CHIRURGIE THORACIQUE ET CARDIO-VASCULAIRE - 2011 ; 15(1) : 17-22 21
c h i r u rg i e c a r d i a q u e
La mortalité dans notre série est plus élevée pour les assis-
tances monoventriculaires que pour les assistances biventri-
culaires. L’absence de données précises sur l’état du patient
avant l’implantation ne nous permet pas d’en déterminer
les raisons, mais il est probable que certains patients en
défaillance multiviscérale ou en choc cardiogénique gravis-
sime avec un pronostic défavorable aient été implantés avec
une assistance monoventriculaire.
Dans les équipes expérimentées, la tendance est plutôt à
mettre en place une assistance biventriculaire chez les pa-
tients les plus graves et une assistance gauche chez les pa-
tients les moins graves, ce qui explique que la mortalité soit
en général plus élevée dans les assistances biventriculaires
que monoventriculaires [10-11]. Par ailleurs, l’insuffisance
ventriculaire droite (IVD) au décours de la mise en place
d’une assistance gauche peut constituer une cause impor-
tante de mortalité si celle-ci n’est pas identifiée ou ne l’est
que tardivement.
La fréquence globale de l’IVD au décours de l’implantation
d’une assistance ventriculaire gauche varie de 20 à 40 % et
la fréquence de l’IVD nécessitant une assistance mécani-
que droite complémentaire varie de 6 à 13 %. Mais si l’IVD
peut être contrôlée médicalement ou secondairement avec
une assistance mécanique, les taux de survie chez ces pa-
tients sont nettement inférieurs à ceux des patients avec une
fonction ventriculaire droite normale. La dysfonction ventri-
culaire droite peut ainsi entraîner jusqu’à 15 % des décès
sous assistance ventriculaire gauche [12-17].
De ce fait, opposer assistance monoventriculaire et biven-
triculaire a peu de sens aujourd’hui. Il paraît plus raisonna-
ble de choisir le mode d’assistance en fonction de l’état du
patient et surtout ne pas hésiter à implanter une assistance
biventriculaire si l’on n’a pas de certitude sur le bon fonc-
tionnement du ventricule droit, si certains paramètres peu-
vent faire craindre une défaillance du ventricule droit en
postopératoire (score de Matthews) [18] ou si l’état du patient
se dégrade après assistance ventriculaire gauche. Dans cette
dernière situation, le recours à une assistance ventriculaire
droite temporaire pourrait être une solution intéressante,
permettant en phase periopératoire d’assurer une hémody-
namique stable en attendant la récupération de la fonction
ventriculaire droite et, à distance, de faire bénéficier le pa-
tient des avantages d’une assistance gauche isolée.
Un autre élément important à considérer est l’évolution du
risque de décès en fonction du temps sous assistance. Là
encore, malgré une meilleure prise en charge des patients
autonomes sous assistance, et en particulier au niveau de
l’anticoagulation et du risque infectieux, l’incidence des dé-
cès n’est pas stable au cours du temps. En effet, la figure 5
montre que l’incidence la plus faible se situe entre 3 et 6
mois. Au-delà de ce délai, le risque de mortalité augmen-
te, ceci pouvant facilement s’expliquer par la survenue des
complications classiques telles qu’infections au niveau du
système, complications hémorragiques ou thrombo-emboli-
ques et dysfonction du système. Une période longue d’at-
tente sous assistance pourrait être également un facteur de
risque de mortalité après transplantation cardiaque [19]. De
ce fait, il serait peut-être licite aujourd’hui de proposer une
greffe en priorité chez les patients réhabilités et autonomes
depuis plus de deux mois.
Enfin, cette étude montre que les taux de survie des patients
greffés après assistance sont comparables à ceux des patients
greffés en première intention. En effet, les taux de survie
donnés par le rapport de l’Agence de biomédecine pour les
patients entre 2000 et 2004 sont de 77 % à 1 an et 69 % à
5 ans, et pour les patients de 2004 à 2008, de 71 % à 1 an
[20]. Ceci s’explique par le fait que les patients sous ACM
arrivent à la greffe après une réhabilitation complète tant
sur le plan organique que fonctionnel. On peut donc consi-
dérer que l’assistance n’est pas un facteur de mortalité pour
la transplantation.
En conclusion, l’assistance circulatoire mécanique est un
outil thérapeutique indispensable permettant de sauver la vie
de jeunes patients. L’amélioration des résultats passe par une
discussion précoce entre cardiologues, réanimateurs et chirur-
giens, par un choix adapté du mode d’assistance en fonction
de l’état clinique du patient et par une transplantation cardia-
que dès que la réhabilitation du patient est acquise. La saisie
prospective des données des patients permettra de mieux ci-
bler les indications d’assistance circulatoire mécanique et de
mieux comprendre l’évolution de ces patients.
n
APPENDICE
Les autres membres du GRAM sont : Frédéric Collard (Mar-
seille), Éric Braunberger (La Réunion), Gérard Babatasi
(Caen), Massimo Massetti (Caen), Camille Dambrin (Tou-
louse), Joseph N’Loga (Lyon), Roland Henaine (Lyon), Mi-
chel Aupart (Tours).