LETTRE TRIMESTRIELLE
3EME TRIMESTRE 2016
ÉDITO
par Philippe-Jean Péron, Président et Hugues Dubly, Directeur général
SI LE NEZ DE CLÉOPÂTRE AVAIT ÉTÉ PLUS
COURT…
Il a manqué, en mai 1981, un peu plus de
550 000 voix (sur un total de 30 millions
exprimées) pour que Valéry Giscard d’Estaing
soit réélu Président de la République française
face à François Mitterrand.
Il a manqué, en juin dernier, un peu plus de
600 000 voix (sur un total de 33 millions
exprimées) pour que le « Remain » l’emporte
sur le « Brexit » lors du référendum britannique
sur l’appartenance à la C.E.E.
Deux scrutins serrés donc.
Deux scrutins pour lesquels les organismes de
sondage et les bookmakers s’étaient trompés
dans leurs prévisions.
Deux scrutins qui ont eu des conséquences
importantes mais très différentes sur les
marchés nanciers.
En 1981, la victoire de François
Mitterrand a entrainé une baisse brutale
de la Bourse française d’environ 25 % en
deux jours, une hausse des taux directeurs
à plus de 22 %, et très vite une première
dévaluation de 8,5 % en octobre 1981 et une
seconde de 10 % en juin 1982.
En juin 2016, la Bourse londonienne n’a
perdu « que » 3 % le lendemain du vote,
et la livre de son côté a perdu plus de 10 %
contre l’euro en quelques jours.
En 1981, les Bourses des pays périphériques
n’ont pratiquement pas souffert de la forte
chute de la Bourse française, tandis que cette
année Paris a baissé de 8 %, Madrid de 12 %,
Francfort de 7 %, au lendemain du référendum
britannique.
Enfin, il a fallu plus de trois ans à la Bourse
parisienne pour se remettre de la chute de mai
1981, alors que la Bourse de Londres a effacé
ses pertes en moins d’une semaine.
Quelles leçons tirer de ces deux
évènements ?
Tout d’abord que les marchés nanciers ont
horreur d’être pris à revers par une annonce
imprévue. Ils réagissent avec une brutalité
inouïe qui fait peur car on craint toujours que
la baisse entraine la baisse.
Ensuite que la situation est radicalement
différente aujourd’hui par rapport
à 1981. En 1981, la baisse était restée
circonscrite à la France, alors qu’aujourd’hui
elle s’est propagée à tous les marchés
européens, parce que l’économie est beaucoup
plus mondialisée et interconnectée aujourd’hui
qu’il y a 25 ans.
Il a fallu plus de
trois ans à la Bourse
parisienne pour se
remettre de la chute
de mai 1981, alors que
la Bourse de Londres
a effacé ses pertes en
moins d’une semaine
3
EDITO I page 2
Si le nez de Cléopâtre avait été plus
court...
FOCUS I page 8
Keep calm and carry on
LES MOTS I page 14
Anglicismes : les adopter ou
les proscrire ?
ECONOMIE I page 4
Un vote qui peut changer l’avenir de
l’Europe
SECTEUR I page 11
Mieux vaut prévenir que
guérir
NOS FONDS I page 16
Performance de la gamme
Brongniart
Directeur de la publication : Hugues Dubly. Imprimerie : AMPLUS, 3 rue de Romainville - 93260 Les Lilas
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Enfin que la situation des
taux est totalement sous
contrôle. Alors qu’en
1981, les taux directeurs
de la banque de France
sont montés à 22 %,
les taux en Europe
ont continué à être
orientés à la baisse
suite au référendum
britannique (-0,20 en
Grande Bretagne, -0,07 en
France, -0,14 en Allemagne… en 2 jours), car
les Banques centrales ont essayé de conjurer
les effets néfastes du Brexit en renforçant leurs
injections de liquidités.
Il est encore trop tôt pour se prononcer sur
les effets naux du Brexit, d’autant qu’on ne
sait pas comment (et si ?) il sera mis en œuvre.
Mais d’ores et déjà on peut dire qu’il y aura
un coup d’arrêt à la spéculation immobilière
à Londres, que les entreprises anglaises
exportatrices retrouveront de la compétitivité
grâce à la baisse de la livre, et que les pays
vont se livrer à un dumping scal pour attirer
(ou retenir) entreprises et compétences sur
leur sol.
On peut aussi craindre un
ralentissement économique
en Grande-Bretagne et en
Europe continentale.
Ce qui rajoute encore de
l’incertitude… tout cela
pour une courte poignée
de voix.
Mais souvenons-nous que
les marchés boursiers se
sont nalement très bien comportés en France
dans les années 1980 et ont triplé de valeur,
surmontant magniquement les incertitudes
générées par les élections de mars 1981...
Les marchés
nanciers ont
horreur d’être pris
à revers par une
annonce imprévue
Ce résultat est un séisme politique
considérable pour la construction
européenne, dont les conséquences
économiques, même si elles sont encore
incertaines, devraient se traduire à court terme
par une réduction de la croissance, notamment
au Royaume-Uni.
A moyen et long terme, c’est bien les
conséquences politiques qui inquiètent car
cette victoire des anti-européens pourrait
venir alimenter d’autres nationalismes et créer
des tensions pouvant fragiliser la région.
Sur le point économique, il s’agira pour le
pays sortant et les autres membres de l’Union
d’arriver à un accord acceptable.
Le choc des résultats
Le 24 juin 2016 au matin, c’est avec
étonnement que l’ensemble des européens
apprenait que la majorité des britanniques
s’était prononcée pour une sortie du pays de
l’Union européenne.
Une fois la surprise passée, le désordre
s’est emparé de la scène politique
anglaise.
La démission du premier ministre David
Cameron – ayant appelé à la tenue de ce
référendum mais partisan du Bremain a
marqué le début de la cacophonie. Il laisse
à son successeur, Theresa May, la lourde
charge de conduire les négociations de
sortie de l’Union européenne. Du côté des
défenseurs du Brexit, Nigel Farage - président
du parti UKIP et député européen – a quitté
ses fonctions, conforté par la victoire de
« l’indépendance » du Royaume-Uni. Enfin,
Nicola Sturgeon - première ministre d’Ecosse
appartenant au parti nationaliste - a fait savoir
que les écossais ne se reconnaissaient pas dans
ce vote de sortie (l’Ecosse a voté à 62% en
faveur du maintien). Elle fait planer l’idée d’un
nouveau référendum d’indépendance tout en
se rendant à Bruxelles pour plaider sa cause.
Notons que la nomination de Theresa May,
actuelle Ministre de l’Intérieur, comme nouveau
première ministre britannique, devrait apaiser
quelque peu les tensions politiques. Néanmoins
beaucoup d’incertitudes persistent.
Quels effets sur l’économie ?
L’incertitude sur l’avenir des relations du
Royaume-Uni avec l’Union européenne ainsi
que la confusion politique risquent de peser
sur la croissance britannique, et sûrement sur
le reste de l’Europe, même si l’ampleur des
effets négatifs est difcile à estimer.
ÉCONOMIE
par Sebastian Paris-Horvitz
UN VOTE QUI PEUT CHANGER L’AVENIR DE
L’EUROPE
Après des mois de grande incertitude sur l’issue du référendum concernant le maintien
(Bremain) ou la sortie (Brexit) du Royaume-Uni de l’Union européenne, les urnes ont
tranché et les britanniques ont mis un terme à une relation qui durait depuis 43 ans.
Les urnes ont tranché
et les britanniques ont
mis un terme à une
relation qui durait depuis
43 ans
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Le premier effet pourrait être le risque de
paralysie des décisions d’investissement
d’un certain nombre d’entreprises.
On peut penser que certains investissements
très dépendants des relations commerciales
avec le reste de l’Union vont être repoussés
voire supprimés.
Plus largement, l’incertitude sur les
perspectives de croissance, y compris de
possibles pertes d’emplois sur le territoire
britannique en faveur de délocalisations sur le
continent, risquent de nuire aux dépenses des
ménages et des entreprises.
Selon les estimations, la perte d’activité
pourrait coûter 1% de croissance à l’économie
britannique sur l’année à venir, avec le risque de
la faire basculer en récession.
En même temps, certains facteurs
stabilisateurs pourraient contribuer
à atténuer les effets du Brexit sur la
croissance. La baisse de la livre devrait
donner un avantage compétitif aux entreprises
anglaises et soutenir notamment l’activité
des secteurs exportateurs, même si, en
contrepartie, elle pourrait rogner le pouvoir
d’achat des ménages anglais.
Un assouplissement de la politique monétaire
de la Banque d’Angleterre (BoE) est également
attendu, expliquant la baisse extraordinaire
des taux d’intérêt à long terme depuis le
vote. Le taux d’intérêt sur les emprunts d’Etat
britannique (Gilts) à 10 ans a fortement reculé
s’établissant à 0,77% (au 7/7/16) son plus bas
historique.
Parallèlement, la BoE a déjà décidé d’assouplir
la réglementation sur les contraintes
prudentielles de capitalisation des banques an
qu’elles ne freinent pas trop la distribution de
crédits à l’économie.
Concernant le reste de l’Europe,
l’incertitude devrait aussi peser sur l’économie
mais de manière plus limitée. En effet l’activité
commerciale avec le Royaume-Uni ne
représente que 10% du commerce de la zone.
Toutefois, les craintes de nouvelles tensions en
Europe, liées notamment au développement de
mouvements populistes, pourraient également
freiner l’activité économique de la zone au-delà
des suites de l’affaiblissement du Royaume-Uni.
En ce sens, il est important de souligner
que pour l’instant l’activité reste plutôt
bien orientée sur le continent, y compris
dans la zone euro.
Il faudra néanmoins attendre les prochains
mois pour avoir une meilleure indication de la
véritable onde de choc du Brexit sur l’activité
du continent.
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Les taux obligataires britanniques au plus bas historique
Taux du rendement à 10 ans des emprunts d'Etat du Royaume Uni
Source : Bloomberg au 07/07/2016
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