier. Le médecin traitant, informé de l’évolution,
aura un rôle majeur au moment de l’adolescence (puis à l’âge adulte) au cours de la prise
en charge de cette période difficile.
Finalement, le développement de Juliette est actuellement satisfaisant, sa famille très
présente, le poids ainsi que les troubles comportementaux sont à surveiller.
Courbe staturo-pondérale de Juliette
V. L’HISTOIRE DE CHELCY M.
Chelcy est née le 24 Mars 2000 à la maternité de l’hôpital intercommunal de VilleneuveSaint-Georges (94).
Dans les antécédents familiaux, on retrouve une myopathie mitochondriale de type III
suivie à l’hôpital Necker (Paris 15ème) chez une cousine paternelle. Chelcy est le 2ème
enfant de parents d’origine Française non consanguins. Elle a un frère né en 1993 et une
petite sœur née en 2001, bien portants.
Le déroulement de la grossesse est sans particularité (on note un tabagisme modéré < à 10
cigarettes par jour), hormis une diminution des mouvements fœtaux (terme ?), plus actifs
en fin de grossesse.
L’accouchement a lieu le 24 Mars 2000 par voie basse au terme de 41 semaines
d’aménorrhée et 1 jour. L’accouchement est eutocyque, le score d’Apgar est à 9 à 1
minute de vie puis à 10 à 5 minutes. Chelcy pèse 2540g, sa taille est de 47 cm et son PC
est à 34,5 cm.
L’examen clinique initial (J1) retrouve une enfant en bon état général, présentant une
hypotrophie modérée, mais avec un examen neurologique anormal. Il existe, en effet, une
hypotonie globale, prédominant au niveau axial. Les réflexes rotuliens sont présents, les
réflexes archaïques également (en particulier, pas de problème de succion ; le Moro est
incomplet). La mobilité spontanée est pauvre chez une enfant qui semble peu éveillée.
Par ailleurs, sur le plan dysmorphique, on note un micrognathisme, un palais ogival et des
commissures labiales supérieures un peu « tombantes ». Le reste de l’examen clinique est
sans particularité.
Devant cette hypotonie globale, persistante dans les premiers jours, sans difficultés
alimentaires, Chelcy est transférée dans l’unité de Néonatalogie le 28 Mars 2000 pour
bilan et prise en charge.
L’évolution est lentement favorable, sur le plan neurologique, avec une amélioration
progressive du tonus passif au niveau périphérique, la présence des réflexes archaïques (le
Moro est toujours incomplet) et un faciès plus éveillé avec un bon contact oculaire.
Chelcy boit correctement ses biberons sans fausse route (poids=2470g à J7).
L’hypotonie axiale persiste, avec une légère amélioration après une semaine
d’hospitalisation. La mobilité spontanée est meilleure, l’alimentation se poursuit sans
problème.
Finalement, au terme d’un bilan clinique et paraclinique, Chelcy quitte le service le 01er
Avril 2000. Son poids de sortie est de 2500g. Elle sera revue et régulièrement suivie en
consultation par le Dr Boivin.
Le bilan paraclinique étiologique :
Face à cette hypotonie, seront réalisés les examens suivants :
- un électromyogramme
- un électroencéphalogramme
- une échographie transfontanellaire
- un scanner cérébral
- un examen ophtalmologique (fond d’œil)
- un dosage des enzymes musculaires (CPK= 680 UI/L puis 95 UI/L ; LDH= 697 UI/L
puis 391 UI/L).
- un dosage de TSHus, T3 et T4.
- une recherche de pathologie infectieuse (bilan biologique, analyse du prélèvement
gastrique, radiographie pulmonaire)
- un caryotype standard (sans recherche spécifique du SWP)
Au total, tous ces résultats sont normaux.
Le suivi et la prise en charge :
Suivie en consultation par le Dr B., nous allons résumer l’évolution de la maladie chez
Chelcy jusqu’au diagnostic porté en Juillet 2002.
* sur le plan psychomoteur
- à 3 mois : il persiste une hypotonie franche au niveau des extenseurs de la nuque (tonus
axial) avec inclinaison de la tête vers la gauche sans torticolis. Le tonus passif est normal.
La mobilité est symétrique et normale. Par ailleurs, Chelcy est une enfant bien éveillée et
souriante.
- à 4 mois : il existe toujours un retard moteur modéré. L’enfant tient bien sa tête dans
l’axe mais ne la soulève pas, en position ventrale, et ne se met pas sur les avant-bras.
L’éveil est satisfaisant. Elle gazouille, suit du regard, joue avec ses mains et commence à
attraper les objets.
- à 7 mois : on note enfin une bonne tenue de la tête et du dos. Le retournement (plat/dos,
plat/ventre) ne sont toujours pas acquis. Chelcy est toujours très souriante (elle rit aux
éclats avec son frère) et calme.
- à 9 mois : la préhension des objets est correcte avec acquisition de la pince pouce/index
et passage des objets d’une main à l’autre. En ce qui concerne la station assise, elle est
presque acquise sans appui avec un dos encore un peu cyphotique.
- à 10 mois : à la demande du Dr Boivin, Chelcy est vue au CAMSP de Choisy-Le-Roi par
le Dr Touati pour avis neuropédiatrique et une éventuelle prise en charge en kinésithérapie
et/ou en psychomotricité.
Après examen clinique et bilan des acquisitions psychomotrices, la rééducation en
kinésithérapie motrice est débutée à l’âge de 10 mois et demi (1 séance par semaine)
relayée par la suite par des séances mensuelles de psychomotricité jusqu’à l’âge de 2 ans.
Un scanner cérébral, une radiographie du crâne (évolution du PC de la moyenne à -2DS)
ainsi qu’une radiographie des hanches, prescrits par le Dr T., s’avèreront normaux.
- à 12 mois : Chelcy a fait de nets progrès sur le plan moteur depuis le mise en route de la
kinésithérapie. Elle commence tout juste à se redresser sur les membres inférieurs mais a
acquis la station assise ainsi que le retournement ; elle se déplace en roulade. La motricité
fine est acquise au niveau des mains. Sur le plan du langage, elle commence à associer
deux syllabes.
- à 19 mois : Chelcy tient debout et marche avec appui. Elle jargonne mais semble bien
comprendre ce qu’on lui dit (examen auditif normal à 13 mois).
- à 24mois : la marche est acquise (à 21 mois). L’enfant monte les escaliers à quatre pattes
et dit quelques mots.
A 2 ans d’âge, l’évolution est satisfaisante au niveau psychomoteur, alors qu’apparaît
parallèlement, une prise de poids importante avec hyperphagie, sans poussée de croissance
nette.
C’est dans ce contexte d’obésité précoce, chez une enfant aux antécédents d’hypotonie
néonatale, qu’on évoque le diagnostic de SWP.
* sur le plan alimentaire et comportemental
Avant l’âge de 2 ans, Chelcy ne présente aucun problème sur le plan alimentaire. Il n’y a
pas de troubles de la succion. On ne relève aucun trouble du comportement ou du
sommeil.
La croissance staturo-pondérale est moyenne (cf courbe staturo-pondérale p.205). A partir
de 2 ans, on note une prise de poids importante avec hyperphagie. Le diagnostic de SWP
est suspecté et un caryotype en haute résolution avec méthode de FISH est effectué chez
Chelcy et ses parents.
Le caryotype confirme le diagnostic chez l’enfant avec présence d’une microdélétion sur
l’un des chromosomes 15. Les caryotypes parentaux sont normaux (il y a un doute sur une
mosaïque de faible effectif pour l’un des chromosomes 15, chez la mère, qui incite, par
précaution, à effectuer un diagnostic prénatal en FISH en cas de grossesse ultérieure).
Finalement, selon la classification de HOLMS, Chelcy présente 5 critères majeurs de
diagnostic (dont un tronqué : en effet, l’hypotonie néonatale ne s’est pas accompagné de
troubles de la succion) (5 points) et un critère mineur (1/2 point) qui est la diminution des
mouvements fœtaux pendant la grossesse, soit un total de 5 points et demi, suffisant pour
porter le diagnostic de SWP (cf tableau 8 p.134) (cf tableau 9 p.214).
Avant même les résultats du caryotype, une prise en charge diététique est mise en place
avec la diététicienne de l’hôpital de Villeneuve-Saint-georges.
- La première consultation, en Juillet 2002, révèle une alimentation hypercalorique avec
une consommation excessive de viandes et de desserts sucrés. Le grignotage est
permanent entre les repas chez une enfant « très gourmande » (poids=13,8 kgs).
La modification des habitudes alimentaires associée à un régime équilibré sont bien
compris par les parents et l’entourage.
- Lors de la deuxième consultation, en Septembre 2002, l’alimentation est bien équilibrée,
normocalorique, avec un poids stable (poids=13,5 kgs). Chelcy réclame moins entre les
repas, sans modification notable de son comportement.
A ce jour, l’évolution est satisfaisante avec poursuite de la prise en charge et du régime
alimentaire. A la dernière consultation du Dr B. (en Novembre 2003), on note une reprise
du poids (+ 3 kgs en 5 mois avec un poids à 18 kgs) bien que Chelcy suive le régime sans
problème, sans grignotage. Elle déjeune à la cantine de l’école depuis septembre 2003, les
plats étant préparés par sa maman. Les efforts sont donc à poursuivre afin de limiter la
survenue d’une obésité.
* sur le plan orthophonique
Suite au diagnostic de SWP, une prise en charge orthophonique, en milieu libéral,
bihebdomadaire, est débutée. Les progrès sont constants et la rééducation orthophonique
poursuivie à ce jour.
* sur le plan relationnel et scolaire
L’intégration en crèche familiale puis à la maternelle à 3 ans ½ se déroule sans problème.
Chelcy est une enfant souriante, en quête de communication, sans difficultés
comportementales.
* sur le plan socio-familial
- La maman reprend son activité professionnelle alors que Chelcy est âgée de 4 mois
(reprise à mi-temps en tant qu’agent administratif). Elle est alors gardée par sa grand-mère
maternelle puis en crèche familiale à partir de l’âge de 6 mois.
Les parents sont présents, informés du handicap de leur enfant, étiqueté SWP à partir de
l’âge de 2 ans. L’évolution naturelle de la maladie et ses particularités sont expliquées aux
parents qui participent pleinement à la prise en charge et au suivi de leur petite fille.
- Sur le plan financier, dans un premier temps, l’AES est refusée par les parents qui
craignent qu’un taux d’invalidité > 50% entraîne des répercussions sur l’intégration
scolaire. Or, le droit à l’AES n’interfère nullement dans l’insertion scolaire, comme le
prouve l’histoire des autres jeunes patients atteints du syndrome. Finalement, à ce jour,
Chelcy bénéficie d’une AES de 3ème catégorie, en plus de la prise en charge en ALD.
*sur le plan médical
On note une hospitalisation du 08 au 09 Février 2002 pour malaise vagal probable suite à
une chute de sa hauteur sans perte de connaissance. L’examen clinique et les explorations
complémentaires à visée cardiaque se sont avérés normaux.
Chelcy a présenté 2 bronchiolites, sans gravité majeure, gérées en ambulatoire par son
médecin traitant.
Le bilan multidisciplinaire à l’hôpital Necker le 22 Mai 2003:
Il s’agit d’une patiente âgée de 3 ans et 2 mois, avec une petite adiposité diffuse. Dans le
cadre du SWP, on note des éléments morphologiques tels qu’un philtrum long au relief
effacé, une lèvre supérieure fine, une étroitesse bitemporale. Elle pèse 15 kgs (+ 1DS) et
sa taille est de 90 cm (- 1,2 DS). L’examen clinique est normal (pas de lésions de grattage,
pas de scoliose).
Sur le plan biologique, un taux bas d’IGF1 (58 ng/ml pour une normale > à 80 ng/ml)
pourrait évoquer un déficit en GH. Cependant, la croissance de Chelcy est tout à fait
satisfaisante avec même un rattrapage au cours des derniers mois et une prise de poids
bien contrôlée depuis l’annonce du diagnostic. Il n’y a donc pas d’indication immédiate à
un traitement par l’hormone de croissance. La prise en charge orthophonique est à
poursuivre. Au niveau moteur, selon le Dr C. (médecin rééducateur), il persiste une
hypotonie modérée, sans problème orthopédique hormis une hyperlaxité. On conseille la
pratique de sports tels que la natation et la danse.
La prise en charge diététique est adaptée. Les parents et l’entourage sont observants.
Cette consultation soulève, en revanche, un problème non signalé auparavant. C’est la
présence d’un ronflement nocturne depuis quelques mois avec notion d’irrégularité
respiratoire. Une polysomnographie du sommeil est réalisée le 06 Novembre 2003 à
l’hôpital Robert Debré (Paris 19ème) : elle révèle un trouble obstructif majeur avec
désaturations nocturnes profondes, motivant une consultation dans le service d’ORL de
l’hôpital de Villeneuve-saint-Georges le 24 Novembre 2003. Devant ce syndrome patent
d’apnées du sommeil et une hypertrophie amygdalienne bilatérale à l’examen clinique,
une amygdalectomie est proposée et effectuée le 09 Décembre 2003. L’intervention se
déroule sans problème et les suites opératoires sont simples.
Le dernier point concerne l’intégration scolaire. La rentrée en petite section de maternelle
en Septembre 2003 s’est bien passée et une évaluation psychométrique est à prévoir en
2005 afin d’adapter les propositions scolaires en fonction de ses capacités (intégration au
CP, orientation en CLIS, etc).
Finalement, la prise en charge globale est adéquate, la croissance staturo-pondérale est à
surveiller (d’autant plus que la prise de poids est rapide à partir de 3 ans ½) afin de
réévaluer la nécessité de la mise en route d’un traitement par hormone de croissance.
Le médecin généraliste (Dr C. à Brunoy) (91) :
Ce qui a attiré l’attention du médecin généraliste, c’est la présence d’une hypotonie axiale
majeure, d’amélioration progressive au fil des consultations.
Il a été informé de l’hospitalisation de Chelcy dans la période néonatale puis de son
évolution par les courriers successifs du Dr B. « J’ai pris en charge cette enfant comme
tout autre patient, en tentant de rassurer la maman, très inquiète, et en suivant
particulièrement l’évolution de cette hypotonie ».
Le Dr C. a insisté sur son rôle de soutien, quasi-psychothérapeutique, vis-à-vis de la mère
de l’enfant, anxieuse par l’absence précise initiale de diagnostic. Ne pas savoir ce que
c’est et comment cela va évoluer est souvent très difficile pour les parents. Il ne faut pas
« paniquer » soi-même afin de les rassurer et suivre les progrès ou les difficultés de
l’enfant avec eux.
L’annonce du diagnostic a été « bénéfique ». La mère de Chelcy a d’ailleurs
immédiatement informé le médecin généraliste avant même l’hôpital. Il a suivi sa prise en
charge en kinésithérapie puis en psychomotricité au CAMSP de Choisy-le-Roi. La
rééducation orthophonique est toujours en cours. Il est au courant du risque d’obésité lié
au syndrome et de la nécessité d’une surveillance accrue (dernier poids au cabinet en
Décembre 2003=18 kgs).
Par ailleurs, le Dr C. gère les pathologies infectieuses bénignes et le calendrier vaccinal.
Le plus important, m’explique t-il, c’est de s’impliquer, même s’il n’y a pas (encore) de
diagnostic. Il faut accompagner l’enfant et ses parents sur le plan médical, humain et
psychologique, et mettre en place une prise en charge secondairement adaptée à
l’affection si besoin.
La synthèse:
Cette observation reflète la difficulté du diagnostic de SWP lorsque le tableau clinique est
pauci-symptômatique. En effet, Chelcy présentait une hypotonie néonatale sans trouble de
la succion ni difficultés alimentaires, avec un premier bilan paraclinique négatif.
Le premier « indice » était dans l’évolution de la grossesse intra-utérine avec une
diminution des mouvements fœtaux. L’amélioration progressive du tonus avec un retard
modéré des acquisitions ont conduit à une prise en charge en kinésithérapie puis en
psychomotricité au CAMSP à partir de 10 mois, et ce jusqu’à 2 ans.
C’est à partir de cet âge qu’apparaît le comportement hyperphagique avec prise de poids
rapide évoquant le diagnostic de SWP confirmé par le caryotype à haute résolution en
méthode de FISH.
Une prise en charge diététique et orthophonique est rapidement mise en place, toujours
poursuivie à ce jour. Sur le plan scolaire, l’intégration est bonne.
Le médecin généraliste, informé du diagnostic, assure le suivi ambulatoire. Il participe au
bon équilibre psychologique de Chelcy et ses parents, mais également de la fratrie qui
souffre, elle aussi, du handicap présent (le Dr C. suit les deux autres enfants de Mme M.).
L’objectif pour Chelcy est avant tout le contrôle du poids, chez cette enfant actuellement
âgée de 4 ans ½ , et des troubles comportementaux qui commencent à apparaître (crises de
colère, caprices et bouderie). Elle bénéficie d’une prise en charge adaptée qui devrait lui
permettre de progresser au sein du noyau familial.
Finalement, dans cette observation, un suivi au long cours pour retard global des
acquisitions a permis de suspecter un SWP dès la prise de poids (étant donné l’antécédent
d’hypotonie néonatale). Le suivi régulier a donc permis d’établir le diagnostic, de
renforcer des mesures préalables (régime alimentaire, conseils diététiques…), proposer
une rééducation orthophonique et un bilan multidisciplinaire spécifique à cette pathologie.
Les parents sont informés des particularités de l’évolution et sont entrés en contact avec
l’association Prader-Willi France.
Courbe staturo-pondérale de Chelcy
VI. L’HISTOIRE DE CHRISTINE G.
Christine est née le 03 Janvier 1980 à la maternité de l’hôpital de Villeneuve-SaintGeorges (94).
Les antécédents familiaux sont sans particularité. Il s’agit du 4ème enfant de parents
d’origine Française (non consanguins) âgés de 38 ans. Son frère (5 ans) et ses deux sœurs
(âgées de 3 et 9 ans) sont en bonne santé.
La grossesse a été mal suivie (date des dernières règles inconnue). Cependant, il a été
constaté par le médecin traitant un hydramnios à partir de 29-30 semaines d’aménorrhée.
D’autre part, en réinterrogant Mme G., après la naissance de sa fille, elle indique une
apparition tardive des mouvements fœtaux vers le 6ème mois, quasi-inexistants à partir du
7ème mois de grossesse. On note enfin, un tabagisme certain : deux paquets de cigarettes
par jour.
L’accouchement a lieu le 03 Janvier 1980, par voie basse, au terme de 37 semaines
d’aménorrhée, après une rupture de la poche des eaux de 4 jours. Le score d’Apgar est à 7
à 1 minute, à 8 à 3 minutes et à 5 minutes de vie.
On constate d’emblée une hypotonie. Christine pèse 2750g, sa taille est de 49,5 cm et son
périmètre crânien est de 36 cm.
Le premier examen clinique (à 2 heures de vie) retrouve une enfant très hypotonique (sur
le plan périphérique et axial) avec une attitude spontanée en batracien et une aréflexie
tendineuse au niveau des rotuliens (les réflexes sont présents au niveau des membres
supérieurs). Le grasping et le Moro sont incomplets, le réflexe de marche est absent. La
succion est présente mais très faible. Il n’y a pas de dysmorphie évidente ; on note,
cependant, une protrusion des petites lèvres au niveau vaginal. Le reste de l’examen
clinique est sans particularité.
L’hypotonie globale associée à des troubles vasomoteurs (accès de pâleur et marbrures
intermittentes) dans un contexte de rupture prématurée de la poche des eaux font suspecter
dans un premier temps, une infection néonatale motivant le transfert et l’hospitalisation
dans l’unité de Néonatalogie.
L’évolution dans le service permet d’infirmer une éventuelle infection néonatale et
confirme les troubles neurologiques constatés dès la naissance.
En effet, sur le plan neuromoteur, l’hypotonie est patente (surtout au niveau axial : aucune
tenue ni redressement de la tête, pas de redressement du tronc) avec absence totale de
gesticulation spontanée et attitude permanente en batracien. Le tonus passif est médiocre,
la mimique est pauvre et le cri est faible. L’état neurologique semble s’aggraver après les
premiers jours de vie avec difficultés de succion et obligation de gavage à 10 jours de vie.
La succion disparaît, les autres réflexes archaïques demeurent inchangés et l’enfant est
somnolente. Un premier bilan neurologique est réalisé.
Sur le plan alimentaire, le gavage se déroule sans difficulté progressivement relayé par
une alimentation au biberon quinze jours plus tard dès la reprise de la succion.
L’évolution est lentement favorable, sur le plan alimentaire et neuromoteur, avec une
légère amélioration de la motilité spontanée, une succion récupérée, des réflexes rotuliens
faibles retrouvés aux membres inférieurs.
Christine est adressée le 01er Février 1980 dans le service du Professeur Arthuis à l’hôpital
Saint-Vincent de Paul (Paris 14ème) pour compléter son bilan.
Les explorations s’avèreront négatives et on conclut à un tableau d’encéphalopathie
anténatale fixée, caractérisée par une très grande hypotonie à prédominance axiale et
également, une absence de contact avec l’entourage. L’étiologie reste obscure
(tabagisme ? infection ? autre ?).
L’enfant retourne dans le service de Pédiatrie de l’hôpital de Villeneuve-Saint-Georges le
12 Février 1980. On note une hypotonie axiale persistante malgré une amélioration nette
de la gesticulation spontanée. La mimique reste pauvre. Les réflexes ostéo-tendineux sont
présents aux membres supérieurs et inférieurs. L’alimentation au biberon se déroule sans
problème (succion normale) et la prise pondérale est satisfaisante.
Christine part en pouponnière le 08 Mars 1980 à Arbonne (77). Son poids de sortie est de
4100g. Elle sera suivie par le Dr Hibon à la pouponnière ainsi que le Dr Guillot et le
Dr Dulac (à l’hôpital Saint-Vincent de Paul) en consultation.
Le bilan paraclinique :
Seront réalisés les examens suivants :
- un électromyogramme
- un dosage des enzymes musculaires (CPK, ASAT et ALAT)
- un électroencéphalogramme
- des radiographies du crâne
- un scanner cérébral (normal mais avec un élargissement direct des espaces péricérébraux
et du sillon interhémisphérique)
- un bilan ophtalmologique (fond d’œil)
- une ponction lombaire avec analyse bactériologique du liquide céphalorachidien
(cultures négatives)
- une recherche exhaustive de pathologie infectieuse (biologique et paraclinique)
- une enquête sérologique : cytomégalovirus, herpès, toxoplasmose, rougeole et rubéole
- un dosage de TSHus
- une chromatographie des acides aminés urinaires
- un caryotype standard (le 14 Janvier 1980) avec technique en bandes R.
Les résultats sont normaux et l’on retient le diagnostic d’encéphalopathie anténatale fixée
d’étiologie indéterminée. Le diagnostic de SWP ne sera porté que bien plus tard vers l’âge
de 5 ans. Nous reviendrons sur les circonstances du diagnostic.
Le suivi et la prise en charge:
Nous allons résumer l’évolution de Christine durant ses 6 mois en pouponnière. En
l’absence de diagnostic initial, la prise en charge n’est pas « stéréotypée » comme pour les
autres enfants. Elle est surtout centrée sur le plan psychomoteur et comportemental.
- à 2 mois (à son arrivée dans la pouponnière): le tonus des membres supérieurs est faible
mais néanmoins présent. Le tonus du tronc est très diminué. Le regard est relativement
immobile avec une mauvaise poursuite oculaire probablement en rapport avec une
hypotonie des muscles oculomoteurs.
- à 4 mois : on note une amélioration du tonus au niveau périphérique. Il existe une
poursuite oculaire manifeste avec un strabisme convergent alternant.
La motilité spontanée est meilleure. Christine sourit rarement. En revanche, elle se met en
colère assez fréquemment.
- à 6 mois : la gesticulation est bien meilleure, plus active et plus rapide. La posture est
modifiée avec enfin, disparition de l’attitude en batracien. La tenue de la nuque est
toujours aussi peu active avec tendance à la chute en arrière. Sur le ventre, Christine
tourne bien sa tête et on note une ébauche de redressement.
- à 8 mois (à sa sortie de la pouponnière): L’évolution est toujours très lente mais certaine
avec une impression d’amélioration de la tenue de la tête. Le tonus du tronc est encore très
faible. Le strabisme convergent est persistant. Le grasping a disparu. L’enfant joue avec
ses mains mais ne tente pas d’attraper un objet. Elle commence à gazouiller, sourit et se
met particulièrement en colère lorsqu’elle a faim (dès l’âge de 5 mois).
Christine est vue en consultation, à intervalle régulier, par le Dr Dulac et le Dr Guillot qui
suivent son évolution, parallèlement à son suivi en pouponnière avec le Dr Hibon.
Finalement, l’évolution a été lente avec quelques améliorations modestes du
développement psychoaffectif. Plusieurs éléments restent à surveiller :
- le développement psychoaffectif qui doit être meilleur avec une stimulation familiale
quotidienne (Christine est gardée par une nourrice dans la journée).
- le développement neurologique, et en particulier, l’hypotonie qui reste très importante.
- le strabisme (qui semble améliorable par les techniques d’occlusion).
- par ailleurs, il existe des problèmes orthopédiques manifestes :
•
les hanches, de type dysplasique, nécessitent un langage en abduction pendant
plusieurs mois avec une évolution clinique et radiologique favorable.
•
ses pieds, en talus valgus, doivent être stimulés avec port d’attelles pour éviter
l’aggravation de la déformation.
- l’enfant présente une certaine susceptibilité respiratoire (rhinopharyngites à répétition et
un épisode de bronchiolite rapidement résolutif après antibiothérapie et kinésithérapie
pluriquotidienne au cours de son séjour à la pouponnière) probablement en raison de
l’hypotonie des muscles thoraciques. Il faut donc veiller à traiter vigoureusement les
affections rhinopharyngées et respiratoires.
Son poids de sortie est de 7475g, elle mesure 38 cm et son PC est de 44 cm.
L’alimentation au biberon se déroule sans difficultés et Christine quitte la pouponnière le
27 Septembre 1980 avec retour au domicile.
Elle sera suivie par le Dr Dulac et le Dr Guillot ainsi que son médecin traitant (le Dr C. à
Brunoy) (91).
En pratique, Christine ne sera pas revue pendant un an (seul son médecin généraliste la
voit périodiquement).
Elle est ensuite hospitalisée une première fois, du 01er au 08 Décembre 1981 dans le
service de Pédiatrie de l’hôpital de Villeneuve-Saint-Georges pour une laryngite
striduleuse et une angine érythémato-pultacée. A cette occasion, l’évaluation du
développement psychomoteur révèle la persistance de l’hypotonie avec une marche non
acquise (à 23 mois). C’est une enfant sociable et souriante. L’évolution staturo-pondérale
est satisfaisante sans difficultés alimentaires majeures.
Après cette hospitalisation, le suivi pédiatrique et neurologique est à nouveau interrompu.
Une seconde hospitalisation du 03 au 12 Juin 1982 pour un syndrome subocclusif sans
étiologie retrouvée et d’évolution favorable sous traitement symptomatique permet de
vérifier les progrès de l’enfant.
Christine marche depuis l’âge de 24 mois. L’hypotonie demeure sans hypotrophie
associée. Son développement pondéral est normal (poids=10,5kgs) (cf courbe staturopondérale p.213). Une évaluation fine et précise des acquisitions ne peut être effectuée
devant le refus des parents.
Un an plus tard, le Dr Dulac revoit l’enfant dont les progrès sont très nets. Christine
commence à dire quelques mots, gazouille, a un excellent contact et s’intéresse à
l’entourage. Il persiste une hypotonie globale mais la force musculaire est normale.
Le strabisme a tendance à diminuer. Les malformations des pieds sont corrigées par une
paire de chaussures adaptées.
Une lettre du centre Caragan (institut médico-éducatif à Fontainebleau) (77) en Novembre
1986 informe le Dr Guillot de la prise en charge de Christine dans cet établissement.
L’enfant est ensuite perdue de vue. Ce n’est qu’en 2002, à la suite de la rencontre du père
par le Dr Guillot que le diagnostic de SWP porté à l’IME (Christine est âgée de 5 ans) sera
connu par l’équipe médicale qui a pris en charge l’enfant initialement.
Son médecin traitant et le médecin de l’établissement médico-éducatif chargé du suivi de
Christine ont cessé leur activité professionnelle. Je n’ai pu obtenir que quelques
informations « récentes » (la patiente a quitté le centre il y a 2 ans) grâce à une infirmière
qui s’est occupé de la patiente pendant de nombreuses années.
Les troubles du comportement, notamment alimentaires, et la prise pondérale dominent le
pronostic chez cette jeune femme, à présent, âgée de 24 ans. C‘est l’apparition de la
pléthore avec hyperphagie, aux alentours de 3-4ans qui a permis d’évoquer le diagnostic.
Il persiste un retard moteur (hypotonie avec troubles de la statique) et développemental
global. Les parents de Christine ont déménagé et la patiente a été transférée dans un centre
à proximité de leur domicile.
Selon la classification des critères de Holms, avant l’âge de 3 ans, Christine présentait 3
critères majeurs de diagnostic et 1 critère mineur soit un score de 3 points et demi
insuffisant pour porter le diagnostic de SWP (cf tableau 8 p.134) (cf tableau 9 p.214).
Cependant, ce score est probablement sous-estimé, les divers aspects cliniques et
paracliniques de la maladie n’ayant pas été évoqués (l’origine génétique du SWP n’était
pas connue à cette époque).
La synthèse :
Encore trop peu connu à l’époque, le SWP n’a été porté qu’à l’âge de 5 ans devant
l’apparition de troubles du comportement alimentaire. L’absence de suivi après l’âge de
4 ans, en moyenne, ne permet pas de déterminer si une prise en charge spécifique a été
débutée à l’ IME, suite au diagnostic, sur le plan diététique ou un autre volet de la maladie
(orthophonique, comportemental…).
Cette jeune femme, a présent, reste peu autonome avec des difficultés statiques,
pondérales et comportementales majeures, avec une absence d’intégration socioprofessionnelle, conséquences qui auraient probablement pu être limitées en cas de
diagnostic précoce.
Cette histoire reflète les différences entre la prise en charge actuelle et celle de Christine
dans les années 80. Elle révèle également le côté exemplaire de l’évolution naturelle de la
maladie.
Une hypotonie centrale néonatale doit faire évoquer le SWP (même en l’absence de
troubles de la succion, comme chez Christine ou Chelcy) d’autant plus s’il apparaît
secondairement une hyperphagie associée à des troubles du comportement alimentaire ou
non. Elle suppose un suivi régulier de l’enfant.
La rupture de ce suivi et les prémices des techniques de génétique moléculaire ont
entraîné, chez Christine, un retard de diagnostic avec malheureusement, une évolution peu
favorable sur le plan médical et socio-familial.
CRITERES
CRITERES MAJEURS DE
DIAGNOSTIC
CRITERES MINEURS DE
DIAGNOSTIC
PATIENTS
Courbe de croissance staturo-pondérale de Christine
TONY
- TOUS les critères majeurs de diagnostic soit tous
les critères cités pour Perrine y compris
l’hyperphagie, la recherche constante de nourriture et
le comportement obsessionnel vis-à-vis de
l’alimentation.
CHRISTOPHE
- Hypotonie centrale néonatale et infantile entraînant
une difficulté à têter, s’améliorant progressivement
avec l’âge.
- Difficulté à s’alimenter avec recours au gavage.
- Prise de poids excessive entre 1 et 6 ans.
- Hypogonadisme avec cryptorchidie bilatérale et
scrotum peu développé.
- Retard global du développement avant 6 ans.
PERRINE
- Hypotonie centrale néonatale et infantile entraînant
une difficulté à têter, s’améliorant progressivement
avec l’âge.
- Difficulté à s’alimenter entraînant le recours au
gavage.
- Prise de poids excessive entre 1 et 6 ans.
- Hypogonadisme avec hypoplasie des petites lèvres.
- Retard global du développement avant 6 ans.
- Délétion 15q11-13 confirmée par le test de FISH.
JULIETTE
CHELCY
CHRISTINE
- Problèmes de comportement
caractéristiques*.
- Mains petites.
- Problèmes d’articulation au niveau
du langage.
- Un indice supplémentaire : capacité
inhabituelle à réaliser des puzzles.
-Diminution des mouvements
fœtaux pendant la grossesse.
- Problèmes d’articulation au niveau
du langage.
- Hypotonie centrale néonatale et infantile entraînant
une difficulté à têter, s’améliorant progressivement
avec l’âge.
- Difficulté à s’alimenter avec recours au gavage.
- Prise de poids excessive entre 1 et 6 ans.
- Retard global du développement avant 6 ans.
- DUP confirmée par analyse de microsatellites.
- Diminution des mouvements
fœtaux pendant la grossesse.
- Problèmes d’articulation au niveau
du langage.
- Hypotonie centrale néonatale et infantile (mais pas
de troubles de la succion).
- Prise de poids excessive entre 1 et 6 ans.
- Retard global du développement avant 6 ans.
- Hyperphagie - recherche constante de nourriture.
- Délétion 15q11-13 confirmée par le test de FISH.
- Diminution des mouvements
fœtaux pendant la grossesse.
- Hypotonie centrale néonatale et infantile (mais pas
de troubles de la succion).
- Prise de poids excessive entre 1 et 6 ans.
- Retard global du développement avant 6 ans.
(-Type d’anomalie chromosomique ?)
- Diminution des mouvements
fœtaux pendant la grossesse.
* crises de colère, accès de violence, comportement obsessionnel/compulsif, opposition systématique et tendance au vol.
Tableau 9 : Récapitulatif des critères MAJEURS et MINEURS de diagnostic du SWP
chez les six enfants.
B. DISCUSSION ET REFLEXION A PARTIR DES DOSSIERS
DES ENFANTS
Notre série rétrospective, bien que modeste, nous permet de faire quelques observations.
Nous reviendrons rapidement sur certaines particularités cliniques puis nous insisterons
davantage sur deux points essentiels : la présentation et l’évolution du syndrome jusqu’à
l’annonce de la maladie et la prise en charge et le suivi avant et après le diagnostic.
I. AVANT LE DIAGNOSTIC DE SWP
I.1. Sur le plan clinique
Anamnèse : Tous les enfants de la série sont issus de parents non germains sauf pour l’un
d’entre eux (Tony). Il n’y a pas d’antécédents familiaux génétiques particuliers excepté
une myopathie mitochondriale de type III chez la cousine de Chelcy (au second degré).
Or, la littérature ne mentionne pas de corrélation entre la probabilité de survenue de la
maladie et le degré de parenté ainsi que les éventuels antécédents familiaux de l’enfant
atteint du syndrome.
Les signes cliniques anténataux :
- On observe une réduction de l’activité fœtale au cours de la grossesse dans 67% des cas
dans notre étude, chiffre estimé à 76% dans les données de la littérature (31) (52).
- 1 enfant sur 6 est né prématurément avec une présentation par le siège pour l’un d’entre
eux (il ne s’agit pas de celui né prématurément). Ces chiffres sont inférieurs à ceux de la
littérature (41 % de naissances prématurées et 26% de présentation par le siège) (31) (52)
probablement en rapport avec le faible effectif de notre série.
Si la prématurité et la présentation par le siège sont des situations, il est vrai, peu
spécifiques d’une affection particulière, la diminution des mouvements fœtaux est un
signe anténatal fréquent dans le SWP puisqu’il est retrouvé dans 2/3 des cas dans notre
série.
L’interrogatoire de la mère est donc primordial : une hypomotilité fœtale, associée à une
hypotonie, dès la naissance de l’enfant permet, non pas d’affirmer, mais d’évoquer le
SWP d’autant plus s’il y a des troubles de l’alimentation associés.
A la naissance :
- L’hypotonie est présente dans 100% des cas comme dans la littérature ( ). Il s’agit
toujours d’une hypotonie diffuse, globale, prédominante sur le plan axial, d’amélioration
progressive pour tous les enfants au cours des trois premiers mois.
- On note une absence de mouvements spontanés chez les 6 enfants et une succion faible
voire absente chez 86% d’entre eux, entraînant un recours au gavage.
Celui-ci est interrompu, en moyenne, aux alentours de 1 à 2 mois (un cas d’hypotonie
sévère avec gavage prolongé jusqu’à 7 mois), un peu plus précocement que ce qui est
mentionné dans la littérature (3 mois) (31).
Le mécanisme de l’anomalie génétique (délétion ou DUP) ainsi que le diagnostic précoce
pour 50% d’entre eux expliquent probablement, en partie, une durée de gavage raccourcie
grâce à une prise en charge et une stimulation adaptée dès la période néonatale. Il apparaît
cependant que pour les 3 enfants dont le diagnostic a été porté ultérieurement, soit il n’y
avait pas de troubles de la succion (Chelcy et Christine), soit la durée du gavage s’est
révélée inférieure à 3 mois (amélioration rapide du réflexe de succion et alimentation à la
cuillère à partir de 2 mois chez Christophe).
L’hypotonie constante et les troubles de la succion, fréquemment retrouvés dans le SWP
orientent le diagnostic dès la naissance. La durée du gavage semble aléatoire et variable
selon le degré d’hypotonie.
- Le syndrome dysmorphique peut être évident dès la naissance mais il est habituellement
plus net à partir de l’âge de 2 ans selon la littérature ( ). Dans notre série, on remarque
effectivement que seul 2 enfants sur 6 présentent une anomalie morphologique
caractéristique du SWP à la naissance (commissures labiales supérieures « tombantes »
chez Chelcy et yeux « en amande » chez Juliette) avec une évolution franche vers la
dysmorphie après l’âge de 2 ans pour 84% d’entre eux.
Finalement, il existe des signes dysmorphiques pathognomoniques du SWP dont la
présence dès la période néonatale suggère le diagnostic lorsqu’ils sont associés à une
hypotonie et/ou à des troubles de l’alimentation. Cependant, leur absence, au début de la
vie de l’enfant, n’exclut pas le diagnostic, la dysmorphie étant plus apparente à partir de
l’enfance (comme il est observé dans notre série).
- Le dernier point concerne les anomalies génitales : on note la présence d’une ectopie
testiculaire chez les 2 garçons de l’étude (avec en plus, un micropénis chez Tony) et une
hypoplasie des organes génitaux féminins (petites lèvres) chez 50% des filles.
Dans la littérature (31), les anomalies génitales sont beaucoup plus fréquentes chez les
garçons que chez les filles (80 à 90%) et notre série corrobore les chiffres actuels.
Au total, avant même l’étude cytogénétique et le suivi propre à l’affection, un certain
nombre de signes anténataux et néonataux doivent attirer l’attention et faire évoquer le
diagnostic pour tout médecin qui examine l’enfant. D’après notre étude (et dans la
littérature), en période anté et néonatale, on pourrait résumer le SWP en quelques motsclés :
- hypomobilité fœtale
- hypotonie
- troubles de la succion
- hypogonadisme
- (+/- syndrome dysmorphique).
En pratique, nombre de médecins généralistes suivent les grossesses en ambulatoire et ce
chiffre risque de s’accroître au regard de la pénurie prévisionnelle des gynécologues en ville.
Une diminution des mouvements fœtaux actifs en fin de grossesse au-delà de la surveillance
obstétricale et échographique nécessaire doit alerter le médecin traitant afin de permettre un
diagnostic le plus précoce possible en coopération avec l’équipe hospitalière face à un tableau
d’hypotonie néonatale chez le nouveau-né.
I.2. La prise en charge et le suivi (avant le diagnostic)
* sur le plan psychomoteur
Le diagnostic précoce pour 3 des enfants de la série a permis une prise en charge
immédiate pluridisciplinaire. Pour les 3 autres :
- Chelcy a bénéficié d’une rééducation en psychomotricité et en kinésithérapie à partir de
10 mois environ devant un retard global des acquisitions.
- Pour Christophe, une prise en charge en psychomotricité, initialement intrahospitalière
puis au CAMSP de Choisy-Le-Roi, est mise en place dès son plus jeune âge.
- Il n’y a pas de rééducation particulière pour Christine au cours de son séjour en
Pouponnière. On note une amélioration lente de ses acquisitions psychomotrices.
Finalement, que l’étiologie soit connue ou non, l’hypotonie est un signe d’alerte qui
motive une prise en charge rééducative en kinésithérapie et/ou en psychomotricité comme
c’est le cas pour 84% des enfants de notre étude. Le suivi au long cours de cet handicap,
en l’absence de diagnostic, permet à la fois d’évaluer les progrès de l’enfant et de repérer
l’apparition de symptômes orientant vers une affection particulière telle que le SWP.
C’est l’hyperphagie avec prise pondérale excessive, à partir de 2 ans d’âge, qui a permis
chez Chelcy et Christophe d’identifier la maladie (surcharge pondérale à partir de 3-4 ans
chez Christine avec un diagnostic à l’âge de 5 ans seulement connu par l’équipe médicale
depuis 2 ans).
Dans notre étude, et dans le cadre du SWP, l’évolution de l’hypotonie est primordiale
pour tout médecin qui suit l’enfant. Il s’agit de faire le point sur le bilan des acquisitions et
permettre un diagnostic devant la présence de symptômes évocateurs.
* sur le plan orthophonique
Les troubles du langage (retard d’acquisition de la parole, pauvreté du vocabulaire et/ou
difficultés d’articulation) sont présents chez tous les enfants de la série avec un jargon qui
apparaît aux alentours de 23,8 mois en moyenne. La littérature (31) mentionne, en effet,
des difficultés d’acquisition de la parole chez les enfants atteints du SWP du fait de la
petitesse de la bouche et de l’hypotonie des muscles articulatoires. Les troubles du
langage sont un critère mineur de la maladie selon la classification de Holms.
On distingue dans la littérature, la rééducation bucco-faciale (il s’agit de stimuler la
sensibilité et la motricité bucco-faciale dès les premiers jours) qui précède la rééducation
du langage. Aucun enfant, dans notre étude, n’a bénéficié de cette rééducation spécifique
avant le diagnostic, avec cependant, une stimulation active de la succion et la déglutition
par les parents dans plus de 65% des cas.
L’absence de prise en charge rééducative de la parole, pour 3 des enfants de la série, avant
le diagnostic, s’explique probablement par leur âge au moment de l’identification de la
maladie. Ainsi, Chelcy et Christophe sont âgés de 2 ans lors du diagnostic, âge médian
d’apparition du langage dans le cadre d’un retard global des acquisitions. Nous ne savons
pas si Christine a bénéficié d’une prise en charge orthophonique.
Il n’y a donc pas, ou peu, de troubles du langage avant le diagnostic. C’est le suivi, dans
notre étude, d’enfants présentant un retard global des acquisitions (en particulier, une
hypotonie) qui permet de repérer les difficultés langagières et d’en assurer la prise en
charge.
* sur le plan diététique et comportemental
- L’âge moyen d’apparition du surpoids est de 21,4 mois dans notre série. Il est aux
alentours de 2 ans dans la littérature (31).
Il n’y a pas de prise en charge diététique spécifique avant le diagnostic, puisque c’est
l’hyperphagie avec surcharge pondérale, vers 21 mois, qui a permis d’évoquer et de
confirmer la maladie chez les enfants dont l’étiologie restait indéterminée, d’où la
nécessité du suivi.
- Sur le plan comportemental, avant le diagnostic, on note la présence d’un comportement
« stéréotypé » chez Christophe à partir de 20 mois :
entêtement, exigence, accès de colère et tyrannie avec son entourage
capacités d’attention labiles, intolérance à la frustration et difficultés à
suivre des consignes strictes et précises.
Juliette et Tony présentent, également, des troubles du comportement fréquents dans le
SWP (opiniâtreté, colère à la frustration, tyrannie) tandis qu’aucun problème
comportemental n’est mentionné chez Chelcy. Christine présente des accès de colère dès
l’âge de 5 mois (sans autre trouble signalé).
Dans la littérature ( ), ces troubles apparaissent en moyenne vers l’âge de 1 à 2 ans. Le
faible effectif de notre série n’est pas représentatif de la fréquence des divers troubles du
comportement observés dans le SWP (par exemple, 88% d’accès de colère dans une
population de 100 patients atteints du syndrome de 4 à 46 ans) (31).
La prise en charge initiale chez les enfants se résume à la surveillance de l’évolution de
ces anomalies comportementales.
Ainsi, lorsqu’on analyse la prise en charge et le suivi des enfants, avant le diagnostic, dans
notre série, il apparaît clairement que l’hypotonie est le fil directeur de l’évolution.
Son suivi au long cours permet d’évaluer les progrès des jeunes patients et de constater
l’émergence de symptômes qui s’intègrent dans le SWP confirmé par étude cytogénétique.
L’évolution naturelle de la maladie est biphasique. La présentation néonatale du syndrome
évolue avec apparition d’une surcharge pondérale et de troubles de degré variables que
seul un suivi régulier et coordonné permet de dépister. L’intérêt est de porter un diagnostic
afin de permettre une prise en charge adaptée et pluridisciplinaire. C’est ce suivi qui a
permis dans 100% des cas dans notre étude d’identifier le syndrome en période néonatale
et dans l’enfance (pour Christine, le diagnostic a été porté par l’équipe médicale de
l’IME).
I.3. Sur le plan paraclinique
Quels ont été les examens paracliniques effectués dans notre étude face à une hypotonie
néonatale ? Parmi les examens les plus fréquents, on retrouve :
- la réalisation d’un électroencéphalogramme dans 100% des cas.
- le scanner cérébral et l’électromyogramme dans 84% des cas.
- un dosage de TSHus dans 67% des cas.
- le fond d’œil et l’échographie transfontanellaire sont réalisés dans la moitié des cas
ainsi que le dosage des CPK.
- 1/3 des enfants bénéficient d’une ponction lombaire avec étude et analyse
bactériologique du liquide céphalorachidien (LCR).
- une seule biopsie musculaire (Perrine) est effectuée.
- enfin, chez tous les enfants de la série est réalisé un caryotype à la naissance.
Il s’agit d’un caryotype standard pour 1/3 des enfants complété dans tous les cas,
secondairement, par la méthode de l’hybridation par fluorescence in situ (FISH)
permettant le diagnostic (délétion paternelle).
On réalise chez 2/3 des enfants un caryotype en haute résolution avec technique de
FISH suivi d’une analyse de méthylation en cas de négativité des résultats.
Un profil de méthylation anormal s’accompagne alors de l’étude des microsatellites les
plus fréquemment explorés dans le SWP (loci D15S11 et GABRD3). Leur recherche
positive confirme le mécanisme impliqué (DUP) et la maladie.
Au total, dans notre étude, en cas de suspicion de SWP, la démarche diagnostique est la
suivante :
Caryotype en haute résolution avec méthode de FISH
Si positif :
SWP confirmé
Si négatif :
Analyse du profil
de méthylation
Si positif :
Analyse de microsatellites
Si négatif :
Le SWP serait exclu
Confirmation du SWP
(en présence des loci caractéristiques)
Enfin, dans notre série, le mécanisme impliqué dans la survenue du syndrome est :
- une délétion d’origine paternelle dans 67% des cas.
- une disomie uniparentale d’origine maternelle dans 33% des cas
Nous allons comparer ces données par rapport à la littérature.
Selon la littérature (40), face à une hypotonie globale de topographie imprécise
(périphérique ? centrale ?) un certain nombre d’examens, à visée étiologique sont
réalisés :
- un électromyogramme avec mesure des vitesses de conduction nerveuse sensitive et
motrice
- un dosage des enzymes musculaires (CPK)
- une biopsie neuromusculaire, non systématique
- un fond d’œil
- un scanner cérébral, voire une IRM ou une échographie transfontanellaire
En fonction de ces résultats, de l’anamnèse, de la clinique et de l’évaluation du QI de
l’enfant, un certain nombre d’examens biologiques complètent alors le bilan : caryotype,
sérologies, etc.
Comparativement à la littérature, dans notre série, la fréquence de ces examens à visée
étiologique est de:
- l’EMG : 84%
- le dosage des CPK : 50%
- la biopsie neuromusculaire : 17%
- le fond d’œil : 50%
- le scanner cérébral : 50%
- l’échographie transfontanellaire ou l’IRM : 50%
- le dosage de TSHus : 67%
- le caryotype : 100%
Il apparaît donc que :
* le caryotype est systématiquement réalisé dans notre étude, comme il est préconisé dans
la littérature, surtout en cas d’hypotonie centrale. Il s’agit de ne pas méconnaître une
anomalie génétique à l’origine de la maladie.
* l’EMG, en seconde intention, s’explique par la fréquence non négligeable de certaines
myopathies et de l’intérêt de la précocité du diagnostic malgré un pronostic souvent
réservé.
* Les autres examens (dosage des CPK, TSHus, fond d’œil, scanner cérébral) de
fréquence variable, par rapport à la littérature, sont probablement réalisés en fonction de la
présentation du tableau clinique et de l’expérience respective des services spécialisés qui
accueillent l’enfant.
La démarche diagnostique, dans notre série, par rapport à la littérature, met en évidence :
* la réalisation en première intention d’un caryotype en haute résolution avec technique de
FISH pour confirmer le SWP
* l’analyse du profil de méthylation n’est effectuée qu’en cas de négativité du précédent
caryotype. En cas de résultat anormal, c’est l’étude des microsatellites qui confirme le
diagnostic.
Si l’on se réfère à notre arbre décisionnel (cf figure XIII p.44), la « stratégie » varie selon
les auteurs mais elle fait appel aux mêmes outils diagnostiques que dans notre étude.
Il est probable que la prévalence élevée du mécanisme délétionnel dans le syndrome
justifie, dans notre série, la réalisation en première intention d’un caryotype avec
technique de FISH. L’intérêt est à la fois au diagnostic et au conseil génétique en évaluant
avec les parents le risque de récurrence dans la descendance. La démarche diagnostique
est donc réalisée selon l’arbre décisionnel de la littérature. Enfin, malgré le faible effectif,
les fréquences respectives du mécanisme délétionnel et de la DUP (67% et 33%) sont
similaires à celles de la littérature (70% et 20-30%).
Connaître les outils diagnostiques pour identifier le SWP s’intègre dans la connaissance
globale de l’affection pour tout médecin généraliste ou spécialiste. Dans notre étude, en
accord avec la littérature, le suivi régulier des enfants conditionne la séquence des
examens complémentaires permettant le diagnostic.
Au total, d’après toutes ces données, avant même le diagnostic, l’évaluation, à chaque
consultation, du développement psychomoteur des enfants présentant une hypotonie
néonatale permet, dans un premier temps, d’apprécier les progrès et de renforcer la
stimulation pour laquelle les parents et l’entourage jouent un rôle primordial.
Ce travail d’observation et de soutien dans le cadre du suivi participe, secondairement, à
l’épanouissement progressif de l’enfant ainsi qu’à l’obtention du diagnostic face à
l’évolution « stéréotypée » du tableau clinique dans le SWP.
La présentation biphasique « naturelle » de l’affection nécessite un suivi au long cours (en
moyenne, 2 ans d’évolution entre les deux phases). Il y a donc un changement dans la
présentation clinique de la maladie, non pas tant engendré par le suivi mais objectivé
grâce à celui-ci dans tous les cas, dans notre étude. Une fois le diagnostic posé, la mise en
route d’une prise en charge adaptée et pluridisciplinaire est essentielle.
Nous allons étudier l’évolution et la prise en charge des enfants dans notre étude après
l’annonce du diagnostic. Nous comparerons ces résultats aux données de la littérature.
II. APRES LE DIAGNOSTIC DE SWP
II.1. La prise en charge
* sur le plan psychomoteur
On rappelle que 84% des enfants de la série ont bénéficié d’une rééducation en
kinésithérapie et/ou en psychomotricité à l’âge médian de 5,4 mois. La littérature est en
faveur d’une prise en charge kinésithérapeutique précoce, dès le premier mois (63), puis
en psychomotricité (l’âge de début est variable : dans les premiers mois ou plus tard en
fonction des capacités de l’enfant et de la disponibilité du ou de la psychomotricien(ne)
qui s’en occupe) à raison de deux séances par semaine.
Suite au diagnostic, et comparativement à la littérature, la prise en charge sur le plan
psychomoteur est adaptée pour tous les enfants qui en ont bénéficié. Leur rythme de
séances est variable : il dépend des progrès respectifs, du lieu d’exercice (CAMSP ou en
libéral) et de l’emploi du temps des « rééducateurs ».
Les résultats de notre étude sont d’autant plus satisfaisants que l’acquisition de la station
assise vers 11,6 mois (habituellement 12-13 mois) et de la marche aux alentours de 24,5
mois (24-30 mois en moyenne) surviennent à un âge plus précoce que dans la littérature.
Il apparaît donc que, quelque soit l’âge du diagnostic, l’identification du syndrome
n’interfère pas avec la décision de rééducation face à un handicap tel que l’hypotonie
néonatale.
Ainsi, le suivi de nos jeunes patients et leur prise en charge rééducative dans la prime
enfance semblent bénéfiques car ils modifient l’évolution de manière positive avec des
acquisitions plus précoces (station assise, marche…) et facilitent ensuite, l’intégration
sociale et scolaire.
* sur le plan orthophonique
Dans notre série, la rééducation orthophonique débute aux alentours de 2 ans et 8 mois en
moyenne. Elle concerne l’acquisition de la parole et du langage.
Suite au diagnostic, une à deux séances hebdomadaires permettent aux enfants de notre
étude l’acquisition progressive du langage parlé et l’expression des capacités de
communication non verbales. La rééducation se poursuit pour tous à ce jour (pour
Christine ?).
Selon la littérature, deux séances par semaine, de courte durée mais répétées, à partir de
24 mois, favorisent l’oralité chez les enfants atteints du SWP.
Notre prise en charge semble adéquate avec la réalisation de phrases complètes (à 4 ans et
demi en moyenne) chez les plus âgés d’entre eux.
L’absence de référence littéraire quant à l’âge des diverses acquisitions langagières dans
le SWP (de nombreux facteurs interviennent : le QI, les capacités propres à l’individu, la
stimulation…) rend difficile la comparaison avec les résultats de notre étude. On note, tout
de même, quasiment chez tous les enfants, une communication et un langage progressif au
fil des séances et de l’âge.
Il reste que le suivi au long cours est primordial pour l’évolution des troubles du langage
et le renforcement de la prise en charge si nécessaire. Les troubles du langage font partie
intégrante du SWP ; suivre leur évolution est donc susceptible de modifier l’évolution de
l’affection sur ces axe particulier de prise en charge.
* sur le plan diététique et comportemental
- On note, dans 84% des cas, la mise en route d’un régime et de règles hygiéno-diététiques
adaptées, avec l’aide d’une diététicienne dans 67% des cas.
C’est l’apparition de la pléthore qui a permis le diagnostic à 2 ans chez Chelcy et
Christophe et à 5 ans chez Christine. Si les deux premiers ont bénéficié d’une prise en
charge spécifique, on ne sait pas quel a été le suivi pour Christine. Celle-ci souffre,
actuellement, de troubles du comportement alimentaires associés à une surcharge
pondérale manifeste.
La littérature préconise un régime, dès que possible, permanent, adapté à l’enfant et
compris de tout l’entourage, constamment encadré par une diététicienne et/ou un médecin
nutritionniste. Une activité physique au moins trois fois par semaine (natation, vélo, etc)
est indispensable ainsi qu’un soutien psychologique pour les troubles du comportement
liés à la quête obsessionnelle et permanente de la nourriture.
Dans notre étude, comparativement à la littérature, suite au diagnostic, le régime existe
chez tous les enfants (Christine ?) et instauré dès l’accélération de la prise pondérale.
On ne retrouve une activité physique régulière que chez Juliette (piscine et danse une fois
par semaine) à une fréquence moindre que celle proposée dans la littérature. Il faut
cependant, tenir compte des aptitudes et surtout de la disponibilité de l’enfant et de son
entourage. 67% de nos jeunes patients présentent une hyperphagie avec des troubles
obsessionnels et compulsifs alimentaires (98% dans la littérature) sans prise en charge
spécifique psychologique mentionnée dans les dossiers.
Il semble donc que :
- le diagnostic en période néonatale permet de prévenir les parents et l’entourage du
risque ultérieur de la survenue d’une obésité et d’anticiper sa prise en charge. Le risque lié
aux complications est majeur ; dans notre étude, tous les parents en ont été informés et ont
compris l’enjeu diététique pour leur enfant.
- le diagnostic dans l’enfance, après l’apparition de la pléthore, permet une action
« préventive » immédiate (du risque d’obésité) et adaptée, sans retard (la littérature
préconise une prise en charge dès la survenue de la surcharge pondérale) (31).
Il apparaît donc que le suivi au long cours, dans notre série, modifie l’évolution, non pas
naturelle de la maladie (la surcharge pondérale est présente dans 100% des cas), mais
inéluctable, vers l’obésité qui survient si aucune mesure n’est envisagée.
67% des enfants de l’étude sont contrôlés sur le plan pondéral. Il faut davantage insister
sur l’activité physique et le soutien psychologique et envisager un traitement par hormone
de croissance en cas de ralentissement de la croissance staturale (comme chez Christophe)
et/ou de la poursuite de la prise de poids malgré les mesures mises en place (comme chez
Tony).
- Sur le plan comportemental, après le diagnostic, 67% des enfants de l’étude présentent
une hyperphagie avec des troubles obsessionnels et compulsifs. 50% d’entre eux sont très
opiniâtres avec des accès de colère. Ces chiffres sont inférieurs à ceux de la littérature en
rapport probablement avec notre effectif modéré et l’apparition plus tardive de ces
troubles (en moyenne vers 1 à 2 ans, mais parfois entre 3 et 7 ans selon les patients) (31).
L’intérêt du suivi au long cours est le « dépistage » des troubles psychopathologiques,
à tout âge du diagnostic, afin d’assurer la surveillance et éventuellement la prise en charge
par les professionnels spécialisés. Les enfants concernés dans notre étude bénéficient
d’une surveillance régulière.
Les troubles du comportement sont indissociables du SWP. Leur identification et leur
prise en charge, grâce au suivi, modifie favorablement l’évolution de l’affection en
limitant la survenue de troubles majeurs (exemple : fréquence plus élevée de psychoses
dans les DUP d’origine maternelle) (26) perturbant l’équilibre psychoaffectif, social et
professionnel du patient.
* sur le plan hormonal
•
l’insuffisance gonadique
Les 2 garçons de la série présentent, dès la naissance, une ectopie testiculaire. On note un
micropénis chez Tony et une hypoplasie scrotale chez Christophe. Selon la littérature
(31), on retrouve dans le SWP une cryptorchidie dans 80 à 90% des cas avec une
fréquence variable d’anomalies associées : micropénis, hypoplasie scrotale.
Une surveillance s’impose avec recours à un traitement hormonal par HCG (actuellement
discuté) et/ou en cas d’échec, une intervention chirurgicale. Les 2 garçons de la série ont
bénéficié d’un traitement chirurgical précédé d’un traitement hormonal partiellement
efficace pour Tony.
Cet hypogénitalisme clinique, à la naissance, avant même le diagnostic, participe surtout
à l’évocation du syndrome en présence d’autres symptômes. Dans notre étude, le suivi
précoce et prolongé a permis à ces enfants de pallier à l’insuffisance gonadique par des
traitements adaptés.
On ne pourrait résumer le SWP sans évoquer l’hypogénitalisme. Son suivi et sa prise en
charge sont donc l’un des volets (avec les autres déjà cités) susceptible de modifier
l’évolution de la maladie dans sa globalité (à noter, la présence chez 50% des filles de
l’étude, d’une hypoplasie des organes génitaux externes chez Perrine et une protrusion des
petites lèvres chez Christine, anomalies fréquemment retrouvées dans le SWP) (31).
•
l’insuffisance somatotrope
Tous les enfants ont bénéficié d’un bilan multidisciplinaire dans le cadre du SWP avec un
dosage d’IGF1 abaissé par rapport à la normale, reflet de la production de GH (excepté
Christine, le bilan multidisciplinaire n’existant pas à l’époque).
Seuls 2 des enfants (soit 1/3 de l’effectif) ont un déficit objectif en GH et un traitement a
été (ou sera prochainement) débuté après bilan préthérapeutique.
Selon la littérature (67), l’hormone somatotrope est déficitaire chez 50% des patients
atteints du SWP. Les dernières recommandations soulignent que la présence d’un tel
déficit n’est pas une condition obligatoire à la mise en route du traitement (67). Les
enfants atteints du syndrome peuvent être traités sans qu’ils aient un déficit en GH et/ou
un retard statural, le traitement étant bénéfique sur la croissance mais également sur la
force musculaire, avec peut-être une action sur les troubles comportementaux (77).
Dans notre série :
- c’est l’excès pondéral (+2,5 DS), malgré un régime et des règles hygiéno-diététiques
respectées, qui a motivé chez Tony l’initiation du traitement.
- l’éventualité d’un traitement par GH repose chez Christophe sur l’insuffisance staturale
associé à une prise pondérale régulière. La décision est en attente.
- il n’y a pas d’indication à un traitement pour les autres enfants.
Le suivi au long cours, dans le cadre du bilan multidisciplinaire, repère les enfants
pouvant bénéficier du traitement, permettant ainsi de modifier l’évolution de la maladie,
principalement de par les effets de la thérapeutique sur l’axe somatotrope et sur la
composition corporelle (pas de recul dans le dossier de Tony concernant l’efficacité du
traitement).
* concernant les autres problèmes rencontrés dans le SWP
Les anomalies cutanées, orthopédiques, ophtalmologiques et/ou dentaires sont
mentionnées dans les dossiers respectifs des enfants lors du bilan multidisciplinaire (donc
après le diagnostic). Chez nos jeunes patients, aucun cas de scoliose ou de prurit n’est
relevé ; seul Tony présente une inflexion latérale du rachis (à contrôler dans un an) et des
lésions de grattage avec poussées urticariennes itératives dans un contexte d’allergie.
Il n’y a pas de problèmes ophtalmologiques ou dentaires particuliers pour chacun d’entre
eux. La littérature mentionne ces anomalies sans fréquence précise (31) mais insiste sur la
nécessité de prévenir (surveillance régulière) ou à défaut, de traiter ces symptômes de la
manière la plus adaptée au vu des risques et des complications inhérentes liées à leur
évolution et leurs conséquences sur leur vie quotidienne (myopie, strabisme, scoliose, etc).
Le dépistage de ces problèmes est donc indispensable et s’intègre dans le suivi normal de
tout enfant, malade ou non. Leur fréquence supérieure dans le SWP par rapport à la
population générale incite à une surveillance accrue. Ce sont tous des critères mineurs de
la maladie (hormis les troubles orthopédiques tels la cyphose et la scoliose qui sont un
indice supplémentaire) et leur prise en charge et leur suivi sont primordiaux afin de limiter
leur évolution et l’aggravation d’autres troubles préexistants (exemples : difficultés
scolaires aggravées par une myopie ou un strabisme, troubles de la concentration en
présence d’un prurit intempestif, surpoids associé à une scoliose, alimentation
hyperglucidique non contrôlée et apparition de caries, etc), permettant ainsi de modifier
favorablement l’évolution de la maladie.
II.2. Le médecin généraliste dans le SWP
Une meilleure information de la maladie et de la concertation avec le milieu hospitalier
sont les deux éléments qui retiennent notre attention lors des entretiens avec les médecins
généralistes de nos jeunes patients.
Certains soulignent leur rôle dans le suivi de l’hypotonie, la prévention de l’obésité ou
encore de soutien psychothérapeutique à l’égard des familles, souvent désemparées face à
cette maladie et la lourdeur de sa prise en charge. Parfois, c’est le pédiatre ou le médecin
de la PMI qui assure le suivi ambulatoire en lien avec le médecin traitant qui prendra le
relais à l’enfance ou à l’adolescence (en coordination avec les praticiens spécialisés).
A travers les réponses et les attentes de ces médecins généralistes, quel est finalement leur
rôle dans la prise en charge et le suivi du SWP ?
Le SWP est un désordre multisystémique avec une variabilité clinique considérable.
Cette diversité de troubles somatiques et psychiques explique toute la difficulté de la
prise en charge. Elle doit être globale, multidisciplinaire en collaboration avec le médecin
traitant.
Il participe au dépistage du syndrome, parfois passé inaperçu à la naissance, puis une fois
le diagnostic posé, à la prise en charge et au suivi au long cours comprenant la prévention
et le traitement des complications ainsi que le soutien à l’entourage.
Les médecins généralistes se situent en première ligne et doivent donc être sensibilisés à
cette pathologie pour évoquer précocement le diagnostic devant une hypotonie néonatale
puis dans l’enfance, en présence d’une obésité avec des troubles du comportement.
L’identification des facteurs de risque cardiovasculaires (tabac, hypertension artérielle,
diabète, dyslipidémie, etc) dans le SWP, comme dans toute obésité sévère, est un rôle
également crucial du médecin généraliste. Cette recherche précoce permet ensuite de
mener une action efficace de prévention des complications.
Le médecin généraliste doit donc informer sur l’obésité et ses conséquences, la prévenir
au plus tôt par le rééquilibrage entre alimentation et activité physique, lutter contre la
sédentarité et la stigmatisation des obèses. L’activité physique doit être promue comme un
facteur de bonne santé. Par ailleurs, il assure le suivi de ces petits patients comme celui
de n’importe quel autre enfant (calendrier vaccinal, traitement des épisodes infectieux,
certificats médicaux, surveillance de la courbe de croissance staturo-pondérale, etc)
et joue un rôle privilégié de soutien, de conseils et d’explications au sein de la famille
concernée.
Toutes ces actions supposent une connaissance globale de l’affection et des institutions
assurant le suivi de l’enfant atteints du SWP afin d’orienter les parents et l’enfant vers les
spécialistes et les structures adaptées au handicap et les soutenir dans le parcours long et
difficile de la maladie.
CONCLUSION
Le SWP est une affection fascinante qui se situe au cœur de découvertes génétiques
étonnantes. Jusque dans un passé récent, le diagnostic était souvent tardif et difficile parce
que les symptômes qui le composent, sont souvent lorsqu’ils sont pris isolément, fréquents
et communs.
Sur le plan génétique, le SWP résulte de la perte de fonction de plusieurs gènes
progressivement bien identifiés. Dans la population générale, il est possible d’envisager
que des mutations géniques spécifiques dans cette région chromosomique soient
entièrement ou en partie responsables des signes cliniques ou comportementaux que l’on
retrouve dans des pathologies telles que l’obésité, les troubles obsessionnels et compulsifs,
le déficit gonadique ou encore la maladie psychotique.
Ainsi, le SWP, comme d’autres maladies génétiques, peut servie de modèle pour aider à
une meilleure compréhension et à une meilleure approche de ces pathologies dont la
prévalence augmente, en particulier, pour l’obésité.
Sur le plan clinique, il faut savoir évoquer le syndrome en présence d’une hypotonie
néonatale associée à des troubles de la succion-déglutition.
L’hyperphagie avec le risque d’obésité et les troubles du comportement, notamment
alimentaires, à partir de la deuxième enfance, permettent encore le diagnostic et sa prise
en charge, en particulier, celle de l’obésité dont les complications font toute la gravité de
la maladie.
Dans cette thèse, six cas d’enfants atteints de la maladie sont rapportés : pour trois d’entre
eux, le diagnostic a été fait en période néonatale, pour deux autres, il a été plus tardif avec
une évolution précoce différente (hypotonie isolée chez Chelcy ; hypotonie, troubles de la
succion et hypogonadisme pour Christophe) et un cas pour lequel le syndrome a été
confirmé à l’âge de 5 ans.
Tous ces enfants (sauf Christine) ont bénéficié d’une prise en charge spécifique, adaptée,
pluridisciplinaire dès l’annonce du diagnostic.
En l’absence de diagnostic en période néonatale, pour deux des enfants, le suivi au long
cours a permis d’identifier la maladie dès les prémices de l’obésité (hyperphagie,
surcharge pondérale) avec de bons résultats thérapeutiques. Dès lors, la prise en charge est
globale, centrée sur l’obésité et les troubles comportementaux avec poursuite des
techniques psychomotrices rééducatives initiées dès le plus jeune âge. Le diagnostic
rétrospectif et l’évolution ainsi que la socialisation médiocres chez Christine préjugent de
la nécessité d’un suivi au long cours, le plus précoce possible, dans le SWP. On rappelle
cependant que cette enfant est née en 1980. Le diagnostic était alors peu connu et/ou peu
évoqué et les tests génétiques inexistants.
Finalement, si la présentation de la maladie n’est pas modifiée par le suivi, celui-ci permet
néanmoins d’évoquer le diagnostic dans l’enfance à un âge où « tout est encore possible »
du fait de la présentation biphasique de l’affection (hypotonie puis surcharge pondérale).
Dès le diagnostic, la prise en charge, multidisciplinaire, sur les divers axes cliniques et/ou
thérapeutiques du syndrome modifient favorablement l’évolution chez tous les enfants
(excepté Christine) en stimulant leur développement psychomoteur, le langage et en
limitant la survenue de la pléthore.
Grâce au suivi, deux des enfants de l’étude bénéficient d’un traitement par hormone de
croissance (prochainement pour Christophe) évoqué lors du bilan multidisciplinaire.
L’hypogonadisme (masculin) fréquent dans cette affection est dépisté, surveillé et traité
également grâce au suivi.
Tous ces aspects cliniques ne doivent pas nous faire oublier la dimension psychologique
de l’affection, pour l’enfant et son entourage. Il s’agit d’une prise en charge globale de la
personne et non pas exclusivement d’une pathologie. Tel est l’objectif à atteindre pour
tout thérapeute.
En ce qui concerne le médecin généraliste, il doit être au centre de l’approche
multidisciplinaire du patient atteint du SWP en évaluant les aspects médicaux,
psychologiques et sociaux et en apportant un soutien et une réponse adaptée à la situation.
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