Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une

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THESE
Pour l'obtention du grade de
DOCTEUR DE L'UNIVERSITÉ DE POITIERS
UFR de sciences économiques et de gestion
CRIEF - Centre de recherche sur l'intégration économique et financière
(Diplôme National - Arrêté du 7 août 2006)
École doctorale : SORG - Sociétés et organisations
Secteur de recherche : Sciences Economiques
Présentée par :
Thibault Cuenoud
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques :
une relation ambivalente
Directeur(s) de Thèse :
Jacques Léonard, Elisabeth Paulet
Soutenue le 19 juin 2012 devant le jury
Jury :
Président
Jean-Pierre Allégret
Professeur à l'Université Paris-Ouest
Rapporteur
Delphine Lahet
Professeur à l'Université Bordeaux IV Montesquieu
Rapporteur
Jean-Christophe Poutineau
Professeur à l'Université de Rennes I
Membre
Jacques Léonard
Professeur émérite à l'Université de Poitiers
Membre
Elisabeth Paulet
Professeur à l'ESCEM/FBS
Pour citer cette thèse :
Thibault Cuenoud. Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente [En ligne]. Thèse
Sciences Economiques. Poitiers : Université de Poitiers, 2012. Disponible sur Internet <http://theses.univ-poitiers.fr>
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Université de Poitiers
Faculté de Sciences Economiques
CRISES FINANCIERES ET FONDAMENTAUX
MACROECONOMIQUES : UNE RELATION AMBIVALENTE
Thèse pour le Doctorat ès Sciences Economiques
Présentée par
Thibault CUENOUD
Et soutenue publiquement le 19 juin 2012
MEMBRES DU JURY
Directeur de thèse :
Jacques LEONARD, Professeur émérite à l'Université de Poitiers
Co-Directrice :
Elisabeth PAULET, Professeur à l'ESCEM/FBS
Rapporteurs :
Delphine LAHET, Professeur à l'Université Bordeaux IV Montesquieu
Jean-Christophe POUTINEAU, Professeur à l'Université de Rennes I
Suffragant :
Jean-Pierre ALLEGRET, Professeur à l'Université Paris-Ouest
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Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
La faculté de Sciences Economiques de Poitiers n’entend donner aucune approbation, ni
improbation aux opinions émises dans cette thèse. Ces opinions doivent être considérées
comme propres à leur auteur
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Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Remerciements
Mes remerciements s’adressent en premier lieu à mes deux co-directeurs de thèse, Jacques
LEONARD et Elisabeth PAULET. Leur soutien permanent, la qualité de leur encadrement et la
complémentarité de leurs conseils se sont avérés nombre de fois indispensables à la bonne
réalisation de ce travail. Je souhaite aussi remercier Jean-Christophe POUTINEAU et Delphine
LAHET, tous deux rapporteurs, ainsi que Jean-Pierre ALLEGRET, suffragant, pour l’honneur
qu’ils ont pu me faire en acceptant de constituer le jury de cette thèse.
Durant ces années de doctorat, j’ai pu bénéficier du statut d’étudiant à la faculté de Sciences
Economiques de Poitiers et d’assistant chercheur à l’ESCEM Paris Tours Poitiers. Mes
remerciements s’adressent aux membres des laboratoires de ces deux composantes : le
CRIEF (Centre de Recherche sur l’Intégration Economique et Financière) et le CRESCEM
(Centre de Recherche de l’Ecole Supérieure de Commerce et de Management). Les échanges
qui ont pu s’y réaliser tout au long de mon doctorat ont été riches d’enseignement et
d’apprentissage.
Plus largement, mes remerciements s’adressent à l’ensemble du personnel de l’ESCEM avec
qui j’ai eu la chance de partager la vie de cette école. Les diverses activités que j’ai pu y
exercer me permettent aujourd’hui d’appréhender plus facilement mon avenir
professionnel. De peur d’en oublier certains, je préfère n’en nommer aucun. J’espère qu’ils
me le pardonneront.
Ces dernières lignes s’adressent à ma famille et belle famille qui ont su s’accommoder au fil
des années de mes travers envers la recherche. Mais surtout, merci à ma femme Carole, à
mes deux enfants Gabriel et Calie et à mes parents pour le soutien inconditionnel dont ils
ont toujours fait preuve. Ce projet est aussi un peu le leur.
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Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Ces quelques mots pour dédier ce travail à mon père qui n’a pas eu la possibilité de rester
parmi nous pour enfin voir son fils finir ses études…
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Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Résumé : Dans le cadre de l’analyse des crises financières au sein des pays émergents, de
nombreux travaux sont venus expliquer l’occurrence de ce genre de phénomènes. Pourtant,
des faits nouveaux se manifestent sans pour autant s’inscrire dans les recherches déjà
proposées (Corée du Sud, Brésil et surtout dans les pays d’Europe centrale et orientale). En
référence à cette littérature, la thèse pose en retour la question de l’incidence de la
contagion financière sur la dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macrofinanciers de pays émergents susceptibles d’être initialement considérés comme « robustes
». La réponse passe par la mise en évidence des principales composantes des crises
financières pour en extraire les limites face à l’hypothèse soulevée. La description des
stratégies de rattrapage économique, par l’intégration au marché financier international, est
à l’origine des vulnérabilités potentielles dans les effets de contagion. La structure instable
de l’endettement international, à l’aide de l’Hypothèse d’Instabilité Financière de Minsky
(1974), va offrir les éléments théoriques nécessaires à la modélisation des faits empiriques.
Les premières générations de crises de change viendront conceptualiser la fuite des capitaux
en attribuant la responsabilité de la contraction de la liquidité au reste du monde. Dans la
transition qu’ils opèrent actuellement en vue de leur adhésion à l’UEM, les PECO ne peuvent
être considérés comme étant à l’abri de la survenance de crises financières, et ce même s’ils
bénéficient des impacts stabilisateurs favorables liés à leur appartenance à l’UE. Mais
disposent-ils alors des facteurs de robustesse macroéconomique et macro-financière
suffisants pour conjurer les incidences économiques d’éventuelles pressions par voie de
contagion ? La partie empirique de la thèse devrait permettre de répondre à la question à
travers des modélisations économétriques et analytiques.
Mots-clés : Fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers, crises financières,
interdépendance, effets de contagion, crises de change de première génération, HIF de
Minsky.
Abstract: As part of the financial crises analysis in emerging countries, many studies
explained the occurrence of such phenomena. However, new facts occur which do not
appear in research already available (mainly in countries like South Korea, Brazil and Central
and Eastern Europe). In reference to this literature, the thesis raises in return the question of
the financial contagion impact on macro-economic and macro-financial fundamentals
degradation about emerging countries initially considered as "robust." The answer is linked
with the key components identification of financial crises to extract its limits against the
hypothesis raised. The description of economic recovery strategies, by the international
financial market integration, is the source of potential vulnerabilities in the contagion. The
unstable structure of international debt, with the financial instability hypothesis of Minsky
(1974), will provide the theoretical elements necessary for empirical facts modeling. The first
generation of currency crises will conceptualize capital flight by assigning responsibility for
the liquidity squeeze to the rest of the world. In the transition they currently operate in
order to join EMU, the Central and Eastern Europe countries cannot be considered safe from
the financial crises occurrence, even if they have favorable impacts stabilizers due to the fact
they belong to EU. So do they have enough robust macro-economic and macro-financial
factors to ward off the economic impact of any pressure by contagion? The empirical part of
the thesis should answer the question through analytical and econometric modeling.
Keywords: Fundamental macroeconomic and macro-financial, financial crises,
interdependence, contagion, currency crises of the first generation, HIF Minsky.
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Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Sommaire
Introduction générale .....................................................................................9
Partie 1. Présentation synthétique des modèles de crises de change : un
retour vers les crises financières comme élément d’interprétation
Introduction de la première partie ................................................................................... 16
Chapitre 1. Définition, détermination, anticipation et récurrence des crises
financières
Introduction intermédiaire....................................................................................................... 19
1. Une approche générale des crises comme définition........................................................ 21
2. Détermination et anticipation des crises financières en Sciences Economiques .............. 27
3. Historique des crises financières : une récurrence continue ............................................. 34
Conclusion intermédiaire ......................................................................................................... 39
Chapitre 2. La vulnérabilité des régimes de change face aux tensions
financières internationales
Introduction intermédiaire....................................................................................................... 41
1. Les nouveaux éléments du contexte financier international ............................................ 43
2. La place prépondérante des effets de contagion dans l’environnement financier ........... 54
3. Des stratégies d’ancrage du taux de change par nature source de vulnérabilité ............. 60
4. La contrainte du change fixe dans un contexte de tensions financières internationales . 68
5. Synthèse des différentes modélisations de crises de change............................................ 73
6. Contextualisation de la problématique à travers des faits récents : focus sur la Corée du
Sud, le Brésil et les PECO .................................................................................................... 84
Conclusion intermédiaire ......................................................................................................... 94
Conclusion de la première partie ...................................................................................... 96
Partie 2. Identification et modélisation des faits originaux : un processus de
développement source d’interdépendances et d’effets de contagion
Introduction de la deuxième partie ................................................................................ 100
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Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Chapitre 3. Une stratégie de rattrapage économique basée sur l’attractivité
des IDE, source de vulnérabilités potentielles ?
Introduction intermédiaire..................................................................................................... 103
1. Enjeux de l’intégration au commerce international : des perspectives favorables de
développement économique ........................................................................................... 106
2. La nécessité de contracter des endettements externes, facteur de dépendance au
marché financier international ........................................................................................ 116
3. Le rôle prépondérant des IDE : entre attractivité, croissance économique et stabilité
macro-financière .............................................................................................................. 126
Conclusion intermédiaire ....................................................................................................... 138
Chapitre 4. Spécification de faits originaux : construction théorique pays
développé/pays émergent d’après l’hypothèse d’instabilité financière de
Minsky
Introduction intermédiaire..................................................................................................... 140
1. L’apport de Minsky comme élément d’explication au déclenchement de la crise ......... 142
2. Le processus de crise : mise en parallèle des modélisations de 1ere génération ........... 154
3. Matérialisation du phénomène de crise dans les PECO : un processus en deux étapes . 163
4. Caractérisation des phénomènes d’interdépendance et de contagion dans les PECO ... 178
Conclusion intermédiaire ....................................................................................................... 193
Conclusion de la deuxième partie................................................................................... 196
Partie 3. Divergences de comportement au sein des PECO lors de tensions
financières internationales : entre transferts de capitaux et positionnement
structurel
Introduction de la troisième partie ................................................................................. 200
Chapitre 5. Modélisations économétriques comme approche empirique :
focus sur les flux de capitaux
Introduction intermédiaire..................................................................................................... 203
1. La détermination du rôle des capitaux étrangers au sein des PECO : une obligation
d’attractivité pour ces territoires ..................................................................................... 205
2. Eléments d’attractivité des capitaux étrangers dans les PECO : croissance économique,
rentabilité des investissements et variation des taux de change .................................... 219
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Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
3. Eléments de répulsion des capitaux étrangers dans les PECO : analyse des tensions
financières par les canaux de liquidité et de taux d’intérêt ............................................. 231
Conclusion intermédiaire ....................................................................................................... 241
Chapitre 6. Détermination de la qualité du positionnement des PECO : entre
turbulences financières et viabilité du rattrapage économique
Introduction intermédiaire..................................................................................................... 243
1. Méthodologie de la démarche : une dynamique en trois thématiques .......................... 246
2. Analyse ciblée de la qualité des fondamentaux des PECO .............................................. 255
3. Turbulences financières de court terme : focus sur la politique budgétaire ................... 278
4. Viabilité du rattrapage économique à moyen terme : focus sur les flux d’IDE ............... 288
Conclusion intermédiaire ....................................................................................................... 298
Conclusion de la troisième partie ................................................................................... 300
Conclusion générale .................................................................................... 303
Bibliographie ............................................................................................... 313
Table des matières ...................................................................................... 329
Table des illustrations ................................................................................. 332
Annexe 1 : équation économétrique (1) ...................................................... 339
Annexe 2 : équation économétrique (2) ...................................................... 344
Annexe 3 : équation économétrique (3) ...................................................... 347
Annexe 4 : équation économétrique (4) ...................................................... 352
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Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Introduction générale
L’analyse économique repose sur l’interprétation de faits pour comprendre puis expliquer le
comportement des agents économiques. Ce regard sur la société doit permettre de redéfinir
dans la mesure du possible la nature des choix pour optimiser l’allocation des ressources et
amplifier le bien être de chacun. Le monde dans lequel nous sommes aujourd’hui apparait
de plus en plus spécifique aux périodes antérieures, nécessitant de poursuivre ce travail afin
d’apporter toujours plus de compréhension aux phénomènes économiques présents et
futurs. La mondialisation des échanges et la globalisation des modes de production et de
consommation, rendues possible en diminuant technologiquement les distances terrestres,
illustrent cette amplification des flux économiques pouvant apparaitre complexes.
Ces échanges alimentent favorablement les interactions qui naissent entre les individus à
travers de nouvelles méthodes de travail, d’apprentissage, de coopération… Pourtant, cet
essor si vertueux soit-il peut être à la merci du comportement de quelques individus, qui en
souhaitant maximiser leur propre préférence peuvent dangereusement déstabiliser le bienêtre collectif de tous. Le marché financier reflète cette tendance puisqu’il est le fruit d’une
libéralisation intense des échanges entre les territoires, à l’origine d’une instabilité
récurrente souvent induit par une minorité d’acteurs. Le rôle de ce secteur est d’autant plus
déterminant à chaque territoire national puisque légitiment il définit l’allocation des
capitaux vers l’économie réelle. Le travail réalisé ici s’inscrit dans la réflexion de l’instabilité
financière internationale dans un contexte de régulation toujours nationale. La démarche
que nous allons adopter n’est pas de proposer des alternatives aux difficultés rencontrées
mais de centrer l’attention sur les limites du système actuel, notamment sur les risques de
déstabilisation des économies intégrées au reste du monde.
La thématique que nous abordons est au cœur de nombreux débats en macroéconomie
financière. Le FMI a pu l’aborder récemment lors de la redéfinition des nouvelles modalités
de crédits qu’elles accordent, flexibles ou modulables (FMI, 2007). Pour autant, de
nombreuses interrogations sont toujours présentes. Le développement de pays émergents,
en parallèle à des moyens d’information et de communication toujours plus importants, ne
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Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
cesse d’amplifier les acteurs sur la scène internationale. De nature divergente sur le marché
financier, où les instances publiques côtoient les acteurs privés, les objectifs qu’ils ont le sont
tout autant. Les problématiques induites par cette augmentation des échanges financiers
sont regroupées sous la notion de gouvernance ou d’architecture financière internationale.
L’hypothèse d’une nouvelle régulation, sans supposer de sa forme future, n’est pourtant pas
envisageable pour le moment puisqu’il faudra à ces agents économiques s’accorder à un
moment donné. Cartapanis le soulève brièvement. « Il est très improbable, tout au moins à
court terme, que la nouvelle architecture prenne la forme d’un ensemble de règles de droit
dont la combinaison déboucherait sur un nouveau système s’imposant à la communauté
internationale, à l’image de la création du FMI en 1944. » (Cartapanis, 2001).
Au regard de ces faits, la problématique postule que des pays émergents avec des
fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers de bonne qualité sont susceptibles
de subir des tensions financières induites par des effets de contagion. Pour autant, ces
territoires ne témoignent pas de vulnérabilités fondamentales qui pourraient leur être
propres. Ce postulat, fort puisqu’il remet en cause la littérature existante, réfute le lien de
cause à effet avec la dégradation des fondamentaux qui légitimement annonçait
l’occurrence d’une crise. Les travaux précédents postulent que toute tension dans une
économie ne peut s’expliquer que par une vulnérabilité déjà existante dont les effets de
contagion ne viendront que renforcer l’impact. Il ne s’agit pas ici de mettre en doute les
apports passés, puisque ceux-ci témoignent toujours pour partie de leur pertinence dans
l’instabilité financière actuelle. Mais l’occurrence de plus en plus forte de ces faits nouveaux,
reflétant la problématique qu’il conviendra de démontrer, fait poser de nombreuses
questions tant dans les méthodes de détermination, de détection et d’anticipation de ces
crises aujourd’hui.
De telles affirmations, qu’il faudra conforter dans ce travail, font supposer que les
vulnérabilités des autres pourraient devenir les notre lors d’effets de contagion difficilement
évitables au regard de l’imbrication des marchés nationaux avec ceux internationaux. Les
exemples de crises en Corée du Sud (1997-1998), au Brésil (1999-2002) et plus récemment
dans les pays d’Europe centrale et orientale (2008) illustrent une tendance qui semble
s’affirme au fil du temps. La libéralisation des flux financiers a offert l’opportunité d’amplifier
10
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
la croissance économique de ces territoires. Mais cette intensification des flux, à travers la
globalisation des échanges, semble apporter une instabilité supplémentaire à la sphère
financière. Cette instabilité apparait pourtant comme un élément essentiel de la capacité
d’adaptation du système financier international aux contraintes macroéconomiques et
macro-financières du moment. Contraintes qui ne cessent d’évoluer dans un monde en
mouvance permanente.
Le mode de fonctionnement des marchés financiers pose de véritables questions quant à la
viabilité des processus de rattrapage économiques actuellement choisis des pays émergents
que nous venons de citer. L’intégration de plus en plus poussée aux marchés commerciaux
et financiers, afin d’amorcer une dynamique de développement, renforce d’autant plus les
effets de contagion potentiels entre économies. La fréquence de l’occurrence des crises peut
être stable sur la durée mais les turbulences financières qu’elles entrainent y apparaissent
plus nombreuses et systémiques. Tout un ensemble d’éléments se doit d’être analysé pour
en comprendre l’évolution : de l’origine de la crise jusqu’à sa matérialisation, puis des effets
de contagion à travers les taux de change pour enfin impacter les fondamentaux
macroéconomiques et macro-financiers, hypothéquant d’autant plus un retour rapide à la
croissance. Le regard qu’il convient d’avoir consistera à analyser la littérature existante tout
en expliquant les nombreuses difficultés qui émergent lors de la conceptualisation de ces
faits spécifiques.
Ce travail se voulant constructif, son cheminement repose d’abord sur l’analyse des
concepts de bases des phénomènes de crises pour ensuite se confronter à la théorie
économique et enfin aux faits empiriques.
Le premier chapitre se concentre tout d’abord sur la définition d’une crise, volontairement
par une approche généraliste, pour en comprendre la nature même. Les éléments qui en
ressortiront seront appliqués à la sphère économique puis au secteur financier plus
particulièrement. Une large
description
des
méthodes
de déterminations puis
d’anticipations, couramment utilisé en sciences économiques, permettra de mettre en avant
la logique aujourd’hui adoptée pour les conceptualiser. En effet, le panel d’outils de mesure
utilisé afin de quantifier ce phénomène repose intégralement sur la dégradation des
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Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers propres au pays subissant une crise.
L’analyse économique actuelle s’ancre dans une relation de cause à effet entre crises
financières et fondamentaux. L’énumération des variables macroéconomiques et macrofinancières, à travers un comportement changeant avant la réalisation d’une crise, doit
permettre de les anticiper. Le pouvoir prédictif de ce genre d’interprétation, dans le cas
spécifique de notre problématique, devient faible si le pays en situation de tension
financière n’a pas eu de dégradation au préalable de ses fondamentaux. Ces premiers
éléments décrivent les difficultés dans l’organisation présente des flux financiers
internationaux. Comment permettre à des marchés financiers d’apporter des éléments de
réponses à travers leurs fluctuations si elles ne sont pas dues à des vulnérabilités qui leurs
sont propres ? La véritable question qui se pose, à partir du moment où il devient pertinent
de prendre en compte ce genre d’interprétation, est de savoir si un pays devenant
vulnérable au regard de l’incapacité de ses partenaires à apporter des solutions efficaces
peut intervenir dans le reste du monde pour tenter de se protéger.
Le second chapitre va chercher à contextualiser les nouvelles caractéristiques du marché
financier international, permettant d’expliquer par la suite les éléments justifiant la
problématique de ce travail. La forte libéralisation des flux financiers des pays émergents a
pour but d’attirer les capitaux étrangers, nécessaires à la restructuration de leur appareil
productif. Cette ouverture du compte de capital les met dans une situation de dépendance
forte vis-à-vis du reste du monde mais aussi de vulnérabilité puisqu’en parallèle ils se
doivent de stériliser le risque de dépréciation monétaire pour être attractif (ancrage des taux
de change). Pourtant, ce n’est pas un hasard si les trois générations de modélisation de
crises de change se font dans le cadre d’un ancrage fixe. Même si le processus de
libéralisation apparait comme un élément essentiel à la régulation du système financier
international, la fluctuation du prix des actifs nécessaire à une réallocation optimale du
capital est aussi source d’instabilité à l’origine de phénomènes de contagion. Ces deux
caractéristiques, instabilité financière et effets de contagion, poussent à modifier les
fondements des phénomènes de crises et plus spécifiquement dans l’interprétation des
crises de change.
12
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Le troisième chapitre va expliquer comment, à travers la stratégie de rattrapage
économique adoptée par les pays émergents, de nombreuses vulnérabilités vont se créer
dans les effets de contagion. Le processus de développement économique, adopté
aujourd’hui par une majorité de pays émergents, repose sur une intégration au commerce
international, source d’amplification de la croissance économique. Mais la condition à cette
reconversion est l’attractivité de capitaux étrangers, principalement sous forme
d’Investissements Directs Etrangers (IDE). Cette stratégie, source de dynamisme, n’est pas
pour autant sans risque puisqu’elle induit une amplification des interdépendances tant
commerciales que financières vis-à-vis du reste du monde. Ce processus impose le déficit
récurent de leur balance courante afin d’importer des biens d’équipement nécessaires à la
restructuration de leur tissu industriel. L’afflux des capitaux étrangers permet de financer et
ainsi de neutraliser le solde de la balance des paiements mais aussi de stabiliser l’ancrage du
taux de change. Lors du retrait pour quelque raison que ce soit des capitaux, le déficit
récurent de leur balance courante ne sera plus compensée, mettant sous pression l’ancrage
du taux de change. L’anticipation à terme de sa non viabilité précipitera sa chute, comme
dans les modélisations de première génération.
Le quatrième chapitre vient compléter la présentation de vulnérabilités potentielles à
travers les canaux de contagion des pays émergents, à l’aide de l’Hypothèse d’Instabilité
Financière de Minsky (HIF). Selon cette théorie, l’occurrence d’une crise financière n’est pas
due à la diminution du taux de rentabilité (qui peut être assimilée à la non-dégradation des
fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers pour un pays) mais à celle du taux
d’intérêt. Cet élément perturbateur va offrir l’opportunité d’expliquer la fuite des capitaux
étrangers au sein du pays émergent. La configuration de l’endettement est devenue
international. Elle repose sur des échéances de court terme dans les pays développés pour
en minimiser le coût, afin d’investir ces mêmes capitaux dans des placements de moyen
voire long terme dans les pays émergents pour en maximiser la rentabilité. Lors d’une
augmentation des taux d’intérêt dans le pays développé, qu’il conviendra de matérialiser,
cette structure internationale de l’endettement va pousser nombre d’agents économiques à
retirer leurs capitaux pour rembourser leurs créances face à l’incapacité d’obtenir tout
refinancement.
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Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Le cinquième chapitre a pour ambition de confirmer par les faits la plausibilité des postulats
annoncés.
Les
PECO
illustrent
empiriquement
l’interprétation
théorique
décrite
précédemment au regard de la forte dépendance qu’ils ont aujourd’hui avec la zone euro et
de l’occurrence de la crise de 2008. La disponibilité des données nécessaires aux équations
qui vont être créées rend d’autant plus pertinent l’application de tests économétriques. La
construction de modélisations va reposer sur l’utilisation des premières générations de
modélisations de crises en complément de l’approche théorique de l’Hypothèse d’Instabilité
Financière (HIF) de Minsky (1974). Elles vont permettre de tester chaque étape décrite dans
l’occurrence d’une crise financière sans dégradation des fondamentaux macroéconomiques
et macro-financiers du pays. Il s’agira tout d’abord de déterminer le rôle fondamental des
capitaux étrangers, où ceux-ci permettent de neutraliser le déficit récurent de la balance
courante ainsi que la stabilisation du taux de change. Il conviendra ensuite de valider les
raisons de l’attractivité des pays émergents dans les stratégies d’allocations des capitaux
étrangers, tout en confortant la nature à court terme de leur endettement. La dernière
étape confirmera la plausibilité des effets de contagion à travers les canaux de liquidité et de
taux d’intérêt entre pays développés et en voie de développement.
Le sixième chapitre se veut complémentaire à l’analyse effectuée durant les modélisations.
La crise des Subprimes a pu impacter indifféremment les PECO en 2008 mais certains ont pu
rebondir plus facilement que d’autres. Même s’il apparait difficile pour ces pays d’éviter les
tensions financières internationales, ils ne sont aucunement responsables de l’augmentation
des taux d’intérêt dans le reste du monde à l’origine des perturbations, la qualité de leur
positionnement économique à court et moyen terme apparait déterminant. Il leur faut être
capable de réguler à court terme les tensions financières internationales récurrentes tout en
définissant une dynamique de rattrapage économique favorable à moyen et long terme. Ces
deux aspects sont indissociables puisque l’inefficacité de court terme peut dégrader les
fondamentaux de ces pays, hypothéquant leur chance de rebondir par la suite. Alors que la
viabilité à moyen terme de leur développement économique est l’assurance d’un retour
rapide des capitaux étrangers lors de l’après crise. Au regard de la situation de chaque PECO,
des regroupements seront effectués pour définir des scénarios de court et moyen terme
quant à la viabilité potentielle de leur rattrapage économique.
14
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Partie 1
Présentation synthétique des modèles de crises de change :
un retour vers les crises financières comme élément
d’interprétation
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Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Introduction de la première partie
La relation entre les crises financières et les fondamentaux macroéconomiques n’est pas, au
regard de l’historique des sciences économiques, un champ d’étude inexploré. Une remise à
plat de ces apports est nécessaire pour permettre par la suite de rebondir sur des postulats
aujourd’hui largement admis. Le cheminement de cette première partie a pour ambition de
mettre en parallèle les fondements nécessaires à la réflexion de la problématique de thèse. Il
s’agira d’abord de présenter ce travail avec une véritable volonté de comprendre la nature
même d’une crise en complément des éléments de détermination et de réalisation de ce
phénomène. Par la suite, la description du contexte de libéralisation puis d’intégration des
marchés financiers, en parallèle à un ancrage fixe de nombreux taux de change de pays en
voie de développement, offrira les arguments nécessaires à la contextualisation de ces
tensions.
L’hypothèse qui est ici mise en avant repose sur l’affirmation que des pays émergents, dont
les fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers sont robustes, peuvent
néanmoins entrer en crise par des effets de contagion sans pour autant témoigner d’une
vulnérabilité fondamentale qui pourrait leur être propre. La littérature existante est en
totale opposition puisqu’elle postule que toute crise dans une économie ne peut s’expliquer
que par une vulnérabilité déjà existante dont les effets de contagion ne viendront que
renforcer l’impact. Une description complémentaire des modélisations de crise sera
l’opportunité d’en décrire les limites dans l’interprétation qu’elles donnent à ces
phénomènes apparaissant néanmoins nouveaux au regard de leur fréquence. Les modalités
dans l’occurrence de crises en Corée du Sud (1997-1998), puis au Brésil (1999-2002) et
surtout dans les pays d’Europe centrale et orientale (PECO) ayant intégré l’Union
européenne (2008) illustrent cette tendance qu’il conviendra de décrire pour tenter d’en
interpréter les grandes lignes.
Le choix d’un développement général de la notion de crise est adopté ici. Celle-ci pouvant
être spécifique à bien des domaines (économique, financière, sociologique…). Elle garde
néanmoins une dynamique similaire lors de sa concrétisation. Une mise en parallèle entre
les crises et la finance offre l’opportunité de prétendre qu’il ne s’agit pas d’un phénomène
16
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
propre aux sciences économiques. Son occurrence peut être perçue comme un événement
nécessaire induit par l’incapacité des forces en présence à s’adapter aux contraintes de leur
environnement. La littérature économique s’est emparée de la thématique depuis de
nombreuses années. L’économie capitaliste y apparaît propice au regard de la fréquence
élevée de ce phénomène. Un panel large d’outils de mesure a pu être réalisé afin de le
quantifier. La détermination de ces indicateurs repose sur la dégradation des fondamentaux
macroéconomiques et macro-financiers propres aux pays. La façon dont sont présentées les
tensions financières dans un contexte macroéconomique confirme l’attachement de cause à
effet entre crise financière et fondamentaux.
La libéralisation des flux financiers, à l’origine de l’intégration des marchés nationaux, a
offert l’opportunité d’amplifier la croissance économique de ces territoires. Mais cette
intensification des flux, à travers la globalisation des échanges, semble apporter une
instabilité supplémentaire à la sphère financière. Elle apparait pourtant comme un élément
essentiel à la régulation du système financier international afin de l’adapter aux contraintes
macroéconomiques et macro-financières du moment. L’intégration de plus en plus poussée
des marchés renforce les effets de contagion potentiels entre économies. Les turbulences
financières y apparaissent plus nombreuses mais aussi plus systémiques. La plus récente
libéralisation des pays en voie de développement semble les rendre d’autant plus
vulnérables à ces tensions. La problématique qui se pose véritablement concerne la capacité
de ces pays à libéraliser, notamment leur compte de capital, alors que nombre d’entre eux
sont sous ancrage fixe.
Les tensions financières, à travers l’instabilité qu’elles induisent, sont souvent à l’origine de
crises de change voire de crises jumelles (juxtaposition d’une crise de change et d’une crise
bancaire). La nature des régimes de change, qu’ils soient fixes, flexibles ou semi-flexibles,
explique largement cette tendance. La détermination du prix d’une monnaie sur le marché
international est fonction de l’offre et de la demande. Une multitude d’éléments est prise en
compte dans la fixation d’un prix d’équilibre. La liste des variables pouvant potentiellement
l’influencer n’a cessé de croître pour aboutir à une situation paradoxale tant elles sont
nombreuses aujourd’hui. Les indicateurs monétaires impactent directement le taux de
17
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
change. Mais les anticipations des agents économiques internationaux, qu’elles soient
fondées ou non, deviennent déterminantes dans un contexte de libéralisation financière.
Le besoin de capitaux des pays émergents pour pallier le manque d’épargne nationale, afin
d’amorcer une dynamique de rattrapage économique, rend vulnérables nombre d’entre eux
aux aléas des marchés financiers. Cette caractéristique est qualifiée de « péché originel » des
pays émergents puisqu’ils doivent s’endetter en devises étrangères et non en monnaie
locale. Les agents économiques internationaux ne souhaitent pas détenir le risque de
dépréciation de la monnaie du pays en voie de développement.
Les modélisations de première, deuxième et troisième générations, ont cherché à expliquer
les raisons de l’occurrence d’une crise de change mais toujours dans une dynamique de
dégradation des fondamentaux du pays à l’origine de l’amplification des vulnérabilités. Sa
matérialisation reste pourtant la même, à savoir une fuite généralisée des capitaux ne
permettant plus à l’ancrage fixe d’être viable au regard du déficit apparaissant normal de la
balance courante lors d’un processus de rattrapage économique. Des éléments de plus en
plus structurés, avec la Corée du Sud (1997-1998), le Brésil (1999-2002) mais surtout les
PECO (2008), démontrent le caractère inapproprié de ces modélisations. Ils ont pu remettre
en lumière l’importance des fondamentaux macroéconomiques. La relative bonne santé de
ces pays (fondamentaux macroéconomiques robustes et anticipations auto-réalisatrices
faibles) ne peut justifier les tensions financières alors induites. Se pose la question de la
réappropriation des modélisations de première génération dans l’explication de ces
phénomènes. Il s’agira alors d’en reprendre l’essence même mais en y contextualisant les
paramètres de la problématique de thèse, à savoir l’instabilité financière et les effets de
contagion dans un contexte d’ancrage du taux de change.
18
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Chapitre 1
Définition, détermination, anticipation et récurrence des crises financières.
Introduction intermédiaire
Les crises financières semblent faire partie intégrante de l’économie capitaliste. De tous
temps et sur tous les territoires, des tensions financières ont pu voir le jour. La littérature
économique est vaste dans ce domaine tant au regard de leur récurrence mais surtout de
l’incapacité à les prévenir afin d’en amoindrir les coûts financiers et réels. Néanmoins, de
nombreuses interprétations peuvent être réalisées à travers ces travaux afin d’en
comprendre le processus de fonctionnement. Une description dynamique de ce phénomène,
à travers sa définition, sa détermination puis sa réalisation, doit permettre d’offrir les
fondements nécessaires à la réflexion de la problématique de thèse. Cette approche qui se
veut d’abord générale, en y décrivant la crise de façon globale, va ensuite se focaliser sur ses
caractéristiques en regard du secteur de la finance. Elle peut être interprétée comme le
produit d’un ensemble d’éléments ayant pour origine son environnement, engendrant un
écart important par rapport à un état de référence jugé normal.
La volonté de sélectionner cette approche offre l’opportunité de mettre en parallèle la
dynamique d’une crise dans le cadre de sa temporalité et les éléments issus de la littérature
afin de la quantifier pour la déterminer. La démarche ainsi choisie met en lumière les
variables macroéconomiques et macro-financières, à travers leur dégradation, qui
apparaissent symptomatiques lors de crises financières au regard de ces travaux.
L’amplification apparente de ce phénomène n’est pas étrangère à la mutation des sociétés
contemporaines. L’ouverture des économies aux capitaux étrangers, le risque systémique, la
faible rémunération des actifs dans les pays développés, l’abondance de la liquidité et
l’augmentation de l’endettement international, le risque d’instabilité des pays émergents,
les effets de contagion et d’interdépendance, la volatilité des taux de change peuvent
apparaitre comme autant d’arguments venant conforter cette interprétation d’une
récurrence plus forte de ce phénomène.
19
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Ce retour sur la notion de crise est le point de départ du cheminement de la problématique.
Un inventaire des méthodes de mesure et d’anticipation des crises financières va venir
compléter l’analyse. Le retournement brutal sur le marché financier du prix des actifs lors du
dépassement d’un seuil qui aura été défini préalablement offre l’opportunité de quantifier
l’occurrence de ce phénomène. Une énumération de variables macroéconomiques et macrofinancières, à travers un comportement changeant avant la réalisation d’une crise, doit
permettre de les anticiper. Des divergences d’interprétation avec notre postulat peuvent
déjà être annotées. La sélection de variables déterminantes dans l’anticipation d’une crise se
concentre sur des indicateurs de vulnérabilité macroéconomiques et macro-financiers
propres au pays en crise. Le pouvoir prédictif de telles modélisations devient faible si le pays
en situation de tensions financières n’a pas eu au préalable une dégradation de ses
fondamentaux.
20
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
1. Une approche générale des crises comme définition
Un premier contour peut permettre de décrire les mécanismes de fonctionnement de la
notion de crise. Elle ronge d’elle-même et de l’intérieur un organisme, qu’il soit vivant, de
type institutionnel ou organisationnel, au regard de contraintes qu’il ne devient plus possible
de laisser en l’état. « Telle une gangrène, elle nait et se développe par l’intermédiaire de
mécanismes internes dysfonctionnels. » (Courbon, 2010). Elle est le produit d’un ensemble
d’éléments ayant pour origine son environnement, engendrant un écart important par
rapport à un état de référence jugé normal. « Pour que la discrimination soit possible, il est
nécessaire que les signes manifestes, les symptômes du processus observé dépassent un
certain seuil de tolérance à l’anormal. » (Courbon, 2010). Le seuil est fonction du domaine,
de l’histoire et de la culture où la crise va se concrétiser.
Pourtant, la crise n’est pas obligatoirement synonyme d’effets négatifs. « Une société qui
évolue est une société qui se détruit pour se récupérer, et c’est une société, donc, où se
multiplient les événements. » (Sinding, 1981). Il y est question de rupture nécessaire afin
d’adapter l’individu ou la société aux nouvelles contraintes auxquelles ils n’ont su se
préparer. « L’intérêt de l’idée de crise est de définir un avant et un après, et donc de faire
apparaître une évolution, voire une rupture entre deux formes de gestion et de traitement de
l’espace tendanciellement différentes (….) » (Marié, 1998). Une définition descriptive ne doit
pas pour autant faire oublier la dynamique de temporalité qui est propre au phénomène de
crise. Le processus peut être présenté en trois temps complémentaires : la période
antérieure à la crise, la période de crise puis la période postérieure à la crise (Lecomte, & al.,
1986). Chacun de ces temps est régi par un mécanisme pouvant induire un enchainement
potentiel vers la période suivante. Il y est question de la détermination d’un nouvel équilibre
lorsque ces tensions s’exercent. Le tableau 1 repris des travaux de Lecomte et al. (1986),
bien que destinés à des applications médicales, en décrit une dynamique intéressante.
La période antérieure à la crise comprend trois étapes complémentaires que sont un
événement dangereux induisant un état vulnérable puis un facteur déclenchant qui renforce
la situation de stress. Si l’organisme est capable d’appréhender puis d’anticiper les tensions
alors subies, il va se diriger vers un nouvel équilibre sans passer par une situation critique
21
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
pouvant être définie comme une crise. S’il n’en est pas capable, il va entrer dans la période
de crise. Lorsque le déséquilibre n’est plus maitrisé, deux comportements vont s’enchainer
l’un après l’autre. Il va d’abord y avoir un processus de désorganisation qui s’apparente à de
la panique induit par l’incapacité apparente de l’organisme à réguler cette situation
« anormale ». Ensuite, un processus de réorganisation issue d’efforts de réappropriation du
nouvel environnement va se poursuivre. Il va s’ensuivre une transition vers la dernière étape
qui est la période postérieure à la crise par un retour à un nouvel équilibre.
Tableau 1. La dynamique des crises : une interprétation globale
Source : (Lecomte, & al., 1986)
22
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
La réalisation de la crise puis son dépassement ne sont pas pour autant sources d’un
apprentissage favorable. Le nouvel équilibre peut être de niveau de fonctionnement
supérieur, identique voire inférieur suivant l’expérience acquise. L’organisme en sera plus
fort s’il est dorénavant capable de prendre en compte les situations de stress subies. Au
contraire, l’impact de la crise peut dégrader d’autant plus sa capacité à réagir en imposant
des vulnérabilités supplémentaires auxquelles le nouvel équilibre n’apporte pas de réponse.
L’utilisation de la notion de crise dans le cadre des sciences économiques peut être assimilée
à la définition alors proposée. Le concept de crise repose sur la nature cyclique de la
croissance économique lors d’une chute de la production (Kitchin, 1923) (Juglar, 1862)
(Kondratiev, 1926). Afin de le matérialiser, un retour historique peut être envisagé. Les crises
économiques ont d’abord été des crises où des problèmes d’ajustement entre l’offre et la
demande sur les marchés des biens et services ont pu apparaitre. A partir d’un élément
perturbateur, le facteur déclenchant, l’équilibre va être perturbé pour donner naissance à
une fluctuation de prix au sein d’un secteur d’activité. Un retour à l’équilibre se mettra en
place où un nouveau prix sera défini, issu d’une nouvelle confrontation entre l’offre et la
demande. La régulation nécessaire à ce retour à l’équilibre a pu nécessiter une intervention
publique, la mise en place de nouveaux outils de production, la faillite d’entreprises, …
La production agricole est, historiquement, un exemple de crise économique. L’élément
déclenchant y est majoritairement constitué par les aléas climatiques (une surproduction
agricole faisant diminuer les prix au regard de la faiblesse de la demande ou une sousproduction faisant augmenter les prix au regard de la force de la demande). L’amplification
des échanges à partir de l’ère industrielle a renforcé la fluctuation des prix des marchandises
par les forces de l’offre et de la demande. D’autres éléments perturbants sont alors entrés
en jeu (solvabilité de la demande, intervention de l’état, innovations…). Elles ont été définies
de crises de sous-consommation à partir du milieu du 20ème siècle où le facteur perturbateur
va engendrer une chute des prix influençant le niveau de production. La demande n’était pas
suffisamment solvable pour satisfaire la croissance de l’offre.
Aujourd’hui, nous assistons à des phénomènes de crises économiques plus globalisés tant
les structures de production et la population des consommateurs se sont mondialisées. « Les
23
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
périodes de crises économiques se caractérisent au niveau international par l’apparition d’un
déséquilibre massif des paiements internationaux (…). » (Allégret, 1993). Pourtant, la
dynamique des crises économiques reste la même. « Toutes ces situations dites
« historiques » de crise se traduisent concrètement par une baisse des prix, une multiplication
des faillites et un fléchissement de la production et de l’emploi. » (Attali, 1976). La
dynamique de la croissance économique apparait structurée par des cycles de hausse puis
de baisse dont les périodes de crises sont le lien entre récession et expansion.
La sphère financière s’est développée en parallèle à l’économie afin de permettre une
meilleure allocation des ressources (Berthélemy, & al., 1994). Elle a permis d’amplifier les
périodes de croissance à travers l’intermédiation financière entre les détenteurs de capitaux,
qui prêtent, et les demandeurs de capitaux, qui investissent. Les formes d’actifs issues de
cette activité financière vont se retrouver sur des marchés afin de permettre aux prêteurs de
se désengager si nécessaire pour d’éventuels repreneurs. Le prix d’équilibre des actifs de ces
marchés financiers est aussi fonction de la confrontation de l’offre et de la demande.
Il est communément admis que la finance permet une diminution des risques en dirigeant
l’épargne vers des placements plus productifs et stables (Bencivenga, & al., 1991), en offrant
la possibilité de diversifier son portefeuille (Saint-Paul, 1992) (Greenwood, & al., 1990) et en
obtenant plus facilement des informations nécessaires à la bonne gestion des
investissements (Gertler, & al., 1991) (King, & al., 1993). Le marché financier peut aussi être
à la source de déséquilibres importants où le prix des actifs financiers, à la hausse comme à
la baisse, n’apparait plus correspondre à la valeur intrinsèque de l’actif. Les répercussions
peuvent être dangereuses sur l’activité économique tant lors de phases d’euphories que de
périodes de paniques généralisées. Mais l’occurrence d’une crise financière aborde dans sa
dynamique une temporalité propre à l’ensemble des crises.
Il y a tout d’abord un événement déclencheur que Minsky décrira de « déplacement »
(Minsky, 1982), qui pousse les capitaux à se diriger vers le secteur d’activité devenu attractif.
« La nature de ce déplacement varie d’un boom spéculatif à l’autre, que ce soit le début ou la
fin d’une guerre, une récolte record ou catastrophique, l’application généralisée d’une
nouvelle invention aux conséquences pernicieuses – canaux, chemin de fer, automobile – un
24
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
événement politique ou un succès financier surprenant, une conversion de la dette publique
qui s’accompagne d’une baisse précipitée des taux d’intérêt. » (Kindleberger, 1978).
L’attractivité d’un secteur va dans un premier temps se renforcer et la demande d’actifs
financiers pour y investir va faire augmenter le prix de ces actifs, confortant d’autant plus la
rentabilité espérée. Ce processus de spéculation est décrit comme « l’euphorie » (Minsky,
1982) ou « l’overtrading » (Kindleberger, 1978). Il s’agit néanmoins d’une augmentation de
la vulnérabilité de la sphère financière au regard de la spéculation alors engendrée. Cet
excès d’échange d’actifs financiers peut se transmettre à l’économie par une augmentation
du prix des biens et services du secteur à travers des jeux d’arbitrages entre agents
économiques internationaux.
Un facteur déclenchant va marquer le début du retournement à l’origine de la panique
généralisée. « Le signal spécifique qui marque le début de la crise, peut-être la faillite d’une
banque ou d’une entreprise, prise au piège du crédit (…). La course a commencé. Les prix
baissent. Les faillites se multiplient. La liquidation se fait parfois dans le bon ordre, mais le
plus souvent dégénère en panique quand on s’aperçoit qu’il n’y a pas suffisamment d’argent
en circulation pour permettre à tous de réaliser les plus-values attendues. » (Kindleberger,
1978). Minsky qualifie cette étape de « phase de révulsion » (Minsky, 1982). Les banques
vont alors restreindre fortement l’accès au crédit au regard de l’augmentation du risque de
défaut des agents économiques.
Le retour à un nouvel équilibre devient envisageable lorsque l’une au moins des trois
conditions suivantes est présente : les prix des actifs sont devenus tellement bas que de
nouveaux investisseurs sont prêts à les racheter, les transactions peuvent être stoppées en
clôturant le marché, un prêteur en dernier ressort apporte sa garantie afin de restaurer la
confiance (Kindleberger, 1978). « De façon générale, une crise financière se définit comme
une brutale augmentation de la demande de monnaie à des fins de précaution. » (Corneille,
1998). Lorsque les liquidités sont de retour sur le marché financier, un nouvel équilibre se
forme où un nouveau prix des actifs qui était à la source de la spéculation est défini.
25
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Les crises abordent des thématiques larges dont la finance fait partie. Leurs dynamiques
peuvent être mises en parallèle au regard des faits empiriques de l’histoire économique et
financière de nos sociétés. Le cycle de l’activité économique amplifié par l’intermédiation
financière apporte des éléments de compréhension nécessaires à la poursuite de l’étude. Les
marchés financiers, à travers la détermination du prix d’équilibre des actifs, se résument à la
confrontation entre une offre et une demande. C’est alors tout élément perturbateur du
marché qui va induire une dépréciation significative du prix des actifs à l’origine de la crise.
Les difficultés de réactivité, afin d’apporter les réponses nécessaires aux ajustements
pouvant engendrer une crise, reposent sur la nature internationale des éléments
perturbateurs d’un marché devenu globalisé. Il s’agit de savoir si un pays devenant
vulnérable au regard de l’incapacité de ses partenaires à apporter des solutions efficaces
peut intervenir pour tenter au final de se protéger ?
26
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
2. Détermination et anticipation des crises financières en Sciences Economiques
Il convient de présenter les éléments de mesure que l’on peut utiliser afin de déterminer
puis d’anticiper les crises financières. Cette approche doit permettre de faire un parallèle
entre la dynamique d’une crise dans le cadre de sa temporalité et les éléments issus de la
littérature afin de la quantifier pour la mesurer. La démarche alors choisie va nous permettre
de mettre en avant les variables macroéconomiques et macro-financières qui apparaissent
déterminantes lors des crises financières au regard de ces travaux. « (…) la notion de crise
apparaît toujours comme le lieu essentiel où se révèle le cœur d’une modélisation théorique :
il n’y a pas, en effet, de définition de la crise dans un corps d’analyse sans désignation de ses
causes, et donc, sans dévoilement de la grille de lecture de la dynamique sociale. » (Attali,
1976). Il conviendra de revenir sur ces interprétations pour les confronter à notre approche.
Des limites y apparaissent notamment quant à la pertinence des anticipations auxquelles
elles conduisent.
La plus élémentaire des méthodes de détection d’une crise consiste à observer le prix des
actifs déterminé sur un marché financier afin de signaler les perturbations propres au
secteur (FMI, 1998) (Artus, 2001). Elles peuvent correspondre à des ruptures brutales de
tendance, des retournements de conjoncture, le dépassement de seuils… (Dehove, 2004).
Cette approche ne peut être que complémentaire à d’autres analyses approfondies au
risque d’aboutir à des erreurs d’interprétation. Elle met seulement en avant des situations
anormales où une crise financière s’est potentiellement réalisée. Les indicateurs sont les
variables représentant les prix des actifs établis sur les marchés financiers : taux de change,
indices boursiers, prix immobiliers, prix obligataires, prix des dettes souveraines, prix des
métaux précieux et des matières premières… (Boyer, & al., 2004).
Les graphiques 1 et 2 illustrent des périodes de fortes volatilités du prix d’actifs financiers
matérialisant des phénomènes de crises.
27
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Graphique 1. Crise de change : volatilité des taux de change
2,5
Australie
2,3
2,1
Canada
1,9
1,7
1,5
Suisse
1,3
1,1
RoyaumeUni
0,9
0,7
0,5
1980 1982 1984 1986 1988 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 2006 2008 2010
Zone euro
(17 pays)
Source : OCDE - Taux de change, unités de monnaie nationale par dollar É-U (moyenne
mensuelle)
Graphique 2. Crises boursières : volatilité des cours boursiers
160
France
140
Allemagne
120
Japon
100
80
RoyaumeUni
60
États-Unis
40
20
1990
1992
1994
1996
1998
2000
2002
2004
2006
2008
2010
Zone euro
(17 pays)
Source : OCDE- Cours des actions, Indice 2005=100
Les graphiques qui viennent d’être présentés décrivent des périodes de fortes amplifications
de hausses des prix, suivies généralement par des périodes de fortes baisses de ces mêmes
prix. L’équilibre entre l’offre et la demande sur les marchés financiers apparait ici perturbé.
Ces retournements de conjoncture peuvent être à l’origine de crises financières sans pour
autant en expliquer les raisons.
28
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
La méthode suivante est celle des « events » qui a été utilisée à l’origine pour l’analyse des
crises de change (Eichengreen, & al., 1995) (Frankel, & al., 1996) et des crises jumelles
(Kaminsky, & al., 1996). Son principe repose sur l’analyse de l’évolution d’avant et d’après
crise de variables déterminantes lors de la réalisation des tensions financières. La démarche
comprend plusieurs étapes. Il faut tout d’abord identifier le moment de la crise. Ensuite, il
convient de séparer les périodes de crise de celles de non crise. La période de crise doit être
suffisamment large pour prendre en compte la fluctuation de la variable avant la crise,
pendant la crise puis après la crise. Pour chaque fréquence de la période de crise, il y a une
comparaison de la valeur de la variable sélectionnée avec sa valeur en période de non crise.
Cette valeur est souvent définie par sa moyenne et son écart-type (Dehove, 2004) sur des
périodes qui peuvent être de six mois, d’un an, de deux ans (Eichengreen, & al., 1995) mais
aussi de trois ans (Frankel, & al., 1996) voire de quatre ans (Aziz, & al., 2000).
L’idée est d’obtenir sur toute la période de crise un graphique illustrant le différentiel de
variation de la variable déterminante par son comportement changeant d’avant, de pendant
et d’après crise par rapport à son niveau en périodes de non crise (Latinier, 2006).
L’hétérogénéité de la structure économique des pays, à la source de fluctuations
différenciées des variables, implique d’inclure des filtres nécessaires à leur normalisation
(Aziz, & al., 2000). A titre d’exemple, la variable sélectionnée dans le graphique 3 est un taux
d’intérêt réel sur une période de 18 mois avant et de 18 mois après une crise de change
(Dehove, 2003). La ligne horizontale correspond à la moyenne des périodes de non crises. Ici,
le taux d’intérêt réel diminue avant la crise et reste en dessous de son niveau moyen un à
deux mois avant et pendant la crise.
Graphique 3. Exemple d’analyse par « event » sur un taux d’intérêt réel
Source : Dehove, 2003.
29
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
La possibilité de prendre plusieurs variables, avec la modélisation multi-variée, pour
anticiper le risque de crise est un avantage par rapport à la méthode précédente des
« event » qui ne se focalise que sur une seule variable explicative. Le modèle multi-varié est
une estimation de la probabilité d’une crise avec une (one-step) ou plusieurs (k-step)
périodes avant sa réalisation, et ce à travers des modifications Logit ou Probit (Dehove,
2004). L’idée est d’appréhender une variable indépendante discrète, la variable de crise,
avec d’autres variables indépendantes continues. Il s’agit d’expliquer un indicateur
d’anticipation de crise par une série de variables indépendantes mais récurrentes de ce
phénomène.
Deux types de fonction sont généralement utilisés : la fonction de répartition de la loi
normale centrée réduite pour le modèle probit (Eichengreen, & al., 1995) (Frankel, & al.,
1996) et la fonction de répartition de la loi logistique pour le modèle logit (Eliasson, & al.,
2001). Il n’y a donc finalement sur le fond que peu de différences entre le modèle probit et
le modèle logit (Latinier, 2006). La méthodologie multi-variée permet de quantifier la
probabilité d’occurrence d’une crise financière. Par exemple, un risque de dévaluation du
taux de change peut être défini au regard de variables alors sélectionnées comme les
réserves de devises, le déficit de la balance courante, le taux d’intérêt...
La méthode des signaux ou des « indicateurs avancés » est l’une des méthodes les plus
complètes de modélisation de l’anticipation des crises financières. Elle est aussi basée sur
l’évolution de variables macroéconomiques et macro-financières avant la réalisation d’une
crise. Lorsqu’une variable dépasse un seuil alors défini, un signal sera déclenché permettant
d’anticiper la réalisation de la crise financière (Kaminsky, & al., 1996). L’idée est d’analyser le
cycle des affaires afin de prédire un retournement de la conjoncture où des indices
précurseurs au retournement seront capables de donner de bonnes informations. Il peut
s’agir par exemple d’une définition binaire de la crise à travers un indice de pression sur le
taux de change (Kaminsky, & al., 1998), (Cartapanis, & al., 1998) (Cartapanis, & al., 1999).
Chaque indicateur va être analysé suivant un seuil fixé pour chacune de ces variables, le
dépassement de ce seuil correspondant à un signal. Tout l’intérêt est de faire émerger un
maximum de bons signaux (réalisation de la crise financière à la suite) et un minimum de
30
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
mauvais signaux (non réalisation de la crise financière). Les indicateurs sont alors classés
suivant leur qualité de prédiction de la crise au regard de la fréquence de bons signaux émis.
Certaines critiques quant à la plausibilité de cette méthode ont pu émerger, notamment
dans l’anticipation de la crise des Subprimes (2008), où une analyse sur 107 pays a pu être
menée à travers 60 causes potentielles de crises (Rose, & al., 2009).
Les travaux de Kaminsky et Reinhart (1996) restent la référence pour ce type de méthode de
détection de crises financières (tableau 2). Ils ont pu mettre en avant l’étude de 76 crises de
change dans 20 pays (15 émergents et 5 développés) durant la période 1970-1995. Il en
ressort une classification de seize variables macroéconomiques et macro-financières
pertinentes dans la détermination avancée des crises financières sur une période de crise de
24 mois sélectionnée (tableau 3). Celle qui a le plus fort pouvoir prédictif est le taux de
change réel.
Tableau 2. Tableau de répartition des signaux des variables prédictives
Crise (dans les 24 mois)
Pas de crise (dans les 24 mois)
Signal émis
A
B
Pas de signal émis
C
D
A+C = total des crises
B+D = total des non crises
Source : (Kaminsky, & al., 1998).
A : nombre de mois pendant lesquels un indicateur envoie un bon signal
B : nombre de mois pendant lesquels un indicateur envoie un mauvais signal (erreur type 1)
C : nombre de mois pendant lesquels un indicateur manque d’envoyer un bon signal (erreur
type 2)
D : nombre de mois pendant lesquels un indicateur manque d’envoyer un mauvais signal
L’optimalité d’un indicateur afin de prédire une crise est fonction de l’envoi de signaux tous
les mois avant la réalisation de la crise sans pour autant en adresser lors de périodes de non
crise (A>0, B=0, C=0 et D>0). Le ratio de qualité de chaque variable est le suivant :
(A/(A+B))
31
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Cette formule mesure la probabilité conditionnelle pour qu’une crise ne se réalise pas sans
avoir pu émettre un signal.
(B/(B+D))
Cette formule mesure la probabilité conditionnelle pour que des mauvais signaux soient
envoyés par la variable (une non crise soit pris pour une crise) ;
L’idée est alors de combiner ces deux signaux afin d’avoir un indicateur qui puisse émettre
de bons signaux tout en évitant d’en émettre des mauvais. Il s’agit d’un indicateur appelé
« bruit sur bons signaux » :
(B/(B+D)) / (A/(A+C)).
Lorsque le ratio est faible, le type d’erreur 2 est faiblement présent alors que le pouvoir
prédictif d’une crise est fort. Ceci étant, ces signaux n’expliquent aucunement la façon dont
la crise se réalise (le lien de cause à effet entre les variables). En outre, la définition des
seuils d’alerte reste subjective (Dehove, 2003).
Les techniques qui ont pu être mises en avant dans cette section sont largement utilisées
dans la littérature économique dans le cadre de la détermination et de l’anticipation des
crises financières (FMI, 1998). Le choix des variables devient déterminant pour définir la
qualité de l’anticipation à travers leur pouvoir précurseur. Mais l’explication des raisons de la
détérioration des variables n’est cependant pas donnée dans ce type d’interprétation
(Eichengreen, & al., 1995) (Frankel, & al., 1996) (Bussière, & al., 2002). Cette problématique
est d’autant plus importante au regard du postulat qui a pu être posé ici où il n’y a pas de
dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers au sein des pays en
crise pouvant expliquer son origine. L’utilisation de ces variables ne va pas permettre de
prédire les tensions potentielles et rendre l’occurrence de ce style de crise d’autant plus
inattendu.
32
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Tableau 3. Classification des variables suivant leur pouvoir prédictif
Source : (Kaminsky, & al., 1996)
33
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
3. Historique des crises financières : une récurrence continue
Il peut convenir de décrire la fréquence des crises financières et notamment des crises de
change au regard de leurs récurrences dans les économies. « Il n’y a pas d’économie de
marché sans crises » (Kindleberger, 1978). De nombreux auteurs ont pu réaliser des études à
partir des années 1800 jusqu’à aujourd’hui (Bordo, & al., 2001) (Boucher, 2002). Les crises
semblent s’être intensifiées depuis ces dernières années, allant même jusqu’à être
simultanées (on parle de crises jumelles). Le contexte actuel serait l’élément explicatif de
l’augmentation de cette récurrence. L’amplification des échanges financiers notamment
dans des pays peu développés et sans système de régulation important pourrait expliquer
cette tendance (Brender, & al., 2001). L’ouverture des économies aux capitaux étrangers, le
risque systémique, la faible rémunération des actifs dans les pays développés, l’abondance
de la liquidité internationale, l’augmentation de l’endettement international, le risque
d’instabilité des pays émergents, les effets de contagion et d’interdépendance, la volatilité
des taux de change sont autant d’arguments venant conforter cette interprétation.
Les études ont littéralement explosé sur le sujet. Kaminsky, Lizondo et Reinhart (1998)
mettent en avant 28 études réalisées entre 1950 et 1998. Aujourd’hui, il y a en plus du
double. L’abandon du système de Bretton Woods en 1976, qui offrait l’opportunité de fixer
les rapports entre les devises internationales, en serait l’une des raisons (Bordo, & al., 2001).
Bordo, Eichengreen, Klingebiel, Martinez-Peria (2001) ont réalisé une étude sur 56 pays
(développés et en voie de développement) sur une période de 120 ans (graphique 4). Il y est
question d’une plus forte probabilité d’avoir des crises sur la période 1973-1997 que sur les
périodes 1880-1913 et 1945-1971. Il n’y a que la période 1919-1939 qui fait exception (dû à
l’instabilité de l’entre deux guerres). Les crises financières seraient d’une fréquence de 6%
durant la période de Bretton Woods alors qu’elles atteindraient plus de 10% entre 1973 et
1997. Il s’agit alors surtout de la réapparition des crises bancaires et du retour des crises
jumelles.
34
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Graphique 4. Fréquence des crises financières
L’analyse de Dehove (2003) (tableau 4) permet de mettre en parallèle la récurrence des
crises financières avec quatre périodes différentes dans les règles d’émission de monnaie, de
contrôle des capitaux et de la liberté bancaire issues des travaux de Bordo, Eichengreen,
Klingebiel et Martinez-Peria, (Bordo, & al., 2001). Certains types de crises peuvent apparaitre
pour ensuite disparaitre à chaque période sans pour autant témoigner d’une généralisation
quant à la récurrence des crises financières. Lors de la période de l’étalon-or, les crises sont
d’abord bancaires (2%) et faiblement de change (1%) ainsi que jumelles (1%). La période de
l’entre-deux-guerres est sujette à de nombreuses crises de toutes natures : crises de change
(5%), crises bancaires (5%) et crises jumelles (5%). Pendant les accords de Bretton Woods,
les crises bancaires disparaissent totalement mais les crises de changes restent nombreuses
(7%). La période des 30 années suivantes, l’après Bretton Woods, se caractérise par un
retour aux crises bancaires (2%) et l’apparition des crises jumelles (2%) tout en gardant un
taux de crises de change élevé (5%).
35
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Tableau 4. Fréquence par période de régulation internationale divergente
Source : (Dehove, 2003) Les signes (-) et (+) informent de l’intensité de la relation entre les
crises et les périodes.
Le retour des crises bancaires au regard de la libéralisation des systèmes bancaires
nationaux peut être interprété comme une relation d’interdépendance entre la régulation
bancaire et les crises dans ce même secteur. Quant aux crises de change, elles
n’apparaissent nullement dépendre d’un cadre d’analyse spécifique plutôt qu’une autre. La
récurrence des crises financières ne semble pas plus importante depuis les 30 dernières
années. L’analyse de Stone et Weeks (2001) confirme cette interprétation où, d’après une
étude sur 49 pays, le nombre de crises financières n’a pas plus augmenté (graphique 5). Il y a
surtout une augmentation des crises jumelles durant cette période.
Graphique 5. Fréquence des crises sur une période plus récente
Source : (Stone, & al., 2001)
36
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
La poursuite de l’analyse de la récurrence des crises financières lors de l’après Bretton
Woods met en avant dans la littérature une plus grande vulnérabilité vis-à-vis des pays en
voie de développement (Bordo, & al., 2001), (Dehove, 2003), (Stone, & al., 2001).
Le graphique 6 montre l’Afrique avec une probabilité d’occurrence de crise moyenne d’une
année sur deux contre l’Amérique Latine une année sur cinq, suivie de près par l’Asie et le
Moyen-Orient. Les pays développés restent largement à l’écart au regard des pays en voie
de développement avec en moyenne une crise par décennie (Stone, & al., 2001).
Graphique 6. Fréquence des crises par région
Source : (Stone, & al., 2001)
Quant au graphique 7, les crises dans les pays émergents y sont deux fois plus importantes
durant la période 1973-1997 que durant les périodes 1919-1939 et 1945-1971 ainsi que cinq
fois plus importantes durant la période de l’étalon-or : de 1880 à 1913.
37
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Graphique 7. Fréquence des crises dans les pays émergents par période
Source : (Bordo, & al., 2001) probabilité de crise en % par an
La différenciation de l’occurrence des crises financières entre les pays développés et les
émergents s’interprète par l’insertion plus tardive de ces derniers dans la sphère financière
internationale. Quant à la mise en parallèle du contrôle des capitaux et du contrôle bancaire
au regard de l’historique des crises financières, elle ne semble pas apporter de réponse. Il est
difficile d’y voir une tendance historique ni dans un sens (stabilisation progressive des
marchés mise en avant par la théorie de l’efficience des marchés) ni dans l’autre (la
libéralisation et la financiarisation des économies). Pourtant, les crises de change
apparaissent toujours importantes quel que soit la période analysée. Ces deux
caractéristiques, vulnérabilités des pays émergents couplées aux crises de change, dans un
contexte de libéralisation et d’intégration forte des économies internationales, mettent en
avant des spécificités qu’il faudra expliquer.
38
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Conclusion intermédiaire
Le présent chapitre a permis de décrire la notion de crise afin de retracer la dynamique et
l’amplification de ce phénomène. Il y est question de rupture nécessaire afin d’adapter
l’individu ou la société aux nouvelles contraintes auxquelles ils n’ont su se préparer. Dans le
cadre spécifique de la finance, la fluctuation du prix des actifs, lors d’un retournement de
conjoncture, est à l’origine de déséquilibres. Mais le marché financier n’en sera pas plus fort
s’il n’a pas été capable de trouver les adaptations nécessaires à ces nouvelles tensions qui
pourront revenir prochainement. Cet aspect est important puisqu’il est déjà équivoque au
regard de notre problématique. Comment permettre à des marchés financiers, et plus
spécifiquement dans les pays en voie de développement, d’apporter des éléments de
réponses à des tensions pouvant être à l’origine d’une crise si elles ne sont pas dues à des
vulnérabilités qui leurs sont propres ? La véritable question qui se pose, à partir du moment
où il devient pertinent de prendre en compte ces caractéristiques, est de savoir si un pays
devenant vulnérable au regard de l’incapacité de ses partenaires à apporter des solutions
efficaces peut intervenir pour tenter de se protéger ?
La quantification du processus de détermination de crise afin d’anticiper d’éventuelles
tensions pose le même genre de questionnement. Les méthodologies adoptées reposent sur
l’obtention du différentiel de fluctuation de variables déterminantes par un comportement
changeant d’avant, de pendant et d’après crise. Mais ces indices ne peuvent être définis de
précurseurs que pour le retournement de la conjoncture du pays et nullement vis-à-vis
d’effets de contagion internationaux. Elles n’ont aucun pouvoir dans le cadre de notre
postulat de non vulnérabilité apparente des fondamentaux macroéconomiques et macrofinanciers propres au pays. Ces techniques d’analyse apparaissent pertinentes si l’on
suppose que la crise est le fruit d’une dégradation interne dont des signes précurseurs
pourront témoigner de l’occurrence. Se pose de nouveau la question des effets de contagion
pouvant rendre vulnérable le pays, à l’origine d’une crise potentielle, à un choc externe.
L’analyse a mis en avant la récurrence historique des crises financières sans pour autant
témoigner de faits spécifiques importants au regard de la mondialisation et de la
globalisation de la sphère financière récente. Pourtant, deux points importants sont à mettre
39
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
en évidence : les crises de change sont toujours présentes à l’ensemble des périodes et les
pays émergents sont a priori plus vulnérables que les pays développés. La poursuite de
l’étude se devra d’en expliquer les raisons.
Le chapitre suivant aura pour ambition d’illustrer le contexte financier actuel pour
déterminer de nouveaux éléments déterminants de la vulnérabilité des régimes de change
au sein des pays en voie de développement. Une attention particulière sera évidemment
orientée vers les notions d’interdépendance et d’effets de contagion au regard de leur rôle
de plus en plus important de par la libéralisation financière internationale.
40
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Chapitre 2
La vulnérabilité des régimes de change face aux tensions financières
internationales.
Introduction intermédiaire
La finance fait partie des secteurs qui ont été fortement impactés par la dynamique de
libéralisation et d’intégration (diminution des entraves aux mouvements de capitaux et
rémunération identique du risque sur différents territoires). Ce processus a été une
opportunité pour les agents économiques internationaux afin d’opérer des arbitrages entre
les places financières. Il s’agissait avant tout pour les pays en voie de développement de
financer leurs besoins en capitaux afin d’amorcer une dynamique de rattrapage
économique. Ces caractéristiques ont induit une situation d’interdépendance entre les
économies où l’instabilité qui en résulte va amplifier les phénomènes de contagion. La
description des effets de contagion ne doit pas pour autant occulter la remise en cause du
postulat qui leur est attribué : ils prennent pour explication une vulnérabilité apparente
justifiant la déstabilisation de l’économie. S’il peut s’avérer que des pays avec de bons
fondamentaux peuvent entrer en crise sans témoigner de vulnérabilités propres, la question
de la régulation des flux financiers au niveau supranational va se poser véritablement.
La nécessité de stabiliser le risque de dépréciation monétaire, afin de rendre attractif les
pays en voie de développement, les a conduit à ancrer leur taux de change dans un contexte
de libéralisation des flux de capitaux. Pourtant, ce n’est pas un hasard si les trois générations
de modélisation de crises de change se font dans le cadre d’un ancrage fixe. Une crise de
change se matérialise par la fuite généralisée de capitaux ne permettant plus à l’ancrage
d’être viable au regard du déficit apparaissant pourtant normal de la balance courante lors
d’un processus de rattrapage économique. Pourtant, la fuite généralisée des capitaux,
symptomatique de ce phénomène, est le fruit d’une multitude de variables qu’il devient
difficile d’interpréter. A la moindre tension constatée ou anticipée, les agents économiques
peuvent choisir de rapatrier leurs capitaux.
41
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Il convient tout d’abord de présenter le nouveau contexte financier international afin de
mettre en évidence l’origine des nouvelles vulnérabilités de ces économies dans le cadre
d’une crise de change. Il s’agira alors de s’attarder sur les ancrages fixes afin d’en expliquer
la forte popularité. Les modélisations de première, deuxième et troisième générations
seront présentées pour expliquer les raisons historiques de l’occurrence de ces
phénomènes. Mais au regard de la problématique de thèse, et en appui de faits empiriques
récents (Corée du Sud, Brésil et plus spécifiquement PECO), les nombreuses limites
obligeront à une contextualisation des modélisations, notamment de première génération.
42
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
1. Les nouveaux éléments du contexte financier international
La finance fait partie des secteurs qui ont largement été propulsés dans l’ère de la
globalisation. On parle même de « globalisation financière » (Aglietta, 2000) avec des
mutations profondes qui ont pu toucher son fonctionnement dans l’ensemble des pays. A
partir du moment où il a été possible de réaliser des transactions financières entre différents
territoires, une autre caractéristique de la finance moderne a pu apparaitre : l’intégration
des marchés financiers nationaux au marché financier international. « Le processus de
globalisation désigne le mouvement historique d’ouverture des marchés de capitaux. A la
limite, la globalisation est parfaite lorsque toutes les entraves aux mouvements de capitaux
ont disparu. Quant à lui, l’état d’intégration désigne la situation dans laquelle tous les actifs
appartements à la même classe de risque sont également rentables, indépendamment des
marchés où ils sont émis. » (Pépin, 2004).
La globalisation financière, qu’il peut convenir aussi d’appeler libéralisation financière, se
caractérise par une allocation du capital non plus majoritairement par le système bancaire
traditionnel mais principalement à travers les marchés financiers, impliquant une croissance
économique différenciée tant dans sa dynamique que dans l’allocation des ressources. Il en
a découlé trois bouleversements majeurs : une dérégulation des taux d’intérêt par les
pouvoirs publics, une concurrence entre les différents canaux de financement et une
ouverture du système financier sur le reste du monde (Allegret, & al., 2003).
La nature du financement des firmes reflète cette tendance avec une forte augmentation de
titres de créances négociables et des capitalisations boursières (tableau 5). « Il appartient
déjà à l’histoire des faits économiques et financiers que les années 1980 furent la décennie de
la déréglementation et de la libéralisation des marchés de capitaux, et surtout de leur
internationalisation croissante. » (Goyeau, & al., 1999)
43
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Tableau 5. Capitalisation boursière sur les marchés d’actions
Source : (Minda, 1997) Milliards de dollars
Il faut néanmoins garder à l’esprit que les marchés financiers domestiques ne sont que
progressivement devenus internationaux et non par un processus rapide et direct (Pépin,
2004). Ainsi, une déréglementation de l’activité financière par les pouvoirs publics n’est pas
pour autant synonyme de contribution directe au système financier international. Il lui faut
ensuite devenir attractif au regard des autres places financières (espérance de rentabilité
plus forte, diversification du risque…). Le graphique 8 met en avant cette tendance
internationale du processus de libéralisation des économies depuis les années 1970, que ce
soit dans les pays développés (Allemagne, Canada, Danemark, Espagne, États-Unis, Finlande,
France, Irlande, Italie, Japon, Norvège, Portugal, Royaume-Uni et Suède) ou dans les pays en
voie de développement même si elle fût plus tardive pour eux (Argentine, Brésil, Chili,
Colombie, Corée, Hong Kong, Indonésie, Malaisie, Mexique, Pérou, Philippines, Taïwan,
Thaïlande et Venezuela). L’indice qui y est utilisé est issu de la libéralisation du compte de
capital, du marché boursier et du secteur domestique financier.
Graphique 8. Indice de libéralisation financière
Source : (Kaminsky, & al., 2002)
44
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Quant au degré d’intégration financière d’un pays, il se mesure suivant l’existence ou non
d’une prime de risque différenciées sur des actifs financiers de même nature cotés sur
plusieurs places financières (Stulz, 1981) (Adler, & al., 1983) (Bordes, 1988) (Bourguinat,
1997) (Goyeau, & al., 1999) (Pépin, 2004). Si ces actifs avec le même niveau de risque ont le
même rendement espéré, on peut parler de marchés intégrés. Alors que, s’ils n’ont pas les
mêmes rentabilités espérées, on parle de marchés segmentés (Chen, & al., 1995) (Wheatley,
1988). « L’intégration financière internationale équivaut alors par définition à la réalisation
absolue de la loi du prix unique du risque sur les marchés de capitaux internationaux. »
(Goyeau, & al., 1999).
Les investisseurs vont donc diversifier leurs actifs financiers au regard tant des risques
communs que des risques spécifiques de chaque actif avec des stratégies de diversification
géographique. « En revanche, si les marchés sont strictement segmentés, les investisseurs
sont exposés seulement à des risques locaux. » (Arouri, 2006). Le processus de globalisation a
offert l’opportunité aux agents économiques internationaux de faire des arbitrages entre les
places financières internationales, à l’origine de l’intégration des marchés financiers. « Le
passage d’une situation de marchés segmentés à une situation de marchés intégrés est
désigné sous le terme de processus d’intégration financière » (Goyeau, & al., 1999).
De nombreuses modélisations ont pu voir le jour afin de tester le degré d’intégration des
marchés financiers. Les premières analyses réalisées mettent en avant seulement les deux
situations extrêmes. Sur les modélisations à segmentation absolue, la rentabilité des actifs
est déterminée par des sources locales de risques (Sharpe, 1964) (Lintner, 1965) (Black,
1972) (Merton, 1987). Sur les modélisations d’intégration parfaite des marchés financiers
nationaux, il n’y a que les sources de risques internationaux qui sont sélectionnées (Harvey,
1991) (De Santis, & al., 1997) (De Santis, & al., 1998) (De Santis, & al., 2003). Dans la réalité,
la situation est un peu plus mitigée. D’autres modélisations sont venues en complément
depuis pour tenter d’inclure aussi bien la segmentation que l’intégration des marchés
(Errunza, & al., 1985) (Black, 1974) (Stulz, 1981) (Hietala, 1989).
Il en ressort que de nombreuses contraintes réglementaires et tarifaires ont pu disparaitre
ces dernières années (on parle de barrières directes) afin de laisser place à une libéralisation
45
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
apparente des flux de capitaux (Bekaert, & al., 2000) (Henry, 2000). Mais dans la réalité, il
existe encore des contraintes (on parle de barrières indirectes): risque de change, instabilité
économique et monétaire, risque pays, asymétrie d’information… (Ahearne, & al., 2001 )
(Stock, & al., 2003 ) (Gérard, & al., 2003) (Hardouvelis, & al., 2006). La segmentation des
marchés pourrait même trouver pour origine des facteurs d‘ordre institutionnel : contrôle
des capitaux, traitement fiscal, coûts de transaction… (Arouri, 2006). Il existe une forte
diversité de variables prises en compte (Bekaert, 1995).
Arouri (Arouri, 2006) a pu en lister quelques-unes afin de refléter des facteurs locaux,
globaux et de mesures synthétiques de risque (tableau 6). Pourtant, le coût supplémentaire
de ces barrières, directes et indirectes, est supporté par les investisseurs internationaux.
Lorsque ces coûts sont supérieurs aux gains attendus lors d’une diversification
internationale, les investisseurs préfèrent conserver leur épargne sous forme d’actifs
domestiques (Black, 1974) (Stulz, 1981) (Cooper, & al., 1994) (Cooper, & al., 2000) (Errunza,
& al., 1985) (Errunza, & al., 1992).
Tableau 6. Facteurs d’intégration
Degré d’ouverture commerciale.
Développement du marché boursier.
Actifs étrangers.
Actifs étrangers nets.
Volatilité des taux de change.
Inflation.
Ecart des taux d’inflation.
Taux d’intérêt court.
Variation du taux d’intérêt court.
Prime de terme.
Ecart des taux d’intérêt.
Croissance de la production industrielle.
Ecart des taux de croissance.
Déficit courant.
Chômage.
Volatilité des exportations.
Taux d’intérêt mondial.
Variation du taux d’intérêt mondial.
Croissance de la production industrielle mondiale.
Risque Pays.
Source : (Arouri, 2006)
46
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Des études ont pu mettre en avant le bien fondé d’un développement financier pour
permettre aux pays en voie de développement d’amplifier leur croissance économique
(Levine, 1997). « Le développement financier favorise le développement économique en
exerçant une action sur le commerce ou l’intensité des échanges, d’une part, et sur le volume
et la qualité de l’investissement, d’autre part. » (Guillaumont Jeanneney, & al., 2006). Le
développement financier s’est effectué en parallèle à la libéralisation financière qui devait
permettre à ces pays de financer les besoins en capitaux nécessaires à la dynamique de
rattrapage économique. L’épargne nationale en concurrence directe avec les capitaux
étrangers devait faire diminuer fortement les taux d’intérêt. L’implication des agents
économiques internationaux devait améliorer l’efficience des projets à travers l’adoption de
leurs méthodes (nécessité de transparence, sélection de normes, gestion des projets…).
Il s’agissait de permettre la régulation d’un déséquilibre entre épargne et investissement au
niveau international où la rentabilité forte des pays émergents (la dynamique de rattrapage
induit de nouveaux marchés à conquérir) attire les capitaux issus de l’épargne des pays
développés moins rémunéré (leurs marchés sont déjà saturés). Il y a eu une relative réussite,
notamment dans des pays comme la Corée du Sud et Taiwan (Shaw, 1973) (McKinnon,
1973). Puis, la libéralisation financière a entrainé des périodes de forte instabilité (Argentine
et Turquie pour les plus médiatisés). Ainsi, certains auteurs (Allegret, & al., 2003) ont pu
mettre en avant l’importance de la qualité de la régulation institutionnelle dans le degré
d’instabilité induit par la libéralisation financière : un système financier efficace doit avoir un
système légal fort pour faire respecter les contrats, un système judiciaire efficace, un
système de droit à la propriété, un système comptable ; le tout pour favoriser l’efficience du
système financier.
La libéralisation financière des pays en voie de développement marque cependant une
divergence forte avec les pays développés. Il y est question d’asymétrie et de déséquilibre
où la libre fluctuation des capitaux y entraine des périodes d’excès, à la source de bulles
spéculatives puis de fuites généralisées, rendant difficilement maitrisable toute construction
d’une croissance équilibrée (Boyer, & al., 2004). Le graphique 9 permet d’illustrer la
tendance plus récente de libéralisation des pays développés, au regard de leur compte de
capital, du marché boursier et du secteur financier. La problématique qui se pose
47
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
véritablement concerne la capacité de ces pays à libéraliser, notamment les flux de leur
compte de capital, alors que nombre d’entre eux sont sous ancrage fixe (FMI, 2009) « Par
libéralisation du compte de capital, on entend, d’une manière générale, l’assouplissement
des restrictions appliquées aux flux de capitaux franchissant la frontière d’un pays donné. Il
en résulte normalement un plus haut degré d’intégration financière à l’économie mondiale
sous forme d’entrées et de sorties de capitaux plus importantes. » (Ayhan, & al., 2004).
Graphique 9. Libéralisation des pays en voie de développement
Source : (Kaminsky, & al., 2008)
48
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
La possibilité de diversifier le risque, par l’accès à un marché financier international, permet
de le réduire. Les agents économiques ont alors eu tendance à demander plus d’actifs
risqués, faisant augmenter leur prix et diminuer leur rentabilité attendue (Errunza, & al.,
1985) (Alexander, & al., 1987) (Pépin, 2004). Au regard du besoin en capitaux des pays
émergents et de cette demande d’actifs risqués, se pose la question de la capacité de
régulation de l’instabilité financière dans ces pays qui a eu tendance à s’intensifier (Bordo, &
al., 2001) (Stone, & al., 2001) (Dehove, 2003). « L’instabilité financière signifie l’incapacité à
définir un système commun de normes de conversion stables en amont des contrats. Elle se
traduit par l’incohérence temporelle et spatiale des schémas d’anticipations, autrement dit
par leur non-transitivité et leur non-récursivité. » (Léonard, 1995).
Les agents économiques ont aujourd’hui la possibilité d’allouer librement leurs capitaux où
ceux-ci sont cotés sur des marchés financiers afin de les rendre liquides. Mais la
détermination du prix de ces actifs financiers est fonction de la confrontation de l’offre et de
la demande qui peut varier fortement au regard d’un certain nombre de variables. « Les
travaux récents sur le mimétisme et les anticipations auto-réalisatrices montrent comment
l’instabilité financière peut ainsi parfaitement se développer de manière quasi autonome et
récurrente, c'est-à-dire sans pour autant qu’elle puisse être justifiée par une instabilité
première des fondamentaux. » (Léonard, 1995).
Il est difficile de qualifier l’instabilité financière comme néfaste à l’activité économique et
financière d’un pays. Elle apparait d’un côté comme un élément essentiel à la régulation du
système financier international afin de l’adapter aux contraintes macroéconomiques et
macro-financières de son époque. Dadas (Dadas, 1993) en décrit sa récente évolution à
travers trois étapes : d’une régulation d’abord par l’inflation (1973-1982), il s’en est suivi une
régulation par les primes de risque (1980-1984) puis par les taux de change, d’intérêt et de la
valeur des actifs (depuis 1983-1985). Mais l’instabilité financière reste source de perte de
richesse lorsqu’elle conduit à des phénomènes de crises (Boyer, & al., 2004) (FMI, 1998).
Le tableau 7 illustre les pertes cumulées de PIB au regard de la nature des crises (de change,
bancaire et jumelle). Il y apparait que les crises jumelles sont les plus graves avec une
moyenne de 18.6% de pertes cumulées de PIB entre 1973 et 1997.
49
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Tableau 7. Évolution en longue période de la durée et de la profondeur des crises
Source : (Boyer, & al., 2004) dans (Bordo, & al., 2001)
Le tableau 8 liste, en fonction des différentes étapes de déréglementation nécessaires à la
libéralisation du secteur financier, les aspects positifs souhaités mais aussi les conséquences
indésirables à l’origine de l’instabilité du secteur.
Tableau 8. Les effets de la déréglementation financière
Source : (Boyer, & al., 2004)
50
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Il y apparait que la déréglementation financière est à l’origine d’une augmentation des flux
financiers qu’il devient difficile de maîtriser (Artus, 1991). « Les mécanismes d’intégrationdéréglementation conjugués à la volatilité des taux ne font qu’exacerber l’instabilité
financière et la font apparaitre comme inhérente au système financier international. »
(Dadas, 1993).
Le développement financier aborde une caractéristique forte au regard de notre
problématique. Il semblerait qu’il se soit réalisé avec une augmentation de l’instabilité, et
plus particulièrement dans les pays en voie de développement, que ce soit en Afrique
Subsaharienne, en Afrique du Nord, en Amérique Centrale et Latine ainsi qu’en Asie
(graphique 10). L’essor du secteur financier y est mesuré suivant la croissance du ratio de la
masse monétaire ou des crédits bancaires au PIB de l’économie (Guillaumont Jeanneney, &
al., 2006).
Graphique 10. Evolution du ratio crédit/PIB et de son instabilité par période et par
continent (1966-2000)
51
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
52
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Périodes 1 (1966-1970) Période 2 (1971-1975) Période 3 (1976-1980) Période 4 (1981-1985)
Période 5 (1986-1990) Période 6 (1991-1995) Période 7 (1996-2000). Les données sont en
moyennes simple ; pour chaque pays, l’instabilité du ratio crédit/PIB est la moyenne par
période de la valeur absolue du résidu issu de l’estimation de l’équation suivante : Xt=a+b*Xt1+c*t+€ où Xt représente le ratio crédit/PIB et représente la tendance.
Source : (Guillaumont Jeanneney, & al., 2006)
Ces illustrations (graphique 10) mettent clairement en évidence des trends haussiers du
développement financier en parallèle de l’instabilité financière avec une augmentation de la
tendance au cours des dernières périodes (1991-1995 et 1996-2000). Ce qui apparaît
frappant, c’est la généralité du phénomène où aucun territoire n’est épargné. L’amplification
des interactions financières dans un contexte de libéralisation des flux de capitaux peut être
à la base de ce processus. La possibilité d’allouer librement les capitaux afin de les rendre
liquides semble les rendre difficilement maîtrisables. Il convient d’en comprendre les
raisons.
53
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
2. La place prépondérante des effets de contagion dans l’environnement financier
La globalisation et l’intégration des marchés financiers a induit un contexte
d’interdépendance entre économies où l’instabilité va amplifier les phénomènes de
contagion. « Les instabilités peuvent avoir soit une origine technique, soit une origine d’ordre
conflictuel ou toute autre origine. Mais quel que soit leur origine, ces instabilités se
répandent rapidement à tous les secteurs et imprègnent toutes les parties d’une société. »
(Dadas, 1993). Cette libéralisation a aussi offert l’opportunité de maximiser ses profits à
travers un endettement moins coûteux dans un territoire pour effectuer ensuite des
investissements dans un territoire plus rémunérateur. « De manière générale, la
libéralisation financière accomplie dans le contexte de la désinflation a considérablement
élevé les rendements de l’épargne. (…) Sur le plan financier, cette pression les a conduits à
recourir systématiquement à l’endettement pour élever les rendements de leurs fonds
propres grâce à l’effet de levier. » (Aglietta, 2000)
Deux aspects spécifiques à la période récente de l’instabilité financière peuvent ici être mis
en avant afin d’expliquer l’occurrence de crises financières. L’amplification des effets de
contagion a induit une augmentation des vulnérabilités qui, à travers une structure de
l’endettement international instable, ont pu impacter des pays sans pour autant témoigner
d’une dégradation de leurs fondamentaux. « …la libéralisation des mouvements de capitaux
s’est le plus souvent traduite par une forte augmentation des engagements liquides,
notamment de l’endettement à court terme en devises par l’entremise des banques, ce qui a
considérablement accentué la vulnérabilité des économies concernées à un changement dans
l’état de confiance, à un choc dans l’évaluation des risques de la part des investisseurs
internationaux » (Cartapanis, 2001).
Il n’existe pas de définition communément admise de la contagion dans le contexte de
tensions financières. On peut admettre qu’il s’agit d’une augmentation de la probabilité de
l’occurrence d’une crise. « Dans son acception la plus large, le terme de « contagion »
désigne le fait qu’une crise ou une attaque spéculative sur un marché accroît
significativement la probabilité de tensions sur d’autres marchés, pouvant ainsi conduire à
une succession de crises sur des marchés distincts. » (Cailleteau, & al., 1999). Même si une
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Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
partie de la littérature récente définie comme seule contagion la « shift contation » ou
« contagion pure » (Forbes et Rigobon, 2000), il peut être intéressant au moins de présenter
les deux approches toujours utilisées aujourd’hui.
La première définition (les effets de contagion non contingents aux crises) suppose qu’il y a
contagion dès qu’il y a influence mutuelle et que les voies de la contagion sont celles de
l’interdépendance (Masson, 1998). On y distingue trois formes de contagion : la contagion
issue d’une même série de causes communes (on parle de contagion « monsoonal »), la
contagion issue de relations déjà existantes entre deux économies (on parle de contagion
« spill-over ») et la contagion d’ordre subjectif (on parle de contagion « pure »). Il s’agit
plutôt d’une situation où le sentiment et les anticipations des agents économiques seront
prépondérants. Les deux premières formes de contagion (« monsoonal » et « spill-over »)
sont qualifiées de « fundamentals-based contagion » (Calvo, & al., 1996).
La deuxième définition (les effets de contagion contingents aux crises) n’accepte l’idée de
contagion seulement si elle est associée à une augmentation exceptionnelle et transitoire de
l’intensité des interdépendances économiques pendant la crise (King, & al., 1990). On parle
de « shift contagion » pour la définir (Forbes, & al., 2000).
La littérature identifie six canaux potentiels de contagion (tableau 9) (Eichengreen, & al.,
1996) (Kaminsky, & al., 2000) (Forbes, & al., 2001) (Dornbusch, & al., 2000) (Dehove, 2003)
(Dehove, 2004).
Tableau 9. Enumération des différents canaux de contagion
Les différents effets de contagion :
Canal des échanges commerciaux et des prix intérieurs (via la demande).
Canal des taux d’intérêt dans un système de change fixe asymétrique.
Canal de la liquidité dans un système interconnecté.
Canal des interdépendances d’interprétation des informations et de la
concurrence des fonds d’investissement.
Canal des arbitrages entre les marchés nationaux et les risques pays.
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Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Le premier canal joue via la demande du commerce international à travers la rigidité des prix
nominaux internes (Gerlach, & al., 1995). On peut supposer que la dévaluation du taux de
change entraîne la diminution des prix à l’importation de son partenaire. Il s’en suit une
diminution de la demande de monnaie domestique et une augmentation de la demande de
devise du pays partenaire qui se voit alors confronté à une fuite de ses réserves de change
pouvant conduire à des tensions. Il faut néanmoins insister sur le degré d’élasticité de la
balance commerciale de ces pays pour envisager une telle dynamique. Il n’est pas certain
que la diminution du prix à l’importation pour le partenaire se traduise automatiquement
par une augmentation des importations commerciales. Cette approche a pu être testée avec
de nombreux pays (Kaminsky, & al., 2000).
Le deuxième canal joue via les taux d’intérêt dans un système de change fixe asymétrique.
C'est-à-dire dans une économie « centre » où la monnaie du centre est la devise de
référence et d’ancrage des partenaires à sa périphérie. Des tensions sur le pays « centre »
peuvent le conduire à faire varier son taux d’intérêt, impactant alors l’ancrage des pays
périphériques (Drazen, 1999). Ce canal sera réutilisé dans le cadre de l’analyse des PECO où
ceux-ci ont ancré leur monnaie (officiellement ou non) à l’euro.
Le troisième canal joue via une interconnexion des systèmes bancaires nationaux confrontés
au risque de liquidité (Goldfajn, & al., 1996). Un système bancaire peut être en situation
d’illiquidité induit par des difficultés internes à son territoire (incapacité à se refinancer,
augmentation des défaillances, pertes induites par un endettement en devises étrangères…).
Mais au regard de la configuration des institutions financières qui s’endettent et se prêtent
entre elles sur les marchés financiers internationaux, la défaillance d’une structure se
répercute aussi sur ses partenaires étrangers, contaminant alors les autres systèmes
bancaires.
Le quatrième canal joue via l’interdépendance des informations du marché international et
du comportement des fonds d’investissement où l’information va circuler d’un marché à un
autre, à l’origine de comportements mimétiques (Schiller, 1999) voire d’effets de
résonnance (Masson, 1998). L’explication a pu être donnée quant aux raisons de ce
comportement. La globalisation et l’intégration du marché financier international ont
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Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
impliqué une uniformatisation des méthodes de gestion de portefeuilles (Aglietta, 2001). Les
effets induits vont porter par exemple sur la concurrence entre les fonds d’investissements
dont l’attractivité dépend principalement de leur rentabilité. A partir du moment où des
tensions commencent à se matérialiser (effets spéculatifs par exemple), les fonds ne vont
pas se retirer tant que le marché n’a pas répercuté ces tensions, et ce au risque d’obtenir un
rendement moins élevé que ceux de leurs concurrents (Caplin, & al., 1995).
Le cinquième et dernier canal joue via les arbitrages des investisseurs sur les marchés
financiers en fonction de leurs estimations du risque-pays (Kodres, & al., 1999). La stratégie
adoptée en termes de diversification des placements repose souvent sur la détermination de
groupes de pays possédant de fortes similitudes (économiques, financières, structurelles…)
laissant à croire qu’ils seront impactés indifféremment lors d’un choc. Cependant, la
défaillance d’un pays va induire le rapatriement des capitaux alors investis dans l’ensemble
des pays de ce même groupe.
L’ensemble de ces contributions peut être regroupé dans un tableau afin d’en clarifier les
éléments (tableau 10).
Tableau 10. Présentation de toutes les formes de contagion
La contagion par les fondamentaux (choc commun ou choc idiosyncrasie)
Source : (Dehove, 2003) issu de (Dornbusch, & al., 2000)
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Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
La contagion par les changements institutionnels
Source : (Dehove, 2003) issu de (Dornbusch, & al., 2000)
Comportement des investisseurs
Source : (Dehove, 2003) issu de (Dornbusch, & al., 2000)
La description des effets de contagion ne doit pas pour autant occulter la remise en cause du
postulat qui leur est attribué. Ces effets de contagion prennent pour explication une
vulnérabilité apparente justifiant la déstabilisation d’une économie. « Si la contagion
financière aide à expliquer la fréquence accrue des crises, celles-ci ne frappent pas au hasard
pour autant. Elles sanctionnent plutôt les faiblesses des données économiques
fondamentales, et notamment la fragilité de la position extérieure et les carences du système
financier, y compris lorsqu’elles découlent de l’accumulation excessive d’engagements
extérieurs à court terme. » (FMI, 1999).
Une liste de variables (tableau 11), sans vocation à être objective, est présentée afin de
décrire les vulnérabilités potentielles pouvant justifier et amplifier un effet de contagion. Il y
est question d’indicateurs cohérents d’interdépendances économiques (ratio déficit des
transactions courantes/PIB, croissance du PIB, taux de chômage, croissance implicite des
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Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
marchés d’exportation après la crise), d’interdépendances financières (ratio dette extérieure
à court terme/dette extérieure totale, ratio dette extérieure à court terme/réserves et
créancier communs) mais aussi et surtout de la capacité à réguler les tensions propres au
territoire (taux d’intérêt réel et croissance du crédit intérieur réel) et celles en confrontation
avec les reste du monde (appréciation du taux de change effectif réel, ratio M2/réserves,
appréciation implicite du taux de change réel après la crise).
Tableau 11. Caractéristiques des pays vulnérables aux contagions
Appréciation du taux de change effectif réel.
Ratio déficit des transactions courantes/PIB.
Ratio dette extérieure à court terme/dette extérieure total.
Ratio dette extérieure à court terme/réserves.
Ratio M2/réserves.
Taux d’intérêt réel.
Croissance du PIB.
Taux de chômage.
Croissance du crédit intérieur réel.
Appréciation implicite du taux de change réel après la crise.
Croissance implicite des marchés d’exportation après la crise.
Créancier communs.
Source : (FMI, 1999).
Il apparait évident que les effets de contagion sont un sujet délicat puisqu’ils posent la
question de la régulation au niveau supranational. De nombreuses études ont travaillé sur
les relations de dépendances internationales, notamment vis-à-vis de l’impact des prêts
bancaires au sein des pays émergents (Jeanneau & Micu, 2002). Mais s’il peut s’avérer que
des pays avec de bons fondamentaux peuvent entrer en crise sans témoigner de
vulnérabilités, la libéralisation financière internationale induit alors d’avoir en parallèle une
régulation internationale. « Si en effet des économies sont renversées par des crises
financières dont les causes leur sont totalement extérieures (…). Elle constitue donc un volet
important de la réflexion sur l’architecture financière internationale et sur la supervision des
marchés, au cœur de la question de la volatilité des marchés de capitaux internationaux. »
(Dehove, 2003).
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Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
3. Des stratégies d’ancrage du taux de change par nature source de vulnérabilité
Lorsque l’on parle de crise de change, en réalité, il s’agit d’une crise de la balance des
paiements. Ce sont les échanges entre un pays et le reste du monde qui sont à l’origine des
tensions, soit par les variations du taux de change, soit par les variations de réserves de
devises. La sélection de ces deux variables se justifie par la diversité des ancrages (fixe, semifixe et flottant). En changes fixes, ce sont les réserves qui vont fortement varier. En changes
flexibles, il y a variation de la parité de la monnaie et les réserves restent stables. Pour les
pays étant dans des régimes de flottement administré, la crise de change se matérialise par
la variation conjointe de ces deux indicateurs. Ainsi, la détermination des causes d’une crise
de change se fait en expliquant les raisons de la variation de ces deux indicateurs (Duchêne,
& al., 2006). La littérature propose de nombreuses interprétations à travers le dépassement
de seuils fixés à l’avance.
Afin de matérialiser la détermination des crises de change, des formulations ont été
proposées. Les premières se cantonnent seulement à la variation du taux de change sans
prendre en compte celles des réserves. L’idée est de supposer que l’intervention du
gouvernement à travers ses réserves de devises, ne permettant pas à l’attaque spéculative
de se réaliser, ne peut être considérée comme une crise puisqu’elle a pu être évitée (Frankel,
& al., 1996). La quantification d’une crise peut se caractériser par le constat d’une
dépréciation annuelle excédant plus de 25% du taux de change nominal vis-à-vis de la
monnaie internationale de référence (le dollar en l’occurrence) sous condition qu’il n’y ait
pas eu de crise les deux années précédentes ou bien la dépréciation dépasse au moins 10%
la variation du taux de change de l’année précédente (Frankel, & al., 1996). Le second seuil
de 10% par rapport à l’année précédente peut être mis en place pour pallier l’instabilité
possible du taux de change d’une économie en difficulté induite par des taux d’inflation
importants.
Une seconde approche consiste à repérer une dépréciation du taux de change de 25%, avec
au moins le doublement du taux de dépréciation par rapport à l’année suivante avec un taux
de dépréciation de l’année précédente inférieure à 40%. L’objectif est là encore de ne pas
comptabiliser les fluctuations induites dans les périodes de forte inflation (Milesi-Ferretti, &
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Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
al., 1998). Il peut aussi s’agir d’un taux de dépréciation d’au moins 15%, d’une augmentation
du taux de dépréciation d’au moins 10% par rapport à l’année précédente avec un taux de
dépréciation de l’année précédente inférieure à 10% (Milesi-Ferretti, & al., 1998). De même,
on pourra repérer un taux de dépréciation d’au moins 15%, une augmentation du taux de
dépréciation d’au moins 10% par rapport à l’année précédente et un taux de dépréciation de
l’année précédente inférieure à 10% avec un taux de change « péggé » l’année avant la crise
(Milesi-Ferretti, & al., 1998).
Tableau 12. Fréquence des crises de change d’après des méthodologies différentes
CRISE1 : Dépréciation de 25%, au moins 10% plus haut que l’année précédente.
CRISE2 : Dépréciation de 25%, au moins 10% plus haut que l’année précédente, avec cette
dernière inférieure à 40%.
CRISE3 : Dépréciation de 15%, au moins 10% plus haut que l’année précédente, avec cette
dernière inférieur à 10%.
CRISE4 : Même que CRISE3 au moins 10% plus haut que l’année précédente.
Fenêtre : Exclusion des crises se produisant même période de 3 ans d’une autre crise.
Issue des travaux de Milesi-Ferretti et Razin (1998)
Source : (Dehove, 2003)
61
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Le tableau 12 permet d’illustrer la fréquence des crises de change au regard de l’indicateur
sélectionné (Dehove, 2003). On peut voir que les résultats sont fortement divergents à partir
du moment où l’on adopte une méthodologie plutôt qu’une autre. La fréquence pouvant
aller de 168 (crise 2 sans fenêtre) à 119 (crise 4 avec fenêtre) sur le total des crises de
change. Cette divergence est la même que les distributions soient géographiques ou
temporelles.
D’autres méthodes complémentaires ont été testées afin d’y déterminer l’ensemble des
tensions. A partir de la construction d’un indice composite de pression spéculative, plusieurs
variables y seront associées. Une crise de change avec un ancrage flexible se matérialise par
une fluctuation de son taux. Alors qu’une attaque spéculative sur un taux de change fixe se
concrétise par une fluctuation des réserves de devises mais aussi par l’appréciation du taux
d’intérêt manipulé par les autorités publiques afin de rendre de nouveau attractif le
territoire. L’indice composite de pression spéculative a pour ambition de prendre en compte
toutes les attaques, qu’elles aient échouées ou non et pour tous les régimes de change (fixe,
flexible et semi-flexible). On peut prendre comme exemple la variation du taux de change et
des réserves de devises (Sachs, & al., 1996) (Berg, & al., 1999) (Wyplosz, 2001), la variation
du taux de change, des réserves de devises ainsi que la variation du taux d’intérêt
(Eichengreen, & al., 1995) (Eichengreen, & al., 1996) (Eichengreen, & al., 1996) puis la
variation du taux de change réel effectif et les réserves de devises (Cartapanis, & al., 1998)
(Cartapanis, & al., 1999).
La formulation proposée par Dehove (Dehove, 2003) est issue des travaux d’Eichengreen
(Eichengreen, & al., 1995) (Eichengreen, & al., 1996) (Eichengreen, & al., 1996).
IND : indicateur de pression spéculative
e : taux de change par rapport à un pays de référence
Di : écart de taux d’intérêt par rapport au pays de référence
D
: écart de variation du ratio réserves M1 par rapport au pays de référence
Les indices α, β et 𝛄 sont définis de façon à ce que la volatilité des trois composantes soit
égale
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Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Le principe est de déterminer des périodes de crises de celles de non crises en fonction du
dépassement de la moyenne de l’écart-type de l’ensemble des périodes avec la condition
qu’une période au minimum sépare deux crises successives. Les différentes pressions qui
peuvent se matérialiser sur le taux de change sont décrites dans le tableau 13. On peut y voir
des pressions divergentes dans le temps (1971-1999) entre pays et indifféremment qu’ils
soient développés ou en voie de développement.
Source : (Wyplosz, 2001)
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Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
L’idéal pour éviter une crise de change est de contenir sa dépréciation (en change fixe,
flexible voire semi-flexible). Il faut alors retourner la tendance issue de l’effet spéculatif. Il y a
la possibilité pour la Banque Centrale de vendre ses réserves de devises afin d’acheter sa
monnaie (mise à disposition sur le marché international de plus de devises et diminution de
la monnaie domestique). Plus celles-ci sont importantes, plus la Banque Centrale sera à
même d’intervenir et d’influencer la parité. Il y a aussi la possibilité pour le gouvernement de
contracter des dettes en devises afin de les mettre à disposition à la Banque Centrale. Les
pouvoirs publics peuvent aussi choisir d’agir sur les taux d’intérêt afin de les faire
augmenter, source d’attractivité pour les capitaux étrangers (une augmentation des taux
d’intérêt est synonyme d’augmentation de la rentabilité des placements effectués). Il s’agit
ici d’un panel d’outils de lutte de la part du gouvernement et/ou de la Banque Centrale
contre une attaque spéculative (justifiée ou non). Mais il serait souhaitable d’avoir des
éléments supplémentaires pour prédire et anticiper ce genre de tensions.
Les variables permettant de définir la vulnérabilité des taux de change s’avèrent
relativement nombreuses. Les travaux de Kaminsky ont tenté de les énumérer (Kaminsky, &
al., 1998). Il en ressort 103 (tableau 14). Il s’agit alors de présenter ces variables afin
d’exposer les difficultés de prévision des crises de change. Il ne s’agit pas que de la qualité
des fondamentaux mais surtout de la « notion de zone de turbulence ». Il apparait évident
que les fondamentaux sont multiples dans la détermination d’une crise de change. Ceux-ci
ne sont ainsi plus seulement issus de déséquilibres monétaires potentiels pouvant induire
des pressions sur la balance des paiements. Il y a aussi des facteurs sociaux (taux de
chômage, volonté politique, coût d’endettement des ménages…) et microéconomiques
(situation des intermédiaires financiers, régulation prudentielle du secteur bancaire…). La
mise en parallèle des effets d’anticipation des investisseurs internationaux complique la
tâche. « De même, l'ensemble des fondamentaux recensés dans les différents modèles,
fondamentaux dont l'évolution est susceptible de modifier les anticipations des opérateurs et
de provoquer la crise, n'a cessé de s'agrandir, traduisant la difficulté à cerner les facteurs
pertinents du « risque pays » (Brana, & al., 2001).
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Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Tableau 14. Liste des indicateurs potentiels dans le cadre de crises de change
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Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Source : (Kaminsky, & al., 1998)
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Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
L’intervention des pouvoirs publics, lors de la détérioration de la balance des paiements,
n’est que l’étape finale à la tentative de palier les pressions spéculatives. Il faut s’intéresser à
l’origine du mouvement de fuite des capitaux pour tenter de définir des anticipations
viables. Mais ces caractéristiques sont véritablement un défi. La libéralisation des flux afin
d’intégrer le marché financier international apparaît peu compatible avec la volonté de
stabiliser, voire d’ancrer, un taux de change au regard de la multitude des variables tant
internes qu’externes au pays ayant potentiellement une influence sur le déclenchement
d’une fuite généralisée de capitaux. L’amplification des interdépendances entre économies,
à l’origine de la libéralisation financière, induit des effets de contagion potentiellement plus
importants, source d’augmentation des variables pouvant impacter la stabilité d’un taux de
change. Se pose la question de la viabilité d’un taux de change stabilisé dans un contexte
financier libéralisé.
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Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
4. La contrainte du change fixe dans un contexte de tensions financières internationales
Le choix de l’adoption d’un régime fixe se justifie pour de nombreux pays émergents par la
nécessité d’obtenir des capitaux étrangers afin de pallier le manque d’épargne domestique
pourtant indispensable à la dynamique de rattrapage économique. L’attractivité de ces
territoires est souvent conditionnée par la stabilisation du risque de dépréciation monétaire.
Ce choix est d’autant plus problématique que la valeur alors définie pour la monnaie ne peut
être indéfiniment optimum par rapport à la situation économique du pays. Les évolutions
tant internes qu’externes à ce territoire impliquent automatiquement une nécessité de
réajustement de cette valeur d’ancrage (Obstfeld, & al., 1995). Comment devient-il possible
de le réaliser sans pour autant être à la source d’effets de spéculation dans un contexte de
libéralisation financière internationale ? Des solutions existent à priori : « (…) d’une part, les
crawling pegs, système où les parités sont maintenues autour d’un taux de référence, qui luimême est dévalué régulièrement à un taux annoncé à l’avance (…). D’autre part, il faut aussi
inclure les taux de change fixes de facto annoncés comme des changes flottants. » (Coudert,
2004).
L’assurance d’un ancrage fixe à court terme apparait comme une bombe à retardement à
moyen terme. Le FMI étant même allé jusqu’à le déconseiller pour privilégier des changes
flottants avec cible d’inflation (Coudert, 2004). La libéralisation des flux de capitaux a induit
la possibilité de les attirer mais aussi de les repousser rapidement. « (…) lorsqu’un abandon
de la parité devient imminent, les détenteurs de monnaie nationale l’échangent contre de la
monnaie étrangère pour contraindre les autorités monétaires à passer à un régime de taux
de change flexibles. » (Artus, 1986). Des modélisations ont pu être mises en avant dans la
littérature afin de témoigner du danger des taux de change fixes qui peuvent renforcer la
pression spéculative (Chang, & al., 1998). Ce n’est pas un hasard si les trois générations de
modélisation de crises de change se font dans le cadre d’ancrage fixe. Pourtant, une grande
majorité de pays, qu’ils soient en voie de développement ou développés, choisit toujours les
régimes fixes ou administrés. Le tableau 15 met en avant une évolution récente (avril 2008,
avril 2009 et avril 2010) mais qui témoigne malgré tout d’une augmentation des taux de
change par ancrage qualifiée de fixe (13.2% de « Hard Pegs » et 50.8 de « Soft Pegs »).
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Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Tableau 15. Énumération des taux de change par régime
Source : FMI (pourcentage des membres du FMI)
Cette classification a pu être faite auprès du FMI où chaque pays informait de la nature de
son ancrage jusqu’en 1999 où cette liste est définie comme des régimes dits « de jure ». De
nombreux écarts existaient entre les déclarations des pays et la réalité sur les mouvements
de taux de change. Des pays annonçaient des taux de change flottant alors qu’en réalité les
pouvoirs publics intervenaient régulièrement pour encadrer leur monnaie dans une zone de
valeur (Calvo, & al., 2002). Cette situation témoigne de la volonté des gouvernements de
tenter de se protéger contre les spéculateurs. Il y a une véritable peur du flottement. Le FMI
réalise donc des corrections suite aux déclarations au regard d’analyses statistiques
supplémentaires (Calvo, & al., 2002), (Levy-Yeyati, & al., 2000), (Levy-Yeyati, & al., 2003)
(Bénassy-Quéré, & al., 2002), (Reinhart, & al., 2002). Le détail de la nature de ces ancrages
(tableau 16) met en avant la prédominance du dollar US (50 pays sous ancrage), de l’euro
(28 pays sous ancrage) et du composite (15 pays).
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Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Tableau 16. Devises internationales de référence dans la nature des régimes de change
Source : FMI
La capacité de régulation d’un choc externe n’est pourtant pas la même lorsque l’on se
trouve en régime flottant ou fixe, du moins théoriquement (Coudert, 2004). Lors d’un choc
nominal, à travers des tensions sur l’offre de monnaie par exemple, l’ancrage fixe impose
une discipline qui va permettre de détourner les pressions alors que le taux de change
flexible va le transmettre. Lors d’un choc réel, par une perte de productivité ou la baisse des
termes de l’échange, l’absence de flexibilité dans le cas d’un change fixe n’offre aucune
possibilité de regagner en compétitivité-prix si nécessaire. Cette impossibilité d’ajuster au
70
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
regard des chocs réels externes devient problématique quand on peut voir la forte volatilité
des matières premières, les politiques monétaires des autres pays, les crises devenant
internationales, la dépendance à ses concurrents… (Calvo, & al., 2003).
Dans la pratique, il y a peu d’études qui ont pu mettre en avant une relation théorique avec
des faits empiriques significatifs dans ce domaine (Coudert, 2004), mis à part quelques
exceptions où l’analyse y est restreinte à un choc sur les termes de l’échange dans un
contexte de change flexible (Edwards, & al., 2003). Un ancrage fixe impose une discipline
monétaire à l’origine de la diminution empirique de l’inflation. Mais la masse monétaire
dans un pays émergent, avec ancrage ou non, est globalement la même. Il s’agit alors d’une
discipline monétaire qui joue plutôt un rôle favorable sur les anticipations des agents
économiques au moins dans les pays émergents : l’ancrage apparait comme source de
crédibilité (Rogoff, & al., 2003) (Ghosh, & al., 1997), (Levy-Yeyati, & al., 2001), (Rogoff, & al.,
2003).
Ainsi, de nombreuses études mettent en avant que les changes flottants seraient des
facteurs d’amplification des phénomènes de crise, puisque ne parvenant pas à amortir les
chocs réels (Hausmann, & al., 1999), (Dornbusch, 2001), (Calvo, & al., 2000) (Calvo, & al.,
2002). Cette situation s’explique par « le péché originel », [terme employé par (Eichengreen,
& al., 1999)] des pays en voie de développement, c'est-à-dire une dépendance importante
aux capitaux étrangers, [termes repris dans les travaux de (Ennajar, & al., 2005)]. Il s’agit
pour ces pays de l’impossibilité d’emprunter dans leur monnaie, qui apparait trop risquée
pour les investisseurs internationaux, même s’ils mettent en place une rigueur monétaire
forte. Ceux-ci doivent alors réguler au mieux leur stock de devises pour y remédier. Il y a
aussi une intolérance à des niveaux de dettes jugés excessifs pour les pays émergents alors
que ces mêmes niveaux sont tolérés dans les pays développés (Reinhart, & al., 2003). Pour
toutes ces raisons, les pays émergents ne peuvent laisser leur taux de change flotter (Calvo,
& al., 2000) (Calvo, & al., 2002).
La globalisation des marchés financiers doit permettre, à travers la fluctuation du prix des
actifs, d’allouer au mieux, facilement et rapidement le capital aux secteurs les plus
dynamiques. La quasi-obligation, pour les pays en voie de développement, d’ancrer leur
71
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
régime de change afin d’attirer des capitaux étrangers nécessaires à l’amorçage de leur
processus de rattrapage économique, apparait ici contradictoire mais surtout amplificatrice
des risques d’occurrence de crises de change. A la moindre tension constatée ou anticipée,
les agents économiques peuvent choisir de rapatrier leurs capitaux. Toute la difficulté est de
déterminer la source qui a pu engendrer ces tensions. De nombreux fondamentaux ont pu
rendre compte de l’influence qu’ils pouvaient exercer sur l’occurrence de ce phénomène
(indicateurs macroéconomiques, macro-financiers, sociaux, politiques économiques,
microéconomiques et micro-financiers…). La libéralisation financière, à l’origine de
l’augmentation des interdépendances et donc des effets de contagion lors de tensions, ne
fait qu’élargir les variables explicatives potentielles.
72
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
5. Synthèse des différentes modélisations de crises de change
La libéralisation des flux économiques et financiers induit des tensions sur les taux de change
qu’il est d’autant plus difficile de prévoir qu’elles résultent des jeux d’anticipations des
agents économiques internationaux. Ces tensions sont d’autant plus problématiques que les
pays émergents sont dans l’obligation d’ancrer leur monnaie à des devises de référence.
Même s’il est possible de comprendre la dynamique de crise en le déterminant, les
explications quant à son occurrence sont singulièrement plus délicates. Des modélisations
sont alors venues à la suite de crises pour les expliquer. Cependant, elles ne sont que des
interprétations qui apparaissent dépassées dès que de nouveaux faits à l’origine de
nouvelles crises apparaissent. Au regard de ces éléments, il est coutume de dire que la
théorie est souvent en retard d’une crise (Cartapanis, 2002). La problématique a pour
ambition de mettre en avant de nouveaux faits, à savoir la non dégradation des
fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers propres au pays, dans le cadre de
l’occurrence d’une crise de change. Il convient donc de décrire chaque génération de
modélisation pour ensuite les utiliser afin de les contextualiser au regard de notre postulat
de départ.
Les premiers travaux qui utilisent des mécanismes d’ajustement assimilables aux tensions
dépendantes de l’ancrage d’un taux de change font référence aux modèles de stabilisation
des prix des marchandises à travers l’intervention de politiques publiques (Salant, & al.,
1978) (Salant, 1983). L’idée qui y est défendue repose sur des politiques de stabilisation des
prix sujets à des attaques spéculatives dévastatrices. Les spéculateurs cherchent à acquérir
des ressources épuisables si et seulement si ils anticipent une hausse des prix suffisamment
rapide pour obtenir un taux de profit élevé. Lorsque le prix d’équilibre qui aurait prévalu
sans intervention publique, « le shadow price » (Salant, & al., 1978), passe au-dessus de la
cible du gouvernement, alors les spéculateurs vont acheter les marchandises d’autant plus
que le gouvernement tente de stabiliser les prix. Les stocks du gouvernement vont alors
diminuer. Les spéculateurs achètent les marchandises du gouvernement au prix qu’il a fixé
en supposant qu’il ne peut pas l’assurer éternellement. Lorsqu’il va arrêter, les prix des
marchandises vont alors augmenter, source de gains pour les spéculateurs.
73
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Tant que les prix sont au-dessus du niveau défini de l’intervention du gouvernement, les
spéculateurs vendront ce qu’ils ont comme marchandises. Ils anticiperont qu’ils ne pourront
pas réaliser de gains. Le gouvernement se retrouve seul à acquérir un large stock de
marchandises pour ne pas voir les prix diminuer. Cela ne veut pas dire que toutes les
politiques de stabilisation des prix seront des échecs. Il faut simplement que les prix fixés se
rapprochent plus ou moins du prix d’équilibre, « le shadow price » (Salant, & al., 1978), sans
intervention du gouvernement sur le marché. Ou éventuellement que le gouvernement
puisse avoir des moyens importants pour intervenir et maintenir le prix fixé soit à travers des
réserves en fortes quantités soit en ayant la possibilité de réglementer la spéculation sur le
prix des marchandises.
La dynamique de la régulation des prix sur un marché est possible lorsqu’on est dans un
marché libéralisé où il est permis aux spéculateurs d’acheter et de vendre sans contraintes.
Cependant, dans un contexte de libéralisation des capitaux avec un ancrage fixe du taux de
change pour de nombreux pays en voie de développement, les pressions potentielles des
spéculateurs ne peuvent que se renforcer. Ces deux caractéristiques apparaissent même
contradictoires. Ainsi, le gouvernement a pour objectif de fixer le prix de sa monnaie. Sa
capacité d’intervention sera fonction des réserves qu’il possède. Lorsque le gouvernement
n’a plus les moyens d’intervenir, l’ancrage casse et la crise se réalise (dépréciation du prix de
la monnaie domestique impactant l’ensemble du pays).
Les modélisations dites de première génération (Krugman, 1979) (Flood, & al., 1984)
mettent en avant, à travers des faits empiriques (crises de change dans les pays d’Amérique
Latine des années 1970-1980), l’occurrence de tensions financières (graphique 11). Les
réserves de devises diminuent d’abord lentement, induit par une dégradation des
fondamentaux monétaires, pour ensuite disparaitre totalement et rapidement lors de la
fuite généralisée des capitaux qui va précipiter l’ancrage. « La crise est indissociable de
l’apparition de déséquilibres persistants, sur le marché de la monnaie ou sur le plan
budgétaire, qui entrent en conflit avec la contrainte d’un stock limité de réserves de
change. » (Cartapanis, 2004). La perte de confiance, avant l’épuisement total des réserves,
est à l’origine d’une attaque spéculative soudaine qui va réduire à néant la totalité des
réserves alors restantes.
74
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
L’incompatibilité entre équilibre interne (dynamiser la croissance économique) et équilibre
externe (ancrage du taux de change) met en avant des variables dites fondamentales dans la
détection précoce de l’occurrence d’une crise : le niveau des réserves de change, le crédit
intérieur et l’inflation anticipée (Krugman, 1979). Le niveau des réserves est révélateur de la
croissance des crédits et de l’inflation anticipée permettant de définir la capacité du pays à
sauvegarder son ancrage. Les déficits publics (Krugman, 1979) et les crédits accordés au
secteur privé (Pesenti, & al., 2000) sont sources d’une création monétaire pouvant être trop
importante et à l’origine de l’anticipation d’une forte inflation.
Graphique 11. Variation des réserves de change en Amérique Latine
Source : (Latinier, 2006)
Flood et Garber (Flood, & al., 1984) vont mettre en parallèle la situation d’avant crise de
celle d’après crise en y introduisant un prix d’équilibre du taux de change, le « shadow
price » (Salant, 1983) : celui qui aurait prévalu si le gouvernement n’était pas intervenu. La
dynamique de spéculation sur le change est la même que celle sur le prix des marchandises
(Salant, & al., 1978) (Salant, 1983). Les agents économiques vont spéculer lorsqu’ils
anticiperont une source de gains ayant pour origine la différence entre le prix du taux de
change fixé par le gouvernement et le « shadow price », le prix d’équilibre.
75
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Même si le « shadow price » est difficile à définir, il est possible de réaliser des prévisions à
travers la détermination d’un taux de change dit réel d’équilibre (Williamson, 1991)
(Williamson, 1994) (Wren-Lewis, & al., 1998) (Williamson, 2000) (Drime, & al., 2005) (Carton,
& al., 2005) (Carton, & al., 2006). Mais la détermination du timing devient problématique.
Comment définir la période d’occurrence de la crise ? Les crises de change de première
génération sont fonction de la dégradation des fondamentaux du pays (réserves de devises,
croissance des crédits internes et inflation anticipée) (Krugman, 1979) mais aussi des
anticipations des spéculateurs qui précipitent la crise ou non (on parle de comportements
spéculatifs arbitraires) (Flood, & al., 1984). « L’abandon de la parité, ou la modification des
taux pivots si l’on maintient une zone cible, est donc provoqué par l’attaque spéculative, mais
serait intervenu, tôt ou tard, même en son absence. » (Cartapanis, 2004). Ici, les spéculateurs
sont supposés avoir un comportement rationnel puisqu’ils vont précipiter une crise qui était
inévitable.
L’occurrence de nouvelles crises, notamment du SME en 1992-1993, va conduire à mettre en
avant d’autres éléments dans la matérialisation de tensions sur le taux de change. Ces crises
ont pu d’abord être interprétées comme des crises de première génération (Krugman, 1994)
(Krugman, 1996) mais elles furent finalement qualifiées de crises de seconde génération
(Obstfeld, 1994). Même si la dynamique reste la même, la fuite des capitaux à l’origine des
pressions sur le taux de change dont les réserves de devises ne pourront pas suffire à assurer
l’ancrage fixe, les variables qui vont influencer l’interprétation des agents économiques vont
être différentes.
L’article de Diamond et Dybvig (Diamond, & al., 1983) est l’un des premiers à introduire la
notion de crise auto-réalisatrice mais vis-à-vis de crises financières apparaissant sous trois
conditions : la dette de court terme excède les actifs de court terme, il n’existe pas de
prêteur suffisamment important sur le marché privé pour couvrir l’ensemble de la dette de
court terme existante et il n’y a pas de prêteur en dernier ressort. Sous toutes ces
conditions, il apparait logique que les créanciers retirent leurs crédits si les autres font la
même chose. Deux équilibres peuvent se matérialiser : soit les agents économiques ont
confiance vis-à-vis des intermédiaires financiers, ce qui conduit à la pérennité du système
bancaire. Soit ce n’est pas le cas et la défiance des intermédiaires financiers va induire un
76
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
« run » bancaire. Si on transpose cette approche aux crises de change, la dynamique peut en
être la même. Obstfeld (Obstfeld, 1986) va mettre en avant qu’il ne s’agit pas d’un
comportement irrationnel des spéculateurs mais d’un équilibre indéterminé vis-à-vis de la
viabilité de l’ancrage du taux de change (le gouvernement, même s’il a les moyens
d’intervenir, va-t-il le faire réellement pour sauvegarder son ancrage ?).
Les effets d’anticipation dans la capacité ou non d’un gouvernement à défendre son ancrage
s’expliquent par les conséquences potentiellement néfastes sur l’équilibre interne. Pour faire
revenir les capitaux internationaux, nécessaires à la reconstitution des réserves de devises,
la Banque Centrale doit augmenter son taux directeur (l’augmentation du taux d’intérêt est
synonyme d’augmentation de la rentabilité au sein du pays). Mais c’est aussi une source
d’augmentation du coût de l’endettement défavorable à l’activité du pays, source de
chômage. Pour faire diminuer l’inflation interne induite par la sphère privée ou publique, la
Banque Centrale se doit aussi d’augmenter les taux directeurs afin de faire diminuer l’octroi
de crédits, ce qui est pourtant néfaste à l’activité du pays.
La défense de l’ancrage du taux de change est ainsi politiquement délicate en termes
électoraux. Même s’il est possible d’intervenir en empruntant des réserves, en augmentant
les taux d’intérêt, en réduisant le besoin de financement, voire en instaurant un contrôle des
changes, c’est l’élévation des coûts du maintien de l’ancrage qui devient déterminant. Les
nouvelles variables qui entrent en jeu vont être celles qui seront directement impactées par
les mesures de défense de l’ancrage sur l’activité économique du pays (tableau 17). Le
marché sait que les pouvoirs publics adaptent leur politique au regard des contraintes
économiques du pays (l’objectif d’un gouvernement est de dynamiser son économie sous
contrainte de sa réélection). A travers cette forte relation d’interdépendance entre le
gouvernement, la situation économique du pays et les spéculateurs, il y a alors apparition
d’équilibres multiples (la réaction de l’un des acteurs induit un changement de
comportement des autres) donnant lieu à des crises « auto-réalisatrices ». « On est donc en
présence d’une configuration d’équilibre multiples et des crises auto-réalisatrices peuvent
alors apparaitre. » (Cartapanis, 2004)
77
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Tableau 17. Liste non exhaustive d’indicateurs de vulnérabilités issus des modélisations de
seconde génération
Auteurs :
(Obstfeld, 1994).
Variables :
Taux d’intérêt élevé.
Chômage élevé.
Croissance du PIB faible.
Fragilité du système bancaire.
Appréciation réelle de la monnaie.
Dégradation du solde budgétaire.
(Ozkan, & al., 1995).
Contrôle des capitaux.
Augmentation de la maturité des contrats de dettes.
Hausse des coûts de sortie du régime de change.
Volonté des décideurs politiques d’intervenir ou pas.
(Obstfeld, 1996)
Dette publiques.
Dette des banques.
Diminution de la production.
Taux d’intérêt réels élevés.
Effets de contagion à l’ensemble de l’économie.
Augmentation du chômage.
(Cartapanis, 2004)
Taux de chômage élevé.
Stock de dette publique et dette externe.
Source : Recherche auteur
Pour de nombreux travaux (Obstfeld, 1994) (Krugman, 1994) (Ozkan, & al., 1995) (Obstfeld,
1996) (Krugman, 1996) (Cartapanis, 2004), une crise de deuxième génération garde pour
fondement de base une dégradation de la situation économique du pays (la pression des
spéculateurs sur le gouvernement ne se fait pas sans raison). Pourtant, les fondamentaux
macroéconomiques n’y apparaissent pas plus déterminants. « Si l’on intègre l’incertitude
radicale et les surrections qui marquent la détermination des prix des actifs vers lesquels sont
diversifiés les portefeuilles dans les pays émergents (actions, actifs immobiliers), les
euphories spéculatives sont nécessairement à la merci d’un renversement d’opinion et, donc,
d’une défiance généralisée que les facteurs macroéconomiques n’expliquent alors que très
partiellement. » (Cartapanis, 2004).
Une troisième et dernière génération de modélisation de crise a pu apparaitre dans le cadre
de la crise asiatique en 1997-1998 (Eichengreen, & al., 1995) (Krugman, 2001) (Pesenti, & al.,
2000). Cette nouvelle génération de modélisation n’est pas admise par tous (Flood, & al.,
78
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
1998) (Jeanne, 1999). Les interprétations quant à l’occurrence de la crise asiatique sont
encore très partagées. Il s’agit pour certains d’une dégradation des fondamentaux
macroéconomiques où la réaction politique ne fut pas optimale afin d’en réguler les
pressions en plus d’effets de contagion importants (Corsetti, & al., 1999). Alors que d’autres
y verront une crise d’illiquidité à l’origine de la fuite des capitaux (Radelet, & al., 1998). Les
imperfections d’information sur les marchés financiers couplées à la fragilité du système
bancaire expliquent l’occurrence de la crise bien plus que des vulnérabilités macroéconomiques. Le contexte fondamental est dégradé mais ce sont les déséquilibres bancaires
qui vont provoquer le basculement de l’opinion et son extension sur le marché des changes
(Cartapanis, 2002).
Graphique 12. Taux de croissance du PIB (en %) des pays asiatiques
12
Malaisie
7
Indonesie
2
-3
Thailande
-8
-13
1990
1992
1994
1996
1998
2000
2002
2004
2006
2008
2010
Corée du
Sud
Source : World Data Bank
Graphique 13. Taux de croissance consommation finale (en %) des pays asiatiques
15
Malaisie
10
Indonesie
5
0
Thailande
-5
-10
1990
1992
1994
1996
1998
2000
2002
Source : World Data Bank
79
2004
2006
2008
2010
Corée du
Sud
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Graphique 14. Taux d’inflation (en %) des pays asiatiques
30
Corée du
Sud
25
20
Malaisie
15
10
Indonésie
5
0
Thailande
-5
1990
1992
1994
1996
1998
2000
2002
2004
2006
2008
2010
Source : World Data Bank
Graphique 15. Valeur des cours boursiers (en % du PIB) des pays asiatiques
225
Corée du
Sud
175
Malaisie
125
75
Indonésie
25
Thailande
-25
1990
1992
1994
1996
1998
2000
2002
2004
2006
2008
2010
Source : World Data Bank
Graphique 16. Endettement public (en % du PIB) des pays asiatiques
80
Corée du
Sud
70
60
50
Malaisie
40
30
Indonésie
20
10
0
Thailande
1990
1992
1994
1996
1998
2000
2002
Source : World Data Bank et OCDE
80
2004
2006
2008
2010
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Si l’on procède à une mise en parallèle des deux générations de modélisation de crise
précédentes, il en ressort que la quasi-totalité des pays asiatiques étaient considérés comme
ayant des fondamentaux corrects (taux de croissance économique et consommation finale
fortes, inflation et solde budgétaire contenus, valeurs des boursiers corrects) (graphiques 12,
13, 14, 15 et 16) et les gouvernements n’étaient pas en proie à des difficultés internes
pouvant faire envisager un abandon des ancrages des taux de change (Cartapanis, & al.,
1998) (Cartapanis, & al., 1999) (Cartapanis, & al., 2002) (Cartapanis, 2002).
Les flux importants de capitaux étrangers ont augmenté de façon significative la liquidité
interne aux pays puisqu’ils ont pu servir à alimenter les crédits domestiques. Il en est ressorti
une augmentation des prêts non performants. Lors de la fuite des capitaux, le déficit courant
qui était jugé soutenable dans le cadre d’un processus de rattrapage a mis sous pression
l’ancrage du taux de change. L’endettement des banques nationales en devises étrangères,
apparaissant sans risque au regard de l’ancrage et l’augmentation des prêts de plus en plus
risqués, expliquent la défaillance du système bancaire. Celui-ci n’avait pu être supervisé de
façon optimale afin de le limiter tant dans les risques qu’il prenait en s’endettant en devises
à court terme que pour les prêts non performants qu’il a attribué. « Cette crise de liquidité
bancaire, qui se trouve à l’origine de la crise de change, s’est ensuite transformée en crise de
solvabilité bancaire dès lors que la défiance s’étendait, que la dépréciation du change
augmentait la charge réelle de la dette et que les sorties de capitaux s’accéléraient. »
(Cartapanis, 2004). Le concept de « crises jumelles » (Kaminsky, & al., 1996) peut qualifier ce
genre de crise où les tensions bancaires et l’instabilité du taux de change n’ont fait que
renforcer son ampleur.
L’objectif externe (la défense de la parité de change qui nécessite des taux d’intérêt élevés)
est entré en contradiction avec l’objectif interne (la préservation du système bancaire qui
nécessite des taux d’intérêt faibles). « La crise asiatique n’est pas une crise de change
conventionnelle et s’apparente à une crise financière profonde qui présente tous les
ingrédients d’une crise systémique enchâssée dans les structures de la finance mondiale
contemporaine. » (Cartapanis, 2004).
81
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
La crise asiatique n’étant pas similaire aux crises de première et deuxième générations, la
notion de crise intergénérationnelle a pu être émise. En combinant les différents éléments,
l’élargissement des fondamentaux s’est fait aux variables bancaires et financières
(tableau 18) en parallèle à des effets auto-réalisateurs (Flood, & al., 1998). Certains vont
alors centrer leur attention sur les conflits d’objectifs gouvernementaux durant cette crise à
travers une approche définie de « escape clause » (Jeanne, 1999). Il en ressort de forts liens
entre crises bancaires et crises de change dans la situation actuelle de libéralisation des
marchés financiers.
Tableau 18. Liste non exhaustive d’indicateurs financiers de vulnérabilités issus de
modélisations de 3ème génération
Auteurs :
(Krugman, 2001)
(Corsetti, & al., 1998).
(Chang, & al., 1998)
(Krugman, 2001)
(Mishkin, 1998)
(Mishkin, 1999)
(Mishkin, 2000)
(Stiglitz, 2000).
Variables :
Désajustements d’échéances dans les bilans bancaires.
Chocs ponctuels sur les collatéraux (bulles).
Crises d’illiquidité bancaires.
Endettement excessif.
L’aléa moral.
Les créances internationales.
La dégradation des bilans bancaires.
Dégradation des bilans des entreprises.
Les dettes extérieures à court terme sur réserves.
(Schneider, & al., 2000)
Bulles sur le prix des actifs.
Source : Recherche auteur.
La difficulté des crises de troisième génération réside dans l’incapacité pour le
gouvernement d’arrêter l’hémorragie des fuites de réserves de change. Le système bancaire,
déjà aux abois, ne pourrait supporter des taux d’intérêt plus élevés (risque de diminution de
la demande de crédits, de l’augmentation des créances douteuses à travers la baisse de la
croissance économique et de l’impossibilité de se refinancer à moindre coût pour essuyer les
pertes). De plus, une crise bancaire impose au gouvernement d’intervenir pour renflouer les
institutions financières afin de les recapitaliser au regard de l’augmentation des taux de
défaut. Cette augmentation de l’endettement public est une source de création monétaire
pouvant conduire à de l’inflation tout aussi néfaste à l’ancrage du taux de change. De plus, la
82
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Banque Centrale ne peut refinancer les banques afin de les aider avec des conditions plus
favorables. Il y a là aussi une possible augmentation de la masse monétaire, source
d’inflation future.
Les différentes modélisations qui ont pu être présentées ici ont toutes des caractéristiques
communes. Une crise de change se matérialise par la fuite généralisée de capitaux ne
permettant plus à l’ancrage d’être viable au regard du déficit apparaissant pourtant normal
de la balance courante lors d’un processus de rattrapage économique. C’est la modélisation
de première génération qui avait pu mettre en avant pour la première fois cette dynamique.
Les générations suivantes ne viendront que recontextualiser, par de nouvelles variables, des
origines différentes de la fuite généralisée des capitaux. Mais même au regard de la diversité
des modélisations, il y sera pourtant toujours question de la responsabilité du pays, à travers
ses vulnérabilités propres, dans l’occurrence ou non d’une crise de change. Des faits
empiriques nouveaux et récents confortant de plus en plus la problématique : faiblement
pour la Corée du Sud en 1997/1998, beaucoup plus pour le Brésil en 1999/2002 et
indéniablement pour les PECO en 2008. Ces exemples devront être modélisés afin d’y
intégrer de nouvelles variables reflétant ces caractéristiques, à savoir une instabilité
financière internationale forte et des effets de contagion prépondérants sans pour autant
témoigner d’une dégradation de leurs fondamentaux macroéconomiques et macrofinanciers.
83
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
6. Contextualisation de la problématique à travers des faits récents : focus sur la Corée du
Sud, le Brésil et les PECO
De récentes tensions à l’origine de mouvements de crises en Corée du Sud (1997/1998), au
Brésil (1999/2002) et plus récemment dans les pays d’Europe Centrale et Orientale (2008)
ont pu remettre partiellement en cause l’approche communément admise du paradigme
dominant sur les crises financières. L’idée ici n’est pas d’apporter une nouvelle façon de
concevoir une modélisation de crise mais plutôt de fournir des éléments supplémentaires
pour recontextualiser les modélisations de première génération qui restent toujours
pertinentes de par leur dynamique (fuite des capitaux mettant sous pression l’ancrage d’un
taux de change fixe). Ces récents faits empiriques interrogent puisqu’ils confortent de plus
en plus l’hypothèse de ce travail. La Corée du Sud a pu interpeller dans une certaine mesure
quant à la qualité de ses fondamentaux macroéconomiques et macro-financières, même si
elle détenait des variables dégradées en parallèle. Le Brésil est venu conforter ces propos
par l’ampleur des tensions financières qu’il a pu subir durant une période relativement
longue. Quant aux PECO, l’intégration à l’Union européenne en 2004 et 2007 puis celle en
cours à la zone euro ont dessiné un environnement bien plus que propice à ce genre
d’évènement.
Il s’agit plutôt d’illustrer pour donner matière à réflexion dans la description de
l’environnement de la problématique. La diversité des tensions sur les taux de change
pousse à la modestie lorsque l’on peut y proposer des alternatives. « Les années quatrevingt-dix auront vu se multiplier les crises de change, constituées de brusques variations des
taux de change, accompagnées de pertes massives de réserves en devises et se traduisant
par une forte dévaluation ou par le flottement d’une monnaie, en situation d’ancrage, ou
bien par une dépréciation violente et subite en situation de flottement impur. » (Cartapanis,
2004).
La crise coréenne est souvent décrite comme le résultat d’une mauvaise gestion de sa
libéralisation financière. « Un examen détaillé des causes de la crise asiatique, et du cas
coréen en particulier, révèle que cette économie était sous tension en raison d’une stratégie
non soutenable de croissance forte, financée par endettement, et du manque de contrôle et
84
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
de
surveillance
dans
le
secteur
financier. »
(Gongpil,
1998).
Les
indicateurs
macroéconomiques traditionnels étaient pourtant relativement bons : croissance forte, peu
de chômage, pas de déficit budgétaire public, … (Tableau 19).
Cette crise s’est ainsi inscrite en opposition des modélisations dites de première génération.
De plus, les modélisations de seconde génération n’ont pas apporté de réponses adéquates
puisque les autorités locales n’ont pas subi de perte de crédibilité, notamment dans la fixité
de l’ancrage du taux de change au dollar. Pourtant, les nouvelles variables reflétant les
caractéristiques de la problématique, à savoir une instabilité financière internationale forte
et des effets de contagion prépondérants, apparaissent déterminants dans l’occurrence de
cette crise. L’instabilité financière internationale, lors de la fuite généralisée des capitaux, a
induit des effets de contagion à travers la crise thaïlandaise à l’ensemble de l’Asie. La Corée
du Sud n’a pas su apporter les éléments nécessaires afin de répondre à cette crise. L’analyse
de la situation fait surtout ressortir des faiblesses trop importantes au sein du système
financier national, le rendant fragile dans son rôle d’absorption des chocs causés par les
mouvements de capitaux internationaux.
Tableau 19. Principaux indicateurs économiques de la Corée du Sud (en %)
1991 1992 1993
Croissance du PIB
9.1
5.1
5.8
Exportations
11.8
11
11.3
Importations
19.2
5.1
6.7
Epargne brute/PIB
35.9
34.1
35.1
Investissement brut/PIB
38.9
36.6
35.1
Compte courant/PIB
-2.8
-1.3
0.3
Taux d’inflation
9.3
6.2
4.8
Source : Banque de Corée, National Income, divers numéros.
1994
8.6
16.5
21.7
35.2
36.1
-0.1
6.3
1995
8.9
24
22
35.9
37
-1.8
4.5
1996
7.1
13
14.8
34.5
38.2
-4.8
4.9
1997
5.5
23.6
3.8
34.2
36.1
-1.9
4.4
La croissance du PIB de la Corée du Sud est restée largement soutenue avec des taux allant
de 9.1% en 1991 à 5.5% en 1997. Ses exportations ont eu tendance à augmenter pour passer
de 11.8% en 1991 à 23.6% en 1997 même si ses importations furent moins régulières (19.2%
en 1991, 5.1% en 1992, 22% en 1995 puis 3.8% en 1997). L’épargne brute ainsi que
l’investissement brut sont toujours restés constant avec des taux moyens de 35% et de 38%.
85
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Le compte courant (qui n’a jamais dépassé les -5% du PIB) ainsi que le taux d’inflation (en
moyenne de 5 à 6%) étaient largement sous contrôle.
La crise brésilienne se doit d’être définie sur une durée allant de 1999 à 2002. Durant cette
période, une multitude de tentatives de la part du gouvernement brésilien ainsi que du FMI
ont été utilisées pour sortir le pays d’une situation délicate. La seule observation des
fondamentaux du Brésil ne saurait expliquer toutes les turbulences subites. « Si l’on passe en
revue les critères habituels de « risque pays », il apparait que la contrainte d’endettement
externe, tout comme le solde courant diminué des investissements directs, ne peuvent pas
expliquer l’ampleur de la crise, même dans le cas du Brésil qui a un besoin de financement
international conséquent » (Sgard, 1998).
Une analyse plus détaillée fait ressortir que le Brésil n’a pas un ratio d’endettement plus
important qu’un autre pays en développement, voire même d’un pays développé. Le Brésil
reste un pays fortement orienté vers les exportations avec un processus de développement
dynamique malgré les nombreuses difficultés propres à tous les pays en voie de
développement. Quant aux indicateurs internes, ils restent corrects surtout au regard de la
politique de stabilisation macroéconomique imposée par les pouvoirs publics et le FMI
(tableau 20). Cet exemple de pays reflète de nouveau la problématique puisque les chocs
externes qu’il a subi (1999 : impact de la crise asiatique, 2002 : impact de la bulle internet)
l’ont profondément touché. L’instabilité financière internationale couplée à des effets de
contagion importants ont induit un cercle vicieux de crise généralisée.
Tableau 20. Principaux indicateurs économiques du Brésil (en %)
1994
5.9
Croissance du PIB
Taux d’inflation
Taux d’intérêt réel
26
Epargne domestique
21.6
Solde de la balance courante
-0.1
Dette extérieure brute
27.1
Dette nette publique
21.6
Source : (Sand-Zantman, et al., 2002)
1995
4.2
22
24.8
19.6
-2.6
22.6
25.2
1996
2.7
9.1
16.5
18.9
-3.1
23.2
29.3
86
1997
3.6
4.3
17.8
18.5
-4.7
24.9
30
1998
-0.1
2.5
24.1
16.9
-4.5
30
35.6
1999
0.7
8.4
19.8
15.5
-4.7
45.5
39
2000
4.4
5.3
10.5
17.2
-4.1
40.5
39.7
2001
1.7
9.5
9.5
-4.6
44.9
42.7
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
La croissance du PIB est peu stable où elle passe de 5.9% en 1994 à -0.1 en 1998 puis 1.7 en
2001. Mais le taux d’inflation apparait sous contrôle en fin de période puisqu’il ne dépassera
pas les 10%. Le taux d’intérêt réel y est fort (24.8% en 1995 et 24.1% en 1998 par exemple).
Il s’agit peut-être d’un signe de méfiance de la part des investisseurs étrangers, nécessitant
d’augmenter la rémunération au regard du profil risqué du Brésil. L’épargne domestique a
toujours été importante avec des taux moyens de 15 à 20%. Le solde de la balance courante
est largement acceptable avec des taux inférieurs à -5%. La dette extérieure brute et la dette
nette publique ont eu tendance à augmenter mais dans des proportions raisonnables (44.9%
de dette extérieure brute et 42.7% de dette nette publique en 2001).
La situation des PECO, fin 2008, est beaucoup plus intéressante et explicative au regard de
l’environnement de ces pays. L’impact des variables déterminantes que sont l’instabilité
financière et les effets de contagion a été ici poussé à un niveau élevé afin de s’intégrer
parfaitement à la problématique. Ces pays ont ancré leur taux de change (de façon officielle
ou non) afin d’amplifier l’attractivité du territoire mais aussi pour adopter un jour l’euro. En
parallèle, ils ont dû libéraliser leur balance des paiements, condition indispensable à une
intégration à l’Union européenne (Directive Européenne, 1988). Cette configuration, appelée
« le péché originel » (Eichengreen, & al., 1999), aurait pu apparaitre risquée pour d’autre
pays en voie de développement. Ce ne fut nullement le cas au regard de l’intégration en
cours à l’Union européenne et à la zone euro, source de stabilisation pour les investisseurs
internationaux.
Ainsi, il n’est question ici que des nations ayant intégré l’Union européenne en 2004 et 2007,
à savoir la Bulgarie, l’Estonie, la Hongrie, la Lettonie, la Lituanie, la Pologne, la République
Tchèque, la Roumanie, la Slovaquie et la Slovénie. Cette caractéristique est essentielle
puisqu’elle a permis à ces pays de bénéficier d’une attractivité forte de capitaux étrangers et
de devenir un partenaire commercial de l’Europe occidentale (tableau 21). Les chiffres sont
éloquents, tous supérieurs à 50% tant pour la part des exportations vers l'UE dans les
exportations totales que pour la part des importations de l'UE dans les importations totales
et de 75% pour la part du stock d’IDE de l’UE sur le total des IDE.
87
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
La perspective d’adhérer à l’Union européenne, puis celle en cours à l’euro, a conduit à
l’idée que ces pays pourraient un jour converger vers les mêmes niveaux de développement
que les partenaires historiques de la zone. L’exemple de réussite de pays comme l’Espagne
et l’Irlande ne peut que conforter cette hypothèse. Parallèlement, des politiques
communautaires ont pu être mises en place afin de maximiser dans la mesure du possible
leur développement à travers les fonds européens. L’ancrage à l’Europe a constitué le garant
d’une certaine stabilité au regard du reste du monde. Il est clair que dans cette situation, les
effets de contagion de l’Europe occidentale vers l’Europe centrale et orientale au sein de
l’Union européenne ne peuvent être que prépondérants en cas de choc.
Tableau 21. Caractéristiques économiques et financières de l’intégration des PECO à
l’Union européenne en 2008
PECO
Bulgarie
Rép. Tchèque
Estonie
Hongrie
Lituanie
Lettonie
Pologne
Roumanie
Slovénie
Slovaquie
Source : Eurostat.
Part des exportations
vers l'UE dans les
exportations totales (%)
60
84,9
70
78,2
60,3
68,6
77,8
70,5
68,1
85,3
Part des importations de
l'UE dans les
importations totales (%)
56,7
76,9
79,8
68,2
57,6
75,5
71,9
69,2
71,3
72,9
Part du stock d’IDE de
l’UE sur le total des IDE
(%)
91,91
94,23
96,10
74,98
94,22
90,04
88,17
94,43
98,37
93,54
Le tableau ci-dessous met en évidence la forte intégration commerciale de pays avec l’Union
européenne en 2008 : du plus bas en Bulgarie avec 60% de la part des exportations et 56.7%
des importations, au plus élevé en République Tchèque avec 84.9% de la part des
exportations et 76.9% des importations. Pour ce qui est de l’intégration financière, la
dépendance aux capitaux de l’Union européenne est poussée à son extrême avec des taux
d’intégration pouvant aller, pour certains d’entre eux comme la Slovénie, jusqu’à 98.37% en
2008. Ces chiffres confortent l’idée que les canaux de contagion sont parvenus à un niveau
sans précédent.
88
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Peu de temps encore avant la crise de fin 2008, les PECO étaient considérés comme
fortement attractifs avec de bons fondamentaux (tableau 22). Leur taux de croissance était
favorable, le solde public majoritairement contenu et le taux d’inflation sous contrôle mis à
part en Roumanie. Ils n’étaient nullement considérés comme assortis de vulnérabilités
d’ordre macroéconomiques, telles celles relatives aux modélisations de première
génération. Quant à la volonté du gouvernement de poursuivre l’ancrage à l’euro,
configuration de la deuxième génération, il n’a jamais été remis en cause. Bien au contraire,
la perspective d’adhérer à l’euro est synonyme d’attractivité amplifiant la croissance
économique. Quant aux éléments à l’origine de la troisième et dernière génération de
modélisation de crise, il n’y a jamais eu véritablement de fragilité du système bancaire. Mis à
part que ce dernier appartient majoritairement aux grands groupes financiers d’Europe
occidentale, garants de sa bonne régulation à travers le transfert des méthodes de gestion
du risque et de capitalisation suffisamment importantes.
Tableau 22. Données sur les fondamentaux macroéconomiques des PECO (moyenne
2000/2008)
PECO
Moyenne 2000-2008
Bulgarie
République tchèque
Estonie
Lettonie
Lituanie
Hongrie
Pologne
Roumanie
Slovénie
Slovaquie
Source : Eurostat
Taux de croissance (%)
Solde public (%)
6,21
2,29
5,82
8,32
3,76
6,21
3,19
21,59
4,72
4,30
0,82
-3,92
0,78
-1,69
-1,86
-6,16
-4,24
-2,73
-2,18
-4,68
Taux d’inflation (%)
7,21
2,81
4,81
6,12
2,94
6,36
3,54
17,60
5,41
5,74
La Roumanie a un taux de croissance apparaissant exceptionnel avec 21.59% de moyenne
par an entre 2000 et 2008. On peut l’expliquer par un développement plus tardif couplé à
des difficultés de régulation importantes jusqu’au début des années 2000 (pour preuve, le
taux d’inflation moyen était de 17.60% sur la même période). Pour ce qui concerne les
autres PECO, ils enregistrent des taux de croissance économique largement favorables avec
89
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
6.21% pour la Bulgarie et la Hongrie ainsi que 8.32% pour la Lettonie. Mais cette dynamique
n’est pas apparue avec de forts déséquilibres puisque leur solde public et leur taux
d’inflation sont restés maintenus (-6.16% en Hongrie pour le plus dégradé des soldes publics
et 7.21% en Bulgarie pour le plus important des taux d’inflation).
Les éléments à prendre en compte pour expliquer comment des pays peuvent rentrer en
crise (plus spécifiquement au regard de l’exemple des PECO), alors qu’ils ont de bons
fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers, reposent conjointement sur les
effets de contagion et l’instabilité financière internationale. Ces deux caractéristiques vont
permettre la fuite généralisée des capitaux internationaux sans pour autant justifier de
vulnérabilités propres. Ces tensions rendent fragiles principalement et surtout les pays en
voie de développement qui ont opté pour une dynamique de rattrapage basée sur les
exportations.
Ces pays ont quelques caractéristiques communes qui renforcent cet effet de contagion : un
déficit de la balance courante (effet typique/logique pour un pays en cours de rattrapage), la
stabilisation de la balance des paiements par l’afflux d’IDE, un ancrage du taux de change
(fixe ou semi-fixe) afin de rassurer les investisseurs internationaux et une libéralisation des
flux financiers toujours pour favoriser les IDE. Pourtant, ces quatre caractéristiques sont
explosives si les autorités publiques ne sont pas en mesure de réguler le système financier
afin d’optimiser les sorties de capitaux lors d’un choc externe.
La description sommaire de l’impact d’un choc externe sur un pays en voie de
développement peut être la suivante : rapatriement des capitaux internationaux du pays
vers le reste du monde (pour des raisons qui peuvent être multiples), déficit de la balance
des paiements (la balance courante étant négative, elle ne peut plus être compensée par les
afflux d’IDE), risque de décrochage de l’ancrage du taux de change (mise sous pression des
réserves en devises de la Banque Centrale) et finalement intervention des autorités
publiques afin de défendre l’ancrage du taux de change (notamment par l’augmentation du
taux directeur de la Banque Centrale et la diminution des réserves de change).
90
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Cette amplification des vulnérabilités sera à l’origine d’un cercle vicieux de crise qui était
d’abord induit par un choc externe pour finalement s’auto-entretenir. L’augmentation des
taux directeurs de la part de la Banque Centrale va automatiquement faire augmenter les
taux d’intérêt dans la sphère économique. Les agents privés et publics vont directement
subir cette augmentation. Il y aura donc des difficultés à se financer ou se refinancer,
affectant leur solvabilité (augmentation des charges d’intérêt) mais aussi la dynamique
économique (l’augmentation du coût des crédits fait diminuer l’opportunité des projets
d’investissement). Quant à la libéralisation des flux financiers, afin de favoriser l’afflux d’IDE,
elle ne permet pas de protéger le pays contre des retournements brutaux de capitaux
internationaux. En cas de choc, ceux-ci peuvent se retirer facilement du pays, laissant les
agents privés et publics dans l’incapacité de se refinancer alors que ceux-ci ont des
obligations.
Les PECO illustrent véritablement l’ensemble de ces caractéristiques puisqu’ils ont opté pour
un rattrapage économique, depuis la fin de l’ère soviétique, tourné vers l’exportation dont
les capitaux étrangers furent essentiels pour combler le manque d’épargne nationale.
L’adhésion à l’Union européenne et à celle en cours à la zone euro les ont poussés à
libéraliser les flux financiers tout en ancrant leurs taux de change. Ces vulnérabilités, à
l’origine des effets de contagion, vont logiquement renforcer les pressions sur le taux de
change.
L’impact sur la sphère économique va augmenter les faillites (poids de la dette, impossibilité
de refinancement, …), et diminuer l’attrait des IDE pour le pays puisqu’il n’aura plus de
croissance économique forte (diminution de la mise en route de projets d’investissement
par le cout élevé des financements). Les flux d’IDE seront alors de plus en plus faibles, le
rapatriement des capitaux internationaux va alors s’amplifier. L’impact de la sphère
financière ne permettra pas d’optimiser les interactions financières entre le pays et le reste
du monde. Les capitaux internationaux pourront s’affranchir librement des aléas nationaux
« grâce » à la libéralisation autorisée et incontrôlée des instances nationales du pays. Le taux
de change ne pourra donc pas poursuivre son ancrage. Une dévaluation devient alors
inévitable, dernier mécanisme qui va anéantir le pays.
91
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Les graphiques 17 et 18 illustrent la fuite des capitaux étrangers et la diminution généralisée
des réserves de change des PECO afin de tenter de stabiliser leur taux de change à partir de
la fin 2008. Ils démontrent bien une rupture entre d’un côté un trend haussier (définie
d’étape 1) largement imputable à la forte dynamique d’attractivité de ces pays jusqu’en
2008. Puis, une rupture pour la majorité d’entre eux (étape 2) lors des effets de contagion de
la crise des Subprimes engendrant une instabilité financière à l’origine de ces tensions.
Graphique 17. La fuite généralisée des capitaux au sein des PECO
Bulgarie
35000
Etape2
30000
Etape1
25000
République
tchèque
Estonie
Lettonie
20000
Lituanie
15000
Hongrie
10000
Pologne
Roumanie
5000
Slovénie
0
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011
Slovaquie
-5000
Source : Eurostat - Millions d'euros (à partir du 1.1.1999)/Millions d'écus (jusqu'au
31.12.1998).
Graphique 18. Baisse des réserves de change (or y compris)
70 000,00
Bulgarie
60 000,00
République
tchèque
Estonie
Etape1
50 000,00
Etape2
Lettonie
40 000,00
Lituanie
30 000,00
Hongrie
Pologne
20 000,00
Roumanie
10 000,00
Slovénie
0,00
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012
Slovaquie
Source : Eurostat - Millions d'euros (à partir du 1.1.1999)/Millions d'écus (jusqu'au
31.12.1998)
92
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Les éléments qui ont pu être apportés ici avaient pour but de démontrer par des faits
empiriques la plausibilité de la problématique. La Corée du Sud, le Brésil mais surtout les
PECO ont pu être impactés par des effets de contagion importants induits par une
intégration forte à l’économie mondiale. L’instabilité financière internationale, qui offre
l’opportunité de retirer les capitaux rapidement, devient difficilement contrôlable au regard
des ancrages fixes qui ont pu être choisis. Il conviendra cependant de revenir sur les raisons
pouvant justifier cette instabilité internationale, l’origine de l’élément perturbateur,
notamment au niveau de la nature de l’endettement des agents économiques au regard de
caractéristiques communes à ces pays : déficit de la balance courante, stabilisation de la
balance des paiements par l’afflux d’IDE, ancrage du taux de change et libéralisation du
compte de capital.
93
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Conclusion intermédiaire
La libéralisation des flux financiers a pu être considérée comme une opportunité pour les
pays en voie de développement. Ils ont pu ainsi financer leurs besoins en capitaux
nécessaires à l’amorçage de leur dynamique de rattrapage économique. Mais
l’augmentation de ces échanges a induit une situation d’interdépendance où l’instabilité qui
en résulte va amplifier les effets de contagion. Ces deux caractéristiques, l’instabilité de la
sphère financière et les effets de contagion, poussent à modifier les fondements de
l’interprétation des crises de change. S’il s’avère que des pays avec de bons fondamentaux
peuvent entrer en crise à travers la contraction de ces flux de capitaux, alors la libéralisation
financière induit d’avoir en parallèle une régulation internationale. Le paradigme dominant
postule que la fuite de ces capitaux est le fruit d’une vulnérabilité propre au pays en crise,
même issue d’effets de contagion qui lui sont externes. La remise en cause de ce postulat
reste délicate au regard de l’impact que ces sorties de capitaux peuvent avoir. Mais de toute
évidence, la possibilité d’allouer librement les capitaux afin de les rendre liquides semble
amener à plus de difficultés pour les maîtriser.
En parallèle à cette instabilité financière, l’attractivité en capitaux des pays émergents est
souvent conditionnée à la stabilisation du risque de dépréciation monétaire. Les échanges
entre un pays et le reste du monde sont à l’origine des tensions soit par la variation du taux
de change soit par la variation des réserves de devises. L’ancrage d’une monnaie, surtout
pour des territoires en pleine essor, ne peut rester véritablement viable à moyen terme. La
libéralisation des flux de capitaux, afin d’intégrer le marché financier international, apparait
peu compatible avec cette volonté de stabilisation du taux de change. A la moindre tension
constatée ou anticipée, les agents économiques ont la capacité de rapatrier rapidement
leurs capitaux. Toute la difficulté, afin de rendre viable des ancrages de change dans un
contexte de libéralisation, est de déterminer la source pouvant engendrer ces tensions afin
de les anticiper.
Une crise de change pour un pays en voie de développement se caractérise par la fuite
généralisée de capitaux ne permettant plus à l’ancrage d’être viable au regard du déficit
apparaissant pourtant normal de la balance courante lors d’un processus de rattrapage
94
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
économique. De nombreux fondamentaux ont pu rendre compte de l’influence qu’ils
pouvaient exercer sur l’occurrence d’une crise (indicateurs macroéconomiques, macrofinanciers, sociaux, politiques, microéconomiques, micro-financiers…). Cependant, ce ne
sont que des interprétations qui apparaissent en décalage au regard de récents faits
empiriques confortant notre problématique (Corée du Sud en 1997-1998, Brésil en 19992002 et plus particulièrement dans les PECO en 2008).
A partir de la modélisation de première génération, qui apparait toujours essentielle, une
modélisation complémentaire devra être façonnée afin d’y intégrer de nouvelles variables
reflétant ces caractéristiques. La libéralisation financière a amplifié les situations
d’interdépendance à l’origine d’effets de contagion prépondérants qu’il peut convenir de
définir d’éléments de vulnérabilité propre au pays sans pour autant témoigner de la
dégradation de ses fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers.
95
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Conclusion de la première partie
La première partie avait pour ambition de présenter la façon dont la littérature économique
appréhende le phénomène de crise financière et plus spécifiquement de crise de change.
Une remise à plat de ces postulats, d’où découle la façon même de déterminer puis
d’anticiper ces phénomènes, est indispensable pour les confronter à la problématique. Celleci repose sur l’affirmation que des pays émergents, dont les fondamentaux
macroéconomiques et macro-financiers sont robustes, peuvent néanmoins entrer en crise
par des effets de contagion sans pour autant témoigner d’une vulnérabilité fondamentale
qui pourrait leur être propre. La littérature existante est en totale opposition puisqu’elle
postule que toute crise dans une économie ne peut s’expliquer que par une vulnérabilité
déjà existante dont les effets de contagion ne viendront que renforcer l’impact. Le
cheminement alors choisi a permis de faire ressortir les limites de telles interprétations au
regard de faits nouveaux pouvant se matérialiser lors des crises en Corée du Sud (19971998), au Brésil (1999-2002) et plus spécifiquement dans les PECO (2008).
Une crise est perçue comme un événement nécessaire induit par l’incapacité des forces en
présence à s’adapter aux contraintes qui leur font face. Cette interprétation met en lumière
des variables macroéconomiques et macro-financières qui, à travers leur dégradation,
apparaissent symptomatiques lors de crises financières. Cette approche doit permettre de
faire un parallèle entre la dynamique d’une crise dans le cadre de sa temporalité et les
éléments issus de la littérature afin de la quantifier pour l’anticiper et la prévenir. Deux
limites apparaissent ici dans la capacité des économies à apporter les éléments nécessaires
face aux contraintes pouvant engendrer une crise. L’élément perturbateur à l’origine de la
crise peut être étranger au pays. Se pose la question de sa légitimité d’intervention afin de
s’en prémunir. Ensuite, l’anticipation d’une crise repose sur la dégradation des
fondamentaux propres au pays. Si ceux-ci ne se dégradent pas, comme il est postulé dans la
problématique, les méthodes de déterminations des crises pour les prévoir deviennent
inefficaces. Des réajustements tant méthodologiques que réglementaires (à travers une
coopération sur la stabilité financière internationale) se doivent d’être réalisés afin d’inclure
ces faits nouveaux s’ils venaient à être avérés.
96
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Le processus de libéralisation apparait comme un élément essentiel à la régulation du
système financier international afin de l’adapter aux contraintes du moment. Mais la
fluctuation du prix des actifs nécessaire à une réallocation optimale du capital est aussi
source d’instabilité à l’origine de phénomènes de contagion. Ces deux caractéristiques,
l’instabilité de la sphère financière et les effets de contagion, poussent à modifier les
fondements de l’interprétation des crises de change. Le besoin de capitaux des pays
émergents destinés à palier leur manque d’épargne nationale et d’amorcer une dynamique
de rattrapage économique rend dépendant nombre d’entre eux à ces aléas (cette
caractéristique est appelée « le péché originel des pays émergents »). Paradoxalement, la
nécessité de stabiliser le risque de dépréciation monétaire afin de bénéficier de ces capitaux
internationaux les a conduits à ancrer leur taux de change. La problématique qui se pose
véritablement concerne la capacité de ces pays à libéraliser, notamment leur compte de
capital, alors que nombre d’entre eux sont sous ancrage fixe. Afin de rendre viable cette
configuration, il faut pouvoir déterminer les sources potentielles des tensions afin de les
anticiper.
Les modélisations de première, deuxième et troisième générations ont cherché à expliquer
les raisons de l’occurrence d’une crise de change mais toujours par une dynamique de
dégradation des fondamentaux du pays à l’origine de l’amplification des vulnérabilités. La
matérialisation de l’occurrence de ce phénomène reste pourtant la même. La fuite
généralisée des capitaux ne permet plus à l’ancrage d’être viable au regard du déficit
récurrent de la balance courante induit par le processus de rattrapage du pays émergent. La
modélisation de première génération a pu mettre en avant cette dynamique de crise sur le
taux de change. Les générations suivantes sont venues recontextualiser, par de nouvelles
variables, des origines différentes de la fuite généralisée des capitaux. Il s’agira dans la partie
suivante de faire de même. Les nouveaux paramètres à y intégrer repose sur l’instabilité
financière internationale et les effets de contagion qu’il conviendra de matérialiser.
La problématique qui est défendue ici est délicate au regard de l’hypothèse de non
dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers au sein des pays
pouvant justifier de l’occurrence d’une crise. Les nouvelles vulnérabilités qui pourraient
expliquer cet état de fait reposent sur des éléments extérieurs au territoire. L’instabilité
97
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
financière internationale est l’agrégation de comportements financiers des agents
économiques à travers le monde alors que l’amplification des effets de contagion n’est que
la résultante d’une intégration poussée des économies contemporaines. Les vulnérabilités
prépondérantes n’apparaissent plus seulement comme celles propres au pays mais
concernent également celles de ses partenaires économiques et financiers. A partir du
moment où les difficultés de l’un deviennent aussi celles des autres, il peut être souhaitable
d’envisager une supervision supranationale.
98
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Partie 2
Identification et modélisation des faits originaux : un processus de
développement source d’interdépendances et d’effets de
contagion.
99
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Introduction de la deuxième partie
La partie précédente a permis de définir la notion de crise, et notamment celle financière,
pour ensuite la contextualiser au regard de la nature même des nouvelles vulnérabilités de
notre époque. Les nouveaux éléments de libéralisation, d’interdépendance et d’effets de
contagion qui ont pu en ressortir, se doivent ici d’être explicités afin d’en comprendre leurs
interactions. Ensuite, ils pourront être modélisés. L’ambition ici est d’apporter une
compréhension de ces phénomènes macroéconomiques et macro-financiers apparaissant
nouveaux sans juger de leurs prépondérances dans les phénomènes de crises. Ainsi, de
nombreuses caractéristiques se doivent d’être présentes pour éventuellement faire émerger
l’occurrence de ce style de tensions. Pour rappel, le pays émergent doit avoir un déficit
récurrent de sa balance courante, une stabilisation de sa balance des paiements par l‘afflux
d’IDE, une stabilisation voire un ancrage de son taux de change et la libéralisation des flux
financiers (libéralisation de son compte de capital). Il s’agit tout d’abord d’expliquer les
raisons de l’adoption de ces caractéristiques par les pays émergents venant d’être émis (but
du premier chapitre), à l’origine de création de vulnérabilités, pour ensuite décrire
théoriquement la dynamique et empiriquement l’occurrence de ce genre nouveau de crise
(lors du second chapitre).
Le processus de développement économique, adopté aujourd’hui par une majorité de pays
émergents, repose sur une intégration dans le commerce international, source
d’amplification de la croissance économique à travers le partage d’idées, de compétences et
de technologies. Mais la réussite de cette intégration impose l’acquisition d’un avantage
compétitif nécessitant la reconversion de l’appareil productif du pays. Celle-ci n’apparait
envisageable que par l’afflux de capitaux étrangers, majoritairement sous forme d’IDE, qu’il
conviendra d’expliquer ultérieurement. Cette stratégie, source de dynamisme, n’est pas
pour autant sans risque puisqu’elle induit une amplification des interdépendances tant
commerciales que financières vis-à-vis du reste du monde. La libéralisation des flux
financiers mondiaux met aussi en parallèle une mise en concurrence entre les territoires où
l’attractivité de chacun est fonction des avantages qu’il apporte (coût de la main d’œuvre,
poids de la fiscalité, réglementations…). Les éléments qui en ressortent, en relation avec la
100
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
problématique, sont la libéralisation de leur compte de capital et la neutralisation du risque
de change.
En parallèle à l’émergence de vulnérabilités au sein des pays émergents (ou la libéralisation
des flux de capitaux apparait incompatible avec la stabilisation du taux de change), il
conviendra de décrire les éléments perturbateurs à l’origine de tensions financières
internationales. Une démarche d’abord théorique, donnant suite à une préférence pour
l’Hypothèse d’Instabilité Financière (HIF) de Minsky, permettra de justifier la variation à la
hausse du taux d’intérêt, responsable des difficultés des agents économiques internationaux
au regard de la structuration de leur endettement. Le rôle de la Banque Centrale y sera
décrit avec quelques éléments pouvant être définis de complémentaires mais restant
nécessaires à la problématique. Ces éléments vont offrir l’opportunité d’expliquer la fuite
des capitaux étrangers au sein du pays émergent sans pour autant prendre comme élément
perturbateur une dégradation de leurs fondamentaux macroéconomiques et macrofinanciers.
Cette interprétation, plutôt externe dans l’explication de l’occurrence de la crise, va être
complétée par la matérialisation des tensions en interne au pays, notamment par la
contraction de taux de change. C’est principalement à travers les canaux de contagion de la
liquidité et des taux d’intérêt que le processus s’enclenche. D’une première fuite des
capitaux étrangers, de par les tensions financières internationales, celle-ci va se renforcer au
regard de l’amplification des vulnérabilités interne. Le déficit récurrent de la balance
courante, légitime lors d’un processus de rattrapage économique, va conforter les pressions
sur le taux de change puisque les flux positifs de capitaux étrangers ne neutraliseront plus ce
solde négatif. Cet élément nouveau, au regard des différentes modélisations des crises de
change, est la vulnérabilité principale du pays émergent. Celle-ci devient explosive dans le
contexte économique et financier actuel.
Pour illustrer la problématique, un focus est réalisé principalement sur les PECO durant la
crise des Subprimes en 2008. L’ensemble des graphiques et tableaux, relatant l’évolution des
variables macroéconomiques et macro-financières, met en exergue deux étapes
importantes. La première période correspond à une situation de rattrapage économique
101
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
largement favorable pour ces pays (avec des indicateurs positifs). La deuxième, fruit de
l’élément perturbateur induit par les tensions financières internationales, conduit à une fuite
des capitaux qui engendrera une crise de change mais aussi une forte rupture de la
croissance économique. Un nouveau point intéressant sera aussi décrit ici : celui de la
divergence non pas de l’impact des pressions internationales, puisque la totalité des PECO
ont pu la subir, mais plutôt de l’émergence d’un cercle vicieux de décroissance économique
divergent entre ces pays. Une analyse historique du développement économique de ces
pays, d’abord lors de la période soviétique, ensuite par l’intégration à l’Union européenne,
permettra d’aborder l’héritage des spécialisations de ces pays dont ils ont du s’accommoder
pour impulser une dynamique de rattrapage économique viable à l’origine de
comportement changeant lors des pressions internationales.
102
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Chapitre 3
Une stratégie de rattrapage économique basée sur l’attractivité des IDE,
source de vulnérabilités potentielles ?
Introduction intermédiaire
Les pays en voie de développement cherchent à se dynamiser afin d’impulser un processus
de rattrapage économique. L’histoire récente du développement économique témoigne de
l’insertion au commerce international comme la seule solution viable pour induire ce
processus. Cette ouverture commerciale reste largement plébiscitée par la littérature
économique ainsi que les instances internationales comme le FMI et la Banque Mondiale. Le
partage de connaissances et d’idées à travers les échanges qui en résultent apparaissent
favorables aux économies, qu’elles soient en voie de développement ou développées.
Pourtant, la participation au commerce international implique un processus de spécialisation
où chaque territoire doit posséder un avantage compétitif lui permettant de se centrer sur
les secteurs dont la production est exportable. Le fruit de cette stratégie a été adopté par les
PECO de la fin des années 80 (lors de la chute du mur de Berlin) à aujourd’hui. La perspective
d’intégration à l’Union européenne (qui s’est matérialisée en 2004 et 2007) puis celle en
cours à la zone euro n’ont fait que renforcer cette tendance.
La contrainte des pays en voie de développement réside dans le fait qu’ils n’ont pas, lors du
démarrage de ce processus, les moyens financiers pour restructurer leur appareil productif
afin de se spécialiser dans des secteurs destinés à l’exportation. Le niveau de vie faible de
leur population explique cette incapacité à obtenir les capitaux nécessaires au décollage
économique. Même si certains pays qu’il convient de qualifier d’émergents au regard de
l’attractivité dont ils font preuve témoignent d’une épargne domestique potentiellement
disponible. Or, il leurs est souvent difficile de la capter face au risque souverain auquel ils
font encore face. Cette situation est vraie pour les PECO qui n’avaient pas les moyens
financiers pour impulser leur processus de rattrapage L’appel aux financements extérieurs
est alors l’alternative incontournable pour ces pays. Ce choix a été largement adopté par les
PECO qui aujourd’hui se retrouvent tributaires du marché financier international. La
103
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
dynamique de rattrapage ainsi décrite induit cependant de nombreuses fragilités tant que
les spécialisations sectorielles axées à l’exportation ne se sont pas émancipées des capitaux
étrangers. L’endettement international suppose une dépendance au marché financier
mondial avec toutes les vulnérabilités que cela peut entrainer (influence des aléas financiers
internationaux, dépendance aux organismes de prêts étrangers,…). L’importation de biens
d’équipement nécessaires à la restructuration du tissu économique met sous pression la
balance courante du pays puisque dans un même temps les exportations restent en général
insuffisantes pour contrebalancer ces dépenses. L’endettement permet de palier ce déficit
de la balance courante tant qu’il apparait légitime et est source de gains de productivité
futurs. A terme, le processus de développement économique doit permettre au pays de
bénéficier d’un surplus commercial grâce à sa spécialisation sectorielle qui le dégage de la
contrainte des capitaux étrangers et d’amplifier sa montée en gamme vers des secteurs plus
intensifs en technologies. Se posera alors la question du positionnement actuel des PECO
dans leur dynamique de rattrapage au regard de ces éléments.
La forme d’endettement qui est majoritairement privilégiée aujourd’hui correspond aux IDE.
En plus de répondre aux besoins de capitaux, ils apportent avec eux tout un ensemble de
compétences dont le territoire pourra s’approprier les avantages lors de leur diffusion aux
autres secteurs. Les PECO ont eux aussi fait le pari de les attirer. Les IDE ne sont pas des
titres de dettes traditionnelles mais des prises de participations ou de créations de nouvelles
activités au regard de l’avantage compétitif que peut posséder un pays. Il y a une véritable
implication de ces capitaux à travers les transferts de technologies et de compétences.
Même s’il faut tempérer l’impact potentiel des IDE sur la croissance économique d’un pays
(notamment au regard de sa capacité d’absorption induite principalement par le niveau de
qualification de la population), ils semblent conforter l’amplification du rattrapage
économique. Les IDE deviennent des éléments déterminants dans l’amorçage du
développement, mettant sous pression concurrentielle et donc en concurrence ces
territoires afin de les attirer. Une politique d’attractivité territoriale s’installe afin de mettre
en avant des avantages compétitifs source d’attractivité des IDE (coût de la main d’œuvre,
réglementation fiscale, libéralisation du compte de capital, stabilisation du risque de
dépréciation monétaire…). Les PECO ont du faire de nombreuses concessions dans le cadre
de leur attractivité territoriale, qu’il conviendra de lister.
104
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Les éléments qui vont être exposés ici ont pour ambition d’expliquer le cheminement
actuellement choisi par de nombreux pays émergents, et notamment les PECO, dans le cadre
de leur stratégie de rattrapage économique. Il peut convenir de revenir sur chacune de ces
interprétations pour en expliquer clairement la dynamique sans pour autant en juger de la
pertinence. La problématique n’a pas vocation ici à valider l’efficience de cette stratégie de
développement mais plutôt à insister sur les vulnérabilités qu’elle engendre. Une mise en
parallèle du contexte dans lequel se retrouvent les pays en voie de développement, à travers
une libéralisation des flux de capitaux et d’un ancrage de leur taux de change nécessaire à
l’attractivité des IDE, va permettre de matérialiser le processus de crise propre à notre
problématique sans pour autant témoigner d’une dégradation de leurs fondamentaux
macroéconomiques et macro-financiers. L’association au commerce mondiale, induisant une
intégration au marché financier international afin d’y trouver des capitaux, est un des
éléments de vulnérabilités, facteurs d’amplification des interdépendances et des effets de
contagion externes au pays.
105
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
1. Enjeux de l’intégration au commerce international : des perspectives favorables de
développement économique
Le développement économique « peut être défini comme un processus endogène et
cumulatif de long terme de progrès de la productivité et de réduction des inégalités, en
intégrant des coûts humains et environnementaux acceptables. » (Hugon, 2006). Les
stratégies adoptées au cours des dernières décennies laissent perplexes quant à la capacité
de nos sociétés à impulser favorablement ce genre de dynamique. Historiquement, quatre
grandes périodes peuvent émerger vis-à-vis des pratiques généralement admises à la suite
de la 2eme Guerre Mondiale puis en parallèle à la décolonisation (tableau 23).
Tableau 23. Les quatre grandes périodes de l’économie du développement
Principales
périodes :
Contexte historique :
Paradigme dominant
en économie :
1960-1968
Construction et
fondements
Décolonisation.
Le Tiers Monde face aux
deux blocs.
Synthèse classicokeynésienne.
1968, 1975-1980
Radicalisation et
affrontements
Luttes de libération.
Nouvel ordre économique
international
Libéralisation.
Normalisation.
Divergences des pays
semi-industrialisés et des
PMA.
1980-1995
Libéralisation et
ajustement
1995-2007
Refondation et
post-ajustement
Objectifs du millénaire.
Unilatéralisme américain.
Montée en puissance des
pays émergents.
Paradigme
néoclassique et néoricardien.
Questions en économie
du développement :
Dualisme.
Désarticulation.
Cercle vicieux.
Effets de seuil.
Spécialisation
appauvrissant.
Relations Nord/Sud.
Paradigme néoclassique avec le
« Consensus de
Washington ».
Marchés efficients.
Droits de propriété.
Modèle d’équilibre
général calculable.
Néo-institutionnalisme
ou institutionnalisme
rationnel.
Microéconomie en
information imparfaite.
Pauvreté.
Gouvernance.
Trappes à pauvreté.
Asymétries.
Informations.
Modes de coordination.
Source : (Hugon, 2007)
La première grande période, de 1960 à 1968, est assimilée à la stratégie du décollage
économique où la pensée dominante en économie du développement a découlé de la
synthèse classico-keynésienne. Un rôle important est attribué aux Etats des pays en voie de
développement dans l’amorce d’une dynamique de rattrapage pour créer un cercle vertueux
106
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
à travers des financements internationaux massifs vers des secteurs industriels jugés
prioritaires. La relative confiance vis-à-vis des gouvernements de ces pays dans leur capacité
à allouer avec efficience ces ressources a cependant posé problème par la suite face à des
difficultés de corruptions, de compétences mais aussi de savoir-faire. La notion de rationalité
à long terme de l’Etat fut mise en défaut au regard du manque de retour et d’expérience
réelle des projets.
Entre 1975 et 1980, une deuxième grande période a pu émerger. Elle repose sur la
contestation de la répartition des influences géostratégiques de l’époque. La dégradation
des termes de l’échange pour de nombreux pays en voie de développement, souvent
producteurs de matières premières, a poussé ceux-ci à mettre en place des stratégies de
substitutions aux importations. L’état devait alors jouer un rôle important afin de se
dédouaner des dépendances internationales en parallèle de la mise en œuvre de politiques
de développement économique. Les échecs des pays en voie de développement ayant
adopté cette stratégie de repli, par la non-participation aux échanges commerciaux
internationaux, a sérieusement remis en cause le choix de cette méthode.
La troisième grande période, entre 1980 et 1995, correspond à l’ère du paradigme néoclassique avec le « Consensus de Washington » (tableau 24). Les deux chocs pétroliers de
1973 et 1979, en parallèle à des endettements importants, lors de la mise en place des
fondamentaux nécessaires à une impulsion économiques dans les années 1960/1968, vont
créer de forts déséquilibres macroéconomiques et macro-financiers à l’origine de la
défaillance de certains Etats sur leurs dettes (notamment avec le Mexique en 1982). Des
politiques d’ajustement structurelles ont été imposées, reposant sur la libéralisation de
l’économie, le désengagement de l’état, l’ouverture extérieure et le respect des
fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers et devant favoriser l’augmentation
de la compétitivité de ces territoires (Williamson, 1990). Ces mesures doivent faciliter
l’ajustement des équilibres macroéconomiques, notamment au niveau de la balance des
paiements pour satisfaire les contraintes de la dette, à travers une régulation par le marché
et non plus par les forces étatiques.
107
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Tableau 24. Les dix propositions de Williamson du « Consensus de Washington »
1. Discipline budgétaire.
2. Réorientation des priorités des dépenses publiques vers des domaines offrant à la
fois un rendement économique et un potentiel d’amélioration de la répartition des
revenus, tels que les soins de santé primaires, l’enseignement primaire et les
infrastructures.
3. Réforme fiscale (baisse des taux marginaux et élargissement de l'assiette fiscale).
4. Libéralisation des taux d'intérêt.
5. Taux de change compétitif.
6. Libéralisation du commerce.
7. Libéralisation des entrées d'IDE.
8. Privatisation.
9. Déréglementation (dans le sens de la suppression des barrières à l'entrée et de
sortie).
10. Droits de propriété garantis.
Source : (Williamson, 1990)
Même si cette stratégie de développement économique, reposant sur la libéralisation et
l’intégration internationale, est fortement remise en cause aujourd’hui (il s’agit de la
quatrième grande période du tableau 24 : refondation et post-ajustement), au sein même de
structures internationales comme le FMI et la Banque Mondiale (Stiglitz, 2001) (AbrahamFrois, & al., 2003) (Clift, 2003) (Banque Mondiale, 2007) (FMI, 2007), elle reste toujours
utilisée par de nombreux pays. De multiples exemples de réussites, notamment les quatre
dragons (Corée du Sud, Hong-Kong, Singapour et Taïwan) mais aussi la Chine et certains pays
d’Amérique Latine, tendent à démontrer que l’ouverture commerciale est un facteur
amplificateur de croissance économique, et donc de rattrapage économique.
Les PECO ont aussi choisi cette stratégie d’intégration au commerce internationale. Cette
insertion a véritablement pu se réaliser lors du début du processus d’intégration à l’Union
européenne. Ces pays, afin de se restructurer suite à leur passé socialiste, étaient dans des
situations difficiles. Le tableau 25 vient confirmer cette tendance avec des taux d'ouverture
commerciale (moyenne des importations et des exportations en % du PIB) qui n’ont cessé de
croitre depuis 1999 pour passer de 40% à 56% en 2008.
108
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Tableau 25. Taux d’ouverture commerciale des PECO avant tensions internationales 2008
1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008
Bulgarie
36
45
45
44
46
49
50
54
61
59
Rep. Tchèque
46
54
56
52
55
63
62
66
69
66
Estonie
51
65
61
56
56
59
65
70
62
60
Hongrie
54
64
60
54
54
56
59
68
69
70
Lituanie
34
39
43
45
45
48
53
56
53
58
Lettonie
32
32
33
34
36
40
43
44
41
39
Pologne
22
24
23
24
28
32
31
35
36
36
Roumanie
26
31
33
35
35
37
34
34
32
32
Slovénie
42
48
48
46
46
51
55
61
65
65
Slovaquie
53
60
65
63
67
68
70
78
79
76
Moyenne PECO
40
46
47
45
47
50
52
57
57
56
Source : Eurostat et calculs auteur (moyenne des importations et exportations en % du PIB)
Au regard de la situation actuelle, et sans volonté de porter un jugement sur les stratégies
adoptés au cours de l’histoire récente de l’économie du développement, force est de
constater que l’intégration au commerce extérieur est apparu comme une alternative
indispensable afin d’impulser une dynamique économique. Les approches théoriques sont
majoritairement favorables à cette tendance (Michaely, 1977) (Feder, 1983) (Kormendi, &
al., 1985) (Fischer, 1991) (Fischer, 1993) (Dollar, 1992) (Levine, & al., 1992) (Edwards, 1993)
(Harrison, 1996) (Edwards, 1995). Les organisations internationales vont jusqu’à conforter
officiellement ces faits. L’OMC affirme que « la plupart des études empiriques constatent
l’existence d’une rétroaction positive entre l’ouverture du régime commercial et la croissance
économique. »
(OMC,
1998).
Postulat
conforté
par
la
Banque
Mondiale
où
« L'approfondissement du commerce mondial et l'intégration d'investissement détient la
promesse d'une augmentation plus rapide du niveau de vie partout dans le monde, en
particulier dans les pays en développement. » (World Bank, 2002).
Quelques travaux empiriques ont notamment pu justifier cette forte relation entre
croissance économique et commerce international. Pour ne reprendre que certains
exemples, Fontagné et Mondher (Fontagné, & al., 2002) ont validé cette hypothèse à travers
la réalisation d’un indice d’évaluation et de contrôle des performances à l’exportation
auprès de 184 pays sur 72 secteurs (tableaux 26, 27 et 28). Quant à l’OMC (OMC, 1998), elle
109
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
a aussi cherché à conforter ces faits sur un panel de 41 pays en voie de développement
suivant une classification de leur degré d’ouverture (les pays très tournés vers l’intérieur, les
pays modérément tournés vers l’intérieur, les pays modérément tournés vers l’extérieur et
les pays très tournés vers l’extérieur). Il s’agissait ensuite de comparer la relation entre le
taux de croissance économique par habitant moyen avec le degré d’ouverture commerciale
sur trois périodes : 1963-1973, 1974-1985 et 1986-1992 (graphique 19).
Tableau 26. Meilleures performances commerciales globales des pays en voie de
développement (2000)
Source : (Fontagné, & al., 2002 ; ddonnées de CHELEM-CEPII pour la 1ere colonne,
COMTRADE et calculs auteurs pour les colonnes suivantes).
Le classement des meilleures performances commerciales des pays possédant un revenu par
tête en PPA (parité du pouvoir d’achat) en 2000 inférieur à 10 000 dollars met en avant des
pays asiatiques (Malaisie, Chine, Vietnam, Indonésie et Cambodge) ainsi que des pays
d’Europe centrale et orientale (Estonie, Ukraine et République Tchèque). L’Afrique du Sud et
le Mexique sont aussi présents.
110
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Tableau 27. Meilleure amélioration des performances commerciales des pays en voie de
développement (1996-2000)
Source : (Fontagné, & al., 2002 ; ddonnées de CHELEM-CEPII pour la 1ere colonne,
COMTRADE et calculs auteurs pour les colonnes suivantes).
Cet autre classement, reposant sur les mêmes critères que le tableau 26, illustre les pays qui
ont le plus progressé au regard de leur performance commerciale. Les explications peuvent
cependant diverger pour justifier cette ascension (mise en avant d’un avantage compétitif
important, effet de la régionalisation, petite taille des territoires pour d’autres…).
Tableau 28. Les dix moins bonnes performances commerciales globales pour les pays en
développement (2000)
Source : (Fontagné, & al., 2002 ; ddonnées de CHELEM-CEPII pour la 1ere colonne,
COMTRADE et calculs auteurs pour les colonnes suivantes).
111
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Le tableau 28 est quant à lui plus critique puisqu’il regroupe les pays en voie de
développement les moins performants. Sans en reprendre la liste, ces pays correspondent à
ceux qui sont le moins développés économiquement.
Graphique 19. Corrélation entre l’ouverture commerciale et la croissance économique
Source : (OMC, 1998)
Le graphique 19 met clairement en avant une relation forte entre le degré d’ouverture
commerciale et le taux de croissance économique. Plus le degré d’ouverture commerciale
est fort (barres en bleu foncé), plus le taux de croissance économique du revenu par
habitant est proche des 6 à 7 %, quelque soit la période étudiée (1963-1973, 1974-1985 et
1986-1992).
Pourtant, le sens de causalité reste encore à définir même au regard de ces études
empiriques. Un niveau de développement économique élevé induit une amplification de la
consommation qui se traduit par une augmentation du commerce extérieur ou s’agit-il du
contraire ? L’augmentation du commerce extérieur induit-il une augmentation du
développement économique ? Le débat reste encore en suspens.
Certains auteurs vont affirmer que la corrélation entre commerce et revenu n’est pas
suffisamment pertinente (Helpman, 1988) (Bradford, & al., 1993). « L’examen de la
corrélation entre le degré d’ouverture commerciale et le revenu n’indique pas de relation de
causalité entre ces deux variables. Les caractéristiques des pays ont des effets plus
112
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
importants sur le commerce extérieur sans pour autant être corrélé avec d’autres éléments
du revenu. » (Frankel, & al., 1999)
D’autres vont être même plus catégoriques. « Les progrès de l'ouverture et des échanges se
sont-ils traduits par un mouvement général de convergence des économies ? La réponse est
négative : en moyenne sur 20, 30 ou 40 ans, les pays n'ont pas enregistré une croissance de
leur PIB par tête d'autant plus élevée qu'ils étaient pauvres (L'estimation sur un large
échantillon de pays d'une équation de convergence absolue, où la croissance par tête est
régressée sur le PIB par tête initial, conduit à rejeter l'hypothèse de convergence.). »
(Bensidoun, & al., 2001). Le tableau 29 issu de ces travaux décrit cette interprétation qui
apparait contradictoire au regard des études empiriques mises en avant il y a peu.
Tableau 29. Une convergence trop faible pour parler d’un effet de corrélation
Source : (Bensidoun, & al., 2001)
Il ne s’agit pas ici de prétendre que le commerce extérieur permet d’amplifier la croissance
économique d’un pays, notamment celle des pays en voie de développement. Ce travail n’a
pas vocation à le démontrer. Mais la tendance actuelle reste largement orientée vers une
appropriation de ce paradigme. « L’ouverture commerciale, la libéralisation des échanges au
sens large et finalement la participation à la vague mondialisante constitueraient pour
beaucoup un puissant vecteur de développement ; peut-être la seule issue possible ou la
seule alternative à la misère. » (Cardebat, 2002).
113
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Le succès actuel de pays comme la Chine qui avait pu choisir cette stratégie ne peut que
conforter son attractivité par les autres pays en voie de développement (Gaffard, & al.,
2008). « Les liens entre ouverture et croissance ont paru suffisamment convaincants pour que
l'attention porte désormais sur la seule mise en œuvre d'un schéma unique de libéralisation
et de règles communes. » (Bensidoun, & al., 2001). Les résultats des PECO, ayant adopté
aussi cette stratégie, ont des résultats positifs tant en terme de croissance économique
(graphique 20) que de productivité (graphique 21).
Graphique 20. Evolution du PIB des PECO
Slovaquie
1 000 000,00
900 000,00
Slovénie
800 000,00
Roumanie
700 000,00
Pologne
600 000,00
Hongrie
500 000,00
Lituanie
400 000,00
300 000,00
Lettonie
200 000,00
Estonie
100 000,00
République
tchèque
Bulgarie
0,00
1995
1997
1999
2001
2003
2005
2007
2009
2011
2013
Source : Eurostat - Millions d'euros (aux prix de l'année précédente)
Graphique 21. Evolution de la productivité du travail par tête des PECO
1000
Slovaquie
900
Slovénie
800
Roumanie
700
Pologne
600
Hongrie
500
Lituanie
400
300
Lettonie
200
Estonie
100
République
tchèque
Bulgarie
0
1995
1997
1999
2001
2003
2005
2007
2009
2011
Source : Eurostat - Productivité réelle du travail par personnes employées - Indice, 2005=100.
114
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
La dynamique économique des PECO est apparue favorable depuis le début du processus de
rattrapage. Les taux de croissance économique sont forts et soutenus entre 2000 et 20008
(graphique 20). Il ne s’agit pas seulement d’un effet en termes de richesse, mais aussi vis-àvis d’une dynamique positive sur le tissu économique. L’augmentation de la productivité par
tête à l’ensemble de l’économie témoigne de cette tendance (graphique 21).
La présentation d’une typologie historique des principales stratégies de l’économie du
développement avait pour ambition de mettre en avant l’importance actuelle du commerce
international. Celle-ci s’est traduite par une libéralisation des échanges afin d’amplifier ce
phénomène. La littérature économique reste largement favorable à ce processus, même s’il
est possible d’émettre quelques réserves notamment sur le lien de cause à effet avec la
croissance économique.
Les PECO ont pu adopter cette stratégie depuis la fin du bloc soviétique avec une implication
beaucoup plus forte à partir des années 2000 (début de la perspective d’intégration future à
l’Union européenne). Cependant, en plus d’une libéralisation financière et d’une
stabilisation de son taux de change, l’adhésion à cette dynamique repose sur la
détermination d’un avantage compétitif des territoires indispensable afin de pouvoir vendre
sa production au reste du monde. Il s’agira alors de s’interroger sur le façonnage de cette
stratégie pour en comprendre les fragilités engendrées lors du processus de rattrapage
économique de ces pays (Hugon, 2001).
115
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
2. La nécessité de contracter des endettements externes, facteur de dépendance au
marché financier international
L’acquisition d’un avantage compétitif pour un pays en voie de développement réside
souvent dans la spécialisation sur un secteur tourné vers l’exportation. Cette ouverture au
commerce international lui permet de produire beaucoup plus et lui offre l’opportunité de
réaliser des économies d’échelle et des effets d’apprentissage. Cependant, dans le cadre de
cette spécialisation, il convient d’insister sur un point essentiel relatif à la vulnérabilité des
pays en voie de développement : le besoin en capitaux pour restructurer l’appareil productif.
Le principe même de cette dynamique repose sur un endettement. Ainsi, en acquérant les
fondamentaux nécessaires, le tissu économique se redynamise et permet le remboursement
des dettes contractées.
La description de cette relation entre croissance économique et endettement est mise en
avant dans la littérature économique. « La théorie suggère que l’emprunt, contenu dans des
limites raisonnables, peut aider les pays en développement à affermir leur croissance.»
(Pattillo, & al., 2002). Cette interprétation parait légitime. Lorsque l’endettement sert à
restructurer l’appareil productif, il permet au pays de créer de par lui-même les conditions
de son remboursement. « Dans cette perspective un emprunt à l’extérieur permet
précisément à un pays de procéder à des importations qu’il n’aurait pu financer par ses
seules recettes d’exportations. » (L'Hériteau, 1979).
Cependant, des contraintes émergent à travers l’endettement. Elles résident dans la charge
financière qui repose sur le futur. Ce pays sera-t-il dans la capacité de rembourser sa dette
alors qu’il n’est pas en mesure, aujourd’hui même, de s’assurer de la matérialisation d’une
dynamique de rattrapage économique ? « En effet, si tout processus de développement
économique et social est conditionné par l’obtention de ressources financières, qu’elles soient
internes ou qu’elles proviennent de sources extérieures, il dépend avant tout de l’usage qui
en est fait. » (Berr, 2007). Le graphique 22 illustre la relation entre endettement et
croissance économique, même si le danger du surendettement peut prendre à contrecourant cette dynamique favorable.
116
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Graphique 22. Impact de l’endettement sur la croissance économique
Source : (Pattillo, & al., 2002)
La contrainte de financement à travers l’acquisition de capitaux dans ces pays est bien réelle.
L’épargne domestique, au regard du niveau de vie plus faible de ces territoires, leur fait le
plus souvent défaut. Même si certains d’entre eux possèdent les capitaux nécessaires
(notamment les pays émergents), nombre d’entre eux les voient s’expatrier. Le graphique 23
illustre cette tendance pour les PECO, ceux-ci pouvant avoir des taux d’épargne variant de
10 à plus de 30% alors qu’ils continuent de s’endetter à l’étranger.
Graphique 23. Niveau d’épargne des PECO (en % du PIB)
30
Bulgarie
28
République
tchèque
Estonie
26
24
Lettonie
22
Lituanie
20
18
Hongrie
16
Pologne
14
Roumanie
12
Slovénie
10
1995
1997
1999
2001
2003
2005
Source : Eurostat - Prix courants - Epargne brute.
117
2007
2009
2011
Slovaquie
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Le secteur financier est souvent trop peu développé. « La mobilisation des ressources
internes suppose l’existence de systèmes bancaires et de régimes fiscaux efficaces, mais aussi
équitables afin d’être acceptés par les populations, et donc d’institutions fiables. Ces
conditions étant trop peu souvent réunies par les pays en développement, ceux-ci sont
contraints d’obtenir des ressources externes visant, en théorie, à réduire les inégalités et la
pauvreté. » (Berr, 2007) Les autorités publiques sont généralement incapables d’endiguer la
fuite de l’épargne nationale par manque de confiance de leurs résidents. « Ainsi, on retrouve
un des problèmes essentiels des pays émergents à savoir que ce sont des pays risqués,
caractéristique souvent liée au niveau du risque souverain. Cela explique qu’ils payent cher
leurs emprunts extérieurs, mais aussi le fait qu’une partie importante de l’épargne sorte pour
se placer à l’étranger. » (Ennajar, & al., 2005)
Les différentes interprétations réalisées à ce sujet définissent un coefficient de rétention de
l’épargne nationale plus faible dans les pays émergents que dans les pays développés
(Obstfeld, & al., 2000). Le graphique 24 illustre clairement cette situation.
Graphique 24. Placement des résidents à l’étranger
Source : (Ennajar, & al., 2005)
118
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Ce même graphique décrit une allocation importante des capitaux des pays émergents vers
l’étranger qui semble se renforcer au cours du temps. Même si le trend est haussier tant
pour les résidents des pays émergents que pour ceux des pays développés, résultat de la
globalisation et de la mondialisation des échanges, cet aspect apparait contradictoire au
regard du manque apparent de capitaux dans les pays en voie de développement. Le
passage par l’endettement externe semble être la seule solution envisageable pour les pays
émergents. Mais la nature des dettes contractées ne se destine pas totalement à une
redynamisation du tissu économique d’un pays. Les éléments justifiant un endettement de
l’étranger peuvent être regroupés en trois thématiques (Ikonicoff, 1984).
La première, avec le déséquilibre récurrent de la balance commerciale qui s’explique par une
augmentation des importations ou une diminution des exportations, voire les deux en même
temps. La variation récurrente du prix de plusieurs matières premières, où de nombreux
pays en voie de développement sont spécialisés dans ces productions, explique souvent les
déficits de la balance courante.
La deuxième, par la volonté pour un territoire d’amplifier au maximum sa croissance
économique à travers de grands projets d’infrastructures, va mettre à disposition des
moyens importants afin de se spécialiser dans des secteurs apparaissant porteurs.
La troisième, lors de politique d’intégration au système international, justifie le fait de passer
par l’étranger plutôt que de rester focaliser au niveau national. Les aspects bénéfiques de la
finance internationale sur le système financier national de ces pays semblent attester cette
tendance.
Le tableau 30 met en avant ces éléments à travers quelques exemples lesquels démontrent
que la stratégie de développement par l’endettement international n’évolue pas, ou reste
inchangée.
119
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Tableau 30. Nature de l’endettement international des pays en voie de développement
Source : (Ikonicoff, 1984)
Les PECO aussi ont choisi la solution de l’endettement externe pour obtenir les moyens
financiers qui impulseront une dynamique de rattrapage économique (graphique 25). Elle a
majoritairement pris la forme d’IDE comme le démontre le graphique 26.
Graphique 25. Solde des flux de capitaux étrangers des PECO
Slovaquie
90000
Slovénie
Roumanie
70000
Pologne
Hongrie
50000
Lituanie
30000
Lettonie
Estonie
10000
-10000
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011
République
tchèque
Bulgarie
Source : Eurostat - Millions d'euros (à partir du 1.1.1999)/Millions d'écus (jusqu'au
31.12.1998).
120
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Graphique 26. Solde des flux d’IDE des PECO
45 000
Slovaquie
40 000
Slovénie
35 000
Roumanie
30 000
Pologne
25 000
Hongrie
20 000
Lituanie
15 000
Lettonie
10 000
Estonie
5 000
0
-5 000
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011
République
tchèque
Bulgarie
Source : Eurostat - Millions d'euros (à partir du 1.1.1999)/Millions d'écus (jusqu'au
31.12.1998).
L’ensemble de ces éléments justifiant les raisons de l’endettement externe des pays en voie
de développement pose de nombreuses questions qui ne relèvent pas seulement de l’ordre
du poids de la dette. « Si l’endettement extérieur permet au pays bénéficiaire d’accroître
l’investissement et/ou la consommation de biens dits essentiels, il peut s’avérer utile. (…)
Mais des investissements étrangers massifs peuvent signifier une perte de souveraineté
économique par le pays bénéficiaire et générer des problèmes d’ordre politique. » (Berr,
2007). Cette dépendance au reste du monde se matérialise par une contrainte d’équilibre
tant interne qu’externe à travers la balance des paiements.
Un pays qui aura acheté plus qu’il n’aura vendu à l’étranger, même si ces échanges sont
légitimes, verra sa balance courante être déficitaire. Il devra donc s’endetter vis-à-vis de
l’étranger afin de satisfaire ce déficit. Il sera en position de besoin de financement avec le
reste du monde (Guyon, 2008). Cette tendance est visible au sein des PECO, au moins
jusqu’en 2009, dont la balance commerciale (graphique 27) et la balance courante
(graphique 28) sont déficitaires. Ce déséquilibre justifie alors le recours à des capitaux
étrangers.
121
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Graphique 27. Evolution de la balance commerciale des PECO
Slovaquie
15 000
Slovénie
5 000
Roumanie
-5 000
Pologne
-15 000
Hongrie
Lituanie
-25 000
Lettonie
-35 000
Estonie
-45 000
République
tchèque
Bulgarie
-55 000
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011
Source : Eurostat - Millions d'euros (à partir du 1.1.1999)/Millions d'écus (jusqu'au
31.12.1998).
Graphique 28. Solde des balances courantes des PECO
Slovaquie
2500
Slovénie
-2500
Roumanie
Pologne
-7500
Hongrie
Lituanie
-12500
Lettonie
-17500
Estonie
-22500
République
tchèque
Bulgarie
1995
1997
1999
2001
2003
2005
2007
2009
2011
Source : Eurostat - Millions d'euros (à partir du 1.1.1999)/ECU (jusqu'au 31.12.1998).
Il peut apparaitre légitime que des pays en voie de développement demandent à contracter
des dettes externes afin d’importer des biens et services nécessaires à l’amorçage d’une
dynamique de rattrapage (comme par exemple l’acquisition de biens d’équipement). Mais
cet endettement induit par le déficit de cette balance courante ne peut être que transitoire
puisqu’il hypothèque la stabilité financière externe du pays. « Si les difficultés de paiements
122
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
sont transitoires et réversibles, l'emprunt extérieur évite une contraction. Par contre, si les
déficits ne sont ni transitoires ni réversibles, le financement du déséquilibre n'est guère viable
à moyen et à long terme puisqu'il conduit à un endettement à croissance exponentielle (…).
Alternativement, le pays devra tôt ou tard réorienter les demandes et les offres intérieures de
manière à accroître les exportations et à diminuer les importations. » (Tremblay, 1983)
L’augmentation des exportations et des importations des PECO favorise leur intégration
dans le commerce international (graphiques 29 et 30). Mais même dans ces conditions
favorables, la dépendance aux capitaux étrangers reste grande (la balance courante est
toujours déficitaire) et le signe d’un processus de rattrapage économique toujours en cours.
« Malgré une bonne insertion commerciale des PECO dans le commerce mondial, ces pays
continuent à enregistrer des déficits courants chroniques qui sont nécessaires au rattrapage
du niveau de vie européen. Le financement de ces déficits s’est réalisé jusqu’à présent sous
une forme relativement favorable, puisque les IDE ont été largement majoritaires dans le
financement des balances courantes. Les PECO ont pu ainsi être relativement bien protégés
des situations de retournements brutaux des investissements de portefeuille. » (Aglietta, &
al., 2003)
Graphique 29. Evolution des exportations des PECO
20
Bulgarie
15
République
tchèque
Estonie
10
Lettonie
5
Lituanie
0
Hongrie
Pologne
-5
Roumanie
-10
Slovénie
-15
Slovaquie
2000
2002
2004
2006
2008
2010
2012
Source : Eurostat - Indice des prix, variation en pourcentage par rapport à la période
précédente, basée sur 2005=100.
123
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Graphique 30. Evolution des importations des PECO
Bulgarie
18
République
tchèque
Estonie
13
Lettonie
8
Lituanie
3
Hongrie
Pologne
-2
Roumanie
-7
Slovénie
-12
Slovaquie
2000
2002
2004
2006
2008
2010
2012
Source : Eurostat - Indice des prix, variation en pourcentage par rapport à la période
précédente, basée sur 2005=100.
La contrainte pour les pays en voie de développement réside dans la confiance que leur
accorde le marché financier international quant à leur capacité à s’endetter. « Une économie
où l'absorption interne excède la production interne peut être considérée comme étant dans
un état stable aussi longtemps que le déséquilibre de la balance extérieure est toléré par le
monde extérieur. Quand les ajustements ne peuvent plus être ajournés, ils se font au niveau
des individus et des organisations économiques. » (Daianu, 1994).
L’analyse des dernières crises de ces pays s’est souvent traduite par des pressions sur leur
balance de paiements qui se matérialisent sur le taux de change lors d’un ancrage de celui-ci.
« Les pays en voie de développement sont souvent définis comme des pays structurellement
à la recherche de l’épargne mondiale. Cette caractéristique s’accompagne naturellement
d’un recours massif à un financement extérieur, dont on a pu mesurer, ces dernières années,
le rôle qu’il a joué dans les crises financières. » (Ennajar, & al., 2005)
Mais la nature de l’endettement va aussi déterminer le degré de vulnérabilité d’un pays aux
tensions financières internationales. « Confronté à un déficit de sa balance des paiements
courants qu'il cherche à contrebalancer par des flux de capitaux privés, un pays peut,
théoriquement, recourir à plusieurs procédés de financement : attirer les investissements
124
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
directs étrangers, émettre des emprunts obligataires sur les marchés internationaux, obtenir
divers types de concours bancaires allant, par exemple, des crédits fournisseurs ou acheteurs
aux prêts à moyen terme pour financer les investissements de ses entreprises publiques.
Généralement, il sollicite, simultanément, tous ces canaux de financement, selon des
proportions variables d'un pays à l'autre et d'une époque à l'autre. » (Metais, 1979)
Toute la contrainte réside dans la détermination de la limite du déficit de la balance
courante. « En ce qui concerne les concepts sur lesquels s’appuyer, les déséquilibres externes
soulèvent trois grands types de questions. Un pays endetté est-il solvable alors que ses
déficits courants accroissent, plus ou moins rapidement, son niveau d’endettement ? Ces
déficits courants sont-ils soutenables compte tenu d’un ensemble d’hypothèses relatives à
leur régime macroéconomique ? Sont-ils éventuellement excessifs par référence à une norme
économiquement justifiée ? Chacun de ces concepts impose un degré de contrainte plus ou
moins fort en termes d’ajustement éventuel du solde courant. » (Doisy, & al., 2003)
Le processus de rattrapage économique, largement adopté aujourd’hui par les pays en voie
de développement, impose une restructuration de l’appareil productif. Ce dernier se
spécialise dans des secteurs pouvant bénéficier d’un avantage compétitif indispensable à
l’intégration du commerce mondial. Mais la principale vulnérabilité de ce processus repose
sur un endettement par le marché financier international afin de mener à bien ce projet en
parallèle à une amplification des interdépendances commerciales et financières.
Deux contraintes apparaissent ici : le poids de la dette qui hypothèque la stabilité financière
future du pays et la dépendance aux aléas du marché financier international pourtant de
plus en plus instable. La balance courante devra alors devenir positive pour espérer
rembourser les capitaux empruntés et se soustraire à l’instabilité du marché financier
international. « Un emprunt extérieur permanent est possible si les sommes empruntées sont
investies de telle façon qu'elles puissent autofinancer le service de la dette extérieure par une
amélioration marginale de la balance commerciale. » (Tremblay, 1983)
125
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
3. Le rôle prépondérant des IDE : entre attractivité, croissance économique et stabilité
macro-financières
Les IDE ont aujourd’hui un rôle décisif dans le processus de rattrapage économique des pays
en voie de développement. Ils permettent d’apporter les capitaux nécessaires à la
recomposition du tissu économique et offrent l’opportunité de transférer des technologies
et des compétences puisqu’il s’agit avant tout d’un investissement à vocation productive.
Cet état des faits explique la volonté d’attirer les capitaux étrangers afin d’une part, d’aider
les pays à se spécialiser dans des secteurs principalement orientés à l’international et d’autre
part, amplifiant le commerce externe, lui aussi facteur de développement économique. Mais
ces capitaux étrangers, sous forme d’IDE, mettent sous concurrence les territoires pour s’y
localiser.
Les raisons des choix de localisation territoriale des IDE ont été largement abordées par la
littérature existante. La classification de Cheriet et
Tozanli (Cheriet, & al., 2007) en
détermine trois (tableau 31).
Il y a tout d’abord l’approche des déterminants des IDE selon laquelle les IDE vont
s’implanter en fonction des comparaisons entre territoires (on peut parler d’avantages
comparatifs territoriaux).
La seconde approche comprend les stratégies d’implantation des firmes multinationales sur
les marchés et leur mode d’entrée, dans laquelle l’idée est de définir l’attractivité au regard
de l’entreprise et non plus du territoire.
La troisième approche s’inscrit dans une transversalité firmes/territoires où il s’agit de
comprendre quel est l’impact des IDE sur un territoire en termes de croissance économique
et comment un territoire peut pleinement profiter de ces IDE en termes de diffusion et
indirectement, d’attractivité.
126
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Tableau 31. Proposition de classification des travaux sur l’attractivité des IDE
Typologie :
Les déterminants des IDE.
Les stratégies d’implantation des FMN
sur les marchés et leur mode d’entrée.
les effets des IDE sur les entreprises et
les économies locales.
Auteurs cités :
(Mundell, 1957)(Catin & al, 2002)(Mudambi &
Navarra, 2002 in Bevan & al, 2004).
(Hymer, 1968)(Hennart & Reddy, 1997)(Hennart
& Park, 1993)(Kogut 1991)(Bevan & al, 2004).
(Stahler, 2005)(Mainguy, op. cit.)(Dupuch,
2004)(Catin & al, 2001)(Bouklia-Hassan & Zatla,
2001)(Blomström & Kokko, 1998)(Mainguy 2004)
Source : (Cheriet, & al., 2007)
Le besoin en capitaux étrangers pour les pays émergents s’explique par une amplification
favorable du processus de rattrapage économique. Il s’agit non seulement de l’apport
d’épargne faisant défaut au pays en voie de développement mais aussi de la diffusion
potentielle de compétences et de techniques. « L’intérêt porté aux investissements étrangers
dans les pays en développement est généralement justifié par de nombreuses attentes : leur
impact sur la croissance, les apports en ressources financières, l’ouverture aux marchés
internationaux (débouchés, approvisionnements, adaptation aux normes etc.), la hausse de
la productivité, l’amélioration des capacités de gestion locales et les transferts de
technologies. » (Mainguy, 2004).
La littérature reste largement favorable à cette interprétation. « L’investissement direct
étranger est un moteur de croissance et de transformation structurelle » (OECD, 1998). Il
permet la libre circulation des idées productives au-delà des frontières (Romer, 1993).
Plusieurs approches théoriques coexistent dans l’appréhension du phénomène des IDE sur la
croissance économique (tableau 32) : les théories de l’organisation industrielle, les théories
du commerce international et les théories de la croissance endogène (Nurbel, & al., 2008).
127
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Tableau 32. Les théories IDE-croissance économique
Théories :
Description et auteurs cités :
« La première approche traite explicitement du rôle des
Les théories de
investissements directs étrangers dans les transferts de technologie et
l’organisation
la diffusion de la connaissance, ainsi que de leur impact sur la structure
industrielle.
du marché du pays d’accueil (Dunning, 1993 ; Caves, 1996). »
« La deuxième permet de comprendre les motifs qui fondent
Les théories du
l’existence des IDE d’une part, les déterminants du choix de la méthode
commerce
de pénétration des marchés étrangers (exportations, licence, IDE)
international.
d’autre part (Ethier, 1986 ; Horstmann & Markusen, 1992). »
« La troisième approche, enfin, reconnaît en l’investissement direct
étranger un moyen de faire augmenter la dotation du pays d’accueil
Les théories de la
en capital humain, d’accélérer le changement technologique et de
croissance
diffuser la connaissance entre les nations (Grossman & Helpman,
endogène.
1995), avec au bout de la chaîne des effets de l’IDE l’augmentation du
taux de croissance de l’économie du pays d’accueil. »
Source : (Nurbel, & al., 2008)
Dans le cadre de notre problématique, nous nous focaliserons sur les théories de la
croissance endogène. Il est plus intéressant de comprendre les effets des IDE sur la
croissance économique d’un territoire, car ils justifient son attractivité. « L’originalité de
l’approche par la croissance endogène, par rapport aux théories de l’organisation industrielle
et à celles du commerce international, réside dans la reconnaissance explicite de ce que les
retombées de l’activité multinationale étrangère ne sont pas mécaniques. En d’autres
termes, ouvrir la porte aux firmes multinationales étrangères est une étape importante,
savoir tirer avantage de leur présence en est une autre. » (Nurbel, & al., 2008).
Les IDE vont avoir un impact positif direct à travers l’activité qu’ils vont créer et indirect par
les effets de diffusion aux autres acteurs et secteurs de l’économie. « Mis à part les effets
quantitatifs (créations d’emplois, contribution au PIB et aux exportations, etc.),
l’investissement direct étranger aurait aussi des effets qualitatifs plus durables (diffusion
technologique, diversification du tissu productif, etc.). » (Van Wunnick, 2008). L’impact
positif des IDE est aussi fonction du niveau de développement du territoire puisque celui-ci
ne sera pas toujours en mesure d’en tirer le maximum de bénéfices.
L’idée de ce travail repose sur la nécessité de mettre en avant les meilleures conditions
permettant d’amplifier les aspects favorables des IDE (Borensztein, & al., 1998). Mais quels
128
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
sont les éléments permettant de maximiser ce potentiel sur la croissance économique ?
« Ceci revient à identifier le jeu des complémentarités avec d’autres facteurs rendant les IDE
plus efficients encore en termes de croissance. » (Alaya, & al., 2009). La littérature existante
parle de « capacité d’absorption » d’un territoire au regard des avantages que peuvent
donner des IDE (Cohen, & al., 1990).
« La recherche d’un regard critique pertinent sur les retombées de la mondialisation pour les
économies d’accueil est fondée sur l’idée selon laquelle les investissements directs étrangers
entrants ne suffisent pas, en eux-mêmes, pour améliorer leur compétitivité. Des conditions
internes, auxquelles renvoie le concept de capacité d’absorption, doivent être réunies pour
donner naissance aux effets positifs attendus de l’activité des firmes multinationales
étrangères sur le territoire national. » (Nurbel, & al., 2008). La liste des variables, cumulées
avec l’afflux des IDE (tableau 33) permet de décrire les éléments nécessaires à mettre en
œuvre par les pays émergents pour amplifier les effets des IDE au maximum.
Tableau 33. Variables significatives issues de la littérature économique (non exhaustive)
Auteurs :
Variables :
(G. S. Becker 1962, 1975) ;
Un niveau de formation minimum (on parle d’effet seuil)
(Borensztein, De Gregorio &
afin de facilité l’acquisition puis le transfert des technologies
Lee, 1998) ; (Li & Liu, 2005) ;
et des compétences issues des IDE.
(Lipsey, 2000)
(Blomström, Lipsey & Zejan, Les impacts positifs ne peuvent se réaliser qu’entre les pays
1994)
développés.
(De Mello, 1999), (Lipsey,
Plus l’écart technologique est grand entre le territoire qui
2000) ; (Görg & Greenaway, émet et celui qui reçoit l’IDE, plus l’impact favorable des IDE
2004) ; (Xu, 2000)
diminue.
(Hermès & Lensink, 2003) ;
La robustesse du secteur financier apparait décisive afin
(Alfaro, Chandra, Kalemlid’optimaliser l’allocation des IDE.
Ozcan & Sayek, 2004)
(Balasubramanyam, Salisu
La stratégie d’intégration internationale avec notamment le
& Sapsford, 1996)
degré d’ouverture commerciale.
Source : Recherche auteur.
Les synthèses récentes sur ces questions (Levasseur, 2002) (Mainguy, 2004) (Nurbel, & al.,
2008) identifient des listes plus ou moins resserrées de catalyseurs des effets des IDE sur la
croissance. Elles incluent aux côtés de l’éducation et de la distance technologique,
l’ouverture commerciale, le développement financier et institutionnel, la stabilité
129
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
macroéconomique et les infrastructures qui participeraient à la définition élargie des
capacités d’absorption d’une économie.
Néanmoins, même s’il apparait pertinent de mettre en avant les effets potentiels des IDE au
regard des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers d’un pays, les résultats
empiriques de cette approche restent trop contradictoires pour faire émerger un véritable
consensus sur les variables les plus pertinentes. Certaines études mettent en avant une
relation positive avec les composantes du pays (Ram, & al., 2002) pouvant disparaitre au
regard de la sélection des variables de mesure. Au contraire, d’autres ne trouvent rien (Dutt,
1997) (Carkovic, & al., 2005). Pourtant, les pays en voie de développement centrent leur
stratégie de rattrapage économique sur la maximisation du potentiel des IDE. « Du point de
vue de la problématique du rattrapage technologique qui est encore d’actualité pour de
nombreux pays en développement, la capacité d’absorption est à la fois un instrument et un
objectif de politique économique en général, de politique de compétitivité, en particulier.»
(Nurbel, & al., 2008)
Outre la maximisation des effets des IDE, les territoires émergents développement leur
attractivités pour caper les IDE par le biais de différents dispositifs comme l’exonération
d’impôts, le versement de subventions, des aides à l’implantation, la création de zones
franches… (Michalet, 1999) (Rodrik, 2007) (Bailey, & al., 2002). «Attirer sur son territoire les
filiales des multinationales devient un mot d’ordre généralisé » (Michalet, 2007). Cette
relation entre commerce international et IDE devient alors le mode de développement qu’il
faut s’approprier à travers la mise en place de stratégies d’attractivités. « Les effets
bénéfiques du commerce extérieur et de l’investissement direct étranger (IDE) sur l’efficience
et la croissance sont généralement reconnus et l’on est largement d’avis que l’action des
pouvoirs publics devrait viser à réduire ou supprimer les obstacles à l’intégration mondiale
par le biais des échanges et de l’IDE » (Giuseppe, & al., 2003). Les PECO s’inscrivent dans
cette dynamique puisque leur niveau d’attractivité n’a cessé de croitre depuis 2002
(graphique 31).
130
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Graphique 31. Solde des flux de capitaux étrangers des PECO
30000
Bulgarie
25000
République
tchèque
Estonie
20000
Lettonie
Lituanie
15000
Hongrie
10000
Pologne
5000
Roumanie
Slovénie
0
2000
2002
2004
2006
2008
2010
Slovaquie
-5000
Source : Eurostat - Millions d'euros (à partir du 1.1.1999)/Millions d'écus (jusqu'au
31.12.1998).
Cependant, la politique d’attractivité qui s’opère induit des situations de mise en
concurrence entre pays. Il ne faut pas oublier qu’une entreprise s’installe sur un territoire
pour deux raisons : bénéficier d’un avantage compétitif et avoir accès au marché local
(Michalet, 1999). Cet effet de compétition entre territoires impose aux pays de satisfaire aux
exigences des IDE, notamment à celle de leur libre circulation, induisant ainsi des difficultés
lors de tensions financières.
« Se mettent en place progressivement des politiques de "séduction" qui indiquent que les
dirigeants de ces pays lient, à présent, les IDE aux dynamiques de croissance. La quasitotalité des PSEM tente aujourd’hui d’attirer les IDE par des "mesures incitatives" diverses et
variées comme la stabilisation macroéconomique, des politiques de change et la signature
d’accords de partenariat avec l’Europe, des mesures d’exonération fiscale ou la mise en place
de zones franches, des privatisations sanctionnant le désengagement de l’État de certains
secteurs d’activité, ou des réformes institutionnelles visant à l’amélioration du climat des
affaires. » (Alaya, & al., 2009)
La stabilisation macroéconomique et les politiques de change sont alors deux éléments
particulièrement importants dans le cadre de notre problématique puisqu’ils vont être à
l’origine de vulnérabilités pour ces pays lors de tensions financières internationales.
131
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Cette tendance se confirme dans les faits avec des modifications de la réglementation qui
deviennent toutes favorables aux IDE (CNUCED, 2001) « L’assouplissement considérable du
cadre réglementant les IDE a des incidences importantes sur les choix de localisation des
entreprises : il permet aux entreprises de rechercher les sites qui correspondent le mieux aux
différentes étapes de leur processus de production. Ceci est d’autant plus possible que les
échanges commerciaux sont eux-mêmes libéralisés et que les progrès en matière de
communication — notamment les nouvelles technologies de l’information et de la
communication — permettent de lier à moindre coût les différents sites de production. »
(Levasseur, 2002).
Au final, les firmes multinationales qui dirigeront leurs capitaux vers les territoires les plus
attractifs chercheront les avantages comparatifs au regard de différents critères qui ne
reposent pas seulement sur la minimisation des coûts de production. Différentes variables
importent également, comme le coût de la main d’œuvre, l’ouverture commerciale, la
fiscalité, la taille du pays… (tableau 34).
132
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Tableau 34. Variables explicatives de l’implantation étrangère dans un pays
Source : (Levasseur, 2002)
133
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Ces études mettent clairement en avant une diversité importante de variables sans pour
autant justifier de la prédominance de l’une sur l’autre, excepté celle de la taille du pays.
L’interprétation qui peut en être faite est qu’il n’existe pas d’éléments déterminants, au
niveau macroéconomique d’un pays, pouvant attirer les flux de capitaux. Il convient plutôt
de se pencher vers des secteurs d’activités pour établir une expertise et des compétences
plus fortes, indispensables à la réalisation d’attractivité ciblée et non globale. Les PECO ont
pu converser vers des spécialisations sectorielles précises pour attirer les IDE (tableau 35).
Tableau 35. Spécialisation sectorielle au sein des PECO
Source : Chelem, Natixis, en pourcentage du total – 2006
Cette orientation vers le commerce international s’est traduite par des spécialisations
tournées vers l’énergie pour certains (Lituanie, Estonie et Lettonie), l’agroalimentaire
(Lituanie et Lettonie), le textile (Roumanie et Bulgarie), le non ferreux (Bulgarie), la
mécanique (République Tchèque, Pologne et Hongrie), les véhicules (République Tchèque et
Slovaquie) et l’électronique (Hongrie). Ces éléments démontrent la matérialisation d’un
positionnement stratégique dans le commerce international.
La théorisation de la stratégie des firmes multinationales recoupe différents domaines :
l’économie internationale traditionnelle, l’économie spatiale l’économie industrielle,
l’économie de la firme (Krifa-Schneider, & al., 2007). Le but n’est pas de définir les courants
théoriques les plus enclins à expliquer le processus de la localisation d’IDE sur un territoire
mais plutôt de mettre en avant sa complexité, pour mieux l’appréhender. « Ces difficultés
134
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
d’appréciation se traduisent par une multiplication des scores et mesures de l’attractivité,
atténuant davantage la visibilité/crédibilité des politiques publiques d’incitation des IDE.
Dans ce sens, une réelle compétition entre les pays/territoires s’est instaurée à mesure que le
contexte international accordait aux FMN une puissance leur permettant de transcender la
souveraineté des États-nations. » (Cheriet, & al., 2007). La solution qui est adopté est de
présenter un ensemble de classification de l’attractivité d’un territoire afin d’en décrire la
complexité. Les travaux de Anne Musson (Musson, 2010) permettent, à travers un exemple
de 30 pays avec sept méthodes de classifications les plus médiatisées, d’illustrer la
divergence qui peut exister dans la détermination de l’attractivité d’un territoire par rapport
à un autre (tableau 36).
Tableau 36. Exemples de la diversité des classifications sur l’attractivité des territoires
Source : (Musson, 2010) - °Utilisation de l’étude d’Ernest et Young portant sur les capitales
économiques concurrentes à Paris.
135
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Le tableau ci-dessus reprend les classifications issues du rapport annuel du World
Competitiveness Yearbook de l’IMD de Lausanne où l’attractivité territoriale est définie
d’après la performance économique, l’efficacité du gouvernement, l’efficacité des affaires et
les infrastructures. Il y a aussi l’Indice Global Competitiveness Index de l’organisme World
Economic Forum qui repose sur l’efficience des institutions, des politiques publiques ainsi
que de la productivité de l’économie. L’institut AT Kearney, quant à lui, définit un Indice de
Confiance, utilisé pour faire ressortir l’attrait de certains territoires pour des dirigeants de
firmes multinationales, ainsi qu’un Indice de Globalisation où l’intégration économique, la
connectivité technologique et l’engagement politique sont déterminants. La Banque
Mondiale, à travers, notamment, les études de la CNUCED avec l’Indice de Performance des
IDE, travaille sur un indice d’attractivité au regard des flux d’IDE dont la publication se réalise
dans le World Investment Report. Le dernier indicateur résulte des travaux d’Ernst&Young
entre les pays européens.
L’ensemble de ces classifications mettent en exergue un point important : la divergence des
résultats. Il devient difficile pour les territoires émergents de mettre en place des politiques
d’attractivité sans véritablement savoir quels sont les éléments essentiels leur permettant
de devenir attractifs alors que les IDE apparaissent aujourd’hui déterminants dans
l’impulsion d’une dynamique de rattrapage viable à moyen terme par le transferts de
compétences et de technologies. Pourtant, la compétition entre territoires est forte. « Dans
ce cadre, la stratégie de la firme se fonde sur la recherche des facteurs de production les plus
compétitifs, leur organisation et leur mise en œuvre là où les conditions de production sont
les plus favorables. Ce type de logique conduit les FMN à comparer systématiquement les
avantages respectifs des territoires dans leur choix de localisation, sans hésiter à transférer
leur activité (ou un segment d’activité) ailleurs lorsque les conditions de rentabilité ne leur
paraissent plus requises. » (Krifa-Schneider, & al., 2007).
La dynamique de rattrapage, à travers un endettement qui se matérialise par des prises de
participation et la création de nouvelles structures avec les IDE, apparait vertueuse au regard
de la spécialisation sectorielle qu’elle induit et aux transferts de technologies et de
compétences qu’elle offre potentiellement. Cependant, même si cette ouverture
commerciale et financière sur le reste du monde semble amplifier le processus de rattrapage
136
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
économique, elle place les pays dans des conditions de forte vulnérabilité du fait de la
situation de concurrence qui se créée entre eux (notamment lorsque ces pays ont
majoritairement un ancrage de leur taux de change ainsi qu’un compte de capital libéralisé
afin d’attirer les capitaux étrangers). En effet, à la moindre tension financière, ces capitaux
peuvent quitter le pays, mettant alors sous pression la balance courante : le déficit
récurrent, a priori normal au regard du processus de rattrapage économique et induisant
alors des tensions sur le taux de change, peut se trouver lui-même annonciateur d’une crise
de change potentielle.
137
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Conclusion intermédiaire
Le choix de définir une stratégie de rattrapage économique reposant sur l’intégration au
commerce international à travers l’afflux d’IDE, comme source de financement mais aussi de
transferts de technologies et de compétences, est pertinent pour bon nombre de pays
émergents, et notamment les PECO. Comme le décrit le schéma 1, le processus de
développement économique suppose l’acquisition d’une spécialisation sectorielle axée vers
l’exportation qui va nécessiter des capitaux étrangers afin de restructurer le tissu
économique. Le déficit récurrent de la balance courante qui en découle va être compensé
par une attractivité de capitaux en IDE. La dynamique favorable qui s’y installe, comme par
exemple depuis le début du processus d’intégration à l’Union européenne puis celle en cours
à la zone euro pour les PECO, permet de renforcer les spécialisations afin d’espérer à terme
une diminution des déficits de la balance courante.
Schéma 1. Stratégie de développement économique
Diminution
déficit
structurel
balance
courante.
Spécialisations
sectorielles axées
vers les
exportations.
Déficit structurel
de la balance
courante
Dynamique
favorable.
Développement
tissu
économique afin
d'amplifier les
exportations
Attractivité
capitaux
internationaux.
La littérature économique semble attester favorablement ce processus de rattrapage
économique qui se traduit par une participation au commerce mondial et une intégration au
marché financier internationale. Cependant, son appropriation par la quasi-totalité des pays
138
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
émergents met en avant une situation de compétition. Il s’agit de mettre en place des
politiques d’attractivités territoriales qui se traduisent principalement par la libéralisation du
compte de capital et la neutralisation du risque de dépréciation monétaire (stabilisation du
taux de change).
Cette dynamique est pourtant source de difficultés car elle implique des vulnérabilités fortes
face à la capacité de régulation macroéconomique et macro-financière que ces pays peuvent
exercer. Sans justifier d’une dégradation de leurs fondamentaux, ils sont sujets à l’instabilité
financière internationale dont leur dépendance à travers l’octroi de capitaux étrangers ne
fait qu’amplifier le potentiel d’effets de contagion. L’incompatibilité entre libéralisation du
compte de capital et stabilisation du taux de change donne une place trop importante à
l’afflux des IDE qu’il convient de perpétuer jusqu’à l’amélioration du solde de la balance
courante dans le cadre du processus de rattrapage.
D’autres éléments externes aux pays émergents peuvent justifier un arrêt des flux de
capitaux à l’origine des premières tensions macroéconomiques et macro-financières qu’il
peut subir. Afin de conforter le postulat de la problématique de ce travail, il conviendra
d’approfondir cette démarche.
139
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Chapitre 4
Spécification de faits originaux : construction théorique pays développé/ays
émergent d’après l’hypothèse d’instabilité financière de Minsky.
Introduction intermédiaire
Le chapitre précédant met en avant les principales bases nécessaires à la compréhension des
vulnérabilités potentiellement induites par le processus de rattrapage économique des pays
émergents, de par des interdépendances source d’une amplification des effets de
contagions, qui deviennent difficilement maîtrisables au regard de l’instabilité de la sphère
réelle. Nous allons maintenant décrire l’élément perturbateur qui matérialisera les tensions
sur ces vulnérabilités apparentes. Tout d’abord se pose la question du comportement du
marché financier international afin de créer des tensions externes au pays émergent sans
pour autant se baser sur une dégradation de ses fondamentaux. Ensuite, il s’agira de
comprendre la dynamique des effets de contagion en interne, notamment par les canaux qui
y seront sollicités, pour aboutir à une crise de change pouvant être assimilée à la
modélisation de première génération.
L’approche théorique de l’Hypothèse d’Instabilité Financière (HIF) de Minsky (Minsky, 1974)
apparait comme le cadre d’analyse le plus pertinent de la problématique. Selon le postulat
de cette hypothèse, l’occurrence d’une crise financière n’est pas dû à la diminution du taux
de rentabilité (qui peut être assimilé à la non dégradation des fondamentaux
macroéconomiques et macro-financiers pour un pays) mais à celle du taux d’intérêt. Il est ici
l’élément perturbateur puisque la configuration de l’endettement devenu international
repose sur des échéances de court terme dans des pays développés (afin de minimiser le
coût du capital) pour investir sur des placements de moyen voire long termes dans des pays
émergent (afin de maximiser le taux de rentabilité). L’HIF de Minsky a pour habitude d’être
utilisé sur un même territoire vis-à-vis de la nature temporelle de l’endettement puis de
l’investissement. Il y a ici une recontextualisation théorique où l’endettement se fait dans un
pays développé afin d’investir ces capitaux dans un pays émergent par cet effet de levier. La
140
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
difficulté va résider dans l’explication de la variation à la hausse du taux d’intérêt alors que la
situation économique et financière reste favorable au contexte.
Conjointement à l’instabilité de la sphère financière et aux effets de contagion qu’ils peuvent
induire (notamment à travers l’HIF de Minsky), il faudra modifier les fondements de
l’interprétation des crises de change de première génération pour en expliquer le nouveau
cheminement. C’est surtout de leur besoin en capitaux pour palier leur manque d’épargne
pourtant facteur de la dynamique de rattrapage économique qui les rend dépendants à ces
aléas (cette caractéristique est appelée « le péché originel des pays émergents »). Le
processus de développement économique des pays émergents repose sur la restructuration
du tissu économique induisant des importations principalement de biens d’équipements,
sources d’un déficit récurrent de la balance courante. La double contrainte de libéralisation
du compte de capital et de stabilisation du risque de dépréciation monétaire pour bénéficier
de ces capitaux internationaux met les pays dans une situation de vulnérabilité forte. La
récurrence de ce déficit, légitime dans le cadre du processus de rattrapage, impose un afflux
positif de capitaux étrangers, même lors de périodes de tensions, afin d’assurer la stabilité
du taux de change.
La poursuite de ce raisonnement va s’illustrer par une démonstration empirique des faits
auparavant décrits théoriquement. La crise des Subprimes en est l’exemple type puisque
l’origine de la crise en prend la configuration. Il s’agira de reprendre les principaux agrégats
économiques et financiers afin de matérialiser la dynamique de la problématique dans
l’occurrence de la crise de change qui a pu se profiler au sein des PECO. Une approche
complémentaire sur l’histoire des PECO parachèvera cette description, d’une division
internationale socialiste du travail durant la période communiste à la situation actuelle au
sein de l’Union européenne. Cette démarche permettra de justifier des divergences actuelles
de ces pays quant aux effets des tensions internationales. Pourtant, l’impact historique de
ces spécialisations sectorielles fortement orientées par l’URSS a induit un héritage qu’il leur
faudra exploiter au maximum afin de sortir favorablement de la période de transition qui
s’en est suivie.
141
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
1. L’apport de Minsky comme élément d’explication au déclenchement de la crise
La logique de ce travail repose sur la nécessité d’apporter des réponses aux pays qui peuvent
succomber à un choc externe suite à une crise financière internationale, alors qu’ils
possédaient de bons fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers (forte
croissance économique, chômage contenu, secteurs d’activités productifs et concurrentiels à
l’international, …). Il convient donc de s’interroger plus sur les effets de contagion induits par
l’instabilité financière du reste du monde et de son impact sur l’économie en question que
sur le processus de création d’une crise financière ou sur son explication (déséquilibre
macroéconomique, bulle spéculative, restructuration sectorielle…). La dépendance aux
capitaux étrangers, indispensable pour lancer le processus de rattrapage économique des
pays en voie de développement, justifie l’amplification de vulnérabilités potentielles par les
canaux de contagion.
Un retour historique sur les éléments théoriques des raisons de l’instabilité financière
permet de faire émerger quelques interprétations intéressantes au regard de la
problématique. Il s’agit des effets induits par les politiques monétaires sur l’endettement,
l’inflation et le prix des actifs financiers comme éléments de perturbations de la sphère
financière.
Selon Wicksell (Wicksell, 1898), les politiques d’ajustements monétaires peuvent faire
diverger le taux d’intérêt de sa valeur naturelle. Plus le coût du financement de
l’investissement est faible, plus la masse monétaire augmente, ce qui, au final, offre un
contexte de tension inflationniste et d’endettement à la base de tensions financières.
Fisher (Fisher, 1911) s’intéresse au niveau d’endettement que peuvent induire les politiques
monétaires lors de tensions. Un taux d’endettement trop important des agents
économiques oblige les pays à vendre des actifs pour rembourser une partie de leurs dettes
ou de leurs intérêts. La généralisation de ce comportement entraine une chute des prix des
actifs qui, finalement, concourra à accroitre la valeur réelle de l’endettement (niveau
d’endettement donné pour des placements en perte de valeur), source de vulnérabilités
supplémentaires. Hayek (Hayek, 1931) définit alors deux types d’allongements du détour de
142
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
production : l’accroissement de l’épargne volontaire et la création monétaire pure. Dans le
deuxième cas, l’insuffisance de fonds prêtables en début de période sera compensée par
une création monétaire pure qui, en fin de période, ne sera pas validée comme source
d’accumulation mais détruite par la consommation. Il ne peut pas perpétuellement y avoir
de création monétaire (on parle de crédits purs) pour soutenir l’épargne (inflation,
endettement, …). « Dans ces conditions, toute injection non homothétique de monnaie
entraînera mécaniquement un déséquilibre temporaire de la production, qui se résoudra
dans l’inflation de telle sorte que la partition initiale de la production soit finalement
rétablie. » (Léonard, 1985)
L’approche de Minsky (Minsky, 1974) compléte celle de Keynes (Léonard, 1985) tout en
reprennant certains concepts d’Irving Fisher (Fisher, 1911) sur les niveaux d’endettement
induits par les politiques monétaires. Pour Minsky, en période de prospérité, les agents
économiques vont prendre plus de risques pour augmenter leurs profits (phase d’euphorie).
Afin d’accroitre la rentabilité de leurs investissements, ils vont s’endetter à court terme (les
taux sont plus faibles) et investir sur le moyen, voire long terme afin de maximiser les profits
(Mynsky, 1986). Lorsque les agents économiques commencent à s’apercevoir qu’il y a une
prise de risques trop importante, il y a une augmentation de la préférence pour la liquidité
au sens de Keynes (Keynes, 1955). Celle-ci se traduire alors par une augmentation du taux
d’intérêt et un rationnement du crédit (Arestis, & al., 2002) (Wolfson, 2002). La
configuration de l’investissement par endettement peut nécessiter le renouvellement des
crédits initiaux. Cette exigence va rendre instable la sphère financière en cas de choc de
liquidité et/ou de taux d’intérêt sans pour autant justifier une diminution des taux de
rentabilité des investissements.
Le schéma 2 décrit cette répartition de l’investissement à travers des structures
d’endettement pouvant devenir financièrement instables. Celles-ci vont évoluer en parallèle
à une situation économique favorable de l’hedge vers la spéculative puis la ponzi finance
jusqu’à ce que cette configuration deviennent trop risquée sans pour autant témoigner
d’une dégradation de la rentabilité financière.
143
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Schéma 2. Typologie des situations financières de Minsky
Typologie de la
structure de
vulnérabilité
financière des
investisseurs :
Hedge
Finance
« Les cash flows
espérés dépassent
les charges
financières à chaque
période. Comme les
revenus nets sont
positifs à chaque
période, l’espérance
de la valeur nette
actualisée peut
rester positive pour
les taux d’intérêt
élevés. »
Spéculative
Finance
« Les cash-flows courants sont inférieurs aux charges
financières courantes, mais le revenu courant excède
néanmoins les intérêts à pays de la dette. L’écart est
donc dû à l’impossibilité de rembourser des dettes
parvenues à échéances. Cette illiquidité peut rester
transitoire et la valeur actualisée des revenus futurs être
supérieure à la valeur actualisée des paiements futurs
(unité illiquide mais solvable). Les unités spéculatives
doivent continuellement reconduire leur dette afin de
rembourser les principaux. Leur valeur actuelle n’est
donc positive que pour des taux d’intérêt suffisamment
faibles ou une inflation suffisamment élevée. »
Ponzi
Finance
« Les cash flows ne suffisent à
payer ni les principaux ni les
intérêts. L’unité engagée dans ce
type de financement doit alors
accroître sa dette à chaque
période. Ce type de financement
n’est viable qu’en période
d’inflation éleée et de faibles taux
courts. Il ne s’agit pas cependant
nécessairement d’un financement
frauduleux. En effet, des projets
d’investissement dont la période
de gestation est très longue et le
seuil de rentabilité très élevé
peuvent
engager
les
entrepreneurs dans ce type de
situation
pour
le
moins
inconfortable. »
Source : (Brossard, 1998)
Par conséquent, l’approche de Minsky est bien la plus pertinente pour démontrer notre
problématique. Bien au-delà de l’explication des raisons potentielles de vulnérabilités de la
sphère financière, il faudra envisager cette approche par la suite dans un contexte
international. Contrairement à l’hypothèse de Keynes (Keynes, 1955), Minsky suppose que
l’émergence de la crise n’est pas le fruit d’une diminution des taux de rentabilité mais le
résultat d’une augmentation des taux d’intérêt, mettant en difficultés le secteur financier de
par la configuration qui s’est installé. « Chez Minsky, la bascule dans la crise est quasiexclusivement due à la hausse du taux monétaire de l’intérêt, (…) la variabilité des gains
financiers prospectifs, leurs transformation en pertes en capital, autrement dit la crise
financière et son articulation avec la crise d’accumulation qui se traduira par une régression
de l’investissement productif, ne tiennent qu’au fil ténu de la hausse du taux monétaire de
l’intérêt. » (Léonard, 1985).
Il n’y a donc pas de dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers
comme éléments justifiant les tensions, postulat dans lequel notre problématique s’inscrit.
144
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
La raison de l’augmentation des taux d’intérêt se doit d’être explicitée afin de comprendre la
démarche de Minsky et celle de notre travail. Cette variable est l’élément clé dans la
dégradation de la structure d’endettement de la sphère financière. Pour les keynésiens
auxquels Minsky s’apparente, le taux d’intérêt est endogène à l’économie. Ses variations
sont alors le fruit de la configuration qui va s’exprimer au regard des variables réelles de
l’économie. Cependant, Minsky suppose qu’un rationnement des réserves ne peut conduire
qu’à une augmentation des taux d’intérêt. Il suit alors la logique Wicksellienne (Wicksell,
1898) selon laquelle la demande est plus forte que l’offre, ce qui induit une augmentation
du taux d’intérêt. Il s’agit d’une approche monétariste où le niveau de l’offre de monnaie
détermine le taux d’intérêt. Or, il y a un problème de paradigme, puisque les postkeynésiens
supposent que la monnaie est endogène au système et qu’elle est déterminée seulement
par la demande (Léonard, 1985) (King, 1996) (Lavoie, 1997) (Mouakil, 2006).
Dans ce contexte, comment le taux d’intérêt peut-il varier à la hausse puisqu’il est fonction
de la préférence pour la liquidité qui elle-même ne peut augmenter qu’en cas d’anticipations
négatives ? Il convient de proposer une alternative afin d’expliquer comment le taux
d’intérêt varie à la hausse tout en restant dans une logique d’instabilité financière
postkeynésienne. Celle-ci doit convenir à la théorisation de notre problématique, à savoir la
non dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers donc des taux
de rentabilité.
Keynes (Keynes, 1955) en mettant en avant la notion de préférence pour la liquidité des
agents économiques, a biaisé la logique classique et néoclassique selon laquelle la monnaie
ne servait que d’intermédiaire à des échanges (Say, 1861). Les agents économiques
pourraient refuser de consommer ou d’épargner une partie de leur monnaie afin de
satisfaire quatre objectifs pouvant varier suivant les anticipations des agents (motifs de
transaction, de précaution, de financement et de spéculation) (Keynes, 1955). La demande
effective (consommation des salariées et investissement des entreprises) va alors
déterminer le niveau d’emploi et de production puisqu’il n’y a plus reconduction de la
richesse vers la production mais conservation de celle-ci en tant que liquidité par une
thésaurisation possible. Ainsi, les investissements vont aussi être fonction des effets
d’anticipations futurs, qui détermine alors le niveau de demande effective actuelle.
145
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Le courant postkeynésien, qui se caractérise par l’approfondissement des apports de Keynes
(Mouakil, 2006), va tenter de poursuivre cette interprétation. Minsky va s’y inscrire, se
qualifiant de keynésien financier. Son originalité sera de définir la monnaie tant en terme de
stock que de flux. « Concevoir l’économie capitaliste comme un ensemble de bilans et de
relevés d’opérations interdépendants, reconnaitre que les postes des bilans créent des flux
monétaires à travers le temps et intégrer ensemble les modifications de bilan avec les flux de
revenus. » (Minsky, 1996). La monnaie sera stock puisqu’elle va être détenue en tant qu’actif
le plus liquide dans un monde incertain (principe de la préférence pour la liquidité et des
effets d’anticipation de Keynes). On s’assure de sa solvabilité vis-à-vis de ses engagements
par la réduction de l’incertitude lors de son stockage (Minsky, 1991). La monnaie sera un flux
indispensable au financement de l’investissement. De nombreuses modélisations tenteront
de reprendre cette interprétation (Lavoie, & al., 2001-2002).
Ces deux caractéristiques de la monnaie, pour Minsky, se font dans un environnement qui a
évolué. Le début de cette mutation a pu commencer avec la crise de 1966 aux USA qu’il
considère comme l’ère de la fragilité financière (Minsky, 1986) (Wray, 1999). Le processus de
libéralisation et de déréglementation a détruit la distinction entre économie d’endettement
et économie de marchés financiers. La monnaie est régulée par la demande et non par
l’offre. En effet, d’après Minsky, les innovations financières permettent d’augmenter la
circulation de la base monétaire et de la masse monétaire. De nombreux auteurs vont
travailler sur les intuitions de Minsky (Dymski, & al., 1992)(Papadimitriou, & al., 1997). La
création de titres financiers, à travers des effets d’innovation, va permettre de faire circuler
de la liquidité de manière à accroitre la quantité de financement. Il y a alors contournement
de la création monétaire de la Banque Centrale. Ces innovations sont principalement
utilisées pour financer des investissements par l’endettement.
Le contexte de la libéralisation financière internationale, comme il a pu être développé
auparavant à travers l’ouverture des comptes de capital et l’impact que cela peut avoir sur la
stabilisation des taux de change de nombre de pays émergents, va renforcer d’autant plus
cette tendance. L’augmentation ou la diminution de la masse monétaire lors de ses flux avec
l’étranger grâce à la libéralisation des marchés de change confortent cette interprétation.
Les travaux de Minsky s’inscrivent dans une volonté de stabiliser une économie devenue
146
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
instable par la configuration financière actuelle (Minsky, 1986). La situation présente rend
toujours pertinente cette volonté de stabilisation du marché financier.
Cette configuration de l’endettement cumulatif (hedge, speculative et ponzi finance) peut
nécessiter le renouvellement des crédits initiaux, rendant instable la sphère financière en cas
de choc de liquidité et/ou de taux d’intérêt. « Lorsque le financement de l’économie est en
partie assuré par hausse de la vitesse de circulation de la monnaie, il se produit une réduction
du rapport liquidités/titres qui implique un plus grand risque de voir se produire des ventes
de titres contagieuses et une chute brutale des prix d’actifs. » (Brossard, 1998). Le schéma 3
décrit clairement le processus d’Hypothèse de l’Instabilité Financière de Minsky.
Schéma 3. L’Hypothèse d’Instabilité Financière de Minsky (1974 )
Comportement
spéculatif des
acteurs financiers.
Augmentation du
profil de risque des
investisseurs.
Endettement à court
terme pour investir à
moyen voire long
terme.
Rupture à un moment (choc
interne, externe, prise de
conscience collective...).
Phase d’euphorie
(perspective de
croissance forte).
Elément
perturbateur
Cette exigence va
rendre instable la
sphère financière.
Endettement de
court terme
implique le
renouvellement des
crédits initiaux.
Augmentation
du taux
d’intérêt et
Vulnérabilité
renforcée par la rationnement
du crédit.
configuration de
l’investissement.
Augmentation
de la
préférence
pour la
liquidité.
L’explication des postulats de Minsky, notamment la variation du taux d’intérêt dans un
contexte économiquement favorable, va poser de nombreux questionnements au sein
même de la pensée postkeynésienne. Deux courants de pensée coexistent (Mouakil, 2006).
147
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
D’un côté, il y a les structuralistes (Pollin, 1991) qui se rapprochent des idées de Minsky, qui
regroupent Pollin (Pollin, 1991), Palley (Palley, 1994) (Palley, 1996) et Wray (Wray, 1995). De
l’autre, les horizontalistes qui se rapprochent des idées de Kaldor (Moore, 1988), regroupant
Lavoie (Lavoie, 1992) (Lavoie, 1995) et Moore (Moore, 1991) (Moore, 1994). Dans l’intérêt
de la compréhension de la problématique de ce travail, il convient de décrire les principaux
points de discordances de ces deux courants. Ils vont permettre d’expliquer les variations à
la hausse du taux d’intérêt dans une phase d’euphorie, élément indispensable à l’occurrence
des pressions internationales.
Les structuralistes de Minsky vont avancer que seule la masse monétaire est endogène et
vont à l’encontre des autorités monétaires qui ne sont pas totalement accommodantes
(graphique 32).
Graphique 32. Représentation des interprétations monétaires des structuralistes
Source : (Mouakil, 2006)
Le graphique 32 en illustre l’évolution. Les courbes I, II et III décrivent l’impact des
différentes politiques monétaires restrictives de la Banque Centrale sur le taux d’intérêt où
celui-ci augmente au regard de la contraction de la liquidité. Lorsque le taux d’intérêt
s’accroit, il devient de plus en plus intéressant de diminuer les liquidités oisives afin de
profiter de cette rémunération (justifiant l’amplification de la circulation de la monnaie). La
courbe, d’abord horizontale, ne va pas tout de suite devenir verticale. La vitesse de
148
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
circulation de la monnaie ne pouvant pas augmenter à l’infini, les innovations financières (les
contrats de réméré et l’essor du marché des fonds fédéraux pour Minsky, les flux de
capitaux mondiaux pour nous) vont prendre le relais afin de maximiser l’utilisation de la
monnaie. Au regard de l’efficacité limitée de la politique monétaire restrictive, la Banque
Centrale va de nouveau interagir où la courbe va se déplacer de I à II puis à III et ainsi de
suite. « Il apparait de cette manière un palier horizontal (a-b) caractérisant la période durant
laquelle l’innovation institutionnelle se propage » (Mouakil, 2006).
Quant aux horizontalistes de Kaldor, autant la masse monétaire que la base monétaire sont
endogènes. La Banque Centrale et les banques commerciales restent toujours totalement
accommodantes. Pour autant, cela ne signifie pas qu’elles sont passives puisque le taux
d’intérêt va permettre de définir une contrainte de solvabilité (graphique 33) « L’offre de
monnaie est infiniment élastique (par rapport au taux d’intérêt), ou plutôt elle ne peut pas
être distinguée de la demande de monnaie. » (Kaldor, & al., 1981)
Graphique 33. Représentation des interprétations des horizontalistes
Source : (Mouakil, 2006)
Les structuralistes vont aussi généraliser le concept de préférence pour la liquidité des
banques commerciale. « L’augmentation de l’offre de monnaie dans l’économie se traduit
par une dégradation des principaux ratios de liquidité des banques et des emprunteurs qui
149
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
entrainerait en retour une augmentation de la préférence pour la liquidité des banques d’où
des taux d’intérêt de plus en plus élevés facturés aux emprunteurs. » (Mouakil, 2006).
L’hypothèse d’instabilité financière de Minsky est définie ici comme une pro-cyclicité du
levier d’endettement de l’ensemble des acteurs économiques. Les horizontalistes refusent
ce lien entre augmentation de l’offre de monnaie et dégradation du levier d’endettement
qui est à l’origine de l’amplification de la préférence pour la liquidité et qui se matérialise par
le niveau du taux d’intérêt. La préférence pour la liquidité est un concept largement
subjectif, dont la modulation de la préférence n’est pas automatique lors de l’augmentation
des risques, surtout si l’on est dans une phase d’expansion (anticipations futures optimistes).
L’approche de Minsky apparait dès lors incompatible avec le principe de demande effective.
En effet, Minsky semble négliger « le paradoxe de la dette » de Kalecki. Selon cet auteur,
l’endettement n’est pas systématiquement source d’augmentation de vulnérabilités
financières (diminution de la solvabilité de l’agent économique) puisque l’endettement peut
en retour accroitre la demande et donc engendrer les profits susceptibles d’augmenter les
fonds propres des agents économiques. Dans ces conditions, une augmentation de la
préférence pour la liquidité qui conduirait à une hausse du taux d’intérêt, comme le
supposent les structuralistes, n’a pas lieu d’être.
L’originalité que nous apportons, dans le prolongement du courant structuraliste, est
d’intégrant la Banque Centrale comme l’un des acteurs économiques interagissant de façon
endogène sur la demande de monnaie. Cette interprétation va permettre d’expliquer la
relation de cause à effet sur le taux d’intérêt. Les structuralistes, et notamment Minsky,
décrivent la Banque Centrale selon ses deux rôles, celui de « Big Bank » qui consiste à laisser
chuter (sans les contrôler) les taux d’intérêt lors de période de crise et le rôle de gestion de
la masse monétaire, imposant aussi la variation de ce même taux d’intérêt.
Se pose alors la question de savoir comment accomplir ces deux rôles, a priori
contradictoires mais ayant la même variable pour intervenir, le taux d’intérêt. Pour les
horizontalistes, il n’y a pas de dilemme entre gestion de la politique monétaire et préteur en
dernier ressort. La Banque Centrale peut tout à fait « resserrer » sa politique monétaire,
150
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
mais pour eux, cela ne signifie pas qu’elle va rationner les réserves. Ce n’est pas parce que la
Banque Centrale est accommodante que le contrôle des taux d’intérêt lui échappe. Ainsi, les
horizontalistes considèrent le taux directeur comme une variable exogène et visualisent
l’offre de monnaie Banque Centrale comme étant parfaitement élastique à ce taux.
A l’opposé de cette interprétation horizontaliste, il est supposé que la Banque Centrale n’est
jamais totalement accommodante. Le taux directeur n’est pas exogène comme pourraient le
décrire les horizontalistes mais il reflète une certaine endogénéité qu’il convient de définir.
Dans le contexte actuel de mondialisation avec un processus déjà largement avancé de
libéralisation et de dérégulation, les Banques Centrales n’ont plus les moyens d’encadrer
« par la force » les flux monétaires. Il s’agit d’insister sur le degré de pouvoir des Banques
Centrales. Elles contraignent moins les agents économiques à travers la régulation de la base
et de la masse monétaire qu’elles influencent leurs comportements par la variation de leurs
taux directeurs.
On peut dès lors comparer la Banque Centrale à une « agence de notation spécifique »
puisqu’elle est indépendante, publique et normalement neutre vis-à-vis de l’ensemble des
agents économiques. C’est la variation du taux directeur qui va alors informer les agents
économiques qui ne sont pas obligés de passer par elle pour se refinancer en période de
forte croissance économique. Mais son rôle de préteur en dernier ressort lui permet, en
parallèle à des prises de décisions sérieuses, d’assoir sa capacité d’influence.
On peut alors supposer une « endogénéisation » de la Banque Centrale à l’économie afin de
la considérer comme un agent économique « particulier ». Puisqu’elle n’a pas les moyens de
déterminer la quantité de monnaie à mettre à disposition mais plutôt une capacité à
influencer le degré de préférence pour la liquidité, elle influence les anticipations au regard
de son statut d’agence de notation particulière mais aussi par son rôle de préteur en dernier
ressort qui donne de l’importance à son interprétation.
A la suite de tous ces éléments, on peut maintenant expliquer la dynamique de l’occurrence
de l’instabilité financière de Minsky. Les schémas 4 et 5 vont les reprendre en décrivant le
rôle essentiel que peut jouer une Banque Centrale.
151
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Schéma 4. Lors d’une période de spéculation positive
Une prise de risque qui
peut apparaitre logique
puisque les perspectives de
rentabilités présentes et
futures sont fortes.
La préférence pour la
liquidité diminue,
nous sommes dans un
contexte
d’anticipations
favorables.
Les taux d’intérêt
entre les institutions
financières et les
agents économiques
diminuent.
La Banque Centrale
peut être
éventuellement
accommodante et
suivre cette tendance
en diminuant ses taux
directeurs.
Les agents économiques
prennent de plus en plus de
risques en s’endettant sur le
court terme pour investir sur
le moyen voire le long
terme.
Schéma 5. Renforcement de la période de spéculation positive : l’euphorie
Nous supposons que les taux de rentabilités présents
mais aussi futurs restent attractifs (logique de l’HIF de
Minsky, le déclenchement de la crise se fait par la
structure de financement et non par une dégradation
des taux de rentabilité).
On suppose que le taux d’intérêt entre agents
économiques et institutions financiers est
toujours faible (la préférence pour la liquidité
est toujours faible).
La phase de spéculation positive
devient de plus en plus forte.
Cette période de spéculation quelque peu
excessive va induire une source potentielle
d’inflation.
La Banque Centrale est ici dans l’un de ces deux
rôles (stabilisation de la masse monétaire). Elle va
avoir de l’influence par sa neutralité (public,
indépendante…) mais aussi par son second rôle de
preteur en dernier ressort.
La Banque Centrale, qui n’a pas le pouvoir
de réguler les flux monétaires par la force, va
tenter d’informer les agents économiques
du caractère potentiel de l’augmentation de
l’inflation.
On suppose que l’inflation n’est pas
obligatoirement présente mais la
Banque Centrale suppose qu’il y a un
risque.
Deux effets vont alors surgir au regard du comportement changeant de la Banque Centrale.
Tout d’abord un effet sur la variation des taux d’intérêt induit par l’anticipation de l’inflation.
On suppose que dans les prévisions de rentabilité du capital, il peut y avoir des pertes
152
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
induites par l’effet d’inflation (rôle d’agence de notation de la Banque Centrale qui informe
sur ses prévisions). Cette anticipation va alors faire augmenter les taux d’intérêt entre les
agents économiques et les institutions financières (pour pallier le risque de l’inflation, les
prêts doivent être assortis de taux d’intérêt plus élevés). Il y a donc un calquage des taux
d’intérêt sur les taux directeurs par effet d’anticipation.
Le deuxième effet agit sur la contraction de la liquidité où il y a changement de rôle de la
Banque Centrale. L’augmentation des taux directeurs de la Banque Centrale induit
automatiquement son second rôle de préteur en dernier ressort. Même si l’économie réelle
n’a pas pour le moment de difficultés (nous sommes dans une phase spéculative positive),
les agents économiques et financiers anticipent qu’en cas de difficultés financières, ils
devront se refinancer par l’intermédiaire de la Banque Centrale à des coûts plus élevés. Ils
préfèrent donc diminuer leur endettement et garder des liquidités afin de se prémunir
contre tous risques. Ceci amène donc à une contraction de la liquidité, de la masse
monétaire mais aussi de la base monétaire (la préférence pour la liquidité augmente).
La description de l’hypothèse d’instabilité financière de Minsky a permis d’illustrer dans quel
cadre d’analyse théorique s’inscrit la problématique. La variation à la hausse du taux
d’intérêt résultant de la structure instable d’endettement des agents économiques
s’explique par le rôle que va jouer la Banque Centrale en tant qu’agent économique
influençant la sphère réelle. Même si celle-ci ne peut rendre exogène la masse monétaire,
puisque les innovations et la libéralisation financière ont offert l’opportunité de passer outre
cette instance, sa capacité d’influence lors de risque d’inflation peut suffire à provoquer une
rupture de la dynamique favorable alors que les taux de rentabilité étaient encore
acceptables.
On peut voir que le déclenchement d’une crise peut se réaliser sans dégradation des
fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers. Il s’agira alors de réinterpréter ces
nouveaux éléments au regard de notre cadre d’analyse, à savoir une intégration
commerciale et financière des pays émergents facteur d’amplification de l’interdépendance
et des effets de contagion.
153
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
2. Le processus de crise : mise en parallèle des modélisations de première génération
La problématique de thèse repose sur l’analyse du comportement d’un pays en voie de
développement doté de bons fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers mais
soumis aux impacts d’une crise financière internationale (choc externe) issue d’un ou de
plusieurs pays développés qui se transforme en crise domestique auto-entretenue. L’idée
est de mettre en avant qu’un pays avec de bons fondamentaux macroéconomiques peut
entrer en crise au regard de la vulnérabilité potentielle qui s’instaure à travers sa dynamique
de rattrapage économique en parallèle à une structure instable de l’investissement
international (principalement par la nature de l’endettement). Il convient de matérialiser
cette dépendance aux vulnérabilités financières internationales (à l’aide d’une configuration
à la Minsky) qui se manifeste par des pressions sur le taux de change du pays en voie de
développement.
Les vulnérabilités potentielles des pays en voie de développement ont déjà été évoquées
(partie 2 chapitre1). Le choix d’axer le rattrapage économique, à travers des IDE, sur des
spécialisations sectorielles basées vers l’exportation induit des fragilités fortes aux tensions
financières potentielles externes. Cette insertion au commerce international impose de
déréglementer le compte de capital, source d’attractivité devant permettre aux IDE de se
localiser librement dans ces pays. Mais la nécessité de stériliser le risque de change pour les
investisseurs étrangers conduit à stabiliser la monnaie de ces pays à une devise de référence.
Ainsi deviennent-ils dépendants de la situation financière internationale (risque de fuite des
capitaux mettant sous pression leur taux de change) sans pour autant témoigner, au regard
de la problématique, de vulnérabilités apparentes de leurs fondamentaux. Le déficit
récurrent de leur balance courante apparaissant normal lors d’un processus de rattrapage
économique justifie l’obligation d’attractivité des IDE afin de maintenir l’ancrage.
Le chapitre 2 de la 1ere partie a pu illustrer les multiples raisons pouvant justifier de la fuite
de capitaux à travers les modélisations de première, seconde et troisième générations. Il
convient ici d’expliquer la dynamique des tensions financières internationales qui vont
impacter le pays émergent à travers ces vulnérabilités potentielles. Il s’agira de quantifier,
non pas la qualité des fondamentaux macroéconomiques et macro-financières, puisque nous
154
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
réfutons leur dégradation comme élément justifiant de l’occurrence d’une crise, mais plutôt
les effets de contagion induits par cette situation de dépendance aux capitaux étrangers.
Le comportement spéculatif des acteurs financiers internationaux, dans le cadre de la
libéralisation des flux, engendre une augmentation des risques, notamment par effets de
contagion, sur la sphère financière internationale. L’originalité du raisonnement réside dans
l’utilisation d’une approche de Minsky (Minsky, 1974) dans un contexte où les effets de
contagion y sont déterminants (contagion financière à travers les canaux du taux d’intérêt et
de la liquidité) entre un pays développé et un pays en voie de développement.
L’endettement à court terme (afin de réduire le coût du capital) des agents économiques
internationaux dans le pays développé est destiné à investir à moyen, voire long terme, dans
le pays en voie de développement (afin de bénéficier de taux de rentabilité plus élevé).
Ceci induit une vulnérabilité importante pour le pays d’accueil des capitaux, sans pour
autant témoigner d’une dégradation de ses variables macroéconomiques et macrofinancières. Cependant, une telle vulnérabilité n’a jamais été véritablement analysée dans un
contexte international (à plusieurs pays) et, surtout, il n’y a jamais eu de modélisation pour
tenter de réaliser des tests économétriques, mis à part les travaux de Taylor et O’Connell
(Taylor, & al., 1985) et Downe (Downe, 1987) qui reprend les bases du modèle de Taylor et
O’connell.
L’approche de Minsky n’a été développée que dans le cadre du territoire national américain
(Taylor, & al., 1985) (Downe, 1987). Des travaux ont pu reprendre son approche mais il n’y a
pas eu de réalisations économétriques dans un contexte international et plus
spécifiquement entre des pays développés et émergents dans le cadre de l’Union
européenne (Alves, & al., 2000) (Schroeder, 2002) (Arestis, & al., 2002) (Amann, & al., 2006)
L’augmentation des taux d’intérêt et la contraction de la liquidité dans le pays développé,
propre à l’Hypothèse d’Instabilité Financière de Minsky, va imposer aux agents économiques
internationaux de rapatrier les actifs placés dans le pays en voie de développement
puisqu’ils n’auront plus l’opportunité de renouveler leurs crédits nécessaires au
remboursement de ceux arrivant à échéance. Ce rapatriement des capitaux, rendu possible
155
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
par la libéralisation des comptes de capital du pays en voie de développement, va induire
des pressions sur l’ancrage du taux de change au regard du déficit récurrent de la balance
courante, un déficit apparaissant néanmoins logique dans le cadre d’une dynamique de
rattrapage.
Il va donc y avoir des pressions sur le taux de change du pays en voie de développement qui
peut s’assimiler à une crise de change de première génération à la Krugman (Krugman, 1979)
par une diminution inquiétante des réserves de devises. La dynamique de la crise, par un
effet de contagion des canaux financiers, ne s’apparente pas à une dégradation des
fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers du pays en voie de développement
mais avant tout à une dépendance financière au pays développé, ce qui renforce
l’interprétation initiale.
La dynamique de l’Hypothèse d’Instabilité de Minsky sera ici interprétée dans une
configuration de l’endettement et de l’investissement au niveau international. La crise est ici
le fruit d’une régulation qui se réalise afin de répondre à des tensions qu’il n’a pas été
possible soit d’envisager soit d’appréhender comme le chapitre 1 de la 1ere partie a pu le
mettre en avant. Dans le cadre de cette problématique, la crise va mettre en difficulté
certains agents économiques qui vont devoir adopter des comportements pouvant
provoquer des effets de contagion auprès du pays en voie de développement au regard des
vulnérabilités qu’il aura pu matérialiser, non pas en terme de dégradation des fondamentaux
macroéconomiques et macro-financiers mais surtout en terme de degré de dépendance et
de contagion à la structure de l’endettement devenue international.
Le schéma 6 met en avant le processus de réalisation de la crise qu’il va convenir de
développer.
156
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Schéma 6. Impact d’une contagion financière internationale dans la
dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers
Pays développé
étant à l’origine
d’une crise.
Une crise peut être considérée comme un mécanisme de régulation face à la nécessité
de répondre à des contraintes devenues incontrôlables (surinvestissement, mauvaise
anticipation, incapacité à mettre en œuvre des solutions appropriées, …)..
A l’origine, la crise peut être cantonnée à un secteur spécifique.
Des effets de contagion s’exercent au sein même du pays
développé.
Canal des échanges commerciaux et des
prix intérieurs (via la demande).
Pays en voie de
développement.
Canal des taux d’intérêt dans un système
de change fixe asymétrique.
Canal de la liquidité dans un système
interconnecté.
Canal des interdépendances
d’interprétation des informations.
Canal de la concurrence des fonds
d’investissements.
Contagion
financière par ces
2 canaux.
Crise financière qui dégrade
les fondamentaux
macroéconomiques pour
entrer dans un cercle
vicieux de crise
économique.
Canal des arbitrages entre les marchés
nationaux et les risques pays.
La transmission du choc externe va se réaliser à travers la sphère financière internationale
puisqu’elle repose sur une configuration de l’endettement et de l’investissement devenu
mondiale. Il s’agira alors d’étudier deux canaux financiers prépondérants, plus
particulièrement pour les PECO, dans l’effet de contagion du choc (schéma 7). Le canal des
taux d’intérêt dans un système de change fixe asymétrique (l’adhésion à l’Union européenne
mais aussi celle en cours à la zone euro indiquent une stabilisation voire même un ancrage
des taux de change avec les PECO) ainsi que le canal de la liquidité dans un système
interconnecté (la dynamique de rattrapage économique des PECO a amplifié les flux
d’investissements étrangers ayant principalement pour origine l’Europe occidentale).
Ces canaux sont d’autant plus significatifs que l’adhésion à l’Union européenne s’est faite
sous condition de la libéralisation du compte de capital (Directive Européenne, 1988). A
travers ces deux canaux financiers, une dépendance s’exerce et peut se matérialiser par des
périodes d’attraction puis de répulsion, dont l’instabilité financière internationale sera
l’élément perturbateur.
157
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Schéma 7. Les canaux significatifs au regard de la problématique de thèse
Canal
des taux d’intérêt dans un
système de change fixe
asymétrique :
Canal de la liquidité dans
un système interconnecté :
L’adhésion à l’Union européenne mais
Les flux d’investissements de l’Europe
aussi celle en cours à la Zone euro
occidentale vers l’Europe centrale et
indiquent un ancrage des taux de
orientale, à travers la dynamique de
change entre ces pays. Le canal du taux
rattrapage économique des PECO,
d’intérêt est donc indéniablement
justifient la prise en compte du canal de
significatif dans des effets de contagion
la liquidité.
financière.
Les modélisations dites de premières générations (Krugman, 1979) (Flood, & al., 1984)
déterminent les éléments responsables de l’occurrence d’une crise financière à travers la
diminution des réserves de change induite par une dégradation des fondamentaux
monétaires, pour ensuite disparaitre totalement et rapidement lors de la fuite généralisée
des capitaux (schéma 8). Ici, la baisse des réserves s’explique par le déficit récurrent de la
balance courante qui était auparavant compensé par l’afflux de capitaux étrangers sous
forme d’IDE. Or, on s’inscrit dans des vulnérabilités seulement potentielles en termes de
dépendance et d’effets de contagion à travers la structure d’endettement vouée aux
investissements internationaux.
La perte de confiance, se confirmant lors de l’épuisement des réserves, va être à l’origine
d’une attaque spéculative soudaine réduisant à néant la totalité des réserves alors restantes.
Il n’y a pas ici de variables macroéconomiques et macro-financières justifiant la dégradation
des réserves de change.
Flood et Garber (Flood, & al., 1984), ont distingué la situation d’avant crise de celle d’après
crise en y introduisant un prix d’équilibre du taux de change défini de « shadow price »
158
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
(Salant, 1983). Les agents économiques auront le même comportement que dans les
modélisations de première génération de Krugman (Krugman, 1979) ainsi que Flood et
Garber (Flood, & al., 1984). Ils vont spéculer lorsqu’ils anticiperont une source de gains ayant
pour origine la différence entre le niveau du taux de change fixé par le gouvernement et le
« shadow price », autrement dit le niveau d’équilibre.
Les spéculateurs auront un comportement rationnel puisque, même sans dégradation des
fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers du pays émergent, la fuite des
capitaux justifiée par l’Hypothèse d’Instabilité Financière de Minsky (Minsky, 1974) va
mettre le taux de change sous pression. La matérialisation de la crise, lors de l’éclatement de
l’ancrage, peut être source de gains.
Schéma 8. Dynamique des modélisations de 1ere génération
Contexte :
Intérêt à la
problématique :
Les modèles
fondateurs :
• Les modélisations de première génération traduisent un déséquilibre sur le marché de la
monnaie domestique : inflation causée par un déficit budgétaire ou/et par un excès de
crédits domestiques qui rentre en conflit avec la contrainte d’un stock limité de réserves
de devises nécessaires à assurer l’ancrage (fixe ou partiel) du taux de change.
• L’impact d’un pays développé sur un pays émergent va se traduire par un retrait des flux
d’investissements du pays développé, source de création monétaire dans le pays
émergent, donc d’inflation.
• Flood et Garber (1984) : supposent la Parité des Taux d’Intérêt (PTI) non couverte ;
Cette divergence est pourtant fondamentale pour nous (HIF de Minsky).
• Krugman (1979) : n’impose pas cette contrainte de PTI. Nous allons donc l’utiliser dans
cette modélisation.
Le timing de la crise reste toujours problématique, comme dans les premières, secondes et
troisièmes générations de crises de change, au regard de la multitude de variables qu’il
conviendrait de sélectionner. Même si Kaminsky a pu en énumérer 103 (Kaminsky, & al.,
1998), dans le cadre de notre problématique, il s’agirait de se focaliser sur le degré de
dépendance amplifiant les effets de contagion financière entre pays émergents et pays
159
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
développés (variables qui ne sont pas véritablement comptabilisées encore aujourd’hui dans
le cadre des crises de change comme nous l’avons dit dans le chapitre 1 partie 1).
A partir du moment où la source de l’occurrence de la crise du pays émergent est définie, à
savoir la configuration de l’endettement des agents économiques internationaux, il devient
difficile pour ces pays de la réguler puisqu’elle n’est pas de leur ressort comme nous l’avons
déjà dit dans le chapitre 1 partie 1. La modélisation de première génération a pu être
précurseur sur la dynamique de la rupture d’un taux de change lors de la fuite de capitaux.
Les deuxièmes et troisièmes générations de modélisation viendront redéfinir des raisons de
fuites généralisées des capitaux. Ici, il s’agit non pas de tenter de réexpliquer l’occurrence
d’une crise de change, la dynamique de la 1ère génération le fait amplement, mais plutôt de
recontextualiser la situation de vulnérabilité qui s’inscrit au regard de la sphère financière
internationale en parallèle à des dynamiques de rattrapage économique des pays
émergents.
Le schéma 9 représente l’interaction entre les modélisations de premières générations
associées à l’Hypothèse d’Instabilité Financière de Minsky dans le cadre d’un pays développé
et d’un pays émergent.
Schéma 9. Modélisation des spécificités de la problématique
Le comportement spéculatif
des acteurs financiers
internationaux, dans le cadre
de la libéralisation des flux,
engendre une augmentation
des risques (HIF 1974) .
L’impact sur le taux
de change va alors
affecter la
dynamique du pays
émergent de la
même manière
qu’une crise
traditionnelle de
1ere génération.
Modélisation de
1ere génération
associée à l’HIF
de Minsky.
Le déficit récurrent de la balance courante,
induit par le processus de rattrapage
économique, n’est plus compensé par les
flux d’IDE mettant sous pression la stabilité
du taux de change.
160
En cas de choc financier
international, la
vulnérabilité fondamentale
se localise alors dans le
processus de contagion
(contagion par le canal du
taux d’intérêt et par le
canal de la liquidité),
impactant l’ancrage du taux
de change du pays
émergent lors de la fuite
des capitaux étrangers
rendue possible par la
libéralisation du compte de
capital.
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Le profil des pays émergents répondant à notre problématique présente des caractéristiques
qu’il peut convenir de lister afin de rappeler la pertinence de s’inscrire dans les
modélisations de première génération. Elles incluent le déficit récurrent du compte courant,
les flux de capitaux puissants vecteurs d’IDE ainsi qu’un ancrage fixe ou partiel du taux de
change. La dynamique de rattrapage économique induit un processus d’importations
nécessaire à l’industrialisation du territoire se concrétisant par un déficit de la balance
commerciale et indirectement de la balance courante.
En période d’attractivité, les flux d’IDE vont largement compenser ce déficit. Alors qu’en
période de fuite généralisée des capitaux, il ne le sera pas, il sera en revanche à l’origine de
la diminution mécanique des réserves de change. Le déficit de la balance courante n’est
viable (à l’origine seulement), que par l’attractivité du territoire au regard des capitaux
étrangers qui s’y localisent. L’importance de ces flux est déterminante dès le début du
processus de rattrapage économique. La nature de l’ancrage définit le degré de vulnérabilité
potentiel des pays émergents lors d’une fuite généralisé des capitaux. Un ancrage fixe
devient d’autant plus difficilement tenable en situation de tensions.
Ces éléments, dans le cadre du nouveau contexte financier international, permettent de
lister les spécificités qui apparaissent déterminantes dans la concrétisation de cette nouvelle
forme de crise de change, lors de son occurrence (tableau 37).
Tableau 37. Les spécificités de la problématique de thèse
La responsabilité des acteurs internationaux est cruciale.
La libéralisation des capitaux rend tout comportement spéculatif global.
La finance n’est pas neutre vis-à-vis de la sphère réelle.
La notion de vulnérabilité est à conceptualiser en termes de dépendances qui vont se
matérialiser en termes d’effets de contagion.
Les effets de contagions financières sont primordiaux.
L’interconnexion entre le système de production et le système financier à travers
l’endettement international assure la pertinence de cette approche.
La modélisation qu’il conviendra de réaliser se devra de reprendre ces éléments sans pour
autant avoir l’ambition de créer une nouvelle génération. Il s’agira de réutiliser certains
161
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
éléments qui apparaissent déterminants dans la concrétisation de l’occurrence d’une crise
de change au regard des vulnérabilités potentielles reflétant le nouveau contexte financier
international.
162
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
3. Matérialisation du phénomène de crise dans les PECO : un processus en deux étapes
Les PECO ont des caractéristiques structurelles qui nous poussent à les adopter dans le cadre
de cette problématique : passé socialiste sous l’emprise de l’URSS puis processus de
libéralisation et d’intégration à l’UE (en 2004 et en 2007) puis à l’Union Monétaire
européenne (actuellement en cours). La période de transition des PECO, de l’économie
planifiée à l’économie de marché, s’est réalisée par une intégration économique et
financière internationale à travers l’amplification de leurs attractivités notamment vis-à-vis
de l’Europe occidentale (processus de délocalisation et perspective de croissance forte de
ces nouveaux marchés émergents).
La dynamique de développement économique s’est faite à travers l’attractivité des IDE avec
des spécialisations vers des secteurs porteurs à l’exportation comme il a pu l’être décrit dans
le chapitre 1 de la partie 2. Cette ouverture commerciale et financière s’est réalisée dans le
cadre d’une implication de plus en plus forte à l’Union européenne où de véritables
éléments de dépendances financières ont pu se matérialiser entre pays développés et pays
émergent de cette zone. L’adhésion à la zone communautaire a été conditionnée par une
libéralisation des flux financiers, économiques et monétaires. La relative bonne dynamique
de ces pays justifie l’hypothèse de fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers
robustes alors que les vulnérabilités potentielles en termes de dépendance par des effets de
contagion n’ont cessé de s’amplifier.
Les travaux déjà réalisés sur ces pays n’utilisent pas la même approche que la nôtre puisqu’il
y est toujours question de la responsabilité du pays dans l’occurrence d’une crise
(Brüggemann, & al., 2002) (Carriello & al., 2006) (Cartapanis, & al., 1999) (Kittelmann, &al.,
2006) (Krkoska, 2000) (Ötker, & al., 1994) (Schardax, 2002)
Ce travail souhaite s’appuyer sur une étude empirique concernant les PECO qu’il conviendra
de sélectionner suivant les aspects suivants : bons fondamentaux macroéconomiques,
libéralisation des flux financiers, économiques et monétaires et forte interdépendance avec
des pays développés dans une situation d’instabilité financière internationale induite par un
endettement à la Minsky. L’idée est de justifier empiriquement la problématique auparavant
163
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
décrite théoriquement. Ainsi, les PECO légitimement sélectionnés sont ceux ayant intégré
l’UE en 2004 et 2007 (Bulgarie, Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Pologne, République
Tchèque, Roumanie, Slovaquie, Slovénie) puisqu’ils abordent l’ensemble de ces
caractéristiques.
On peut donc distinguer deux étapes, comme la problématique a pu le décrire. La première
dans laquelle les anticipations sont positives dans le cadre de l’intégration en cours à l’Union
européenne et à l’Union Monétaire Européenne avec ancrage fixe/partiel du taux de change,
se matérialisant par un afflux de capitaux étrangers (schéma 10). Cette situation permet de
compenser le déficit récurrent de la balance courante. Le processus de rattrapage favorable
de ces pays induit une diminution des risques à la source d’un endettement de plus en plus
instable, comme peut l’exprimer l’Hypothèse d’Instabilité Financière de Minsky. Il en ressort
un endettement de court terme dans le pays développé pour investir ces capitaux à moyen
et long termes dans les PECO.
Schéma 10. Dynamique de l’étude : étape 1 (spéculation favorable)
Stabilisation voire ancrage fixe du taux de change.
Pays développé étant à
l’origine d’une crise.
Endettement de plus en
plus instable par les
agents économiques
internationaux dans le
pays développé à court
terme afin de diminuer
le coût de financement.
Processus
d’attractivité
internationale.
Afflux de capitaux étrangers.
Pays émergent.
Investissement à moyen
terme et long terme par
les agents économiques
internationaux dans le
pays émergent afin de
maximiser les profits.
La seconde étape résulte d’un élément perturbateur dans le pays développé, à l’origine
d’anticipations négatives qui vont faire fuir les capitaux étrangers dans le pays émergent
164
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
(schéma 11). C’est le début de la crise financière globalisée mettant sous pression la stabilité
du taux de change du pays émergent.
Schéma 11. Dynamique de l’étude : étape 2 (choc financier externe)
Stabilisation voire ancrage fixe du taux de change .
Pays développé étant à
l’origine d’une crise.
Difficultés des agents
économiques
internationaux à se
refinancer, imposant la
liquidation de leurs
investissements.
Dynamique d’un choc
financier externe.
Fuite des capitaux étrangers.
Pays émergent.
Crise financière qui
dégrade les
fondamentaux
macroéconomiques pour
entrer dans un cercle
vicieux de crise
économique.
Le besoin de liquidités
des agents économiques
internationaux va
induire une fuite des
capitaux ne permettant
plus de stabiliser le
déficit récurrent de la
balance courante.
La création d’une instabilité financière va d’autant plus se renforcer que les PECO doivent à
terme intégrer la zone euro, induisant des taux de change fixe voire fortement stabilisés
(afin de diminuer le risque de change). En cas d’augmentation des taux directeurs de la zone
euro par la Banque Centrale européenne (pour quelque raison que ce soit), le taux de court
terme en euro va augmenter et la liquidité disponible se contracter. Les agents économiques
internationaux vont voir la rentabilité nette des placements dans les PECO diminuer
(l’augmentation du coût du capital induit une diminution de la rentabilité nette des
placements), source de perte d’attractivité des PECO.
De plus, la difficulté de se refinancer, de par la contraction de la liquidité, va imposer aux
investisseurs de vendre des avoirs afin d’obtenir de la liquidité, induisant la chute de la
valeur des actifs des PECO. L’ensemble de ces contraintes sur le taux de change (perte
d’attractivité des placements, nécessité de vendre des actifs, déficits récurrents de la
balance courante propre au processus de rattrapage des PECO) met sous pression l’ancrage
165
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
du taux de change. La crise de change alors induite peut s’apparenter aux modèles de
première génération à la Krugman (Krugman, 1979) si les réserves de devises ne sont pas
suffisantes pour assurer l’ancrage.
Des faits empiriques viennent confirmer la viabilité de l’hypothèse qui est proposée ici. Les
raisons qui vont pousser les investisseurs de la zone euro (des pays développés) à investir
vers les PECO (pays émergents) s’expliquent par des taux de rentabilité plus élevés dans les
PECO (graphique 34). Il va donc y avoir une forte attractivité des capitaux de la zone euro
vers l’Europe centrale et orientale. Quant à l’endettement, les taux d’intérêt de la zone euro
sont largement plus faibles que ceux des PECO (graphique 35). Les investisseurs
internationaux vont donc s’endetter en euro et à court terme afin de diminuer le coût du
capital (graphique 36).
Graphique 34. Différence du taux de rentabilité du capital entre les PECO et la zone euro
4,00
Bulgarie
3,00
Rép Tchèque
2,00
Estonie
1,00
Hongrie
0,00
Lituanie
-1,00
Lettonie
-2,00
Pologne
-3,00
Roumanie
-4,00
Slovénie
Slovaquie
Source : Eurostat et calculs auteur.
Le taux de rentabilité par pays est calculé à partir de l’Excédent Brut d’Exploitation du pays
divisé par la Formation Brute de Capital Fixe de ce même pays. Le graphique met en avant
des tendances intéressantes. La première tendance générale indique une relative
amélioration des taux pour l’ensemble des PECO au regard de la rentabilité du capital de la
zone euro (différentiel qui augmente). La seconde correspond au découpage en deux sous166
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
périodes : de 1995-2000, certains pays comme la Slovénie, la Roumanie, la Bulgarie et la
Hongrie ont des différentiels négatifs alors que pour la période 2000-2008, nous n’avons
plus aucun pays avec des différentiels négatifs (les plus mauvais suivent 0%). Enfin, la
troisième tendance révèle la disparité des taux entre les PECO. Une majorité ont un
différentiel entre 0 et 1% alors que la Roumanie, la Hongrie et la Pologne peuvent aller
jusqu’à 3%.
Graphique 35. Comparaison taux d’intérêt (à 3 mois) de la zone euro et des PECO
16
Bulgarie
14
Rép Tchèque
Zone euro
12
Estonie
10
Hongrie
8
Lituanie
6
Lettonie
4
Pologne
Roumanie
2
Slovénie
Slovaquie
Source : Eurostat
La description de ce graphique démontre que pour une même échéance d’endettement (ici
à 3 mois), le taux d’intérêt de la zone euro est toujours plus faible en comparaison des taux
d’intérêt des PECO. Une petite divergence est à relever pour la République Tchèque. On peut
expliquer cette situation par un risque-pays bien plus fort dans les PECO que dans la zone
euro.
167
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Graphique 36. Comparaison entre les taux d’intérêt à différentes échéances en euro
5,5
5
Jour le
jour
4,5
1 mois
4
3,5
3 mois
3
2,5
6 mois
2
12 mois
Source : Eurostat
L’analyse de ce graphique indique que le coût de l’endettement en euro matérialisé à travers
les taux d’intérêt devient de plus en plus faible lorsque les échéances (au jour le jour jusqu’à
12 mois) diminuent. Cependant, il existe une relative corrélation entre tous les taux d’intérêt
(à la hausse comme à la baisse) qui impacte en même temps toutes les échéances
d’endettement.
Une présentation plus synthétique de la problématique dans le cadre particulier des PECO
est ainsi décrite à partir des schémas 12 et 13. Le processus d’intégration à l’Union
européenne puis à l’Union Monétaire européenne en parallèle au rattrapage économique de
ces pays a induit une structure économique et financière pouvant être qualifiée de
particulière. Les effets de dépendance, sources de contagion potentielle en cas de difficultés,
sont au cœur de l’interprétation de notre problématique.
168
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Schéma 12. La dynamique d’attractivité des capitaux des PECO : étape 1
Schéma 13. La dynamique de fuite de capitaux des PECO : étape 2
169
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
La récente crise des Subprimes permet d’illustrer, au titre de l’empirique, la dynamique qui a
pu être jusqu’à présent décrite sous une approche plutôt théorique. En effet, la situation
récente fait état de difficultés récurrentes suite à la crise financière internationale. Celle-ci,
mis à part des effets de contagions induits par des interdépendances financières
internationales fortes, n’a jamais mis en avant une vulnérabilité macroéconomique ou
macro-financière au sein des PECO, mis à part peut-être sur le niveau de leurs réserves de
devises nécessaires à la stabilisation de leur taux de change.
Notre problématique a l’opportunité de pouvoir être calée sur le cas concret des PECO,
d’une première période d’afflux massifs de capitaux étrangers qualifiée d’étape 1 prenant fin
pour donner suite à une deuxième période de fuite généralisée des capitaux définie d’étape
2. Les graphiques suivants témoignent de ce découpage entre deux périodes distinctes.
Graphique 37. Attractivité puis fuites généralisées des capitaux étrangers
110000
90000
Slovaquie
Etape2
Etape
1
Slovénie
Roumanie
70000
Pologne
Hongrie
50000
Lituanie
30000
Lettonie
Estonie
10000
République
tchèque
Bulgarie
-10000
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011
Source : Eurostat - Millions d'euros (à partir du 1.1.1999)/Millions d'écus (jusqu'au
31.12.1998).
A travers le graphique 37, les capitaux ont pu se localiser de plus en plus fortement au sein
des PECO depuis les années 2002 jusqu’en 2008 (étape 1). Ensuite, ils ont pu fuir de cette
zone géographique avec un retournement de conjoncture important de 2008 à 2009 (étape
170
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
2). Il y a donc bien eu un élément perturbateur à l’origine de ce retournement de
conjoncture défavorable à ces pays.
Graphique 38. Déficit récurrent du compte courant résultant du processus de rattrapage
économique
Bulgarie
10,00
Républiqu
e tchèque
Estonie
5,00
0,00
Lettonie
-5,00
Lituanie
-10,00
Hongrie
Pologne
-15,00
Etape1
Roumanie
-20,00
Etape2
-25,00
1990 1992 1994
1996 1998 2000 2002 2004 2006 2008
2010
Slovénie
Slovaquie
Source : Eurostat et calculs auteurs – compte courant en pourcentage du PIB.
Les comptes courants des PECO sont ici tous déficitaires depuis les années 1997 jusqu’en
2009, sauf peut-être pour la Slovénie en 2001, 2002 et 2003 (graphique 38). Cette situation,
qui traduit le processus de rattrapage économique de ces pays, les met dans une position de
vulnérabilité forte vis-à-vis des aléas du marché financier international lors des fluctuations
des capitaux. Il leurs faut constamment un afflux positif de capitaux afin de stabiliser leur
taux de change quelque soit la conjoncture économique du moment.
Lors de périodes favorables (étape 1), l’attractivité se fait sans difficultés. Alors que durant
les périodes de tensions internationales (étape 2), même si le processus de rattrapage
économique peut marquer une pause au regard du contexte actuel, la balance courante
reste déficitaire pour la majorité des PECO malgré une légère amélioration mais qui reste
insuffisante.
171
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Graphique 39. Impact sur la croissance économique des turbulences financières
internationales
Etape2
Etape1
Source : Eurostat - Millions d'euros (aux prix de l'année précédente)
Le graphique 39 est très intéressant car ils décrivent la dynamique de la croissance
économique des PECO lors de la période favorable (étape 1) puis lors de tensions financières
internationales (étape 2). Nous constatons que le retrait des capitaux à partir de 2008
impacte fortement la croissance économique puisqu’elle en devient même négative en
2009.
Le processus de contagion financière qui a pu être décrit auparavant se concrétise ici avec
un cercle vicieux se matérialisant par une chute de la croissance économique nationale.
Pourtant, avant les tensions financières internationales, il n’y avait pas de vulnérabilités
apparentes des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers dans les PECO.
172
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Tableau 38. Ancrage voire stabilisation des taux de change
Ecart-type des taux
de change avec l’euro
(2000 2010)
Bulgarie
République Tchèque
Nature officielle de l’ancrage
Currency board avec l’euro
Flottement administré
Currency board avec l’euro dans le cadre du
Estonie
MCE2 depuis juin 2004 et adoption depuis
janvier 2011
Hongrie
Flottement
Currency board avec l’euro dans le cadre du
Lituanie
MCE2 depuis juin 2004
Peg contre l’euro dans le cadre du MCE2
Lettonie
depuis mai 2005
Pologne
Flottement
Roumanie
Flottement administré
Adhésion au MCE2 en 2004 puis adoption
Slovénie
de l’euro en 2007
Flottement dans le cadre du MCE2 depuis
Slovaquie
2005 puis adoption de l’euro en 2009
Source : Eurostat, Natixis et calculs auteur.
Variation
nominal
Variation
réel
0,13
2,62
1,60
2,69
0,00
0,84
3,56
3,64
1,95
2,12
1,92
2,33
5,35
4,46
5,35
3,65
0,61
0,51
1,87
2,43
Le tableau 38 met clairement en avant la stratégie de stabilisation des taux de change de
l’ensemble des PECO, officiellement à travers un ancrage fixe ou officieusement par une
stabilisation de leur volatilité avec l’euro. Comme il a pu l’être décrit dans le chapitre 1 partie
2, la dynamique de rattrapage économique de ces pays repose sur l’attractivité d’IDE
nécessaire à financer la restructuration de leur appareil productif. L’adoption de ce même
processus par de nombreux pays en voie de développement les met en situation de
concurrence. Cette dernière sera à l’origine de la mise en place d’une politique d’attractivité
territoriale qui passe notamment par la neutralisation du risque de dépréciation monétaire.
Pourtant, comme les graphiques précédents ont pu le décrire, l’afflux de capitaux n’est pas
toujours possible, particulièrement lors de périodes de tensions financières internationales.
Le déficit récurrent de la balance courante va alors induire des pressions sur la stabilité du
taux de change pendant ces moments de tensions. Lorsqu’il n’est pas possible d’anticiper les
tensions financières pouvant conduire à une crise (comme dans cet exemple, bien que hors
de portée de la capacité de régulation des PECO), les pays vont devoir œuvrer pour tenter
d’atténuer les impacts sur le risque de rupture de la stabilisation de leur taux de change. Le
173
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
chapitre 2 de la partie 1 avait décrit les méthodes d’intervention des pouvoirs publics et des
Banques Centrales de ces pays pour contrer le risque de dépréciation monétaire.
Pour reconstituer les stocks des PECO, il est possible de jouer sur l’appréciation des taux
directeur, sur les réserves de devises ainsi que par l’endettement en devises étrangères des
pouvoirs publics. Toutes ces stratégies ont été utilisées par les PECO. L’augmentation des
taux directeurs a été mise en œuvre au risque d’accentuer la dégradation de la crise
économique qui se profile au sein de ces pays (graphique 40), d’accroitre l’utilisation des
devises de réserves (graphique 41) et finalement, aggraver l’endettement en devises
internationales pourtant plus difficile à obtenir au regard du risque de défaut grandissant sur
ces pays (graphiques 42).
Graphique 40. Les taux directeurs comme outil de régulation du taux de change
Bulgarie
15
Etape1
Etape2
13
11
République
tchèque
Estonie
Lettonie
9
Lituanie
7
Hongrie
Pologne
5
Roumanie
3
Slovénie
1
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011
Slovaquie
Source : Eurostat - Taux d'intérêt des banques centrales - Taux d'emprunt officiels.
174
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Graphique 41. Diminution des réserves de devises
70 000,00
Bulgarie
60 000,00
République
tchèque
Estonie
Etape1
50 000,00
Lettonie
Etape2
40 000,00
Lituanie
30 000,00
Hongrie
Pologne
20 000,00
Roumanie
10 000,00
Slovénie
0,00
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012
Slovaquie
Source : Eurostat - Millions d'euros (à partir du 1.1.1999)/Millions d'écus (jusqu'au
31.12.1998)
Graphiques 42. Niveau de risque souverain des PECO
Etape 2
Etape 2
Etape 1
Etape 1
55
Les graphiques 40, 41 et 42 témoignent de nouveau par des faits empiriques de l’occurrence
d’une crise sur le taux de change lors du phénomène de contagion des tensions financières
internationales. Jusque dans les années 2008, la période est favorable (étape 1) avec une
faible volatilité des taux directeurs, une amplification continue des réserves de devises et un
risque souverain quasi-nul. Ensuite, lors de l’émergence des tensions financières
175
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
internationales (étape 2), la stabilisation des taux de change devient difficile (graphique 43)
même avec l’utilisation des techniques de régulation décrites ci-dessus.
Graphique 43. Appréciation des taux de change
20,00
Etape2
15,00
Lev bulgare
Couronne
tchèque
Etape1
10,00
Forint
5,00
Litas
0,00
Lats
-5,00
Zloty
-10,00
Leu roumain
Source : Eurostat
L’augmentation du profil de risque des PECO, à partir de l’augmentation des vulnérabilités
d’interdépendance avec la sphère financière internationale, impose une amplification du
profil de risque des investisseurs internationaux ayant pu y localiser des capitaux. Même si
ceux-ci peuvent supporter l’augmentation de leurs taux d’endettement, induits par
l’augmentation des taux directeurs de la zone euro en terme de marge nette, ils vont avoir,
malgré tout, des difficultés à trouver de nouvelles liquidités nécessaires pour se refinancer
de par la nature court-termiste des échéances de leurs endettements au regard de
l’amplification du risque de leur profil (principe de l’Hypothèse d’Instabilité Financière de
Minsky décrit dans le chapitre 1 partie 2). Indirectement, ils devront vendre des actifs issus
de ces pays, soit pour obtenir de nouvelles liquidités, soit pour diminuer leur exposition au
risque souverain, ce qui amplifie la fuite des capitaux étrangers des PECO.
L’ambition de se focaliser sur les PECO a permis de matérialiser par les faits empiriques
l‘occurrence d’une crise dans ces pays sans pour autant justifier la dégradation de leurs
fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers. Au contraire, il a pu être mis en
avant que les interdépendances financières induites par une intégration internationale de
176
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
ces pays dans le cadre de leur processus de rattrapage économique ont été renforcées à
travers le processus d’intégration à l’Union européenne et à la zone euro. Un aspect
important a été soulevé : la récurrence du déficit de la balance courante de ces pays. Ce
déficit, légitime dans le cadre du processus de rattrapage, impose un afflux positif de
capitaux étrangers (même en période de tensions internationales), afin de stabiliser le taux
de change des PECO.
Les éléments précédant ont pu mettre en avant l’incapacité de s’assurer d’une attractivité
permanente des capitaux étrangers même si la qualité de la croissance économique des
PECO est bonne. Les possibilités d’intervention des Banques Centrales et des pouvoirs
publics, à travers l’augmentation des taux directeurs, l’utilisation des réserves de change et
leur capacité à s’endetter en devises étrangères apparaissent insuffisantes pour tenter de
lutter contre ces pressions. La seule alternative est l’aide internationale dont la Roumanie, la
Hongrie et la Lettonie ont bénéficié à cette période.
177
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
4. Caractérisation des phénomènes d’interdépendance et de contagion dans les PECO
Les PECO ont un passé commun important puisqu’ils font partie des pays ayant pu adopter la
planification lors de l’après-guerre pour ensuite rentrer dans une période de transition à la
chute du mur de Berlin en 1989 et se présenter aujourd’hui comme des pays de l’Union
européenne fortement intégrés à l’économie de marché. Les caractéristiques historiques de
ces pays ont créé un héritage d’interdépendances qu’il n’est pas possible d’effacer sans pour
autant renier de grandes diversités entre leurs territoires. L’analyse de ces dépendances, à
l’origine d’effets potentiels de contagion dans le cadre de notre problématique, se doit
d’être présentée plus en profondeur afin d’expliciter des comportements pouvant être
divergents entre les PECO lors de tensions internationales. « La globalisation financière a eu
comme conséquence une forte mobilité des capitaux sans coûts, sans délai et sans égard aux
frontières géographiques. La libéralisation financière, généralement non maîtrisée, que
certains pays de l’Europe de l’Est ont connue, les a rendus très vulnérables à l’effet de
contagion » (Ben Abdallah, & al., 2005)
L’occurrence d’une crise financière à travers l’amplification des effets de contagion a induit
une augmentation des vulnérabilités qui, à travers une structure de l’endettement
international instable, peut impacter des pays sans pour autant témoigner d’une
dégradation de leurs fondamentaux. La situation des PECO témoigne de l’amplification de
cette forme de vulnérabilité, à travers les effets de contagion, et non d’une dégradation de
leurs fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers. De récents apports
déterminent la contagion comme « shift contagion » ou « contagion pure » uniquement
(Forbes et Rigobon, 2000). L’idée ici n’est pas de prendre position sur ces aspects, orientant
la présentation des effets de contagion potentiels au sein des PECO avec les deux approches
aujourd’hui encore proposées. La première se veut non contingente aux crises. La contagion
y est décrite comme le fruit de l’influence mutuelle. On peut parler d’interdépendance
(Masson, 1998). La deuxième va plutôt se focaliser sur l’amplification des effets contingents
aux crises. Il s’agit d’effets de contagion qui se matérialisent exceptionnellement et
seulement pendant la période de tension (King, & al., 1990). On parle de « shift contagion »
(Forbes, & al., 2000).
178
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Au regard des caractéristiques historiques communes des PECO, les deux styles de
contagion, interdépendance d’avant crise et amplification lors de la crise, jouent pleinement
leur rôle lors des tensions financieres internationales. La littérature met en avant cinq
canaux potentiels de contagion (tableau 39) (Eichengreen, & al., 1996) (Kaminsky, & al.,
2000) (Forbes, & al., 2001) (Dornbusch, & al., 2000) (Dehove, 2003) (Dehove, 2004).
Cependant, dans notre problematique tous les canaux de contagion n’ont pas la même
importance. Certains apparaissent plus significatifs que d’autres.
Tableau 39. Enumération des différents canaux de contagion
Les différents effets de contagion :
Canal des échanges commerciaux et des prix intérieurs (via la demande).
Canal des taux d’intérêt dans un système de change fixe asymétrique.
Canal de la liquidité dans un système interconnecté.
Canal des interdépendances d’interprétation des informations et concurrence
des fonds d’investissement.
Canal des arbitrages entre les marchés nationaux et les risques pays.
Le canal des échanges commerciaux et des prix intérieurs est devenu fondamental pour les
PECO qui fondent leur rattrapage économique sur une spécialisation axée sur l’intégration
au commerce international. La nécessité de pallier le déficit de leur balance courante en
parallèle au processus d’acquisition de compétences et de technologie amplifiant le
phénomène de croissance justifie la sélection de ce premier canal. Le canal des taux
d’intérêt dans un système de change fixe asymétrique est lui aussi pertinent au regard de
l’ancrage des monnaies des PECO à la zone euro qui peut être considérée comme l’économie
centre. L’adoption de cette stratégie d’ancrage fixe témoigne d’une volonté de stériliser le
risque de change afin de devenir attractif. Le dernier canal significatif correspond à la
liquidité dans un système interconnecté que forme l’ensemble des pays fortement intégrés à
la finance internationale comme les membres de l’Union européenne.
Les canaux suivant vont plutôt être le fruit d’effets de contagion avant ou pendant les crises
financières internationales qui, au regard du mode de développement relativement similaire
179
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
de ces économies, vont globaliser les tensions individuelles à l’ensemble de la région. La
transmission d’information et la concurrence (canal des interdépendances d’interprétation
des informations et de la concurrence des fonds d’investissement) et celui de la répartition
par zone/pays des fonds d’investissements (canal des arbitrages entre les marchés nationaux
et les risques pays) seront les éléments qui activeront la diffusion et contribueront à
amplifier les pressions déjà présentes à travers les premiers canaux de contagion sans pour
autant en être les éléments déclencheurs.
Les pays en question que sont les PECO, sélectionnés dans le cadre de notre problématique,
ont adhéré au CAEM (Conseil d’Assistance Economique Mutuelle) lors de la période
soviétique puis à l’Union européenne en passant par une période intermédiaire qui peut être
qualifiée de transition (se pose néanmoins la question de savoir si cette période de transition
est finie ou non). L’intérêt de faire un parallèle entre ces deux modes d’échanges
internationaux est de faire ressortir les canaux commerciaux, d’intérêt et de liquidité qui
sont devenus complémentaires dans la stratégie de rattrapage adoptée aujourd’hui par les
pays émergents. Les spécialisations axées sur le commerce international (canal des échanges
commerciaux et des prix intérieurs) ne sont rendues possibles que par une libéralisation des
capitaux afin d’attirer des investissements étrangers (canal de la liquidité dans un système
interconnecté) mais elles nécessitent de stabiliser le taux de change afin de stériliser le
risque de dépréciation monétaire (canal des taux d’intérêt dans un système de change fixe
asymétrique).
Le CAEM été créé en 1949 en réponse au plan Marshall d’aide à la reconstruction proposée
par les USA à l’Europe. Il a intégré l’URSS, la Pologne, la Tchécoslovaquie, la Hongrie, la
Bulgarie et la Roumanie dans un premier temps pour ensuite y voir adhérer l’Albanie de
1949 à 1961 puis la RDA en 1950 ainsi que la Mongolie en 1962, Cuba en 1972 et le Vietnam
en 1978. Son rôle était de répondre aux contraintes économiques du moment. « Dans un
premier temps et dans le contexte d’après-guerre, il s’agit de favoriser le commerce extérieur
et les échanges entre les Etats dont les relations économiques se faisaient traditionnellement
plus avec l’Europe de l’Ouest qu’entre eux ou avec l’URSS. Puis, à partir de 1955, la
transmission communiste des Etats de l’Est étant effectuée, le CAEM est chargé d’organiser
une coordination des plans nationaux. » (Godard, 2011).
180
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Même s’il reste difficile, aujourd’hui, de définir le rôle du CAEM dans le cadre des échanges
intra-pays soviétiques, souvent à l’origine d’un processus de spécialisation sectoriel imposé
par l’URSS, de grandes tendances peuvent néanmoins être décrites ici afin d’illustrer la
complémentarité qui a pu en naitre. Le graphique 44 décrit cette tendance de poussée de
coordination entre les membres. « Les échangent résultent en fait d’une concertation dans le
cadre de la coordination des plans au niveau du CAEM. Ils font toujours l’objet d’accords à
long terme (cinq ans) conclus bilatéralement entre les Etats, et contingentés chaque année
en quantités physiques. » (Tiraspolsky, 2004)
Graphique 44. Evolution des exportations et des importations intra-CAEM
Source : (Slim, 1997)
Les échanges intra-CAEM, tant au niveau des exportations que des importations, ont
toujours été importants puisqu’ils varient de 50% à 65% du total des échanges de ses
membres jusqu’à son éclatement lors de la chute du mur de Berlin en 1989.
L’importance permanente des échanges durant la période soviétique a poussé les membres
du CAEM à amplifier leur intégration par le fruit d’une coordination des économies de tous
les secteurs apparaissant fondamentaux à l’époque : constructions mécaniques, sidérurgie,
métallurgie non ferreuse, industries du charbon, du pétrole et du gaz, industrie chimique,
181
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
industrie légère et agriculture (Martinowsky, 2004). L’idée était au final de se spécialiser par
pays afin d’augmenter la rentabilité des investissements. « Et comme aucun des pays
intéressés, en dehors de l’URSS, ne possédait des ressources suffisantes pour édifier à lui seul
une économie moderne complète, la question qui vient très rapidement à l’ordre du jour fut
celle de la spécialisation des productions par pays » (Martinowsky, 2004). On peut parler
d’une division internationale socialiste du travail (XVème session du Conseil, 1961), où une
comparaison pouvant être effectuée avec celle actuellement en cours au sein de l’Union
européenne. Les graphiques 45 et 46 décrivent la nature même de ces spécialisations à
l’exportation durant la période de planification.
Graphiques 45 et 46. Evolution des spécialisations à l’exportation des membres du CAEM
182
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Source : (Slim, 1997)
Les graphiques 45 et 46 mettent en avant des complémentarités fortes à travers ces
échanges commerciaux. L’URSS y apparait spécialisée vers la mise à disposition de
combustibles et de matières premières d’origine minérale (section 2) alors que les autres
partenaires vont plutôt fournir des machines, équipements et moyens de transport
(section1). Les problématiques soulevés ici sont les dépendances qui en découlent entre les
PECO avec l’URSS où « de grands pans de leurs économies sont étroitement rattachés à
l’appareil de production soviétique, par le biais
notamment de la coproduction. Leur
commerce est satellisé à 40% au moins. » (Tiraspolsky, 2004).
Même si le degré d’intégration commerciale des pays du CAEM apparait fort, il ne témoigne
pas véritablement de complémentarités potentiellement efficaces dans une répartition des
spécialisations régionales. L’organisation même du CAEM a pu faire apparaitre des
divergences entre l’efficacité économique et les choix politiques. « La section du plan
consacrée aux échanges mutuels précisera notamment, outre le volume et la composition des
livraisons, l’évolution des prix, les entreprises principalement responsables de la production
destinée à l’exportation, de même que celles auxquelles sont destinées les importations. »
(Lemoine, 2004).
183
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Dans ces conditions, les canaux de contagion commerciaux, conjointement à un ancrage
entre les monnaies et à une allocation des capitaux fixée par planification, rend difficile
toute tentative de définir leur potentiel de transmission. « Que représentent les concepts de
coûts, de valeur, de cours officiel et taux de change, d’équilibre de la balance commerciale,
de termes de l’échange dans des économies où le commerce extérieur, monopole d’état, est
planifié ? » (Tiraspolsky, 2004). Pourtant, l’impact historique de ces spécialisations fortement
orientées par l’URSS a induit un héritage pour ces pays qu’il leur faudra exploiter au
maximum afin de sortir favorablement de la période de transition.
La mutation des relations extérieures d’une économie planifiée à une économie de marché
libéralisée devra être mise en parallèle à la stratégie qui avait déjà pu être adoptée par ces
pays : celle des spécialisations sectorielles à l’exportation à travers des investissements
étrangers importants. « …le CAEM a fonctionné jusqu’à sa disparition de façon autarcique,
coupé du reste du monde par la non-convertibilité des monnaies, système de formation des
prix spécifiques et des barrières commerciales. Il était basé sur des accords de spécialisation
de la production entre pays membres. (…)» (Martinowsky, 2004). En plus de difficultés
communes souvent héritées des faiblesses du CAEM (tableau 40), des divergences fortes
entre pays apparaîtront. « (…) la caractéristique commune à leurs structures d’exportation en
1990 est la faible teneur en valeur ajoutée des productions exportés, comme par exemple les
vêtements et les meubles, qui font appel à un travail peu qualifié. Ces exportations ont
d’autres part un assez fort contenu en ressources naturelles (produits de l’agriculture,
matières premières, combustibles), et en énergie (produits intermédiaires de la chimie et de
la métallurgie). » (Leroy, & al., 1992)
Tableau 40 : Bilan du CAEM dressé par les économistes Est-européens
Le manque de technologies modernes.
L’inadaptation de la coopération et de la spécialisation.
La surconsommation industrielle en matériaux et énergie.
La détérioration simultanée des situations énergétiques dans tous les pays est-européens.
Les pénuries alimentaires absolues ou relatives.
Le manque d’organisation dans la production industrielle.
L’absence de coordination dans les relations économiques extérieures.
L’inadéquation des mécanismes de coopération aux exigences modernes.
Source : (Tiraspolsky, 2004)
184
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Le tableau 40 met en avant les limites qui ont mené à la désintégration du CAEM, obligeant
les PECO à se restructurer afin de palier ces lacunes. Certains points apparaissent plus
intéressants que d’autres, comme par exemple le manque de technologie modernes,
l’inadaptation de la coopération et de la spécialisation ainsi que de l’inadéquation des
mécanismes de coopération aux exigences modernes.
La chute du mur de Berlin en 1989 marque la fin de l’ère de la planification et le début de la
transition pour les PECO par un processus de libéralisation pouvant apparaitre brutal. « A
permis le succès d’un scénario « libéral-étatiste » dont les traits principaux s’observent dans
toute l’Europe centrale : une stratégie financière orthodoxe, un enchainement rapide de
réformes structurelles, qui crédibilise de lui-même les pouvoirs publics, enfin un renforcement
régulier de l’Etat de droit – respect de l’autorité de la loi, durcissement des droits de
propriété, discipline contractuelle. » (Sgard, 1997) La fin de l’ère soviétique impose aux PECO
la nécessité de poursuivre le développement de leurs exportations. Elles apparaissent en
cette période de crise comme une solution à l’accompagnement de la transition. « Ensuite,
l’exportation est, dans la crise économique qui accompagne la transition, un des moyens de
relancer l’activité. » (Leroy, & al., 1992).
Les spécialisations de ces pays ont dû s’adapter au nouveau contexte géopolitique. Pourtant,
leur tissu économique n’était pas « optimal » dans ce nouveau contexte de concurrence
internationale. Il s’est alors effectué une réallocation des exportations et des importations
entre les membres de la CAEM, notamment de l’URSS et intra-PECO vers l’Union
européenne comme peut le démontrer le tableau 41.
185
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Tableau 41. Evolution de la réorientation des échanges des PECO entre 1989 et 1991
° Annuaires statistiques nationaux et sources douanières. ¹ Hors ex-RDA. ²OCDE Statistiques
de commerce extérieur.
Source : (Leroy, & al., 1992)
La réorganisation de l’appareil productif a donné lieu à une allocation des marchandises
mettant en lumière les avantages potentiels des PECO non plus en fonction d’une
planification définie par les autorités soviétiques mais en fonction de la concurrence
internationale du libre marché. Les graphiques 47 mettent en avant des tendances
intéressantes : la nature des exportations vers l’Europe des 12 s’oriente principalement vers
des secteurs où le degré technologique n’est pas décisif. Il apparait évident que le retard
technologique engendré lors de la période soviétique explique cette situation. De plus, les
spécialisations dans les secteurs d’exportation traditionnels de ces pays ont pu se maintenir
dans une certaine mesure. « Cette augmentation des ventes aux pays occidentaux constitue
un des principaux résultats favorables des pays en transition. Si elle se maintient, elle peut
devenir un élément majeur de leurs perspectives de croissance, dans la mesure où la
poursuite des politiques restrictives pèsera sur la demande intérieure. » (Holcblat, 1992).
186
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Graphiques 47. Evolutions des spécialisations à l’exportation des PECO après 1990
Source : (Leroy, & al., 1992)
187
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Les derniers éléments de comparaisons des graphiques ci-dessus mettent en avant une
évolution entre 1990 et 1992. Il y a toujours de fortes spécialisations à l’exportation
intensive en main d’œuvre (notamment les vêtements en tissus pour la Bulgarie, la Hongrie
et la Pologne, les meubles pour la Hongrie, la Pologne et la République Fédérative Tchèque
et Slovaque ainsi que les chaussures pour la Hongrie, la Pologne et la République Fédérative
Tchèque et Slovaque). A cela, s’ajoute l’émergence d’une mutation du tissu industriel de ces
pays avec des évolutions positives vers le secteur automobile (Pologne, Hongrie et
République Fédérative Tchèque et Slovaque) ainsi que dans le matériel électrique
(République Fédérative Tchèque et Slovaque).
Mais l’existence de divergences fortes entre ces pays, qu’il convient d’expliquer par des
fondamentaux hérités de l’ère soviétique, a différencié les chances, notamment dans le
choix des spécialisations sectorielles imposées à chacun en parallèle à l’état de leurs
agrégats macroéconomiques et macro-financiers. « Concrètement, ce scénario libéral et
légaliste a conduit à une reprise de la croissance et de l’accumulation, en Pologne puis en
République tchèque ; il en va de même en Slovaquie et en Slovénie (…). La Hongrie montre les
mêmes tendances positives que ses voisins sur le plan de l’appareil productif et sur le plan
institutionnel (…) Enfin, si les républiques baltes (notamment l’Estonie), ainsi que la Croatie,
tiennent certes un discours économiques orthodoxe, il est sans doute trop tôt pour entériner
cette option théorique. » (Sgard, 1997).
Le graphique 48 met en avant cette divergence à travers des taux de croissance différents
lors de la période de transition de ces pays.
188
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Graphique 48. Evolution du PIB des PECO entre 1989 et 1998
Source : (Boeri, & al., 2002) 1989=100
Deux avantages comparatifs apparaissent clairement dans les PECO. Un coût de la main
d’œuvre bon marché et des spécialisations héritées du passé soviétique mais
potentiellement intéressantes pour des reconversions nécessitant un minimum de savoirfaire et d’infrastructures. Au regard de l’intégration en cours de ces pays à l’Union
européenne, se concrétisant par les accords de libre-échange dès 1992 (Accord de LibreEchange Centre Européen), ces pays sont aussi devenus de nouveaux marchés
potentiellement attractifs en terme non seulement de production mais aussi de demande. La
restructuration des PECO s’est alors accompagnée d’investissements étrangers massifs, et
principalement de l’Union européenne. « Les restructurations de l’appareil productif
nécessaires à la reprise de la croissance dans les PECO au cours des prochaines années
exigeront des investissements en équipements et en machines dont une partie devra être
importée. Elles s’accompagneront d’un déficit accru dans cette catégorie de produits qui
constitue déjà le principal solde négatif des échanges des PECO avec l’Ouest, à savoir les
machines et le matériel de transport » (Leroy, & al., 1992).
Déjà à cette époque, la stratégie de rattrapage économique basée sur des exportations par
l’attractivité des IDE qui a engendré un déficit de la balance courante et rendu
potentiellement ces pays vulnérables aux tensions financières extérieures, a vu le jour. « Ces
décisions d’investissement seront fonction non seulement des paramètres internes
189
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
déterminant leur rentabilité (évolution des prix, des coûts, du change) mais aussi des
perspectives des marchés extérieurs. Les investissements étrangers auront un rôle décisif, à la
fois en termes quantitatifs, car les ressources financières nationales sont clairement très
limitées, et en termes qualitatifs, car ils seront, pour ceux opérés par les grandes firmes au
moins, intégrés à des stratégies de long terme de délocalisation internationale de
productions. » (Leroy, & al., 1992).
Pourtant, à cette même période, il convenait de s’interroger sur la véritable portée de la
réallocation des exportations à travers l’octroi de capitaux étrangers (canal des échanges
commerciaux). Un processus de libéralisation des capitaux a pu être mis en place (canal de la
liquidité) en parallèle à une stabilisation des taux de change (canal du taux d’intérêt) afin de
garantir l’attractivité de ces territoires. L’accroissement de ces trois processus que sont les
spécialisations sectorielles à l’exportation, la libéralisation des flux de liquidité et la
stabilisation du taux de change ont été des vecteurs d’attractivité favorables aux capitaux
étrangers. Le tableau 42 confirme cette attractivité pour certains des PECO. Le processus n’a
cessé de s’amplifier jusqu’à aujourd’hui.
Tableau 42. Stocks des flux d’IDE au sein des PECO entre 1990 et 2008
Source : (Richter, 2009)
Néanmoins, pour certains économistes, la période de transition n’est pas terminée. Il
devient difficile de la séparer du processus d’intégration à l’Union européenne qui a
véritablement commencé au début des années 2000. La présentation de l’évolution des
spécialisations au sein des PECO, largement héritées du passé soviétique mais restructurées
190
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
à l’aide des afflux des IDE, a permis de relater l’importance de ces flux vis-à-vis des canaux
de contagion qu’ils ont pu amplifier.
La volonté d’augmenter l’attractivité de ces pays au regard des IDE, source de gains de
croissance considérables, s’est traduite par une libéralisation des comptes de capital des
balances courantes en parallèle à la stabilisation des taux de change à l’euro. Ces trois
canaux ont donc évolué conjointement pour parvenir à la configuration actuelle, source
potentielle de vulnérabilité aux tensions financières internationales mais aussi avec une
intégration commerciale finalement favorable des PECO (graphique 49 et tableau 43).
Graphique 49. Evolution production manufacturière des PECO
Slovaquie
1400
Slovénie
1200
Roumanie
1000
Pologne
800
Hongrie
600
Lituanie
400
Lettonie
Estonie
200
République tchèque
0
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011
Bulgarie
Source : Eurostat Indices du chiffre d'affaires (2005=100) (NACE Rév.2)
Tableau 43. Exportations par filière économique en 2006 des PECO (en % du total)
Source : Chelem, Natixis (en pourcentage du total – 2006)
191
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Cette orientation sur le commerce international s’est traduite par des spécialisations
tournées vers l’énergie pour certains (Lituanie, Estonie et Lettonie), l’agroalimentaire
(Lituanie et Lettonie), le textile (Roumanie et Bulgarie), le non ferreux (Bulgarie), la
mécanique (République Tchèque, Pologne et Hongrie), les véhicules (République Tchèque et
Slovaquie) et l’électronique (Hongrie). Ces éléments démontrent bien la matérialisation d’un
positionnement réel dans le commerce international mais, pour tous, issu de l’héritage des
spécialisations antérieurement imposées par l’Union soviétique.
192
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Conclusion intermédiaire
Le cheminement choisi ici a pour ambition de présenter des éléments théoriques, à travers
l’HIF de Minsky, pour ensuite les confronter aux modélisations de premières générations
dans l’occurrence d’une crise de change à l’origine de tensions financières internationales,
notamment au regard de la structure instable de l’endettement. La recontextualisation de
cette démarche d’abord théorique puis empirique, lors de la crise des Subprimes sur les
PECO en 2008, a permis de justifier la cohérence de l’approche réalisée. Le retour historique
des relations d’interdépendance entre les PECO et l’URSS tout d’abord puis vers l’Union
européenne a ensuite permis d’expliquer l’héritage des spécialisations sectorielles de ces
pays difficilement contournables dans leur nécessité de reconversion de leur tissu
économique.
De nombreux points se doivent d’être surlignés ici à la vue de la spécification de faits
originaux qui ont été nécessaires à la compréhension de la problématique.
Tout d’abord, l’HIF de Minsky reste l’élément central du mode de déclenchement des
pressions du marché financier international. La dégradation du taux d’intérêt et non du taux
de rentabilité permet de supposer que les fondamentaux macroéconomiques et macrofinanciers restent robustes. L’extrapolation qu’il convient de faire, au regard des limites de
cette approche, est de la reconfigurer afin de l’inclure dans un contexte international avec
des pays développés et d’autres émergents. L’endettement des agents économiques
internationaux, dans notre exemple, se réalise dans la zone euro (afin de minimiser le coût
de l’endettement) pour être investi dans les PECO (afin de maximiser la rentabilité des
capitaux). Si les taux venaient à augmenter, cette structure de l’endettement serait alors
instable car les agents économiques n’auraient pas les liquidités nécessaires pour satisfaire
les échéances d’endettement à court terme.
La variation du taux d’intérêt, dans un contexte économique et financier relativement
favorable, est problématique dans l’approche de Minsky puisqu’il y est endogène à
l’économie réelle. Le choix de se positionner dans le prolongement du courant des
postkeynésiens, et plus spécifiquement des structuralistes, a permis de clarifier ce concept
193
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
en apportant des éléments complémentaires à notre problématique. La masse monétaire
est décrite comme endogène à l’économie alors que la base monétaire est exogène. Le rôle
de la Banque Centrale sera alors redéfini, d’une fonction pouvant être qualifiée « d’agence
de notation spécifique » Celle-ci y est intégrée comme un acteur de l’économie particulier.
La déréglementation et la libéralisation des flux financiers ne permettent plus à ce genre
d’institution de réguler la masse monétaire « par la force » mais seulement par l’influence
qu’elles peuvent potentiellement exercer de par leurs spécificités (indépendantes, publiques
et neutres).
Les innovations financières décrites par Minsky ainsi que les flux de capitaux étrangers entre
territoires comme soulevées dans la problématique, offrent l’opportunité de faire
augmenter l’utilisation de la masse monétaire (qualifiée d’endogène) pour augmenter
l’endettement potentiel des agents économiques alors que la base monétaire reste exogène.
En effet, une Banque Centrale n’est jamais totalement accommodante. Ainsi, la capacité
d’intervention de la Banque Centrale ne vient pas de sa capacité de régulation de la base
monétaire mais des signaux qu’elle adresse au marché à travers la variation de son taux
directeur. L’influence qu’elle exerce repose donc sur la nature même d’une de ses deux
fonctions de préteur en dernier ressort.
Une fois l’explication du déclenchement des tensions financières internationales réalisée, il
convenait de matérialiser les pressions sur le taux de change au regard des modélisations de
crises. La fuite des capitaux étrangers des pays émergents s’explique par le besoin de
liquidités des agents économiques internationaux au regard de leur incapacité à rembourser
leurs échéances d’endettement à court terme. Cette dynamique va s’auto-renforcer puisque
la liquidation des actifs détenus dans les PECO va amplifier les vulnérabilités sur le taux de
change. La conduite rationnelle des investisseurs ayant pu adopter des comportements
moins risqués (notamment dans la structure de leurs endettements) ira aussi vers la fuite
de cette zone puisqu’elle en devient trop risquée.
Cette situation s’explique par le déficit récurrent de la balance courante, apparaissant
légitime dans le cadre d’un processus de rattrapage économique, tant en période de
croissance forte que de tensions financières internationales. En effet, les graphiques
194
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
illustrant la situation des PECO décrivent clairement des déficits avant, pendant, et après les
tensions sur le taux de change. La dynamique d’une crise de change de première génération
se matérialise par l’incompatibilité d’une création monétaire (par des déficits publics ou par
des crédits privés) avec l’ancrage du taux de change. Ici, c’est le processus de rattrapage
économique qui induit un déficit récurrent de la balance courante ou l’afflux positif des
capitaux étrangers se doit d’être continu. Au regard du contexte financier actuel, source de
nombreuses instabilités à travers les canaux de contagion de la liquidité, du taux d’intérêt
mais aussi des échanges commerciaux, les PECO ne peuvent garantir l’attractivité continue
des capitaux étrangers.
195
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Conclusion de la deuxième partie
La partie précédente avait pour ambition de mettre en lumière les stratégies de rattrapage
économique adoptées par bon nombre de pays émergents, non pas pour en critiquer les
fondements puisque les résultats en termes de croissance économique semblent attester de
la viabilité de ce processus, mais plutôt le cheminement. Celui-ci apparait source de
vulnérabilités non pas au regard des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers,
mais par une intégration internationale commerciale et financière. Alors que ces secteurs
sont aujourd’hui pleinement libéralisés, il apparait délicat de supposer qu’un pays émergent
a les capacités de réguler les tensions venant du reste du monde s’il n’en est pas lui-même
responsable.
Ce processus suppose l’acquisition d’une spécialisation sectorielle axée sur l’exportation qui
nécessite des capitaux étrangers pour restructurer le tissu économique. Le déficit récurrent
de la balance courante qui en découle est alors compensé par une attractivité de capitaux en
IDE. La dynamique favorable qui s’y installe permet de renforcer les spécialisations
sectorielles afin d’espérer à terme une diminution des déficits de la balance courante. Mais
l’adoption par la quasi-totalité des pays émergents de cette stratégie de développement
induit une situation de compétition à travers la mise en place de politiques d’attractivités
territoriales, se traduisant principalement par la libéralisation du compte de capital et la
neutralisation du risque de dépréciation monétaire.
L’incompatibilité entre libéralisation du compte de capital et stabilisation du taux de change
donnent une place trop importante à l’afflux des IDE qu’il convient de perpétuer jusqu’à
l’amélioration du solde de la balance courante dans le cadre du processus de rattrapage.
Sans justifier d’une dégradation de leurs fondamentaux, ils sont sujets à l’instabilité
financière internationale dont leurs dépendances à travers l’octroi de capitaux étrangers ne
fait qu’amplifier le potentiel des effets de contagion. Par conséquent, la contrainte réside
dans la capacité du marché financier à perpétuer cet afflux de capitaux, légitime pour des
pays favorablement en cours de rattrapage économique.
196
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
La nature des pressions internationales, toujours dans un contexte de non dégradation des
fondamentaux, repose sur l’HIF de Minsky puisque celui-ci y postule la dégradation du taux
d’intérêt et non du taux de rentabilité. A partir de sa réappropriation, dans un contexte
international entre pays développés et émergents, l’endettement des agents économiques
internationaux devient source d’instabilité financière. L’endettement à court terme dans la
zone euro minimise le coût de l’endettement, favorisant l’investissement dans les PECO afin
de maximiser la rentabilité des capitaux. Cette structure de l’endettement rend instable la
sphère financière en cas d’augmentation des taux d’intérêt puisque les agents économiques
n’auraient plus les liquidités nécessaires afin de satisfaire les échéances d’endettement à
court terme.
Un positionnement postkeynésien, et plus spécifiquement structuraliste, a offert
l’opportunité d’approfondir l’explication de la problématique. La Banque Centrale, en tenant
le rôle « d’agence de notation spécifique » qui permet d’être un acteur de l’économie
particulier, devient un acteur de l’économie à part entière. La nature de son intervention ne
vient pas de sa capacité de régulation de la base monétaire, quasi-impossible dans le
contexte de libéralisation financière actuelle, mais des signaux qu’elle adresse au marché à
travers la variation de son taux directeur.
Au regard de leur incapacité à rembourser leurs échéances d’endettement à court terme, le
besoin de liquidités des agents économiques internationaux devient l’élément perturbateur
à l’origine du processus de crise au sein de ces pays. Cette dynamique va s’auto-renforcer
puisque la liquidation des actifs détenus dans les PECO va amplifier les vulnérabilités sur le
taux de change. Il devient donc compréhensible de se retirer de ces pays car la zone est
maintenant trop risquée. Le déficit récurrent de la balance courante, apparaissant légitime
dans le cadre d’un processus de rattrapage économique, met sous pression le taux de
change même en période de tensions financières internationales. Le processus de rattrapage
économique induit un déficit récurrent de la balance courante où l’afflux positifs des
capitaux étrangers se doit d’être continu. Au regard du contexte financier actuel, source de
nombreuses instabilités à travers les canaux de contagion de la liquidité, du taux d’intérêt
mais aussi des échanges commerciaux, il n’est pas sûr que ces PECO puissent bénéficier de
ces flux en permanence.
197
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Les derniers éléments de cette 2eme partie s’orientent vers les caractéristiques
d’interdépendances puis de contagion au sein des PECO depuis l’ère soviétique jusqu’à
aujourd’hui. L’idée était d’expliquer les divergences de l’impact des tensions financières
internationales, alors que l’ensemble des PECO ont adopté la même stratégie de
développement. De par leurs spécialisations sectorielles imposées par l’URSS, ces pays ont
des héritages divergents qui les ont poussés à prendre des chemins différents dans la nature
de leurs spécialisations actuelles et de leur positionnement économique, financier et
monétaire.
La partie suivante tentera de décrire ces divergences par une décomposition analytique du
positionnement des PECO qu’il conviendra de définir. La réalisation de tests économétriques
permettra d’illustrer l’importance de la structure de l’endettement international comme
élément perturbateur. Une mise en parallèle de ces interprétations, qualité du
positionnement macroéconomique et macro-financier des PECO et nature des capitaux
étrangers au sein des PECO, offrira l’opportunité de définir des scénarios de court et moyen
terme à ces pays.
198
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Partie 3
Divergences de comportement au sein des PECO lors de tensions
financières internationales : entre transferts de capitaux et
positionnement structurel
199
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Introduction de la troisième partie
Les principaux éléments permettant de contextualiser la problématique ont été décrits
précédemment. L’approche théorique de l’HIF de Minsky vient conforter la description des
faits mis en avant. Elle permet de justifier de la plausibilité de phénomènes de crises sans
pour autant l’expliquer par une dégradation des fondamentaux macroéconomiques et
macro-financiers dans les pays en question. La stratégie de rattrapage économique, à
travers une intégration au commerce mondial, pousse à un financement par le reste du
monde pour restructurer l’appareil productif. Le retrait de ces capitaux, induit par une
structure instable de l’endettement international (échéance des créances à court terme en
zone euro pour des placements à moyen voire long terme dans les PECO), met sous pression
les taux de change de ces pays où un parallèle avec les modélisations de première
génération peut être fait.
De nombreux graphiques, illustrant la crise des Subprimes de 2008 dans les PECO, sont
venus affirmer par des faits empiriques l’occurrence de ce genre d’événements. Ces pays
émergents, avec l’intégration à l’Union européenne en 2004 et 2007 puis avec celle en cours
à la zone euro, reflètent la création de vulnérabilités à travers des effets de contagion de
taux d’intérêt et de liquidité. Afin de venir conforter ces interprétations, des modélisations
économétriques vont être réalisées sur des faits empiriques récents. Il s’agira tout d’abord
de confirmer l’importance de l’afflux positif des capitaux étrangers, même en période de
ralentissement du processus de rattrapage économique, afin de neutraliser le déficit de la
balance courante. L’obligation de stabiliser sa monnaie à l’euro, pour amplifier le processus
de développement économique, impose des réserves de devises importantes mais tout aussi
dépendantes du solde entre capitaux étrangers et déficit du compte des transactions
courantes.
Par la suite, il conviendra de tester les raisons de l’allocation des capitaux étrangers dans ces
territoires. L’objectif de maximisation de la rémunération des placements tout en
minimisant le coût du capital justifie la répartition de la structure de l’endettement en zone
euro et de l’investissement dans les PECO. La spéculation favorable de Minsky (l’attractivité
des capitaux est légitime puisque les gains potentiels sont importants) va être à l’origine de
200
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
la création de vulnérabilités avec la diminution temporelle des échéances d’endettement
pour en amoindrir le coût. La justification empirique, à travers la construction de
modélisations adéquates, est déterminante pour acter de la responsabilité de l’instabilité
financière internationale comme élément déterminant de l’occurrence d’une crise.
Le retournement de la période favorable, sans justifier d’une dégradation des fondamentaux
macroéconomiques et macro-financiers dans les PECO, se doit aussi d’être validé par une
modélisation supplémentaire. La fragilité de la sphère financière internationale, à travers la
structure instable de l’endettement, va rendre propice la contraction de la liquidité
internationale par le déclenchement d’un élément perturbateur. C’est l’augmentation du
taux directeur de la Banque Centrale Européenne (BCE), au regard de son rôle de prêteur en
dernier ressort, qui va précipiter le retournement de conjoncture. Un indicateur de pression
sur le taux de change, issu des travaux de Cartapanis (Cartapanis, et al., 1999), illustrera la
matérialisation des effets de contagion par le taux d’intérêt et la liquidité entre zone euro et
PECO.
L’impossibilité pour les PECO d’agir sur l’occurrence de ces risques a été mise en lumière lors
de l’impact de la crise des Subprimes en 2008, avec la chute pour tous de leur taux de
croissance. La configuration internationale du marché financier, instable au regard des
stratégies d’endettement, ne semble pas offrir d’opportunité afin d’amoindrir les effets
déstabilisants pour ces pays. Même si la contagion à travers les canaux du taux d’intérêt et
de la liquidité a été forte pour tous, certains d’entre eux ont pu rebondir plus facilement que
d’autres. Cette situation questionne sur des alternatives crédibles non dans le
contournement des tensions financières internationales, tous les PECO ont opté pour une
intégration renforcée au reste du monde, mais dans leur potentiel de rebond lors de l’après
crise. Quels sont les éléments leur permettant de patienter favorablement, c’est-à-dire en
évitant d’hypothéquer leur processus de rattrapage futur, face aux turbulences
internationales ? Cette interrogation implique alors de satisfaire une étude analytique des
exigences minimales à avoir pour dépasser les contraintes décrites par la problématique.
La démarche consiste à présenter la méthode d’analyse des fondamentaux des PECO. La
qualité du positionnement de chaque pays y sera soulevé toujours dans le but de rendre
201
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
viable leur processus de rattrapage économique. Deux aspects temporels y seront décrits.
Tout d’abord à court terme afin de réguler au mieux les tensions financières internationales
puisqu’elles apparaissent difficilement contournables. Puis à moyen terme au regard de la
viabilité du processus de rattrapage économique de chacun. L’intégration des PECO au reste
du monde a pour finalité la convergence économique vers les pays développés. Les
divergences et convergences entre ces pays vont permettre de réaliser des regroupements,
à l’origine de l’émergence des éléments apparaissant probants dans leur capacité de rebond
lors de l’après crise.
La description à court terme des pressions induites par l’instabilité financière internationale
va confirmer l’inefficacité de la politique monétaire dans ce contexte. Celle-ci n’apparait plus
opérante pour tenter de lutter contre les pressions sur le taux de change. Alors que la
politique budgétaire semble une alternative crédible qu’il conviendra de justifier. Quant à la
qualité du processus de convergence à moyen terme, celle-ci est la condition sine qua non
pour bénéficier à nouveau et rapidement des capitaux étrangers lors de l’après crise.
L’attractivité d’un pays en termes de potentiel de développement est en effet tout aussi
importante à la suite de fortes tensions internationales. Cette dualité temporelle ne saurait
être sous-estimée. L’incapacité de réguler à court terme les pressions internationales peut
dégrader les fondamentaux du pays, le mettant en difficulté pour réamorcer sa dynamique
économique lors de l’après crise. Inversement, une bonne régulation à court terme ne
permettra qu’un faible retour des capitaux étrangers si la viabilité du rattrapage économique
n’est pas suffisamment assurée.
Cette double analyse, concernant d’abord les stratégies d’allocation des capitaux par les
investisseurs internationaux, puis le positionnement structurel de chaque PECO, vise à
confronter les différences d’objectifs de chacun. Les transferts de capitaux étrangers au sein
des PECO sont déterminés par des logiques de rentabilité légitimes à tous placements
financiers. Alors que l’allocation de ces mêmes capitaux doit permettre aux pays
bénéficiaires de réaliser leur processus de convergence. La comparaison de ces deux modes
d’interprétation permettra de confronter les stratégies de chacun à court puis à long terme.
202
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Chapitre 5
Modélisations économétriques comme approche empirique :
focus sur les flux de capitaux
Introduction intermédiaire
La problématique a mis en avant l’importance des flux de capitaux étrangers, notamment de
l’Union européenne, dans la dynamique de rattrapage des pays émergents, en l’occurrence
les PECO. La structure d’endettement à court terme pour investir ces capitaux à moyen voire
long terme, comme l’HIF de Minsky (Minsky, 1974) a pu le mettre en avant, est l’élément de
vulnérabilité pouvant mettre en difficulté la dynamique de rattrapage de ces pays. Les
interdépendances, à l’origine d’effets de contagion potentiellement importants, posent la
question d’une régulation internationale plus poussée. La poursuite de cette étude consiste
alors à réaliser des modélisations afin de tester la significativité des hypothèses émissent lors
de la présentation puis de la conceptualisation de la problématique.
L’importance de l’afflux des capitaux étrangers afin de compenser le déficit récurrent de la
balance courante, même en période de crise, a été jusqu’à présent largement mise en avant.
Ces capitaux sont aussi nécessaires afin de stabiliser voire d’ancrer le taux de change,
indispensable pour rendre attractif le territoire. Pour valider ces postulats, l’équation (1)
teste la significativité du solde positif des capitaux étrangers pour compenser le déficit
récurrent de la balance courante. L’équation (2), complémentaire de la première, permet de
confirmer le rôle régulateur des réserves de devises au sein des PECO en parallèle aux flux
de capitaux étrangers. Les résultats de ces deux tests économétriques doivent venir
compléter l’idée que l’on peut se faire concernant la prépondérance des capitaux étrangers
et la nécessité pour les PECO d’avoir des flux toujours positifs.
Les capitaux étrangers apparaissant déterminants, il convient de s’interroger sur les
éléments justifiant leur localisation au sein des PECO. L’HIF de Minsky (Minsky, 1974) a été
utilisée en la recontextualisant par rapport au cadre d’analyse de la problématique, à savoir
une dimension internationale de la structure de l’endettement des agents économiques.
203
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
L’équation (3) a pour ambition de confirmer la prépondérance de l’endettement à court
terme dans la zone euro afin d’investir dans les PECO au regard de l’attractivité dont ils font
preuves. Il en découlera des possibilités de stratégies temporelles divergentes des agents
économiques internationaux de court, moyen, voire long terme dans l’allocation des
capitaux. Ici, la vulnérabilité des PECO n’est pas liée dans une quelconque dégradation de
leurs fondamentaux macroéconomiques ou macro-financiers. C’est l’amplification du rôle
des canaux de contagion ayant pour origine l’interdépendance entre ces économies qui
devient déterminant. Deux possibilités de gains y sont soulevées : la rentabilité des
investissements qui y sont effectués et les profits pouvant être réalisés sur les taux de
change par rapport à l’euro.
L’occurrence de la crise que nous décrivons est issue d’un élément perturbateur, engendrant
la fuite des capitaux étrangers hors des PECO. Celle-ci a pour origine la zone euro, lors d’un
resserrement de la politique monétaire de la Banque Centrale Européenne (BCE), qui se
traduit par une augmentation des taux d’intérêt et met en difficultés les agents
économiques internationaux pour se refinancer. L’équation (4) a pour ambition de soulever
la plausibilité des effets de contagion de la zone euro dans le déclenchement des pressions
sur les taux de change des PECO. Les canaux de la liquidité et du taux d’intérêt y
apparaissent les plus adéquats au regard de l’intégration en cours de ces pays à l’Union
européenne et à la zone euro. Des divergences de stratégies des agents économiques
internationaux y apparaissent quant au degré de vulnérabilité induit dans les PECO.
La crise des Subprimes de 2008 a illustré l’occurrence de ce phénomène de tensions
financières internationales. Sans pour autant justifier de vulnérabilités apparentes des PECO,
un retrait massif des capitaux étrangers a pu s’y réaliser. Logiquement, les équations (1), (2),
(3) et (4) vont utiliser les fluctuations des capitaux étrangers depuis le début du processus de
rattrapage économique des PECO jusqu’à cette date pour illustrer empiriquement ce
phénomène.
204
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
1. La détermination du rôle des capitaux étrangers au sein des PECO : une obligation
d’attractivité pour ces territoires
Il convient d’insister sur un point essentiel relatif à la vulnérabilité potentielle des PECO : le
besoin en capitaux étrangers. Les pays d’Europe centrale et orientale ayant intégré l’Union
européenne sont en cours de transition postsocialiste et de rattrapage économique (on peut
parler de convergence). La nécessité des capitaux étrangers provient à l’origine (depuis la
chute de l’URSS) du besoin de pallier le manque d’épargne nationale pour restructurer
l’appareil productif, source future de gains de productivité à l’exportation nécessaire au
rééquilibrage de la balance courante. Les flux d’investissements étrangers à destination des
PECO sont alors indispensables à la dynamique de rattrapage économique. Cependant, la
stabilisation, voire l’ancrage du taux de change, sont fortement recommandés pour les pays
en voie de développement afin de stériliser le risque de dépréciation monétaire, et amplifier
l’attractivité des flux de capitaux étrangers.
La viabilité du processus de rattrapage économique est appréhendée à travers l’étude de la
balance des paiements afin de comprendre comment le déficit induit est financé. Par
définition, le solde de la balance globale des paiements est nul puisque l’ensemble des
comptes qui la composent doivent s’équilibrer (les uns compensant les autres). « La balance
des paiements est un document statistique, présenté suivant les règles de la comptabilité en
partie double, qui rassemble et ordonne l'ensemble des transactions économiques et
financières d'une économie - un pays ou une zone économique - avec le reste du monde au
cours d'une période donnée. » (Banque de France, 2011). Dans le cas des PECO, il est
supposé que le déficit récurrent du compte des transactions courantes, légitime dans le
cadre d’un processus de rattrapage économique, est compensé par un compte financier
positif induit par l’afflux de capitaux étrangers.
La balance des paiements, à travers ses différents comptes (tableau 44), permet de retracer
les échanges de biens et services mais aussi de capitaux étrangers avec le reste du monde,
informations indispensables à l’appui de notre problématique. La composition de la balance
des paiements est réalisée pour tous les pays afin d’homogénéiser les transactions
nécessaires aux comparaisons. « C'est au Fonds Monétaire International (FMI) (…) qu'est
205
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
revenue la normalisation des concepts, des définitions, des classifications et des conventions.
» (Banque de France, 2011).
Tableau 44. Composition des comptes de la balance des paiements
Compte de transactions courantes
Biens
Services
Revenus
Transferts courants
Compte de capital
Transferts en capital
Acquisitions d'actifs non financiers (brevets)
Compte financier
Investissements directs
Investissements de portefeuille
Produits financiers dérivés
Autres investissements
Avoirs de réserve
Erreurs et omissions nettes
Source : Banque de France et INSEE.
Le solde du compte de transactions courantes et du compte de capital correspond à la
capacité de financement de la nation envers le reste du monde lorsque celui-ci est positif.
Cela signifie que le pays va prêter des capitaux à l’étranger, matérialisé par le solde négatif
du compte financier, qui va être investi vers le reste du monde. A l’inverse, s’il est négatif, on
parle de besoin de financement de la nation où c’est le reste du monde qui prête au pays,
avec un solde positif du compte financier. Dans le cadre spécifique des PECO, il est apparu
légitime que le reste du monde prête des capitaux afin d’amorcer une dynamique de
rattrapage économique pour restructurer l’appareil productif.
Les graphiques 50, 51 et 52 présentent les comptes de transactions courantes, de capital et
financiers des PECO de 1995 jusqu’à aujourd’hui. On peut y voir que le déficit de la balance
courante y est de plus en plus important, décrivant une amplification du processus de
rattrapage économique. Alors qu’en parallèle, les flux financiers, matérialisés par un compte
financier positif, sont robustes. Le compte de capital, même s’il est positif, n’apparait pas
déterminant pour tous les PECO durant ce lapse de temps.
206
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Graphique 50. Compte des transactions courantes des PECO avec le reste du monde
Bulgarie
0
République
tchèque
Estonie
-5 000
Lettonie
-10 000
Lituanie
Hongrie
-15 000
Pologne
Roumanie
-20 000
Slovénie
-25 000
1995
1997
1999
2001
2003
2005
2007
2009
Slovaquie
Source : Eurostat (solde millions euros à partir 1.1.1999, millions écus jusqu'au 31.12.1998).
Le graphique 50 décrit un solde de la balance courante largement déficitaire pour les PECO,
témoignant d’une grande fragilité des échanges vis-à-vis du reste du monde, avec une
accentuation de la tendance de 2000 à 2008. Apres 2008, la diminution de ce déficit se
justifie par l’impact de la crise des Subprimes qui a ralenti le processus de rattrapage
économique lors de la fuite des capitaux étrangers. Même dans ces conditions, les balances
courantes restent déficitaires dans les PECO (sauf en Hongrie, Estonie, Lituanie et Lettonie).
Graphique 51. Compte de capital des PECO avec le reste du monde
3 000
Bulgarie
2 500
République
tchèque
Estonie
2 000
Lettonie
1 500
Lituanie
1 000
Hongrie
500
Pologne
0
Roumanie
-500
Slovénie
-1 000
Slovaquie
1995
1997
1999
2001
2003
2005
2007
2009
Source : Eurostat (solde en millions d'euros à partir du 1.1.1999, millions d'écus jusqu'au
31.12.1998).
207
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Pour ce qui concerne le graphique 51, le compte de capital est stationnaire entre 1995 et
2004 (sauf pour la Bulgarie et la Rou1anie jusqu’en 2007). Ensuite, il y a un très léger trend
haussier caractérisant tous les pays jusqu’en 2008. Les PECO ayant intégré l’Union
Européenne en 2004 et 2007, la tendance à la hausse du compte de capital durant cette fin
de période se justifie par les aides communautaires dont ils ont bénéficié. Un seul pays
s’écarte de cette tendance, la Pologne. Mais les données du tableau étant en valeur et non
en pourcentage, le poids économique de la Pologne justifie cette situation.
Comme peut l’affirme la Banque de France, les fonds structurels d’aide au développement,
destinés à faire converger leur économie, sont à intégrer dans le compte de capital. « Le
compte de capital, qui regroupe les transferts en capital - remises de dettes, pertes sur
créances, aides à l'investissement, transferts des migrants - et les acquisitions et cessions
d'actifs non financiers non produits (brevets, marques, droits d'auteur...). » (Banque de
France, 2011)
Graphique 52. Compte financier des PECO avec le reste du monde
27 000
Bulgarie
22 000
République
tchèque
Estonie
17 000
Lettonie
Lituanie
12 000
Hongrie
7 000
Pologne
Roumanie
2 000
Slovénie
-3 000
Slovaquie
1995
1997
1999
2001
2003
2005
2007
2009
Source : Eurostat (solde en millions d'euros à partir du 1.1.1999, millions d'écus jusqu'au
31.12.1998).
Le graphique 52 met en avant le solde positif du compte financier des PECO, comprenant les
flux de capitaux étrangers. On peut explicitement y voir une tendance haussière entre 1995
et 2008 pour l’ensemble des PECO, mis à part pour la Hongrie avec une petite chute en 2007
208
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
(qui se justifie par des problèmes de finances publiques à cette date). Cependant, dès 2008,
le solde du compte financier diminue fortement, allant même jusqu’à être négatif pour la
Hongrie, l’Estonie, la Lituanie et la Lettonie. Ces quatre pays sont dans l’obligation d’avoir un
solde de leur balance courante à nouveau positif puisqu’ils n’ont plus de possibilité de
financer leur endettement.
Compte tenu de ces constats, il convient maintenant de tester la significativité du premier
postulat émis dans cette étude. A savoir que les flux de capitaux, compris au sein du compte
financier, vont compenser le déficit de la balance courante. Les autres éléments qui
composent la balance des paiements, par exemple les aides européennes dans le compte de
capital, ne seront soit pas assez dynamiques, soit insuffisants en montant pour réaliser cette
compensation.
L’équation (1) a été construite pour définir l’importance des flux de capitaux étrangers dans
le financement du déficit récurrent de la balance courante des PECO (indispensable à leur
processus de rattrapage économique).
Les deux variables de périodicité trimestrielle sélectionnées sont le solde de la balance
courante (puisque c’est son déficit qui va justifier l’attractivité des capitaux étrangers), et les
flux d’investissement (totaux, court, moyen et long terme). La décomposition temporelle des
capitaux doit permettre d’évaluer le rôle de chacune de ces variables dans le financement
externe des PECO.
Equation (1) : I(t) = 𝛼0 + 𝛼1.(-B(t))
avec I(t) total, Ct, Pf ou IDE
I(t) Flux de capitaux étrangers totaux exprimés en millions d’euros
I(Ct) Flux de capitaux étrangers de court terme exprimés en millions d’euros
I(Pt) Flux de capitaux étrangers de portefeuille (moyen terme) exprimés en millions d’euros
I(IDE) Flux de capitaux étrangers d’IDE (long terme) exprimés en millions d’euros
B(t) Solde de la balance courante exprimé en millions d’euros
Les résultats économétriques de cette équation, à partir des données d’Eurostat de 1995
jusqu’au début des pressions financières internationales lors de la crise des Subprimes en
2008, sont synthétisées dans le tableau 45.
209
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Tableau 45. Equation (1) : résultats des tests économétriques
Pays
Capitaux
Périodicité
BG
Total
Ct
Pf
IDE
Total
Ct
Pf
IDE
Total
Ct
Pf
IDE
Total
Ct
Pf
IDE
Total
Ct
Pf
IDE
Total
Ct
Pf
IDE
Total
Ct
Pf
IDE
Total
Ct
Pf
IDE
Total
Ct
Pf
IDE
Total
Ct
Pf
IDE
(t)
(t)
(t-1)
(t)
(t-1)
(t)
(t)
(t-1)
(t)
(t)
(t)
(t)
(t)
(t)
(t)
(t)
(t)
(t)
(t)
(t)
(t)
(t)
(t)
(t)
(t)
(t)
(t)
(t)
(t)
(t)
(t)
(t)
(t-1)
(t-1)
(t)
(t-1)
(t)
(t)
(t)
(t)
CZ
EE
HU
LT
LV
PO
RO
SI
SK
Significativité des coefficients
(seuil 5% maxi)
Oui
Oui
Oui
Oui
Oui
Oui
Non
Oui
Oui
Oui
Non
Oui
Oui
Oui
Non
Non
Oui
Oui
Oui
Oui
Oui
Oui
Non
Oui
Oui
Oui
Non
Oui
Oui
Oui
Non
Oui
Oui
Oui
Non
Oui
Non
Non
Non
Oui
Source : données Eurostat et calculs auteur.
210
Signe des coefficients
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
-
+
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
L’analyse du tableau 46 permet de décrire des divergences entre les PECO au niveau du rôle
que peuvent jouer l’ensemble des capitaux et plus spécifiquement les investissements à
court terme, de portefeuille et les IDE. On peut y voir des stratégies implicites divergentes ou
convergentes menées par les agents économiques internationaux dans les investissements
effectués au sein de ces pays émergents sachant que ce sont principalement les flux de
court terme et d’IDE qui viennent financer les besoins des PECO.
De plus, les coefficients de la variable B(t) sont tous positifs lorsqu’ils sont significatifs (avec
quelques très faibles exceptions). Il y a bien un afflux positif des capitaux étrangers pour
financer le déficit de la balance courante induit par le processus de rattrapage économique,
et ce sans différenciation du point de vue de la nature de l’ancrage des taux de change des
PECO.
La Slovaquie est le seul pays avec des flux de capitaux étrangers totaux non significatifs. Ce
pays est relativement en avance par rapport aux autres PECO. Il bénéficie maintenant de
spécialisations sectorielles à l’exportation lui permettant de neutraliser en partie sa balance
des paiements, diminuant dès lors sa dépendance aux capitaux étrangers. La Hongrie a des
capitaux étrangers totaux et de court terme significatifs. Ses difficultés de régulation
macroéconomique, notamment vis-à-vis de son endettement public, peuvent justifier un
horizon de placement plus court des capitaux étrangers (des investissements à moyen et
long termes peuvent apparaitre trop risqués au regard de ces faits).
Quant aux autres pays (Bulgarie, République Tchèque, Estonie, Lituanie, Lettonie, Roumanie,
Pologne et Slovénie), les capitaux étrangers sont significatifs pour les variables
d’investissement total, de court terme et les IDE. Les flux de portefeuille ne semblent pas
dépendre du déficit de la balance courante puisqu’ils sont majoritairement non significatifs.
Les résultats de l’équation (1) permettent de valider l’hypothèse de la dépendance des PECO
aux flux de capitaux, sauf peut-être pour la Slovaquie, afin de compenser le déficit récurrent
de leur balance courante (la balance des paiements se doit d’avoir un solde nul). Sans
financements extérieurs, l’achat de biens d’équipements au reste du monde devient
inenvisageable et peut compromettre le processus de rattrapage économique de ces pays.
211
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Pour autant, l’analyse plus fine des flux de capitaux étrangers, de court terme, de
portefeuille et d’IDE, met en avant des divergences de stratégies de la part des agents
économiques étrangers qu’il convient d’expliquer.
Les capitaux étrangers ne se limitent pas seulement au financement du déficit de la balance
courante des pays émergents. Il y a aussi nécessité de stabiliser, voire d’ancrer leur taux de
change. Même si les pouvoirs publics ont des outils à leur disposition pour rendre leur
territoire attractif (variation du taux directeur, mesures fiscales incitatives, subventions à des
secteurs stratégiques…), l’écart entre le déficit de la balance courante et l’afflux de capitaux
étrangers à moyen et long terme est compensé au final pour partie par la variation des
réserves de devises et pour autre partie par l’endettement en monnaie étrangère à court
terme.
Pour autant, la stabilisation du taux de change reste conditionnée à l’importance des devises
en réserve. Cette relation d’interdépendance est prépondérante dans l’hypothèse d’une
crise de change dans ces pays. Un solde négatif de la balance des transactions courantes
suppose que les agents économiques de ce pays ont acheté plus qu’ils n’ont vendu de biens
et services. L’afflux positif de capitaux étrangers vient compenser ce déficit à travers l’octroi
de créances aux agents économiques locaux par le reste du monde. Cette dualité est
indispensable (pour s’endetter, il faut que quelqu’un puisse prêter en même temps).
Pourtant, à chaque période, le solde de ces deux composantes n’est pas toujours nul. C’est
ici que les réserves de devises et l’endettement à court terme vont servir d’ajustement à la
marge. Un surplus de financement extérieur va faire augmenter les réserves de devises, et
inversement pour un manque de capitaux étrangers.
Pour vérifier la plausibilité de ce second postulat, il convient d’analyser le compte financier
des PECO. Celui-ci comprend l’ensemble des flux de capitaux (graphique 53), à savoir : les
investissements directs, les investissements de portefeuille et les autres investissements.
Mais il comprend aussi les avoirs de réserve (graphique 54) correspondant aux réserves de
devises de chaque PECO. Elles offrent l’opportunité de réguler le solde entre le compte des
transactions courantes et les flux de capitaux.
212
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Graphique 53. Capitaux étrangers du compte financier des PECO
30 000
Bulgarie
25 000
République
tchèque
Estonie
20 000
Lettonie
15 000
Lituanie
10 000
Hongrie
Pologne
5 000
Roumanie
0
Slovénie
-5 000
1995
1997
1999
2001
2003
2005
2007
2009
Slovaquie
Source : Eurostat (solde millions euros à partir1.1.1999, millions d'écus jusqu'au 31.12.1998).
Le graphique 53 décrit une tendance à la hausse des flux de capitaux des PECO, témoignant
d’une perspective favorable du rattrapage économique, de 1995 à 2008. Même si la
tendance s’inverse, lors de la crise des Subprimes en 2008 jusqu’à aujourd’hui, le solde est
toujours positif (sauf pour l’Estonie, la Lituanie, la Lettonie et la Slovénie). Les capitaux
étrangers compensent le déficit de la balance courante, comme l’équation (1) a pu le
confirmer. Mais au regard de la volatilité de ces flux, il n’est pas toujours possible
d’envisager un financement intégral à chaque période.
Graphique 54. Avoirs de réserves du compte financier des PECO
4 000
Bulgarie
2 000
République
tchèque
Estonie
0
-2 000
Lettonie
-4 000
Lituanie
-6 000
Hongrie
-8 000
Pologne
-10 000
Roumanie
-12 000
Slovénie
-14 000
1995
1997
1999
2001
2003
2005
2007
2009
Slovaquie
Source : Eurostat (solde millions euros à partir1.1.1999, millions d'écus jusqu'au 31.12.1998).
213
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Le graphique 54 illustre des fluctuations importantes des avoirs de réserves du compte
financier des PECO. Lors de certaines périodes, le solde y est positif alors que pour d’autres,
le solde devient négatif. Il n’est pas possible d’envisager la formation d’une tendance
régulière à la haussière ou à la baissière. Cette illustration tend à démontre que les réserves
de change des PECO assurent à la marge l’adéquation entre le solde de la balance courante
et celui des capitaux étrangers. Mais cette variabilité du stock de devises impacte
directement la stabilisation du taux de change. Une diminution dangereuse de ces réserves
pourra créer un sentiment d’incertitude sur la viabilité à terme de l’ancrage, s’apparentant
aux crises de première génération.
L’équation (2) offre l’opportunité de tester la significativité de cette argumentation. Le solde
des réserves de devises est d’autant plus important que la stabilisation du taux de change
dépend de ces mêmes réserves. Le déficit de la balance courante B(t) est la variable
explicative puisque c’est ce déficit qui va induire un besoin en capitaux étrangers, compensé
à la marge par les variations des réserves de devises R(t).
Equation (2) : ∆R(t) = 𝛼0 + 𝛼1.B(t)
∆R(t) Variations des réserves de devises du pays exprimées en millions d’euros
B(t) Solde de la balance courante exprimé en millions d’euros
Les résultats économétriques de cette équation, à partir des données d’Eurostat de 1995
jusqu’au début des pressions financières internationales lors de la crise des Subprimes en
2008, sont regroupés dans le tableau 46. Les tests ont été réalisés avec ou sans décalages (t,
t-1 et t-2) puisque les résultats apparaissaient plus significatifs pour certains PECO. Il
conviendra d’expliquer les raisons de ce décalage temporel.
214
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Tableau 46. Equation (2) : résultats des tests économétriques
Pays
périodicité
BG
(t)
(t-1)
(t-2)
(t)
(t-1)
(t-2)
(t)
(t-1)
(t-2)
(t)
(t-1)
(t-2)
(t)
(t-1)
(t-2)
(t)
(t-1)
(t-2)
(t)
(t-1)
(t-2)
(t)
(t-1)
(t-2)
(t)
(t-1)
(t-2)
(t)
(t-1)
(t-2)
CZ
EE
HU
LT
LV
PO
RO
SI
SK
Significativité des coefficients
(seuil 5% maxi)
Non
Non
Oui
Non
Non
Non
Non
Non
Oui
Non
Oui
Non
Non
Non
Non
Oui
Oui
Non
Non
Non
Non
Non
Non
Non
Oui
Non
Non
Oui
Non
Non
Signe des
coefficients
Nature de l’ancrage
Taux de change
Fixe
Flexible
Fixe
-
Flexible
Fixe
-
Fixe
Flexible
Flexible
+
Fixe
+
Fixe
Source : données Eurostat et calculs auteur.
Les résultats des tests économétriques de l’équation (2) du tableau 46 mettent en avant des
faits intéressants, notamment vis-à-vis de la nature de l’ancrage des taux de change de
chaque PECO.
Les variables des pays avec des ancrages flexibles (République Tchèque, Pologne et
Roumanie) ne sont pas significatives sur toutes les périodes (t, t-1 et t2). On peut supposer
que les ajustements du déficit de la balance courante se font par les fluctuations à la marge
des taux de change et non par les réserves de devises. La Hongrie fait exception puisqu’elle a
215
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
un change flexible mais les variables sont significatives. Les difficultés de politiques
budgétaires de ce pays ont créé des tensions spéculatives sur son taux de change, poussant
les pouvoirs publics à intervenir bien plus qu’en laissant fluctuer quelque peu le taux de
change.
Quant aux pays avec des ancrages fixes, ils ont des variables explicatives significatives
(Slovénie, Slovaquie, Bulgarie, Estonie et Lettonie) sauf pour la Lituanie (les variables ne sont
pas significatives). Quelques divergences apparaissent tout de même au sein de ce groupe.
Les pays les plus avancés dans leur rattrapage économique (Slovénie et Slovaquie) n’ont pas
de retard dans leurs variables (elles sont significatives en (t)) et leurs coefficients sont
positifs). Le déficit de la balance courante fait diminuer les réserves de devises et
inversement. Les flux de capitaux n’apparaissent plus ici comme financeurs/soldeurs des
déficits puisque ces pays sont suffisamment développés pour rééquilibrer leur balance
courante (sans compter nécessairement sur l’afflux des capitaux étrangers).
Les pays qui sont encore en cours de rattrapage économique (Bulgarie, Estonie, Lettonie et
l’exception hongroise) témoignent tous d’un décalage temporel entre le déficit de leur
balance courante et la fluctuation de leurs réserves de change (Bulgarie (t-2), Estonie (t-2),
Hongrie (t-1) et Lettonie (t, et t-1)), se justifiant par la nécessité de conserver le plus
longtemps possible un montant élevé de devises. Les pressions du marché financier
international au regard de la viabilité de leur ancrage peut justifier ce décalage temporel.
Leurs coefficients sont aussi tous négatifs. Ces pays en cours de rattrapage économique, ont
un fort besoin de capitaux pour neutraliser le déficit de la balance courante.
Ces éléments peuvent être synthétisés pour plus de lisibilité dans le tableau 47. Il s’agit d’y
présenter la nature des taux de change (fixe ou flexible) au regard de la significativité de la
balance courante et des décalages temporels (t), (t-1) et (t-2).
216
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Tableau 47. Interprétation des tests économétriques de l’équation (2)
Régime du taux de
change
Flexible
Fixe
Périodicité
(t), (t-1) et (t-2)
Pays
Significativité B(t)
République Tchèque
Non
Pologne
Non
Roumanie
Non
Hongrie
Oui
Lituanie
Non
Slovénie
Oui
(t)
Slovaquie
Oui
(t)
Bulgarie
Oui
(t-2)
Estonie
Oui
(t-2)
Lettonie
Oui
(t) (t-1)
(t-1)
Le tableau 47 illustre bien cette divergence entre les ancrages à taux fixe et ceux à taux
variable, en plus des contraintes de stocks de devises imposées par le marché financier
international (justifiées par les décalages temporels éventuels). Pour autant, même s’il
apparait plus facile de réguler le solde entre le déficit de la balance courante et les flux de
capitaux par des ancrages flexibles, cette possibilité comporte aussi des contraintes. Tout
d’abord, et comme nous avons déjà pu le voir auparavant, les agents économiques
internationaux sont plus enclins à investir dans des pays avec des taux de change fixes. Il
n’est pas sûr que chacun des PECO puisse se permettre de libéraliser son taux de change.
Ensuite, les capacités de fluctuation des monnaies doivent rester faibles afin de conserver
leur crédibilité. L’exemple de la Hongrie témoigne des limites de cet ancrage flexible. Ce pays
a dû utiliser ses réserves de devises in fine pour faire face aux tensions qu’il pouvait subir sur
son taux de change.
Les flux de capitaux étrangers sont indispensables aux pays émergents, et particulièrement
aux PECO, afin de compenser le déficit de la balance courante (équation 1) et de stabiliser
les taux de change (équation 2). Pour autant, cette stratégie de convergence, à travers une
intégration économique et financière au reste du monde, ne peut se limiter au seul rôle joué
217
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
par les capitaux pour les PECO. L’objectif des agents économiques internationaux qui vont y
localiser leurs capitaux n’est pas le même, bien au contraire. Ces divergences peuvent être à
l’origine de l’instabilité financière dans ces territoires.
218
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
2. Eléments d’attractivité des capitaux étrangers dans les PECO : croissance économique,
rentabilité des investissements et variation des taux de change
Les capitaux étrangers ont un rôle déterminant dans la viabilité du processus de rattrapage
économique. Ils rendent possible le financement de la restructuration du tissu économique
et le besoin en devises internationales pour permettre l’ancrage du taux de change. Pour
autant, il convient d’expliquer les raisons de l’attractivité des PECO pour comprendre ensuite
comment ces capitaux peuvent déstabiliser le marché financier international, comme l’HIF
de Minsky (Minsky, 1974) le suppose.
Dans la partie précédente, l’approche théorique de Minsky a été illustrée en parallèle à une
démonstration graphique de la situation des PECO lors de la crise des Subprimes en 2008. Il y
est apparu un processus en deux étapes. La première correspond à la période d’attractivité
de ces pays par rapport aux capitaux étrangers, provoquant une augmentation des
vulnérabilités dans la répartition de l’endettement des agents économiques internationaux.
Pour autant, leurs fondamentaux apparaissent bons (dynamique de rattrapage économique
favorable).
La seconde étape est le moment de la matérialisation des tensions financières
internationales par un élément perturbateur, l’augmentation des taux d’intérêt dans la zone
euro. La libéralisation des flux tant économiques que financiers, à l’origine de
l’interconnexion entre le système de production et le système financier à travers
l’endettement international, va expliquer l’interdépendance entre ces pays et induire des
effets de contagion de la zone euro vers les PECO.
Avant de s’intéresser à l’occurrence de la crise, par des effets de contagion importants, il
s’agit tout d’abord de justifier l’attractivité des PECO. Lors de la période de spéculation
favorable selon Minsky (Minsky, 1974), des comportements plus risqués de la part des
investisseurs internationaux sont induits, et ce même s’ils apparaissent a priori légitimes au
regard des bonnes perspectives de rentabilités des placements effectués.
219
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Nos sociétés reposent sur des économies d’endettement. On parle d’effet de levier quand
on s’endette pour réinvestir les capitaux dans des placements assortis d’une rentabilité
espérée plus élevée que le coût de leur financement. La quasi-totalité des agents
économiques internationaux utilise cette stratégie permettant de maximiser la rentabilité
des investissements. La zone euro, territoire plus stable et développé, les conduit à s’y
endetter pour minimiser les coûts de financement. Alors que les perspectives de
développement favorables dans les PECO les poussent à y localiser les capitaux pour
maximiser la rentabilité de ces placements. Le schéma 14 décrit cette première étape au
sens de Minsky (HIF).
Schéma 14. La période de spéculation positive au sein des PECO
Le schéma 14 illustre la stratégie des agents économiques internationaux, logique qui
s’inscrit dans la structure d’endettement en euro pour investir ensuite dans les PECO. Mais
elle va rendre de plus en plus instable la sphère financière. Les perspectives relativement
favorables de rattrapage économique des PECO vont conduire ceux-ci à réaliser des
placements sur des échéances de plus en plus longues (de court terme à moyen, voire long
terme) pour optimiser leurs investissements. Alors qu’en parallèle, la durée de
l’endettement en euro va se réduire, toujours pour diminuer son coût, pouvant aller jusqu’à
des échéances courtes (inférieures ou égales à 12 mois) qu’il faudra renouveler en
permanence.
220
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Deux hypothèses se doivent d’être justifiées afin de mieux fonder le raisonnement au regard
de la première période de spéculation favorable.
Il faut d’abord analyser empiriquement la nature de l’attractivité des PECO par rapport aux
capitaux étrangers, notamment sur les différentes échéances de placements (court, moyen
et long terme). Il s’agit d’identifier la répartition des capitaux suivant les PECO alors que des
divergences vont apparaitre au regard de l’héritage soviétique de chacun d’entre eux, en
parallèle aux stratégies de développement qu’ils ont respectivement adoptées.
Une fois la spéculation positive au sein des PECO confirmée (forte attractivité des PECO
justifiée par les bonnes perspectives de croissance économique), il convient ensuite de se
focaliser sur l’instabilité de la structure de l’endettement des agents économiques
internationaux, notamment à court terme et dans la zone euro.
L’analyse des graphiques 55, 56, 57 et 58 permet de conforter les différences de stratégies
dans l’allocation des capitaux au sein des PECO. Ces faits empiriques vont permettre de
justifier un découpage des capitaux dans la prochaine réalisation de l’équation
économétrique.
Graphique 55. Flux total des capitaux étrangers
35 000
Bulgarie
30 000
République
tchèque
Estonie
25 000
Lettonie
20 000
Lituanie
15 000
Hongrie
10 000
Pologne
5 000
Roumanie
0
Slovénie
-5 000
1995
1997
1999
2001
2003
2005
2007
2009
Slovaquie
Source : Eurostat (solde en millions d'euros à partir du 1.1.1999, millions d'écus jusqu'au
31.12.1998).
221
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Le graphique 55 retrace une augmentation quasi-continue de l’afflux des capitaux étrangers
totaux au sein des PECO. Le solde est constamment positif jusqu’en 2008. Cependant, la
nature de ces capitaux étrangers, vis-à-vis des échéances des investissements, n’est pas
renseignée puisque ces données sont agrégées entre les placements de court, de moyen et
de long terme. Une analyse plus fine apparait nécessaire pour faire ressortir les stratégies de
différenciations temporelles des agents économiques internationaux.
Graphique 56. Flux des capitaux étrangers à court terme
20 000
Bulgarie
15 000
République
tchèque
Estonie
10 000
Lettonie
Lituanie
5 000
Hongrie
0
Pologne
Roumanie
-5 000
Slovénie
-10 000
1995
1997
1999
2001
2003
2005
2007
2009
Slovaquie
Source : Eurostat (solde en millions d'euros à partir du 1.1.1999, millions d'écus jusqu'au
31.12.1998).
Le graphique 56 décrit une stabilité des capitaux de court terme entre 1995 et 2000. Puis, à
partir des années 2000, un trend haussier s’amorce, témoignant d’une attractivité qui se
renforce encore durant les années 2006, 2007 et 2008. En revanche, la période 2008-2009,
marquée par le recul des flux, voire par des flux négatifs pour nombre de PECO, illustre les
effets de la crise des Subprimes.
222
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Graphique 57. Flux des capitaux étrangers à moyen terme
15 000
Bulgarie
13 000
République
tchèque
Estonie
11 000
9 000
Lettonie
7 000
Lituanie
5 000
Hongrie
3 000
Pologne
1 000
-1 000
Roumanie
-3 000
Slovénie
-5 000
1995
1997
1999
2001
2003
2005
2007
2009
Slovaquie
Source : Eurostat (solde en millions d'euros à partir du 1.1.1999, millions d'écus jusqu'au
31.12.1998).
Le graphique 57 illustre la tendance des flux de capitaux de moyen terme, investissement de
portefeuille. La volatilité de ces placements ne fait pas apparaitre de tendance. Sauf entre
2008 et 2010 où les courbes sont fortement haussières. Il y a bien ici une situation
d’opportunité qui se créée lors de la crise des Subprimes : même fortement impactés,
certains PECO apparaissent encore attractifs.
Graphique 58. Flux des capitaux étrangers à long terme (IDE)
Bulgarie
11 000
République
tchèque
Estonie
9 000
Lettonie
7 000
Lituanie
5 000
Hongrie
3 000
Pologne
Roumanie
1 000
Slovénie
-1 000
1995
1997
1999
2001
2003
2005
2007
2009
Slovaquie
Source : Eurostat (solde en millions d'euros à partir du 1.1.1999, millions d'écus jusqu'au
31.12.1998).
223
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Le graphique 58 correspond à l’évolution des capitaux de long terme, les IDE à destination
des PECO. Il en ressort des faits intéressants puisque le solde des IDE est toujours positif,
sauf peut-être durant la crise des Subprimes à partir de 2008 pour certains des PECO. Il y a
une forte augmentation de l’attractivité entre les années 2004 et 2008 où l’intégration à
l’Union européenne entre en ligne de compte.
Les graphiques 55, 56, 57 et 58 confirment une attractivité globale des capitaux étrangers
vers les PECO, qu’ils soient de court terme, de portefeuille ou d’IDE. Mais les divergences
d’intensité des tendances entre ces flux au sein de chaque pays font supposer des stratégies
différenciées adoptées par les agents économiques internationaux. Elles conduisent à inclure
ces éléments dans la réalisation des tests économétriques. La possibilité de s’endetter à
court terme en zone euro pour investir ces capitaux dans les PECO à moyen et long terme
conduit à découper les flux de capitaux au regard de ces aspects temporels.
L’équation (3) a pour but de confirmer l’attractivité des PECO vis-à-vis des capitaux
étrangers, dans une dynamique d’instabilité financière à travers l’endettement à court terme
en euro. Attirés par l’espérance d’une rentabilité plus élevée dans les pays émergents que
dans les pays développés, il convient d’affiner les variables justifiant cette hypothèse.
La première variable explicative est le PIB. C’est l’augmentation du taux de croissance
économique qui va justifier l’afflux des capitaux étrangers tant pour financer la
restructuration du tissu économique que pour répondre à une demande interne de plus en
plus forte.
La deuxième et troisième variables reposent sur les sources potentielles de gains
macroéconomiques dans ces pays : gains provenant des différences de rentabilité entre zone
euro et PECO ; gains induits par la variation du taux de change (selon le régime du taux de
change mais aussi selon sa capacité de stabilisation).
Quant à la quatrième variable, elle vient compléter les trois premières puisqu’elle offre
l’opportunité de financer à moindre coût les capitaux étrangers investis dans les PECO. Il
224
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
s’agit du taux d’intérêt en zone euro à court terme, offrant la capacité de minimiser le coût
d’endettement pour investir ensuite ces capitaux au sein des PECO.
Equation (3) : I(t) =𝛼0 + 𝛼1.(PIB) + 𝛼2.(r2) + 𝛼3.(tc2-P1) + 𝛼4.(ieuro-P1)
avec I(t) total, Ct, Pf ou IDE
I(t) Flux de capitaux étrangers totaux exprimés en % du PIB
I(Ct) Flux de capitaux étrangers à court terme exprimés en % du PIB
I(Pt) Flux de capitaux étrangers de portefeuille (moyen terme) exprimés en % du PIB
I(IDE) Flux de capitaux étrangers d’IDE (long terme) exprimés en % du PIB
PIB Produit intérieur brut du PECO exprimé en taux de croissance
r2 Taux de rentabilité courant du capital fixe du PECO (EBE/FBCF)
tc2 Variations du taux de change du pays de départ (zone euro) vis-à-vis du pays d’accueil
(PECO)
ieuro Taux d’intérêt à court terme du pays de départ (zone euro) (échéance inférieure ou
égale à 12 mois)
P1 Taux d’inflation du pays de départ (zone euro)
Les résultats économétriques de l’équation (3) sont synthétisés dans le tableau 48 cidessous :
225
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Tableau 48. Equation (3) : résultats des tests économétriques
Pays
Nature capitaux étrangers
BG
Ct
Pf
IDE
Total
Ct
Pf
IDE
Total
Ct
Pf
IDE
Total
Ct
Pf
IDE
Total
Ct
Pf
IDE
Total
Ct
Pf
IDE
Total
Ct
Pf
IDE
Total
Ct
Pf
IDE
Total
Ct
Pf
IDE
Total
Ct
Pf
IDE
Total
CZ
EE
HU
LT
LV
PO
RO
SI
SK
PIB
R2
TC2-P1
Ieuro-P1
Significativité et signes des variables
+
+
+
-
-
-
-
+
-
+
-
+
-
+
-
+
-
-
+
+
+
-
+
+
+
-
-
+
+
-
+
-
+
+
+
+
+
-
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
+
-
-
Source : données Eurostat et calculs auteur.
226
+
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
L’analyse du tableau 48 fait ressortir des faits pertinents vis-à-vis des variables
sélectionnées. Le PIB apparait significatif avec un signe positif dans la quasi-totalité des PECO
(sauf pour l’Estonie). Ce résultat légitime notre approche puisque c’est bien la convergence
économique des PECO, à travers l’augmentation de leur croissance économique, qui justifie
le besoin de capitaux étrangers.
Quant aux gains réalisés sur les actifs placés (r2), cette variable est de nombreuses fois
significative au sein des PECO sauf pour la Hongrie et la Slovaquie. La Slovaquie est à la fin de
son processus de convergence économique, justifiant peut être cette faible attractivité pour
r2. Alors que la Hongrie a connu d’importantes incertitudes quant à sa capacité à poursuivre
son développement économique, hypothéquant la confiance que pouvaient lui accorder les
agents économiques internationaux. Concernant les gains sur la variation des taux de change
avec tc2-P1, les résultats ne font pas apparaître de réelles différentiations entre les ancrages
fixes ou flexibles. Les investisseurs étrangers peuvent parier tant à la hausse qu’à la baisse
sur les fluctuations de ces monnaies.
La variable taux d’intérêt à court terme vient ici conforter l’endettement des agents
économiques internationaux en zone euro pour investir dans les PECO. Cette composante
est majoritairement significative quand les variables r2 et tc2-P1 sont elles aussi
significatives. Ce constat vient conforter l’intérêt des agents économiques à optimiser leurs
investissements, à travers des stratégies différenciées entre r2 et tc2, tout en cherchant à
minimiser le cout de l’endettement induit par un effet de levier en zone euro.
Les tests économétriques de l’équation (3) décrivent des variables significatives nombreuses
dans l’affectation des flux de capitaux étrangers. Les hypothèses que nous avons émises
prennent ici toute leur importance. L’existence de convergences ou divergences entre PECO
ne peut se faire qu’entre les variables r2 et tc2-P1. En effet, le PIB est le résultat du besoin
de capitaux induit par une croissance économique forte, présente dans tous les PECO (sauf
pour l’Estonie). Quant aux taux d’intérêt à court terme en zone euro, il est corrélé aux
besoins de financement pour les variables r2 et tc2-P1 comme nous avons pu le décrire
auparavant.
227
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Pour autant, il apparait clairement des stratégies différenciées des investisseurs
internationaux selon les PECO. La divergence de l’héritage soviétique et le degré de réussite
de la période de transition expliquent largement cet état des faits. L’analyse des
fondamentaux macroéconomiques devrait ultérieurement permettre de confirmer ces
tendances. Le tableau 49 ci-dessous illustre les stratégies des agents économiques au regard
des deux variables prépondérantes que sont r2 et tc2.
Tableau 49. Stratégies d’allocation des capitaux étrangers dans les PECO
Pays :
Bulgarie
-
Rép. Tchèque
-
Estonie
-
Hongrie
-
Lituanie
-
Lettonie
-
Pologne
-
Roumanie
-
Slovénie
-
Slovaquie
Descriptif :
Faible coût de la main d’œuvre et marché interne faiblement développé
(adhésion UE seulement en 2007) : stratégies favorables à toutes les
périodes pour r2.
Ancrage du taux de change à l’euro couplé à une perspective
d’adhésion à la zone encore lointaine : pas de stratégies pour tc2.
r2 et tc2 significatifs seulement pour les capitaux à court terme.
Pays fortement développé laissant supposer une diminution potentielle
de son attractivité.
r2 et tc2 sont significatifs sur plusieurs périodes : pays en proie à une
bulle spéculative sur la valeur de ces actifs et sur son taux de change.
Stratégies intermédiaires.
Pays fortement développé laissant supposer une diminution potentielle
de son attractivité.
Pressions spéculatives sur son taux de change, induites par des
difficultés budgétaires, légitime la significativité de tc2 à moyen terme.
r2 et tc2 sont significatifs sur plusieurs périodes : pays en proie à une
bulle spéculative sur la valeur de ces actifs et sur son taux de change.
Stratégies intermédiaires.
r2 et tc2 sont significatifs sur plusieurs périodes : pays en proie à une
bulle spéculative sur la valeur de ces actifs et sur son taux de change.
Stratégies intermédiaires.
r2 et tc2 significatifs à toutes les périodes. Pays de taille importante
d’où de fortes potentialités de développement.
Stratégies pariant sur la taille importante du marché polonais et sur
l’appréciation de sa monnaie.
r2 est significatif sur de nombreuses périodes, contrairement à tc2.
Stratégies des agents économiques beaucoup plus sur la rentabilité des
actifs placés que sur l’appréciation du taux de change (coût main
d’œuvre et taille marché interne justifient ces choix).
Significativités de r2 et tc2 à court et moyen terme.
Pays déjà fortement développé mais le marché lui est encore favorable.
tc2 est significatif seulement à long terme.
Perte de potentialité au regard du niveau de développement de ce
pays.
228
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Le tableau 49 illustre des stratégies d’allocation des capitaux des agents économiques
internationaux globalement en concordance avec le niveau de développement et les
spécificités des PECO. La temporalité des capitaux, à court, moyen et long terme en parallèle
à la significativité des gains effectués sur les actifs placés ou sur la variation des taux de
change, donnent suffisamment d’éléments pour conforter ce lien. Le comportement des
investisseurs devient source de vulnérabilité pour les PECO non dans l’allocation de leurs
capitaux, puisque ceux-ci y apparaissent légitimes, mais dans l’endettement à court terme
en zone euro pour financer ces investissements au sein des PECO.
La première étape de l’HIF de Minsky (Minsky, 1974) repose sur une situation de spéculation
favorable, à l’origine de comportements de plus en plus risqués dans la structure de
l’endettement des agents économiques. L’équation (3) a permis de tester la significativité de
cette approche théorique au regard des faits empiriques lors du processus de rattrapage
économique des PECO. La dynamique favorable de ces pays a fait ressortir une attractivité
forte à l’égard des capitaux étrangers avec des échéances de court, moyen et long terme. Il
en ressort des stratégies d’investissement différenciées entre ces pays, notamment avec les
gains sur les investissements effectués et sur la variation des taux de change.
Parallèlement, l’endettement des agents économiques a été réalisé en zone euro et à court
terme pour financer ces investissements. Il s’agit bien d’une source de vulnérabilité
potentielle, dans un contexte de non dégradation des fondamentaux macroéconomiques et
macro-financiers, à travers un effet de levier déstabilisateur. C’est l’inadéquation de
l’endettement à court terme en zone euro pour utiliser ensuite ces capitaux dans des
placements de court mais aussi de moyen et long terme qui va poser problème en cas de
choc financier externe à ces pays.
L’augmentation des taux d’intérêt en zone euro va matérialiser la seconde étape au sens de
Minsky. Dans ce contexte de raréfaction de la liquidité, il n’est pas sûr que les investisseurs
étrangers puissent encaisser les tensions induites. L’utilisation de l’effet de levier à outrance
pendant la période de spéculation favorable a conduit à des divergences d’horizons
temporelles fortes (endettement à court terme et pour des investissements à moyen et long
terme). L’instabilité de la sphère financière internationale qui en découlera n’aura en aucun
229
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
cas porté sur la dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers des
PECO.
230
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
3. Eléments de répulsion des capitaux étrangers dans les PECO : analyse des tensions
financières par les canaux de liquidité et de taux d’intérêt
La seconde étape de l’HIF de Minsky (Minsky, 1974) (schéma 15) correspond au
retournement de la spéculation positive, non justifiée par une dégradation des
fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers au sein des PECO. L’élément
perturbateur, l’augmentation du taux d’intérêt dans la zone euro, va contracter la liquidité
internationale à des fins de précaution suite à la politique monétaire restrictive de la BCE.
Cette augmentation de la préférence pour la liquidité induit une augmentation des taux
d’intérêt entre agents économiques et un rationnement du crédit. Le profil des investisseurs
devient de plus en plus risqué au regard de la dégradation, tant de la conjoncture
internationale qui s’ensuit que de la structure instable de l’endettement à court terme de
chacun.
231
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
L’instabilité de la sphère financière, va engendrer des effets de contagion importants ayant
pour origine des interdépendances fortes entre économies. Les stratégies de minimisation
du coût du financement de l’endettement (à court terme et dans la zone euro) et la
maximiser de la rentabilité des investissements (à moyen voire long terme dans les PECO), a
pu être démontré avec l’équation (3). Le schéma 16 en décrit la contagion à travers les
canaux les plus pertinents que sont la liquidité et le taux d’intérêt.
Schéma 16. Dynamique des effets de contagion de la zone euro aux PECO
La contagion entre la zone euro et les PECO se réalise tout d’abord à travers le canal du taux
d’intérêt. L’augmentation du taux directeur de la BCE va faire augmenter les taux d’intérêt,
élevant le coût du capital, et faire diminuer la rentabilité nette des placements sans pour
autant justifier d’une dégradation des actifs dans les PECO. Il s’en suit une diminution de
l’attractivité des PECO où les gains nets espérés diminuent d’autant plus que les taux
d’intérêt pratiqués entre agents économiques augmentent. L’endettement à court terme
afin de minimiser son coût imposera des renouvellements incessants, source d’instabilité.
232
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Quant à la liquidité, les agents économiques de la zone euro vont constituer des réserves de
monnaie par motif de précaution pour faire face à leurs propres difficultés présentes et
futures, à l’origine de sa contraction. Le retournement de la conjoncture va renforcer cette
contrainte de liquidité puisque la dégradation économique et financière augmente les profils
de risque des investisseurs. Les agents économiques qui se sont endettés à court terme, ne
trouvant plus les financements pour renouveler leurs échéances, vont devoir vendre leurs
actifs localisés dans les PECO. La liquidation en catastrophe de ces placements conduit à une
diminution de leur valorisation du fait d’une offre excessive face à une faible demande
d’achats. Le profil de risque des investisseurs étrangers se renforce davantage, où la valeur
de leurs dettes ne change pas alors que celles de leurs actifs diminuent.
La fuite des capitaux étrangers est le résultat de la diminution de l’attractivité des PECO
(augmentation du coût de l’endettement) mais aussi du besoin de liquidité des agents
économiques internationaux. En parallèle au déficit de la balance courante de ces pays,
récurent même en situation de tensions financières internationales, les taux de change sont
sous pression. Le défaut de stabilisation ou le risque de rupture des ancrages fait peser un
risque-pays trop élevé sur ces territoires. On retombe dans une dynamique de crise de
première génération. L’anticipation future des difficultés sur le taux de change va faire
précipiter le retrait des capitaux étrangers d’agents économiques qui n’avaient pourtant pas
a priori de problèmes de refinancement.
La dynamique de contagion entre la zone euro et les PECO étant bien réelle, il convient
d’utiliser l’analyse économétrique pour illustrer la réalisation de l’instabilité financière à
partir d’un choc financier dans le pays développé vers le pays émergent. Comme nous avons
déjà pu l’illustrer, deux canaux sont ici privilégiés : le canal du taux d’intérêt dans un système
de changes fixes asymétriques et le canal de la liquidité dans un système interconnecté de
systèmes bancaires nationaux exposé au risque de transformation (ou de liquidité).
Une modélisation s’apparentant à un « Early Warning System » issue des travaux de
Cartapanis, Dropsy et Mametz (Cartapanis, & al., 1999) a été retenue, eux-mêmes issus de
Sachs, Tornell et Velasco (Sachs, & al., 1996) ainsi que de Goldfan et Valdés (Goldfajn, & al.,
1997). L’objectif est de vérifier si les canaux du taux d’intérêt et de la liquidité sont
233
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
pertinents lors de chocs financiers externes. Afin de mener à bien la modélisation, un
indicateur de pression du taux de change est utilisé. Les tensions de l’instabilité financière
entre le pays développé vers le pays en voie de développement, à travers les fuites de
capitaux étrangers, vont se matérialiser par des pressions importantes sur l’ancrage du taux
de change.
Le recours à la modélisation de Cartapanis, Dropsy et Mametz (Cartapanis, & al., 1999) se
justifie tant par l’utilisation de variables similaires à celles de notre problématique (à savoir
les réserves de devises internationales, les variations du taux de change et le niveau des prix
à la consommation) que par l’application de cette modélisation sur les PECO.
L’objectif est de mettre en évidence des vulnérabilités à travers les effets de contagion
impactant les fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers et non du fait de la
qualité même de ces fondamentaux. Ainsi, l’illustration de ces vulnérabilités se matérialise
par des tensions sur les taux de change des PECO qui, s’ils venaient à rompre,
engendreraient une crise de change lors de la fuite généralisée des capitaux étrangers.
Deux groupes distincts apparaissent dans la régulation des taux de change au sein des PECO.
D’une part, les pays qui ont un ancrage fixe (ce sont les variations des réserves de devises
qui vont être les plus pertinentes) avec la Bulgarie, l’Estonie, la Lituanie, la Lettonie, la
Slovénie et la Slovaquie. D’autre part, les pays qui n’ont pas d’ancrage fixe mais qui assurent
néanmoins une certaine stabilité du taux de change (ce sont alors les variations du taux de
change qui vont être les plus pertinentes) avec la République Tchèque, la Hongrie, la Pologne
et la Roumanie.
L’indicateur de pression de crise sur le taux de change appelé CRISE (Cartapanis, & al., 1999)
est défini par l’équation suivante :
[
(
)
]
234
[
(
)
]
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
TCR = (TCN*Peuro)/P
TCR Taux de change réel (une hausse correspond à une dépréciation réelle)
TCN Taux de change nominal (unité de monnaie locale / euro)
Peuro Prix à la consommation euro
P Prix à la consommation du pays domestique
RES Réserves internationales de change (en euro or exclu)
𝜎DTCR Ecart-type de log (TCRt/TCRt-1)
𝜎DRES Ecart-type de log (RESt/RESt-1)
Cartapanis (Cartapanis, & al., 1999) identifie un ensemble de variables macroéconomiques
et macro-financières pertinent suivi durant des périodes de crises et de non-crises
(déterminé par l’indice CRISE). Le choix de ces indicateurs de vulnérabilité ne peut
évidemment refléter l’ensemble des sources de tensions alors induites en périodes de crises.
Cependant, l’objectif du modèle est d’utiliser des indices impactant et donc reflétant le
comportement des investisseurs internationaux « dans l’anticipation et dans l’évaluation de
la confiance accordée à la situation macroéconomique ou financière d’un pays. » (Cartapanis,
& al., 1999). Les indicateurs d’alerte (comprenant plusieurs variables) sélectionnés sont les
suivants : surévaluation du taux de change, déséquilibre commercial ou courant,
endettement externe, déséquilibre budgétaire, déséquilibre monétaire et déséquilibre du
secteur réel.
Dans notre cas, l’idée est d’utiliser l’indice CRISE afin de tester les variables reflétant les
canaux du taux d’intérêt et de la liquidité. La modélisation de Cartapanis (Cartapanis, & al.,
1999) n’a pas testé ces canaux. Il convient de faire les modifications afin d’y faire
correspondre le cadre d’analyse de notre étude. Cependant, les variables que nous avons à
disposition sont trimestrielles et en euro (notamment les flux de capitaux) alors que dans les
travaux de Cartapanis (Cartapanis, & al., 1999), l’indice CRISE est calculé en données
mensuelles et en dollar. Nous réalisons alors les deux interprétations de détection des
périodes de tensions sur les taux de change, en mensuelle et en dollar puis en trimestrielle
et en euro. La comparaison des résultats de ces deux méthodologies met en avant avec la
même exactitude les périodes de crises de celles de non crises.
235
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Le tableau 50, réalisé avec les données d’Eurostat, distingue les périodes de tensions, en
bleu, de celles sans tensions, en blanc (les périodes sans données sont en jaune).
Tableau 50. Résultats des tensions sur les taux de change des PECO
Bulgarie
République Tchèque
Estonie
Lettonie
Lituanie
1996Q2
1996Q3
1996Q4
1997Q1
1997Q2
1997Q3
1997Q4
1998Q1
1998Q2
1998Q3
1998Q4
1999Q1
1999Q2
1999Q3
1999Q4
2000Q1
2000Q2
2000Q3
2000Q4
2001Q1
2001Q2
2001Q3
2001Q4
2002Q1
2002Q2
2002Q3
2002Q4
2003Q1
2003Q2
2003Q3
2003Q4
2004Q1
2004Q2
2004Q3
2004Q4
2005Q1
2005Q2
2005Q3
2005Q4
2006Q1
2006Q2
2006Q3
2006Q4
2007Q1
2007Q2
2007Q3
2007Q4
2008Q1
2008Q2
2008Q3
2008Q4
2009Q1
2009Q2
2009Q3
2009Q4
236
Hongrie
Pologne
Roumanie
Slovénie
Slovaquie
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Le tableau 50 indique des périodes de tensions sur le taux de change des PECO, avec des
données trimestrielles, identiques aux résultats des périodes mensuelles des travaux de
Cartapanis (Cartapanis, & al., 1999). Il y a bien similitude des périodes de tensions sur les
taux de change, justifiant ainsi la cohérence entre les deux approches. L’indicateur de
pression spéculative CRISE peut alors être testé sur les variables reflétant les canaux de
contagion du taux d’intérêt et de la liquidité émise.
Dans le cadre de notre hypothèse, c’est l’augmentation du taux d’intérêt en zone euro qui va
mettre sous pression le taux de change des PECO (matérialisée par l’indice CRISE). Les deux
canaux qui sont à privilégier, sans obligatoirement être simultanés, sont le taux d’intérêt et
la liquidité. En effet, l’augmentation des taux en zone euro à court terme va mettre en
difficulté les agents économiques qui ont pu s’endetter à court terme en zone euro pour
investir à moyen et long terme dans les PECO. Comme nous avons pu le décrire auparavant,
le retrait des capitaux va conduire à une diminution de l’attractivité des PECO et à la
nécessité de satisfaire un besoin de liquidité pour rembourser les échéances d’endettement.
Il n’est pas possible d’utiliser dans une même équation plusieurs variables de taux d’intérêt
et/ou de capitaux (biaisant les résultats au regard du même sens de causalité de ces
variables). L’idéal est alors de sélectionner une seule variable d’investissements étrangers
(total, Ct, Pf et IDE) et d’en analyser l’impact avec une seule variable des taux d’intérêt à
court terme pour une échéance de 12 mois maximum (journalier, 1 mois, 3mois, 6mois et 12
mois) pour avoir des équations plus lisibles.
L’équation (4) repose sur l’utilisation de l’indice CRISE comme variable à expliquer avec le
taux d’intérêt à court terme en zone euro et les flux de capitaux étrangers comme variables
explicatives.
Equation (4) : CRISE = 𝛼0 + 𝛼1.ieuro + 𝛼2.I(t)
avec ieuro journalier, 1 mois, 3 mois, 6 mois ou 12 mois
avec I(t) à court terme, portefeuille, IDE ou total.
237
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
CRISE Indice de pression sur le taux de change
ieuro Taux d’intérêt à court terme en zone euro (périodicité inférieure ou égale à 12 mois)
I(t) Flux de capitaux étrangers totaux exprimés en millions d’euros
I(Ct) Flux de capitaux étrangers à court terme exprimés en millions d’euros
I(Pt) Flux de capitaux étrangers de portefeuille (moyen terme) exprimés en millions d’euros
I(IDE) Flux de capitaux étrangers d’IDE (long terme) exprimés en millions d’euros
Des décalages temporels ont été réalisés (jusqu’à trois périodes) afin d’inclure l’ensemble
des effets sur une durée d’un an maximum. Les données étant trimestrielles, cette
amplitude permet d’inclure les conséquences d’un endettement à court terme pour des
investissements à moyen, voire long terme. Le court terme est abordé avec des échéances
journalières, 1 mois, 3 mois, 6 mois puis 12 mois au maximum. Les agents économiques qui
se sont endettés à 12 mois seront en difficultés au maximum 12 mois après s’ils doivent se
refinancer. Les résultats des tests économétriques de l’équation (4) sont donnés dans le
tableau 51.
Tableau 51. Equation (4) : résultats des tests économétriques
Pays
Canal du taux d’intérêt
Significativité des variables
BG
CZ
EE
Canal de la liquidité
Significativité des variables
Pf
Degré de vulnérabilité
potentiel
Moyen
Total, IDE
Fort
Total, Ct
Faible
Total, Ct, Pf
Moyen
Pf, IDE
Fort
IDE
Moyen
Total, Ct, Pf, IDE
Fort
Pf
Total, Ct
Moyen
Faible
Ct, IDE
Fort
IEUROJ(-3), IEURO1M(-3),
IEURO3M(-3)
IEUROJ, IEURO1M, IEURO3M,
IEURO6M, IEURO12M
HU
LT
IEUROJ, IEURO1M, IEURO3M
IEURO6M, IEURO12M
LV
PL
IEUROJ, IEURO1M, IEURO3M,
IEURO6M, IEURO12M, IEUROJ(3), IEURO1M(-3), IEURO3M(-3)
RO
SI
SK
IEURO1M(-2), IEURO3M(-2),
IEURO6M(-2), IEURO12M(-2)
Source : données Eurostat et calculs auteur.
Le canal du taux d’intérêt (avec échéance journalière, à 1 mois, 3 mois, 6 mois et 12 mois),
est significatif pour la République Tchèque, l’Estonie, la Lituanie, la Pologne et la Slovaquie. Il
n’apparait pas de divergences assez fortes entre ces PECO pour permettre d’identifier des
sous-catégories de pays. L’endettement des agents économiques à court terme en zone euro
238
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
pour ensuite investir dans les PECO semble se confirmer ici. La variation des taux à court
terme dans la zone euro va directement mettre sous pression leur taux de change, posant de
nombreuses interrogations quant à la viabilité de leur ancrage.
Le canal de la liquidité se décompose en capitaux totaux, de court terme, de portefeuille et
d’IDE. Les relations entre la fluctuation des capitaux étrangers et l’indice de pression CRISE
sur le taux de change sont significatives pour tous les PECO. Ce résultat apparait logique
puisque les pressions sur les taux de change et les réserves de devises sont issues de la fuite
de ces mêmes capitaux. Il y a cependant quelques spécificités, à savoir que tous les pays
(sauf l’Estonie et la Slovénie) ont des variables significatives à moyen et long terme
(portefeuille et IDE principalement). Cet aspect met en avant des vulnérabilités fortes au
sein de ces pays puisque ce sont les capitaux de moyen et long terme qui partent
majoritairement et non ceux de court terme.
L’endettement en zone euro à court terme (canal du taux d’intérêt) pour en investir le
produit dans des investissements de moyen et long terme (canal de la liquidité) ne peut
rendre la sphère financière qu’instable. Pour les pays qui ont des variables significatives pour
ces deux canaux (effective pour la République Tchèque, la Lituanie, la Pologne et la
Slovaquie), il y a bien illustration d’une vulnérabilité forte dans la structure de l’endettement
des agents économiques internationaux. Pour autant, à aucun moment il n’a été question de
la qualité de leurs fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers. Les pays de ce
groupe sont les plus avancés économiquement de la zone. Les agents économiques
prendraient-ils plus de risques pour des pays apparaissant macro économiquement plus
stables ?
Concernant les autres PECO, il n’y a que les variables des capitaux de moyen et long terme
qui sont significatives (Bulgarie, Hongrie, Lettonie et Roumanie). Leur fuite peut se justifier
par d’autres éléments que la contraction des taux d’intérêt de la zone euro, même si
l’équation (3) a pu confirmer l’utilisation des taux d’intérêt en zone euro à court terme.
L’Estonie fait exception puisqu’elle a un canal du taux d’intérêt significatif mais en parallèle à
des capitaux de court terme qui se retirent (s’endetter à court terme pour investir aussi à
239
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
court terme apparait peu risqué). Quant à la Slovénie, il n’y a que les capitaux totaux et de
court terme qui sont significatifs. Ce profil n’apparaît, lui non plus, pas risqué.
Comme l’équation (4) a pu le démontrer, l’instabilité financière internationale repose sur un
endettement en euro à court terme dont le produit est utilisé à travers des investissements
à moyen, voire long terme, dans les PECO. Les effets de contagion, à travers les canaux de
taux d’intérêt et de liquidité, sont fortement déstabilisateurs comme la crise des Subprimes
de 2008 en témoigne. Il apparait difficile pour les PECO de lutter contre ces pressions
puisqu’il ne s’agit pas de déséquilibres macroéconomiques ou macro-financiers internes
mais relevant du fonctionnement de la sphère financière internationale. Pourtant, la viabilité
d’une dynamique de rattrapage à moyen terme dépendra de la capacité des PECO à amortir
ces chocs internationaux à court terme, récurrents au marché financier international.
240
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Conclusion intermédiaire
Ce chapitre s’est approprié les hypothèses émises selon notre problématique à travers de
réaliser des tests économétriques de données sur les PECO. Ces pays présentent des profils
de vulnérabilité induits par leurs stratégies de rattrapage économique à l’origine d’une
amplification des interdépendances.
Les équations (1) et (2) confirment le rôle fondamental des capitaux étrangers, tout d’abord
pour compenser le déficit de la balance courante, nécessaire à la restructuration du tissu
économique de ces territoires, mais aussi dans la composition du stock de devises afin
d’assurer la stabilisation, voire l’ancrage, du taux de change. Ces deux équations ont pu faire
émerger des divergences d’allocation des capitaux au sein des PECO (totaux, court terme,
portefeuille et IDE) qui semblent être le fruit de stratégies différenciées des agents
économiques internationaux. De plus, la nature de l’ancrage fait apparaitre des différences
légitimes et logiques entre les PECO, où l’utilisation des réserves de devises se fera
beaucoup plus pour les ancrages fixes que flexibles.
Quant à l‘instabilité de la sphère financière, reposant sur l’approche de l’HIF de Minsky
(Minsky, 1974), elle peut être décrite en deux étapes. La première est qualifiée de
spéculation favorable, confirmée par l’équation (3), et conduit à la création d’une structure
d’endettement vulnérable (financement à court terme en zone euro pour utiliser ces
capitaux dans des placements de moyen voire long terme dans les PECO). Les résultats
mettent en avant des différences dans les stratégies d’allocation des capitaux opérées par
les agents économiques internationaux vis-à-vis des PECO, notamment dans la recherche de
gains dans les placements effectués et sur les variations des taux de change.
La seconde étape dans l’HIF de Minsky (Minsky, 1974) illustre le retournement de cette
dynamique où un élément perturbateur, l’augmentation des taux d’intérêt dans la zone
euro, amplifie la préférence pour la liquidité. Il s’ensuivra des effets de contagion à travers
les canaux de la liquidité et du taux d’intérêt, confirmés par l’équation (4) avec la fuite
généralisée des capitaux étrangers.
241
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Un premier groupe apparait fortement vulnérable avec des placements à moyen et long
terme en contrepartie d’endettements à court terme (majoritairement les PECO les plus
avancés avec la République Tchèque, la Lituanie, la Pologne et la Slovaquie). Un deuxième
groupe est dans une situation intermédiaire mais potentiellement risquée avec la fuite de
placements à moyen et long terme (Bulgarie, Hongrie, Lettonie et Roumanie). Enfin, un
dernier groupe n’apparait pas du tout vulnérable (Estonie et Slovaquie).
Au regard de ces conclusions, les vulnérabilités potentielles des PECO ne peuvent être
totalement sous leur contrôle puisqu’elles ont pour origine le reste du monde. Pourtant, les
résultats des équations économétriques mettent en avant des divergences de stratégies
entre pays par les agents économiques internationaux. Cette différenciation interpelle quant
à la qualité du positionnement dans le rattrapage économique de ces pays. La viabilité de la
dynamique de développement, en parallèle à des marges de manœuvres conjoncturelles
suffisantes (afin d’assouplir les effets des tensions jusqu’au retour à la normale du marché
financier international), pose la question d’une alternative crédible qu’il convient d’analyser.
242
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Chapitre 6
Détermination de la qualité du positionnement des PECO : entre turbulences
financières et viabilité du rattrapage économique.
Introduction intermédiaire
La capacité des PECO à anticiper les tensions financières internationales, afin de leurs
donner l’opportunité de s’adapter pour les atténuer, n’apparait que faiblement
envisageable. D’abord, parce que l’élément perturbateur qui va contracter l’afflux des
capitaux étrangers a pour origine le reste du monde. Ensuite, parce que la non dégradation
de leurs variables macroéconomiques et macro-financières ne permet pas de témoigner
d’une fragilité visible, et donc non ajustable, pouvant résulter de leurs fondamentaux. La
crise des Subprimes en 2008 confirme cet état des faits, où tous ces pays ont été fortement
impactés par la contraction de la liquidité internationale. Le graphique 59 illustre cette
tendance où l’ensemble des PECO (Bulgarie, République Tchèque, Estonie, Lettonie, Lituanie,
Hongrie, Pologne, Roumanie, Slovénie et Slovaquie) ont vu leur taux de croissance
économique devenir négatif fin 2008.
Graphique 59. Taux de croissance du PIB en pourcentage des PECO
Source : Eurostat.
243
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Même s’il n’apparait que peu envisageable de contourner l’impact des tensions financières
internationales, la capacité de rebond des PECO a pu apparaitre divergente lors de l’après
crise. En effet, certains de ces pays ont pu bénéficier d’un retour rapide à la croissance (dès
mi-2009 pour la République Tchèque, la Slovénie, la Slovaquie, la Hongrie et la Pologne)
alors que d’autres plus tardivement et faiblement (au mieux début 2010 pour la Bulgarie,
l’Estonie, la Lituanie, la Lettonie et la Roumanie). Au regard de ces éléments, le chapitre
suivant a pour ambition d’analyser la qualité du positionnement économique pour
comprendre l’alternative crédible qui se dessine pour certains PECO dans le contexte décrit
par la problématique.
L’hypothèse qui est soulevée est la suivante : les fondamentaux macroéconomiques et
macro-financiers n’étant pas dégradés avant la crise, si les PECO arrivent à résister aux
pressions externes, leur sortie de crise pourrait leur être de nouveau bénéfique puisqu’ils
seront encore attractifs (taux de rentabilités toujours plus élevés que dans la zone euro). La
question sous-jacente est de savoir comment des pays qui ne peuvent éviter les tensions
financières internationales sont capables de les supporter jusqu’au retour à la normale du
marché financier international.
Afin de juger de la capacité des PECO à perpétuer une attractivité favorable lors de l’après
crise, il s’agira de définir la méthodologie de la démarche, reposant sur une sélection de
fondamentaux adéquate à la problématique développé dans ce travail. Deux aspects
importants vont émerger, avec des dualités temporelles divergentes, pour analyser puis
définir la résistance des PECO. Il s’agit tout d’abord de l’efficacité des outils conjoncturels de
court terme, permettant de sauvegarder les fondements du processus de croissance
économique face aux pressions financières externes. Puis de la viabilité du processus de
rattrapage économique de moyen terme, nécessaire à la restructuration du tissu
économique pour faire émerger des spécialisations sectorielles à l’internationale. La qualité
du positionnement des PECO, qu’il soit de court terme ou de moyen terme, ne peut
empêcher les pressions internationales à l’origine des tensions sur le taux de change. Mais il
va conditionner l’amplitude du rebond lors de l’après crise si le territoire a pu rester
attractif.
244
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Le cheminement ainsi décrit illustre toute L’importance au regard de la vulnérabilité
principale que ces pays abordent dans le retrait potentiel de capitaux étrangers. Le degré de
rebond des PECO est alors conditionné par leur capacité à encaisser les chocs financiers
externes, à travers des outils de régulation conjoncturelle, tout en maintenant un processus
de développement viable, à travers la qualité de leurs fondamentaux macroéconomiques et
macro-financiers. Le retour rapide des capitaux étrangers, conditionné par la crédibilité des
aspects temporels de court et moyen terme décrits précédemment, reste la meilleure
alternative pour contrecarrer les pressions sur le taux de change.
L’étude analytique de la qualité du positionnement de chaque PECO va permettre in fine de
constituer des groupes de pays au regard des convergences et des divergences face aux
facteurs de vulnérabilité. Ces éléments sont indispensables pour expliquer la nature des
rebonds après la crise des Subprimes de 2008.
245
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
1. Méthodologie de la démarche : une dynamique en trois thématiques
Le développement des parties 1 et 2 a permis de faire ressortir un nombre de variables
déterminantes pour répondre à l’hypothèse posée. Leur agrégation les synthétise en 3
thématiques de vulnérabilités potentielles qui caractérisent au mieux les PECO. Elles ont
pour ambition d’exposer la viabilité du développement économique de chaque pays en
parallèle à sa capacité de régulation dans le cadre de son positionnement tant externe
qu’interne. Comme le décrit le schéma 17, il convient d’avoir un raisonnement dynamique
où chacune des trois thématiques apparait essentielle vis-à-vis de la suivante. Cette
typologie a pour ambition de distinguer les pays avec de bons fondamentaux, c'est-à-dire
ceux qui ont un besoin de liquidité seulement durant la période transitoire afin d’améliorer
leur processus productif, de ceux qui ont des fondamentaux plus faibles, c'est-à-dire des
pays qui ont des besoins de liquidité mais ne justifiant pourtant pas d’amélioration
économique. L’idée est de déterminer si les flux de capitaux étrangers sont utilisés au
maximum de leur potentiel tout en étant en mesure d’en amoindrir les aspects négatifs
(pressions spéculatives et instabilité financière principalement).
Schéma 17. Agrégats sélectionnés afin d’illustrer chaque thématique
Qualité de la
régulation :
Structure interne :
Robustesse
Economique.
Pilotage de la dette
publique.
Robustesse
bancaire.
Pilotage de
l’inflation.
Qualité du
positionnement
international :
Aspect commercial
Aspects monétaire
et financier.
246
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Le schéma 17 a pour ambition d’illustrer l’exposition de chacune des économies émergentes
dans leur stratégie d’intégration au reste du monde adoptée. La qualité du positionnement
international, au regard des aspects commerciaux, monétaires et financiers, permet de juger
de la viabilité de l’intégration du pays vis-à-vis de l’extérieur dans sa dynamique de
rattrapage économique. L’état de sa structure interne, économique et bancaire, décrit
l’adéquation de son positionnement international avec son aptitude de transmission
intérieure (qualité de la restructuration du tissu industriel et diffusion au reste de
l’économie). Quant à la troisième et dernière thématique, la qualité de la régulation avec le
pilotage de la dette publique et de l’inflation, il s’agit de la capacité du pays à réguler les
périodes de tensions financières internationales de court terme afin de rendre viable la
dynamique de rattrapage économique de long terme.
Les vulnérabilités des PECO, dans le cadre de leur processus de convergence dans un
contexte financier instable, suppose une sélection d’agrégats macroéconomiques et macrofinanciers offrant l’opportunité de les illustrer. Cependant, leurs spécificités se doivent d’être
présentées afin de marier au mieux tout jugement de la qualité de leur fondamental tant à
court terme qu’à moyen voire long terme. Il convient d’exposer les composants de chaque
thématique afin d’en expliciter le fondement.
La première thématique (schéma 18) a pour ambition de décrire le positionnement externe
du pays. La double intégration commerciale et financière, complémentaire puisque ce sont
les capitaux étrangers qui permettent d’acquérir des biens d’équipements afin de
restructurer le tissu économique nécessaire à l’émergence d’une spécialisation sectorielle à
l’international, suppose de sélectionner les variables suivantes :
247
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Sché ma 1 8 . Thé matique 1 : qualité du positionne ment inte rnational
Thématique 1 :
Qualité du positionnement international.
As pect commercial.
As pects monétaire et financier.
Degré de
soutenabilité
de
l’endettement
extérieur de Ct
Solde
courant
Taux
d’ouverture
commercial
Choix du
régime
de
change
Indicateur de
compétitivité
-prix
Degré de
soutenabilité
de
l’endettement
extérieur de
Mt et Lt
Les PECO ont tous un très fort degré d’ouverture commerciale avec une dépendance
indéniable à l’UE. Afin de rendre l’analyse de cet indicateur plus pertinent, il a été choisi de
décomposer son étude par secteurs au regard du solde des balances commerciales.
Logiquement, certains secteurs doivent apparaitre déficitaires (Combustibles Minéraux,
Lubrifiants et Produits Annexes ; Produits Alimentaires, Boissons et Tabac ; Produits de Base)
et d’autres excédentaires en raison des spécialisations sectorielles basées sur
l’industrialisation
(Autres
Articles
Manufacturés ;
Machines
et
Matériel
de
Transport ; Produits Chimiques et Connexes).
L’indicateur de compétitivité-prix est l’un des éléments-clés de l’exposition concurrentielle
des pays émergents vis-à-vis des pays développés, au regard du coût relativement faible de
leur main d’œuvre. Il apparait cohérent de voir si l’appréciation du taux de change réel,
effectif dans tous les PECO et source de perte de compétitivité-prix à l’export, est
systématiquement synonyme de dégradation de la balance courante (totale, puis seulement
pour les biens). Son évolution doit définir la nature du positionnement compétitif des PECO.
Le solde négatif de la balance courante, commun à tous les PECO pousse à analyser cet
248
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
agrégat à travers l’évolution de sa tendance, de nature conjoncturelle ou structurelle, pour
être plus pertinent.
Le choix du régime de change est emblématique de la stratégie adoptée par les PECO vis-àvis de leur intégration à l’euro. Un ancrage à la monnaie unique est source d’amplification du
processus de rattrapage économique (renforcement de l’effet d’attractivité) avec une
volonté d’intégrer la zone monétaire rapidement. Mais il peut aussi s’avérer dangereux face
aux pressions spéculatives, à la perte de la politique monétaire et à la non-utilisation de la
politique budgétaire (respect des critères de Maastricht).
La stabilisation voire l’ancrage du taux de change, nécessaire pour être attractif vis-à-vis des
capitaux étrangers, suppose aussi de réguler au mieux l’exposition du pays à l’endettement
en devises à court terme. Elle n’est potentiellement soutenable qu’au regard du différentiel
entre le niveau des réserves de devises avec l’endettement à court terme. Quant à
l’endettement en devises à moyen, voire long terme, sa viabilité dépend de la capacité du
pays à créer de la richesse pour en assurer le remboursement ultérieurement. L’indicateur
dette extérieure/PIB est l’agrégat qui permet de l’illustrer.
La structure interne, deuxième thématique (schéma 19), interroge sur la qualité de
l’utilisation des capitaux étrangers au sein du pays dans son ensemble. La reconversion en
cours du tissu industriel est conditionnée par la diffusion des transferts de technologies et
des compétences des secteurs centrés sur l’exportation, bénéficiant de l’attractivité des IDE,
vers le reste de l’économie. Il y est aussi question des crédits accordés au niveau local, à
travers les financements interbancaires, qui jouent pleinement leur rôle de diffusion dans le
potentiel de développement local. Les éléments qui permettent de juger de l’effectivité de la
dynamique de développement sont les suivants :
249
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Schéma 19. Thématique 2 : qualité de la structure interne
Thématique 2 :
Qualité de la structure interne.
Robustesse Economique.
Robustesse Bancaire.
Stocks
d’IDE/PIB
Tiers one
Efforts
de R&D
Prêts non
performants
Poids de
l’industrie
dans le PIB
Présence des
banques
étrangères
L’industrie, au regard du choix de la dynamique de rattrapage de ces pays, est l’élément
moteur de la reconversion de l’économie par l’effet entraînant qu’il procure. Une analyse du
poids de ce secteur, en comparaison des deux autres que sont l’agriculture et les services,
informe de l’état d’avancement de la restructuration. En parallèle, la description de sa
dynamique permet de juger de son potentiel de progression à court terme.
La convergence économique de ces territoires suppose à terme la perte d’un avantage
concurrentiel (une main d’œuvre peu coûteuse qui a tendance à s’apprécier avec
l’augmentation des niveaux de vie). L’effort de R&D, renforçant la qualité des spécialisations
vers des secteurs à plus haute valeur ajoutée, est l’alternative indispensable pour la
réalisation de la convergence économique. La R&D étrangère n’est pas présente au sein des
PECO, traduisant une localisation des capitaux vers des activités encore à faible valeur
ajoutée. Mais la nature de la R&D nationale décrit la viabilité des efforts fournis pour
poursuivre le développement économique. Sa répartition se fait en deux tendances
distinctes au sein des PECO. La R&D peut être de nature fondamentale et peu productive, se
localisant principalement dans l’enseignement supérieur et les services. Ou la R&D est de
250
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
nature appliquée et à vocation productive, au sein des entreprises avec une concentration
dans l’industrie manufacturière.
Les stocks d’IDE présent dans les PECO, par nature stables et à vocation productive, ne sont
pas toujours destinés d’abord aux secteurs industriels au regard des stratégies adoptés par
ces pays. Ils peuvent se localiser dans des secteurs plus spéculatifs (immobilier,
construction…), démontrant la mauvaise allocation des capitaux étrangers et la défaillance
de crédibilité du processus de rattrapage économique de certains. Quant à l’origine des
capitaux, majoritairement issus de l’Europe occidentale, il peut exister une véritable
dépendance vis-à-vis d’un ou de plusieurs de ces pays. Face à l’instabilité récurrente de la
sphère internationale, une dépendance accrue à l’un de ces pays développés est synonyme
de soutien potentiel lors des tensions.
L’une des caractéristiques communes aux PECO réside dans la forte présence des banques
étrangères. Ces filiales adoptent les méthodes de gestion internationale et bénéficient du
soutien financier de leur maison-mère, favorable à une meilleure allocation des crédits. Elles
ont la capacité de se faire refinancer par leur structure de rattachement et contourner les
politiques monétaires locales, à l’origine de problèmes de régulation macro-prudentielle. Les
différentes réglementations bancaires ont mis en avant l’obligation d’avoir des fonds
propres afin de subvenir à la réalisation potentielle de ce genre de risques. L’intérêt du Tiers
One, directement issu de ces réflexions, est d’informer sur la robustesse du secteur bancaire
avant et après la crise. L’activité financière a été mise à rude épreuve. La dégradation de la
conjoncture économique, en parallèle à un endettement en devises au regard de la
stabilisation des taux de change avec l’euro, a renforcé leurs vulnérabilités. Quant aux prêts
non performants, il permet de se focaliser sur la viabilité de l’activité de crédits à travers la
défaillance des prêts au sein des PECO. Logiquement, la dégradation de la conjoncture
économique induite par les tensions financières internationales, a fragilisé de nombreux
agents économiques locaux.
La qualité de la régulation est la troisième et dernière des thématiques développées ici
(schéma 20). Les pouvoirs publics jouent un rôle déterminant dans la stabilité
macroéconomique et macro-financière du pays. Le besoin en liquidité internationale peut
251
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
être la source de fortes tensions dans l’économie locale. Le gouvernement doit être capable
d’utiliser les outils de la politique économique pour encadrer ces tensions à travers le
pilotage de la dette publique et de l’inflation. Cependant, celui-ci n’a pas toujours les
moyens d’intervenir efficacement (politique monétaire indisponible avec la stabilisation
voire l’ancrage du taux de change et du contrôle du système bancaire par l’étranger,
politique budgétaire atone face aux obligations du Traité de Maastricht pour intégrer la zone
euro…). Autant de caractéristiques qui vont rendre délicates la régulation à court terme des
variables de l’économie par des politiques conjoncturelles.
Schéma 20. Thématique 3 : qualité de la régulation
Thématique 3 :
Qualité de la régulation.
Pilotage de la dette publique.
Pilotage de l’inflation.
Taux
d'inflation
Endettement
public
Instabilité du
solde
budgétaire
Instabilité de
l'inflation
La dette publique est un indicateur pertinent de la capacité pour un gouvernement à
dynamiser son économie en cas de crise. Différents aspects interviennent pour juger de son
efficacité : le niveau de l’endettement (un endettement trop élevé ne permettra pas de
réaliser une politique budgétaire de relance), et la composition de l’échéance de
l’endettement (à court, moyen ou long terme), qui traduit les difficultés de pérennisation
des dettes publiques.
L’outil budgétaire est par définition contra-cyclique. Il doit dynamiser l’économie en
périodes de récession, afin d’amoindrir les effets macroéconomiques négatifs, et se
252
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
contracter en période de croissance, pour réduire l’endettement et reconstituer des marges
de manœuvre. Pourtant, le solde budgétaire n’est pas toujours utilisé avec efficacité; s’en
suit une pro-cyclicité induisant une amplification de la conjoncture économique, qu’elle soit
favorable ou non.
L’inflation détermine la capacité du pays à réguler les tensions monétaires au sein de
l’économie au regard de l’afflux des capitaux étrangers et de l’optimalité de leur allocation
sur le territoire national. Cet indicateur est d’autant plus important puisque l’inflation traduit
une appréciation des prix, source de perte de compétitivité à l’international lorsque les taux
de change sont stabilisés, voire ancrés à l’euro. Il faut d’abord apprécier si l’inflation totale
apparait soutenable ou non puis si sa tendance, qui matérialise les efforts du pays, s’inscrit à
la baisse ou à la hausse.
La décomposition de l’inflation par secteurs permet d’affiner l’analyse afin de déceler d’une
part des tensions structurelles et légitimes procédant à l’effet de rattrapage (Boissons
Alcoolisées, Tabac et Narcotiques ; Electricité, Gaz et Autres Combustibles ; Energie…),
d’autre part aux tensions procédant à une tendance conjoncturelle, voire spéculative, de la
dynamique (Logement, Eau, Electricité, Gaz et Autres Combustibles ; Loyers d'Habitation
Réels…). Il faut notifier l’existence de deux sous-périodes avec des origines différentes pour
l’inflation : 1995/2000 relative à la stabilisation postsocialiste (forte diminution de l’inflation)
et 2001/2009 relative à l’adhésion à l’Union européenne (forte augmentation de l’inflation).
Nous n’étudierons que la 2ème période puisqu’elle s’inscrit dans la détermination de la
qualité des fondamentaux d’avant crise pour envisager l’efficacité de la politique monétaire
lors des tensions internationales en 2008.
La description des trois thématiques permettra d’illustrer le positionnement des PECO tant à
court terme, lors des tensions financières internationales, qu’à moyen terme, dans le cadre
du processus de rattrapage économique. La volonté de définir une approche dynamique
repose sur la complémentarité de la gestion à court terme pour s’assurer de la convergence
économique à moyen terme, sachant que ces deux temporalités sont indissociables pour la
viabilité du processus de croissance économique. Ces deux aspects informent de la capacité
de rebond des PECO face à des tensions internationales qu’ils ne peuvent éviter. La
253
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
méthodologie du raisonnement ainsi décrite, il convient de structurer les agrégats
macroéconomiques et macro-financiers par rapport aux cas spécifiques des PECO pour en
tirer le maximum d’informations pertinentes pour l’interprétation de leur positionnement.
254
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
2. Analyse ciblée de la qualité des fondamentaux des PECO
La détermination de la qualité du positionnement des PEC0, nécessaire pour juger de leur
capacité à rebondir après les turbulences financières internationales, impose de s’interroger
sur les divergences mais aussi sur les convergences entre ces territoires. L’idée est
d’expliquer le comportement de chacun, en particulier durant la crise des Subprimes en
2008, à travers la détermination des fondamentaux les plus probants. La démarche repose
sur la description des agrégats composant les thématiques qui ont été décrites
précédemment, à savoir la qualité du positionnement international, la structure interne et la
qualité de la régulation. La dynamique favorable de ces pays, source d’attractivité avant la
crise, le sera toujours si les PECO ont encore un fort potentiel de développement lors de
l’après crise. Un grand nombre de ces territoires, même avec des profils spécifiques, laisse
entrevoir la création de regroupements.
Afin d’illustrer cet état des faits, dès à présent une présentation par groupe, puis par pays les
composant, est réalisée pour plus de lisibilité (tableau 52).
Tableau 52. Regroupement des PECO : entre qualité du positionnement à court et à moyen
terme
255
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Le tableau 52 liste la répartition des PECO afin de clarifier les regroupements effectués. Le
groupe A correspond aux pays qui ont de bons fondamentaux à court et moyen terme avec
la République Tchèque, la Slovaquie et la Slovénie. Le groupe B intègre les pays
intermédiaires, avec la Pologne et la Roumanie. Le groupe C comprend l’Estonie, la Lituanie,
la Lettonie, la Bulgarie et la Hongrie, pays avec des faiblesses à court ou moyen terme dans
la qualité de leur positionnement. Ces deux composantes de court et moyen terme doivent
permettre de définir in fine leur capacité de rebond lors de l’après crise. Les caractéristiques
groupe par groupe vont être effectuées, complétées par celles de chaque pays les
composants, selon la classification réalisée dans ce tableau.
Le groupe A, à savoir celui des pays les moins vulnérables, comprend la République Tchèque,
la Slovaquie et la Slovénie. Ces pays ont su se restructurer favorablement depuis le début de
la période de transition en tournant leur tissu industriel vers les exportations. Une véritable
politique de restructuration a été effectuée, témoignant d’une viabilité de la qualité du
processus de rattrapage économique. Aujourd’hui, ils sont fortement compétitifs mais ils
n’ont pas encore achevé leur convergence face aux autres pays de l’Union européenne. La
fuite généralisée des capitaux étrangers dans un premier temps, comme on a pu en rendre
compte précédemment, puis l’impact du commerce international, ont induit une diminution
de leur croissance (notamment dans les spécialisations relatives à l’industrie automobile).
La régulation de la politique économique est efficace (faible endettement public et peu de
tensions inflationnistes pour des pays en cours de rattrapage économique). Leurs déficits
courants restent faibles, contenus et légitimes. La stabilité du taux de change n’est plus une
contrainte pour la Slovénie et la Slovaquie (adoption de l’euro en 2007 et 2009). Pour la
République Tchèque, un flottement administré lui permet une certaine flexibilité, même si
elle bénéficie de suffisamment de réserves en devises au regard de son endettement
externe à court terme, écartant l’hypothèse d’une crise de son taux de change.
256
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Les fondamentaux de ces pays sont suffisamment solides. Cependant, les effets de
dépendance, tant vis-à-vis de l’Europe occidentale que des autres PECO, sont à la source de
vulnérabilités potentielles. Différents schémas (schémas 21, 22 et 23) présentent la
composition de leurs fondamentaux au regard des thématiques mises en avant
précédemment. La qualité de leur positionnement international, de leur structure interne
ainsi que de leur régulation y est largement favorable tant pour aborder les pressions à court
terme de l’instabilité financière internationale que dans la viabilité à long terme de leur
dynamique de rattrapage économique. Pour ce groupe de pays, on peut supposer un retour
rapide des capitaux étrangers lors de l’après-crise rendant viable leur dynamique de
convergence.
Au début de la transition, la Tchécoslovaquie était l’un des pays les plus riches des PECO en
termes de PIB par habitant. Elle a su tirer avantage d’une forte industrialisation héritée de
l’ère soviétique, d’un faible endettement extérieur, d’une industrie nucléaire et d’un
processus de réformes déjà en cours bien avant 1989. Ainsi, la République Tchèque actuelle
bénéficie d’activités sectorielles dans l’industrie, orientées à l’internationale avec des soldes
courant fortement excédentaires (schéma 21). Ces spécialisations sont bien intégrées au
regard de l’absence de corrélation entre l’appréciation du taux de change et le solde de la
balance courante, témoignant d’une conversion de la compétitivité-prix vers celle hors-prix
(gage de réussite en cours du processus de développement économique).
L’industrie joue un rôle déterminant avec un poids et une dynamique importante, soutenue
par une R&D qui lui est affectée à 1.47% du PIB. Il existe une forte présence des Pays-Bas,
signe d’une dépendance à l’un des pays d’Europe occidentale et preuve de soutien lors des
périodes difficiles. Sans ancrage officiel à l’euro, et même avec la présence de banques
étrangères (92% des actifs et 93% des crédits), le tiers one s’est peu dégradé durant les
tensions de 2008 (15.15% en 2005 et 11.37% en 2008). L’ampleur de la régulation, qu’il
257
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
s’agisse du pilotage de la dette publique ou de l’inflation, est contenue, témoignant d’une
marges de manœuvre optimale si besoin était.
Contrairement à la Slovénie et à la Slovaquie, la République Tchèque n’a pas fait le choix
d’adhérer rapidement à l’euro. Ce pari apparait aujourd’hui gagnant puisqu’elle peut encore
faire fluctuer sa monnaie afin de s’adapter aux chocs externes. La stabilisation du déficit de
la balance courante totale et la diminution du déficit de la balance courante des biens
témoignent du succès du rattrapage. Les secteurs accès à l’exportation stabilisent, voire
compensent en partie, le déficit de la balance courante, premier signe d’une indépendance
en devenir aux capitaux étrangers.
La Slovaquie s’est favorablement orientée vers le reste du monde à travers des secteurs
industriels compétitifs (schéma 22). Même si l’appréciation de son taux de change, jusqu’à
son adhésion à l’euro en 2009, est négativement corrélée au solde de sa balance courante
totale, il ne l’est pas pour le solde de sa balance des biens. Il y a bien ici une relative
amélioration de sa compétitivité-prix. Le degré de soutenabilité de son endettement externe
est favorable, même si son adhésion récente à l’euro en 2009 la protège des tensions sur le
change. La robustesse de son secteur bancaire ainsi que la qualité de la régulation de la
dette publique et de l’inflation démontrent la forte capacité des politiques conjoncturelles.
Au regard de ces caractéristiques favorable pour la Slovaquie, un aspect demeure cependant
négatif. L’incapacité à réaliser des dépréciations monétaires, afin de sauvegarder son
avantage concurrentiel de faible coût de la main d’œuvre, devrait la pousser à monter en
gamme vis-à-vis de sa production pour se différencier non plus sur les prix mais sur le horsprix. Pourtant, la R&D y est faible avec 0.47% du PIB et principalement orientée sur
l’industrie manufacturière et l’enseignement supérieur et public. La forte appréciation de
l’euro vis-à-vis des autres monnaies internationales implique logiquement que l’ensemble
des pays de la zone se déplace vers des productions à forte compétitivité hors-prix pour
258
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
continuer à exporter. Il s’agira pour la Slovaquie de faire de même pour espérer perpétuer
cette dynamique favorable de rattrapage.
La situation de la Slovénie repose sur une stratégie de spécialisations industrielles orientées
à l’international, importante et dynamique (schéma 23). La poursuite de la dégradation du
solde de la balance courante traduit un processus de rattrapage toujours en cours. La
corrélation négative entre l’appréciation du taux de change et le solde déficitaire de la
balance courante confirme encore l’importance de la compétitivité-prix pour ce pays.
L’adhésion à l’euro en 2007 lui permet de stabiliser les tensions sur le change, même si les
variables de régulation à court terme sont favorables (endettement et inflation contenus). La
faible présence des banques étrangères, avec seulement 22% des actifs et 29% des crédits,
est une marque de différenciation entre les pays de ce premier groupe. La domination de
l’Autriche dans les stocks d’IDE, avec 14% du total, permet à la Slovénie d’avoir des soutiens
lors des tensions financières internationales.
La Slovénie se situe entre la République Tchèque et la Slovaquie, au regard de la qualité de
ses fondamentaux. Elle n’a pas encore acquis de spécialisations hors compétitivité-prix ni
commencé à renverser la tendance à la baisse du déficit de sa balance courante. Mais elle
cherche malgré tout à monter en gamme avec une R&D forte (1.66% du PIB) à destination de
l’industrie manufacturière.
Concernant le groupe B, celui des pays intermédiaires, il comprend la Pologne et la
Roumanie. Ces deux pays ont des caractéristiques communes dans de nombreux domaines,
notamment dans le tissu industriel qui n’a pas encore achevé sa phase de transition, même
si certains secteurs sont compétitifs à l’exportation (mécanique pour la Pologne et textile
259
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
pour la Roumanie). La grande taille de leur économie, de par leur dimension territoriale, a
permis à ces pays d’être relativement épargnés par le choc commercial de 2008. La Pologne
n’a pas subi de pressions inflationnistes ; quant à la Roumanie, elle a su maitriser son
inflation pour passer à des taux plus acceptables (de 59.1% en 1998 à 5.6% en 2009). Ces
pays n’ont par ailleurs pas subi de krach dans le secteur immobilier.
Il existe tout de même des divergences entre ces deux économies. Les déficits courants sont
importants en Pologne et acceptables en Roumanie, traduisant un processus de rattrapage
beaucoup plus avancé pour le premier. Cependant, même sans ancrage du taux de change
(seulement administré pour la Roumanie), l’endettement en devises à court terme est
problématique au regard des réserves actuelles pour les deux pays (la Roumanie a déjà
bénéficié d’aides internationales afin d’augmenter ses réserves de change lors de la crise des
Subprimes).
La Pologne est moins risquée que la Roumanie avec un niveau de développement plus élevé
et la non intervention des instances internationales lors de la crise des Subprimes. La taille
de ces économies leur a permis une plus large indépendance face aux turbulences du reste
du monde. Apres description des schémas 24 et 25, les faiblesses de ces pays se trouvent
beaucoup plus dans la viabilité du processus de rattrapage économique de moyen, voire
long terme, que dans leur capacité à réguler à court terme les pressions du reste du monde.
Leur taille, favorable lors des tensions financières internationales, devient source de
difficultés pour engendrer une réelle dynamique de rattrapage avec des problèmes de
diffusion à l’ensemble de l’économie.
La Pologne avait les plus grandes difficultés économiques parmi les PECO au tout début de la
transition (fort endettement extérieur, vétusté des équipements, déficits publics
récurrents…), d’où une « thérapie de choc ». Elle possédait toutefois des ressources
naturelles importantes dans l’agriculture et les ressources minières (charbon, cuivre, souffre,
260
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
argent, zinc, plomb…) ainsi qu’un début d’ouverture aux capitaux étrangers. Aujourd’hui, ce
pays a su se spécialiser dans des secteurs à l’international (schéma 24). Mais sans taux
d’ouverture excessif ni forte domination industrielle, même si celle-ci reste dynamique, il n’y
a pas véritablement d’intégration significative au reste du monde. L’appréciation du taux de
change négativement corrélée au solde de la balance courante témoigne d’un
positionnement compétitif au niveau du prix. Pourtant, il n’y a pas d’efforts en R&D pour
tenter de surpasser ce positionnement, avec seulement 0.61% du PIB. Il reste cependant le
libre flottement de la monnaie nationale par rapport à l’euro pour ajuster les chocs externes
afin de rester compétitif. Aucun des pays de l’Europe occidentale n’a de position dominante
vis-à-vis des stocks d’IDE, même si les banques étrangères sont fortement présentes (62%
des actifs et 75% des crédits). Quant à la qualité de la régulation à court terme, le taux
d’endettement y apparait de plus en plus fort avec 47% du PIB alors que l’inflation est
maitrisée.
La situation de la Pologne interroge sur l’évolution de son positionnement. Elle donne
l’impression que le rattrapage économique s’est stoppé en cours de route sans pour autant
justifier de la finalité du processus. Le secteur industriel n’y est pas dominant, la R&D
insuffisante, la compétitivité-prix toujours déterminante… Alors que le déficit de la balance
courante, sans tendance, indique l’arrêt partiel des importations de biens d’équipements
pour restructurer le tissu économique.
Au début de la transition, la Roumanie était fortement spécialisée dans l’agriculture et
faiblement dans l’industrie. Pourtant, ces deux secteurs étaient en crise. La politique de
désendettement vis-à-vis de l’étranger appliquée avant 1979 a induit un manque
d’investissement dans l’économie et une paupérisation forte de la population, devenant la
plus pauvre des PECO. Le processus de réforme qui a suivi, lors de la transition, n’a pas été
réalisé avec efficacité (problème de crédibilité, d’application des réformes…). Malgré ce
retard pris, la Roumanie bénéficie aujourd’hui d’une dynamique plutôt favorable avec des
261
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
spécialisations industrielles concentrées sur le textile mais de nombreux efforts sont encore
à faire (schéma 25).
La Roumanie possède de nombreuses similitudes avec la Pologne, principalement avec leur
grande taille. Le taux d’ouverture y est faible, le secteur industriel non dominant, la R&D
insuffisante, aucune domination dans les stocks d’IDE de pays d’Europe occidentale et une
forte présence des banques étrangères (avec 64% des actifs et 89% des crédits). La
corrélation négative de l’appréciation du taux de change avec le solde de la balance
courante témoigne d’un positionnement en compétitivité-prix où la libre fluctuation du taux
de change permet de la conforter. La capacité de régulation des tensions financières est à
l’opposé de celle de la Pologne. L’endettement public est faible alors que l’inflation, même si
le trend est baissier, témoigne d’effets spéculatifs notamment dans « Les loyers d’habitation
réels » avec 71,8% d’augmentation des prix en 2007.
La Roumanie peut rencontrer les mêmes difficultés présentes actuellement en Pologne, pays
plus en avance dans le cadre de son rattrapage économique. Leur grande taille offre une
relative indépendance avec le reste du monde. Mais elle pose des problèmes pour créer des
effets de diffusion significatifs au reste de l’économie. La Roumanie est au tout début de son
processus de convergence, laissant encore place à de nombreuses possibilités. L’adhésion
plus tardive à l’Union européenne en 2007 renforce cette interprétation.
Quant au groupe C, les pays les plus vulnérables, il s’agit de l’Estonie, la Lituanie, la Lettonie,
la Bulgarie et de la Hongrie. Les pays Baltes ainsi que la Bulgarie sont dans des situations
difficiles malgré des politiques publiques efficaces (schémas 26, 27, 28 et 29). La volonté
d’adhérer à l’euro rapidement est l’élément justifiant les faiblesses de la régulation
conjoncturelle de ces économies. Ils ont opté pour une stratégie de court terme afin
d’intégrer la zone euro sans pour autant s’interroger sur la viabilité du processus de leur
rattrapage économique à moyen et long terme (l’industrie est quasi-inexistante dans les
262
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
pays baltes et insuffisante en Bulgarie). Dans le cadre de la Hongrie (schéma 30), il s’agit
plutôt d’un discrédit dans la régulation alors exercée auparavant, principalement dans le
pilotage de l’endettement public. La dynamique de moyen, voire long terme, dans le cadre
du processus de convergence apparait toujours viable mais nécessite des réajustements
importants à court terme afin d’offrir de nouvelles marges de manœuvre pour tempérer les
tensions financières internationales.
Les secteurs de spécialisations à l’international de l’Estonie (schéma 26) ne sont pas
fortement excédentaires, alors que le taux d’ouverture du pays est élevé. L’industrie n’est ni
dominante, ni dynamique. La corrélation négative de l’appréciation du taux de change avec
le déficit de la balance courante confirme qu’il n’y a pas eu de convergence de la
compétitivité-prix vers celle hors-prix. Pourtant, l’Estonie a décidé d’ancrer sa monnaie à
l’euro pour gagner en attractivité et en stabilité, ne lui permettant plus de dévaluation
compétitive. L’adhésion officielle à l’euro début 2011 ne laisse plus de possibilité pour faire
marche arrière. Les perspectives de montée en gamme sont difficilement envisageables,
alors que la R&D est forte avec 1.29% du PIB mais non productive (à destination des services
et de l’enseignement supérieur). Même si l’Estonie a un endettement public faible, il est
réalisé majoritairement à échéances courte, traduisant les difficultés de pérenniser les
financements. Quant à l’inflation, son niveau est élevé et principalement spéculatif.
L’Estonie a une configuration de son développement qui pose problème tant à court terme,
dans sa capacité de réguler les tensions internationales, qu’à moyen terme, dans la viabilité
de son processus de rattrapage économique. Pourtant, la dégradation continue de sa
balance courante confirme l’allocation de capitaux toujours de plus en plus importants mais
dont l’utilisation n’apparait pas optimale. L’adhésion récente à l’euro lui permet de mettre
fin aux pressions sur son taux de change. Pourtant, il n’est pas sûr que le nouveau contexte
macroéconomique et macro-financier induit par la zone monétaire lui offre l’opportunité de
poursuivre sereinement sa convergence économique. La forte appréciation de l’euro face
263
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
aux monnaies des pays émergents, principaux concurrents des PECO au regard des stratégies
de spécialisations sectorielles choisies, laisse peu de place pour ce pays toujours dans une
disposition de compétitivité-prix.
Comme l’Estonie, la Lituanie a des spécialisations à l’international faiblement excédentaires
malgré des taux d’ouverture importants (schéma 27). La corrélation négative de
l’appréciation du taux de change avec le solde de la balance courante, doublée d’une
tendance déficitaire qui se renforce et témoigne d’un processus de convergence toujours en
cours, indique que le pays est toujours dépendant de sa compétitivité-prix. L’industrie est
faible et non dominante. Il n’y a pas de pays d’Europe occidentale prépondérant dans les
stocks d’IDE même si la présence des banques étrangères est forte avec 79% des actifs et
94% des crédits du pays. La faiblesse de la R&D avec seulement 0.8% du PIB et l’ancrage du
taux de change à l’euro mettant fin aux dévaluations compétitives, ne fait pas apparaitre
d’alternative pour permettre un repositionnement au sein du commerce international.
La Lituanie n’a pas de stratégie de rattrapage économique à moyen terme viable. Elle a des
marges de manœuvre à court terme larges pour faire face aux tensions internationales,
contrairement à l’Estonie. Son endettement public est faible avec des échéances de moyen
terme, traduisant une plus grande confiance des investisseurs au niveau des prêts qui lui
sont accordés. L’inflation est restée contenue au moins jusqu’en 2008, lors de la crise des
Subprimes. Ces caractéristiques la placent au-dessus des deux autres pays baltes dans la
qualité de ses fondamentaux, mais seulement à court terme puisque aucun d’entre eux ne
raisonne à moyen terme pour le moment.
264
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
La Lettonie n’a pas de spécialisations internationales fortement excédentaires (schéma 28),
comme le confirme la faiblesse de son industrie tant en taille qu’en dynamisme. La
corrélation négative de l’appréciation de son taux de change avec le solde déficitaire de la
balance courante confirme un positionnement encore centré sur la compétitivité-prix alors
que ce pays s’est privé de tout repositionnement commercial. Son taux de change fixe à
l’euro ne lui permet plus de dévaluations compétitives. La faiblesse de sa R&D avec 0.61% du
PIB ne fait pas espérer de montée en gamme dans ses spécialisations sectorielles. Quant à
l’inflation, avec 15.3% d’augmentation des prix en 2007, avant même la crise des Subprimes
de 2008, est synonyme de perte de compétitivité à l’exportation dans le cadre d’un ancrage
fixe.
La description des caractéristiques de ce pays ont mis en doute la soutenabilité tant de son
processus de développement à moyen terme que de la capacité à encaisser les pressions
financières internationales à court terme. Même avec un endettement public contenu (20%
du PIB), les échéances de son endettement se sont raccourcies pour s’orienter
dangereusement vers du court terme (moins d’un an). Les investissements spéculatifs en
IDE, capitaux normalement stables et productifs, sont orientés principalement vers les
activités immobilières avec 24% des stocks, source de pressions inflationnistes dans
l’ensemble des secteurs. Contrairement à l’Estonie, la Lettonie n’a pas de soutien fort d’un
pays d’Europe occidentale, puisque aucun n’est prépondérant au niveau des stocks d’IDE.
La Bulgarie n’a pas encore de spécialisations internationales fortement excédentaires
(schéma 29), mais possède une industrie dynamique, contrairement aux pays baltes. Le
retard pris dans la mutation industrielle, au début de la période de transition explique cet
état des faits, même si quelques secteurs sont de plus en plus compétitifs à l’exportation
(notamment le textile et le non-ferreux). Son positionnement commercial est
indéniablement basé sur la compétitivité-prix bien que le pays ait choisi d’ancrer sa monnaie
à l’euro. La R&D y est faible avec 0.49% de son PIB et non productive (principalement
265
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
tournée vers les services et le public). Il n’est pas envisagé pour le moment une montée en
gamme de sa production au regard de ces faits. La balance courante déficitaire se renforce,
traduisant la poursuite de son rattrapage économique, en parallèle à une forte présence de
pays européens dans les stocks d’IDE (19% de l’Autriche et 16% des Pays-Bas) et dans le
secteur bancaire (96% des actifs et 98% des crédits du pays).
La Bulgarie se démarque des pays baltes par l’existence d’une petite dynamique industrielle,
faisant espérer une amplification de la viabilité de son processus de rattrapage économique.
Cependant, la qualité de sa régulation à court terme est trop vulnérable. Même avec un
endettement public faible de l’ordre de 14% du PIB, l’inflation y est forte (12% en 2008) et
d’origine spéculative (loyers d’habitation réels avec 10.4% d’augmentation des prix en 2009).
Les investisseurs étrangers intègrent cet aspect puisque 18% des stocks d’IDE sont localisés
dans les activités immobilières et 9% dans la construction, secteurs non productifs. La
dégradation des ratios du secteur bancaire le confirme (tiers one passant de 17.91% en 2005
à 13.48% en 2008 et prêts non performants de 2.54% en 2007 à 5.96% en 2009).
Lors de la chute du mur de Berlin, en 1989, la Hongrie était en avance puisqu’elle s’était déjà
ouverte aux IDE (notamment avec General Electric, Suzuki et General Motors), en parallèle à
un processus de réformes déjà en cours. La Hongrie s’est spécialisée à l’international sur des
secteurs industriels fortement excédentaires et dominants dans son économie (schéma 30).
Les caractéristiques de son positionnement sont favorables puisqu’il converge d’un avantage
compétitif-prix vers celui hors-prix (corrélation positive de l’appréciation du taux de change
et du solde de la balance courante pour les biens). La balance courante pour les biens est
sans tendance, témoignant d’une compensation partielle de ses importations de biens
d’équipements par les excédents de ses exportations. La R&D est moyenne avec 1% du PIB à
destination de l’industrie manufacturière, donc productive. L’Allemagne est prépondérante
dans les stocks d’IDE, source de dépendance mais aussi de soutien lors des tensions
internationales.
266
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Au regard de ces caractéristiques, la Hongrie a un rattrapage économique à moyen et long
terme enviable, posant la question de son intégration à ce groupe décrit comme vulnérable.
Il s’agit surtout pour ce pays de son incapacité à réguler à court terme les tensions externes
posant la question de sa capacité à viabiliser sa dynamique économique. La robustesse
bancaire informe d’une dégradation inquiétante de ses ratios (tiers one à 11.65% en 2004
puis à 5.94% en 2007). L’endettement public devient inquiétant avec 73% du PIB et des
échéances majoritairement à court terme, bien avant la crise de 2008 (42% en 2003 sur du 1
à 5 ans). Ces données traduisent une perte de confiance à long terme des investisseurs dans
la capacité du pays à renverser la situation.
L’analyse de la qualité des fondamentaux des PECO, pour résister aux tensions financières
internationales qu’ils ne peuvent éviter, a permis de faire émerger des convergences et des
divergences entre les pays. Afin de mettre en œuvre une dynamique de rattrapage viable,
condition pour être de nouveau et rapidement attractif lors de la fin des turbulences, il leur
faut aussi être capable d’intervenir lors des perturbations issues du reste du monde pour les
réguler et amoindrir leurs effets.
Pourtant, seules la République Tchèque, la Slovénie et la Slovaquie sont aujourd’hui en
mesure de réaliser ces deux exigences dans la qualité de leur positionnement à court et
moyen terme. D’autres ont les moyens d’intervenir à court terme mais la viabilité à moyen
terme de la dynamique de rattrapage se pose, notamment dans la capacité de diffusion au
reste de l’économie comme en Pologne et en Roumanie. Quant aux autres pays, ceux-ci ne
semblent pas capables de réguler les tensions financières internationales à court terme. Se
pose alors la question de la viabilité de leur rattrapage économique lorsqu’il a été
favorablement amorcée comme en Hongrie, faiblement en Bulgarie, voire pas du tout pour
les pays Baltes. Maintenant que ces divergences ont pu être décrites, il convient de les
confronter au degré de rebond de chacun lors de l’après crise, pour en faire ressortir les
éléments les plus probants.
267
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Schéma 21. Descriptif des vulnérabilités propres à la République Tchèque
Qualité du positionnement international :
Aspect commercial
Taux d'ouverture commerciale:
Indicateur de compétitivité-prix:
Solde courant:
Secteursspécialisationsinternationales: fortementexcédentairesavec des taux d’ouvertureélevés.
Corrélation taux de change solde de la balance courante totale : non. Corrélation taux de change solde
balancecourantebiens: positive.
Balancecourantetotale : sans tendance.Balancecourantedes biens: tendanceà la hausse.
Aspect monétaire et financier
Choix du régime de change:
Flottementadministré.
Degré de soutenabilitéde
Ratioréserves/endettementCT : ; Augmentationdes réserves.
l’endettement extérieur de Ct :
Degré de soutenabilitéde
Ratio endettement/PIB: 42,7% PIB (2007).
l’endettement extérieur de Mt et Lt :
Structure interne :
Robustesse Economique
Poids industrie dans PIB :
Efforts de R&D :
Stocks d'IDE/PIB :
Secteurindustrieldominant(41% CA). Industriedynamique.
R&Dtotale forte (1.47% du PIB).R&D principalementindustriemanufacturièreet entreprises.
Stock IDE pays : Pays-Bas (17%). Secteurs productifs : Fabrication (38%) ; Total automobiles et autre
matérielde transport (10%) ; Commerce, réparations(10%).
Robustesse Bancaire
Présence banques étrangères:
Tiers one :
Prêts non performants :
Forteprésence (92% des actifs et 93% des crédits).
Ratiotiersone total avant crise (2005) : 15,15%. Ratio tiersone total après crise (2008) : 11,37%
Donnéesnon disponibles.
Qualité de la régulation :
Pilotage de la dette publique
Endettement public :
Instabilité du solde budgétaire:
Endettement total : favorable (30% PIB). Endettement CT (41% 2002 et 7.6% 2008) pour progresser
MTet LT.
Endettement total : tendance à la hausse. Solde primaire : faible tendance hausse et non pro-cyclique
(impactstructurel).
Pilotage de l'inflation
Taux d'inflation:
Instabilité de l'inflation :
Inflation totale : faible. Secteurs : Electricité, gaz et autres combustibles (14,2%) ; Logement, eau,
électricité,gaz et autres combustibles(9,9%) ; Loyersd'habitationréels(16,6%).
Inflation totale : Pas de tendance. Secteurs spéculatifs : Tendance à la baisse (Loyers d'habitation
réels).
Source : Bnpparibas, Natixis, Eurostat, Banque Mondiale, FMI, JEDH, Bankscope et OFCE.
268
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Schéma 22. Descriptif des vulnérabilités propres à la Slovaquie
Qualité du positionnement international :
Aspect commercial
Taux d'ouverture commerciale :
Indicateur de compétitivité-prix:
Solde courant :
Secteurs spécialisations internationales : fortement excédentaires avec des taux d’ouvertureforts.
Corrélation taux de change solde de la balance courante totale : négative. Corrélation taux de change
solde balance courante biens : positive.
Balance courante totale : tendance à la baisse. Balance courante des biens : sans tendance.
Aspect monétaire et financier
Choix du régime de change :
Adhésion à l’euro.
Degré de soutenabilité de
Ratio réserves/endettement CT : ; Augmentation des réserves.
l’endettement extérieur de Ct :
Degré de soutenabilité de
Ratio endettement/PIB: 48,9% (2007).
l’endettement extérieur de Mt et Lt :
Structure interne :
Robustesse Economique
Poids industrie dans PIB :
Efforts de R&D :
Stocks d'IDE/PIB :
Secteur industriel dominant (48% CA). Industrie dynamique.
R&D faible (0.47% du PIB). R&D industrie manufacturière et quasi-égale entre entreprises,
enseignement supérieur et publique.
Stocks IDE pays : Pays-Bas (10%). Secteurs productifs : Fabrication (36%) ; Electricité, gaz et eau (13%) ;
Commerce, réparations (11%).
Robustesse Bancaire
Présence banques étrangères :
Tiers one :
Prêts non performants :
Forte présence (73% des actifs et 91% des crédits).
Données non disponibles.
Ratio prêts non performants avant crise (2007) : 3,02%. Ratio prêts non performants après crise
(2009) : Données non disponibles.
Qualité de la régulation :
Pilotage de la dette publique
Endettement public :
Instabilité du solde budgétaire:
Endettement total : favorable (28% PIB). Endettement MT (39%).
Endettement total : tendance à la baisse. Solde primaire : faible tendance hausse et non pro-cyclique
(impact structurel).
Pilotage de l'inflation
Taux d'inflation :
Instabilité de l'inflation :
Inflationtotale : faible. Secteurs : aucun
Inflation totale : Tendance à la baisse. Secteurs spéculatifs : Tendance à la baisse (Logement, eau,
électricité, gaz et autres combustibles, Loyers d'habitation réels).
Source : Bnpparibas, Natixis, Eurostat, Banque Mondiale, FMI, JEDH, Bankscope et OFCE.
269
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Schéma 23. Descriptif des vulnérabilités propres à la Slovénie
Qualité du positionnement international :
Aspect commercial
Taux d'ouverture commerciale :
Indicateur de compétitivité-prix :
Solde courant:
Secteurs spécialisations internationales : fortement excédentaires avec des taux d’ouverture forts.
Corrélation taux de change solde de la balance courante totale : négative. Corrélation taux de change
solde balance courante biens : négative.
Balance courante totale : tendance à la baisse. Balance courante des biens : tendance à la baisse.
Aspect monétaire et financier
Choix du régime de change :
Adhésion à l’euro.
Degré de soutenabilité de
Adhésion zone euro en 2007.
l’endettement extérieur de Ct :
Degré de soutenabilité de
Adhésion zone euro en 2007.
l’endettement extérieur de Mt et Lt :
Structure interne :
Robustesse Economique
Poids industrie dans PIB :
Efforts de R&D :
Stocks d'IDE/PIB :
Secteur industriel dominant (40% CA). Industrie dynamique.
R&D forte (1.66% du PIB). R&D industrie manufacturière et entreprises.
Stocks IDE pays : Autriche (14%). Secteurs productifs : Fabrication (37%) ; Commerce, réparations
(21%) ; Fabrication de produits chimiques (14%).
Robustesse Bancaire
Présence banques étrangères :
Tiers one :
Prêts non performants :
Présence faible (22% des actifs et 29% des crédits).
Ratio tiers one total avant crise (2004) : 14,05%. Ratio tiers one total après crise (2007) : 8,95%.
Ratio prêts non performants avant crise (2007) : 4,32%. Ratio prêts non performants après crise
(2009) : 7,13%.
Qualité de la régulation :
Pilotage de la dette publique
Endettement public :
Instabilité du solde budgétaire:
Endettement total : favorable (23% PIB). Endettement MT (à 50%).
Endettement total : pas de tendance. Solde primaire : faible tendance hausse et pro-cyclique (impact
conjoncturel).
Pilotage de l'inflation
Taux d'inflation :
Instabilité de l'inflation :
Inflation totale : faible. Secteurs : aucun.
Inflation totale : Tendance à la baisse. Secteurs spéculatifs : Tendance à la baisse Loyers d'habitation
réels).
Source : Bnpparibas, Natixis, Eurostat, Banque Mondiale, FMI, JEDH, Bankscope et OFCE.
270
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Schéma 24. Descriptif des vulnérabilités propres à la Pologne
Qualité du positionnement international :
Aspect commercial
Taux d'ouverture commerciale :
Indicateur de compétitivité-prix :
Solde courant :
Secteurs spécialisations internationales : fortement excédentaires avec des taux d’ouverture faibles.
Corrélation taux de change solde de la balance courante totale : négative. Corrélation taux de change
solde balance courante biens : négative.
Balance courante totale : sans tendance. Balance courante des biens : sans tendance.
Aspect monétaire et financier
Choix du régime de change :
Degré de soutenabilité de
l’endettement extérieur de Ct :
Degré de soutenabilité de
l’endettement extérieur de Mt et Lt :
Libre flottement.
Ratio réserves/endettement CT : Forte augmentation (35% 2000 et 104% 2008).
Les réserves de devises ont augmenté en parallèle.
Ratio endettement/PIB: 40,2% (2007).
Structure interne :
Robustesse Economique
Poids industrie dans PIB :
Efforts de R&D :
Stocks d'IDE/PIB :
Secteur industriel non dominant (38% CA). Industrie dynamique.
R&D faible (0.61% du PIB). R&D quasi-égale entre industrie manufacturière, services et enseignement
supérieur, publique, entreprises.
Stocks IDE pays : aucun. Secteurs productifs : Fabrication (35%) ; Commerce, réparations (19%).
Robustesse Bancaire
Présence banques étrangères :
Tiers one :
Prêts non performants :
Forte présence (62% des actifs et 75% des crédits).
Ratio tiers one total avant crise (2004) : 25,03%. Ratio tiers one total après crise (2008) : 12,25%
Ratio prêts non performants avant crise (2007) : 3,88%. Ratio prêts non performants après crise
(2009) : 4,2%
Qualité de la régulation :
Pilotage de la dette publique
Endettement public :
Instabilité du solde budgétaire:
Endettement total : intermédiaire (47% PIB). Endettement MT (41%).
Endettement total : tendance à la hausse. Solde primaire : faible tendance baisse et non pro-cyclique
(impact structurel)
Pilotage de l'inflation
Taux d'inflation :
Instabilité de l'inflation :
Inflation totale : faible. Secteurs : aucun.
Inflation totale : Pas de tendance. Secteurs spéculatifs : Tendance à la baisse (Loyers d'habitation
réels).
Source : Bnpparibas, Natixis, Eurostat, Banque Mondiale, FMI, JEDH, Bankscope et OFCE.
271
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Schéma 25. Descriptif des vulnérabilités propres à la Roumanie
Qualité du positionnement international :
Aspect commercial
Taux d'ouverture commerciale :
Indicateur de compétitivité-prix :
Solde courant :
Secteurs spécialisations internationales : pas fortement excédentaires avec des taux d’ouverture
faibles.
Corrélation taux de change solde de la balance courante totale : négative. Corrélation taux de change
solde balance courante biens : négative.
Balance courante totale : tendance à la baisse. Balance courante des biens : tendance à la baisse.
Aspect monétaire et financier
Choix du régime de change :
Degré de soutenabilité de
l’endettement extérieur de Ct :
Degré de soutenabilité de
l’endettement extérieur de Mt et Lt :
Flottement administré.
Ratio réserves/endettement CT : Forte augmentation (18% 2002 et 78% 2008).
Les réserves de devises ont augmenté en parallèle.
Ratio endettement/PIB: 42,2%.
Structure interne :
Robustesse Economique
Poids industrie dans PIB :
Efforts de R&D :
Stocks d'IDE/PIB :
Secteur industriel non dominant (31% CA). Industrie dynamique autant que les 2 autres secteurs.
R&D totale faible (0.59% du PIB). R&D industrie manufacturière et entreprises.
Stocks IDE pays : aucun. Secteurs productifs : Fabrication (32%) ; Commerce, réparations (13%).
Robustesse Bancaire
Présence banques étrangères :
Tiers one :
Prêts non performants :
Forte présence (64% des actifs et 89% des crédits).
Ratio tiers one total avant crise (2004) : 25,65%. Ratio tiers one total après crise (2007) : 11,77%
Ratio prêts non performants avant crise (2007) : 2,59%. Ratio prêts non performants après crise
(2009) : Données non disponibles.
Qualité de la régulation :
Pilotage de la dette publique
Endettement public :
Instabilité du solde budgétaire:
Endettement total : favorable (14% PIB). Endettement CT MT LT.
Endettement total : tendance à la baisse. Solde primaire : faible tendance baisse et pro-cyclique
(impact conjoncturel).
Pilotage de l'inflation
Taux d'inflation :
Instabilité de l'inflation :
Inflation totale : faible. Secteurs : Boissons alcoolisées, tabac et narcotiques (21,2%) ; Loyers
d'habitation réels (71,8%).
Inflation totale : Tendance à la baisse. Secteurs spéculatifs : Tendance à la baisse (Logement, eau,
électricité, gaz et autres combustibles, Loyers d'habitation réels).
Source : Bnpparibas, Natixis, Eurostat, Banque Mondiale, FMI, JEDH, Bankscope et OFCE.
272
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Schéma 26. Descriptif des vulnérabilités propres à l’Estonie
Qualité du positionnement international :
Aspect commercial
Taux d'ouverture commerciale :
Indicateur de compétitivité-prix :
Solde courant :
Secteurs spécialisations internationales : pas fortement excédentaires malgré des taux d’ouvertures
importants.
Corrélation taux de change solde de la balance courante totale : négative. Corrélation taux de change
solde balance courante biens : négative.
Balance courante totale : tendance à la baisse. Balance courante des biens : tendance à la baisse.
Aspect monétaire et financier
Choix du régime de change :
Fixe (currency board avec intégration au MCE2).
Degré de soutenabilité de
Ratio réserves/endettement CT : Pas de données. Augmentation des réserves.
l’endettement extérieur de Ct :
Degré de soutenabilité de
Ratio endettement/PIB: 116,7%.
l’endettement extérieur de Mt et Lt :
Structure interne :
Robustesse Economique
Poids industrie dans PIB :
Efforts de R&D :
Stocks d'IDE/PIB :
Secteur industriel non dominant (23% CA). Industrie non dynamique.
R&D forte (1.29% du PIB). R&D services et enseignement supérieur.
Stocks IDE pays : Suède (28%) Finlande (16%). Secteurs productifs : Fabrication (29%) ; Commerce,
réparation (27%). Secteurs spéculatifs : Activités immobilières (10%).
Robustesse Bancaire
Présence banques étrangères :
Tiers one :
Prêts non performants :
Forte présence (69% des actifs et 97% des crédits).
Ratio tiers one total avant crise (2004) : 12,84%. Ratio tiers one total après crise (2008) : 12,52%
Ratio prêts non performants avant crise (2007) : 0,61%. Ratio prêts non performants après crise
(2009) : 5%
Qualité de la régulation :
Pilotage de la dette publique
Endettement public :
Instabilité du solde budgétaire:
Endettement total : favorable (5% PIB). Endettement CT (66% 2006 échéance 1 à 5 ans).
Endettement total : pas de tendance (stable). Solde primaire : pas de tendance et pro-cyclique (impact
conjoncturel).
Pilotage de l'inflation
Taux d'inflation :
Instabilité de l'inflation :
Inflation totale : forte (10.6% en 2008). Secteurs : Boissons alcoolisées, tabac et narcotiques (16,0%) ;
Electricité, gaz et autres combustibles (25,5%) ; Energie (23,8%) ; Logement, eau, électricité, gaz et
autres combustibles (16,6%) ; Loyers d'habitation réels (26,8%).
Inflation totale : Pas de tendance. Secteurs spéculatifs : pas de tendance.
Source : Bnpparibas, Natixis, Eurostat, Banque Mondiale, FMI, JEDH, Bankscope et OFCE.
273
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Schéma 27. Descriptif des vulnérabilités propres à la Lituanie
Qualité du positionnement international :
Aspect commercial
Taux d'ouverture commerciale :
Indicateur de compétitivité-prix :
Solde courant :
Secteurs spécialisations internationales : pas fortement excédentaires malgré des taux d’ouvertures
importants.
Corrélation taux de change solde de la balance courante totale : négative. Corrélation taux de change
solde balance courante biens : négative.
Balance courante totale : tendance à la baisse. Balance courante des biens : tendance à la baisse.
Aspect monétaire et financier
Choix du régime de change :
Degré de soutenabilité de
l’endettement extérieur de Ct :
Degré de soutenabilité de
l’endettement extérieur de Mt et Lt :
Fixe (currency board avec intégration au MCE2).
Ratio réserves/endettement CT : Forte augmentation (82% 2001 et 127% 2008). Les réserves de
devises ont augmenté en parallèle.
Ratio endettement/PIB: 70,9%.
Structure interne :
Robustesse Economique
Poids industrie dans PIB :
Efforts de R&D :
Stocks d'IDE/PIB :
Secteur industriel non dominant. Industrie non dynamique.
R&D faible (0.8% du PIB). R&D industrie manufacturière et enseignement supérieur.
Stocks IDE pays : aucun. Secteurs productifs : Fabrication (36%) ; Produits pétroliers raffinés et autres
traitements (16%) ; Commerce, réparations (11%).
Robustesse Bancaire
Présence banques étrangères :
Tiers one :
Prêts non performants :
Forte présence (79% des actifs et 94% des crédits).
Ratio tiers one total avant crise (2004) : 21%. Ratio tiers one total après crise (2007) : 7,35%
Ratio prêts non performants avant crise (2007) : 0,82%. Ratio prêts non performants après crise
(2009) : 7,76%.
Qualité de la régulation :
Pilotage de la dette publique
Endettement public :
Instabilité du solde budgétaire:
Endettement total : favorable (16% PIB). Endettement MT (44%).
Endettement total : tendance à la baisse. Solde primaire : faible tendance hausse et non pro-cyclique
(impact structurel).
Pilotage de l'inflation
Taux d'inflation :
Instabilité de l'inflation :
Inflation totale : faible (sauf en 2008 avec 11.1%). Secteurs : Boissons alcoolisées, tabac et narcotiques
(15,2%) ; Electricité, gaz et autres combustibles (20,2%) ; Logement, eau, électricité, gaz et autres
combustibles (19,3%) ; Loyers d'habitation réels (36,3%) ; Produits alimentaires et boissons non
alcoolisées (15,8%).
Inflation totale : Tendance à la hausse. Secteurs spéculatifs : Tendance à la hausse (Logement, eau,
électricité, gaz et autres combustibles, Loyers d'habitation réels).
Source : Bnpparibas, Natixis, Eurostat, Banque Mondiale, FMI, JEDH, Bankscope et OFCE.
274
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Schéma 28. Descriptif des vulnérabilités propres à la Lettonie
Qualité du positionnement international :
Aspect commercial
Secteurs spécialisations internationales : pas fortement excédentaires malgré des taux d’ouvertures
importants.
Corrélation taux de change solde de la balance courante totale : négative. Corrélation taux de change
Indicateur de compétitivité-prix :
solde balance courante biens : négative.
Solde courant :
Balance courante totale : tendance à la baisse. Balance courante des biens : tendance à la baisse.
Taux d'ouverture commerciale :
Aspect monétaire et financier
Choix du régime de change :
Degré de soutenabilité de
l’endettement extérieur de Ct :
Degré de soutenabilité de
l’endettement extérieur de Mt et Lt :
Fixe (peg sur l’euro avec intégration au MCE2).
Ratio réserves/endettement CT : Fort taux (309% 2000 et 269% 2008). Les réserves de devises ont
augmenté en parallèle.
Ratio endettement/PIB: 123,4%.
Structure interne :
Robustesse Economique
Poids industrie dans PIB :
Efforts de R&D :
Stocks d'IDE/PIB :
Secteur industriel non dominant. Industrie non dynamique.
R&D faible (0.61% du PIB). R&D services et enseignement supérieur.
Stocks IDE pays : aucun. Secteurs productifs : Commerce, réparations (26%) ; Fabrication (20%). Secteur
spéculatifs : Activités immobilières (24%).
Robustesse Bancaire
Présence banques étrangères :
Tiers one :
Prêts non performants :
Forte présence (63% des actifs et 74% des crédits).
Ratio tiers one total avant crise (2005) : 18,43%. Ratio tiers one total après crise (2008) : 10,07%
Ratio prêts non performants avant crise (2007) : 0,67%. Ratio prêts non performants après crise (2009) :
11,5%.
Qualité de la régulation :
Pilotage de la dette publique
Endettement public :
Endettement total : favorable (20% PIB). Endettement MT vers CT (36.5% 2008 échéance moins d’un an).
Endettement total : pas de tendance. Solde primaire : pas de tendance et pro-cyclique (impact
Instabilité du solde budgétaire:
conjoncturel).
Pilotage de l'inflation
Taux d'inflation :
Instabilité de l'inflation :
Inflation totale : forte (15.3% en 2007). Secteurs : Boissons alcoolisées, tabac et narcotiques (36,9%) ;
Electricité, gaz et autres combustibles (35,7%) ; Energie (27,3%) ; Enseignement (21,1%) ; Hôtels, cafés et
restaurants (17%) ; Logement, eau, électricité, gaz et autres combustibles (29,4%) ; Loyers d'habitation
réels (24,7%) ; Produits alimentaires et boissons non alcoolisées (18,2%).
Inflation totale : Tendance à la hausse. Secteurs spéculatifs : Tendance à la hausse (Logement, eau,
électricité, gaz et autres combustibles, Loyers d'habitation réels).
Source : Bnpparibas, Natixis, Eurostat, Banque Mondiale, FMI, JEDH, Bankscope et OFCE.
275
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Schéma 29. Descriptif des vulnérabilités propres à la Bulgarie
Qualité du positionnement international :
Aspect commercial
Taux d'ouverture commerciale :
Indicateur de compétitivité-prix :
Solde courant :
Secteurs spécialisations internationales : pas fortement excédentaires malgré des taux d’ouvertures
importants.
Corrélation taux de change solde de la balance courante totale : négative. Corrélation taux de change
solde balance courante biens : négative.
Balance courante totale : tendance à la baisse. Balance courante des biens : tendance à la hausse.
Aspect monétaire et financier
Choix du régime de change :
Degré de soutenabilité de
l’endettement extérieur de Ct :
Degré de soutenabilité de
l’endettement extérieur de Mt et Lt :
Fixe (currency board lié à l’euro).
Ratio réserves/endettement CT : Forte augmentation (33% 2001 et 103% 2008). Les réserves de
devises ont augmenté en parallèle.
Ratio endettement/PIB: 76%.
Structure interne :
Robustesse Economique
Poids industrie dans PIB :
Efforts de R&D :
Stocks d'IDE/PIB :
Secteur industriel non dominant (30% CA). Industrie dynamique.
R&D totale faible (0.49% du PIB). R&D principalement dans services et publique.
Stocks IDE pays : Autriche (19%) Pays-Bas (16%). Secteurs productifs : Commerce, réparation (18%) ;
Fabrication (25%). Secteurs spéculatifs : Activités immobilières (18%) ; Construction (9%).
Robustesse Bancaire
Présence banques étrangères :
Tiers one :
Prêts non performants :
Forte présence (96% des actifs et 98% des crédits).
Ratio tiers one total avant crise (2005) : 17,91%. Ratio tiers one total après crise (2008) : 13,48%
Ratio prêts non performants avant crise (2007) : 2,54%. Ratio prêts non performants après crise
(2009) : 5,96%
Qualité de la régulation :
Pilotage de la dette publique
Endettement public :
Instabilité du solde budgétaire:
Endettement total : favorable (14% PIB). Endettement MT (41.8%) et LT (30%).
Endettement total : tendance baisse. Solde primaire : pas de tendance et pro-cyclique (impact
conjoncturel).
Pilotage de l'inflation
Taux d'inflation :
Instabilité de l'inflation :
Inflation totale : forte (12% en 2008). Secteurs : Autres biens et services (11,8%) ; Boissons
alcoolisées, tabac et narcotiques (17,9%) ; Enseignement (15,1%) ; Loyers d'habitation réels (10,4%).
Inflation totale : Pas de tendance. Secteurs spéculatifs : pas de tendance.
Source : Bnpparibas, Natixis, Eurostat, Banque Mondiale, FMI, JEDH, Bankscope et OFCE.
276
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Schéma 30. Descriptif des vulnérabilités propres à la Hongrie
Qualité du positionnement international :
Aspect commercial
Taux d'ouverture commerciale :
Indicateur de compétitivité-prix :
Solde courant :
Secteurs spécialisations internationales : pour certains fortement excédentaires et d’autres déficitaires
avec des taux d’ouverture élevés.
Corrélation taux de change solde de la balance courante totale : négative. Corrélation taux de change
solde balance courante biens : positive.
Balance courante totale : tendance à la baisse. Balance courante des biens : sans tendance.
Aspect monétaire et financier
Choix du régime de change :
Libre flottement.
Degré de soutenabilité de
Ratio réserves/endettement CT : Pas de données. Augmentation des réserves.
l’endettement extérieur de Ct :
Degré de soutenabilité de
Ratio endettement/PIB: 91%.
l’endettement extérieur de Mt et Lt :
Structure interne :
Robustesse Economique
Poids industrie dans PIB :
Efforts de R&D :
Stocks d'IDE/PIB :
Secteur industriel dominant (moins de 40%). Industrie non dynamique.
R&D totale moyenne (1% du PIB). R&D industrie manufacturière et entreprises.
Stocks IDE pays : Allemagne (13%). Secteurs productifs : Fabrication (38%) ; Commerce, réparations
(15%) ; Total automobiles et autre matériel de transport (11%).
Robustesse Bancaire
Présence banques étrangères :
Tiers one :
Prêts non performants :
Présence moyenne (58% des actifs et 53% des crédits).
Ratio tiers one total avant crise (2004) : 11,65%. Ratio tiers one total après crise (2007) : 5,94%
Ratio prêts non performants avant crise (2007) : 0,43%. Ratio prêts non performants après crise
(2009) : Données non disponibles.
Qualité de la régulation :
Pilotage de la dette publique
Endettement public :
Instabilité du solde budgétaire:
Endettement total : défavorable (73% PIB). Endettement CT (42% 2003 échéance de 1 à 5 ans).
Endettement total : tendance à la hausse. Solde primaire : faible tendance baisse et non pro-cyclique
(impact structurel).
Pilotage de l'inflation
Taux d'inflation :
Instabilité de l'inflation :
Inflation totale : faible. Secteurs : Electricité, gaz et autres combustibles (23,3%) ; Energie (13,6%) ;
Produits alimentaires et boissons non alcoolisées (12%) ; Hôtels, cafés et restaurants (17,5%).
Inflation totale : Pas de tendance. Secteurs spéculatifs : Tendance à la baisse (Loyers d'habitation
réels).
Source : Bnpparibas, Natixis, Eurostat, Banque Mondiale, FMI, JEDH, Bankscope et OFCE.
277
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
3. Turbulences financières de court terme : focus sur la politique budgétaire
L’incapacité d’éviter la dégradation financière importée du reste du monde pousse à
s’interroger sur la façon de réagir de ces territoires. L’alternative crédible est d’utiliser au
mieux les politiques économiques à court terme afin d’en atténuer les effets négatifs. La
principale fragilité réside dans le retrait des capitaux étrangers, lors de la contraction de la
liquidité dans la zone euro, mettant sous pression l’ancrage des taux de change. La
libéralisation des comptes de capitaux devient incompatible avec l’objectif de stabilisation
monétaire. Le degré de rebond de ces pays, qu’il va convenir de définir, est alors fonction de
leur capacité à réguler au mieux leur taux de change.
La section précédente a mis en avant trois thématiques issues des variables significatives
dans ce travail afin de déterminer la qualité des fondamentaux de chaque PECO. L’une
d’elles, la qualité de la régulation à travers le pilotage de la dette publique et le pilotage de
l’inflation, décrit l’efficacité des politiques monétaires et budgétaires. Le tableau 53
synthétise le positionnement de chacun des PECO. Il convient de centrer notre analyse sur
ces deux aspects afin de déterminer comment et dans quel sens les PECO peuvent utiliser
ces leviers pour atténuer au maximum les effets négatifs de court terme en provenance du
reste du monde. Le degré d’efficience du pilotage de l’inflation se fait par la politique
monétaire principalement. Alors que celle-ci sert aussi à réguler et stabiliser le taux de
change. Quant au pilotage de la dette publique, il amène à une meilleure régulation de
l’activité économique par des politiques contra-cycliques. Mais il permet aussi d’augmenter
les réserves de devises par la contraction d’endettements internationaux.
Tableau 53. Thématique 3 : qualité de la régulation au sein des PECO
Agrégats :
Positionnement favorable
Pilotage de
l’inflation
Hongrie, Pologne, Slovénie et
Slovaquie.
Endettement public
République Tchèque, Lituanie,
Slovaquie, Slovénie et Pologne.
Positionnement défavorable
République Tchèque, Lituanie et
Roumanie. Mais surtout Bulgarie,
Estonie et Lettonie.
Roumanie, Estonie, Lettonie et
Hongrie.
La décomposition de la thématique sur la qualité de la régulation à court terme décrit des
divergences entre les PECO. La maitrise de l’inflation apparait favorable à la Hongrie, la
278
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Pologne, la Slovénie et à la Slovaquie. Alors que la régulation de l’endettement public est
plus efficace pour la République Tchèque, la Lituanie, la Slovaquie, la Slovénie et la Pologne.
Il n’y a que pour la Slovénie et la Slovaquie que ces deux dimensions sont convenables. Il
convient maintenant de s’interroger sur l’aptitude des politiques correspondantes,
monétaires et budgétaires, à atténuer les tensions financières internationales.
L’outil d’abord privilégié est la politique monétaire. La variation du taux directeur de la
Banque Centrale doit permettre d’attirer les capitaux étrangers avec l’augmentation de la
rémunération des placements effectués. Le triangle d’incompatibilité de Mundell-Fleming
(Fleming, 1962) (Mundell, 1963) confirme son importance dans le cadre de l’ancrage du taux
de change. Il postule qu’une économie dans un contexte international a l’obligation de
sacrifier l’un des trois objectifs que sont un taux de change fixe, la libre circulation des
capitaux et l’autonomie de la politique monétaire. Dans le contexte actuel des PECO, où la
libéraliser des flux de capitaux a été imposée lors de l’adhésion à l’Union européenne et
l’ancrage du taux de change fortement conseillé pour rendre attractif le territoire, l’abandon
de l’autonomie de la politique monétaire est légitimement choisi. L’objectif est de faire
varier les taux directeurs de la Banque Centrale afin d’influencer l’attractivité du pays pour
maintenir l’équilibre externe de l’économie. L’aspect théorique ainsi décrit, il convient de
regarder si cet outil conjoncturel est efficace au sein des PECO.
La démarche consiste à analyser l’impact du taux directeur dans chaque PECO vis-à-vis de
l’attractivité effective du pays par rapport aux capitaux étrangers. L’étude est menée sur le
total des capitaux mais aussi, en structure, sur les capitaux à court, moyen et long terme
pour tenter d’éviter les biais induit par l’agrégation des données. Ce choix apparait légitime
puisque les tests économétriques du chapitre précédent ont conforté ce découpage. La
sélection des données repose uniquement sur les taux d’intérêt du marché financier à 3
mois (tableau 54). Afin de compléter l’analyse mais aussi de consolider la problématique, la
réactivité des capitaux étrangers au sein des PECO est aussi testée par rapport aux taux
directeurs de la BCE (tableau 55). L’influence peut-être trop forte de la zone euro vis-à-vis
des PECO, à l’origine de la structure internationale de l’endettement, fait supposer des
interactions importantes entre les deux territoires. Les résultats interpellent puisqu’ils sont
uniformes pour tous les pays, confortant ainsi la problématique.
279
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Tableau 54. Influence de la politique monétaire des PECO dans les flux de capitaux
Coefficient de corrélation :
I(t) total
I(t) Ct
I(t) Pf
(Taux directeur Banque
Centrale/flux capitaux étrangers)
Bulgarie
Données non disponibles
République Tchèque
-0,04
-0,18
0,08
Estonie
Données non disponibles
Hongrie
Données non disponibles
Lituanie
-0,28
-0,37
0,10
Lettonie
-0,17
-0,17
0,02
Pologne
-0,16
-0,25
0,10
Roumanie
-0,81
-0,78
0,12
Slovénie
-0,47
-0,81
0,58
Slovaquie
-0,26
-0,31
-0,02
Source : Eurostat et calculs auteur (1995 2010 - taux d’intérêt à 3 mois)
I(t) IDE
0,05
0,05
-0,10
0,00
-0,75
0,26
0,05
L’efficience de la politique monétaire vis-à-vis de l’attractivité des capitaux nécessaires à
stabiliser l’équilibre externe, mis à part pour les flux de capitaux de portefeuille, est nulle.
Bien au contraire, toute augmentation des taux directeurs dans ces pays émergents fait
majoritairement fuir les capitaux à court terme, mais aussi les capitaux représentatifs
d’investissement direct à l’étranger, ainsi que le total général de ces capitaux. La nature des
fondamentaux de chaque pays n’apparait pas déterminante, alors même que nous avions pu
précédemment définir des groupes reflétant la qualité de leur positionnement (République
Tchèque, Slovaquie et Slovénie pour le groupe A ; Pologne et Roumanie pour le groupe B ;
Estonie, Lituanie, Lettonie, Bulgarie et Hongrie pour le groupe C). Les résultats plus
spécifiques aux PECO dans leur capacité à contrôler l’inflation, pourtant divergents entre
pays, n’apportent pas non plus de solutions.
Il y a un aspect intéressant à mettre en avant. Les flux de capitaux réagissent en sens
contraire de l’effet voulu. Normalement, l’augmentation des taux directeurs doit permettre
d’attirer les capitaux en offrant une meilleure rémunération. Pourtant, nous constatons le
contraire. La politique monétaire n’apparait pas efficace dans sa capacité à réguler l’ancrage
du taux de change dans le contexte de libéralisation des capitaux au sein des PECO. Cette
situation est inquiétante puisque pour ces pays, non seulement ne peuvent éviter le choc du
reste du monde, mais sont en outre incapables de réagir avec cet outil.
280
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Tableau 55. Influence de la politique monétaire de la zone euro dans les flux de capitaux
Coefficient de corrélation
I(t) total
I(t) Ct
I(t) Pf
taux directeur Banque Centrale et
flux de capitaux étrangers :
Bulgarie
0,23
0,20
0,06
République Tchèque
0,21
0,11
0,13
Estonie
0,01
0
0,13
Hongrie
-0,17
-0,06
-0,12
Lituanie
0,16
0,11
-0,05
Lettonie
0,13
0,11
-0,13
Pologne
0,36
0,44
-0,23
Roumanie
0,15
0,18
0,22
Slovénie
0,16
0,15
-0,07
Slovaquie
0,03
-0,09
0,10
Source : Eurostat et calculs auteur (1995 2010 – taux d’intérêt à 3 mois)
I(t) IDE
0,19
0,14
-0,20
-0,03
0,27
0,31
0,29
0,02
-0,03
0,13
Les analyses de corrélations entre le taux directeur de la BCE et les flux de capitaux des
PECO, mis à part les flux de portefeuille, apparaissent beaucoup plus pertinentes. Il y
apparait une attractivité par rapport aux capitaux étrangers qui est fonction de la politique
monétaire de la zone euro. Le caractère spécifique de ces économies, à travers une
intégration poussée à l’Union européenne, peut justifier ce résultat. Le chapitre précédent a
confirmé l’importance de cette dépendance à la zone euro à travers les tests
économétriques (notamment vis-à-vis de l’endettement à court terme). Mais il n’est pas sûr
que l’influence de la BCE soit prise en compte quant à son impact sur les PECO. Celle-ci se
doit déjà de réguler les fortes divergences des membres qui la composent. Pourtant, mis à
part le cas de la Hongrie, la corrélation est positive pour tous les PECO. Les caractéristiques
de ces pays, au regard de leurs fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers ainsi
que de la qualité de régulation de l’inflation, ne sont nullement des éléments déterminants.
Les résultats présentés mettent en avant l’inefficacité de la politique monétaire afin de
réguler à court terme les tensions financières internationales, à l’origine de la fuite
généralisée des capitaux étrangers. Précédemment, la description analytique des PECO a fait
émerger trois principaux groupes de pays (groupes A, B et C), avec des positionnements de
court et moyen terme différents. Mais même au regard de ces divergences, aucun n’est en
mesure de bénéficier d’un retour favorable de l’utilisation de sa politique monétaire.
281
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
L’amplification du risque de rupture se généralise à l’ensemble de la région. La fuite des
capitaux étrangers, parallèlement au déficit récurrent de la balance courante, fait supposer
légitimement l’incapacité à maintenir l’ancrage à terme sans retour rapide des capitaux
étrangers. Les graphiques 60 confirment cet état des faits, avec un risque-pays qui s’est
renforcé dans l’ensemble des PECO dès fin 2008.
Graphiques 60. Un risque-pays trop élevé rend la politique monétaire inefficace
Etape 2
Etape 2
Etape 1
Etape 1
55
La crise des Subprimes a pu mettre en avant cette situation de vulnérabilité. L’Estonie, la
Hongrie et la Roumanie ont fait appel à l’aide internationale pour obtenir des crédits
nécessaires à la reconstitution de leurs stocks de devises pour stabiliser leur taux de change.
L’incapacité de retenir des capitaux pour ces pays pose la question de la régulation de la
politique monétaire dans des situations de tensions. Les Banques Centrales augmentent les
taux de manière considérable, étouffant la dynamique économique interne par la même
occasion, le coût de l’endettement augmentant d’autant plus pour les acteurs locaux.
Entre les investisseurs internationaux qui ont des besoins de liquidité pour satisfaire des
contraintes de refinancement et ceux qui voient le risque-pays de ces territoires augmenter
dangereusement, il n’est pas sûr qu’une politique monétaire conjoncturelle soit appropriée.
Les interprétations mises en évidence apparaissent légitime. La fuite des capitaux n’est pas
la conséquence d’une dégradation de la rentabilité au sein des PECO, comme la
problématique le postule depuis le début. Une augmentation des taux directeurs, offrant de
meilleures rémunérations dans les placements effectués, n’est pas la réponse à apporter.
282
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Dans ces conditions, l’outil de substitution à court terme est la politique budgétaire. La
possibilité pour un gouvernement de s’endetter en devises internationales afin d’augmenter
ses réserves pour assurer l’ancrage du taux de change est alors décisive. La facilité à obtenir
des liquidités dans des moments de fortes pressions internationales viabilise un peu plus
l’ancrage du taux de change. Tout d’abord, l’augmentation quantitative du montant des
devises permet la reconstitution des stocks. Mais aussi par l’aspect qualitatif où des agents
économiques acceptent encore de prêter des capitaux à ces pays, notamment aux instances
publiques, laissant entendre que le marché a toujours confiance dans ces territoires.
La politique budgétaire, même si elle permet d’augmenter les réserves de devises, a d’abord
pour principale objectif le soutien de l’activité économique, lorsqu’elle est utilisée comme
un outil de régulation conjoncturelle. Ainsi, la capacité à atténuer les tensions financières
internationales, à travers les déficits publics, dépend tant des politiques budgétaires
discrétionnaires que des politiques budgétaires automatiques. Les deux styles de politiques
sont étroitement liés. Les stabilisateurs automatiques peuvent diminuer l’impact d’une
récession et permettre un retour à la normale plus rapidement. Mais ils vont
mécaniquement alourdir le déficit public. Alors qu’une intervention discrétionnaire du
gouvernement ne sera possible qu’au regard de son taux d’endettement qui aura pu se
dégrader par les stabilisateurs automatiques. Les marges de manœuvre qui vont rester, au
regard de la capacité d’endettement des gouvernements, conditionneront alors
l’intervention sur le taux de change.
Les caractéristiques d’optimisation d’une politique budgétaire dans ce genre de situation
supposent un comportement contra-cyclique. La fuite des capitaux étrangers, mettant sous
pression le taux de change, va faire diminuer l’activité économique avec la baisse de la
liquidité dans le territoire. Les dépenses de l’Etat doivent alors augmenter et ses recettes
diminuer, source d’un creusement des déficits et du poids de l’endettement total, pour
soutenir l’activité. A contrario, lors de périodes favorables les recettes se doivent
d’augmenter et les dépenses de diminuer pour permettre aux gouvernements de recouvrir
leurs marges de manœuvres afin de faire face aux prochaines difficultés. Tout l’intérêt est
alors de déterminer comment les instances publiques utilisent cet outil conjoncturel, que ce
283
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
soit lors des périodes favorables ou non, puisque de leur solvabilité dépendra leur capacité
d’intervention.
Les variables les plus pertinentes à analyser dans ce cadre d’analyse sont présentées dans le
tableau 56. Elles permettent de déterminer le potentiel de réactivité de la politique
budgétaire face aux tensions financières internationales dans le contexte particulier des
PEC0.
Tableau 56. Description des variables vis-à-vis de l’efficacité de la politique budgétaire
Variables :
Déficits budgétaires des
pouvoirs publics.
Poids de
l’endettement Endettement total des
pouvoirs publics.
Nature de la
politique
Budgétaire
Difficulté du
refinancement
Politique budgétaire
contra-cyclique.
Echéances de court
terme de l’endettement
public.
Niveau des intérêts à
payer par les pouvoirs
publics.
Interprétations :
Les déficits budgétaires et l’endettement total indiquent les
capacités financières pouvant être mises en place lors de
tensions sur le taux de change.
La nature contra ou pro cyclique de la politique budgétaire
(à partir des taux de croissances économiques et des déficits
publics) décrit l’utilisation conjoncturelle des capacités
financières de l’Etat durant des périodes optimales ou non.
Les échéances de court terme de l’endettement public et le
niveau des taux d’intérêts à payer sont des indicateurs
complémentaires vis-à-vis de la facilité ou non des pouvoirs
publics à se refinancer.
La liste des variables du tableau 56 est regroupé en trois grands points : le poids de
l’endettement public (avec le déficit budgétaires et l’endettement total), la nature de la
politique budgétaire (avec l’analyse de la pro-cyclicité des politiques menées) et la difficulté
du refinancement public (avec les périodes des échéances d’endettement ainsi que
l’augmentation des taux d’intérêt demandés). Ces trois approches ne sont pas toujours
complémentaires. La politique budgétaire peut être inefficace par des marges de manœuvre
inexistantes (poids de l’endettement trop fort), par un manque de confiance du marché
international (difficulté de refinancement) ou simplement par le souhait de ne pas utiliser la
politique budgétaire, même lors de périodes de récession, pour ne pas dégrader les finances
publiques (nature de la politique budgétaire).
284
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Cette analyse fait apparaitre des résultats intéressants au sein des PECO lors de la crise de
2008 (tableau 57). Les divergences entre ces pays sont fortes, tant à l’origine de stratégies
de rattrapage économique différentes (intégration rapide à l’euro ou non) que de marges de
manœuvre devenues inexistantes face à l’endettement continu de certains pouvoirs publics.
Ces résultats viennent compléter la régulation du pilotage de la dette de la thématique 3.
Même si le poids de l’endettement public y est pour certains faible, l’utilisation non contracyclique des dépenses publiques et/ou les difficultés de refinancement auprès des marchés
financiers ne permettent pas de réguler efficacement les tensions subies dans ces pays.
Tableau 57. Qualité des variables de la politique budgétaire au sein des PECO
PECO :
Poids de
l’endettement
Bulgarie
Favorable
République Tchèque
Favorable
Estonie
Favorable
Lettonie
Favorable
Lituanie
Favorable
Hongrie
Défavorable
Pologne
Favorable
Romanie
Favorable
Slovénie
Favorable
Slovaquie
Favorable
Source : Eurostat et calculs auteurs
Nature de la
politique
Budgétaire
Défavorable
Favorable
Défavorable
Défavorable
Favorable
Favorable
Favorable
Défavorable
Favorable
Favorable
Difficulté du
refinancement
Favorable
Favorable
Défavorable
Défavorable
Favorable
Défavorable
Favorable
Favorable
Favorable
Favorable
Le tableau 57 décrit des faiblesses pour un nombre précis de pays. L’endettement total est
élevé pour la Hongrie. La nature contra-cyclique des dépenses publiques est défavorable à la
Bulgarie, la Lettonie, l’Estonie et la Roumanie. Quant à l’endettement, principalement à
échéance de court terme, il est inquiétant en Estonie, en Lettonie et en Hongrie. L’adhésion
des PECO à l’Union européenne en 2004 et en 2007 doit logiquement aboutir à terme à
l’intégration à la zone euro. Pour ceux d’entre eux qui ont opté pour une intégration rapide,
ils ont déjà ancré leur monnaie à l’euro (Bulgarie, Estonie, Lettonie et Lituanie). La contrainte
sous-jacente est le respect des critères de Maastricht avec des taux d’endettement et des
déficits annuels contenus. Ils sont dans l’incapacité d’utiliser leur politique budgétaire,
imposant la stérilisation de cet outil de régulation conjoncturelle.
285
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
C’est le poids excessif de l’endettement pour la Hongrie, pays sans volonté d’adhésion à
l’euro dans l’immédiat, qui explique ses difficultés de refinancement. La Roumanie est à
considérer à part puisqu’elle n’a pas d’endettement excessif, ni de difficultés de
refinancement. Mais l’adhésion tardive de ce pays à l’Union européenne en 2007, couplée à
des difficultés de régulation surtout dans le pilotage de son inflation, justifie son objectif
d’endettement faible et non contra-cyclique.
La description analytique de la politique budgétaire des PECO permet maintenant de
comparer les résultats obtenus avec les conséquences de la crise des Subprimes de 2008. La
politique budgétaire apparait comme une alternative crédible pour amoindrir les effets
négatifs dans l’économie (politique contra-cyclique pour soutenir l’activité économique)
ainsi que sur la viabilité de l’ancrage du taux de change (augmentation des réserves de
devises par la contraction de prêts internationaux). Afin de conforter cette interprétation,
une majorité de PECO incapables d’utiliser efficacement l’outil budgétaire ont fait appel à
l’aide internationale lors de la crise de 2008 (Roumanie, Estonie et Hongrie). Le schéma 31
en retrace la répartition.
Schéma 31. Mise en parallèle de l’instabilité financière au sens de Minsky avec l’efficacité
de la politique budgétaire
286
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Le schéma 31 illustre les effets de l’instabilité financière au sens de Minsky en rapport avec
l’efficacité conjoncturelle de la politique budgétaire pour chaque PECO. Il n’y a ici aucun lien
avec la qualité de leurs fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers. C’est la
capacité de régulation à court terme, principalement en utilisant la politique budgétaire
comme outil d’intervention, qui apparait déterminante. Les pays qui n’ont pas la possibilité
de l’utiliser ont été soumis à de fortes pressions vis-à-vis de leur taux de change (Hongrie,
Estonie et Roumanie et dans une moindre mesure la Bulgarie et la Lettonie). Quant aux
autres pays (République Tchèque, Slovaquie, Slovénie, Lituanie et Pologne), ils avaient des
marges de manœuvres budgétaires plus importantes, expliquant certainement une plus
grande facilité de rebond.
Indépendamment de la viabilité de moyen, voire long terme, du processus de rattrapage
économique de ces pays, le choc financier à mis en avant l’importance de la régulation à
court terme par les politiques budgétaires, au détriment de la politique monétaire rendue
inefficace. La fuite des capitaux étrangers n’ayant pas pour origine une dégradation des
fondamentaux de ces pays, l’augmentation des taux directeurs au sein des PECO pour rendre
les territoires plus attractifs n’apparait pas comme une solution pertinente. A l’inverse, la
politique monétaire de la zone euro explique largement plus les fuites de capitaux au sein de
ces pays, comme la problématique de ce travail a pu le défendre.
Afin de préserver les bénéfices d’un processus de rattrapage économique en cours, la
politique budgétaire, à travers le soutien de l’activité économique et la reconstitution des
réserves de devises par l’endettement international, devient déterminante pour éviter le
risque de rupture des ancrages de change. Pourtant, l’intégration à la zone euro impose une
stérilisation de cette même politique budgétaire alors que la politique monétaire est
inefficace. Il devient difficile dans ces conditions de trouver un équilibre viable pour les
PECO.
287
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
4. Viabilité du rattrapage économique à moyen terme : focus sur les flux d’IDE
Les pressions internationales, dans le cadre de l’hypothèse soulevée, peuvent mettre à mal
les agrégats des PECO. La politique budgétaire apparait comme l’élément permettant
d’atténuer ces tensions à court terme. Mais elle n’est pas suffisante pour déterminer la
viabilité du rattrapage économique de ces pays à moyen et long terme. Le retour à la
normale dans le reste du monde sera d’autant plus bénéfique aux PECO, avec le retour des
capitaux étrangers, s’ils ont des taux de rentabilité toujours plus importants que dans la zone
euro. La capacité d’attractivité lors de l’après crise, de préférence préservée par l’efficacité
de la politique budgétaire, devrait logiquement correspondre à la qualité du positionnement
des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers.
Deux des trois thématiques déjà décrites précédemment rentrent en compte dans la
détermination de la viabilité du processus de rattrapage économique de chaque PECO : la
qualité du positionnement international avec les aspects commercial, monétaire et
financier ; la qualité de la structure interne avec les robustesses économique et bancaire. La
présentation des fondamentaux des PECO à travers ces agrégats et à l’aide des
regroupements déjà effectués (groupe A, B et C) doivent permettre de dessiner l’exposition
de chacun pour ensuite les confronter à l’évolution de l’attractivité des capitaux étrangers
lors de l’après crise. Il sera effectué un découpage au regard des capitaux totaux, à court,
moyen et long terme. Les tests économétriques effectués précédemment ont pu confirmer
l’importance de ce choix afin d’en tirer le maximum d’interprétations.
Le tableau 58 définit la qualité du positionnement international autour de l’aspect
commercial (indispensable lors des spécialisations sectorielles basées sur l’exportation), et
les aspects monétaire et financier (nécessaire à la soutenabilité de l’endettement avec le
reste du monde pour financer l’économie).
288
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Tableau 58. Thématique 1 : qualité du positionnement international au sein des PECO
Agrégats :
Taux d’ouverture
commerciale
Compétitivité-prix
Déficit de la balance courante
Endettement devise court
terme
Endettement devise moyen
long terme
Positionnement favorable
République Tchèque, Hongrie,
Slovénie, Slovaquie et spécifique
pour Pologne.
République Tchèque, Hongrie et
Slovaquie.
République Tchèque, Bulgarie,
Pologne, Hongrie et Slovaquie.
Pologne, Hongrie, République
Tchèque et Roumanie (Slovénie
et Slovaquie adhésion euro
avant crise).
Pologne, République Tchèque et
Roumanie (Slovénie et
Slovaquie adhésion euro avant
crise).
Positionnement défavorable
Bulgarie, Estonie, Lituanie,
Lettonie et spécifique pour
Roumanie.
Bulgarie, Estonie, Lituanie,
Lettonie, Pologne, Roumanie,
Slovénie.
Estonie, Lituanie, Lettonie,
Roumanie et Slovénie.
Estonie, Lettonie, Lituanie, et
Bulgarie.
Hongrie, Lituanie, Bulgarie,
Estonie, Lettonie.
L’aspect commercial vis-à-vis du reste du monde est favorable principalement pour la
République Tchèque, la Slovénie, la Slovaquie et la Hongrie. Ces quatre pays abordent un
taux d’ouverture fort, une compétitivité-prix favorable et un déficit de la balance courante
qui s’améliore voire se stabilise. La Pologne est dans une situation intermédiaire, à l’origine
de la taille de son économie. La Bulgarie contient la dégradation de sa balance courante sans
pour autant témoigner d’une réussite dans son positionnement commercial international.
Quant à l’aspect monétaire puis financier, la Slovénie et la Slovaquie ont pu adhérer à l’euro,
mettant ces pays à l’écart de l’analyse. L’endettement en devises à court terme est favorable
en Pologne, Hongrie, République Tchèque et en Roumanie. Alors que l’endettement en
devises à moyen et long terme reprend les mêmes pays sauf la Hongrie.
Quant à la thématique 2 (tableau 59), concernant la qualité de la structure interne, elle
reprend la robustesse économique et bancaire. Son but est de définir le degré de diffusion
au reste de l’économie lors de l’intégration internationale, qu’elle soit commerciale ou
financière. Le stock d’IDE (de nature productif et stable), les efforts de R&D (nécessaires
pour monter en gamme dans les spécialisations sectorielles) et le poids de l’industrie dans le
PIB (stratégie de développement choisie qui passe par l’industrialisation) sont un ensemble
d’éléments déterminant dans la capacité de diffusion des gains de productivité au tissu
289
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
économique dans sa globalité. Les ratios de solvabilités et la présence des banques
étrangères viennent renforcer la bonne gestion des projets économiques puisqu’ils reposent
sur l’endettement des agents économiques locaux.
Tableau 59. Thématique 2 : qualité de la structure interne au sein des PECO
Agrégats :
Poids de l’industrie
dans le PIB
Efforts de R&D
Stocks d’IDE/PIB
Robustesse bancaire
Positionnement favorable
République Tchèque, Hongrie,
Slovénie, Slovaquie, Bulgarie et
Pologne.
République Tchèque, Hongrie,
Roumanie et Slovénie.
Lituanie, Pologne, Roumanie,
République Tchèque, Hongrie,
Slovénie et Slovaquie.
Forte présence des banques
étrangères dans l’ensemble des
PECO (effet stabilisateur)
Positionnement défavorable
Estonie, Lituanie et Lettonie.
Bulgarie, Estonie et Lettonie.
Bulgarie, Estonie et Lettonie.
Dégradation généralisée des
ratios de solvabilité dans tous
les PECO (impact conjoncturel).
Le tableau 59 décrit des effets de diffusions importants dans le reste de l’économie pour ce
qui est de la République Tchèque, de la Hongrie, de la Slovénie et de la Slovaquie. La Pologne
et la Roumanie sont dans des conditions intermédiaires, toujours au regard de la taille de
leur économie rendant plus difficile le processus de diffusion. La robustesse bancaire est
dans une situation de dualité, où la forte présence de banques étrangères dans ces
économies assure des méthodes de gestions rigoureuses en plus du soutien de leur maisonmère. Mais la détérioration des ratios de solvabilités s’est parallèlement réalisée dans tous
les PECO face à la dégradation de la conjoncture économique fin 2008.
Les résultats que nous venons de présenter, à travers les tableaux 58 et 59, témoignent de
divergences fortes entre les PECO dans les stratégies de convergence adoptées. Un premier
regroupement concerne les pays qui ont choisi d’industrialiser leur économie avec de réels
efforts dans les effets de diffusion au reste de l’économie. Il s’agit du groupe A décrit
précédemment avec la République Tchèque, la Slovénie, la Slovaquie mais aussi la Hongrie.
Ce dernier pays avait été classé dans le groupe C puisqu’il témoignait de fortes vulnérabilités
dans ses capacités de régulation de court terme. Cependant, la qualité de son
positionnement à moyen et long terme, ici définie par la viabilité de son rattrapage
économique, reste encore favorable. Le second groupe comprend la Pologne et la
290
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Roumanie, dans une situation intermédiaire. Le troisième groupe est composé de l’Estonie,
de la Lituanie et de la Lettonie, pays sans stratégie de développement crédible à moyen
terme, ainsi que la Bulgarie qui commence tout juste son processus de rattrapage
économique.
La qualité des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers maintenant décrite, il
convient de s’interroger sur l’attractivité effective vis-à-vis des capitaux étrangers lors de
l’après crise, fin 2008, au sein des PECO. La difficulté engendrée par la contraction de la
liquidité internationale pousse les agents économiques internationaux à retirer leurs
capitaux afin de satisfaire leurs difficultés de refinancement en zone euro. Leur fuite
généralisée fait fortement diminuer la valeur des actifs sans pour autant remettre en cause
leur potentiel de rentabilité présente et future (la crise n’a pas pour source la dégradation
des taux de rentabilité). Logiquement, certains capitaux étrangers devraient revenir
rapidement dans les pays les plus prometteurs lors de l’après crise. Il convient d’y regarder
de plus près pour confirmer cette interprétation. Le potentiel de rebond dans ces pays, au
regard de la qualité de leur processus de rattrapage économique mis en avant à travers les
thématiques 1 et 2, va offrir des opportunités de gains non négligeables pour les capitaux de
retour rapidement, lors de la fin des tensions financières internationales.
L’évolution des flux de capitaux totaux, à court, moyen et long terme est présentée dans les
graphiques 61, 62, 63 et 64. De nombreuses tendances émergent au regard de ces faits, dont
certaines largement plus intéressantes que d’autres. Pour plus de lisibilité, les résultats sont
synthétisés dans le tableau 60 qui les récapitule pour chaque PECO. Il peut déjà être décrit
ce que l’on entend par retour rapide des capitaux étrangers. La crise a pu impacter tous les
PECO fin 2008, sans exception. Mais l’analyse graphique décrit le retour de certains capitaux
(principalement les IDE) dès mi-2009 dans le meilleur des cas et seulement début 2010 pour
les autres. Les pays qui ont pu rebondir rapidement ont bénéficié des capitaux étrangers mi2009, mettant fin aux pressions sur le taux de change par la même occasion.
291
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Graphique 61. Flux de capitaux étrangers totaux (% du PIB)
Source : Eurostat (solde)
Graphique 62. Flux de capitaux étrangers à court terme (% du PIB)
Source : Eurostat (solde)
Graphique 63. Flux de capitaux étrangers de portefeuille (% du PIB)
Source : Eurostat (solde)
292
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Graphique 64. Flux de capitaux étrangers IDE (% du PIB)
Source : Eurostat (solde)
Le tableau 60 illustre la décomposition des tendances favorables ou non par le retour rapide
des capitaux jusqu’à mi-2009 dans tous les PECO, par échéance des capitaux étrangers
(totaux, à court terme, de portefeuille et d’IDE).
Tableau 60. Description des tendances des PECO par échéances des capitaux étrangers
Echéances des
capitaux étrangers
I(t) totaux
I(t) Ct
Tendance favorable
Tendance défavorable
Aucun.
Aucun.
Tous les PECO.
Tous les PECO.
Estonie, Lettonie, Bulgarie,
Lituanie, Roumanie, Hongrie,
Slovaquie.
Lituanie, Roumanie, Lettonie et
dans une moindre mesure
l’Estonie (annonce adhésion euro
en 2009).
I(t) portefeuille
Slovénie, Pologne, République
Tchèque.
I(t) IDE
Slovénie, Slovaquie, République
Tchèque, Hongrie. Dans une
moindre mesure la Pologne.
Globalement, les capitaux étrangers ne reviennent pas dans les PECO lors de l’après crise
puisque le total des investissements étrangers est défavorable pour tous les pays. Cette
tendance se confirme aussi avec les flux de capitaux de court terme. Cette situation apparait
logique puisque la région est encore instable et peut témoigner de risques importants pour
des investissements de court terme. En ce qui concerne les flux de capitaux de portefeuille,
nous pouvons y voir une tendance qui correspond partiellement aux pays ayant de bons
293
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
fondamentaux macroéconomiques, tels que la Slovénie, la Pologne et la République
Tchèque.
Quant aux IDE, par nature plus stables et productifs, il y a un regroupement reprenant
totalement la répartition des pays suivant la qualité de leurs fondamentaux. La Slovénie, la
Slovaquie, la République Tchèque, la Hongrie et dans une moindre mesure la Pologne
bénéficient favorablement du retour de ces capitaux. L’Estonie va bénéficier de l’annonce de
son intégration à la zone euro pour début 2011, témoignant d’un rebond isolé de son
attractivité seulement au 4eme trimestre 2009. Quant à la Bulgarie, Lituanie, la Lettonie et la
Roumanie, ces pays sont encore dans une situation de diminution forte de leur attractivité
en IDE jusqu’en 2010.
L’hypothèse émise dans le retour à l’attractivité des PECO lors de l’après crise confirme ici
l’importance de la qualité des fondamentaux émis par les thématiques 1 et 2. Le schéma 32
décrit le positionnement de chaque PECO autour de cette interprétation, entre la viabilité du
processus de rattrapage économique et le retour des IDE lors de l’après crise de 2008.
Schéma 32. Relation entre la qualité du rattrapage économique avec le retour rapide des
IDE lors de l’après crise de 2008
294
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Le schéma 32 illustre clairement la relation entre la qualité du rattrapage économique et le
retour rapide des IDE lors de l’après crise. Les pays bénéficiant de nouveau de ces capitaux
sont la République Tchèque, la Slovénie, la Slovaquie et la Hongrie. Alors que la Lituanie, la
Lettonie, la Bulgarie et la Roumanie n’en bénéficient pas aussi rapidement. La Pologne est
dans une situation intermédiaire et l’Estonie a pu bénéficier succinctement de l’annonce de
son intégration à la zone euro.
La nature des IDE conforte cette interprétation. Logiquement, ce genre d’investissement n’a
pas vocation à être rentabilisé rapidement, se concentrant vers des placements
principalement productifs. Les PECO sont des territoires qui bénéficient d’effets de
convergence positifs depuis l’intégration à l’Union européenne et celle en cours à la zone
euro. La crise a pu les toucher indifféremment mais la non dégradation de leur
fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers pour certains, lors de la contraction
de la liquidité dans la zone euro, peut les rend encore attractifs lors de l’après crise.
Les conséquences de ce retour rapide des IDE dans des PECO ont permis d’atténuer les
effets de la crise financière internationale. Les taux de croissance économique qui repartent
à la hausse dès mi-2009 pour la République Tchèque, la Slovénie, la Slovaquie, la Hongrie et
la Pologne justifient cette interprétation (graphique 65). Alors que cette même analyse dans
les autres pays, à savoir la Bulgarie, l’Estonie, la Lettonie, la Lituanie et la Roumanie,
témoigne d’une croissance économique faible sur cette même période (graphique 66).
295
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Graphique 65. Premier groupe de pays avec des taux de croissance favorables
Source : Eurostat (en pourcentage du PIB)
Graphique 66. Second groupe de pays avec des taux de croissance défavorables
Source : Eurostat (en pourcentage du PIB)
296
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
La description de la viabilité du processus de rattrapage économique a permis d’accentuer le
rôle fondamental des flux de capitaux, principalement sous forme d’IDE, et ce avant,
pendant et après la crise. Ceux-ci sont indispensables au financement de la restructuration
du tissu industriel des PECO, neutralisant ainsi le déficit de la balance courante. Leur fuite
durant la crise des Subprimes de 2008 conforte l’impossibilité pour eux de les retenir dans
un contexte de libéralisation de leur compte de capitaux. Les pressions sur les taux de
change témoignent de l’incompatibilité des ancrages dans ce contexte d’instabilité, pourtant
indispensable à l’attractivité des territoires d’avant crise.
L’alternative qui a pu se dessiner ici repose de nouveau sur la nécessité pour ces pays de
rester attractif pendant la crise afin de voir les capitaux revenir le plus rapidement possible
lors de l’après crise. Mais cette attractivité est fonction de la qualité des fondamentaux de
chacun. Pourtant, toute convergence économique viable est un processus de long terme à
mettre en œuvre. Les deux aspects temporels mis en avant, régulation conjoncturelle à
court terme et qualité des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers à moyen
terme, apparaissent indispensables. Le juste équilibre n’est pourtant pas facile à réaliser
pour les PECO face aux tensions qu’ils peuvent subir.
297
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Conclusion intermédiaire
L’alternative proposée ici était de s’interroger sur la capacité des PECO à patienter à court
terme lors des tensions internationales, pour bénéficier à nouveau des investissements
étrangers lors de l’après crise. Les capitaux sont nécessaires à la poursuite de leur rattrapage
économique lors du retour à la normale des marchés financiers, poursuite conditionnée par
la non dégradation de leurs fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers. La crise
financière de 2008 illustre l’aptitude de certains d’entre eux à dépasser ces tensions au
regard de leur positionnement. Elle a pu d’abord toucher indifféremment les PECO lors des
retraits des capitaux étrangers. Mais certains pays émergents de la zone se sont retrouvés
par la suite en difficulté alors que d’autres beaucoup moins. Cette situation a conduit à
étudier la qualité de leurs agrégats sous la forme de trois thématiques pour refléter les
divergences et convergences entre les PECO, à l’origine de la formalisation de trois groupes
(A, B et C). Puis ces mêmes éléments ont servi à la justification de différenciation à court et
moyen terme dans la capacité de rebond de ces pays.
La possibilité de réguler les tensions issues du marché financier international à court terme
s’est structurée autour de la thématique 3. L’incapacité pour certains à utiliser avec
optimalité l’ensemble des outils conjoncturels de la politique économique (sacrifice de la
politique monétaire afin de stabiliser le taux de change et atomicité de la politique
budgétaire pour respecter les critères de Maastricht) a renforcé les tensions face aux faibles
marges de manœuvre qui pouvaient leur rester (endettement public important et inflation
forte). Dans ces conditions, la détermination de scénarios à court terme n’est nullement
fonction de la qualité du processus de rattrapage économique mais seulement du potentiel
de réactivité de la politique budgétaire des PECO. La mise en parallèle de l’instabilité
financière au sens de Minsky avec le degré d’efficacité de la politique budgétaire des PECO
décrit les regroupements à court terme suivant :
La République Tchèque, la Slovénie, la Slovaquie, la Lituanie et la Pologne ont des marges de
manœuvre budgétaires qu’ils ont pu utiliser lors des pressions sur leur taux de change.
Quant aux autres pays, ils sont beaucoup plus exposés, avec des capacités d’intervention
budgétaires trop faibles. La Hongrie, l’Estonie et la Roumanie ont ainsi pu demander l’aide
298
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
internationale afin de stabiliser leur taux de change. La Bulgarie et la Lettonie n’ayant pas
fait cette démarche, apparaissent moins exposés à l’instabilité financière internationale.
Pour ce qui est des perspectives à moyen terme, la qualité du rattrapage économique des
PECO devient déterminante. Ce point est important puisqu’il confirme de nouveau l’intérêt
de l’alternative mise en avant face aux tensions internationales. La qualité de leur
positionnement macroéconomique et macro-financier détermine le retour, lors de l’après
crise, des capitaux étrangers les plus stables que sont les IDE. Ce retournement lorsqu’il
s’opère s’explique par l’opportunité d’acquérir des actifs à faible coût. La diminution du prix
des actifs et la non dégradation des taux de rentabilité des placements effectués peuvent
légitimer cette stratégie, stoppant les pressions sur les taux de change. Tous les PECO n’ont
pas fait le choix d’une stratégie de convergence en fonction de l’attractivité vis-à-vis des
capitaux à long terme, pourtant moins volatils. Ceux-ci ont pour principales destinations les
secteurs productifs majoritairement industriels, comme en République Tchèque, Slovénie,
Slovaquie, Hongrie et dans une moindre mesure en Pologne. Mis à part la Roumanie, pays en
retard dans son processus de transition postsocialiste, les pays Baltes et la Bulgarie ont
plutôt opté pour une stratégie d’intégration rapide à l’euro, sans pour autant s’interroger sur
la viabilité à moyen terme de la convergence de leur économie.
La présentation de la qualité du positionnement des PECO, à court terme puis à long terme,
au regard des leurs fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers, explique les
rebonds plus rapides pour une partie d’entre eux. Les éléments les plus pertinents, entre la
politique budgétaire et l’attractivité vis-à-vis des IDE, donnent suffisamment matière pour
réaliser des perspectives de développement à l’aide de scénarios.
299
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Conclusion de la troisième partie
L’alternative qui apparait réalisable aujourd’hui pour les PECO, tant au regard des stratégies
d’allocations des capitaux des agents économiques internationaux que de leurs propres
politiques de développement économique, consiste à patienter lors des tensions financières
internationales pour rebondir le plus rapidement lors de l’après crise. Il est difficilement
envisageable pour eux d’intervenir sur les éléments perturbateurs internationaux entrainant
l’occurrence des crises, comme les tests économétriques ont pu le mettre en avant. La
configuration de l’endettement « à la Minsky » des agents économiques, à court terme
auprès de la zone euro pour investir à moyen et long terme dans les PECO, exprime les
vulnérabilités par l’interdépendance qui en résulte entre ces pays. Lors d’une contraction de
la liquidité internationale, les PECO, sans même justifier d’une dégradation de leurs
fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers, se voient impactés par les canaux de
la liquidité ainsi que des taux d’intérêt au regard du processus d’intégration en cours tant au
niveau de l’Union européenne qu’à celui de la zone euro.
Bien que tous les PECO ne soient pas aujourd’hui dans la même situation, fruit de l’héritage
de l’ère soviétique mais aussi de la plus ou moins bonne réussite de leur période de
transition, ils ont tous un potentiel de développement favorable avec des effets de
convergence vers l’Europe occidentale. Leur capacité de régulation à court terme, à travers
la politique budgétaire, et le retour rapide des capitaux étranger lors de l’après crise,
fonction de la qualité du développement économique de moyen terme, sont les éléments
d’une alternative crédible pour dépasser les contraintes induites par l’instabilité financière.
Au regard de ces faits, et de la qualité des fondamentaux macroéconomiques et macrofinanciers de ces pays, leurs perspectives d’évolution à moyen terme peuvent être définies
par la détermination de scénarios reposant sur les analyses effectuées précédemment.
Les pays relevant d’un premier scénario sont la République Tchèque, la Hongrie, la Slovénie
et la Slovaquie. Ils ont choisi la stratégie d’industrialisation sur des secteurs compétitifs à
l’exportation afin de réguler à terme la balance courante à l’aide d’IDE productifs. Avec un
tissu industriel déjà développé et dynamique, couplé à une R&D tournée vers ce secteur, la
balance courante commence déjà à s’améliorer, la compétitivité ne se basant plus
300
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
seulement sur les prix mais aussi sur la qualité technologique. L’ancrage du taux de change
semble sous contrôle avec des taux d’inflation corrects et une politique budgétaire efficiente
(sauf pour la Hongrie) même si la Slovénie et la Slovaquie ont déjà adopté l’euro. A moyen
terme, la dynamique de rattrapage de la République Tchèque, la Slovénie et la Slovaquie
semble favorable. Cependant, même avec des atouts encore forts, la Hongrie devra faire
face à sa contrainte budgétaire pour ne pas réitérer sa défaillance lors de la crise de 2008.
La Bulgarie et la Roumanie composent un second scénario. Ces pays sont plutôt dans une
situation intermédiaire en raison d’une intégration plus tardive (en 2007) à l’Union
européenne. Il n’y a pas encore de stratégie véritablement définie, bien que le secteur
industriel soit dynamique mais encore faible (démontrant en particulier un fort potentiel en
raison d’un coût de la main d’œuvre des plus bas). Ces pays restent fragiles (endettement
public pro-cyclique notamment), mais les flux de capitaux de moyen et long termes
semblent pourtant parier sur leur potentiel de développement. Chacun d’eux entre suit une
démarche spécifique : ancrage à l’euro pour la Bulgarie et flottement administré pour la
Roumanie. Il apparait peu probable que ces pays intègrent l’euro à court terme au regard de
leur degré de développement. Une orientation vers une industrialisation compétitive à
l’exportation peut apparaitre comme une solution pertinente à terme. Dans cette logique, la
Roumanie apparaitrait relativement mieux positionnée que la Bulgarie puisque l’ancrage
bulgare à l’euro, néanmoins source de stabilité, ne lui permet plus de réaliser des
dévaluations compétitives. Dans ce dernier cas, une réorientation de l’ancrage avec un
flottement encadré, ou des marges de fluctuation limitées, serait sans doute nécessaire afin
d’assurer la viabilité du processus de développement.
Le troisième et dernier scénario regroupe les pays baltes. Ils ont opté pour une stratégie
d’intégration rapide à la zone euro avec l’ancrage de leur monnaie. Mais sans projet réel
d’industrialisation ni d’effort particulier en termes de R&D. Dès lors, la résorption
progressive des déficits de balance courante est difficilement envisageable. Ces pays n’ont
pas profité des avantages concurrentiels qu’ils auraient pu avoir (main d’œuvre peu chère)
afin de se spécialiser dans des secteurs compétitifs à l’exportation. Il s’en est suivi une
pression spéculative importante démontrant une dynamique d’attractivité des capitaux sur
des secteurs non productifs (immobilier, bâtiment…). La crise financière a confirmé la
301
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
vulnérabilité de la stratégie de l’Estonie, de la Lituanie et de la Lettonie. L’intégration à
l’euro, effective depuis 2011 pour l’Estonie, élimine de fait le problème d’instabilité du taux
de change mais interdit du même coup d’éventuel recours à des dévaluations compétitives.
Bien au contraire, l’appréciation récurrente de l’euro face aux monnaies des autres pays
émergents est susceptible de poser des problèmes au niveau de la restructuration de
l’économie, que ce soit ou non par l’industrialisation. Dans ces conditions, le scénario
d’après crise pour ces pays apparait a priori relativement défavorable.
La Pologne a un modèle de développement à part. Sa stratégie aurait pu être clairement
définie depuis plusieurs années (industrialisation ou intégration rapide à l’euro), mais il
semble que ce pays se soit orienté vers un autre modèle. C’est pourquoi elle ne fait partie
d’aucun des scénarios précédemment décrits. Ce pays a su se spécialiser sur des secteurs
industriels compétitifs à l’exportation sans pour autant y accorder trop d’importance (le
poids de l’industriel n’est pas dominant mais reste dynamique dans l’économie). S’agirait-il
alors d’une stratégie qui n’est envisageable qu’au regard des caractéristiques internes de la
Pologne (territoire et population importants) ? La taille du marché domestique permet
d’être moins dépendant des chocs internationaux, comme nous avons pu le vérifier durant la
dernière crise. Il semblerait qu’à court terme cette stratégie de développement soit
pertinente. Cependant, les taux de croissance de la Pologne de 1995 à aujourd’hui sont
restés moins attractifs que ceux des autres PECO. Sur le moyen/long terme, le processus de
développement qui s’est engagé semble à la fois relativement moins rapide que dans le cas
de la plupart des PECO mais aussi et peut-être plus sûr en termes de viabilité.
302
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Conclusion Générale
La pensée dominante postule l’existence d’un lien fort de cause à effet entre la dégradation
des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers d’un pays et l’occurrence d’une
crise financière. Historiquement, cette démarche a démontré à de multiples reprises sa
pertinence. De nombreux travaux théoriques et empiriques sont venus conforter cette idée.
Mais le contexte économique et financier n’était pas le même qu’aujourd’hui. Les prémices
de la globalisation et de la mondialisation de nos sociétés ont pu engendrer des
changements dans les modalités d’occurrence des tensions il y a quelques années déjà. Pour
autant, le degré d’imbrication des territoires n’avait pas atteint le niveau que nous lui
connaissons aujourd’hui. La libéralisation des flux économiques, financiers et humains a
conduit à une intégration de la quasi-totalité des sociétés au marché international. Face à
ces nouvelles caractéristiques, il devient légitime de s’interroger sur l’importance à accorder
à la notion d’interdépendance.
Des faits empiriques récents sont venus questionner sur la façon dont nous pouvions
appréhender ces nouvelles formes de crises. La grille de lecture établissant le lien entre la
qualité des fondamentaux et l’émergence d’une crise est apparue inadéquate voire
inappropriée pour quelques une des crises de ces dernières années. La justification graduelle
de cette approche par des caractéristiques empiriques de plus en plus concomitantes, Corée
du Sud (1997-1998), Brésil (fin 1990 début 2000) et particulièrement au sein des PECO
(2008), témoignent de l’insuffisance des modes d’interprétation que nous avions pris pour
habitude d’utiliser. Pis encore, la non dégradation des fondamentaux macroéconomiques et
macro-financiers de ces pays n’a malheureusement pas permis d’annoncer en amont les
pressions latentes.
L’originalité de notre démarche a été de s’interroger sur l’interprétation de ces quelques
faits empiriques qui divergent par rapport à l’explication donnée habituellement par la
littérature économique. La problématique qui s’y dégage suppose de conceptualiser d’une
autre façon l’occurrence de crises financières pour les cas particuliers soulevés
précédemment. L’hypothèse est que des pays peuvent entrer en crise sans pour autant
témoigner d’une dégradation de leurs fondamentaux, laissant place à la prépondérance des
303
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
effets de contagion. L’observation empirique interpelle sur ce phénomène à travers
l’illustration qu’elle offre dans la perception macroéconomique des faits. Mais elle n’apporte
pas suffisamment d’éléments constructifs dans l’appropriation et la structuration du
raisonnement.
La notion de crise en Sciences Economiques, avec un regard critique face au contexte
spécifique de nos exemples empiriques, a donné l’opportunité de dresser des limites
indispensables à la construction de notre raisonnement. Les méthodes actuelles
d’interprétation des crises, reposant sur ce lien de cause à effet, permettent de les
déterminer, de les mesurer pour enfin les anticiper. La dégradation de variables qui reflètent
les fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers définit les écarts par rapport à
une moyenne jugée normale. Celles qui vont fluctuer bien avant l’occurrence d’une crise
seront pertinentes dans l’anticipation du phénomène pour tenter de le contourner en y
apportant les réponses adéquates. Dans le cadre précis de notre hypothèse, à savoir la non
dégradation des fondamentaux et donc dans l’incapacité de formuler de quelconques
anticipations à partir de leurs évolutions constatées, cette approche méthodologique
communément admise ne nous permet pas de façonner notre réflexion. Le besoin de
s’approprier différemment les concepts émis nous oblige à nous orienter vers un autre cadre
d’analyse plus structurant dans notre démarche.
La réalisation d’un cadre reflétant les caractéristiques de notre environnement a reposé sur
l’intégration des éléments reflétant les spécificités majeures de l’architecture financière
actuelle. Ce sont bien les évolutions des modes d’organisation et d’échange entre les
économies qui sous-tendent la constitution de vulnérabilités potentielles dans l’occurrence
d’une crise. La sphère financière n’est plus neutre dans son rôle d’allocation des capitaux
vers les placements les plus efficients dans l’économie réelle. La libéralisation des comptes
de capitaux dans nombre de pays permet de réaliser librement des investissements dans le
reste du monde. Quant aux choix des agents économiques internationaux, individuels ou
collectifs, ils deviennent déterminants et sont souvent à l’origine de comportements
spéculatifs globaux. Le renforcement de l’intégration financière qui en découle amplifie les
dépendances entre économies. Se créent alors des vulnérabilités que nous qualifions de
potentielles lors de la matérialisation d’effets de contagion. Dans ce nouveau contexte
304
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
globalisé et mondialisé, les stratégies des agents économiques internationaux deviennent
prépondérantes face aux capacités de réactivités des instances publiques.
Le besoin de compréhension du constat ainsi opéré, en particulier lors de l’étude des pays
évoqués ci-dessus (Corée du Sud, Brésil et PECO), a permis l’identification de leurs
principales caractéristiques en parallèle à la spécification du nouvel environnement
économique et financier. Ils sont tous entrés dans un processus de convergence économique
largement favorable. En conséquence, la littérature les répertorie au titre de pays
émergents. Chacun d’entre eux est fortement intégré au reste du monde, que ce soit
commercialement ou
financièrement. Ils ont sélectionné une stratégie de rattrapage
économique axée sur des spécialisations sectorielles orientées à l’international. Ils
bénéficient d’une attractivité importante en termes de capitaux étrangers. Ils ont opté pour
une libéralisation de leur compte de capital alors que leur taux de change a été ancré à des
devises de références. L’ensemble de ces éléments a permis de façonner un profil des pays
pouvant subir ce genre de crise. Cette contextualisation entre l’environnement global et les
caractéristiques propres à ces pays a permis de constituer les premiers arguments dans
l’explication de l’origine des crises financières qu’ils ont pu subir.
L’imbrication des faits empiriques donnant naissance à des crises sans témoigner de
dégradation dans les fondamentaux, suppose de s’appuyer sur un cadre théorique
nécessaire à la clarification des concepts émis. L’HIF de Minsky fournit des éléments
théoriques offrant l’opportunité de structurer le développement de la problématique afin de
conforter l’hypothèse de travail. Le raisonnement de Minsky repose sur le choix d’un
endettement à court terme des agents économiques afin d’utiliser ces mêmes capitaux dans
des investissements de moyen, voire de long terme. Les perspectives de croissance
économique favorables poussent avec légitimité les acteurs à prendre de plus en plus de
risques, à l’origine d’une structure de leur endettement instable. La contraction de la
liquidité, lors de l’augmentation des taux d’intérêt, va mettre sous pression les agents
économiques qui ont pu opter pour cette divergence de temporalité entre l’endettement
qu’ils contractent et les investissements qu’ils réalisent.
305
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
L’appropriation théorique de l’HIF de Minsky implique d’apporter des modifications dans
l’interprétation conceptuelle des faits. C’est surtout dans la structure de l’endettement des
agents économiques, principalement dans les pays développés afin d’en amoindrir le coût,
et dans la destination des investissements à moyen, voire long terme, principalement dans
les pays émergents pour en augmenter la rentabilité. Cette internationalisation des modes
d’investissement va être amplifiée par les caractéristiques des pays émergents. La
libéralisation de leur compte de capital et la stabilisation de leur taux de change vont
conforter l’intérêt, pour les investisseurs, d’adopter ce type de stratégies internationales.
Pour autant, cette démarche, même si elle a pour but de garantir l’attractivité financière de
ces pays, interpelle quant à sa viabilité. Tout ancrage apparait fortement risqué s’il ne
permet pas au pays qui le pratique de maitriser les flux internationaux de capitaux auxquels
il se soumet.
L’intérêt de cette approche renforce le constat de l’instabilité financière internationale sans
pour autant la justifier par une dégradation des taux de rentabilité (assimilable à la non
dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers). L’effet de levier
attendu sur ce type d’opération repose sur une contrainte de temporalité à l’origine d’une
structure financière potentiellement fragile et instable. Lors d’une augmentation des taux
d’intérêt sur les marchés des pays prêteurs, l’incapacité de refinancer les échéances
d’endettement à court terme peut fragiliser nombre d’acteurs et les pousser à liquider leurs
actifs en catastrophe. Ce mode d’interprétation offre l’opportunité de structurer le
développement de la problématique. L’occurrence de la crise prend alors pour origine la
contraction du crédit par la Banque Centrale du pays développé et nullement la dégradation
des fondamentaux des pays émergents.
La dualité temporelle entre l’endettement et l’investissement des agents économiques les
fragilise face aux difficultés de refinancement qu’ils vont rencontrer. Ceux-ci vont être dans
l’obligation de rapatrier leurs capitaux investis au sein des pays émergents alors que ces
territoires n’ont toutefois pas connu une quelconque dégradation de leurs fondamentaux
macroéconomiques et macro-financiers. Mais la libéralisation des comptes de capital permet
aux prêteurs de réaliser cette fuite, mettant sous pression l’ancrage des taux de change des
pays emprunteurs. Le déficit récurrent de la balance courante de ces pays, même en période
d’accalmie des tensions sur le taux de change, rend l’ancrage insoutenable à terme. Les
306
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
modélisations de crise de change de première génération viendront contextualiser ce
dernier aspect puisque l’anticipation de l’épuisement des réserves de devises va précipiter
l’ancrage à travers une panique généralisée.
L’approche de l’HIF de Minsky, couplée aux modélisations de première génération de crise
de change, offre l’opportunité de structurer méthodologiquement la problématique de ce
travail. L’hypothèse que l’on sous-entend à travers l’interprétation décrite a ensuite été
validée empiriquement pour légitimer sa pertinence. Les PECO ont été sélectionnés au
niveau de l’application empirique dans la mesure où ils présentent l’ensemble des critères
méthodologiques décrits précédemment : pays émergents prometteurs libéralisant leur
compte de capital et stabilisant leur taux de change vis-à-vis de l’euro, intégration
commerciale et financière forte, principalement tournée vers l’Union européenne. La
démarche s’est d’abord voulue structurante vis-à-vis du rôle que l’on a pu donner aux
capitaux étrangers, puisque ceux-ci vont les impacter indifféremment. La divergence forte
des rebonds économiques des PECO lors de l’après crise a conduit à nous interroger sur la
réactivité de chacun, tant à court terme au niveau de la réception des chocs externes, qu’à
moyen terme pour juger de la qualité de leur convergence économique.
Le choix d’intégrer les marchés internationaux afin d’impulser une dynamique de rattrapage
économique au sein des PECO rend les capitaux étrangers indispensables à la viabilisation de
ce processus. Ces flux de financement sont essentiels vis-à-vis de deux aspects dans
l’amorçage du processus de rattrapage économique des pays émergents. Ceux-ci permettent
de financer le déficit de la balance courante, légitime dans le cadre d’un rattrapage
économique afin d’importer des biens et services nécessaires à la restructuration du tissu
industriel (équation 1). Ils sont aussi déterminants dans la stabilisation des taux de change
puisque le différentiel entre l’afflux de capitaux et le déficit de la balance courante est
compensé par les réserves de devises. Ainsi, plus les entrées de capitaux sont importantes
face au montant du déficit courant à financer, plus les réserves de devises seront
importantes, et inversement (équation 2).
Il y a bien ici création d’une vulnérabilité potentiellement forte au sein des PECO au regard
du rôle accordé aux capitaux étrangers. Ces flux financiers doivent servir à financer le solde
307
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
de la balance courante qui reste déficitaire même en période de contraction des capitaux
étrangers. Le différentiel qui va en résulter pousse les autorités à utiliser les réserves de
devises afin de stabiliser le taux de change. La diminution des réserves, mettant sous
pression la stabilisation des taux de change, est assimilable à une crise de première
génération par la fuite généralisée des capitaux lors de l’anticipation de l’incapacité à
maintenir l’ancrage à terme. La dépendance au marché financier international, source de
dynamisme en période favorable, devient problématique pour ces pays face aux deux rôles
accordés aux capitaux étrangers.
Les modélisations suivantes se sont attachées à démontrer l’instabilité de la structure
financière internationale qu’engendre la répartition de ces capitaux au sein des PECO.
L’attractivité des capitaux étrangers est indispensable pour les PECO mais ce sont les
investisseurs internationaux qui décideront de leur localisation. Il a été établi que leur
attractivité dépendait à la fois du coût de l’endettement à court terme dans la zone euro,
afin de le minimiser, et du différentiel de rentabilité économique entre les PECO et la zone
euro, pour le maximiser (équation 3). Il y a bien une stratégie assimilable à l’HIF de Minsky
dans la répartition effectuée par les agents économiques internationaux. La création de
vulnérabilités potentielles se concentre alors dans les effets de contagion pouvant être
induits entre les marchés financiers de chacun de ces pays.
Lors de l’augmentation des taux d’intérêt en zone euro, par l’action de la Banque Centrale
Européenne pour lutter contre des risques inflationnistes, l’augmentation du coût de
l’endettement et la diminution de la liquidité vont poser de nombreuses difficultés de
refinancement à des investisseurs internationaux dont les structures de financement sont
instables. L’incapacité de renouveler leurs dettes à court terme va les obliger à liquider leurs
placements au sein des PECO, engendrant la fuite généralisée des capitaux et mettant sous
pression les taux de change. La construction d’un indice de pression sur les taux de change a
permis d’identifier la nature des pressions d’après les canaux de liquidité (fuite des capitaux
de court, moyen et long terme) et les canaux de taux d’intérêt (échéances inférieures ou
égales à 12 mois). Il s’est notamment avéré que certains de ces pays bénéficiaient de
capitaux à moyen et long terme alors que ceux-ci avaient été initialement financés sur des
échéances de court terme (équation 4).
308
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
L’importance des flux de capitaux pour les PECO, en parallèle aux stratégies d’allocation des
investisseurs internationaux, a mis en avant l’incapacité pour ces pays de maitriser leur
risque de change. Pour autant, le comportement des PECO vis-à-vis de l’occurrence d’une
crise financière, sans pour autant témoigner d’une dégradation de leurs fondamentaux
macroéconomiques et macro-financiers, a pu témoigner d’effets discriminants entre eux. Ils
ont tous été impactés par le retrait des capitaux étrangers, mais des attitudes divergentes
d’après-crise ont pu apparaitre. L’analyse du positionnement à court terme, puis à long
terme, de chacun d’eux a permis de porter un regard critique quant à leur capacité de
rebond.
L’étude analytique des PECO a permis de retenir deux aspects pertinents dans l’explication
des différences de rebond lors de l’après crise. L’endettement à court terme des agents
économiques internationaux pour investir ces mêmes capitaux à moyen et long terme dans
les PECO impose à ces pays une gestion des pressions induites par cette temporalité
divergente. Ces deux contraintes sont réutilisées ici à travers la capacité des PECO à en
amoindrir les effets. La régulation conjoncturelle des pressions sur le taux de change va être
conditionnée par les marges de manœuvre de court terme de la politique budgétaire. La non
dégradation des fondamentaux de ces pays rend inefficiente toute forme de manipulation
des taux directeurs par la Banque Centrale. La fuite des capitaux ne s’expliquant pas par un
manque de rentabilité mais par un besoin de liquidité au sein de la zone euro, la politique
monétaire apparait inadéquate.
La politique budgétaire offre l’opportunité de reconstituer les capacités de devises à travers
l’endettement et d’assouplir les effets de la crise par des politiques contra-cycliques. La
reconstitution des réserves nécessaires à la viabilité de l’ancrage monétaire va déterminer le
degré de résilience des PECO face aux tensions financières internationales. Quant à la qualité
de la convergence économique de chacun, processus plus structurel et de long terme, la
stratégie de spécialisations industrielle orientée à l’exportation apparait comme la plus
attractive lors de l’après-crise. En particulier, les IDE vont revenir d’autant plus vite vers les
PECO ayant adoptés cette méthode de développement permettant a priori de mettre fin aux
pressions sur les taux de change beaucoup plus rapidement.
309
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Les résultats qui ont été obtenus dans les études économétriques et analytiques ont
conforté la structuration méthodologique de notre approche. La composition instable de la
sphère financière, couplée à une dépendance aux capitaux étrangers pour les PECO, a été
confirmée par l’observation des flux de capitaux, validant l’hypothèse que nous avons émise.
Quant aux comportements divergents entre PECO, au niveau de la capacité de rebond lors
de l’après crise, et donc au niveau de leur positionnement à court puis à moyen terme, a
offert l’opportunité de les discriminer favorablement. La constitution de scénarios a été
réalisée suivant des regroupements issus de ces divergences.
L’approche théorique de l’HIF de Minsky a structuré l’analyse. Mais la validation de
l’hypothèse, qui en est ressortie, connaît néanmoins des limites dans la justification
empirique choisie. Des pistes de réflexions peuvent être identifiées afin de repérer les
potentialités futures d’approfondissement de la recherche. La sélection d’un nombre réduit
d’équations au niveau des tests économétriques apparait excessivement limitative. La
constitution d’un système d’équations plus complet permettrait la modélisation de
l’ensemble des interactions entre les agents économiques concernés et les principales
variables. Quant aux modélisations de crises de change de première génération, une
investigation plus approfondie offrirait vraisemblablement l’opportunité de décrire plus
précisément la temporalité des éventuelles ruptures d’ancrage du taux de change, en la
restituant par rapport à notre problématique.
Pour ce qui est des variables que nous avons pu sélectionner afin de rendre compte de
l’attractivité des effets de levier financier, celles-ci reposent sur le calcul du différentiel de
rentabilité entre la zone euro et les PECO dans les placements effectués. La désagrégation de
ces données permettrait notamment d’analyser les effets par secteurs d’activité. Le
développement économique des PECO est concentré sur des spécialisations industrielles
fortement orientées vers l’exportation. Une analyse plus fine des capitaux alloués et des
taux de rentabilités susceptibles d’être attendus permettrait sans doute de mieux conforter
la problématique.
D’autres propositions sont aussi à avancer quant à l’utilisation de variables plus spécifiques à
notre problématique. Nous avons pu parler de vulnérabilités potentielles puisque c’est à
310
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
travers les effets de contagion que la contraction de la liquidité internationale peut impacter
les pays émergents. La détermination d’un indicateur agrégé reflétant la pondération d’un
panel de dépendances de ces pays aux flux de capitaux étrangers permettrait d’informer sur
le degré de risque de chacun. L’origine des capitaux étrangers, l’importance de la corrélation
des taux d’intérêt avec certaines économies développées, la divergence temporelle vis-à-vis
de la nature de la périodicité entre les investissements effectués et les endettements
réalisés sont déjà quelques pistes de réflexions. Un second indicateur d’agrégation
informerait sur le degré de résilience de ces pays pour ce genre de phénomène à travers les
marges de manœuvres budgétaires, les accords de refinancements internationaux (Union
européenne, FMI, Banque Mondiale…), le positionnement de la productivité du pays face au
reste du monde afin de devenir à nouveau et rapidement attractif lors de l’après-crise…
Pour aller plus loin, l’’intégration de la prime de risque avec l’évolution des CDS à 5 ans des
PECO autoriserait la quantification des anticipations des agents économiques pour ces pays
afin de conforter les effets discriminants ou non. Tout d’abord lors de la fuite généralisée
des capitaux en parallèle des modélisations de première génération dans le moment de
rupture de l’ancrage. Puis dans le retour des capitaux lors de l’après crise, principalement
sous forme d’IDE.
Au-delà des quelques pistes identifiées et susceptibles d’assurer un prolongement efficace
de cette recherche, deux thématiques complémentaires mériteraient selon nous d’être
explorées.
D’une part pour ce qui concerne la manière même de déterminer, mesurer puis anticiper les
crises financières. Les variables habituellement utilisées, lors de leurs dégradations
anticipées, doivent permettre d’appréhender l’occurrence d’une crise. L’affirmation de la
non dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers dans ce genre
de phénomènes nous oriente plutôt dans la détermination d’un degré de vulnérabilités
potentielles de ces pays lors d’une crise de liquidité internationale. Le retrait des capitaux
étrangers ne prenant pas pour origine leur situation économique, il convient plutôt de
s’interroger sur l’importance de leur dépendance au marché financier international.
311
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
D’autre part pour ce qui est des stratégies d’endettement et d’investissement des agents
économiques, stratégies aujourd’hui globales, un minimum de coopération réglementaire
entre les différents territoires pourrait permettre d’éviter des prises de risques trop
importantes. L’Union européenne offre l’opportunité de le réaliser à travers ses instances
supranationales. La dépendance de certains de ses membres face au laxisme des autres
aboutira à terme à plus de collaboration. La libéralisation du compte de capital des pays
émergents en parallèle à un ancrage de leur taux de change apparaissent incompatibles par
nature. Il faut les modérer pour en atténuer les effets négatifs lors d’une fuite généralisée
des capitaux étrangers. Pourtant, l’adhésion à l’Union européenne a imposé d’ouvrir les
comptes de capitaux alors que l’intégration à la zone euro doit être précédée d’un ancrage à
la monnaie unique. Beaucoup plus de souplesse est à envisager dans les modalités
d’intégration de ces pays afin de viabiliser leur processus de convergence économique.
312
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
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Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Table des matières
Introduction générale................................................................................................................. 9
Partie 1. Présentation synthétique des modèles de crises de change : un retour vers les crises
financières comme élément d’interprétation .......................................................................... 15
Introduction de la première partie .......................................................................................... 16
Chapitre 1. Définition, détermination, anticipation et récurrence des crises financières ...... 19
Introduction intermédiaire....................................................................................................... 19
1. Une approche générale des crises comme définition........................................................ 21
2. Détermination et anticipation des crises financières en Sciences Economiques .............. 27
3. Historique des crises financières : une récurrence continue ............................................. 34
Conclusion intermédiaire ......................................................................................................... 39
Chapitre 2. La vulnérabilité des régimes de change face aux tensions financières
internationales ......................................................................................................................... 41
Introduction intermédiaire....................................................................................................... 41
1. Les nouveaux éléments du contexte financier international ............................................ 43
2. La place prépondérante des effets de contagion dans l’environnement financier ........... 54
3. Des stratégies d’ancrage du taux de change par nature source de vulnérabilité ............. 60
4. La contrainte du change fixe dans un contexte de tensions financières internationales . 68
5. Synthèse des différentes modélisations de crises de change............................................ 73
6. Contextualisation de la problématique à travers des faits récents : focus sur la Corée du
Sud, le Brésil et les PECO .................................................................................................... 84
Conclusion intermédiaire ......................................................................................................... 94
Conclusion de la première partie ............................................................................................. 96
Partie 2. Identification et modélisation des faits originaux : un processus de développement
source d’interdépendances et d’effets de contagion .............................................................. 99
Introduction de la deuxième partie ....................................................................................... 100
Chapitre 3. Une stratégie de rattrapage économique basée sur l’attractivité des IDE, source
de vulnérabilités potentielles ? .............................................................................................. 103
Introduction intermédiaire..................................................................................................... 103
1. Enjeux de l’intégration au commerce international : des perspectives favorables de
développement économique ........................................................................................... 106
329
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
2. La nécessité de contracter des endettements externes, facteur de dépendance au
marché financier international ........................................................................................ 116
3. Le rôle prépondérant des IDE : entre attractivité, croissance économique et stabilité
macro-financière .............................................................................................................. 126
Conclusion intermédiaire ....................................................................................................... 138
Chapitre 4. Spécification de faits originaux : construction théorique pays développé/pays
émergent d’après l’hypothèse d’instabilité financière de Minsky ........................................ 140
Introduction intermédiaire..................................................................................................... 140
1. L’apport de Minsky comme élément d’explication au déclenchement de la crise ......... 142
2. Le processus de crise : mise en parallèle des modélisations de 1ere génération ........... 154
3. Matérialisation du phénomène de crise dans les PECO : un processus en deux étapes . 163
4. Caractérisation des phénomènes d’interdépendance et de contagion dans les PECO ... 178
Conclusion intermédiaire ....................................................................................................... 193
Conclusion de la deuxième partie .......................................................................................... 196
Partie 3. Divergences de comportement au sein des PECO lors de tensions financières
internationales : entre transferts de capitaux et positionnement structurel ....................... 199
Introduction de la troisième partie ........................................................................................ 200
Chapitre 5. Modélisations économétriques comme approche empirique : focus sur les flux de
capitaux .................................................................................................................................. 203
Introduction intermédiaire..................................................................................................... 203
1. La détermination du rôle des capitaux étrangers au sein des PECO : une obligation
d’attractivité pour ces territoires ..................................................................................... 205
2. Eléments d’attractivité des capitaux étrangers dans les PECO : croissance économique,
rentabilité des investissements et variation des taux de change .................................... 219
3. Eléments de répulsion des capitaux étrangers dans les PECO : analyse des tensions
financières par les canaux de liquidité et de taux d’intérêt............................................. 231
Conclusion intermédiaire ....................................................................................................... 241
Chapitre 6. Détermination de la qualité du positionnement des PECO : entre turbulences
financières et viabilité du rattrapage économique ................................................................ 243
Introduction intermédiaire..................................................................................................... 243
1. Méthodologie de la démarche : une dynamique en trois thématiques .......................... 246
2. Analyse ciblée de la qualité des fondamentaux des PECO .............................................. 255
3. Turbulences financières de court terme : focus sur la politique budgétaire ................... 278
4. Viabilité du rattrapage économique à moyen terme : focus sur les flux d’IDE ............... 288
Conclusion intermédiaire ....................................................................................................... 298
330
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Conclusion de la troisième partie........................................................................................... 300
Conclusion générale ............................................................................................................... 303
Bibliographie .......................................................................................................................... 313
Table des matières ................................................................................................................. 329
Table des illustrations ............................................................................................................ 332
Annexe 1 : équation économétrique (1) ................................................................................ 339
Annexe 2 : équation économétrique (2) ................................................................................ 344
Annexe 3 : équation économétrique (3) ................................................................................ 347
Annexe 4 : équation économétrique (4) ................................................................................ 352
331
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Table des illustrations
Partie 1. Présentation synthétique des modèles de crises de change : un retour vers les
crises financières comme élément d’interprétation
Liste des tableaux :
Tableau 1. La dynamique des crises : une interprétation globale ........................................... 22
Tableau 2. Tableau de répartition des signaux des variables prédictives ............................... 31
Tableau 3. Classification des variables suivant leur pouvoir prédictif ..................................... 33
Tableau 4. Fréquence par période de régulation internationale divergente .......................... 36
Tableau 5. Capitalisation boursière sur les marchés d’actions ................................................ 44
Tableau 6. Facteurs d’intégration ............................................................................................ 46
Tableau 7. Évolution en longue période de la durée et de la profondeur des crises .............. 50
Tableau 8. Les effets de la déréglementation financière ......................................................... 50
Tableau 9. Enumération des différents canaux de contagion ................................................. 55
Tableau 10. Présentation de toutes les formes de contagion ................................................. 57
Tableau 11. Caractéristiques des pays vulnérables aux contagions ........................................ 59
Tableau 12. Fréquence des crises de change d’après des méthodologies différentes ........... 61
Tableau 13. Exemples de pressions sur le marché des changes .............................................. 63
Tableau 14. Liste des indicateurs potentiels dans le cadre de crises de change ..................... 65
Tableau 15. Énumération des taux de change par régime ...................................................... 69
Tableau 16. Devises internationales de référence dans la nature des régimes de change ..... 70
Tableau 17. Liste non exhaustive d’indicateurs de vulnérabilités issus des modélisations de
seconde génération .................................................................................................................. 78
Tableau 18. Liste non exhaustive d’indicateurs financiers de vulnérabilités issus de
modélisations de 3ème génération ......................................................................................... 82
Tableau 19. Principaux indicateurs économiques de la Corée du Sud (en %) ......................... 85
Tableau 20. Principaux indicateurs économiques du Brésil (en %) ......................................... 86
Tableau 21. Caractéristiques économiques et financières de l’intégration des PECO à l’Union
européenne en 2008 ................................................................................................................ 88
Tableau 22. Données sur les fondamentaux macroéconomiques des PECO (moyenne
2000/2008) ............................................................................................................................... 89
332
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Liste des graphiques :
Graphique 1. Crise de change : volatilité des taux de change ................................................ 28
Graphique 2. Crises boursières : volatilité des cours boursiers ............................................... 28
Graphique 3. Exemple d’analyse par « event » sur un taux d’intérêt réel .............................. 29
Graphique 4. Fréquence des crises financières ....................................................................... 35
Graphique 5. Fréquence des crises sur une période plus récente........................................... 36
Graphique 6. Fréquence des crises par région ........................................................................ 37
Graphique 7. Fréquence des crises dans les pays émergents par période .............................. 38
Graphique 8. Indice de libéralisation financière ...................................................................... 44
Graphique 9. Libéralisation des pays en voie de développement ........................................... 48
Graphique 10. Evolution du ratio crédit/PIB et de son instabilité par période et par continent
(1966-2000) ............................................................................................................................. 51
Graphique 11. Variation des réserves de change en Amérique Latine.................................... 75
Graphique 12. Taux de croissance du PIB (en %) des pays asiatiques ..................................... 79
Graphique 13. Taux de croissance consommation finale (en %) des pays asiatiques ............. 79
Graphique 14. Taux d’inflation (en %) des pays asiatiques ..................................................... 80
Graphique 15. Valeur des cours boursiers (en % du PIB) des pays asiatiques ........................ 80
Graphique 16. Endettement public (en % du PIB) des pays asiatiques ................................... 80
Graphique 17. La fuite généralisée des capitaux au sein des PECO ........................................ 92
Graphique 18. Baisse des réserves de change (or y compris).................................................. 92
Partie 2. Identification et modélisation des faits originaux : un processus de
développement source d’interdépendances et d’effets de contagion
Liste des tableaux :
Tableau 23. Les quatre grandes périodes de l’économie du développement....................... 106
Tableau 24. Les dix propositions de Williamson du « Consensus de Washington » ............. 108
Tableau 25. Taux d’ouverture commerciale des PECO avant tensions internationales 2008 109
Tableau 26. Meilleures performances commerciales globales des pays en voie de
développement (2000) .......................................................................................................... 110
Tableau 27. Meilleure amélioration des performances commerciales des pays en voie de
développement (1996-2000) ................................................................................................. 111
333
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Tableau 28. Les dix moins bonnes performances commerciales globales pour les pays en
développement (2000) .......................................................................................................... 111
Tableau 29. Une convergence trop faible pour parler d’un effet de corrélation .................. 113
Tableau 30. Nature de l’endettement international des pays en voie de développement .. 120
Tableau 31. Proposition de classification des travaux sur l’attractivité des IDE ................... 127
Tableau 32. Les théories IDE-croissance économique ........................................................... 128
Tableau 33. Variables significatives issues de la littérature économique (non exhaustive) . 129
Tableau 34. Variables explicatives de l’implantation étrangère dans un pays ...................... 133
Tableau 35. Spécialisation sectorielle au sein des PECO........................................................ 134
Tableau 36. Exemples de la diversité des classifications sur l’attractivité des territoires ..... 135
Tableau 37. Les spécificités de la problématique de thèse ................................................... 161
Tableau 38. Ancrage voire stabilisation des taux de change ................................................. 173
Tableau 39. Enumération des différents canaux de contagion ............................................. 179
Tableau 40 : Bilan du CAEM dressé par les économistes Est-européens .............................. 184
Tableau 41. Evolution de la réorientation des échanges des PECO entre 1989 et 1991 ....... 186
Tableau 42. Stocks des flux d’IDE au sein des PECO entre 1990 et 2008 .............................. 190
Tableau 43. Exportations par filière économique en 2006 des PECO (en % du total) ........... 191
Liste des graphiques :
Graphique 19. Corrélation entre l’ouverture commerciale et la croissance économique .... 112
Graphique 20. Evolution du PIB des PECO ............................................................................. 114
Graphique 21. Evolution de la productivité du travail par tête des PECO ............................. 114
Graphique 22. Impact de l’endettement sur la croissance économique............................... 117
Graphique 23. Niveau d’épargne des PECO (en % du PIB) .................................................... 117
Graphique 24. Placement des résidents à l’étranger ............................................................. 118
Graphique 25. Solde des flux de capitaux étrangers des PECO ............................................. 120
Graphique 26. Solde des flux d’IDE des PECO ........................................................................ 121
Graphique 27. Evolution de la balance commerciale des PECO ............................................ 122
Graphique 28. Solde des balances courantes des PECO ........................................................ 122
Graphique 29. Evolution des exportations des PECO ............................................................ 123
Graphique 30. Evolution des importations des PECO ............................................................ 124
Graphique 31. Solde des flux de capitaux étrangers des PECO ............................................. 131
334
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Graphique 32. Représentation des interprétations monétaires des structuralistes ............. 148
Graphique 33. Représentation des interprétations des horizontalistes................................ 149
Graphique 34. Différence du taux de rentabilité du capital entre les PECO et la zone euro 166
Graphique 35. Comparaison taux d’intérêt (à 3 mois) de la zone euro et des PECO ............ 167
Graphique 36. Comparaison entre les taux d’intérêt à différentes échéances en euro ....... 168
Graphique 37. Attractivité puis fuites généralisées des capitaux étrangers ......................... 170
Graphique 38. Déficit récurrent du compte courant résultant du processus de rattrapage
économique............................................................................................................................ 171
Graphique 39. Impact sur la croissance économique des turbulences financières
internationales ....................................................................................................................... 172
Graphique 40. Les taux directeurs comme outil de régulation du taux de change ............... 174
Graphique 41. Diminution des réserves de devises ............................................................... 175
Graphiques 42. Niveau de risque souverain des PECO .......................................................... 175
Graphique 43. Appréciation des taux de change ................................................................... 176
Graphique 44. Evolution des exportations et des importations intra-CAEM ........................ 181
Graphiques 45 et 46. Evolution des spécialisations à l’exportation des membres du CAEM 182
Graphiques 47. Evolutions des spécialisations à l’exportation des PECO après 1990 ........... 187
Graphique 48. Evolution du PIB des PECO entre 1989 et 1998 ............................................. 189
Graphique 49. Evolution production manufacturière des PECO ........................................... 191
Liste des schémas :
Schéma 1. Stratégie de développement économique ........................................................... 138
Schéma 2. Typologie des situations financières de Minsky ................................................... 144
Schéma 3. L’Hypothèse d’Instabilité Financière de Minsky (1974) ....................................... 147
Schéma 4. Lors d’une période de spéculation positive.......................................................... 152
Schéma 5. Renforcement de la période de spéculation positive : l’euphorie ....................... 152
Schéma 6. Impact d’une contagion financière internationale dans la dégradation des
fondamentaux macroéconomiques et macro-financier ........................................................ 157
Schéma 7. Les canaux significatifs au regard de la problématique de thèse ........................ 158
Schéma 8. Dynamique des modélisations de 1ere génération.............................................. 159
Schéma 9. Modélisation des spécificités de la problématique .............................................. 160
Schéma 10. Dynamique de l’étude : étape 1 (spéculation favorable) ................................... 164
335
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Schéma 11. Dynamique de l’étude : étape 2 (choc financier externe) .................................. 165
Schéma 12. La dynamique d’attractivité des capitaux des PECO : étape 1 ........................... 169
Schéma 13. La dynamique de fuite de capitaux des PECO : étape 2 ..................................... 169
Partie 3. Divergences de comportement au sein des PECO lors de tensions financières
internationales : entre transferts de capitaux et positionnement structurel
Liste des tableaux :
Tableau 44. Composition des comptes de la balance des paiements ................................... 206
Tableau 45. Equation (1) : résultats des tests économétriques ............................................ 210
Tableau 46. Equation (2) : résultats des tests économétriques ............................................ 215
Tableau 47. Interprétation des tests économétriques de l’équation (2) .............................. 217
Tableau 48. Equation (3) : résultats des tests économétriques ............................................ 226
Tableau 49 : Stratégies d’allocation des capitaux étrangers dans les PECO .......................... 228
Tableau 50. Résultats des tensions sur les taux de change des PECO ................................... 236
Tableau 51. Equation (4) : résultats des tests économétriques ............................................ 238
Tableau 52. Regroupement des PECO : entre qualité du positionnement à court et à moyen
terme ...................................................................................................................................... 255
Tableau 53. Thématique 3 : qualité de la régulation au sein des PECO ................................ 278
Tableau 54. Influence de la politique monétaire des PECO dans les flux de capitaux .......... 280
Tableau 55. Influence de la politique monétaire de la zone euro dans les flux de capitaux . 281
Tableau 56. Description des variables vis-à-vis de l’efficacité de la politique budgétaire .... 284
Tableau 57. Qualité des variables de la politique budgétaire au sein des PECO ................... 285
Tableau 58. Thématique 1 : qualité du positionnement international au sein des PECO ..... 289
Tableau 59. Thématique 2 : qualité de la structure interne au sein des PECO ..................... 290
Tableau 60. Description des tendances des PECO par échéances des capitaux étrangers ... 293
Liste des graphiques :
Graphique 50. Compte des transactions courantes des PECO avec le reste du monde ....... 207
Graphique 51. Compte de capital des PECO avec le reste du monde ................................... 207
Graphique 52. Compte financier des PECO avec le reste du monde ..................................... 208
Graphique 53. Capitaux étrangers du compte financier des PECO ....................................... 213
336
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Graphique 54. Avoirs de réserves du compte financier des PECO ........................................ 213
Graphique 55. Flux total des capitaux étrangers ................................................................... 221
Graphique 56. Flux des capitaux étrangers à court terme .................................................... 222
Graphique 57. Flux des capitaux étrangers à moyen terme .................................................. 223
Graphique 58. Flux des capitaux étrangers à long terme (IDE) ............................................. 223
Graphique 59. Taux de croissance du PIB en pourcentage des PECO ................................... 243
Graphiques 60. Un risque-pays trop élevé rend la politique monétaire inefficace ............... 282
Graphique 61. Flux de capitaux étrangers totaux (% du PIB) ............................................... 292
Graphique 62. Flux de capitaux étrangers à court terme (% du PIB) .................................... 292
Graphique 63. Flux de capitaux étrangers de portefeuille (% du PIB) .................................. 292
Graphique 64. Flux de capitaux étrangers IDE (% du PIB) ..................................................... 293
Graphique 65. Premier groupe de pays avec des taux de croissance favorables.................. 296
Graphique 66. Second groupe de pays avec des taux de croissance défavorables ............... 296
Liste des schémas :
Schéma 14. La période de spéculation positive au sein des PECO ........................................ 220
Schéma 15. La période de retournement conjoncturelle au sein de la zone euro................ 231
Schéma 16. Dynamique des effets de contagion de la zone euro aux les PECO ................... 232
Schéma 17. Agrégats sélectionnés afin d’illustrer chaque thématique................................. 246
Schéma 18. Thématique 1 : qualité du positionnement international .................................. 248
Schéma 19. Thématique 2 : qualité de la structure interne .................................................. 250
Schéma 20. Thématique 3 : qualité de la régulation ............................................................. 252
Schéma 21. Descriptif des vulnérabilités propres à la République Tchèque ......................... 268
Schéma 22. Descriptif des vulnérabilités propres à la Slovaquie........................................... 269
Schéma 23. Descriptif des vulnérabilités propres à la Slovénie............................................. 270
Schéma 24. Descriptif des vulnérabilités propres à la Pologne ............................................. 271
Schéma 25. Descriptif des vulnérabilités propres à la Roumanie .......................................... 272
Schéma 26. Descriptif des vulnérabilités propres à l’Estonie ................................................ 273
Schéma 27. Descriptif des vulnérabilités propres à la Lituanie ............................................. 274
Schéma 28. Descriptif des vulnérabilités propres à la Lettonie ............................................. 275
Schéma 29. Descriptif des vulnérabilités propres à la Bulgarie ............................................. 276
Schéma 30. Descriptif des vulnérabilités propres à la Hongrie ............................................. 277
337
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Schéma 31. Mise en parallèle de l’instabilité financière au sens de Minsky avec l’efficacité de
la politique budgétaire ........................................................................................................... 286
Schéma 32. Relation entre la qualité du rattrapage économique avec le retour rapide des IDE
lors de l’après crise de 2008 ................................................................................................... 294
338
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Annexe 1 : équation économétrique (1)
Pour des raisons de simplicité dans la compréhension des résultats, le test le plus significatif
par pays est présenté.
Bulgarie
Dependent Variable: KTOTAL
Method: Least Squares
Date: 01/14/12 Time: 14:33
Sample: 1995Q1 2008Q4
Included observations: 56
ITOTAL=C(1)+C(2)*(-B)
C(1)
C(2)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
201.1514
1.250474
106.7375
0.116351
1.884543
10.74745
0.0649
0.0000
0.681430
0.675531
658.7733
23435045
-441.9035
115.5076
0.000000
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
849.8571
1156.510
15.85370
15.92603
15.88174
1.622775
République Tchèque
Dependent Variable: KTOTAL
Method: Least Squares
Date: 01/14/12 Time: 14:46
Sample (adjusted): 1999Q2 2008Q4
Included observations: 39 after adjustments
ITOTAL=C(1)+C(2)*(-B(-1))
C(1)
C(2)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
2309.139
-0.818783
389.4169
0.337137
5.929734
-2.428634
0.0000
0.0201
0.137494
0.114183
1671.476
1.03E+08
-343.7491
5.898262
0.020134
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
339
1622.179
1775.939
17.73072
17.81603
17.76133
1.693655
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Estonie
Dependent Variable: KCT
Method: Least Squares
Date: 01/14/12 Time: 14:57
Sample: 1995Q1 2008Q4
Included observations: 56
ICT=C(1)+C(2)*(-B)
C(1)
C(2)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
-44.05951
1.214931
33.70074
0.111776
-1.307375
10.86935
0.1966
0.0000
0.686307
0.680498
166.2856
1493149.
-364.8098
118.1427
0.000000
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
231.3393
294.1831
13.10035
13.17269
13.12840
1.928273
Hongrie
Dependent Variable: KTOTAL
Method: Least Squares
Date: 01/14/12 Time: 15:09
Sample: 1995Q1 2008Q4
Included observations: 56
ITOTAL=C(1)+C(2)*(-B)
C(1)
C(2)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
-104.3974
1.712533
349.3890
0.263474
-0.298800
6.499808
0.7662
0.0000
0.438946
0.428557
1300.416
91318450
-479.9869
42.24750
0.000000
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
340
1865.750
1720.267
17.21382
17.28615
17.24186
2.150087
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Lituanie
Dependent Variable: KCT
Method: Least Squares
Date: 01/14/12 Time: 15:20
Sample: 1995Q1 2008Q4
Included observations: 56
ICT=C(1)+C(2)*(-B)
C(1)
C(2)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
-96.55964
1.054628
47.57953
0.097787
-2.029437
10.78491
0.0474
0.0000
0.682939
0.677068
230.5338
2869874.
-383.1045
116.3143
0.000000
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
294.5000
405.6756
13.75373
13.82607
13.78178
1.822569
Lettonie
Dependent Variable: KTOTAL
Method: Least Squares
Date: 01/14/12 Time: 15:26
Sample: 1995Q1 2008Q4
Included observations: 56
ITOTAL=C(1)+C(2)*(-B)
C(1)
C(2)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
3.586035
1.732339
48.38643
0.098214
0.074112
17.63838
0.9412
0.0000
0.852100
0.849361
266.6955
3840832.
-391.2643
311.1124
0.000000
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
341
580.8571
687.1439
14.04515
14.11749
14.07320
1.898414
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Pologne
Dependent Variable: KCT
Method: Least Squares
Date: 01/14/12 Time: 15:36
Sample (adjusted): 2000Q1 2008Q4
Included observations: 36 after adjustments
ICT=C(1)+C(2)*(-B)
C(1)
C(2)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
-1335.546
1.239046
711.2155
0.273562
-1.877836
4.529312
0.0690
0.0001
0.376315
0.357971
2268.916
1.75E+08
-328.2270
20.51466
0.000069
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
1392.694
2831.660
18.34594
18.43392
18.37665
0.934576
Roumanie
Dependent Variable: KCT
Method: Least Squares
Date: 01/14/12 Time: 15:51
Sample (adjusted): 1996Q1 2008Q4
Included observations: 52 after adjustments
ICT=C(1)+C(2)*(-B)
C(1)
C(2)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
-95.51311
0.768497
88.78337
0.044668
-1.075799
17.20450
0.2872
0.0000
0.855489
0.852599
459.5263
10558223
-391.5353
295.9947
0.000000
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
342
968.0577
1196.906
15.13597
15.21102
15.16474
1.997723
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Slovénie
Dependent Variable: KTOTAL
Method: Least Squares
Date: 01/14/12 Time: 15:58
Sample (adjusted): 1995Q2 2008Q4
Included observations: 55 after adjustments
ITOTAL=C(1)+C(2)*(-B(-1))
C(1)
C(2)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
348.8967
1.117595
68.50393
0.317655
5.093090
3.518261
0.0000
0.0009
0.189332
0.174036
437.3599
10138034
-411.4646
12.37816
0.000900
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
471.5273
481.2363
15.03508
15.10807
15.06330
1.603232
Slovaquie
Dependent Variable: KIDE
Method: Least Squares
Date: 01/14/12 Time: 16:10
Sample (adjusted): 1999Q1 2008Q4
Included observations: 40 after adjustments
IIDE=C(1)+C(2)*(-B)
C(1)
C(2)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
250.0858
0.417416
137.0433
0.194947
1.824867
2.141175
0.0759
0.0387
0.107659
0.084177
556.6666
11775355
-308.6103
4.584631
0.038735
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
343
475.0000
581.6870
15.53052
15.61496
15.56105
1.972381
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Annexe 2 : équation économétrique (2)
Pour des raisons de simplicité dans la compréhension des résultats, le test le plus significatif
par pays est présenté.
Bulgarie
Dependent Variable: RF
Method: Least Squares
Date: 01/14/12 Time: 16:31
Sample (adjusted): 1997Q4 2008Q4
Included observations: 45 after adjustments
RF=C(1)+C(2)*(B(-2))
C(1)
C(2)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
97.61577
-0.230117
107.0234
0.117444
0.912098
-1.959373
0.3668
0.0566
0.081964
0.060615
568.9651
13920013
-348.3012
3.839144
0.056573
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
225.5044
587.0346
15.56894
15.64924
15.59888
1.995484
République Tchèque
Equation (2) non significative.
Estonie
Dependent Variable: RF
Method: Least Squares
Date: 01/14/12 Time: 16:39
Sample (adjusted): 1995Q3 2008Q4
Included observations: 54 after adjustments
RF=C(1)+C(2)*(B(-2))
C(1)
C(2)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
4.926435
-0.173305
21.19152
0.069932
0.232472
-2.478192
0.8171
0.0165
0.105629
0.088430
103.9199
561566.3
-326.3592
6.141434
0.016489
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
344
44.03889
108.8438
12.16145
12.23512
12.18986
2.773486
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Hongrie
Dependent Variable: RF
Method: Least Squares
Date: 01/14/12 Time: 16:41
Sample (adjusted): 1995Q2 2008Q4
Included observations: 55 after adjustments
RF=C(1)+C(2)*(B(-1))
C(1)
C(2)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
-395.2765
-0.648231
335.0298
0.258641
-1.179825
-2.506293
0.2433
0.0153
0.105961
0.089092
1227.905
79910725
-468.2415
6.281503
0.015304
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
334.7018
1286.552
17.09969
17.17269
17.12792
1.587053
Lituanie
Equation (2) non significative.
Lettonie
Dependent Variable: RF
Method: Least Squares
Date: 01/14/12 Time: 16:44
Sample (adjusted): 1995Q2 2008Q4
Included observations: 55 after adjustments
RF=C(1)+C(2)*(B)
C(1)
C(2)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
-1.077209
-0.170013
26.97236
0.054257
-0.039938
-3.133462
0.9683
0.0028
0.156301
0.140382
146.1367
1131864.
-351.1728
9.818581
0.002814
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
Pologne
Equation (2) non significative.
Roumanie
Equation (2) non significative.
345
56.63455
157.6182
12.84265
12.91564
12.87087
1.453904
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Slovénie
Dependent Variable: RF
Method: Least Squares
Date: 01/14/12 Time: 16:49
Sample (adjusted): 1995Q2 2008Q4
Included observations: 55 after adjustments
RF=C(1)+C(2)*(B)
C(1)
C(2)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
21.65169
0.102594
5.701078
0.024380
3.797823
4.208180
0.0004
0.0001
0.250447
0.236304
35.80342
67939.91
-273.8154
17.70878
0.000100
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
8.890909
40.96985
10.02965
10.10264
10.05788
2.193911
Slovaquie
Dependent Variable: RF
Method: Least Squares
Date: 01/14/12 Time: 16:51
Sample (adjusted): 1999Q1 2008Q4
Included observations: 40 after adjustments
RF=C(1)+C(2)*(B)
C(1)
C(2)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
848.8323
1.161490
284.5966
0.404845
2.982580
2.868972
0.0050
0.0067
0.178041
0.156410
1156.025
50782983
-337.8414
8.231001
0.006689
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
346
222.9925
1258.640
16.99207
17.07651
17.02260
1.937876
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Annexe 3 : équation économétrique (3)
Pour des raisons de simplicité dans la compréhension des résultats, le test le plus significatif
par pays est présenté.
Bulgarie
Dependent Variable: KTOTALPIB
Method: Least Squares
Date: 04/03/12 Time: 11:38
Sample (adjusted): 1998Q1 2008Q4
Included observations: 44 after adjustments
ITOTAL=C(1)+C(2)*(PIB)+C(3)*(R2)+C(4)*(TC2-P1)+C(5)*(IEURO-P1)
C(1)
C(2)
C(3)
C(4)
C(5)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
23.40249
2.423219
-10.93201
-1.117798
-1.277201
7.868243
1.437906
2.108173
0.357885
0.365743
2.974297
1.685242
-5.185539
-3.123344
-3.492073
0.0050
0.0999
0.0000
0.0032
0.0011
0.601346
0.560458
9.824271
3764.136
-160.3131
14.70729
0.000000
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
16.94513
14.81837
7.514234
7.716983
7.589423
1.964411
République Tchèque
Dependent Variable: KCTPIB
Method: Least Squares
Date: 04/03/12 Time: 11:43
Sample (adjusted): 1999Q1 2008Q4
Included observations: 40 after adjustments
KCT=C(1)+C(3)*(R2)+C(4)*(TC2-P1)+C(5)*(IEURO-P1)
C(1)
C(3)
C(4)
C(5)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
19.48655
-12.89378
-0.243396
-0.216506
8.840555
6.072720
0.127111
0.119668
2.204222
-2.123229
-1.914831
-1.809226
0.0340
0.0407
0.0633
0.0785
0.169440
0.100226
4.214512
639.4360
-112.1917
2.448075
0.079465
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
347
1.519977
4.443044
5.809584
5.978472
5.870649
1.982413
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Estonie
Dependent Variable: KCTPIB
Method: Least Squares
Date: 04/03/12 Time: 11:55
Sample: 1995Q1 2008Q4
Included observations: 56
KCT=C(1)+C(3)*(R2)+C(4)*(TC2-P1)+C(5)*(IEURO-P1)
C(1)
C(3)
C(4)
C(5)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
36.42804
-19.75559
1.812136
-1.706348
7.202610
5.468356
0.795846
0.797544
5.057616
-3.612711
2.276992
-2.139505
0.0000
0.0007
0.0269
0.0371
0.226015
0.181362
7.653750
3046.155
-191.3565
5.061595
0.003763
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
8.900294
8.459183
6.977018
7.121686
7.033105
1.570196
Hongrie
Dependent Variable: KPFPIB
Method: Least Squares
Date: 04/03/12 Time: 12:00
Sample: 1995Q1 2008Q4
Included observations: 56
KPF=C(1)+C(4)*(TC2-P1)+C(5)*(IEURO-P1)
C(1)
C(4)
C(5)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
4.165634
0.396042
-0.446393
1.345692
0.213847
0.217721
3.095534
1.851983
-2.050302
0.0031
0.0696
0.0453
0.080360
0.045657
6.053689
1942.299
-178.7563
2.315623
0.108611
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
348
2.139082
6.196804
6.491296
6.599797
6.533361
1.979231
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Lituanie
Dependent Variable: KCTPIB
Method: Least Squares
Date: 04/03/12 Time: 12:01
Sample (adjusted): 1995Q2 2008Q4
Included observations: 55 after adjustments
KCT=C(1)+C(2)*(PIB)+C(3)*(R2)+C(4)*(TC2-P1)+C(5)*(IEURO-P1)
C(1)
C(2)
C(3)
C(4)
C(5)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
18.06532
0.420346
-9.294533
-0.781775
0.584661
3.852396
0.215407
2.079596
0.273018
0.304675
4.689372
1.951404
-4.469395
-2.863458
1.918966
0.0000
0.0566
0.0000
0.0061
0.0607
0.424254
0.378194
4.927480
1214.003
-163.1361
9.210969
0.000012
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
5.999546
6.248814
6.114040
6.296525
6.184609
1.392665
Lettonie
Dependent Variable: KTOTALPIB
Method: Least Squares
Date: 04/03/12 Time: 12:03
Sample (adjusted): 1995Q2 2008Q4
Included observations: 55 after adjustments
KTOTAL=C(1)+C(2)*(PIB)+C(3)*(R2)+C(4)*(TC2-P1)+C(5)*(IEURO-P1)
C(1)
C(2)
C(3)
C(4)
C(5)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
30.69356
1.865327
-18.55723
-2.594793
2.964664
6.883188
0.530385
3.741331
0.874924
0.950461
4.459207
3.516928
-4.960060
-2.965736
3.119185
0.0000
0.0009
0.0000
0.0046
0.0030
0.405061
0.357466
11.69194
6835.074
-210.6601
8.510555
0.000026
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
349
18.88037
14.58608
7.842185
8.024669
7.912753
1.533230
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Pologne
Dependent Variable: KCTPIB
Method: Least Squares
Date: 04/03/12 Time: 12:04
Sample (adjusted): 2000Q1 2008Q4
Included observations: 36 after adjustments
KCT=C(1)+C(2)*(PIB)+C(3)*(R2)+C(4)*(TC2-P1)+C(5)*(IEURO-P1)
C(1)
C(2)
C(3)
C(4)
C(5)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
-1.410114
1.183183
-1.404652
-1.189174
1.000697
2.533623
0.375926
0.702973
0.375324
0.395920
-0.556560
3.147381
-1.998159
-3.168394
2.527522
0.5818
0.0036
0.0545
0.0034
0.0168
0.416131
0.340793
2.993715
277.8322
-87.86476
5.523524
0.001778
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
1.827157
3.687224
5.159153
5.379086
5.235916
1.528148
Roumanie
Dependent Variable: KPFPIB
Method: Least Squares
Date: 04/03/12 Time: 12:05
Sample (adjusted): 2000Q2 2008Q4
Included observations: 35 after adjustments
KPF=C(1)+C(2)*(PIB)+C(4)*(TC2-P1)+C(5)*(IEURO-P1)
C(1)
C(2)
C(4)
C(5)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
-1.793784
0.339235
-0.174204
0.212200
1.026715
0.137154
0.094966
0.115303
-1.747109
2.473377
-1.834390
1.840364
0.0905
0.0191
0.0762
0.0753
0.165062
0.084262
1.760701
96.10208
-67.33895
2.042836
0.128261
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
350
0.447706
1.839924
4.076511
4.254265
4.137872
2.102975
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Slovénie
Dependent Variable: KPFPIB
Method: Least Squares
Date: 04/03/12 Time: 12:07
Sample (adjusted): 1998Q1 2007Q1
Included observations: 37 after adjustments
KPF=C(1)+C(2)*(PIB)+C(3)*(R2)+C(4)*(TC2-P1)+C(5)*(IEURO-P1)
C(1)
C(2)
C(3)
C(4)
C(5)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
-2.137425
-1.287698
-0.924075
-0.905711
0.870492
2.419526
0.673622
0.495187
0.520315
0.451197
-0.883406
-1.911604
-1.866115
-1.740698
1.929294
0.3836
0.0649
0.0712
0.0913
0.0626
0.309508
0.223197
3.044145
296.5382
-91.00400
3.585942
0.015893
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
-1.207895
3.453900
5.189405
5.407097
5.266152
2.274535
Slovaquie
Dependent Variable: KIDEPIB
Method: Least Squares
Date: 04/03/12 Time: 12:10
Sample (adjusted): 1999Q1 2008Q4
Included observations: 40 after adjustments
KIDE=C(1)+C(4)*(TC2-P1)+C(5)*(IEURO3-P1)
C(1)
C(4)
C(5)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
3.072636
-1.162414
1.330156
2.042636
0.598377
0.612205
1.504250
-1.942610
2.172730
0.1410
0.0597
0.0363
0.113616
0.065704
8.408467
2615.986
-140.3679
2.371323
0.107400
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
351
5.878056
8.699104
7.168394
7.295060
7.214192
1.940516
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Annexe 4 : équation économétrique (4)
Bulgarie
Dependent Variable: CRISE
Method: Least Squares
Date: 02/01/12 Time: 21:46
Sample (adjusted): 1997Q4 2008Q4
Included observations: 45 after adjustments
CRISE=C(1)+C(2)*(IPF)
C(1)
C(2)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
-0.894567
-0.001864
0.170371
0.000922
-5.250712
-2.022353
0.0000
0.0494
0.086853
0.065617
1.065176
48.78782
-65.67064
4.089912
0.049388
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
-0.769691
1.101943
3.007584
3.087880
3.037518
2.161945
République Tchèque
Dependent Variable: CRISE
Method: Least Squares
Date: 02/01/12 Time: 22:11
Sample (adjusted): 2000Q1 2008Q4
Included observations: 36 after adjustments
CRISE=C(1)+C(2)*(ITOTAL)+C(3)*(IEUROJ(-3))
C(1)
C(2)
C(3)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
1.187737
-0.000306
-0.467541
0.744270
0.000113
0.228115
1.595842
-2.699798
-2.049587
0.1201
0.0109
0.0484
0.276955
0.233134
1.230319
49.95158
-56.97742
6.320151
0.004745
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
352
-0.771769
1.404940
3.332079
3.464039
3.378136
1.722406
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Estonie
Dependent Variable: CRISE
Method: Least Squares
Date: 02/01/12 Time: 21:54
Sample (adjusted): 1996Q2 2008Q4
Included observations: 51 after adjustments
CRISE=C(1)+C(2)*(ITOTAL)+C(3)*(IEURO12M)
C(1)
C(2)
C(3)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
0.772569
-0.001096
-0.439300
0.683709
0.000486
0.171484
1.129967
-2.256054
-2.561751
0.2641
0.0287
0.0136
0.191086
0.157382
1.196728
68.74360
-79.97910
5.669419
0.006161
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
-1.244522
1.303707
3.254082
3.367719
3.297506
2.242261
Hongrie
Dependent Variable: CRISE
Method: Least Squares
Date: 02/02/12 Time: 22:02
Sample (adjusted): 1996Q2 2008Q4
Included observations: 51 after adjustments
CRISE=C(1)+C(2)*(IPF)
C(1)
C(2)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
-0.295922
-0.000429
0.150338
0.000116
-1.968377
-3.708447
0.0547
0.0005
0.219156
0.203220
1.033772
52.36554
-73.03966
13.75258
0.000532
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
353
-0.446418
1.158125
2.942732
3.018489
2.971681
1.569922
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Lituanie
Dependent Variable: CRISE
Method: Least Squares
Date: 02/04/12 Time: 10:55
Sample (adjusted): 1996Q2 2009Q1
Included observations: 52 after adjustments
CRISE=C(1)+C(2)*(IIDE(-1))+C(3)*(IEURO1M(-1))
C(1)
C(2)
C(3)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
0.058053
0.003335
-0.409451
0.760120
0.001359
0.202287
0.076373
2.454345
-2.024106
0.9394
0.0177
0.0484
0.163844
0.129716
1.448272
102.7771
-91.49908
4.800765
0.012475
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
-0.905973
1.552456
3.634580
3.747152
3.677737
2.269078
Lettonie
Dependent Variable: CRISE
Method: Least Squares
Date: 02/04/12 Time: 11:16
Sample (adjusted): 1996Q2 2009Q2
Included observations: 53 after adjustments
CRISE=C(1)+C(2)*(IIDE(-2))
C(1)
C(2)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
-0.201203
-0.003780
0.286777
0.001624
-0.701600
-2.328436
0.4861
0.0239
0.096091
0.078367
1.424691
103.5169
-92.94398
5.421616
0.023891
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
354
-0.689308
1.484026
3.582792
3.657142
3.611383
1.491916
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Pologne
Dependent Variable: CRISE
Method: Least Squares
Date: 02/04/12 Time: 11:54
Sample (adjusted): 2000Q2 2008Q4
Included observations: 35 after adjustments
CRISE=C(1)+C(2)*(IPF)+C(3)*(IEUROJ)
C(1)
C(2)
C(3)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
1.536618
-0.000389
-0.517506
0.937831
0.000138
0.276388
1.638480
-2.814166
-1.872385
0.1111
0.0083
0.0703
0.219740
0.170973
1.447488
67.04712
-61.03868
4.505978
0.018873
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
-0.292317
1.589757
3.659353
3.792669
3.705374
1.436845
Roumanie
Dependent Variable: CRISE
Method: Least Squares
Date: 02/04/12 Time: 17:29
Sample (adjusted): 1996Q2 2008Q4
Included observations: 51 after adjustments
CRISE=C(1)+C(2)*(IPF)
C(1)
C(2)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
-0.502940
-0.002415
0.225526
0.000752
-2.230070
-3.211108
0.0304
0.0023
0.173849
0.156989
1.585413
123.1632
-94.84883
10.31121
0.002336
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
355
-0.630463
1.726736
3.797993
3.873751
3.826943
1.435268
Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente
Slovénie
Dependent Variable: CRISE
Method: Least Squares
Date: 02/04/12 Time: 17:50
Sample (adjusted): 1996Q2 2008Q4
Included observations: 51 after adjustments
CRISE=C(1)+C(2)*(ITOTAL)
C(1)
C(2)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
-0.777729
0.001178
0.285248
0.000410
-2.726502
2.871682
0.0089
0.0060
0.144053
0.126585
1.420029
98.80768
-89.23028
8.246556
0.006016
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
-0.190420
1.519452
3.577658
3.653416
3.606607
2.015279
Slovaquie
Dependent Variable: CRISE
Method: Least Squares
Date: 02/05/12 Time: 09:59
Sample (adjusted): 1999Q4 2009Q3
Included observations: 40 after adjustments
CRISE=C(1)+C(2)*(ICT(-3))+C(3)*(IEURO12M(-2))
C(1)
C(2)
C(3)
R-squared
Adjusted R-squared
S.E. of regression
Sum squared resid
Log likelihood
F-statistic
Prob(F-statistic)
Coefficient
Std. Error
t-Statistic
Prob.
-2.205472
0.000513
0.456603
0.780610
0.000244
0.213471
-2.825319
2.100420
2.138942
0.0076
0.0426
0.0391
0.192323
0.148665
1.373932
69.84446
-67.90537
4.405190
0.019226
Mean dependent var
S.D. dependent var
Akaike info criterion
Schwarz criterion
Hannan-Quinn criter.
Durbin-Watson stat
356
-0.493263
1.489069
3.545268
3.671934
3.591067
1.748584
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