THESE Pour l'obtention du grade de DOCTEUR DE L'UNIVERSITÉ DE POITIERS UFR de sciences économiques et de gestion CRIEF - Centre de recherche sur l'intégration économique et financière (Diplôme National - Arrêté du 7 août 2006) École doctorale : SORG - Sociétés et organisations Secteur de recherche : Sciences Economiques Présentée par : Thibault Cuenoud Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Directeur(s) de Thèse : Jacques Léonard, Elisabeth Paulet Soutenue le 19 juin 2012 devant le jury Jury : Président Jean-Pierre Allégret Professeur à l'Université Paris-Ouest Rapporteur Delphine Lahet Professeur à l'Université Bordeaux IV Montesquieu Rapporteur Jean-Christophe Poutineau Professeur à l'Université de Rennes I Membre Jacques Léonard Professeur émérite à l'Université de Poitiers Membre Elisabeth Paulet Professeur à l'ESCEM/FBS Pour citer cette thèse : Thibault Cuenoud. Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente [En ligne]. Thèse Sciences Economiques. Poitiers : Université de Poitiers, 2012. Disponible sur Internet <http://theses.univ-poitiers.fr> Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Université de Poitiers Faculté de Sciences Economiques CRISES FINANCIERES ET FONDAMENTAUX MACROECONOMIQUES : UNE RELATION AMBIVALENTE Thèse pour le Doctorat ès Sciences Economiques Présentée par Thibault CUENOUD Et soutenue publiquement le 19 juin 2012 MEMBRES DU JURY Directeur de thèse : Jacques LEONARD, Professeur émérite à l'Université de Poitiers Co-Directrice : Elisabeth PAULET, Professeur à l'ESCEM/FBS Rapporteurs : Delphine LAHET, Professeur à l'Université Bordeaux IV Montesquieu Jean-Christophe POUTINEAU, Professeur à l'Université de Rennes I Suffragant : Jean-Pierre ALLEGRET, Professeur à l'Université Paris-Ouest 1 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente La faculté de Sciences Economiques de Poitiers n’entend donner aucune approbation, ni improbation aux opinions émises dans cette thèse. Ces opinions doivent être considérées comme propres à leur auteur 2 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Remerciements Mes remerciements s’adressent en premier lieu à mes deux co-directeurs de thèse, Jacques LEONARD et Elisabeth PAULET. Leur soutien permanent, la qualité de leur encadrement et la complémentarité de leurs conseils se sont avérés nombre de fois indispensables à la bonne réalisation de ce travail. Je souhaite aussi remercier Jean-Christophe POUTINEAU et Delphine LAHET, tous deux rapporteurs, ainsi que Jean-Pierre ALLEGRET, suffragant, pour l’honneur qu’ils ont pu me faire en acceptant de constituer le jury de cette thèse. Durant ces années de doctorat, j’ai pu bénéficier du statut d’étudiant à la faculté de Sciences Economiques de Poitiers et d’assistant chercheur à l’ESCEM Paris Tours Poitiers. Mes remerciements s’adressent aux membres des laboratoires de ces deux composantes : le CRIEF (Centre de Recherche sur l’Intégration Economique et Financière) et le CRESCEM (Centre de Recherche de l’Ecole Supérieure de Commerce et de Management). Les échanges qui ont pu s’y réaliser tout au long de mon doctorat ont été riches d’enseignement et d’apprentissage. Plus largement, mes remerciements s’adressent à l’ensemble du personnel de l’ESCEM avec qui j’ai eu la chance de partager la vie de cette école. Les diverses activités que j’ai pu y exercer me permettent aujourd’hui d’appréhender plus facilement mon avenir professionnel. De peur d’en oublier certains, je préfère n’en nommer aucun. J’espère qu’ils me le pardonneront. Ces dernières lignes s’adressent à ma famille et belle famille qui ont su s’accommoder au fil des années de mes travers envers la recherche. Mais surtout, merci à ma femme Carole, à mes deux enfants Gabriel et Calie et à mes parents pour le soutien inconditionnel dont ils ont toujours fait preuve. Ce projet est aussi un peu le leur. 3 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Ces quelques mots pour dédier ce travail à mon père qui n’a pas eu la possibilité de rester parmi nous pour enfin voir son fils finir ses études… 4 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Résumé : Dans le cadre de l’analyse des crises financières au sein des pays émergents, de nombreux travaux sont venus expliquer l’occurrence de ce genre de phénomènes. Pourtant, des faits nouveaux se manifestent sans pour autant s’inscrire dans les recherches déjà proposées (Corée du Sud, Brésil et surtout dans les pays d’Europe centrale et orientale). En référence à cette littérature, la thèse pose en retour la question de l’incidence de la contagion financière sur la dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macrofinanciers de pays émergents susceptibles d’être initialement considérés comme « robustes ». La réponse passe par la mise en évidence des principales composantes des crises financières pour en extraire les limites face à l’hypothèse soulevée. La description des stratégies de rattrapage économique, par l’intégration au marché financier international, est à l’origine des vulnérabilités potentielles dans les effets de contagion. La structure instable de l’endettement international, à l’aide de l’Hypothèse d’Instabilité Financière de Minsky (1974), va offrir les éléments théoriques nécessaires à la modélisation des faits empiriques. Les premières générations de crises de change viendront conceptualiser la fuite des capitaux en attribuant la responsabilité de la contraction de la liquidité au reste du monde. Dans la transition qu’ils opèrent actuellement en vue de leur adhésion à l’UEM, les PECO ne peuvent être considérés comme étant à l’abri de la survenance de crises financières, et ce même s’ils bénéficient des impacts stabilisateurs favorables liés à leur appartenance à l’UE. Mais disposent-ils alors des facteurs de robustesse macroéconomique et macro-financière suffisants pour conjurer les incidences économiques d’éventuelles pressions par voie de contagion ? La partie empirique de la thèse devrait permettre de répondre à la question à travers des modélisations économétriques et analytiques. Mots-clés : Fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers, crises financières, interdépendance, effets de contagion, crises de change de première génération, HIF de Minsky. Abstract: As part of the financial crises analysis in emerging countries, many studies explained the occurrence of such phenomena. However, new facts occur which do not appear in research already available (mainly in countries like South Korea, Brazil and Central and Eastern Europe). In reference to this literature, the thesis raises in return the question of the financial contagion impact on macro-economic and macro-financial fundamentals degradation about emerging countries initially considered as "robust." The answer is linked with the key components identification of financial crises to extract its limits against the hypothesis raised. The description of economic recovery strategies, by the international financial market integration, is the source of potential vulnerabilities in the contagion. The unstable structure of international debt, with the financial instability hypothesis of Minsky (1974), will provide the theoretical elements necessary for empirical facts modeling. The first generation of currency crises will conceptualize capital flight by assigning responsibility for the liquidity squeeze to the rest of the world. In the transition they currently operate in order to join EMU, the Central and Eastern Europe countries cannot be considered safe from the financial crises occurrence, even if they have favorable impacts stabilizers due to the fact they belong to EU. So do they have enough robust macro-economic and macro-financial factors to ward off the economic impact of any pressure by contagion? The empirical part of the thesis should answer the question through analytical and econometric modeling. Keywords: Fundamental macroeconomic and macro-financial, financial crises, interdependence, contagion, currency crises of the first generation, HIF Minsky. 5 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Sommaire Introduction générale .....................................................................................9 Partie 1. Présentation synthétique des modèles de crises de change : un retour vers les crises financières comme élément d’interprétation Introduction de la première partie ................................................................................... 16 Chapitre 1. Définition, détermination, anticipation et récurrence des crises financières Introduction intermédiaire....................................................................................................... 19 1. Une approche générale des crises comme définition........................................................ 21 2. Détermination et anticipation des crises financières en Sciences Economiques .............. 27 3. Historique des crises financières : une récurrence continue ............................................. 34 Conclusion intermédiaire ......................................................................................................... 39 Chapitre 2. La vulnérabilité des régimes de change face aux tensions financières internationales Introduction intermédiaire....................................................................................................... 41 1. Les nouveaux éléments du contexte financier international ............................................ 43 2. La place prépondérante des effets de contagion dans l’environnement financier ........... 54 3. Des stratégies d’ancrage du taux de change par nature source de vulnérabilité ............. 60 4. La contrainte du change fixe dans un contexte de tensions financières internationales . 68 5. Synthèse des différentes modélisations de crises de change............................................ 73 6. Contextualisation de la problématique à travers des faits récents : focus sur la Corée du Sud, le Brésil et les PECO .................................................................................................... 84 Conclusion intermédiaire ......................................................................................................... 94 Conclusion de la première partie ...................................................................................... 96 Partie 2. Identification et modélisation des faits originaux : un processus de développement source d’interdépendances et d’effets de contagion Introduction de la deuxième partie ................................................................................ 100 6 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Chapitre 3. Une stratégie de rattrapage économique basée sur l’attractivité des IDE, source de vulnérabilités potentielles ? Introduction intermédiaire..................................................................................................... 103 1. Enjeux de l’intégration au commerce international : des perspectives favorables de développement économique ........................................................................................... 106 2. La nécessité de contracter des endettements externes, facteur de dépendance au marché financier international ........................................................................................ 116 3. Le rôle prépondérant des IDE : entre attractivité, croissance économique et stabilité macro-financière .............................................................................................................. 126 Conclusion intermédiaire ....................................................................................................... 138 Chapitre 4. Spécification de faits originaux : construction théorique pays développé/pays émergent d’après l’hypothèse d’instabilité financière de Minsky Introduction intermédiaire..................................................................................................... 140 1. L’apport de Minsky comme élément d’explication au déclenchement de la crise ......... 142 2. Le processus de crise : mise en parallèle des modélisations de 1ere génération ........... 154 3. Matérialisation du phénomène de crise dans les PECO : un processus en deux étapes . 163 4. Caractérisation des phénomènes d’interdépendance et de contagion dans les PECO ... 178 Conclusion intermédiaire ....................................................................................................... 193 Conclusion de la deuxième partie................................................................................... 196 Partie 3. Divergences de comportement au sein des PECO lors de tensions financières internationales : entre transferts de capitaux et positionnement structurel Introduction de la troisième partie ................................................................................. 200 Chapitre 5. Modélisations économétriques comme approche empirique : focus sur les flux de capitaux Introduction intermédiaire..................................................................................................... 203 1. La détermination du rôle des capitaux étrangers au sein des PECO : une obligation d’attractivité pour ces territoires ..................................................................................... 205 2. Eléments d’attractivité des capitaux étrangers dans les PECO : croissance économique, rentabilité des investissements et variation des taux de change .................................... 219 7 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente 3. Eléments de répulsion des capitaux étrangers dans les PECO : analyse des tensions financières par les canaux de liquidité et de taux d’intérêt ............................................. 231 Conclusion intermédiaire ....................................................................................................... 241 Chapitre 6. Détermination de la qualité du positionnement des PECO : entre turbulences financières et viabilité du rattrapage économique Introduction intermédiaire..................................................................................................... 243 1. Méthodologie de la démarche : une dynamique en trois thématiques .......................... 246 2. Analyse ciblée de la qualité des fondamentaux des PECO .............................................. 255 3. Turbulences financières de court terme : focus sur la politique budgétaire ................... 278 4. Viabilité du rattrapage économique à moyen terme : focus sur les flux d’IDE ............... 288 Conclusion intermédiaire ....................................................................................................... 298 Conclusion de la troisième partie ................................................................................... 300 Conclusion générale .................................................................................... 303 Bibliographie ............................................................................................... 313 Table des matières ...................................................................................... 329 Table des illustrations ................................................................................. 332 Annexe 1 : équation économétrique (1) ...................................................... 339 Annexe 2 : équation économétrique (2) ...................................................... 344 Annexe 3 : équation économétrique (3) ...................................................... 347 Annexe 4 : équation économétrique (4) ...................................................... 352 8 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Introduction générale L’analyse économique repose sur l’interprétation de faits pour comprendre puis expliquer le comportement des agents économiques. Ce regard sur la société doit permettre de redéfinir dans la mesure du possible la nature des choix pour optimiser l’allocation des ressources et amplifier le bien être de chacun. Le monde dans lequel nous sommes aujourd’hui apparait de plus en plus spécifique aux périodes antérieures, nécessitant de poursuivre ce travail afin d’apporter toujours plus de compréhension aux phénomènes économiques présents et futurs. La mondialisation des échanges et la globalisation des modes de production et de consommation, rendues possible en diminuant technologiquement les distances terrestres, illustrent cette amplification des flux économiques pouvant apparaitre complexes. Ces échanges alimentent favorablement les interactions qui naissent entre les individus à travers de nouvelles méthodes de travail, d’apprentissage, de coopération… Pourtant, cet essor si vertueux soit-il peut être à la merci du comportement de quelques individus, qui en souhaitant maximiser leur propre préférence peuvent dangereusement déstabiliser le bienêtre collectif de tous. Le marché financier reflète cette tendance puisqu’il est le fruit d’une libéralisation intense des échanges entre les territoires, à l’origine d’une instabilité récurrente souvent induit par une minorité d’acteurs. Le rôle de ce secteur est d’autant plus déterminant à chaque territoire national puisque légitiment il définit l’allocation des capitaux vers l’économie réelle. Le travail réalisé ici s’inscrit dans la réflexion de l’instabilité financière internationale dans un contexte de régulation toujours nationale. La démarche que nous allons adopter n’est pas de proposer des alternatives aux difficultés rencontrées mais de centrer l’attention sur les limites du système actuel, notamment sur les risques de déstabilisation des économies intégrées au reste du monde. La thématique que nous abordons est au cœur de nombreux débats en macroéconomie financière. Le FMI a pu l’aborder récemment lors de la redéfinition des nouvelles modalités de crédits qu’elles accordent, flexibles ou modulables (FMI, 2007). Pour autant, de nombreuses interrogations sont toujours présentes. Le développement de pays émergents, en parallèle à des moyens d’information et de communication toujours plus importants, ne 9 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente cesse d’amplifier les acteurs sur la scène internationale. De nature divergente sur le marché financier, où les instances publiques côtoient les acteurs privés, les objectifs qu’ils ont le sont tout autant. Les problématiques induites par cette augmentation des échanges financiers sont regroupées sous la notion de gouvernance ou d’architecture financière internationale. L’hypothèse d’une nouvelle régulation, sans supposer de sa forme future, n’est pourtant pas envisageable pour le moment puisqu’il faudra à ces agents économiques s’accorder à un moment donné. Cartapanis le soulève brièvement. « Il est très improbable, tout au moins à court terme, que la nouvelle architecture prenne la forme d’un ensemble de règles de droit dont la combinaison déboucherait sur un nouveau système s’imposant à la communauté internationale, à l’image de la création du FMI en 1944. » (Cartapanis, 2001). Au regard de ces faits, la problématique postule que des pays émergents avec des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers de bonne qualité sont susceptibles de subir des tensions financières induites par des effets de contagion. Pour autant, ces territoires ne témoignent pas de vulnérabilités fondamentales qui pourraient leur être propres. Ce postulat, fort puisqu’il remet en cause la littérature existante, réfute le lien de cause à effet avec la dégradation des fondamentaux qui légitimement annonçait l’occurrence d’une crise. Les travaux précédents postulent que toute tension dans une économie ne peut s’expliquer que par une vulnérabilité déjà existante dont les effets de contagion ne viendront que renforcer l’impact. Il ne s’agit pas ici de mettre en doute les apports passés, puisque ceux-ci témoignent toujours pour partie de leur pertinence dans l’instabilité financière actuelle. Mais l’occurrence de plus en plus forte de ces faits nouveaux, reflétant la problématique qu’il conviendra de démontrer, fait poser de nombreuses questions tant dans les méthodes de détermination, de détection et d’anticipation de ces crises aujourd’hui. De telles affirmations, qu’il faudra conforter dans ce travail, font supposer que les vulnérabilités des autres pourraient devenir les notre lors d’effets de contagion difficilement évitables au regard de l’imbrication des marchés nationaux avec ceux internationaux. Les exemples de crises en Corée du Sud (1997-1998), au Brésil (1999-2002) et plus récemment dans les pays d’Europe centrale et orientale (2008) illustrent une tendance qui semble s’affirme au fil du temps. La libéralisation des flux financiers a offert l’opportunité d’amplifier 10 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente la croissance économique de ces territoires. Mais cette intensification des flux, à travers la globalisation des échanges, semble apporter une instabilité supplémentaire à la sphère financière. Cette instabilité apparait pourtant comme un élément essentiel de la capacité d’adaptation du système financier international aux contraintes macroéconomiques et macro-financières du moment. Contraintes qui ne cessent d’évoluer dans un monde en mouvance permanente. Le mode de fonctionnement des marchés financiers pose de véritables questions quant à la viabilité des processus de rattrapage économiques actuellement choisis des pays émergents que nous venons de citer. L’intégration de plus en plus poussée aux marchés commerciaux et financiers, afin d’amorcer une dynamique de développement, renforce d’autant plus les effets de contagion potentiels entre économies. La fréquence de l’occurrence des crises peut être stable sur la durée mais les turbulences financières qu’elles entrainent y apparaissent plus nombreuses et systémiques. Tout un ensemble d’éléments se doit d’être analysé pour en comprendre l’évolution : de l’origine de la crise jusqu’à sa matérialisation, puis des effets de contagion à travers les taux de change pour enfin impacter les fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers, hypothéquant d’autant plus un retour rapide à la croissance. Le regard qu’il convient d’avoir consistera à analyser la littérature existante tout en expliquant les nombreuses difficultés qui émergent lors de la conceptualisation de ces faits spécifiques. Ce travail se voulant constructif, son cheminement repose d’abord sur l’analyse des concepts de bases des phénomènes de crises pour ensuite se confronter à la théorie économique et enfin aux faits empiriques. Le premier chapitre se concentre tout d’abord sur la définition d’une crise, volontairement par une approche généraliste, pour en comprendre la nature même. Les éléments qui en ressortiront seront appliqués à la sphère économique puis au secteur financier plus particulièrement. Une large description des méthodes de déterminations puis d’anticipations, couramment utilisé en sciences économiques, permettra de mettre en avant la logique aujourd’hui adoptée pour les conceptualiser. En effet, le panel d’outils de mesure utilisé afin de quantifier ce phénomène repose intégralement sur la dégradation des 11 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers propres au pays subissant une crise. L’analyse économique actuelle s’ancre dans une relation de cause à effet entre crises financières et fondamentaux. L’énumération des variables macroéconomiques et macrofinancières, à travers un comportement changeant avant la réalisation d’une crise, doit permettre de les anticiper. Le pouvoir prédictif de ce genre d’interprétation, dans le cas spécifique de notre problématique, devient faible si le pays en situation de tension financière n’a pas eu de dégradation au préalable de ses fondamentaux. Ces premiers éléments décrivent les difficultés dans l’organisation présente des flux financiers internationaux. Comment permettre à des marchés financiers d’apporter des éléments de réponses à travers leurs fluctuations si elles ne sont pas dues à des vulnérabilités qui leurs sont propres ? La véritable question qui se pose, à partir du moment où il devient pertinent de prendre en compte ce genre d’interprétation, est de savoir si un pays devenant vulnérable au regard de l’incapacité de ses partenaires à apporter des solutions efficaces peut intervenir dans le reste du monde pour tenter de se protéger. Le second chapitre va chercher à contextualiser les nouvelles caractéristiques du marché financier international, permettant d’expliquer par la suite les éléments justifiant la problématique de ce travail. La forte libéralisation des flux financiers des pays émergents a pour but d’attirer les capitaux étrangers, nécessaires à la restructuration de leur appareil productif. Cette ouverture du compte de capital les met dans une situation de dépendance forte vis-à-vis du reste du monde mais aussi de vulnérabilité puisqu’en parallèle ils se doivent de stériliser le risque de dépréciation monétaire pour être attractif (ancrage des taux de change). Pourtant, ce n’est pas un hasard si les trois générations de modélisation de crises de change se font dans le cadre d’un ancrage fixe. Même si le processus de libéralisation apparait comme un élément essentiel à la régulation du système financier international, la fluctuation du prix des actifs nécessaire à une réallocation optimale du capital est aussi source d’instabilité à l’origine de phénomènes de contagion. Ces deux caractéristiques, instabilité financière et effets de contagion, poussent à modifier les fondements des phénomènes de crises et plus spécifiquement dans l’interprétation des crises de change. 12 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Le troisième chapitre va expliquer comment, à travers la stratégie de rattrapage économique adoptée par les pays émergents, de nombreuses vulnérabilités vont se créer dans les effets de contagion. Le processus de développement économique, adopté aujourd’hui par une majorité de pays émergents, repose sur une intégration au commerce international, source d’amplification de la croissance économique. Mais la condition à cette reconversion est l’attractivité de capitaux étrangers, principalement sous forme d’Investissements Directs Etrangers (IDE). Cette stratégie, source de dynamisme, n’est pas pour autant sans risque puisqu’elle induit une amplification des interdépendances tant commerciales que financières vis-à-vis du reste du monde. Ce processus impose le déficit récurent de leur balance courante afin d’importer des biens d’équipement nécessaires à la restructuration de leur tissu industriel. L’afflux des capitaux étrangers permet de financer et ainsi de neutraliser le solde de la balance des paiements mais aussi de stabiliser l’ancrage du taux de change. Lors du retrait pour quelque raison que ce soit des capitaux, le déficit récurent de leur balance courante ne sera plus compensée, mettant sous pression l’ancrage du taux de change. L’anticipation à terme de sa non viabilité précipitera sa chute, comme dans les modélisations de première génération. Le quatrième chapitre vient compléter la présentation de vulnérabilités potentielles à travers les canaux de contagion des pays émergents, à l’aide de l’Hypothèse d’Instabilité Financière de Minsky (HIF). Selon cette théorie, l’occurrence d’une crise financière n’est pas due à la diminution du taux de rentabilité (qui peut être assimilée à la non-dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers pour un pays) mais à celle du taux d’intérêt. Cet élément perturbateur va offrir l’opportunité d’expliquer la fuite des capitaux étrangers au sein du pays émergent. La configuration de l’endettement est devenue international. Elle repose sur des échéances de court terme dans les pays développés pour en minimiser le coût, afin d’investir ces mêmes capitaux dans des placements de moyen voire long terme dans les pays émergents pour en maximiser la rentabilité. Lors d’une augmentation des taux d’intérêt dans le pays développé, qu’il conviendra de matérialiser, cette structure internationale de l’endettement va pousser nombre d’agents économiques à retirer leurs capitaux pour rembourser leurs créances face à l’incapacité d’obtenir tout refinancement. 13 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Le cinquième chapitre a pour ambition de confirmer par les faits la plausibilité des postulats annoncés. Les PECO illustrent empiriquement l’interprétation théorique décrite précédemment au regard de la forte dépendance qu’ils ont aujourd’hui avec la zone euro et de l’occurrence de la crise de 2008. La disponibilité des données nécessaires aux équations qui vont être créées rend d’autant plus pertinent l’application de tests économétriques. La construction de modélisations va reposer sur l’utilisation des premières générations de modélisations de crises en complément de l’approche théorique de l’Hypothèse d’Instabilité Financière (HIF) de Minsky (1974). Elles vont permettre de tester chaque étape décrite dans l’occurrence d’une crise financière sans dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers du pays. Il s’agira tout d’abord de déterminer le rôle fondamental des capitaux étrangers, où ceux-ci permettent de neutraliser le déficit récurent de la balance courante ainsi que la stabilisation du taux de change. Il conviendra ensuite de valider les raisons de l’attractivité des pays émergents dans les stratégies d’allocations des capitaux étrangers, tout en confortant la nature à court terme de leur endettement. La dernière étape confirmera la plausibilité des effets de contagion à travers les canaux de liquidité et de taux d’intérêt entre pays développés et en voie de développement. Le sixième chapitre se veut complémentaire à l’analyse effectuée durant les modélisations. La crise des Subprimes a pu impacter indifféremment les PECO en 2008 mais certains ont pu rebondir plus facilement que d’autres. Même s’il apparait difficile pour ces pays d’éviter les tensions financières internationales, ils ne sont aucunement responsables de l’augmentation des taux d’intérêt dans le reste du monde à l’origine des perturbations, la qualité de leur positionnement économique à court et moyen terme apparait déterminant. Il leur faut être capable de réguler à court terme les tensions financières internationales récurrentes tout en définissant une dynamique de rattrapage économique favorable à moyen et long terme. Ces deux aspects sont indissociables puisque l’inefficacité de court terme peut dégrader les fondamentaux de ces pays, hypothéquant leur chance de rebondir par la suite. Alors que la viabilité à moyen terme de leur développement économique est l’assurance d’un retour rapide des capitaux étrangers lors de l’après crise. Au regard de la situation de chaque PECO, des regroupements seront effectués pour définir des scénarios de court et moyen terme quant à la viabilité potentielle de leur rattrapage économique. 14 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Partie 1 Présentation synthétique des modèles de crises de change : un retour vers les crises financières comme élément d’interprétation 15 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Introduction de la première partie La relation entre les crises financières et les fondamentaux macroéconomiques n’est pas, au regard de l’historique des sciences économiques, un champ d’étude inexploré. Une remise à plat de ces apports est nécessaire pour permettre par la suite de rebondir sur des postulats aujourd’hui largement admis. Le cheminement de cette première partie a pour ambition de mettre en parallèle les fondements nécessaires à la réflexion de la problématique de thèse. Il s’agira d’abord de présenter ce travail avec une véritable volonté de comprendre la nature même d’une crise en complément des éléments de détermination et de réalisation de ce phénomène. Par la suite, la description du contexte de libéralisation puis d’intégration des marchés financiers, en parallèle à un ancrage fixe de nombreux taux de change de pays en voie de développement, offrira les arguments nécessaires à la contextualisation de ces tensions. L’hypothèse qui est ici mise en avant repose sur l’affirmation que des pays émergents, dont les fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers sont robustes, peuvent néanmoins entrer en crise par des effets de contagion sans pour autant témoigner d’une vulnérabilité fondamentale qui pourrait leur être propre. La littérature existante est en totale opposition puisqu’elle postule que toute crise dans une économie ne peut s’expliquer que par une vulnérabilité déjà existante dont les effets de contagion ne viendront que renforcer l’impact. Une description complémentaire des modélisations de crise sera l’opportunité d’en décrire les limites dans l’interprétation qu’elles donnent à ces phénomènes apparaissant néanmoins nouveaux au regard de leur fréquence. Les modalités dans l’occurrence de crises en Corée du Sud (1997-1998), puis au Brésil (1999-2002) et surtout dans les pays d’Europe centrale et orientale (PECO) ayant intégré l’Union européenne (2008) illustrent cette tendance qu’il conviendra de décrire pour tenter d’en interpréter les grandes lignes. Le choix d’un développement général de la notion de crise est adopté ici. Celle-ci pouvant être spécifique à bien des domaines (économique, financière, sociologique…). Elle garde néanmoins une dynamique similaire lors de sa concrétisation. Une mise en parallèle entre les crises et la finance offre l’opportunité de prétendre qu’il ne s’agit pas d’un phénomène 16 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente propre aux sciences économiques. Son occurrence peut être perçue comme un événement nécessaire induit par l’incapacité des forces en présence à s’adapter aux contraintes de leur environnement. La littérature économique s’est emparée de la thématique depuis de nombreuses années. L’économie capitaliste y apparaît propice au regard de la fréquence élevée de ce phénomène. Un panel large d’outils de mesure a pu être réalisé afin de le quantifier. La détermination de ces indicateurs repose sur la dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers propres aux pays. La façon dont sont présentées les tensions financières dans un contexte macroéconomique confirme l’attachement de cause à effet entre crise financière et fondamentaux. La libéralisation des flux financiers, à l’origine de l’intégration des marchés nationaux, a offert l’opportunité d’amplifier la croissance économique de ces territoires. Mais cette intensification des flux, à travers la globalisation des échanges, semble apporter une instabilité supplémentaire à la sphère financière. Elle apparait pourtant comme un élément essentiel à la régulation du système financier international afin de l’adapter aux contraintes macroéconomiques et macro-financières du moment. L’intégration de plus en plus poussée des marchés renforce les effets de contagion potentiels entre économies. Les turbulences financières y apparaissent plus nombreuses mais aussi plus systémiques. La plus récente libéralisation des pays en voie de développement semble les rendre d’autant plus vulnérables à ces tensions. La problématique qui se pose véritablement concerne la capacité de ces pays à libéraliser, notamment leur compte de capital, alors que nombre d’entre eux sont sous ancrage fixe. Les tensions financières, à travers l’instabilité qu’elles induisent, sont souvent à l’origine de crises de change voire de crises jumelles (juxtaposition d’une crise de change et d’une crise bancaire). La nature des régimes de change, qu’ils soient fixes, flexibles ou semi-flexibles, explique largement cette tendance. La détermination du prix d’une monnaie sur le marché international est fonction de l’offre et de la demande. Une multitude d’éléments est prise en compte dans la fixation d’un prix d’équilibre. La liste des variables pouvant potentiellement l’influencer n’a cessé de croître pour aboutir à une situation paradoxale tant elles sont nombreuses aujourd’hui. Les indicateurs monétaires impactent directement le taux de 17 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente change. Mais les anticipations des agents économiques internationaux, qu’elles soient fondées ou non, deviennent déterminantes dans un contexte de libéralisation financière. Le besoin de capitaux des pays émergents pour pallier le manque d’épargne nationale, afin d’amorcer une dynamique de rattrapage économique, rend vulnérables nombre d’entre eux aux aléas des marchés financiers. Cette caractéristique est qualifiée de « péché originel » des pays émergents puisqu’ils doivent s’endetter en devises étrangères et non en monnaie locale. Les agents économiques internationaux ne souhaitent pas détenir le risque de dépréciation de la monnaie du pays en voie de développement. Les modélisations de première, deuxième et troisième générations, ont cherché à expliquer les raisons de l’occurrence d’une crise de change mais toujours dans une dynamique de dégradation des fondamentaux du pays à l’origine de l’amplification des vulnérabilités. Sa matérialisation reste pourtant la même, à savoir une fuite généralisée des capitaux ne permettant plus à l’ancrage fixe d’être viable au regard du déficit apparaissant normal de la balance courante lors d’un processus de rattrapage économique. Des éléments de plus en plus structurés, avec la Corée du Sud (1997-1998), le Brésil (1999-2002) mais surtout les PECO (2008), démontrent le caractère inapproprié de ces modélisations. Ils ont pu remettre en lumière l’importance des fondamentaux macroéconomiques. La relative bonne santé de ces pays (fondamentaux macroéconomiques robustes et anticipations auto-réalisatrices faibles) ne peut justifier les tensions financières alors induites. Se pose la question de la réappropriation des modélisations de première génération dans l’explication de ces phénomènes. Il s’agira alors d’en reprendre l’essence même mais en y contextualisant les paramètres de la problématique de thèse, à savoir l’instabilité financière et les effets de contagion dans un contexte d’ancrage du taux de change. 18 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Chapitre 1 Définition, détermination, anticipation et récurrence des crises financières. Introduction intermédiaire Les crises financières semblent faire partie intégrante de l’économie capitaliste. De tous temps et sur tous les territoires, des tensions financières ont pu voir le jour. La littérature économique est vaste dans ce domaine tant au regard de leur récurrence mais surtout de l’incapacité à les prévenir afin d’en amoindrir les coûts financiers et réels. Néanmoins, de nombreuses interprétations peuvent être réalisées à travers ces travaux afin d’en comprendre le processus de fonctionnement. Une description dynamique de ce phénomène, à travers sa définition, sa détermination puis sa réalisation, doit permettre d’offrir les fondements nécessaires à la réflexion de la problématique de thèse. Cette approche qui se veut d’abord générale, en y décrivant la crise de façon globale, va ensuite se focaliser sur ses caractéristiques en regard du secteur de la finance. Elle peut être interprétée comme le produit d’un ensemble d’éléments ayant pour origine son environnement, engendrant un écart important par rapport à un état de référence jugé normal. La volonté de sélectionner cette approche offre l’opportunité de mettre en parallèle la dynamique d’une crise dans le cadre de sa temporalité et les éléments issus de la littérature afin de la quantifier pour la déterminer. La démarche ainsi choisie met en lumière les variables macroéconomiques et macro-financières, à travers leur dégradation, qui apparaissent symptomatiques lors de crises financières au regard de ces travaux. L’amplification apparente de ce phénomène n’est pas étrangère à la mutation des sociétés contemporaines. L’ouverture des économies aux capitaux étrangers, le risque systémique, la faible rémunération des actifs dans les pays développés, l’abondance de la liquidité et l’augmentation de l’endettement international, le risque d’instabilité des pays émergents, les effets de contagion et d’interdépendance, la volatilité des taux de change peuvent apparaitre comme autant d’arguments venant conforter cette interprétation d’une récurrence plus forte de ce phénomène. 19 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Ce retour sur la notion de crise est le point de départ du cheminement de la problématique. Un inventaire des méthodes de mesure et d’anticipation des crises financières va venir compléter l’analyse. Le retournement brutal sur le marché financier du prix des actifs lors du dépassement d’un seuil qui aura été défini préalablement offre l’opportunité de quantifier l’occurrence de ce phénomène. Une énumération de variables macroéconomiques et macrofinancières, à travers un comportement changeant avant la réalisation d’une crise, doit permettre de les anticiper. Des divergences d’interprétation avec notre postulat peuvent déjà être annotées. La sélection de variables déterminantes dans l’anticipation d’une crise se concentre sur des indicateurs de vulnérabilité macroéconomiques et macro-financiers propres au pays en crise. Le pouvoir prédictif de telles modélisations devient faible si le pays en situation de tensions financières n’a pas eu au préalable une dégradation de ses fondamentaux. 20 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente 1. Une approche générale des crises comme définition Un premier contour peut permettre de décrire les mécanismes de fonctionnement de la notion de crise. Elle ronge d’elle-même et de l’intérieur un organisme, qu’il soit vivant, de type institutionnel ou organisationnel, au regard de contraintes qu’il ne devient plus possible de laisser en l’état. « Telle une gangrène, elle nait et se développe par l’intermédiaire de mécanismes internes dysfonctionnels. » (Courbon, 2010). Elle est le produit d’un ensemble d’éléments ayant pour origine son environnement, engendrant un écart important par rapport à un état de référence jugé normal. « Pour que la discrimination soit possible, il est nécessaire que les signes manifestes, les symptômes du processus observé dépassent un certain seuil de tolérance à l’anormal. » (Courbon, 2010). Le seuil est fonction du domaine, de l’histoire et de la culture où la crise va se concrétiser. Pourtant, la crise n’est pas obligatoirement synonyme d’effets négatifs. « Une société qui évolue est une société qui se détruit pour se récupérer, et c’est une société, donc, où se multiplient les événements. » (Sinding, 1981). Il y est question de rupture nécessaire afin d’adapter l’individu ou la société aux nouvelles contraintes auxquelles ils n’ont su se préparer. « L’intérêt de l’idée de crise est de définir un avant et un après, et donc de faire apparaître une évolution, voire une rupture entre deux formes de gestion et de traitement de l’espace tendanciellement différentes (….) » (Marié, 1998). Une définition descriptive ne doit pas pour autant faire oublier la dynamique de temporalité qui est propre au phénomène de crise. Le processus peut être présenté en trois temps complémentaires : la période antérieure à la crise, la période de crise puis la période postérieure à la crise (Lecomte, & al., 1986). Chacun de ces temps est régi par un mécanisme pouvant induire un enchainement potentiel vers la période suivante. Il y est question de la détermination d’un nouvel équilibre lorsque ces tensions s’exercent. Le tableau 1 repris des travaux de Lecomte et al. (1986), bien que destinés à des applications médicales, en décrit une dynamique intéressante. La période antérieure à la crise comprend trois étapes complémentaires que sont un événement dangereux induisant un état vulnérable puis un facteur déclenchant qui renforce la situation de stress. Si l’organisme est capable d’appréhender puis d’anticiper les tensions alors subies, il va se diriger vers un nouvel équilibre sans passer par une situation critique 21 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente pouvant être définie comme une crise. S’il n’en est pas capable, il va entrer dans la période de crise. Lorsque le déséquilibre n’est plus maitrisé, deux comportements vont s’enchainer l’un après l’autre. Il va d’abord y avoir un processus de désorganisation qui s’apparente à de la panique induit par l’incapacité apparente de l’organisme à réguler cette situation « anormale ». Ensuite, un processus de réorganisation issue d’efforts de réappropriation du nouvel environnement va se poursuivre. Il va s’ensuivre une transition vers la dernière étape qui est la période postérieure à la crise par un retour à un nouvel équilibre. Tableau 1. La dynamique des crises : une interprétation globale Source : (Lecomte, & al., 1986) 22 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente La réalisation de la crise puis son dépassement ne sont pas pour autant sources d’un apprentissage favorable. Le nouvel équilibre peut être de niveau de fonctionnement supérieur, identique voire inférieur suivant l’expérience acquise. L’organisme en sera plus fort s’il est dorénavant capable de prendre en compte les situations de stress subies. Au contraire, l’impact de la crise peut dégrader d’autant plus sa capacité à réagir en imposant des vulnérabilités supplémentaires auxquelles le nouvel équilibre n’apporte pas de réponse. L’utilisation de la notion de crise dans le cadre des sciences économiques peut être assimilée à la définition alors proposée. Le concept de crise repose sur la nature cyclique de la croissance économique lors d’une chute de la production (Kitchin, 1923) (Juglar, 1862) (Kondratiev, 1926). Afin de le matérialiser, un retour historique peut être envisagé. Les crises économiques ont d’abord été des crises où des problèmes d’ajustement entre l’offre et la demande sur les marchés des biens et services ont pu apparaitre. A partir d’un élément perturbateur, le facteur déclenchant, l’équilibre va être perturbé pour donner naissance à une fluctuation de prix au sein d’un secteur d’activité. Un retour à l’équilibre se mettra en place où un nouveau prix sera défini, issu d’une nouvelle confrontation entre l’offre et la demande. La régulation nécessaire à ce retour à l’équilibre a pu nécessiter une intervention publique, la mise en place de nouveaux outils de production, la faillite d’entreprises, … La production agricole est, historiquement, un exemple de crise économique. L’élément déclenchant y est majoritairement constitué par les aléas climatiques (une surproduction agricole faisant diminuer les prix au regard de la faiblesse de la demande ou une sousproduction faisant augmenter les prix au regard de la force de la demande). L’amplification des échanges à partir de l’ère industrielle a renforcé la fluctuation des prix des marchandises par les forces de l’offre et de la demande. D’autres éléments perturbants sont alors entrés en jeu (solvabilité de la demande, intervention de l’état, innovations…). Elles ont été définies de crises de sous-consommation à partir du milieu du 20ème siècle où le facteur perturbateur va engendrer une chute des prix influençant le niveau de production. La demande n’était pas suffisamment solvable pour satisfaire la croissance de l’offre. Aujourd’hui, nous assistons à des phénomènes de crises économiques plus globalisés tant les structures de production et la population des consommateurs se sont mondialisées. « Les 23 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente périodes de crises économiques se caractérisent au niveau international par l’apparition d’un déséquilibre massif des paiements internationaux (…). » (Allégret, 1993). Pourtant, la dynamique des crises économiques reste la même. « Toutes ces situations dites « historiques » de crise se traduisent concrètement par une baisse des prix, une multiplication des faillites et un fléchissement de la production et de l’emploi. » (Attali, 1976). La dynamique de la croissance économique apparait structurée par des cycles de hausse puis de baisse dont les périodes de crises sont le lien entre récession et expansion. La sphère financière s’est développée en parallèle à l’économie afin de permettre une meilleure allocation des ressources (Berthélemy, & al., 1994). Elle a permis d’amplifier les périodes de croissance à travers l’intermédiation financière entre les détenteurs de capitaux, qui prêtent, et les demandeurs de capitaux, qui investissent. Les formes d’actifs issues de cette activité financière vont se retrouver sur des marchés afin de permettre aux prêteurs de se désengager si nécessaire pour d’éventuels repreneurs. Le prix d’équilibre des actifs de ces marchés financiers est aussi fonction de la confrontation de l’offre et de la demande. Il est communément admis que la finance permet une diminution des risques en dirigeant l’épargne vers des placements plus productifs et stables (Bencivenga, & al., 1991), en offrant la possibilité de diversifier son portefeuille (Saint-Paul, 1992) (Greenwood, & al., 1990) et en obtenant plus facilement des informations nécessaires à la bonne gestion des investissements (Gertler, & al., 1991) (King, & al., 1993). Le marché financier peut aussi être à la source de déséquilibres importants où le prix des actifs financiers, à la hausse comme à la baisse, n’apparait plus correspondre à la valeur intrinsèque de l’actif. Les répercussions peuvent être dangereuses sur l’activité économique tant lors de phases d’euphories que de périodes de paniques généralisées. Mais l’occurrence d’une crise financière aborde dans sa dynamique une temporalité propre à l’ensemble des crises. Il y a tout d’abord un événement déclencheur que Minsky décrira de « déplacement » (Minsky, 1982), qui pousse les capitaux à se diriger vers le secteur d’activité devenu attractif. « La nature de ce déplacement varie d’un boom spéculatif à l’autre, que ce soit le début ou la fin d’une guerre, une récolte record ou catastrophique, l’application généralisée d’une nouvelle invention aux conséquences pernicieuses – canaux, chemin de fer, automobile – un 24 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente événement politique ou un succès financier surprenant, une conversion de la dette publique qui s’accompagne d’une baisse précipitée des taux d’intérêt. » (Kindleberger, 1978). L’attractivité d’un secteur va dans un premier temps se renforcer et la demande d’actifs financiers pour y investir va faire augmenter le prix de ces actifs, confortant d’autant plus la rentabilité espérée. Ce processus de spéculation est décrit comme « l’euphorie » (Minsky, 1982) ou « l’overtrading » (Kindleberger, 1978). Il s’agit néanmoins d’une augmentation de la vulnérabilité de la sphère financière au regard de la spéculation alors engendrée. Cet excès d’échange d’actifs financiers peut se transmettre à l’économie par une augmentation du prix des biens et services du secteur à travers des jeux d’arbitrages entre agents économiques internationaux. Un facteur déclenchant va marquer le début du retournement à l’origine de la panique généralisée. « Le signal spécifique qui marque le début de la crise, peut-être la faillite d’une banque ou d’une entreprise, prise au piège du crédit (…). La course a commencé. Les prix baissent. Les faillites se multiplient. La liquidation se fait parfois dans le bon ordre, mais le plus souvent dégénère en panique quand on s’aperçoit qu’il n’y a pas suffisamment d’argent en circulation pour permettre à tous de réaliser les plus-values attendues. » (Kindleberger, 1978). Minsky qualifie cette étape de « phase de révulsion » (Minsky, 1982). Les banques vont alors restreindre fortement l’accès au crédit au regard de l’augmentation du risque de défaut des agents économiques. Le retour à un nouvel équilibre devient envisageable lorsque l’une au moins des trois conditions suivantes est présente : les prix des actifs sont devenus tellement bas que de nouveaux investisseurs sont prêts à les racheter, les transactions peuvent être stoppées en clôturant le marché, un prêteur en dernier ressort apporte sa garantie afin de restaurer la confiance (Kindleberger, 1978). « De façon générale, une crise financière se définit comme une brutale augmentation de la demande de monnaie à des fins de précaution. » (Corneille, 1998). Lorsque les liquidités sont de retour sur le marché financier, un nouvel équilibre se forme où un nouveau prix des actifs qui était à la source de la spéculation est défini. 25 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Les crises abordent des thématiques larges dont la finance fait partie. Leurs dynamiques peuvent être mises en parallèle au regard des faits empiriques de l’histoire économique et financière de nos sociétés. Le cycle de l’activité économique amplifié par l’intermédiation financière apporte des éléments de compréhension nécessaires à la poursuite de l’étude. Les marchés financiers, à travers la détermination du prix d’équilibre des actifs, se résument à la confrontation entre une offre et une demande. C’est alors tout élément perturbateur du marché qui va induire une dépréciation significative du prix des actifs à l’origine de la crise. Les difficultés de réactivité, afin d’apporter les réponses nécessaires aux ajustements pouvant engendrer une crise, reposent sur la nature internationale des éléments perturbateurs d’un marché devenu globalisé. Il s’agit de savoir si un pays devenant vulnérable au regard de l’incapacité de ses partenaires à apporter des solutions efficaces peut intervenir pour tenter au final de se protéger ? 26 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente 2. Détermination et anticipation des crises financières en Sciences Economiques Il convient de présenter les éléments de mesure que l’on peut utiliser afin de déterminer puis d’anticiper les crises financières. Cette approche doit permettre de faire un parallèle entre la dynamique d’une crise dans le cadre de sa temporalité et les éléments issus de la littérature afin de la quantifier pour la mesurer. La démarche alors choisie va nous permettre de mettre en avant les variables macroéconomiques et macro-financières qui apparaissent déterminantes lors des crises financières au regard de ces travaux. « (…) la notion de crise apparaît toujours comme le lieu essentiel où se révèle le cœur d’une modélisation théorique : il n’y a pas, en effet, de définition de la crise dans un corps d’analyse sans désignation de ses causes, et donc, sans dévoilement de la grille de lecture de la dynamique sociale. » (Attali, 1976). Il conviendra de revenir sur ces interprétations pour les confronter à notre approche. Des limites y apparaissent notamment quant à la pertinence des anticipations auxquelles elles conduisent. La plus élémentaire des méthodes de détection d’une crise consiste à observer le prix des actifs déterminé sur un marché financier afin de signaler les perturbations propres au secteur (FMI, 1998) (Artus, 2001). Elles peuvent correspondre à des ruptures brutales de tendance, des retournements de conjoncture, le dépassement de seuils… (Dehove, 2004). Cette approche ne peut être que complémentaire à d’autres analyses approfondies au risque d’aboutir à des erreurs d’interprétation. Elle met seulement en avant des situations anormales où une crise financière s’est potentiellement réalisée. Les indicateurs sont les variables représentant les prix des actifs établis sur les marchés financiers : taux de change, indices boursiers, prix immobiliers, prix obligataires, prix des dettes souveraines, prix des métaux précieux et des matières premières… (Boyer, & al., 2004). Les graphiques 1 et 2 illustrent des périodes de fortes volatilités du prix d’actifs financiers matérialisant des phénomènes de crises. 27 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Graphique 1. Crise de change : volatilité des taux de change 2,5 Australie 2,3 2,1 Canada 1,9 1,7 1,5 Suisse 1,3 1,1 RoyaumeUni 0,9 0,7 0,5 1980 1982 1984 1986 1988 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 2006 2008 2010 Zone euro (17 pays) Source : OCDE - Taux de change, unités de monnaie nationale par dollar É-U (moyenne mensuelle) Graphique 2. Crises boursières : volatilité des cours boursiers 160 France 140 Allemagne 120 Japon 100 80 RoyaumeUni 60 États-Unis 40 20 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 2006 2008 2010 Zone euro (17 pays) Source : OCDE- Cours des actions, Indice 2005=100 Les graphiques qui viennent d’être présentés décrivent des périodes de fortes amplifications de hausses des prix, suivies généralement par des périodes de fortes baisses de ces mêmes prix. L’équilibre entre l’offre et la demande sur les marchés financiers apparait ici perturbé. Ces retournements de conjoncture peuvent être à l’origine de crises financières sans pour autant en expliquer les raisons. 28 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente La méthode suivante est celle des « events » qui a été utilisée à l’origine pour l’analyse des crises de change (Eichengreen, & al., 1995) (Frankel, & al., 1996) et des crises jumelles (Kaminsky, & al., 1996). Son principe repose sur l’analyse de l’évolution d’avant et d’après crise de variables déterminantes lors de la réalisation des tensions financières. La démarche comprend plusieurs étapes. Il faut tout d’abord identifier le moment de la crise. Ensuite, il convient de séparer les périodes de crise de celles de non crise. La période de crise doit être suffisamment large pour prendre en compte la fluctuation de la variable avant la crise, pendant la crise puis après la crise. Pour chaque fréquence de la période de crise, il y a une comparaison de la valeur de la variable sélectionnée avec sa valeur en période de non crise. Cette valeur est souvent définie par sa moyenne et son écart-type (Dehove, 2004) sur des périodes qui peuvent être de six mois, d’un an, de deux ans (Eichengreen, & al., 1995) mais aussi de trois ans (Frankel, & al., 1996) voire de quatre ans (Aziz, & al., 2000). L’idée est d’obtenir sur toute la période de crise un graphique illustrant le différentiel de variation de la variable déterminante par son comportement changeant d’avant, de pendant et d’après crise par rapport à son niveau en périodes de non crise (Latinier, 2006). L’hétérogénéité de la structure économique des pays, à la source de fluctuations différenciées des variables, implique d’inclure des filtres nécessaires à leur normalisation (Aziz, & al., 2000). A titre d’exemple, la variable sélectionnée dans le graphique 3 est un taux d’intérêt réel sur une période de 18 mois avant et de 18 mois après une crise de change (Dehove, 2003). La ligne horizontale correspond à la moyenne des périodes de non crises. Ici, le taux d’intérêt réel diminue avant la crise et reste en dessous de son niveau moyen un à deux mois avant et pendant la crise. Graphique 3. Exemple d’analyse par « event » sur un taux d’intérêt réel Source : Dehove, 2003. 29 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente La possibilité de prendre plusieurs variables, avec la modélisation multi-variée, pour anticiper le risque de crise est un avantage par rapport à la méthode précédente des « event » qui ne se focalise que sur une seule variable explicative. Le modèle multi-varié est une estimation de la probabilité d’une crise avec une (one-step) ou plusieurs (k-step) périodes avant sa réalisation, et ce à travers des modifications Logit ou Probit (Dehove, 2004). L’idée est d’appréhender une variable indépendante discrète, la variable de crise, avec d’autres variables indépendantes continues. Il s’agit d’expliquer un indicateur d’anticipation de crise par une série de variables indépendantes mais récurrentes de ce phénomène. Deux types de fonction sont généralement utilisés : la fonction de répartition de la loi normale centrée réduite pour le modèle probit (Eichengreen, & al., 1995) (Frankel, & al., 1996) et la fonction de répartition de la loi logistique pour le modèle logit (Eliasson, & al., 2001). Il n’y a donc finalement sur le fond que peu de différences entre le modèle probit et le modèle logit (Latinier, 2006). La méthodologie multi-variée permet de quantifier la probabilité d’occurrence d’une crise financière. Par exemple, un risque de dévaluation du taux de change peut être défini au regard de variables alors sélectionnées comme les réserves de devises, le déficit de la balance courante, le taux d’intérêt... La méthode des signaux ou des « indicateurs avancés » est l’une des méthodes les plus complètes de modélisation de l’anticipation des crises financières. Elle est aussi basée sur l’évolution de variables macroéconomiques et macro-financières avant la réalisation d’une crise. Lorsqu’une variable dépasse un seuil alors défini, un signal sera déclenché permettant d’anticiper la réalisation de la crise financière (Kaminsky, & al., 1996). L’idée est d’analyser le cycle des affaires afin de prédire un retournement de la conjoncture où des indices précurseurs au retournement seront capables de donner de bonnes informations. Il peut s’agir par exemple d’une définition binaire de la crise à travers un indice de pression sur le taux de change (Kaminsky, & al., 1998), (Cartapanis, & al., 1998) (Cartapanis, & al., 1999). Chaque indicateur va être analysé suivant un seuil fixé pour chacune de ces variables, le dépassement de ce seuil correspondant à un signal. Tout l’intérêt est de faire émerger un maximum de bons signaux (réalisation de la crise financière à la suite) et un minimum de 30 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente mauvais signaux (non réalisation de la crise financière). Les indicateurs sont alors classés suivant leur qualité de prédiction de la crise au regard de la fréquence de bons signaux émis. Certaines critiques quant à la plausibilité de cette méthode ont pu émerger, notamment dans l’anticipation de la crise des Subprimes (2008), où une analyse sur 107 pays a pu être menée à travers 60 causes potentielles de crises (Rose, & al., 2009). Les travaux de Kaminsky et Reinhart (1996) restent la référence pour ce type de méthode de détection de crises financières (tableau 2). Ils ont pu mettre en avant l’étude de 76 crises de change dans 20 pays (15 émergents et 5 développés) durant la période 1970-1995. Il en ressort une classification de seize variables macroéconomiques et macro-financières pertinentes dans la détermination avancée des crises financières sur une période de crise de 24 mois sélectionnée (tableau 3). Celle qui a le plus fort pouvoir prédictif est le taux de change réel. Tableau 2. Tableau de répartition des signaux des variables prédictives Crise (dans les 24 mois) Pas de crise (dans les 24 mois) Signal émis A B Pas de signal émis C D A+C = total des crises B+D = total des non crises Source : (Kaminsky, & al., 1998). A : nombre de mois pendant lesquels un indicateur envoie un bon signal B : nombre de mois pendant lesquels un indicateur envoie un mauvais signal (erreur type 1) C : nombre de mois pendant lesquels un indicateur manque d’envoyer un bon signal (erreur type 2) D : nombre de mois pendant lesquels un indicateur manque d’envoyer un mauvais signal L’optimalité d’un indicateur afin de prédire une crise est fonction de l’envoi de signaux tous les mois avant la réalisation de la crise sans pour autant en adresser lors de périodes de non crise (A>0, B=0, C=0 et D>0). Le ratio de qualité de chaque variable est le suivant : (A/(A+B)) 31 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Cette formule mesure la probabilité conditionnelle pour qu’une crise ne se réalise pas sans avoir pu émettre un signal. (B/(B+D)) Cette formule mesure la probabilité conditionnelle pour que des mauvais signaux soient envoyés par la variable (une non crise soit pris pour une crise) ; L’idée est alors de combiner ces deux signaux afin d’avoir un indicateur qui puisse émettre de bons signaux tout en évitant d’en émettre des mauvais. Il s’agit d’un indicateur appelé « bruit sur bons signaux » : (B/(B+D)) / (A/(A+C)). Lorsque le ratio est faible, le type d’erreur 2 est faiblement présent alors que le pouvoir prédictif d’une crise est fort. Ceci étant, ces signaux n’expliquent aucunement la façon dont la crise se réalise (le lien de cause à effet entre les variables). En outre, la définition des seuils d’alerte reste subjective (Dehove, 2003). Les techniques qui ont pu être mises en avant dans cette section sont largement utilisées dans la littérature économique dans le cadre de la détermination et de l’anticipation des crises financières (FMI, 1998). Le choix des variables devient déterminant pour définir la qualité de l’anticipation à travers leur pouvoir précurseur. Mais l’explication des raisons de la détérioration des variables n’est cependant pas donnée dans ce type d’interprétation (Eichengreen, & al., 1995) (Frankel, & al., 1996) (Bussière, & al., 2002). Cette problématique est d’autant plus importante au regard du postulat qui a pu être posé ici où il n’y a pas de dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers au sein des pays en crise pouvant expliquer son origine. L’utilisation de ces variables ne va pas permettre de prédire les tensions potentielles et rendre l’occurrence de ce style de crise d’autant plus inattendu. 32 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Tableau 3. Classification des variables suivant leur pouvoir prédictif Source : (Kaminsky, & al., 1996) 33 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente 3. Historique des crises financières : une récurrence continue Il peut convenir de décrire la fréquence des crises financières et notamment des crises de change au regard de leurs récurrences dans les économies. « Il n’y a pas d’économie de marché sans crises » (Kindleberger, 1978). De nombreux auteurs ont pu réaliser des études à partir des années 1800 jusqu’à aujourd’hui (Bordo, & al., 2001) (Boucher, 2002). Les crises semblent s’être intensifiées depuis ces dernières années, allant même jusqu’à être simultanées (on parle de crises jumelles). Le contexte actuel serait l’élément explicatif de l’augmentation de cette récurrence. L’amplification des échanges financiers notamment dans des pays peu développés et sans système de régulation important pourrait expliquer cette tendance (Brender, & al., 2001). L’ouverture des économies aux capitaux étrangers, le risque systémique, la faible rémunération des actifs dans les pays développés, l’abondance de la liquidité internationale, l’augmentation de l’endettement international, le risque d’instabilité des pays émergents, les effets de contagion et d’interdépendance, la volatilité des taux de change sont autant d’arguments venant conforter cette interprétation. Les études ont littéralement explosé sur le sujet. Kaminsky, Lizondo et Reinhart (1998) mettent en avant 28 études réalisées entre 1950 et 1998. Aujourd’hui, il y a en plus du double. L’abandon du système de Bretton Woods en 1976, qui offrait l’opportunité de fixer les rapports entre les devises internationales, en serait l’une des raisons (Bordo, & al., 2001). Bordo, Eichengreen, Klingebiel, Martinez-Peria (2001) ont réalisé une étude sur 56 pays (développés et en voie de développement) sur une période de 120 ans (graphique 4). Il y est question d’une plus forte probabilité d’avoir des crises sur la période 1973-1997 que sur les périodes 1880-1913 et 1945-1971. Il n’y a que la période 1919-1939 qui fait exception (dû à l’instabilité de l’entre deux guerres). Les crises financières seraient d’une fréquence de 6% durant la période de Bretton Woods alors qu’elles atteindraient plus de 10% entre 1973 et 1997. Il s’agit alors surtout de la réapparition des crises bancaires et du retour des crises jumelles. 34 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Graphique 4. Fréquence des crises financières L’analyse de Dehove (2003) (tableau 4) permet de mettre en parallèle la récurrence des crises financières avec quatre périodes différentes dans les règles d’émission de monnaie, de contrôle des capitaux et de la liberté bancaire issues des travaux de Bordo, Eichengreen, Klingebiel et Martinez-Peria, (Bordo, & al., 2001). Certains types de crises peuvent apparaitre pour ensuite disparaitre à chaque période sans pour autant témoigner d’une généralisation quant à la récurrence des crises financières. Lors de la période de l’étalon-or, les crises sont d’abord bancaires (2%) et faiblement de change (1%) ainsi que jumelles (1%). La période de l’entre-deux-guerres est sujette à de nombreuses crises de toutes natures : crises de change (5%), crises bancaires (5%) et crises jumelles (5%). Pendant les accords de Bretton Woods, les crises bancaires disparaissent totalement mais les crises de changes restent nombreuses (7%). La période des 30 années suivantes, l’après Bretton Woods, se caractérise par un retour aux crises bancaires (2%) et l’apparition des crises jumelles (2%) tout en gardant un taux de crises de change élevé (5%). 35 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Tableau 4. Fréquence par période de régulation internationale divergente Source : (Dehove, 2003) Les signes (-) et (+) informent de l’intensité de la relation entre les crises et les périodes. Le retour des crises bancaires au regard de la libéralisation des systèmes bancaires nationaux peut être interprété comme une relation d’interdépendance entre la régulation bancaire et les crises dans ce même secteur. Quant aux crises de change, elles n’apparaissent nullement dépendre d’un cadre d’analyse spécifique plutôt qu’une autre. La récurrence des crises financières ne semble pas plus importante depuis les 30 dernières années. L’analyse de Stone et Weeks (2001) confirme cette interprétation où, d’après une étude sur 49 pays, le nombre de crises financières n’a pas plus augmenté (graphique 5). Il y a surtout une augmentation des crises jumelles durant cette période. Graphique 5. Fréquence des crises sur une période plus récente Source : (Stone, & al., 2001) 36 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente La poursuite de l’analyse de la récurrence des crises financières lors de l’après Bretton Woods met en avant dans la littérature une plus grande vulnérabilité vis-à-vis des pays en voie de développement (Bordo, & al., 2001), (Dehove, 2003), (Stone, & al., 2001). Le graphique 6 montre l’Afrique avec une probabilité d’occurrence de crise moyenne d’une année sur deux contre l’Amérique Latine une année sur cinq, suivie de près par l’Asie et le Moyen-Orient. Les pays développés restent largement à l’écart au regard des pays en voie de développement avec en moyenne une crise par décennie (Stone, & al., 2001). Graphique 6. Fréquence des crises par région Source : (Stone, & al., 2001) Quant au graphique 7, les crises dans les pays émergents y sont deux fois plus importantes durant la période 1973-1997 que durant les périodes 1919-1939 et 1945-1971 ainsi que cinq fois plus importantes durant la période de l’étalon-or : de 1880 à 1913. 37 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Graphique 7. Fréquence des crises dans les pays émergents par période Source : (Bordo, & al., 2001) probabilité de crise en % par an La différenciation de l’occurrence des crises financières entre les pays développés et les émergents s’interprète par l’insertion plus tardive de ces derniers dans la sphère financière internationale. Quant à la mise en parallèle du contrôle des capitaux et du contrôle bancaire au regard de l’historique des crises financières, elle ne semble pas apporter de réponse. Il est difficile d’y voir une tendance historique ni dans un sens (stabilisation progressive des marchés mise en avant par la théorie de l’efficience des marchés) ni dans l’autre (la libéralisation et la financiarisation des économies). Pourtant, les crises de change apparaissent toujours importantes quel que soit la période analysée. Ces deux caractéristiques, vulnérabilités des pays émergents couplées aux crises de change, dans un contexte de libéralisation et d’intégration forte des économies internationales, mettent en avant des spécificités qu’il faudra expliquer. 38 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Conclusion intermédiaire Le présent chapitre a permis de décrire la notion de crise afin de retracer la dynamique et l’amplification de ce phénomène. Il y est question de rupture nécessaire afin d’adapter l’individu ou la société aux nouvelles contraintes auxquelles ils n’ont su se préparer. Dans le cadre spécifique de la finance, la fluctuation du prix des actifs, lors d’un retournement de conjoncture, est à l’origine de déséquilibres. Mais le marché financier n’en sera pas plus fort s’il n’a pas été capable de trouver les adaptations nécessaires à ces nouvelles tensions qui pourront revenir prochainement. Cet aspect est important puisqu’il est déjà équivoque au regard de notre problématique. Comment permettre à des marchés financiers, et plus spécifiquement dans les pays en voie de développement, d’apporter des éléments de réponses à des tensions pouvant être à l’origine d’une crise si elles ne sont pas dues à des vulnérabilités qui leurs sont propres ? La véritable question qui se pose, à partir du moment où il devient pertinent de prendre en compte ces caractéristiques, est de savoir si un pays devenant vulnérable au regard de l’incapacité de ses partenaires à apporter des solutions efficaces peut intervenir pour tenter de se protéger ? La quantification du processus de détermination de crise afin d’anticiper d’éventuelles tensions pose le même genre de questionnement. Les méthodologies adoptées reposent sur l’obtention du différentiel de fluctuation de variables déterminantes par un comportement changeant d’avant, de pendant et d’après crise. Mais ces indices ne peuvent être définis de précurseurs que pour le retournement de la conjoncture du pays et nullement vis-à-vis d’effets de contagion internationaux. Elles n’ont aucun pouvoir dans le cadre de notre postulat de non vulnérabilité apparente des fondamentaux macroéconomiques et macrofinanciers propres au pays. Ces techniques d’analyse apparaissent pertinentes si l’on suppose que la crise est le fruit d’une dégradation interne dont des signes précurseurs pourront témoigner de l’occurrence. Se pose de nouveau la question des effets de contagion pouvant rendre vulnérable le pays, à l’origine d’une crise potentielle, à un choc externe. L’analyse a mis en avant la récurrence historique des crises financières sans pour autant témoigner de faits spécifiques importants au regard de la mondialisation et de la globalisation de la sphère financière récente. Pourtant, deux points importants sont à mettre 39 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente en évidence : les crises de change sont toujours présentes à l’ensemble des périodes et les pays émergents sont a priori plus vulnérables que les pays développés. La poursuite de l’étude se devra d’en expliquer les raisons. Le chapitre suivant aura pour ambition d’illustrer le contexte financier actuel pour déterminer de nouveaux éléments déterminants de la vulnérabilité des régimes de change au sein des pays en voie de développement. Une attention particulière sera évidemment orientée vers les notions d’interdépendance et d’effets de contagion au regard de leur rôle de plus en plus important de par la libéralisation financière internationale. 40 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Chapitre 2 La vulnérabilité des régimes de change face aux tensions financières internationales. Introduction intermédiaire La finance fait partie des secteurs qui ont été fortement impactés par la dynamique de libéralisation et d’intégration (diminution des entraves aux mouvements de capitaux et rémunération identique du risque sur différents territoires). Ce processus a été une opportunité pour les agents économiques internationaux afin d’opérer des arbitrages entre les places financières. Il s’agissait avant tout pour les pays en voie de développement de financer leurs besoins en capitaux afin d’amorcer une dynamique de rattrapage économique. Ces caractéristiques ont induit une situation d’interdépendance entre les économies où l’instabilité qui en résulte va amplifier les phénomènes de contagion. La description des effets de contagion ne doit pas pour autant occulter la remise en cause du postulat qui leur est attribué : ils prennent pour explication une vulnérabilité apparente justifiant la déstabilisation de l’économie. S’il peut s’avérer que des pays avec de bons fondamentaux peuvent entrer en crise sans témoigner de vulnérabilités propres, la question de la régulation des flux financiers au niveau supranational va se poser véritablement. La nécessité de stabiliser le risque de dépréciation monétaire, afin de rendre attractif les pays en voie de développement, les a conduit à ancrer leur taux de change dans un contexte de libéralisation des flux de capitaux. Pourtant, ce n’est pas un hasard si les trois générations de modélisation de crises de change se font dans le cadre d’un ancrage fixe. Une crise de change se matérialise par la fuite généralisée de capitaux ne permettant plus à l’ancrage d’être viable au regard du déficit apparaissant pourtant normal de la balance courante lors d’un processus de rattrapage économique. Pourtant, la fuite généralisée des capitaux, symptomatique de ce phénomène, est le fruit d’une multitude de variables qu’il devient difficile d’interpréter. A la moindre tension constatée ou anticipée, les agents économiques peuvent choisir de rapatrier leurs capitaux. 41 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Il convient tout d’abord de présenter le nouveau contexte financier international afin de mettre en évidence l’origine des nouvelles vulnérabilités de ces économies dans le cadre d’une crise de change. Il s’agira alors de s’attarder sur les ancrages fixes afin d’en expliquer la forte popularité. Les modélisations de première, deuxième et troisième générations seront présentées pour expliquer les raisons historiques de l’occurrence de ces phénomènes. Mais au regard de la problématique de thèse, et en appui de faits empiriques récents (Corée du Sud, Brésil et plus spécifiquement PECO), les nombreuses limites obligeront à une contextualisation des modélisations, notamment de première génération. 42 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente 1. Les nouveaux éléments du contexte financier international La finance fait partie des secteurs qui ont largement été propulsés dans l’ère de la globalisation. On parle même de « globalisation financière » (Aglietta, 2000) avec des mutations profondes qui ont pu toucher son fonctionnement dans l’ensemble des pays. A partir du moment où il a été possible de réaliser des transactions financières entre différents territoires, une autre caractéristique de la finance moderne a pu apparaitre : l’intégration des marchés financiers nationaux au marché financier international. « Le processus de globalisation désigne le mouvement historique d’ouverture des marchés de capitaux. A la limite, la globalisation est parfaite lorsque toutes les entraves aux mouvements de capitaux ont disparu. Quant à lui, l’état d’intégration désigne la situation dans laquelle tous les actifs appartements à la même classe de risque sont également rentables, indépendamment des marchés où ils sont émis. » (Pépin, 2004). La globalisation financière, qu’il peut convenir aussi d’appeler libéralisation financière, se caractérise par une allocation du capital non plus majoritairement par le système bancaire traditionnel mais principalement à travers les marchés financiers, impliquant une croissance économique différenciée tant dans sa dynamique que dans l’allocation des ressources. Il en a découlé trois bouleversements majeurs : une dérégulation des taux d’intérêt par les pouvoirs publics, une concurrence entre les différents canaux de financement et une ouverture du système financier sur le reste du monde (Allegret, & al., 2003). La nature du financement des firmes reflète cette tendance avec une forte augmentation de titres de créances négociables et des capitalisations boursières (tableau 5). « Il appartient déjà à l’histoire des faits économiques et financiers que les années 1980 furent la décennie de la déréglementation et de la libéralisation des marchés de capitaux, et surtout de leur internationalisation croissante. » (Goyeau, & al., 1999) 43 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Tableau 5. Capitalisation boursière sur les marchés d’actions Source : (Minda, 1997) Milliards de dollars Il faut néanmoins garder à l’esprit que les marchés financiers domestiques ne sont que progressivement devenus internationaux et non par un processus rapide et direct (Pépin, 2004). Ainsi, une déréglementation de l’activité financière par les pouvoirs publics n’est pas pour autant synonyme de contribution directe au système financier international. Il lui faut ensuite devenir attractif au regard des autres places financières (espérance de rentabilité plus forte, diversification du risque…). Le graphique 8 met en avant cette tendance internationale du processus de libéralisation des économies depuis les années 1970, que ce soit dans les pays développés (Allemagne, Canada, Danemark, Espagne, États-Unis, Finlande, France, Irlande, Italie, Japon, Norvège, Portugal, Royaume-Uni et Suède) ou dans les pays en voie de développement même si elle fût plus tardive pour eux (Argentine, Brésil, Chili, Colombie, Corée, Hong Kong, Indonésie, Malaisie, Mexique, Pérou, Philippines, Taïwan, Thaïlande et Venezuela). L’indice qui y est utilisé est issu de la libéralisation du compte de capital, du marché boursier et du secteur domestique financier. Graphique 8. Indice de libéralisation financière Source : (Kaminsky, & al., 2002) 44 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Quant au degré d’intégration financière d’un pays, il se mesure suivant l’existence ou non d’une prime de risque différenciées sur des actifs financiers de même nature cotés sur plusieurs places financières (Stulz, 1981) (Adler, & al., 1983) (Bordes, 1988) (Bourguinat, 1997) (Goyeau, & al., 1999) (Pépin, 2004). Si ces actifs avec le même niveau de risque ont le même rendement espéré, on peut parler de marchés intégrés. Alors que, s’ils n’ont pas les mêmes rentabilités espérées, on parle de marchés segmentés (Chen, & al., 1995) (Wheatley, 1988). « L’intégration financière internationale équivaut alors par définition à la réalisation absolue de la loi du prix unique du risque sur les marchés de capitaux internationaux. » (Goyeau, & al., 1999). Les investisseurs vont donc diversifier leurs actifs financiers au regard tant des risques communs que des risques spécifiques de chaque actif avec des stratégies de diversification géographique. « En revanche, si les marchés sont strictement segmentés, les investisseurs sont exposés seulement à des risques locaux. » (Arouri, 2006). Le processus de globalisation a offert l’opportunité aux agents économiques internationaux de faire des arbitrages entre les places financières internationales, à l’origine de l’intégration des marchés financiers. « Le passage d’une situation de marchés segmentés à une situation de marchés intégrés est désigné sous le terme de processus d’intégration financière » (Goyeau, & al., 1999). De nombreuses modélisations ont pu voir le jour afin de tester le degré d’intégration des marchés financiers. Les premières analyses réalisées mettent en avant seulement les deux situations extrêmes. Sur les modélisations à segmentation absolue, la rentabilité des actifs est déterminée par des sources locales de risques (Sharpe, 1964) (Lintner, 1965) (Black, 1972) (Merton, 1987). Sur les modélisations d’intégration parfaite des marchés financiers nationaux, il n’y a que les sources de risques internationaux qui sont sélectionnées (Harvey, 1991) (De Santis, & al., 1997) (De Santis, & al., 1998) (De Santis, & al., 2003). Dans la réalité, la situation est un peu plus mitigée. D’autres modélisations sont venues en complément depuis pour tenter d’inclure aussi bien la segmentation que l’intégration des marchés (Errunza, & al., 1985) (Black, 1974) (Stulz, 1981) (Hietala, 1989). Il en ressort que de nombreuses contraintes réglementaires et tarifaires ont pu disparaitre ces dernières années (on parle de barrières directes) afin de laisser place à une libéralisation 45 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente apparente des flux de capitaux (Bekaert, & al., 2000) (Henry, 2000). Mais dans la réalité, il existe encore des contraintes (on parle de barrières indirectes): risque de change, instabilité économique et monétaire, risque pays, asymétrie d’information… (Ahearne, & al., 2001 ) (Stock, & al., 2003 ) (Gérard, & al., 2003) (Hardouvelis, & al., 2006). La segmentation des marchés pourrait même trouver pour origine des facteurs d‘ordre institutionnel : contrôle des capitaux, traitement fiscal, coûts de transaction… (Arouri, 2006). Il existe une forte diversité de variables prises en compte (Bekaert, 1995). Arouri (Arouri, 2006) a pu en lister quelques-unes afin de refléter des facteurs locaux, globaux et de mesures synthétiques de risque (tableau 6). Pourtant, le coût supplémentaire de ces barrières, directes et indirectes, est supporté par les investisseurs internationaux. Lorsque ces coûts sont supérieurs aux gains attendus lors d’une diversification internationale, les investisseurs préfèrent conserver leur épargne sous forme d’actifs domestiques (Black, 1974) (Stulz, 1981) (Cooper, & al., 1994) (Cooper, & al., 2000) (Errunza, & al., 1985) (Errunza, & al., 1992). Tableau 6. Facteurs d’intégration Degré d’ouverture commerciale. Développement du marché boursier. Actifs étrangers. Actifs étrangers nets. Volatilité des taux de change. Inflation. Ecart des taux d’inflation. Taux d’intérêt court. Variation du taux d’intérêt court. Prime de terme. Ecart des taux d’intérêt. Croissance de la production industrielle. Ecart des taux de croissance. Déficit courant. Chômage. Volatilité des exportations. Taux d’intérêt mondial. Variation du taux d’intérêt mondial. Croissance de la production industrielle mondiale. Risque Pays. Source : (Arouri, 2006) 46 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Des études ont pu mettre en avant le bien fondé d’un développement financier pour permettre aux pays en voie de développement d’amplifier leur croissance économique (Levine, 1997). « Le développement financier favorise le développement économique en exerçant une action sur le commerce ou l’intensité des échanges, d’une part, et sur le volume et la qualité de l’investissement, d’autre part. » (Guillaumont Jeanneney, & al., 2006). Le développement financier s’est effectué en parallèle à la libéralisation financière qui devait permettre à ces pays de financer les besoins en capitaux nécessaires à la dynamique de rattrapage économique. L’épargne nationale en concurrence directe avec les capitaux étrangers devait faire diminuer fortement les taux d’intérêt. L’implication des agents économiques internationaux devait améliorer l’efficience des projets à travers l’adoption de leurs méthodes (nécessité de transparence, sélection de normes, gestion des projets…). Il s’agissait de permettre la régulation d’un déséquilibre entre épargne et investissement au niveau international où la rentabilité forte des pays émergents (la dynamique de rattrapage induit de nouveaux marchés à conquérir) attire les capitaux issus de l’épargne des pays développés moins rémunéré (leurs marchés sont déjà saturés). Il y a eu une relative réussite, notamment dans des pays comme la Corée du Sud et Taiwan (Shaw, 1973) (McKinnon, 1973). Puis, la libéralisation financière a entrainé des périodes de forte instabilité (Argentine et Turquie pour les plus médiatisés). Ainsi, certains auteurs (Allegret, & al., 2003) ont pu mettre en avant l’importance de la qualité de la régulation institutionnelle dans le degré d’instabilité induit par la libéralisation financière : un système financier efficace doit avoir un système légal fort pour faire respecter les contrats, un système judiciaire efficace, un système de droit à la propriété, un système comptable ; le tout pour favoriser l’efficience du système financier. La libéralisation financière des pays en voie de développement marque cependant une divergence forte avec les pays développés. Il y est question d’asymétrie et de déséquilibre où la libre fluctuation des capitaux y entraine des périodes d’excès, à la source de bulles spéculatives puis de fuites généralisées, rendant difficilement maitrisable toute construction d’une croissance équilibrée (Boyer, & al., 2004). Le graphique 9 permet d’illustrer la tendance plus récente de libéralisation des pays développés, au regard de leur compte de capital, du marché boursier et du secteur financier. La problématique qui se pose 47 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente véritablement concerne la capacité de ces pays à libéraliser, notamment les flux de leur compte de capital, alors que nombre d’entre eux sont sous ancrage fixe (FMI, 2009) « Par libéralisation du compte de capital, on entend, d’une manière générale, l’assouplissement des restrictions appliquées aux flux de capitaux franchissant la frontière d’un pays donné. Il en résulte normalement un plus haut degré d’intégration financière à l’économie mondiale sous forme d’entrées et de sorties de capitaux plus importantes. » (Ayhan, & al., 2004). Graphique 9. Libéralisation des pays en voie de développement Source : (Kaminsky, & al., 2008) 48 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente La possibilité de diversifier le risque, par l’accès à un marché financier international, permet de le réduire. Les agents économiques ont alors eu tendance à demander plus d’actifs risqués, faisant augmenter leur prix et diminuer leur rentabilité attendue (Errunza, & al., 1985) (Alexander, & al., 1987) (Pépin, 2004). Au regard du besoin en capitaux des pays émergents et de cette demande d’actifs risqués, se pose la question de la capacité de régulation de l’instabilité financière dans ces pays qui a eu tendance à s’intensifier (Bordo, & al., 2001) (Stone, & al., 2001) (Dehove, 2003). « L’instabilité financière signifie l’incapacité à définir un système commun de normes de conversion stables en amont des contrats. Elle se traduit par l’incohérence temporelle et spatiale des schémas d’anticipations, autrement dit par leur non-transitivité et leur non-récursivité. » (Léonard, 1995). Les agents économiques ont aujourd’hui la possibilité d’allouer librement leurs capitaux où ceux-ci sont cotés sur des marchés financiers afin de les rendre liquides. Mais la détermination du prix de ces actifs financiers est fonction de la confrontation de l’offre et de la demande qui peut varier fortement au regard d’un certain nombre de variables. « Les travaux récents sur le mimétisme et les anticipations auto-réalisatrices montrent comment l’instabilité financière peut ainsi parfaitement se développer de manière quasi autonome et récurrente, c'est-à-dire sans pour autant qu’elle puisse être justifiée par une instabilité première des fondamentaux. » (Léonard, 1995). Il est difficile de qualifier l’instabilité financière comme néfaste à l’activité économique et financière d’un pays. Elle apparait d’un côté comme un élément essentiel à la régulation du système financier international afin de l’adapter aux contraintes macroéconomiques et macro-financières de son époque. Dadas (Dadas, 1993) en décrit sa récente évolution à travers trois étapes : d’une régulation d’abord par l’inflation (1973-1982), il s’en est suivi une régulation par les primes de risque (1980-1984) puis par les taux de change, d’intérêt et de la valeur des actifs (depuis 1983-1985). Mais l’instabilité financière reste source de perte de richesse lorsqu’elle conduit à des phénomènes de crises (Boyer, & al., 2004) (FMI, 1998). Le tableau 7 illustre les pertes cumulées de PIB au regard de la nature des crises (de change, bancaire et jumelle). Il y apparait que les crises jumelles sont les plus graves avec une moyenne de 18.6% de pertes cumulées de PIB entre 1973 et 1997. 49 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Tableau 7. Évolution en longue période de la durée et de la profondeur des crises Source : (Boyer, & al., 2004) dans (Bordo, & al., 2001) Le tableau 8 liste, en fonction des différentes étapes de déréglementation nécessaires à la libéralisation du secteur financier, les aspects positifs souhaités mais aussi les conséquences indésirables à l’origine de l’instabilité du secteur. Tableau 8. Les effets de la déréglementation financière Source : (Boyer, & al., 2004) 50 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Il y apparait que la déréglementation financière est à l’origine d’une augmentation des flux financiers qu’il devient difficile de maîtriser (Artus, 1991). « Les mécanismes d’intégrationdéréglementation conjugués à la volatilité des taux ne font qu’exacerber l’instabilité financière et la font apparaitre comme inhérente au système financier international. » (Dadas, 1993). Le développement financier aborde une caractéristique forte au regard de notre problématique. Il semblerait qu’il se soit réalisé avec une augmentation de l’instabilité, et plus particulièrement dans les pays en voie de développement, que ce soit en Afrique Subsaharienne, en Afrique du Nord, en Amérique Centrale et Latine ainsi qu’en Asie (graphique 10). L’essor du secteur financier y est mesuré suivant la croissance du ratio de la masse monétaire ou des crédits bancaires au PIB de l’économie (Guillaumont Jeanneney, & al., 2006). Graphique 10. Evolution du ratio crédit/PIB et de son instabilité par période et par continent (1966-2000) 51 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente 52 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Périodes 1 (1966-1970) Période 2 (1971-1975) Période 3 (1976-1980) Période 4 (1981-1985) Période 5 (1986-1990) Période 6 (1991-1995) Période 7 (1996-2000). Les données sont en moyennes simple ; pour chaque pays, l’instabilité du ratio crédit/PIB est la moyenne par période de la valeur absolue du résidu issu de l’estimation de l’équation suivante : Xt=a+b*Xt1+c*t+€ où Xt représente le ratio crédit/PIB et représente la tendance. Source : (Guillaumont Jeanneney, & al., 2006) Ces illustrations (graphique 10) mettent clairement en évidence des trends haussiers du développement financier en parallèle de l’instabilité financière avec une augmentation de la tendance au cours des dernières périodes (1991-1995 et 1996-2000). Ce qui apparaît frappant, c’est la généralité du phénomène où aucun territoire n’est épargné. L’amplification des interactions financières dans un contexte de libéralisation des flux de capitaux peut être à la base de ce processus. La possibilité d’allouer librement les capitaux afin de les rendre liquides semble les rendre difficilement maîtrisables. Il convient d’en comprendre les raisons. 53 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente 2. La place prépondérante des effets de contagion dans l’environnement financier La globalisation et l’intégration des marchés financiers a induit un contexte d’interdépendance entre économies où l’instabilité va amplifier les phénomènes de contagion. « Les instabilités peuvent avoir soit une origine technique, soit une origine d’ordre conflictuel ou toute autre origine. Mais quel que soit leur origine, ces instabilités se répandent rapidement à tous les secteurs et imprègnent toutes les parties d’une société. » (Dadas, 1993). Cette libéralisation a aussi offert l’opportunité de maximiser ses profits à travers un endettement moins coûteux dans un territoire pour effectuer ensuite des investissements dans un territoire plus rémunérateur. « De manière générale, la libéralisation financière accomplie dans le contexte de la désinflation a considérablement élevé les rendements de l’épargne. (…) Sur le plan financier, cette pression les a conduits à recourir systématiquement à l’endettement pour élever les rendements de leurs fonds propres grâce à l’effet de levier. » (Aglietta, 2000) Deux aspects spécifiques à la période récente de l’instabilité financière peuvent ici être mis en avant afin d’expliquer l’occurrence de crises financières. L’amplification des effets de contagion a induit une augmentation des vulnérabilités qui, à travers une structure de l’endettement international instable, ont pu impacter des pays sans pour autant témoigner d’une dégradation de leurs fondamentaux. « …la libéralisation des mouvements de capitaux s’est le plus souvent traduite par une forte augmentation des engagements liquides, notamment de l’endettement à court terme en devises par l’entremise des banques, ce qui a considérablement accentué la vulnérabilité des économies concernées à un changement dans l’état de confiance, à un choc dans l’évaluation des risques de la part des investisseurs internationaux » (Cartapanis, 2001). Il n’existe pas de définition communément admise de la contagion dans le contexte de tensions financières. On peut admettre qu’il s’agit d’une augmentation de la probabilité de l’occurrence d’une crise. « Dans son acception la plus large, le terme de « contagion » désigne le fait qu’une crise ou une attaque spéculative sur un marché accroît significativement la probabilité de tensions sur d’autres marchés, pouvant ainsi conduire à une succession de crises sur des marchés distincts. » (Cailleteau, & al., 1999). Même si une 54 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente partie de la littérature récente définie comme seule contagion la « shift contation » ou « contagion pure » (Forbes et Rigobon, 2000), il peut être intéressant au moins de présenter les deux approches toujours utilisées aujourd’hui. La première définition (les effets de contagion non contingents aux crises) suppose qu’il y a contagion dès qu’il y a influence mutuelle et que les voies de la contagion sont celles de l’interdépendance (Masson, 1998). On y distingue trois formes de contagion : la contagion issue d’une même série de causes communes (on parle de contagion « monsoonal »), la contagion issue de relations déjà existantes entre deux économies (on parle de contagion « spill-over ») et la contagion d’ordre subjectif (on parle de contagion « pure »). Il s’agit plutôt d’une situation où le sentiment et les anticipations des agents économiques seront prépondérants. Les deux premières formes de contagion (« monsoonal » et « spill-over ») sont qualifiées de « fundamentals-based contagion » (Calvo, & al., 1996). La deuxième définition (les effets de contagion contingents aux crises) n’accepte l’idée de contagion seulement si elle est associée à une augmentation exceptionnelle et transitoire de l’intensité des interdépendances économiques pendant la crise (King, & al., 1990). On parle de « shift contagion » pour la définir (Forbes, & al., 2000). La littérature identifie six canaux potentiels de contagion (tableau 9) (Eichengreen, & al., 1996) (Kaminsky, & al., 2000) (Forbes, & al., 2001) (Dornbusch, & al., 2000) (Dehove, 2003) (Dehove, 2004). Tableau 9. Enumération des différents canaux de contagion Les différents effets de contagion : Canal des échanges commerciaux et des prix intérieurs (via la demande). Canal des taux d’intérêt dans un système de change fixe asymétrique. Canal de la liquidité dans un système interconnecté. Canal des interdépendances d’interprétation des informations et de la concurrence des fonds d’investissement. Canal des arbitrages entre les marchés nationaux et les risques pays. 55 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Le premier canal joue via la demande du commerce international à travers la rigidité des prix nominaux internes (Gerlach, & al., 1995). On peut supposer que la dévaluation du taux de change entraîne la diminution des prix à l’importation de son partenaire. Il s’en suit une diminution de la demande de monnaie domestique et une augmentation de la demande de devise du pays partenaire qui se voit alors confronté à une fuite de ses réserves de change pouvant conduire à des tensions. Il faut néanmoins insister sur le degré d’élasticité de la balance commerciale de ces pays pour envisager une telle dynamique. Il n’est pas certain que la diminution du prix à l’importation pour le partenaire se traduise automatiquement par une augmentation des importations commerciales. Cette approche a pu être testée avec de nombreux pays (Kaminsky, & al., 2000). Le deuxième canal joue via les taux d’intérêt dans un système de change fixe asymétrique. C'est-à-dire dans une économie « centre » où la monnaie du centre est la devise de référence et d’ancrage des partenaires à sa périphérie. Des tensions sur le pays « centre » peuvent le conduire à faire varier son taux d’intérêt, impactant alors l’ancrage des pays périphériques (Drazen, 1999). Ce canal sera réutilisé dans le cadre de l’analyse des PECO où ceux-ci ont ancré leur monnaie (officiellement ou non) à l’euro. Le troisième canal joue via une interconnexion des systèmes bancaires nationaux confrontés au risque de liquidité (Goldfajn, & al., 1996). Un système bancaire peut être en situation d’illiquidité induit par des difficultés internes à son territoire (incapacité à se refinancer, augmentation des défaillances, pertes induites par un endettement en devises étrangères…). Mais au regard de la configuration des institutions financières qui s’endettent et se prêtent entre elles sur les marchés financiers internationaux, la défaillance d’une structure se répercute aussi sur ses partenaires étrangers, contaminant alors les autres systèmes bancaires. Le quatrième canal joue via l’interdépendance des informations du marché international et du comportement des fonds d’investissement où l’information va circuler d’un marché à un autre, à l’origine de comportements mimétiques (Schiller, 1999) voire d’effets de résonnance (Masson, 1998). L’explication a pu être donnée quant aux raisons de ce comportement. La globalisation et l’intégration du marché financier international ont 56 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente impliqué une uniformatisation des méthodes de gestion de portefeuilles (Aglietta, 2001). Les effets induits vont porter par exemple sur la concurrence entre les fonds d’investissements dont l’attractivité dépend principalement de leur rentabilité. A partir du moment où des tensions commencent à se matérialiser (effets spéculatifs par exemple), les fonds ne vont pas se retirer tant que le marché n’a pas répercuté ces tensions, et ce au risque d’obtenir un rendement moins élevé que ceux de leurs concurrents (Caplin, & al., 1995). Le cinquième et dernier canal joue via les arbitrages des investisseurs sur les marchés financiers en fonction de leurs estimations du risque-pays (Kodres, & al., 1999). La stratégie adoptée en termes de diversification des placements repose souvent sur la détermination de groupes de pays possédant de fortes similitudes (économiques, financières, structurelles…) laissant à croire qu’ils seront impactés indifféremment lors d’un choc. Cependant, la défaillance d’un pays va induire le rapatriement des capitaux alors investis dans l’ensemble des pays de ce même groupe. L’ensemble de ces contributions peut être regroupé dans un tableau afin d’en clarifier les éléments (tableau 10). Tableau 10. Présentation de toutes les formes de contagion La contagion par les fondamentaux (choc commun ou choc idiosyncrasie) Source : (Dehove, 2003) issu de (Dornbusch, & al., 2000) 57 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente La contagion par les changements institutionnels Source : (Dehove, 2003) issu de (Dornbusch, & al., 2000) Comportement des investisseurs Source : (Dehove, 2003) issu de (Dornbusch, & al., 2000) La description des effets de contagion ne doit pas pour autant occulter la remise en cause du postulat qui leur est attribué. Ces effets de contagion prennent pour explication une vulnérabilité apparente justifiant la déstabilisation d’une économie. « Si la contagion financière aide à expliquer la fréquence accrue des crises, celles-ci ne frappent pas au hasard pour autant. Elles sanctionnent plutôt les faiblesses des données économiques fondamentales, et notamment la fragilité de la position extérieure et les carences du système financier, y compris lorsqu’elles découlent de l’accumulation excessive d’engagements extérieurs à court terme. » (FMI, 1999). Une liste de variables (tableau 11), sans vocation à être objective, est présentée afin de décrire les vulnérabilités potentielles pouvant justifier et amplifier un effet de contagion. Il y est question d’indicateurs cohérents d’interdépendances économiques (ratio déficit des transactions courantes/PIB, croissance du PIB, taux de chômage, croissance implicite des 58 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente marchés d’exportation après la crise), d’interdépendances financières (ratio dette extérieure à court terme/dette extérieure totale, ratio dette extérieure à court terme/réserves et créancier communs) mais aussi et surtout de la capacité à réguler les tensions propres au territoire (taux d’intérêt réel et croissance du crédit intérieur réel) et celles en confrontation avec les reste du monde (appréciation du taux de change effectif réel, ratio M2/réserves, appréciation implicite du taux de change réel après la crise). Tableau 11. Caractéristiques des pays vulnérables aux contagions Appréciation du taux de change effectif réel. Ratio déficit des transactions courantes/PIB. Ratio dette extérieure à court terme/dette extérieure total. Ratio dette extérieure à court terme/réserves. Ratio M2/réserves. Taux d’intérêt réel. Croissance du PIB. Taux de chômage. Croissance du crédit intérieur réel. Appréciation implicite du taux de change réel après la crise. Croissance implicite des marchés d’exportation après la crise. Créancier communs. Source : (FMI, 1999). Il apparait évident que les effets de contagion sont un sujet délicat puisqu’ils posent la question de la régulation au niveau supranational. De nombreuses études ont travaillé sur les relations de dépendances internationales, notamment vis-à-vis de l’impact des prêts bancaires au sein des pays émergents (Jeanneau & Micu, 2002). Mais s’il peut s’avérer que des pays avec de bons fondamentaux peuvent entrer en crise sans témoigner de vulnérabilités, la libéralisation financière internationale induit alors d’avoir en parallèle une régulation internationale. « Si en effet des économies sont renversées par des crises financières dont les causes leur sont totalement extérieures (…). Elle constitue donc un volet important de la réflexion sur l’architecture financière internationale et sur la supervision des marchés, au cœur de la question de la volatilité des marchés de capitaux internationaux. » (Dehove, 2003). 59 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente 3. Des stratégies d’ancrage du taux de change par nature source de vulnérabilité Lorsque l’on parle de crise de change, en réalité, il s’agit d’une crise de la balance des paiements. Ce sont les échanges entre un pays et le reste du monde qui sont à l’origine des tensions, soit par les variations du taux de change, soit par les variations de réserves de devises. La sélection de ces deux variables se justifie par la diversité des ancrages (fixe, semifixe et flottant). En changes fixes, ce sont les réserves qui vont fortement varier. En changes flexibles, il y a variation de la parité de la monnaie et les réserves restent stables. Pour les pays étant dans des régimes de flottement administré, la crise de change se matérialise par la variation conjointe de ces deux indicateurs. Ainsi, la détermination des causes d’une crise de change se fait en expliquant les raisons de la variation de ces deux indicateurs (Duchêne, & al., 2006). La littérature propose de nombreuses interprétations à travers le dépassement de seuils fixés à l’avance. Afin de matérialiser la détermination des crises de change, des formulations ont été proposées. Les premières se cantonnent seulement à la variation du taux de change sans prendre en compte celles des réserves. L’idée est de supposer que l’intervention du gouvernement à travers ses réserves de devises, ne permettant pas à l’attaque spéculative de se réaliser, ne peut être considérée comme une crise puisqu’elle a pu être évitée (Frankel, & al., 1996). La quantification d’une crise peut se caractériser par le constat d’une dépréciation annuelle excédant plus de 25% du taux de change nominal vis-à-vis de la monnaie internationale de référence (le dollar en l’occurrence) sous condition qu’il n’y ait pas eu de crise les deux années précédentes ou bien la dépréciation dépasse au moins 10% la variation du taux de change de l’année précédente (Frankel, & al., 1996). Le second seuil de 10% par rapport à l’année précédente peut être mis en place pour pallier l’instabilité possible du taux de change d’une économie en difficulté induite par des taux d’inflation importants. Une seconde approche consiste à repérer une dépréciation du taux de change de 25%, avec au moins le doublement du taux de dépréciation par rapport à l’année suivante avec un taux de dépréciation de l’année précédente inférieure à 40%. L’objectif est là encore de ne pas comptabiliser les fluctuations induites dans les périodes de forte inflation (Milesi-Ferretti, & 60 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente al., 1998). Il peut aussi s’agir d’un taux de dépréciation d’au moins 15%, d’une augmentation du taux de dépréciation d’au moins 10% par rapport à l’année précédente avec un taux de dépréciation de l’année précédente inférieure à 10% (Milesi-Ferretti, & al., 1998). De même, on pourra repérer un taux de dépréciation d’au moins 15%, une augmentation du taux de dépréciation d’au moins 10% par rapport à l’année précédente et un taux de dépréciation de l’année précédente inférieure à 10% avec un taux de change « péggé » l’année avant la crise (Milesi-Ferretti, & al., 1998). Tableau 12. Fréquence des crises de change d’après des méthodologies différentes CRISE1 : Dépréciation de 25%, au moins 10% plus haut que l’année précédente. CRISE2 : Dépréciation de 25%, au moins 10% plus haut que l’année précédente, avec cette dernière inférieure à 40%. CRISE3 : Dépréciation de 15%, au moins 10% plus haut que l’année précédente, avec cette dernière inférieur à 10%. CRISE4 : Même que CRISE3 au moins 10% plus haut que l’année précédente. Fenêtre : Exclusion des crises se produisant même période de 3 ans d’une autre crise. Issue des travaux de Milesi-Ferretti et Razin (1998) Source : (Dehove, 2003) 61 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Le tableau 12 permet d’illustrer la fréquence des crises de change au regard de l’indicateur sélectionné (Dehove, 2003). On peut voir que les résultats sont fortement divergents à partir du moment où l’on adopte une méthodologie plutôt qu’une autre. La fréquence pouvant aller de 168 (crise 2 sans fenêtre) à 119 (crise 4 avec fenêtre) sur le total des crises de change. Cette divergence est la même que les distributions soient géographiques ou temporelles. D’autres méthodes complémentaires ont été testées afin d’y déterminer l’ensemble des tensions. A partir de la construction d’un indice composite de pression spéculative, plusieurs variables y seront associées. Une crise de change avec un ancrage flexible se matérialise par une fluctuation de son taux. Alors qu’une attaque spéculative sur un taux de change fixe se concrétise par une fluctuation des réserves de devises mais aussi par l’appréciation du taux d’intérêt manipulé par les autorités publiques afin de rendre de nouveau attractif le territoire. L’indice composite de pression spéculative a pour ambition de prendre en compte toutes les attaques, qu’elles aient échouées ou non et pour tous les régimes de change (fixe, flexible et semi-flexible). On peut prendre comme exemple la variation du taux de change et des réserves de devises (Sachs, & al., 1996) (Berg, & al., 1999) (Wyplosz, 2001), la variation du taux de change, des réserves de devises ainsi que la variation du taux d’intérêt (Eichengreen, & al., 1995) (Eichengreen, & al., 1996) (Eichengreen, & al., 1996) puis la variation du taux de change réel effectif et les réserves de devises (Cartapanis, & al., 1998) (Cartapanis, & al., 1999). La formulation proposée par Dehove (Dehove, 2003) est issue des travaux d’Eichengreen (Eichengreen, & al., 1995) (Eichengreen, & al., 1996) (Eichengreen, & al., 1996). IND : indicateur de pression spéculative e : taux de change par rapport à un pays de référence Di : écart de taux d’intérêt par rapport au pays de référence D : écart de variation du ratio réserves M1 par rapport au pays de référence Les indices α, β et 𝛄 sont définis de façon à ce que la volatilité des trois composantes soit égale 62 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Le principe est de déterminer des périodes de crises de celles de non crises en fonction du dépassement de la moyenne de l’écart-type de l’ensemble des périodes avec la condition qu’une période au minimum sépare deux crises successives. Les différentes pressions qui peuvent se matérialiser sur le taux de change sont décrites dans le tableau 13. On peut y voir des pressions divergentes dans le temps (1971-1999) entre pays et indifféremment qu’ils soient développés ou en voie de développement. Source : (Wyplosz, 2001) 63 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente L’idéal pour éviter une crise de change est de contenir sa dépréciation (en change fixe, flexible voire semi-flexible). Il faut alors retourner la tendance issue de l’effet spéculatif. Il y a la possibilité pour la Banque Centrale de vendre ses réserves de devises afin d’acheter sa monnaie (mise à disposition sur le marché international de plus de devises et diminution de la monnaie domestique). Plus celles-ci sont importantes, plus la Banque Centrale sera à même d’intervenir et d’influencer la parité. Il y a aussi la possibilité pour le gouvernement de contracter des dettes en devises afin de les mettre à disposition à la Banque Centrale. Les pouvoirs publics peuvent aussi choisir d’agir sur les taux d’intérêt afin de les faire augmenter, source d’attractivité pour les capitaux étrangers (une augmentation des taux d’intérêt est synonyme d’augmentation de la rentabilité des placements effectués). Il s’agit ici d’un panel d’outils de lutte de la part du gouvernement et/ou de la Banque Centrale contre une attaque spéculative (justifiée ou non). Mais il serait souhaitable d’avoir des éléments supplémentaires pour prédire et anticiper ce genre de tensions. Les variables permettant de définir la vulnérabilité des taux de change s’avèrent relativement nombreuses. Les travaux de Kaminsky ont tenté de les énumérer (Kaminsky, & al., 1998). Il en ressort 103 (tableau 14). Il s’agit alors de présenter ces variables afin d’exposer les difficultés de prévision des crises de change. Il ne s’agit pas que de la qualité des fondamentaux mais surtout de la « notion de zone de turbulence ». Il apparait évident que les fondamentaux sont multiples dans la détermination d’une crise de change. Ceux-ci ne sont ainsi plus seulement issus de déséquilibres monétaires potentiels pouvant induire des pressions sur la balance des paiements. Il y a aussi des facteurs sociaux (taux de chômage, volonté politique, coût d’endettement des ménages…) et microéconomiques (situation des intermédiaires financiers, régulation prudentielle du secteur bancaire…). La mise en parallèle des effets d’anticipation des investisseurs internationaux complique la tâche. « De même, l'ensemble des fondamentaux recensés dans les différents modèles, fondamentaux dont l'évolution est susceptible de modifier les anticipations des opérateurs et de provoquer la crise, n'a cessé de s'agrandir, traduisant la difficulté à cerner les facteurs pertinents du « risque pays » (Brana, & al., 2001). 64 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Tableau 14. Liste des indicateurs potentiels dans le cadre de crises de change 65 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Source : (Kaminsky, & al., 1998) 66 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente L’intervention des pouvoirs publics, lors de la détérioration de la balance des paiements, n’est que l’étape finale à la tentative de palier les pressions spéculatives. Il faut s’intéresser à l’origine du mouvement de fuite des capitaux pour tenter de définir des anticipations viables. Mais ces caractéristiques sont véritablement un défi. La libéralisation des flux afin d’intégrer le marché financier international apparaît peu compatible avec la volonté de stabiliser, voire d’ancrer, un taux de change au regard de la multitude des variables tant internes qu’externes au pays ayant potentiellement une influence sur le déclenchement d’une fuite généralisée de capitaux. L’amplification des interdépendances entre économies, à l’origine de la libéralisation financière, induit des effets de contagion potentiellement plus importants, source d’augmentation des variables pouvant impacter la stabilité d’un taux de change. Se pose la question de la viabilité d’un taux de change stabilisé dans un contexte financier libéralisé. 67 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente 4. La contrainte du change fixe dans un contexte de tensions financières internationales Le choix de l’adoption d’un régime fixe se justifie pour de nombreux pays émergents par la nécessité d’obtenir des capitaux étrangers afin de pallier le manque d’épargne domestique pourtant indispensable à la dynamique de rattrapage économique. L’attractivité de ces territoires est souvent conditionnée par la stabilisation du risque de dépréciation monétaire. Ce choix est d’autant plus problématique que la valeur alors définie pour la monnaie ne peut être indéfiniment optimum par rapport à la situation économique du pays. Les évolutions tant internes qu’externes à ce territoire impliquent automatiquement une nécessité de réajustement de cette valeur d’ancrage (Obstfeld, & al., 1995). Comment devient-il possible de le réaliser sans pour autant être à la source d’effets de spéculation dans un contexte de libéralisation financière internationale ? Des solutions existent à priori : « (…) d’une part, les crawling pegs, système où les parités sont maintenues autour d’un taux de référence, qui luimême est dévalué régulièrement à un taux annoncé à l’avance (…). D’autre part, il faut aussi inclure les taux de change fixes de facto annoncés comme des changes flottants. » (Coudert, 2004). L’assurance d’un ancrage fixe à court terme apparait comme une bombe à retardement à moyen terme. Le FMI étant même allé jusqu’à le déconseiller pour privilégier des changes flottants avec cible d’inflation (Coudert, 2004). La libéralisation des flux de capitaux a induit la possibilité de les attirer mais aussi de les repousser rapidement. « (…) lorsqu’un abandon de la parité devient imminent, les détenteurs de monnaie nationale l’échangent contre de la monnaie étrangère pour contraindre les autorités monétaires à passer à un régime de taux de change flexibles. » (Artus, 1986). Des modélisations ont pu être mises en avant dans la littérature afin de témoigner du danger des taux de change fixes qui peuvent renforcer la pression spéculative (Chang, & al., 1998). Ce n’est pas un hasard si les trois générations de modélisation de crises de change se font dans le cadre d’ancrage fixe. Pourtant, une grande majorité de pays, qu’ils soient en voie de développement ou développés, choisit toujours les régimes fixes ou administrés. Le tableau 15 met en avant une évolution récente (avril 2008, avril 2009 et avril 2010) mais qui témoigne malgré tout d’une augmentation des taux de change par ancrage qualifiée de fixe (13.2% de « Hard Pegs » et 50.8 de « Soft Pegs »). 68 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Tableau 15. Énumération des taux de change par régime Source : FMI (pourcentage des membres du FMI) Cette classification a pu être faite auprès du FMI où chaque pays informait de la nature de son ancrage jusqu’en 1999 où cette liste est définie comme des régimes dits « de jure ». De nombreux écarts existaient entre les déclarations des pays et la réalité sur les mouvements de taux de change. Des pays annonçaient des taux de change flottant alors qu’en réalité les pouvoirs publics intervenaient régulièrement pour encadrer leur monnaie dans une zone de valeur (Calvo, & al., 2002). Cette situation témoigne de la volonté des gouvernements de tenter de se protéger contre les spéculateurs. Il y a une véritable peur du flottement. Le FMI réalise donc des corrections suite aux déclarations au regard d’analyses statistiques supplémentaires (Calvo, & al., 2002), (Levy-Yeyati, & al., 2000), (Levy-Yeyati, & al., 2003) (Bénassy-Quéré, & al., 2002), (Reinhart, & al., 2002). Le détail de la nature de ces ancrages (tableau 16) met en avant la prédominance du dollar US (50 pays sous ancrage), de l’euro (28 pays sous ancrage) et du composite (15 pays). 69 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Tableau 16. Devises internationales de référence dans la nature des régimes de change Source : FMI La capacité de régulation d’un choc externe n’est pourtant pas la même lorsque l’on se trouve en régime flottant ou fixe, du moins théoriquement (Coudert, 2004). Lors d’un choc nominal, à travers des tensions sur l’offre de monnaie par exemple, l’ancrage fixe impose une discipline qui va permettre de détourner les pressions alors que le taux de change flexible va le transmettre. Lors d’un choc réel, par une perte de productivité ou la baisse des termes de l’échange, l’absence de flexibilité dans le cas d’un change fixe n’offre aucune possibilité de regagner en compétitivité-prix si nécessaire. Cette impossibilité d’ajuster au 70 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente regard des chocs réels externes devient problématique quand on peut voir la forte volatilité des matières premières, les politiques monétaires des autres pays, les crises devenant internationales, la dépendance à ses concurrents… (Calvo, & al., 2003). Dans la pratique, il y a peu d’études qui ont pu mettre en avant une relation théorique avec des faits empiriques significatifs dans ce domaine (Coudert, 2004), mis à part quelques exceptions où l’analyse y est restreinte à un choc sur les termes de l’échange dans un contexte de change flexible (Edwards, & al., 2003). Un ancrage fixe impose une discipline monétaire à l’origine de la diminution empirique de l’inflation. Mais la masse monétaire dans un pays émergent, avec ancrage ou non, est globalement la même. Il s’agit alors d’une discipline monétaire qui joue plutôt un rôle favorable sur les anticipations des agents économiques au moins dans les pays émergents : l’ancrage apparait comme source de crédibilité (Rogoff, & al., 2003) (Ghosh, & al., 1997), (Levy-Yeyati, & al., 2001), (Rogoff, & al., 2003). Ainsi, de nombreuses études mettent en avant que les changes flottants seraient des facteurs d’amplification des phénomènes de crise, puisque ne parvenant pas à amortir les chocs réels (Hausmann, & al., 1999), (Dornbusch, 2001), (Calvo, & al., 2000) (Calvo, & al., 2002). Cette situation s’explique par « le péché originel », [terme employé par (Eichengreen, & al., 1999)] des pays en voie de développement, c'est-à-dire une dépendance importante aux capitaux étrangers, [termes repris dans les travaux de (Ennajar, & al., 2005)]. Il s’agit pour ces pays de l’impossibilité d’emprunter dans leur monnaie, qui apparait trop risquée pour les investisseurs internationaux, même s’ils mettent en place une rigueur monétaire forte. Ceux-ci doivent alors réguler au mieux leur stock de devises pour y remédier. Il y a aussi une intolérance à des niveaux de dettes jugés excessifs pour les pays émergents alors que ces mêmes niveaux sont tolérés dans les pays développés (Reinhart, & al., 2003). Pour toutes ces raisons, les pays émergents ne peuvent laisser leur taux de change flotter (Calvo, & al., 2000) (Calvo, & al., 2002). La globalisation des marchés financiers doit permettre, à travers la fluctuation du prix des actifs, d’allouer au mieux, facilement et rapidement le capital aux secteurs les plus dynamiques. La quasi-obligation, pour les pays en voie de développement, d’ancrer leur 71 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente régime de change afin d’attirer des capitaux étrangers nécessaires à l’amorçage de leur processus de rattrapage économique, apparait ici contradictoire mais surtout amplificatrice des risques d’occurrence de crises de change. A la moindre tension constatée ou anticipée, les agents économiques peuvent choisir de rapatrier leurs capitaux. Toute la difficulté est de déterminer la source qui a pu engendrer ces tensions. De nombreux fondamentaux ont pu rendre compte de l’influence qu’ils pouvaient exercer sur l’occurrence de ce phénomène (indicateurs macroéconomiques, macro-financiers, sociaux, politiques économiques, microéconomiques et micro-financiers…). La libéralisation financière, à l’origine de l’augmentation des interdépendances et donc des effets de contagion lors de tensions, ne fait qu’élargir les variables explicatives potentielles. 72 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente 5. Synthèse des différentes modélisations de crises de change La libéralisation des flux économiques et financiers induit des tensions sur les taux de change qu’il est d’autant plus difficile de prévoir qu’elles résultent des jeux d’anticipations des agents économiques internationaux. Ces tensions sont d’autant plus problématiques que les pays émergents sont dans l’obligation d’ancrer leur monnaie à des devises de référence. Même s’il est possible de comprendre la dynamique de crise en le déterminant, les explications quant à son occurrence sont singulièrement plus délicates. Des modélisations sont alors venues à la suite de crises pour les expliquer. Cependant, elles ne sont que des interprétations qui apparaissent dépassées dès que de nouveaux faits à l’origine de nouvelles crises apparaissent. Au regard de ces éléments, il est coutume de dire que la théorie est souvent en retard d’une crise (Cartapanis, 2002). La problématique a pour ambition de mettre en avant de nouveaux faits, à savoir la non dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers propres au pays, dans le cadre de l’occurrence d’une crise de change. Il convient donc de décrire chaque génération de modélisation pour ensuite les utiliser afin de les contextualiser au regard de notre postulat de départ. Les premiers travaux qui utilisent des mécanismes d’ajustement assimilables aux tensions dépendantes de l’ancrage d’un taux de change font référence aux modèles de stabilisation des prix des marchandises à travers l’intervention de politiques publiques (Salant, & al., 1978) (Salant, 1983). L’idée qui y est défendue repose sur des politiques de stabilisation des prix sujets à des attaques spéculatives dévastatrices. Les spéculateurs cherchent à acquérir des ressources épuisables si et seulement si ils anticipent une hausse des prix suffisamment rapide pour obtenir un taux de profit élevé. Lorsque le prix d’équilibre qui aurait prévalu sans intervention publique, « le shadow price » (Salant, & al., 1978), passe au-dessus de la cible du gouvernement, alors les spéculateurs vont acheter les marchandises d’autant plus que le gouvernement tente de stabiliser les prix. Les stocks du gouvernement vont alors diminuer. Les spéculateurs achètent les marchandises du gouvernement au prix qu’il a fixé en supposant qu’il ne peut pas l’assurer éternellement. Lorsqu’il va arrêter, les prix des marchandises vont alors augmenter, source de gains pour les spéculateurs. 73 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Tant que les prix sont au-dessus du niveau défini de l’intervention du gouvernement, les spéculateurs vendront ce qu’ils ont comme marchandises. Ils anticiperont qu’ils ne pourront pas réaliser de gains. Le gouvernement se retrouve seul à acquérir un large stock de marchandises pour ne pas voir les prix diminuer. Cela ne veut pas dire que toutes les politiques de stabilisation des prix seront des échecs. Il faut simplement que les prix fixés se rapprochent plus ou moins du prix d’équilibre, « le shadow price » (Salant, & al., 1978), sans intervention du gouvernement sur le marché. Ou éventuellement que le gouvernement puisse avoir des moyens importants pour intervenir et maintenir le prix fixé soit à travers des réserves en fortes quantités soit en ayant la possibilité de réglementer la spéculation sur le prix des marchandises. La dynamique de la régulation des prix sur un marché est possible lorsqu’on est dans un marché libéralisé où il est permis aux spéculateurs d’acheter et de vendre sans contraintes. Cependant, dans un contexte de libéralisation des capitaux avec un ancrage fixe du taux de change pour de nombreux pays en voie de développement, les pressions potentielles des spéculateurs ne peuvent que se renforcer. Ces deux caractéristiques apparaissent même contradictoires. Ainsi, le gouvernement a pour objectif de fixer le prix de sa monnaie. Sa capacité d’intervention sera fonction des réserves qu’il possède. Lorsque le gouvernement n’a plus les moyens d’intervenir, l’ancrage casse et la crise se réalise (dépréciation du prix de la monnaie domestique impactant l’ensemble du pays). Les modélisations dites de première génération (Krugman, 1979) (Flood, & al., 1984) mettent en avant, à travers des faits empiriques (crises de change dans les pays d’Amérique Latine des années 1970-1980), l’occurrence de tensions financières (graphique 11). Les réserves de devises diminuent d’abord lentement, induit par une dégradation des fondamentaux monétaires, pour ensuite disparaitre totalement et rapidement lors de la fuite généralisée des capitaux qui va précipiter l’ancrage. « La crise est indissociable de l’apparition de déséquilibres persistants, sur le marché de la monnaie ou sur le plan budgétaire, qui entrent en conflit avec la contrainte d’un stock limité de réserves de change. » (Cartapanis, 2004). La perte de confiance, avant l’épuisement total des réserves, est à l’origine d’une attaque spéculative soudaine qui va réduire à néant la totalité des réserves alors restantes. 74 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente L’incompatibilité entre équilibre interne (dynamiser la croissance économique) et équilibre externe (ancrage du taux de change) met en avant des variables dites fondamentales dans la détection précoce de l’occurrence d’une crise : le niveau des réserves de change, le crédit intérieur et l’inflation anticipée (Krugman, 1979). Le niveau des réserves est révélateur de la croissance des crédits et de l’inflation anticipée permettant de définir la capacité du pays à sauvegarder son ancrage. Les déficits publics (Krugman, 1979) et les crédits accordés au secteur privé (Pesenti, & al., 2000) sont sources d’une création monétaire pouvant être trop importante et à l’origine de l’anticipation d’une forte inflation. Graphique 11. Variation des réserves de change en Amérique Latine Source : (Latinier, 2006) Flood et Garber (Flood, & al., 1984) vont mettre en parallèle la situation d’avant crise de celle d’après crise en y introduisant un prix d’équilibre du taux de change, le « shadow price » (Salant, 1983) : celui qui aurait prévalu si le gouvernement n’était pas intervenu. La dynamique de spéculation sur le change est la même que celle sur le prix des marchandises (Salant, & al., 1978) (Salant, 1983). Les agents économiques vont spéculer lorsqu’ils anticiperont une source de gains ayant pour origine la différence entre le prix du taux de change fixé par le gouvernement et le « shadow price », le prix d’équilibre. 75 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Même si le « shadow price » est difficile à définir, il est possible de réaliser des prévisions à travers la détermination d’un taux de change dit réel d’équilibre (Williamson, 1991) (Williamson, 1994) (Wren-Lewis, & al., 1998) (Williamson, 2000) (Drime, & al., 2005) (Carton, & al., 2005) (Carton, & al., 2006). Mais la détermination du timing devient problématique. Comment définir la période d’occurrence de la crise ? Les crises de change de première génération sont fonction de la dégradation des fondamentaux du pays (réserves de devises, croissance des crédits internes et inflation anticipée) (Krugman, 1979) mais aussi des anticipations des spéculateurs qui précipitent la crise ou non (on parle de comportements spéculatifs arbitraires) (Flood, & al., 1984). « L’abandon de la parité, ou la modification des taux pivots si l’on maintient une zone cible, est donc provoqué par l’attaque spéculative, mais serait intervenu, tôt ou tard, même en son absence. » (Cartapanis, 2004). Ici, les spéculateurs sont supposés avoir un comportement rationnel puisqu’ils vont précipiter une crise qui était inévitable. L’occurrence de nouvelles crises, notamment du SME en 1992-1993, va conduire à mettre en avant d’autres éléments dans la matérialisation de tensions sur le taux de change. Ces crises ont pu d’abord être interprétées comme des crises de première génération (Krugman, 1994) (Krugman, 1996) mais elles furent finalement qualifiées de crises de seconde génération (Obstfeld, 1994). Même si la dynamique reste la même, la fuite des capitaux à l’origine des pressions sur le taux de change dont les réserves de devises ne pourront pas suffire à assurer l’ancrage fixe, les variables qui vont influencer l’interprétation des agents économiques vont être différentes. L’article de Diamond et Dybvig (Diamond, & al., 1983) est l’un des premiers à introduire la notion de crise auto-réalisatrice mais vis-à-vis de crises financières apparaissant sous trois conditions : la dette de court terme excède les actifs de court terme, il n’existe pas de prêteur suffisamment important sur le marché privé pour couvrir l’ensemble de la dette de court terme existante et il n’y a pas de prêteur en dernier ressort. Sous toutes ces conditions, il apparait logique que les créanciers retirent leurs crédits si les autres font la même chose. Deux équilibres peuvent se matérialiser : soit les agents économiques ont confiance vis-à-vis des intermédiaires financiers, ce qui conduit à la pérennité du système bancaire. Soit ce n’est pas le cas et la défiance des intermédiaires financiers va induire un 76 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente « run » bancaire. Si on transpose cette approche aux crises de change, la dynamique peut en être la même. Obstfeld (Obstfeld, 1986) va mettre en avant qu’il ne s’agit pas d’un comportement irrationnel des spéculateurs mais d’un équilibre indéterminé vis-à-vis de la viabilité de l’ancrage du taux de change (le gouvernement, même s’il a les moyens d’intervenir, va-t-il le faire réellement pour sauvegarder son ancrage ?). Les effets d’anticipation dans la capacité ou non d’un gouvernement à défendre son ancrage s’expliquent par les conséquences potentiellement néfastes sur l’équilibre interne. Pour faire revenir les capitaux internationaux, nécessaires à la reconstitution des réserves de devises, la Banque Centrale doit augmenter son taux directeur (l’augmentation du taux d’intérêt est synonyme d’augmentation de la rentabilité au sein du pays). Mais c’est aussi une source d’augmentation du coût de l’endettement défavorable à l’activité du pays, source de chômage. Pour faire diminuer l’inflation interne induite par la sphère privée ou publique, la Banque Centrale se doit aussi d’augmenter les taux directeurs afin de faire diminuer l’octroi de crédits, ce qui est pourtant néfaste à l’activité du pays. La défense de l’ancrage du taux de change est ainsi politiquement délicate en termes électoraux. Même s’il est possible d’intervenir en empruntant des réserves, en augmentant les taux d’intérêt, en réduisant le besoin de financement, voire en instaurant un contrôle des changes, c’est l’élévation des coûts du maintien de l’ancrage qui devient déterminant. Les nouvelles variables qui entrent en jeu vont être celles qui seront directement impactées par les mesures de défense de l’ancrage sur l’activité économique du pays (tableau 17). Le marché sait que les pouvoirs publics adaptent leur politique au regard des contraintes économiques du pays (l’objectif d’un gouvernement est de dynamiser son économie sous contrainte de sa réélection). A travers cette forte relation d’interdépendance entre le gouvernement, la situation économique du pays et les spéculateurs, il y a alors apparition d’équilibres multiples (la réaction de l’un des acteurs induit un changement de comportement des autres) donnant lieu à des crises « auto-réalisatrices ». « On est donc en présence d’une configuration d’équilibre multiples et des crises auto-réalisatrices peuvent alors apparaitre. » (Cartapanis, 2004) 77 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Tableau 17. Liste non exhaustive d’indicateurs de vulnérabilités issus des modélisations de seconde génération Auteurs : (Obstfeld, 1994). Variables : Taux d’intérêt élevé. Chômage élevé. Croissance du PIB faible. Fragilité du système bancaire. Appréciation réelle de la monnaie. Dégradation du solde budgétaire. (Ozkan, & al., 1995). Contrôle des capitaux. Augmentation de la maturité des contrats de dettes. Hausse des coûts de sortie du régime de change. Volonté des décideurs politiques d’intervenir ou pas. (Obstfeld, 1996) Dette publiques. Dette des banques. Diminution de la production. Taux d’intérêt réels élevés. Effets de contagion à l’ensemble de l’économie. Augmentation du chômage. (Cartapanis, 2004) Taux de chômage élevé. Stock de dette publique et dette externe. Source : Recherche auteur Pour de nombreux travaux (Obstfeld, 1994) (Krugman, 1994) (Ozkan, & al., 1995) (Obstfeld, 1996) (Krugman, 1996) (Cartapanis, 2004), une crise de deuxième génération garde pour fondement de base une dégradation de la situation économique du pays (la pression des spéculateurs sur le gouvernement ne se fait pas sans raison). Pourtant, les fondamentaux macroéconomiques n’y apparaissent pas plus déterminants. « Si l’on intègre l’incertitude radicale et les surrections qui marquent la détermination des prix des actifs vers lesquels sont diversifiés les portefeuilles dans les pays émergents (actions, actifs immobiliers), les euphories spéculatives sont nécessairement à la merci d’un renversement d’opinion et, donc, d’une défiance généralisée que les facteurs macroéconomiques n’expliquent alors que très partiellement. » (Cartapanis, 2004). Une troisième et dernière génération de modélisation de crise a pu apparaitre dans le cadre de la crise asiatique en 1997-1998 (Eichengreen, & al., 1995) (Krugman, 2001) (Pesenti, & al., 2000). Cette nouvelle génération de modélisation n’est pas admise par tous (Flood, & al., 78 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente 1998) (Jeanne, 1999). Les interprétations quant à l’occurrence de la crise asiatique sont encore très partagées. Il s’agit pour certains d’une dégradation des fondamentaux macroéconomiques où la réaction politique ne fut pas optimale afin d’en réguler les pressions en plus d’effets de contagion importants (Corsetti, & al., 1999). Alors que d’autres y verront une crise d’illiquidité à l’origine de la fuite des capitaux (Radelet, & al., 1998). Les imperfections d’information sur les marchés financiers couplées à la fragilité du système bancaire expliquent l’occurrence de la crise bien plus que des vulnérabilités macroéconomiques. Le contexte fondamental est dégradé mais ce sont les déséquilibres bancaires qui vont provoquer le basculement de l’opinion et son extension sur le marché des changes (Cartapanis, 2002). Graphique 12. Taux de croissance du PIB (en %) des pays asiatiques 12 Malaisie 7 Indonesie 2 -3 Thailande -8 -13 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 2006 2008 2010 Corée du Sud Source : World Data Bank Graphique 13. Taux de croissance consommation finale (en %) des pays asiatiques 15 Malaisie 10 Indonesie 5 0 Thailande -5 -10 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 Source : World Data Bank 79 2004 2006 2008 2010 Corée du Sud Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Graphique 14. Taux d’inflation (en %) des pays asiatiques 30 Corée du Sud 25 20 Malaisie 15 10 Indonésie 5 0 Thailande -5 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 2006 2008 2010 Source : World Data Bank Graphique 15. Valeur des cours boursiers (en % du PIB) des pays asiatiques 225 Corée du Sud 175 Malaisie 125 75 Indonésie 25 Thailande -25 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 2006 2008 2010 Source : World Data Bank Graphique 16. Endettement public (en % du PIB) des pays asiatiques 80 Corée du Sud 70 60 50 Malaisie 40 30 Indonésie 20 10 0 Thailande 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 Source : World Data Bank et OCDE 80 2004 2006 2008 2010 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Si l’on procède à une mise en parallèle des deux générations de modélisation de crise précédentes, il en ressort que la quasi-totalité des pays asiatiques étaient considérés comme ayant des fondamentaux corrects (taux de croissance économique et consommation finale fortes, inflation et solde budgétaire contenus, valeurs des boursiers corrects) (graphiques 12, 13, 14, 15 et 16) et les gouvernements n’étaient pas en proie à des difficultés internes pouvant faire envisager un abandon des ancrages des taux de change (Cartapanis, & al., 1998) (Cartapanis, & al., 1999) (Cartapanis, & al., 2002) (Cartapanis, 2002). Les flux importants de capitaux étrangers ont augmenté de façon significative la liquidité interne aux pays puisqu’ils ont pu servir à alimenter les crédits domestiques. Il en est ressorti une augmentation des prêts non performants. Lors de la fuite des capitaux, le déficit courant qui était jugé soutenable dans le cadre d’un processus de rattrapage a mis sous pression l’ancrage du taux de change. L’endettement des banques nationales en devises étrangères, apparaissant sans risque au regard de l’ancrage et l’augmentation des prêts de plus en plus risqués, expliquent la défaillance du système bancaire. Celui-ci n’avait pu être supervisé de façon optimale afin de le limiter tant dans les risques qu’il prenait en s’endettant en devises à court terme que pour les prêts non performants qu’il a attribué. « Cette crise de liquidité bancaire, qui se trouve à l’origine de la crise de change, s’est ensuite transformée en crise de solvabilité bancaire dès lors que la défiance s’étendait, que la dépréciation du change augmentait la charge réelle de la dette et que les sorties de capitaux s’accéléraient. » (Cartapanis, 2004). Le concept de « crises jumelles » (Kaminsky, & al., 1996) peut qualifier ce genre de crise où les tensions bancaires et l’instabilité du taux de change n’ont fait que renforcer son ampleur. L’objectif externe (la défense de la parité de change qui nécessite des taux d’intérêt élevés) est entré en contradiction avec l’objectif interne (la préservation du système bancaire qui nécessite des taux d’intérêt faibles). « La crise asiatique n’est pas une crise de change conventionnelle et s’apparente à une crise financière profonde qui présente tous les ingrédients d’une crise systémique enchâssée dans les structures de la finance mondiale contemporaine. » (Cartapanis, 2004). 81 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente La crise asiatique n’étant pas similaire aux crises de première et deuxième générations, la notion de crise intergénérationnelle a pu être émise. En combinant les différents éléments, l’élargissement des fondamentaux s’est fait aux variables bancaires et financières (tableau 18) en parallèle à des effets auto-réalisateurs (Flood, & al., 1998). Certains vont alors centrer leur attention sur les conflits d’objectifs gouvernementaux durant cette crise à travers une approche définie de « escape clause » (Jeanne, 1999). Il en ressort de forts liens entre crises bancaires et crises de change dans la situation actuelle de libéralisation des marchés financiers. Tableau 18. Liste non exhaustive d’indicateurs financiers de vulnérabilités issus de modélisations de 3ème génération Auteurs : (Krugman, 2001) (Corsetti, & al., 1998). (Chang, & al., 1998) (Krugman, 2001) (Mishkin, 1998) (Mishkin, 1999) (Mishkin, 2000) (Stiglitz, 2000). Variables : Désajustements d’échéances dans les bilans bancaires. Chocs ponctuels sur les collatéraux (bulles). Crises d’illiquidité bancaires. Endettement excessif. L’aléa moral. Les créances internationales. La dégradation des bilans bancaires. Dégradation des bilans des entreprises. Les dettes extérieures à court terme sur réserves. (Schneider, & al., 2000) Bulles sur le prix des actifs. Source : Recherche auteur. La difficulté des crises de troisième génération réside dans l’incapacité pour le gouvernement d’arrêter l’hémorragie des fuites de réserves de change. Le système bancaire, déjà aux abois, ne pourrait supporter des taux d’intérêt plus élevés (risque de diminution de la demande de crédits, de l’augmentation des créances douteuses à travers la baisse de la croissance économique et de l’impossibilité de se refinancer à moindre coût pour essuyer les pertes). De plus, une crise bancaire impose au gouvernement d’intervenir pour renflouer les institutions financières afin de les recapitaliser au regard de l’augmentation des taux de défaut. Cette augmentation de l’endettement public est une source de création monétaire pouvant conduire à de l’inflation tout aussi néfaste à l’ancrage du taux de change. De plus, la 82 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Banque Centrale ne peut refinancer les banques afin de les aider avec des conditions plus favorables. Il y a là aussi une possible augmentation de la masse monétaire, source d’inflation future. Les différentes modélisations qui ont pu être présentées ici ont toutes des caractéristiques communes. Une crise de change se matérialise par la fuite généralisée de capitaux ne permettant plus à l’ancrage d’être viable au regard du déficit apparaissant pourtant normal de la balance courante lors d’un processus de rattrapage économique. C’est la modélisation de première génération qui avait pu mettre en avant pour la première fois cette dynamique. Les générations suivantes ne viendront que recontextualiser, par de nouvelles variables, des origines différentes de la fuite généralisée des capitaux. Mais même au regard de la diversité des modélisations, il y sera pourtant toujours question de la responsabilité du pays, à travers ses vulnérabilités propres, dans l’occurrence ou non d’une crise de change. Des faits empiriques nouveaux et récents confortant de plus en plus la problématique : faiblement pour la Corée du Sud en 1997/1998, beaucoup plus pour le Brésil en 1999/2002 et indéniablement pour les PECO en 2008. Ces exemples devront être modélisés afin d’y intégrer de nouvelles variables reflétant ces caractéristiques, à savoir une instabilité financière internationale forte et des effets de contagion prépondérants sans pour autant témoigner d’une dégradation de leurs fondamentaux macroéconomiques et macrofinanciers. 83 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente 6. Contextualisation de la problématique à travers des faits récents : focus sur la Corée du Sud, le Brésil et les PECO De récentes tensions à l’origine de mouvements de crises en Corée du Sud (1997/1998), au Brésil (1999/2002) et plus récemment dans les pays d’Europe Centrale et Orientale (2008) ont pu remettre partiellement en cause l’approche communément admise du paradigme dominant sur les crises financières. L’idée ici n’est pas d’apporter une nouvelle façon de concevoir une modélisation de crise mais plutôt de fournir des éléments supplémentaires pour recontextualiser les modélisations de première génération qui restent toujours pertinentes de par leur dynamique (fuite des capitaux mettant sous pression l’ancrage d’un taux de change fixe). Ces récents faits empiriques interrogent puisqu’ils confortent de plus en plus l’hypothèse de ce travail. La Corée du Sud a pu interpeller dans une certaine mesure quant à la qualité de ses fondamentaux macroéconomiques et macro-financières, même si elle détenait des variables dégradées en parallèle. Le Brésil est venu conforter ces propos par l’ampleur des tensions financières qu’il a pu subir durant une période relativement longue. Quant aux PECO, l’intégration à l’Union européenne en 2004 et 2007 puis celle en cours à la zone euro ont dessiné un environnement bien plus que propice à ce genre d’évènement. Il s’agit plutôt d’illustrer pour donner matière à réflexion dans la description de l’environnement de la problématique. La diversité des tensions sur les taux de change pousse à la modestie lorsque l’on peut y proposer des alternatives. « Les années quatrevingt-dix auront vu se multiplier les crises de change, constituées de brusques variations des taux de change, accompagnées de pertes massives de réserves en devises et se traduisant par une forte dévaluation ou par le flottement d’une monnaie, en situation d’ancrage, ou bien par une dépréciation violente et subite en situation de flottement impur. » (Cartapanis, 2004). La crise coréenne est souvent décrite comme le résultat d’une mauvaise gestion de sa libéralisation financière. « Un examen détaillé des causes de la crise asiatique, et du cas coréen en particulier, révèle que cette économie était sous tension en raison d’une stratégie non soutenable de croissance forte, financée par endettement, et du manque de contrôle et 84 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente de surveillance dans le secteur financier. » (Gongpil, 1998). Les indicateurs macroéconomiques traditionnels étaient pourtant relativement bons : croissance forte, peu de chômage, pas de déficit budgétaire public, … (Tableau 19). Cette crise s’est ainsi inscrite en opposition des modélisations dites de première génération. De plus, les modélisations de seconde génération n’ont pas apporté de réponses adéquates puisque les autorités locales n’ont pas subi de perte de crédibilité, notamment dans la fixité de l’ancrage du taux de change au dollar. Pourtant, les nouvelles variables reflétant les caractéristiques de la problématique, à savoir une instabilité financière internationale forte et des effets de contagion prépondérants, apparaissent déterminants dans l’occurrence de cette crise. L’instabilité financière internationale, lors de la fuite généralisée des capitaux, a induit des effets de contagion à travers la crise thaïlandaise à l’ensemble de l’Asie. La Corée du Sud n’a pas su apporter les éléments nécessaires afin de répondre à cette crise. L’analyse de la situation fait surtout ressortir des faiblesses trop importantes au sein du système financier national, le rendant fragile dans son rôle d’absorption des chocs causés par les mouvements de capitaux internationaux. Tableau 19. Principaux indicateurs économiques de la Corée du Sud (en %) 1991 1992 1993 Croissance du PIB 9.1 5.1 5.8 Exportations 11.8 11 11.3 Importations 19.2 5.1 6.7 Epargne brute/PIB 35.9 34.1 35.1 Investissement brut/PIB 38.9 36.6 35.1 Compte courant/PIB -2.8 -1.3 0.3 Taux d’inflation 9.3 6.2 4.8 Source : Banque de Corée, National Income, divers numéros. 1994 8.6 16.5 21.7 35.2 36.1 -0.1 6.3 1995 8.9 24 22 35.9 37 -1.8 4.5 1996 7.1 13 14.8 34.5 38.2 -4.8 4.9 1997 5.5 23.6 3.8 34.2 36.1 -1.9 4.4 La croissance du PIB de la Corée du Sud est restée largement soutenue avec des taux allant de 9.1% en 1991 à 5.5% en 1997. Ses exportations ont eu tendance à augmenter pour passer de 11.8% en 1991 à 23.6% en 1997 même si ses importations furent moins régulières (19.2% en 1991, 5.1% en 1992, 22% en 1995 puis 3.8% en 1997). L’épargne brute ainsi que l’investissement brut sont toujours restés constant avec des taux moyens de 35% et de 38%. 85 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Le compte courant (qui n’a jamais dépassé les -5% du PIB) ainsi que le taux d’inflation (en moyenne de 5 à 6%) étaient largement sous contrôle. La crise brésilienne se doit d’être définie sur une durée allant de 1999 à 2002. Durant cette période, une multitude de tentatives de la part du gouvernement brésilien ainsi que du FMI ont été utilisées pour sortir le pays d’une situation délicate. La seule observation des fondamentaux du Brésil ne saurait expliquer toutes les turbulences subites. « Si l’on passe en revue les critères habituels de « risque pays », il apparait que la contrainte d’endettement externe, tout comme le solde courant diminué des investissements directs, ne peuvent pas expliquer l’ampleur de la crise, même dans le cas du Brésil qui a un besoin de financement international conséquent » (Sgard, 1998). Une analyse plus détaillée fait ressortir que le Brésil n’a pas un ratio d’endettement plus important qu’un autre pays en développement, voire même d’un pays développé. Le Brésil reste un pays fortement orienté vers les exportations avec un processus de développement dynamique malgré les nombreuses difficultés propres à tous les pays en voie de développement. Quant aux indicateurs internes, ils restent corrects surtout au regard de la politique de stabilisation macroéconomique imposée par les pouvoirs publics et le FMI (tableau 20). Cet exemple de pays reflète de nouveau la problématique puisque les chocs externes qu’il a subi (1999 : impact de la crise asiatique, 2002 : impact de la bulle internet) l’ont profondément touché. L’instabilité financière internationale couplée à des effets de contagion importants ont induit un cercle vicieux de crise généralisée. Tableau 20. Principaux indicateurs économiques du Brésil (en %) 1994 5.9 Croissance du PIB Taux d’inflation Taux d’intérêt réel 26 Epargne domestique 21.6 Solde de la balance courante -0.1 Dette extérieure brute 27.1 Dette nette publique 21.6 Source : (Sand-Zantman, et al., 2002) 1995 4.2 22 24.8 19.6 -2.6 22.6 25.2 1996 2.7 9.1 16.5 18.9 -3.1 23.2 29.3 86 1997 3.6 4.3 17.8 18.5 -4.7 24.9 30 1998 -0.1 2.5 24.1 16.9 -4.5 30 35.6 1999 0.7 8.4 19.8 15.5 -4.7 45.5 39 2000 4.4 5.3 10.5 17.2 -4.1 40.5 39.7 2001 1.7 9.5 9.5 -4.6 44.9 42.7 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente La croissance du PIB est peu stable où elle passe de 5.9% en 1994 à -0.1 en 1998 puis 1.7 en 2001. Mais le taux d’inflation apparait sous contrôle en fin de période puisqu’il ne dépassera pas les 10%. Le taux d’intérêt réel y est fort (24.8% en 1995 et 24.1% en 1998 par exemple). Il s’agit peut-être d’un signe de méfiance de la part des investisseurs étrangers, nécessitant d’augmenter la rémunération au regard du profil risqué du Brésil. L’épargne domestique a toujours été importante avec des taux moyens de 15 à 20%. Le solde de la balance courante est largement acceptable avec des taux inférieurs à -5%. La dette extérieure brute et la dette nette publique ont eu tendance à augmenter mais dans des proportions raisonnables (44.9% de dette extérieure brute et 42.7% de dette nette publique en 2001). La situation des PECO, fin 2008, est beaucoup plus intéressante et explicative au regard de l’environnement de ces pays. L’impact des variables déterminantes que sont l’instabilité financière et les effets de contagion a été ici poussé à un niveau élevé afin de s’intégrer parfaitement à la problématique. Ces pays ont ancré leur taux de change (de façon officielle ou non) afin d’amplifier l’attractivité du territoire mais aussi pour adopter un jour l’euro. En parallèle, ils ont dû libéraliser leur balance des paiements, condition indispensable à une intégration à l’Union européenne (Directive Européenne, 1988). Cette configuration, appelée « le péché originel » (Eichengreen, & al., 1999), aurait pu apparaitre risquée pour d’autre pays en voie de développement. Ce ne fut nullement le cas au regard de l’intégration en cours à l’Union européenne et à la zone euro, source de stabilisation pour les investisseurs internationaux. Ainsi, il n’est question ici que des nations ayant intégré l’Union européenne en 2004 et 2007, à savoir la Bulgarie, l’Estonie, la Hongrie, la Lettonie, la Lituanie, la Pologne, la République Tchèque, la Roumanie, la Slovaquie et la Slovénie. Cette caractéristique est essentielle puisqu’elle a permis à ces pays de bénéficier d’une attractivité forte de capitaux étrangers et de devenir un partenaire commercial de l’Europe occidentale (tableau 21). Les chiffres sont éloquents, tous supérieurs à 50% tant pour la part des exportations vers l'UE dans les exportations totales que pour la part des importations de l'UE dans les importations totales et de 75% pour la part du stock d’IDE de l’UE sur le total des IDE. 87 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente La perspective d’adhérer à l’Union européenne, puis celle en cours à l’euro, a conduit à l’idée que ces pays pourraient un jour converger vers les mêmes niveaux de développement que les partenaires historiques de la zone. L’exemple de réussite de pays comme l’Espagne et l’Irlande ne peut que conforter cette hypothèse. Parallèlement, des politiques communautaires ont pu être mises en place afin de maximiser dans la mesure du possible leur développement à travers les fonds européens. L’ancrage à l’Europe a constitué le garant d’une certaine stabilité au regard du reste du monde. Il est clair que dans cette situation, les effets de contagion de l’Europe occidentale vers l’Europe centrale et orientale au sein de l’Union européenne ne peuvent être que prépondérants en cas de choc. Tableau 21. Caractéristiques économiques et financières de l’intégration des PECO à l’Union européenne en 2008 PECO Bulgarie Rép. Tchèque Estonie Hongrie Lituanie Lettonie Pologne Roumanie Slovénie Slovaquie Source : Eurostat. Part des exportations vers l'UE dans les exportations totales (%) 60 84,9 70 78,2 60,3 68,6 77,8 70,5 68,1 85,3 Part des importations de l'UE dans les importations totales (%) 56,7 76,9 79,8 68,2 57,6 75,5 71,9 69,2 71,3 72,9 Part du stock d’IDE de l’UE sur le total des IDE (%) 91,91 94,23 96,10 74,98 94,22 90,04 88,17 94,43 98,37 93,54 Le tableau ci-dessous met en évidence la forte intégration commerciale de pays avec l’Union européenne en 2008 : du plus bas en Bulgarie avec 60% de la part des exportations et 56.7% des importations, au plus élevé en République Tchèque avec 84.9% de la part des exportations et 76.9% des importations. Pour ce qui est de l’intégration financière, la dépendance aux capitaux de l’Union européenne est poussée à son extrême avec des taux d’intégration pouvant aller, pour certains d’entre eux comme la Slovénie, jusqu’à 98.37% en 2008. Ces chiffres confortent l’idée que les canaux de contagion sont parvenus à un niveau sans précédent. 88 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Peu de temps encore avant la crise de fin 2008, les PECO étaient considérés comme fortement attractifs avec de bons fondamentaux (tableau 22). Leur taux de croissance était favorable, le solde public majoritairement contenu et le taux d’inflation sous contrôle mis à part en Roumanie. Ils n’étaient nullement considérés comme assortis de vulnérabilités d’ordre macroéconomiques, telles celles relatives aux modélisations de première génération. Quant à la volonté du gouvernement de poursuivre l’ancrage à l’euro, configuration de la deuxième génération, il n’a jamais été remis en cause. Bien au contraire, la perspective d’adhérer à l’euro est synonyme d’attractivité amplifiant la croissance économique. Quant aux éléments à l’origine de la troisième et dernière génération de modélisation de crise, il n’y a jamais eu véritablement de fragilité du système bancaire. Mis à part que ce dernier appartient majoritairement aux grands groupes financiers d’Europe occidentale, garants de sa bonne régulation à travers le transfert des méthodes de gestion du risque et de capitalisation suffisamment importantes. Tableau 22. Données sur les fondamentaux macroéconomiques des PECO (moyenne 2000/2008) PECO Moyenne 2000-2008 Bulgarie République tchèque Estonie Lettonie Lituanie Hongrie Pologne Roumanie Slovénie Slovaquie Source : Eurostat Taux de croissance (%) Solde public (%) 6,21 2,29 5,82 8,32 3,76 6,21 3,19 21,59 4,72 4,30 0,82 -3,92 0,78 -1,69 -1,86 -6,16 -4,24 -2,73 -2,18 -4,68 Taux d’inflation (%) 7,21 2,81 4,81 6,12 2,94 6,36 3,54 17,60 5,41 5,74 La Roumanie a un taux de croissance apparaissant exceptionnel avec 21.59% de moyenne par an entre 2000 et 2008. On peut l’expliquer par un développement plus tardif couplé à des difficultés de régulation importantes jusqu’au début des années 2000 (pour preuve, le taux d’inflation moyen était de 17.60% sur la même période). Pour ce qui concerne les autres PECO, ils enregistrent des taux de croissance économique largement favorables avec 89 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente 6.21% pour la Bulgarie et la Hongrie ainsi que 8.32% pour la Lettonie. Mais cette dynamique n’est pas apparue avec de forts déséquilibres puisque leur solde public et leur taux d’inflation sont restés maintenus (-6.16% en Hongrie pour le plus dégradé des soldes publics et 7.21% en Bulgarie pour le plus important des taux d’inflation). Les éléments à prendre en compte pour expliquer comment des pays peuvent rentrer en crise (plus spécifiquement au regard de l’exemple des PECO), alors qu’ils ont de bons fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers, reposent conjointement sur les effets de contagion et l’instabilité financière internationale. Ces deux caractéristiques vont permettre la fuite généralisée des capitaux internationaux sans pour autant justifier de vulnérabilités propres. Ces tensions rendent fragiles principalement et surtout les pays en voie de développement qui ont opté pour une dynamique de rattrapage basée sur les exportations. Ces pays ont quelques caractéristiques communes qui renforcent cet effet de contagion : un déficit de la balance courante (effet typique/logique pour un pays en cours de rattrapage), la stabilisation de la balance des paiements par l’afflux d’IDE, un ancrage du taux de change (fixe ou semi-fixe) afin de rassurer les investisseurs internationaux et une libéralisation des flux financiers toujours pour favoriser les IDE. Pourtant, ces quatre caractéristiques sont explosives si les autorités publiques ne sont pas en mesure de réguler le système financier afin d’optimiser les sorties de capitaux lors d’un choc externe. La description sommaire de l’impact d’un choc externe sur un pays en voie de développement peut être la suivante : rapatriement des capitaux internationaux du pays vers le reste du monde (pour des raisons qui peuvent être multiples), déficit de la balance des paiements (la balance courante étant négative, elle ne peut plus être compensée par les afflux d’IDE), risque de décrochage de l’ancrage du taux de change (mise sous pression des réserves en devises de la Banque Centrale) et finalement intervention des autorités publiques afin de défendre l’ancrage du taux de change (notamment par l’augmentation du taux directeur de la Banque Centrale et la diminution des réserves de change). 90 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Cette amplification des vulnérabilités sera à l’origine d’un cercle vicieux de crise qui était d’abord induit par un choc externe pour finalement s’auto-entretenir. L’augmentation des taux directeurs de la part de la Banque Centrale va automatiquement faire augmenter les taux d’intérêt dans la sphère économique. Les agents privés et publics vont directement subir cette augmentation. Il y aura donc des difficultés à se financer ou se refinancer, affectant leur solvabilité (augmentation des charges d’intérêt) mais aussi la dynamique économique (l’augmentation du coût des crédits fait diminuer l’opportunité des projets d’investissement). Quant à la libéralisation des flux financiers, afin de favoriser l’afflux d’IDE, elle ne permet pas de protéger le pays contre des retournements brutaux de capitaux internationaux. En cas de choc, ceux-ci peuvent se retirer facilement du pays, laissant les agents privés et publics dans l’incapacité de se refinancer alors que ceux-ci ont des obligations. Les PECO illustrent véritablement l’ensemble de ces caractéristiques puisqu’ils ont opté pour un rattrapage économique, depuis la fin de l’ère soviétique, tourné vers l’exportation dont les capitaux étrangers furent essentiels pour combler le manque d’épargne nationale. L’adhésion à l’Union européenne et à celle en cours à la zone euro les ont poussés à libéraliser les flux financiers tout en ancrant leurs taux de change. Ces vulnérabilités, à l’origine des effets de contagion, vont logiquement renforcer les pressions sur le taux de change. L’impact sur la sphère économique va augmenter les faillites (poids de la dette, impossibilité de refinancement, …), et diminuer l’attrait des IDE pour le pays puisqu’il n’aura plus de croissance économique forte (diminution de la mise en route de projets d’investissement par le cout élevé des financements). Les flux d’IDE seront alors de plus en plus faibles, le rapatriement des capitaux internationaux va alors s’amplifier. L’impact de la sphère financière ne permettra pas d’optimiser les interactions financières entre le pays et le reste du monde. Les capitaux internationaux pourront s’affranchir librement des aléas nationaux « grâce » à la libéralisation autorisée et incontrôlée des instances nationales du pays. Le taux de change ne pourra donc pas poursuivre son ancrage. Une dévaluation devient alors inévitable, dernier mécanisme qui va anéantir le pays. 91 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Les graphiques 17 et 18 illustrent la fuite des capitaux étrangers et la diminution généralisée des réserves de change des PECO afin de tenter de stabiliser leur taux de change à partir de la fin 2008. Ils démontrent bien une rupture entre d’un côté un trend haussier (définie d’étape 1) largement imputable à la forte dynamique d’attractivité de ces pays jusqu’en 2008. Puis, une rupture pour la majorité d’entre eux (étape 2) lors des effets de contagion de la crise des Subprimes engendrant une instabilité financière à l’origine de ces tensions. Graphique 17. La fuite généralisée des capitaux au sein des PECO Bulgarie 35000 Etape2 30000 Etape1 25000 République tchèque Estonie Lettonie 20000 Lituanie 15000 Hongrie 10000 Pologne Roumanie 5000 Slovénie 0 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 Slovaquie -5000 Source : Eurostat - Millions d'euros (à partir du 1.1.1999)/Millions d'écus (jusqu'au 31.12.1998). Graphique 18. Baisse des réserves de change (or y compris) 70 000,00 Bulgarie 60 000,00 République tchèque Estonie Etape1 50 000,00 Etape2 Lettonie 40 000,00 Lituanie 30 000,00 Hongrie Pologne 20 000,00 Roumanie 10 000,00 Slovénie 0,00 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 Slovaquie Source : Eurostat - Millions d'euros (à partir du 1.1.1999)/Millions d'écus (jusqu'au 31.12.1998) 92 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Les éléments qui ont pu être apportés ici avaient pour but de démontrer par des faits empiriques la plausibilité de la problématique. La Corée du Sud, le Brésil mais surtout les PECO ont pu être impactés par des effets de contagion importants induits par une intégration forte à l’économie mondiale. L’instabilité financière internationale, qui offre l’opportunité de retirer les capitaux rapidement, devient difficilement contrôlable au regard des ancrages fixes qui ont pu être choisis. Il conviendra cependant de revenir sur les raisons pouvant justifier cette instabilité internationale, l’origine de l’élément perturbateur, notamment au niveau de la nature de l’endettement des agents économiques au regard de caractéristiques communes à ces pays : déficit de la balance courante, stabilisation de la balance des paiements par l’afflux d’IDE, ancrage du taux de change et libéralisation du compte de capital. 93 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Conclusion intermédiaire La libéralisation des flux financiers a pu être considérée comme une opportunité pour les pays en voie de développement. Ils ont pu ainsi financer leurs besoins en capitaux nécessaires à l’amorçage de leur dynamique de rattrapage économique. Mais l’augmentation de ces échanges a induit une situation d’interdépendance où l’instabilité qui en résulte va amplifier les effets de contagion. Ces deux caractéristiques, l’instabilité de la sphère financière et les effets de contagion, poussent à modifier les fondements de l’interprétation des crises de change. S’il s’avère que des pays avec de bons fondamentaux peuvent entrer en crise à travers la contraction de ces flux de capitaux, alors la libéralisation financière induit d’avoir en parallèle une régulation internationale. Le paradigme dominant postule que la fuite de ces capitaux est le fruit d’une vulnérabilité propre au pays en crise, même issue d’effets de contagion qui lui sont externes. La remise en cause de ce postulat reste délicate au regard de l’impact que ces sorties de capitaux peuvent avoir. Mais de toute évidence, la possibilité d’allouer librement les capitaux afin de les rendre liquides semble amener à plus de difficultés pour les maîtriser. En parallèle à cette instabilité financière, l’attractivité en capitaux des pays émergents est souvent conditionnée à la stabilisation du risque de dépréciation monétaire. Les échanges entre un pays et le reste du monde sont à l’origine des tensions soit par la variation du taux de change soit par la variation des réserves de devises. L’ancrage d’une monnaie, surtout pour des territoires en pleine essor, ne peut rester véritablement viable à moyen terme. La libéralisation des flux de capitaux, afin d’intégrer le marché financier international, apparait peu compatible avec cette volonté de stabilisation du taux de change. A la moindre tension constatée ou anticipée, les agents économiques ont la capacité de rapatrier rapidement leurs capitaux. Toute la difficulté, afin de rendre viable des ancrages de change dans un contexte de libéralisation, est de déterminer la source pouvant engendrer ces tensions afin de les anticiper. Une crise de change pour un pays en voie de développement se caractérise par la fuite généralisée de capitaux ne permettant plus à l’ancrage d’être viable au regard du déficit apparaissant pourtant normal de la balance courante lors d’un processus de rattrapage 94 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente économique. De nombreux fondamentaux ont pu rendre compte de l’influence qu’ils pouvaient exercer sur l’occurrence d’une crise (indicateurs macroéconomiques, macrofinanciers, sociaux, politiques, microéconomiques, micro-financiers…). Cependant, ce ne sont que des interprétations qui apparaissent en décalage au regard de récents faits empiriques confortant notre problématique (Corée du Sud en 1997-1998, Brésil en 19992002 et plus particulièrement dans les PECO en 2008). A partir de la modélisation de première génération, qui apparait toujours essentielle, une modélisation complémentaire devra être façonnée afin d’y intégrer de nouvelles variables reflétant ces caractéristiques. La libéralisation financière a amplifié les situations d’interdépendance à l’origine d’effets de contagion prépondérants qu’il peut convenir de définir d’éléments de vulnérabilité propre au pays sans pour autant témoigner de la dégradation de ses fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers. 95 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Conclusion de la première partie La première partie avait pour ambition de présenter la façon dont la littérature économique appréhende le phénomène de crise financière et plus spécifiquement de crise de change. Une remise à plat de ces postulats, d’où découle la façon même de déterminer puis d’anticiper ces phénomènes, est indispensable pour les confronter à la problématique. Celleci repose sur l’affirmation que des pays émergents, dont les fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers sont robustes, peuvent néanmoins entrer en crise par des effets de contagion sans pour autant témoigner d’une vulnérabilité fondamentale qui pourrait leur être propre. La littérature existante est en totale opposition puisqu’elle postule que toute crise dans une économie ne peut s’expliquer que par une vulnérabilité déjà existante dont les effets de contagion ne viendront que renforcer l’impact. Le cheminement alors choisi a permis de faire ressortir les limites de telles interprétations au regard de faits nouveaux pouvant se matérialiser lors des crises en Corée du Sud (19971998), au Brésil (1999-2002) et plus spécifiquement dans les PECO (2008). Une crise est perçue comme un événement nécessaire induit par l’incapacité des forces en présence à s’adapter aux contraintes qui leur font face. Cette interprétation met en lumière des variables macroéconomiques et macro-financières qui, à travers leur dégradation, apparaissent symptomatiques lors de crises financières. Cette approche doit permettre de faire un parallèle entre la dynamique d’une crise dans le cadre de sa temporalité et les éléments issus de la littérature afin de la quantifier pour l’anticiper et la prévenir. Deux limites apparaissent ici dans la capacité des économies à apporter les éléments nécessaires face aux contraintes pouvant engendrer une crise. L’élément perturbateur à l’origine de la crise peut être étranger au pays. Se pose la question de sa légitimité d’intervention afin de s’en prémunir. Ensuite, l’anticipation d’une crise repose sur la dégradation des fondamentaux propres au pays. Si ceux-ci ne se dégradent pas, comme il est postulé dans la problématique, les méthodes de déterminations des crises pour les prévoir deviennent inefficaces. Des réajustements tant méthodologiques que réglementaires (à travers une coopération sur la stabilité financière internationale) se doivent d’être réalisés afin d’inclure ces faits nouveaux s’ils venaient à être avérés. 96 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Le processus de libéralisation apparait comme un élément essentiel à la régulation du système financier international afin de l’adapter aux contraintes du moment. Mais la fluctuation du prix des actifs nécessaire à une réallocation optimale du capital est aussi source d’instabilité à l’origine de phénomènes de contagion. Ces deux caractéristiques, l’instabilité de la sphère financière et les effets de contagion, poussent à modifier les fondements de l’interprétation des crises de change. Le besoin de capitaux des pays émergents destinés à palier leur manque d’épargne nationale et d’amorcer une dynamique de rattrapage économique rend dépendant nombre d’entre eux à ces aléas (cette caractéristique est appelée « le péché originel des pays émergents »). Paradoxalement, la nécessité de stabiliser le risque de dépréciation monétaire afin de bénéficier de ces capitaux internationaux les a conduits à ancrer leur taux de change. La problématique qui se pose véritablement concerne la capacité de ces pays à libéraliser, notamment leur compte de capital, alors que nombre d’entre eux sont sous ancrage fixe. Afin de rendre viable cette configuration, il faut pouvoir déterminer les sources potentielles des tensions afin de les anticiper. Les modélisations de première, deuxième et troisième générations ont cherché à expliquer les raisons de l’occurrence d’une crise de change mais toujours par une dynamique de dégradation des fondamentaux du pays à l’origine de l’amplification des vulnérabilités. La matérialisation de l’occurrence de ce phénomène reste pourtant la même. La fuite généralisée des capitaux ne permet plus à l’ancrage d’être viable au regard du déficit récurrent de la balance courante induit par le processus de rattrapage du pays émergent. La modélisation de première génération a pu mettre en avant cette dynamique de crise sur le taux de change. Les générations suivantes sont venues recontextualiser, par de nouvelles variables, des origines différentes de la fuite généralisée des capitaux. Il s’agira dans la partie suivante de faire de même. Les nouveaux paramètres à y intégrer repose sur l’instabilité financière internationale et les effets de contagion qu’il conviendra de matérialiser. La problématique qui est défendue ici est délicate au regard de l’hypothèse de non dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers au sein des pays pouvant justifier de l’occurrence d’une crise. Les nouvelles vulnérabilités qui pourraient expliquer cet état de fait reposent sur des éléments extérieurs au territoire. L’instabilité 97 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente financière internationale est l’agrégation de comportements financiers des agents économiques à travers le monde alors que l’amplification des effets de contagion n’est que la résultante d’une intégration poussée des économies contemporaines. Les vulnérabilités prépondérantes n’apparaissent plus seulement comme celles propres au pays mais concernent également celles de ses partenaires économiques et financiers. A partir du moment où les difficultés de l’un deviennent aussi celles des autres, il peut être souhaitable d’envisager une supervision supranationale. 98 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Partie 2 Identification et modélisation des faits originaux : un processus de développement source d’interdépendances et d’effets de contagion. 99 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Introduction de la deuxième partie La partie précédente a permis de définir la notion de crise, et notamment celle financière, pour ensuite la contextualiser au regard de la nature même des nouvelles vulnérabilités de notre époque. Les nouveaux éléments de libéralisation, d’interdépendance et d’effets de contagion qui ont pu en ressortir, se doivent ici d’être explicités afin d’en comprendre leurs interactions. Ensuite, ils pourront être modélisés. L’ambition ici est d’apporter une compréhension de ces phénomènes macroéconomiques et macro-financiers apparaissant nouveaux sans juger de leurs prépondérances dans les phénomènes de crises. Ainsi, de nombreuses caractéristiques se doivent d’être présentes pour éventuellement faire émerger l’occurrence de ce style de tensions. Pour rappel, le pays émergent doit avoir un déficit récurrent de sa balance courante, une stabilisation de sa balance des paiements par l‘afflux d’IDE, une stabilisation voire un ancrage de son taux de change et la libéralisation des flux financiers (libéralisation de son compte de capital). Il s’agit tout d’abord d’expliquer les raisons de l’adoption de ces caractéristiques par les pays émergents venant d’être émis (but du premier chapitre), à l’origine de création de vulnérabilités, pour ensuite décrire théoriquement la dynamique et empiriquement l’occurrence de ce genre nouveau de crise (lors du second chapitre). Le processus de développement économique, adopté aujourd’hui par une majorité de pays émergents, repose sur une intégration dans le commerce international, source d’amplification de la croissance économique à travers le partage d’idées, de compétences et de technologies. Mais la réussite de cette intégration impose l’acquisition d’un avantage compétitif nécessitant la reconversion de l’appareil productif du pays. Celle-ci n’apparait envisageable que par l’afflux de capitaux étrangers, majoritairement sous forme d’IDE, qu’il conviendra d’expliquer ultérieurement. Cette stratégie, source de dynamisme, n’est pas pour autant sans risque puisqu’elle induit une amplification des interdépendances tant commerciales que financières vis-à-vis du reste du monde. La libéralisation des flux financiers mondiaux met aussi en parallèle une mise en concurrence entre les territoires où l’attractivité de chacun est fonction des avantages qu’il apporte (coût de la main d’œuvre, poids de la fiscalité, réglementations…). Les éléments qui en ressortent, en relation avec la 100 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente problématique, sont la libéralisation de leur compte de capital et la neutralisation du risque de change. En parallèle à l’émergence de vulnérabilités au sein des pays émergents (ou la libéralisation des flux de capitaux apparait incompatible avec la stabilisation du taux de change), il conviendra de décrire les éléments perturbateurs à l’origine de tensions financières internationales. Une démarche d’abord théorique, donnant suite à une préférence pour l’Hypothèse d’Instabilité Financière (HIF) de Minsky, permettra de justifier la variation à la hausse du taux d’intérêt, responsable des difficultés des agents économiques internationaux au regard de la structuration de leur endettement. Le rôle de la Banque Centrale y sera décrit avec quelques éléments pouvant être définis de complémentaires mais restant nécessaires à la problématique. Ces éléments vont offrir l’opportunité d’expliquer la fuite des capitaux étrangers au sein du pays émergent sans pour autant prendre comme élément perturbateur une dégradation de leurs fondamentaux macroéconomiques et macrofinanciers. Cette interprétation, plutôt externe dans l’explication de l’occurrence de la crise, va être complétée par la matérialisation des tensions en interne au pays, notamment par la contraction de taux de change. C’est principalement à travers les canaux de contagion de la liquidité et des taux d’intérêt que le processus s’enclenche. D’une première fuite des capitaux étrangers, de par les tensions financières internationales, celle-ci va se renforcer au regard de l’amplification des vulnérabilités interne. Le déficit récurrent de la balance courante, légitime lors d’un processus de rattrapage économique, va conforter les pressions sur le taux de change puisque les flux positifs de capitaux étrangers ne neutraliseront plus ce solde négatif. Cet élément nouveau, au regard des différentes modélisations des crises de change, est la vulnérabilité principale du pays émergent. Celle-ci devient explosive dans le contexte économique et financier actuel. Pour illustrer la problématique, un focus est réalisé principalement sur les PECO durant la crise des Subprimes en 2008. L’ensemble des graphiques et tableaux, relatant l’évolution des variables macroéconomiques et macro-financières, met en exergue deux étapes importantes. La première période correspond à une situation de rattrapage économique 101 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente largement favorable pour ces pays (avec des indicateurs positifs). La deuxième, fruit de l’élément perturbateur induit par les tensions financières internationales, conduit à une fuite des capitaux qui engendrera une crise de change mais aussi une forte rupture de la croissance économique. Un nouveau point intéressant sera aussi décrit ici : celui de la divergence non pas de l’impact des pressions internationales, puisque la totalité des PECO ont pu la subir, mais plutôt de l’émergence d’un cercle vicieux de décroissance économique divergent entre ces pays. Une analyse historique du développement économique de ces pays, d’abord lors de la période soviétique, ensuite par l’intégration à l’Union européenne, permettra d’aborder l’héritage des spécialisations de ces pays dont ils ont du s’accommoder pour impulser une dynamique de rattrapage économique viable à l’origine de comportement changeant lors des pressions internationales. 102 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Chapitre 3 Une stratégie de rattrapage économique basée sur l’attractivité des IDE, source de vulnérabilités potentielles ? Introduction intermédiaire Les pays en voie de développement cherchent à se dynamiser afin d’impulser un processus de rattrapage économique. L’histoire récente du développement économique témoigne de l’insertion au commerce international comme la seule solution viable pour induire ce processus. Cette ouverture commerciale reste largement plébiscitée par la littérature économique ainsi que les instances internationales comme le FMI et la Banque Mondiale. Le partage de connaissances et d’idées à travers les échanges qui en résultent apparaissent favorables aux économies, qu’elles soient en voie de développement ou développées. Pourtant, la participation au commerce international implique un processus de spécialisation où chaque territoire doit posséder un avantage compétitif lui permettant de se centrer sur les secteurs dont la production est exportable. Le fruit de cette stratégie a été adopté par les PECO de la fin des années 80 (lors de la chute du mur de Berlin) à aujourd’hui. La perspective d’intégration à l’Union européenne (qui s’est matérialisée en 2004 et 2007) puis celle en cours à la zone euro n’ont fait que renforcer cette tendance. La contrainte des pays en voie de développement réside dans le fait qu’ils n’ont pas, lors du démarrage de ce processus, les moyens financiers pour restructurer leur appareil productif afin de se spécialiser dans des secteurs destinés à l’exportation. Le niveau de vie faible de leur population explique cette incapacité à obtenir les capitaux nécessaires au décollage économique. Même si certains pays qu’il convient de qualifier d’émergents au regard de l’attractivité dont ils font preuve témoignent d’une épargne domestique potentiellement disponible. Or, il leurs est souvent difficile de la capter face au risque souverain auquel ils font encore face. Cette situation est vraie pour les PECO qui n’avaient pas les moyens financiers pour impulser leur processus de rattrapage L’appel aux financements extérieurs est alors l’alternative incontournable pour ces pays. Ce choix a été largement adopté par les PECO qui aujourd’hui se retrouvent tributaires du marché financier international. La 103 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente dynamique de rattrapage ainsi décrite induit cependant de nombreuses fragilités tant que les spécialisations sectorielles axées à l’exportation ne se sont pas émancipées des capitaux étrangers. L’endettement international suppose une dépendance au marché financier mondial avec toutes les vulnérabilités que cela peut entrainer (influence des aléas financiers internationaux, dépendance aux organismes de prêts étrangers,…). L’importation de biens d’équipement nécessaires à la restructuration du tissu économique met sous pression la balance courante du pays puisque dans un même temps les exportations restent en général insuffisantes pour contrebalancer ces dépenses. L’endettement permet de palier ce déficit de la balance courante tant qu’il apparait légitime et est source de gains de productivité futurs. A terme, le processus de développement économique doit permettre au pays de bénéficier d’un surplus commercial grâce à sa spécialisation sectorielle qui le dégage de la contrainte des capitaux étrangers et d’amplifier sa montée en gamme vers des secteurs plus intensifs en technologies. Se posera alors la question du positionnement actuel des PECO dans leur dynamique de rattrapage au regard de ces éléments. La forme d’endettement qui est majoritairement privilégiée aujourd’hui correspond aux IDE. En plus de répondre aux besoins de capitaux, ils apportent avec eux tout un ensemble de compétences dont le territoire pourra s’approprier les avantages lors de leur diffusion aux autres secteurs. Les PECO ont eux aussi fait le pari de les attirer. Les IDE ne sont pas des titres de dettes traditionnelles mais des prises de participations ou de créations de nouvelles activités au regard de l’avantage compétitif que peut posséder un pays. Il y a une véritable implication de ces capitaux à travers les transferts de technologies et de compétences. Même s’il faut tempérer l’impact potentiel des IDE sur la croissance économique d’un pays (notamment au regard de sa capacité d’absorption induite principalement par le niveau de qualification de la population), ils semblent conforter l’amplification du rattrapage économique. Les IDE deviennent des éléments déterminants dans l’amorçage du développement, mettant sous pression concurrentielle et donc en concurrence ces territoires afin de les attirer. Une politique d’attractivité territoriale s’installe afin de mettre en avant des avantages compétitifs source d’attractivité des IDE (coût de la main d’œuvre, réglementation fiscale, libéralisation du compte de capital, stabilisation du risque de dépréciation monétaire…). Les PECO ont du faire de nombreuses concessions dans le cadre de leur attractivité territoriale, qu’il conviendra de lister. 104 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Les éléments qui vont être exposés ici ont pour ambition d’expliquer le cheminement actuellement choisi par de nombreux pays émergents, et notamment les PECO, dans le cadre de leur stratégie de rattrapage économique. Il peut convenir de revenir sur chacune de ces interprétations pour en expliquer clairement la dynamique sans pour autant en juger de la pertinence. La problématique n’a pas vocation ici à valider l’efficience de cette stratégie de développement mais plutôt à insister sur les vulnérabilités qu’elle engendre. Une mise en parallèle du contexte dans lequel se retrouvent les pays en voie de développement, à travers une libéralisation des flux de capitaux et d’un ancrage de leur taux de change nécessaire à l’attractivité des IDE, va permettre de matérialiser le processus de crise propre à notre problématique sans pour autant témoigner d’une dégradation de leurs fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers. L’association au commerce mondiale, induisant une intégration au marché financier international afin d’y trouver des capitaux, est un des éléments de vulnérabilités, facteurs d’amplification des interdépendances et des effets de contagion externes au pays. 105 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente 1. Enjeux de l’intégration au commerce international : des perspectives favorables de développement économique Le développement économique « peut être défini comme un processus endogène et cumulatif de long terme de progrès de la productivité et de réduction des inégalités, en intégrant des coûts humains et environnementaux acceptables. » (Hugon, 2006). Les stratégies adoptées au cours des dernières décennies laissent perplexes quant à la capacité de nos sociétés à impulser favorablement ce genre de dynamique. Historiquement, quatre grandes périodes peuvent émerger vis-à-vis des pratiques généralement admises à la suite de la 2eme Guerre Mondiale puis en parallèle à la décolonisation (tableau 23). Tableau 23. Les quatre grandes périodes de l’économie du développement Principales périodes : Contexte historique : Paradigme dominant en économie : 1960-1968 Construction et fondements Décolonisation. Le Tiers Monde face aux deux blocs. Synthèse classicokeynésienne. 1968, 1975-1980 Radicalisation et affrontements Luttes de libération. Nouvel ordre économique international Libéralisation. Normalisation. Divergences des pays semi-industrialisés et des PMA. 1980-1995 Libéralisation et ajustement 1995-2007 Refondation et post-ajustement Objectifs du millénaire. Unilatéralisme américain. Montée en puissance des pays émergents. Paradigme néoclassique et néoricardien. Questions en économie du développement : Dualisme. Désarticulation. Cercle vicieux. Effets de seuil. Spécialisation appauvrissant. Relations Nord/Sud. Paradigme néoclassique avec le « Consensus de Washington ». Marchés efficients. Droits de propriété. Modèle d’équilibre général calculable. Néo-institutionnalisme ou institutionnalisme rationnel. Microéconomie en information imparfaite. Pauvreté. Gouvernance. Trappes à pauvreté. Asymétries. Informations. Modes de coordination. Source : (Hugon, 2007) La première grande période, de 1960 à 1968, est assimilée à la stratégie du décollage économique où la pensée dominante en économie du développement a découlé de la synthèse classico-keynésienne. Un rôle important est attribué aux Etats des pays en voie de développement dans l’amorce d’une dynamique de rattrapage pour créer un cercle vertueux 106 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente à travers des financements internationaux massifs vers des secteurs industriels jugés prioritaires. La relative confiance vis-à-vis des gouvernements de ces pays dans leur capacité à allouer avec efficience ces ressources a cependant posé problème par la suite face à des difficultés de corruptions, de compétences mais aussi de savoir-faire. La notion de rationalité à long terme de l’Etat fut mise en défaut au regard du manque de retour et d’expérience réelle des projets. Entre 1975 et 1980, une deuxième grande période a pu émerger. Elle repose sur la contestation de la répartition des influences géostratégiques de l’époque. La dégradation des termes de l’échange pour de nombreux pays en voie de développement, souvent producteurs de matières premières, a poussé ceux-ci à mettre en place des stratégies de substitutions aux importations. L’état devait alors jouer un rôle important afin de se dédouaner des dépendances internationales en parallèle de la mise en œuvre de politiques de développement économique. Les échecs des pays en voie de développement ayant adopté cette stratégie de repli, par la non-participation aux échanges commerciaux internationaux, a sérieusement remis en cause le choix de cette méthode. La troisième grande période, entre 1980 et 1995, correspond à l’ère du paradigme néoclassique avec le « Consensus de Washington » (tableau 24). Les deux chocs pétroliers de 1973 et 1979, en parallèle à des endettements importants, lors de la mise en place des fondamentaux nécessaires à une impulsion économiques dans les années 1960/1968, vont créer de forts déséquilibres macroéconomiques et macro-financiers à l’origine de la défaillance de certains Etats sur leurs dettes (notamment avec le Mexique en 1982). Des politiques d’ajustement structurelles ont été imposées, reposant sur la libéralisation de l’économie, le désengagement de l’état, l’ouverture extérieure et le respect des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers et devant favoriser l’augmentation de la compétitivité de ces territoires (Williamson, 1990). Ces mesures doivent faciliter l’ajustement des équilibres macroéconomiques, notamment au niveau de la balance des paiements pour satisfaire les contraintes de la dette, à travers une régulation par le marché et non plus par les forces étatiques. 107 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Tableau 24. Les dix propositions de Williamson du « Consensus de Washington » 1. Discipline budgétaire. 2. Réorientation des priorités des dépenses publiques vers des domaines offrant à la fois un rendement économique et un potentiel d’amélioration de la répartition des revenus, tels que les soins de santé primaires, l’enseignement primaire et les infrastructures. 3. Réforme fiscale (baisse des taux marginaux et élargissement de l'assiette fiscale). 4. Libéralisation des taux d'intérêt. 5. Taux de change compétitif. 6. Libéralisation du commerce. 7. Libéralisation des entrées d'IDE. 8. Privatisation. 9. Déréglementation (dans le sens de la suppression des barrières à l'entrée et de sortie). 10. Droits de propriété garantis. Source : (Williamson, 1990) Même si cette stratégie de développement économique, reposant sur la libéralisation et l’intégration internationale, est fortement remise en cause aujourd’hui (il s’agit de la quatrième grande période du tableau 24 : refondation et post-ajustement), au sein même de structures internationales comme le FMI et la Banque Mondiale (Stiglitz, 2001) (AbrahamFrois, & al., 2003) (Clift, 2003) (Banque Mondiale, 2007) (FMI, 2007), elle reste toujours utilisée par de nombreux pays. De multiples exemples de réussites, notamment les quatre dragons (Corée du Sud, Hong-Kong, Singapour et Taïwan) mais aussi la Chine et certains pays d’Amérique Latine, tendent à démontrer que l’ouverture commerciale est un facteur amplificateur de croissance économique, et donc de rattrapage économique. Les PECO ont aussi choisi cette stratégie d’intégration au commerce internationale. Cette insertion a véritablement pu se réaliser lors du début du processus d’intégration à l’Union européenne. Ces pays, afin de se restructurer suite à leur passé socialiste, étaient dans des situations difficiles. Le tableau 25 vient confirmer cette tendance avec des taux d'ouverture commerciale (moyenne des importations et des exportations en % du PIB) qui n’ont cessé de croitre depuis 1999 pour passer de 40% à 56% en 2008. 108 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Tableau 25. Taux d’ouverture commerciale des PECO avant tensions internationales 2008 1999 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 Bulgarie 36 45 45 44 46 49 50 54 61 59 Rep. Tchèque 46 54 56 52 55 63 62 66 69 66 Estonie 51 65 61 56 56 59 65 70 62 60 Hongrie 54 64 60 54 54 56 59 68 69 70 Lituanie 34 39 43 45 45 48 53 56 53 58 Lettonie 32 32 33 34 36 40 43 44 41 39 Pologne 22 24 23 24 28 32 31 35 36 36 Roumanie 26 31 33 35 35 37 34 34 32 32 Slovénie 42 48 48 46 46 51 55 61 65 65 Slovaquie 53 60 65 63 67 68 70 78 79 76 Moyenne PECO 40 46 47 45 47 50 52 57 57 56 Source : Eurostat et calculs auteur (moyenne des importations et exportations en % du PIB) Au regard de la situation actuelle, et sans volonté de porter un jugement sur les stratégies adoptés au cours de l’histoire récente de l’économie du développement, force est de constater que l’intégration au commerce extérieur est apparu comme une alternative indispensable afin d’impulser une dynamique économique. Les approches théoriques sont majoritairement favorables à cette tendance (Michaely, 1977) (Feder, 1983) (Kormendi, & al., 1985) (Fischer, 1991) (Fischer, 1993) (Dollar, 1992) (Levine, & al., 1992) (Edwards, 1993) (Harrison, 1996) (Edwards, 1995). Les organisations internationales vont jusqu’à conforter officiellement ces faits. L’OMC affirme que « la plupart des études empiriques constatent l’existence d’une rétroaction positive entre l’ouverture du régime commercial et la croissance économique. » (OMC, 1998). Postulat conforté par la Banque Mondiale où « L'approfondissement du commerce mondial et l'intégration d'investissement détient la promesse d'une augmentation plus rapide du niveau de vie partout dans le monde, en particulier dans les pays en développement. » (World Bank, 2002). Quelques travaux empiriques ont notamment pu justifier cette forte relation entre croissance économique et commerce international. Pour ne reprendre que certains exemples, Fontagné et Mondher (Fontagné, & al., 2002) ont validé cette hypothèse à travers la réalisation d’un indice d’évaluation et de contrôle des performances à l’exportation auprès de 184 pays sur 72 secteurs (tableaux 26, 27 et 28). Quant à l’OMC (OMC, 1998), elle 109 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente a aussi cherché à conforter ces faits sur un panel de 41 pays en voie de développement suivant une classification de leur degré d’ouverture (les pays très tournés vers l’intérieur, les pays modérément tournés vers l’intérieur, les pays modérément tournés vers l’extérieur et les pays très tournés vers l’extérieur). Il s’agissait ensuite de comparer la relation entre le taux de croissance économique par habitant moyen avec le degré d’ouverture commerciale sur trois périodes : 1963-1973, 1974-1985 et 1986-1992 (graphique 19). Tableau 26. Meilleures performances commerciales globales des pays en voie de développement (2000) Source : (Fontagné, & al., 2002 ; ddonnées de CHELEM-CEPII pour la 1ere colonne, COMTRADE et calculs auteurs pour les colonnes suivantes). Le classement des meilleures performances commerciales des pays possédant un revenu par tête en PPA (parité du pouvoir d’achat) en 2000 inférieur à 10 000 dollars met en avant des pays asiatiques (Malaisie, Chine, Vietnam, Indonésie et Cambodge) ainsi que des pays d’Europe centrale et orientale (Estonie, Ukraine et République Tchèque). L’Afrique du Sud et le Mexique sont aussi présents. 110 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Tableau 27. Meilleure amélioration des performances commerciales des pays en voie de développement (1996-2000) Source : (Fontagné, & al., 2002 ; ddonnées de CHELEM-CEPII pour la 1ere colonne, COMTRADE et calculs auteurs pour les colonnes suivantes). Cet autre classement, reposant sur les mêmes critères que le tableau 26, illustre les pays qui ont le plus progressé au regard de leur performance commerciale. Les explications peuvent cependant diverger pour justifier cette ascension (mise en avant d’un avantage compétitif important, effet de la régionalisation, petite taille des territoires pour d’autres…). Tableau 28. Les dix moins bonnes performances commerciales globales pour les pays en développement (2000) Source : (Fontagné, & al., 2002 ; ddonnées de CHELEM-CEPII pour la 1ere colonne, COMTRADE et calculs auteurs pour les colonnes suivantes). 111 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Le tableau 28 est quant à lui plus critique puisqu’il regroupe les pays en voie de développement les moins performants. Sans en reprendre la liste, ces pays correspondent à ceux qui sont le moins développés économiquement. Graphique 19. Corrélation entre l’ouverture commerciale et la croissance économique Source : (OMC, 1998) Le graphique 19 met clairement en avant une relation forte entre le degré d’ouverture commerciale et le taux de croissance économique. Plus le degré d’ouverture commerciale est fort (barres en bleu foncé), plus le taux de croissance économique du revenu par habitant est proche des 6 à 7 %, quelque soit la période étudiée (1963-1973, 1974-1985 et 1986-1992). Pourtant, le sens de causalité reste encore à définir même au regard de ces études empiriques. Un niveau de développement économique élevé induit une amplification de la consommation qui se traduit par une augmentation du commerce extérieur ou s’agit-il du contraire ? L’augmentation du commerce extérieur induit-il une augmentation du développement économique ? Le débat reste encore en suspens. Certains auteurs vont affirmer que la corrélation entre commerce et revenu n’est pas suffisamment pertinente (Helpman, 1988) (Bradford, & al., 1993). « L’examen de la corrélation entre le degré d’ouverture commerciale et le revenu n’indique pas de relation de causalité entre ces deux variables. Les caractéristiques des pays ont des effets plus 112 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente importants sur le commerce extérieur sans pour autant être corrélé avec d’autres éléments du revenu. » (Frankel, & al., 1999) D’autres vont être même plus catégoriques. « Les progrès de l'ouverture et des échanges se sont-ils traduits par un mouvement général de convergence des économies ? La réponse est négative : en moyenne sur 20, 30 ou 40 ans, les pays n'ont pas enregistré une croissance de leur PIB par tête d'autant plus élevée qu'ils étaient pauvres (L'estimation sur un large échantillon de pays d'une équation de convergence absolue, où la croissance par tête est régressée sur le PIB par tête initial, conduit à rejeter l'hypothèse de convergence.). » (Bensidoun, & al., 2001). Le tableau 29 issu de ces travaux décrit cette interprétation qui apparait contradictoire au regard des études empiriques mises en avant il y a peu. Tableau 29. Une convergence trop faible pour parler d’un effet de corrélation Source : (Bensidoun, & al., 2001) Il ne s’agit pas ici de prétendre que le commerce extérieur permet d’amplifier la croissance économique d’un pays, notamment celle des pays en voie de développement. Ce travail n’a pas vocation à le démontrer. Mais la tendance actuelle reste largement orientée vers une appropriation de ce paradigme. « L’ouverture commerciale, la libéralisation des échanges au sens large et finalement la participation à la vague mondialisante constitueraient pour beaucoup un puissant vecteur de développement ; peut-être la seule issue possible ou la seule alternative à la misère. » (Cardebat, 2002). 113 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Le succès actuel de pays comme la Chine qui avait pu choisir cette stratégie ne peut que conforter son attractivité par les autres pays en voie de développement (Gaffard, & al., 2008). « Les liens entre ouverture et croissance ont paru suffisamment convaincants pour que l'attention porte désormais sur la seule mise en œuvre d'un schéma unique de libéralisation et de règles communes. » (Bensidoun, & al., 2001). Les résultats des PECO, ayant adopté aussi cette stratégie, ont des résultats positifs tant en terme de croissance économique (graphique 20) que de productivité (graphique 21). Graphique 20. Evolution du PIB des PECO Slovaquie 1 000 000,00 900 000,00 Slovénie 800 000,00 Roumanie 700 000,00 Pologne 600 000,00 Hongrie 500 000,00 Lituanie 400 000,00 300 000,00 Lettonie 200 000,00 Estonie 100 000,00 République tchèque Bulgarie 0,00 1995 1997 1999 2001 2003 2005 2007 2009 2011 2013 Source : Eurostat - Millions d'euros (aux prix de l'année précédente) Graphique 21. Evolution de la productivité du travail par tête des PECO 1000 Slovaquie 900 Slovénie 800 Roumanie 700 Pologne 600 Hongrie 500 Lituanie 400 300 Lettonie 200 Estonie 100 République tchèque Bulgarie 0 1995 1997 1999 2001 2003 2005 2007 2009 2011 Source : Eurostat - Productivité réelle du travail par personnes employées - Indice, 2005=100. 114 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente La dynamique économique des PECO est apparue favorable depuis le début du processus de rattrapage. Les taux de croissance économique sont forts et soutenus entre 2000 et 20008 (graphique 20). Il ne s’agit pas seulement d’un effet en termes de richesse, mais aussi vis-àvis d’une dynamique positive sur le tissu économique. L’augmentation de la productivité par tête à l’ensemble de l’économie témoigne de cette tendance (graphique 21). La présentation d’une typologie historique des principales stratégies de l’économie du développement avait pour ambition de mettre en avant l’importance actuelle du commerce international. Celle-ci s’est traduite par une libéralisation des échanges afin d’amplifier ce phénomène. La littérature économique reste largement favorable à ce processus, même s’il est possible d’émettre quelques réserves notamment sur le lien de cause à effet avec la croissance économique. Les PECO ont pu adopter cette stratégie depuis la fin du bloc soviétique avec une implication beaucoup plus forte à partir des années 2000 (début de la perspective d’intégration future à l’Union européenne). Cependant, en plus d’une libéralisation financière et d’une stabilisation de son taux de change, l’adhésion à cette dynamique repose sur la détermination d’un avantage compétitif des territoires indispensable afin de pouvoir vendre sa production au reste du monde. Il s’agira alors de s’interroger sur le façonnage de cette stratégie pour en comprendre les fragilités engendrées lors du processus de rattrapage économique de ces pays (Hugon, 2001). 115 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente 2. La nécessité de contracter des endettements externes, facteur de dépendance au marché financier international L’acquisition d’un avantage compétitif pour un pays en voie de développement réside souvent dans la spécialisation sur un secteur tourné vers l’exportation. Cette ouverture au commerce international lui permet de produire beaucoup plus et lui offre l’opportunité de réaliser des économies d’échelle et des effets d’apprentissage. Cependant, dans le cadre de cette spécialisation, il convient d’insister sur un point essentiel relatif à la vulnérabilité des pays en voie de développement : le besoin en capitaux pour restructurer l’appareil productif. Le principe même de cette dynamique repose sur un endettement. Ainsi, en acquérant les fondamentaux nécessaires, le tissu économique se redynamise et permet le remboursement des dettes contractées. La description de cette relation entre croissance économique et endettement est mise en avant dans la littérature économique. « La théorie suggère que l’emprunt, contenu dans des limites raisonnables, peut aider les pays en développement à affermir leur croissance.» (Pattillo, & al., 2002). Cette interprétation parait légitime. Lorsque l’endettement sert à restructurer l’appareil productif, il permet au pays de créer de par lui-même les conditions de son remboursement. « Dans cette perspective un emprunt à l’extérieur permet précisément à un pays de procéder à des importations qu’il n’aurait pu financer par ses seules recettes d’exportations. » (L'Hériteau, 1979). Cependant, des contraintes émergent à travers l’endettement. Elles résident dans la charge financière qui repose sur le futur. Ce pays sera-t-il dans la capacité de rembourser sa dette alors qu’il n’est pas en mesure, aujourd’hui même, de s’assurer de la matérialisation d’une dynamique de rattrapage économique ? « En effet, si tout processus de développement économique et social est conditionné par l’obtention de ressources financières, qu’elles soient internes ou qu’elles proviennent de sources extérieures, il dépend avant tout de l’usage qui en est fait. » (Berr, 2007). Le graphique 22 illustre la relation entre endettement et croissance économique, même si le danger du surendettement peut prendre à contrecourant cette dynamique favorable. 116 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Graphique 22. Impact de l’endettement sur la croissance économique Source : (Pattillo, & al., 2002) La contrainte de financement à travers l’acquisition de capitaux dans ces pays est bien réelle. L’épargne domestique, au regard du niveau de vie plus faible de ces territoires, leur fait le plus souvent défaut. Même si certains d’entre eux possèdent les capitaux nécessaires (notamment les pays émergents), nombre d’entre eux les voient s’expatrier. Le graphique 23 illustre cette tendance pour les PECO, ceux-ci pouvant avoir des taux d’épargne variant de 10 à plus de 30% alors qu’ils continuent de s’endetter à l’étranger. Graphique 23. Niveau d’épargne des PECO (en % du PIB) 30 Bulgarie 28 République tchèque Estonie 26 24 Lettonie 22 Lituanie 20 18 Hongrie 16 Pologne 14 Roumanie 12 Slovénie 10 1995 1997 1999 2001 2003 2005 Source : Eurostat - Prix courants - Epargne brute. 117 2007 2009 2011 Slovaquie Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Le secteur financier est souvent trop peu développé. « La mobilisation des ressources internes suppose l’existence de systèmes bancaires et de régimes fiscaux efficaces, mais aussi équitables afin d’être acceptés par les populations, et donc d’institutions fiables. Ces conditions étant trop peu souvent réunies par les pays en développement, ceux-ci sont contraints d’obtenir des ressources externes visant, en théorie, à réduire les inégalités et la pauvreté. » (Berr, 2007) Les autorités publiques sont généralement incapables d’endiguer la fuite de l’épargne nationale par manque de confiance de leurs résidents. « Ainsi, on retrouve un des problèmes essentiels des pays émergents à savoir que ce sont des pays risqués, caractéristique souvent liée au niveau du risque souverain. Cela explique qu’ils payent cher leurs emprunts extérieurs, mais aussi le fait qu’une partie importante de l’épargne sorte pour se placer à l’étranger. » (Ennajar, & al., 2005) Les différentes interprétations réalisées à ce sujet définissent un coefficient de rétention de l’épargne nationale plus faible dans les pays émergents que dans les pays développés (Obstfeld, & al., 2000). Le graphique 24 illustre clairement cette situation. Graphique 24. Placement des résidents à l’étranger Source : (Ennajar, & al., 2005) 118 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Ce même graphique décrit une allocation importante des capitaux des pays émergents vers l’étranger qui semble se renforcer au cours du temps. Même si le trend est haussier tant pour les résidents des pays émergents que pour ceux des pays développés, résultat de la globalisation et de la mondialisation des échanges, cet aspect apparait contradictoire au regard du manque apparent de capitaux dans les pays en voie de développement. Le passage par l’endettement externe semble être la seule solution envisageable pour les pays émergents. Mais la nature des dettes contractées ne se destine pas totalement à une redynamisation du tissu économique d’un pays. Les éléments justifiant un endettement de l’étranger peuvent être regroupés en trois thématiques (Ikonicoff, 1984). La première, avec le déséquilibre récurrent de la balance commerciale qui s’explique par une augmentation des importations ou une diminution des exportations, voire les deux en même temps. La variation récurrente du prix de plusieurs matières premières, où de nombreux pays en voie de développement sont spécialisés dans ces productions, explique souvent les déficits de la balance courante. La deuxième, par la volonté pour un territoire d’amplifier au maximum sa croissance économique à travers de grands projets d’infrastructures, va mettre à disposition des moyens importants afin de se spécialiser dans des secteurs apparaissant porteurs. La troisième, lors de politique d’intégration au système international, justifie le fait de passer par l’étranger plutôt que de rester focaliser au niveau national. Les aspects bénéfiques de la finance internationale sur le système financier national de ces pays semblent attester cette tendance. Le tableau 30 met en avant ces éléments à travers quelques exemples lesquels démontrent que la stratégie de développement par l’endettement international n’évolue pas, ou reste inchangée. 119 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Tableau 30. Nature de l’endettement international des pays en voie de développement Source : (Ikonicoff, 1984) Les PECO aussi ont choisi la solution de l’endettement externe pour obtenir les moyens financiers qui impulseront une dynamique de rattrapage économique (graphique 25). Elle a majoritairement pris la forme d’IDE comme le démontre le graphique 26. Graphique 25. Solde des flux de capitaux étrangers des PECO Slovaquie 90000 Slovénie Roumanie 70000 Pologne Hongrie 50000 Lituanie 30000 Lettonie Estonie 10000 -10000 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 République tchèque Bulgarie Source : Eurostat - Millions d'euros (à partir du 1.1.1999)/Millions d'écus (jusqu'au 31.12.1998). 120 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Graphique 26. Solde des flux d’IDE des PECO 45 000 Slovaquie 40 000 Slovénie 35 000 Roumanie 30 000 Pologne 25 000 Hongrie 20 000 Lituanie 15 000 Lettonie 10 000 Estonie 5 000 0 -5 000 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 République tchèque Bulgarie Source : Eurostat - Millions d'euros (à partir du 1.1.1999)/Millions d'écus (jusqu'au 31.12.1998). L’ensemble de ces éléments justifiant les raisons de l’endettement externe des pays en voie de développement pose de nombreuses questions qui ne relèvent pas seulement de l’ordre du poids de la dette. « Si l’endettement extérieur permet au pays bénéficiaire d’accroître l’investissement et/ou la consommation de biens dits essentiels, il peut s’avérer utile. (…) Mais des investissements étrangers massifs peuvent signifier une perte de souveraineté économique par le pays bénéficiaire et générer des problèmes d’ordre politique. » (Berr, 2007). Cette dépendance au reste du monde se matérialise par une contrainte d’équilibre tant interne qu’externe à travers la balance des paiements. Un pays qui aura acheté plus qu’il n’aura vendu à l’étranger, même si ces échanges sont légitimes, verra sa balance courante être déficitaire. Il devra donc s’endetter vis-à-vis de l’étranger afin de satisfaire ce déficit. Il sera en position de besoin de financement avec le reste du monde (Guyon, 2008). Cette tendance est visible au sein des PECO, au moins jusqu’en 2009, dont la balance commerciale (graphique 27) et la balance courante (graphique 28) sont déficitaires. Ce déséquilibre justifie alors le recours à des capitaux étrangers. 121 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Graphique 27. Evolution de la balance commerciale des PECO Slovaquie 15 000 Slovénie 5 000 Roumanie -5 000 Pologne -15 000 Hongrie Lituanie -25 000 Lettonie -35 000 Estonie -45 000 République tchèque Bulgarie -55 000 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 Source : Eurostat - Millions d'euros (à partir du 1.1.1999)/Millions d'écus (jusqu'au 31.12.1998). Graphique 28. Solde des balances courantes des PECO Slovaquie 2500 Slovénie -2500 Roumanie Pologne -7500 Hongrie Lituanie -12500 Lettonie -17500 Estonie -22500 République tchèque Bulgarie 1995 1997 1999 2001 2003 2005 2007 2009 2011 Source : Eurostat - Millions d'euros (à partir du 1.1.1999)/ECU (jusqu'au 31.12.1998). Il peut apparaitre légitime que des pays en voie de développement demandent à contracter des dettes externes afin d’importer des biens et services nécessaires à l’amorçage d’une dynamique de rattrapage (comme par exemple l’acquisition de biens d’équipement). Mais cet endettement induit par le déficit de cette balance courante ne peut être que transitoire puisqu’il hypothèque la stabilité financière externe du pays. « Si les difficultés de paiements 122 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente sont transitoires et réversibles, l'emprunt extérieur évite une contraction. Par contre, si les déficits ne sont ni transitoires ni réversibles, le financement du déséquilibre n'est guère viable à moyen et à long terme puisqu'il conduit à un endettement à croissance exponentielle (…). Alternativement, le pays devra tôt ou tard réorienter les demandes et les offres intérieures de manière à accroître les exportations et à diminuer les importations. » (Tremblay, 1983) L’augmentation des exportations et des importations des PECO favorise leur intégration dans le commerce international (graphiques 29 et 30). Mais même dans ces conditions favorables, la dépendance aux capitaux étrangers reste grande (la balance courante est toujours déficitaire) et le signe d’un processus de rattrapage économique toujours en cours. « Malgré une bonne insertion commerciale des PECO dans le commerce mondial, ces pays continuent à enregistrer des déficits courants chroniques qui sont nécessaires au rattrapage du niveau de vie européen. Le financement de ces déficits s’est réalisé jusqu’à présent sous une forme relativement favorable, puisque les IDE ont été largement majoritaires dans le financement des balances courantes. Les PECO ont pu ainsi être relativement bien protégés des situations de retournements brutaux des investissements de portefeuille. » (Aglietta, & al., 2003) Graphique 29. Evolution des exportations des PECO 20 Bulgarie 15 République tchèque Estonie 10 Lettonie 5 Lituanie 0 Hongrie Pologne -5 Roumanie -10 Slovénie -15 Slovaquie 2000 2002 2004 2006 2008 2010 2012 Source : Eurostat - Indice des prix, variation en pourcentage par rapport à la période précédente, basée sur 2005=100. 123 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Graphique 30. Evolution des importations des PECO Bulgarie 18 République tchèque Estonie 13 Lettonie 8 Lituanie 3 Hongrie Pologne -2 Roumanie -7 Slovénie -12 Slovaquie 2000 2002 2004 2006 2008 2010 2012 Source : Eurostat - Indice des prix, variation en pourcentage par rapport à la période précédente, basée sur 2005=100. La contrainte pour les pays en voie de développement réside dans la confiance que leur accorde le marché financier international quant à leur capacité à s’endetter. « Une économie où l'absorption interne excède la production interne peut être considérée comme étant dans un état stable aussi longtemps que le déséquilibre de la balance extérieure est toléré par le monde extérieur. Quand les ajustements ne peuvent plus être ajournés, ils se font au niveau des individus et des organisations économiques. » (Daianu, 1994). L’analyse des dernières crises de ces pays s’est souvent traduite par des pressions sur leur balance de paiements qui se matérialisent sur le taux de change lors d’un ancrage de celui-ci. « Les pays en voie de développement sont souvent définis comme des pays structurellement à la recherche de l’épargne mondiale. Cette caractéristique s’accompagne naturellement d’un recours massif à un financement extérieur, dont on a pu mesurer, ces dernières années, le rôle qu’il a joué dans les crises financières. » (Ennajar, & al., 2005) Mais la nature de l’endettement va aussi déterminer le degré de vulnérabilité d’un pays aux tensions financières internationales. « Confronté à un déficit de sa balance des paiements courants qu'il cherche à contrebalancer par des flux de capitaux privés, un pays peut, théoriquement, recourir à plusieurs procédés de financement : attirer les investissements 124 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente directs étrangers, émettre des emprunts obligataires sur les marchés internationaux, obtenir divers types de concours bancaires allant, par exemple, des crédits fournisseurs ou acheteurs aux prêts à moyen terme pour financer les investissements de ses entreprises publiques. Généralement, il sollicite, simultanément, tous ces canaux de financement, selon des proportions variables d'un pays à l'autre et d'une époque à l'autre. » (Metais, 1979) Toute la contrainte réside dans la détermination de la limite du déficit de la balance courante. « En ce qui concerne les concepts sur lesquels s’appuyer, les déséquilibres externes soulèvent trois grands types de questions. Un pays endetté est-il solvable alors que ses déficits courants accroissent, plus ou moins rapidement, son niveau d’endettement ? Ces déficits courants sont-ils soutenables compte tenu d’un ensemble d’hypothèses relatives à leur régime macroéconomique ? Sont-ils éventuellement excessifs par référence à une norme économiquement justifiée ? Chacun de ces concepts impose un degré de contrainte plus ou moins fort en termes d’ajustement éventuel du solde courant. » (Doisy, & al., 2003) Le processus de rattrapage économique, largement adopté aujourd’hui par les pays en voie de développement, impose une restructuration de l’appareil productif. Ce dernier se spécialise dans des secteurs pouvant bénéficier d’un avantage compétitif indispensable à l’intégration du commerce mondial. Mais la principale vulnérabilité de ce processus repose sur un endettement par le marché financier international afin de mener à bien ce projet en parallèle à une amplification des interdépendances commerciales et financières. Deux contraintes apparaissent ici : le poids de la dette qui hypothèque la stabilité financière future du pays et la dépendance aux aléas du marché financier international pourtant de plus en plus instable. La balance courante devra alors devenir positive pour espérer rembourser les capitaux empruntés et se soustraire à l’instabilité du marché financier international. « Un emprunt extérieur permanent est possible si les sommes empruntées sont investies de telle façon qu'elles puissent autofinancer le service de la dette extérieure par une amélioration marginale de la balance commerciale. » (Tremblay, 1983) 125 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente 3. Le rôle prépondérant des IDE : entre attractivité, croissance économique et stabilité macro-financières Les IDE ont aujourd’hui un rôle décisif dans le processus de rattrapage économique des pays en voie de développement. Ils permettent d’apporter les capitaux nécessaires à la recomposition du tissu économique et offrent l’opportunité de transférer des technologies et des compétences puisqu’il s’agit avant tout d’un investissement à vocation productive. Cet état des faits explique la volonté d’attirer les capitaux étrangers afin d’une part, d’aider les pays à se spécialiser dans des secteurs principalement orientés à l’international et d’autre part, amplifiant le commerce externe, lui aussi facteur de développement économique. Mais ces capitaux étrangers, sous forme d’IDE, mettent sous concurrence les territoires pour s’y localiser. Les raisons des choix de localisation territoriale des IDE ont été largement abordées par la littérature existante. La classification de Cheriet et Tozanli (Cheriet, & al., 2007) en détermine trois (tableau 31). Il y a tout d’abord l’approche des déterminants des IDE selon laquelle les IDE vont s’implanter en fonction des comparaisons entre territoires (on peut parler d’avantages comparatifs territoriaux). La seconde approche comprend les stratégies d’implantation des firmes multinationales sur les marchés et leur mode d’entrée, dans laquelle l’idée est de définir l’attractivité au regard de l’entreprise et non plus du territoire. La troisième approche s’inscrit dans une transversalité firmes/territoires où il s’agit de comprendre quel est l’impact des IDE sur un territoire en termes de croissance économique et comment un territoire peut pleinement profiter de ces IDE en termes de diffusion et indirectement, d’attractivité. 126 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Tableau 31. Proposition de classification des travaux sur l’attractivité des IDE Typologie : Les déterminants des IDE. Les stratégies d’implantation des FMN sur les marchés et leur mode d’entrée. les effets des IDE sur les entreprises et les économies locales. Auteurs cités : (Mundell, 1957)(Catin & al, 2002)(Mudambi & Navarra, 2002 in Bevan & al, 2004). (Hymer, 1968)(Hennart & Reddy, 1997)(Hennart & Park, 1993)(Kogut 1991)(Bevan & al, 2004). (Stahler, 2005)(Mainguy, op. cit.)(Dupuch, 2004)(Catin & al, 2001)(Bouklia-Hassan & Zatla, 2001)(Blomström & Kokko, 1998)(Mainguy 2004) Source : (Cheriet, & al., 2007) Le besoin en capitaux étrangers pour les pays émergents s’explique par une amplification favorable du processus de rattrapage économique. Il s’agit non seulement de l’apport d’épargne faisant défaut au pays en voie de développement mais aussi de la diffusion potentielle de compétences et de techniques. « L’intérêt porté aux investissements étrangers dans les pays en développement est généralement justifié par de nombreuses attentes : leur impact sur la croissance, les apports en ressources financières, l’ouverture aux marchés internationaux (débouchés, approvisionnements, adaptation aux normes etc.), la hausse de la productivité, l’amélioration des capacités de gestion locales et les transferts de technologies. » (Mainguy, 2004). La littérature reste largement favorable à cette interprétation. « L’investissement direct étranger est un moteur de croissance et de transformation structurelle » (OECD, 1998). Il permet la libre circulation des idées productives au-delà des frontières (Romer, 1993). Plusieurs approches théoriques coexistent dans l’appréhension du phénomène des IDE sur la croissance économique (tableau 32) : les théories de l’organisation industrielle, les théories du commerce international et les théories de la croissance endogène (Nurbel, & al., 2008). 127 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Tableau 32. Les théories IDE-croissance économique Théories : Description et auteurs cités : « La première approche traite explicitement du rôle des Les théories de investissements directs étrangers dans les transferts de technologie et l’organisation la diffusion de la connaissance, ainsi que de leur impact sur la structure industrielle. du marché du pays d’accueil (Dunning, 1993 ; Caves, 1996). » « La deuxième permet de comprendre les motifs qui fondent Les théories du l’existence des IDE d’une part, les déterminants du choix de la méthode commerce de pénétration des marchés étrangers (exportations, licence, IDE) international. d’autre part (Ethier, 1986 ; Horstmann & Markusen, 1992). » « La troisième approche, enfin, reconnaît en l’investissement direct étranger un moyen de faire augmenter la dotation du pays d’accueil Les théories de la en capital humain, d’accélérer le changement technologique et de croissance diffuser la connaissance entre les nations (Grossman & Helpman, endogène. 1995), avec au bout de la chaîne des effets de l’IDE l’augmentation du taux de croissance de l’économie du pays d’accueil. » Source : (Nurbel, & al., 2008) Dans le cadre de notre problématique, nous nous focaliserons sur les théories de la croissance endogène. Il est plus intéressant de comprendre les effets des IDE sur la croissance économique d’un territoire, car ils justifient son attractivité. « L’originalité de l’approche par la croissance endogène, par rapport aux théories de l’organisation industrielle et à celles du commerce international, réside dans la reconnaissance explicite de ce que les retombées de l’activité multinationale étrangère ne sont pas mécaniques. En d’autres termes, ouvrir la porte aux firmes multinationales étrangères est une étape importante, savoir tirer avantage de leur présence en est une autre. » (Nurbel, & al., 2008). Les IDE vont avoir un impact positif direct à travers l’activité qu’ils vont créer et indirect par les effets de diffusion aux autres acteurs et secteurs de l’économie. « Mis à part les effets quantitatifs (créations d’emplois, contribution au PIB et aux exportations, etc.), l’investissement direct étranger aurait aussi des effets qualitatifs plus durables (diffusion technologique, diversification du tissu productif, etc.). » (Van Wunnick, 2008). L’impact positif des IDE est aussi fonction du niveau de développement du territoire puisque celui-ci ne sera pas toujours en mesure d’en tirer le maximum de bénéfices. L’idée de ce travail repose sur la nécessité de mettre en avant les meilleures conditions permettant d’amplifier les aspects favorables des IDE (Borensztein, & al., 1998). Mais quels 128 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente sont les éléments permettant de maximiser ce potentiel sur la croissance économique ? « Ceci revient à identifier le jeu des complémentarités avec d’autres facteurs rendant les IDE plus efficients encore en termes de croissance. » (Alaya, & al., 2009). La littérature existante parle de « capacité d’absorption » d’un territoire au regard des avantages que peuvent donner des IDE (Cohen, & al., 1990). « La recherche d’un regard critique pertinent sur les retombées de la mondialisation pour les économies d’accueil est fondée sur l’idée selon laquelle les investissements directs étrangers entrants ne suffisent pas, en eux-mêmes, pour améliorer leur compétitivité. Des conditions internes, auxquelles renvoie le concept de capacité d’absorption, doivent être réunies pour donner naissance aux effets positifs attendus de l’activité des firmes multinationales étrangères sur le territoire national. » (Nurbel, & al., 2008). La liste des variables, cumulées avec l’afflux des IDE (tableau 33) permet de décrire les éléments nécessaires à mettre en œuvre par les pays émergents pour amplifier les effets des IDE au maximum. Tableau 33. Variables significatives issues de la littérature économique (non exhaustive) Auteurs : Variables : (G. S. Becker 1962, 1975) ; Un niveau de formation minimum (on parle d’effet seuil) (Borensztein, De Gregorio & afin de facilité l’acquisition puis le transfert des technologies Lee, 1998) ; (Li & Liu, 2005) ; et des compétences issues des IDE. (Lipsey, 2000) (Blomström, Lipsey & Zejan, Les impacts positifs ne peuvent se réaliser qu’entre les pays 1994) développés. (De Mello, 1999), (Lipsey, Plus l’écart technologique est grand entre le territoire qui 2000) ; (Görg & Greenaway, émet et celui qui reçoit l’IDE, plus l’impact favorable des IDE 2004) ; (Xu, 2000) diminue. (Hermès & Lensink, 2003) ; La robustesse du secteur financier apparait décisive afin (Alfaro, Chandra, Kalemlid’optimaliser l’allocation des IDE. Ozcan & Sayek, 2004) (Balasubramanyam, Salisu La stratégie d’intégration internationale avec notamment le & Sapsford, 1996) degré d’ouverture commerciale. Source : Recherche auteur. Les synthèses récentes sur ces questions (Levasseur, 2002) (Mainguy, 2004) (Nurbel, & al., 2008) identifient des listes plus ou moins resserrées de catalyseurs des effets des IDE sur la croissance. Elles incluent aux côtés de l’éducation et de la distance technologique, l’ouverture commerciale, le développement financier et institutionnel, la stabilité 129 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente macroéconomique et les infrastructures qui participeraient à la définition élargie des capacités d’absorption d’une économie. Néanmoins, même s’il apparait pertinent de mettre en avant les effets potentiels des IDE au regard des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers d’un pays, les résultats empiriques de cette approche restent trop contradictoires pour faire émerger un véritable consensus sur les variables les plus pertinentes. Certaines études mettent en avant une relation positive avec les composantes du pays (Ram, & al., 2002) pouvant disparaitre au regard de la sélection des variables de mesure. Au contraire, d’autres ne trouvent rien (Dutt, 1997) (Carkovic, & al., 2005). Pourtant, les pays en voie de développement centrent leur stratégie de rattrapage économique sur la maximisation du potentiel des IDE. « Du point de vue de la problématique du rattrapage technologique qui est encore d’actualité pour de nombreux pays en développement, la capacité d’absorption est à la fois un instrument et un objectif de politique économique en général, de politique de compétitivité, en particulier.» (Nurbel, & al., 2008) Outre la maximisation des effets des IDE, les territoires émergents développement leur attractivités pour caper les IDE par le biais de différents dispositifs comme l’exonération d’impôts, le versement de subventions, des aides à l’implantation, la création de zones franches… (Michalet, 1999) (Rodrik, 2007) (Bailey, & al., 2002). «Attirer sur son territoire les filiales des multinationales devient un mot d’ordre généralisé » (Michalet, 2007). Cette relation entre commerce international et IDE devient alors le mode de développement qu’il faut s’approprier à travers la mise en place de stratégies d’attractivités. « Les effets bénéfiques du commerce extérieur et de l’investissement direct étranger (IDE) sur l’efficience et la croissance sont généralement reconnus et l’on est largement d’avis que l’action des pouvoirs publics devrait viser à réduire ou supprimer les obstacles à l’intégration mondiale par le biais des échanges et de l’IDE » (Giuseppe, & al., 2003). Les PECO s’inscrivent dans cette dynamique puisque leur niveau d’attractivité n’a cessé de croitre depuis 2002 (graphique 31). 130 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Graphique 31. Solde des flux de capitaux étrangers des PECO 30000 Bulgarie 25000 République tchèque Estonie 20000 Lettonie Lituanie 15000 Hongrie 10000 Pologne 5000 Roumanie Slovénie 0 2000 2002 2004 2006 2008 2010 Slovaquie -5000 Source : Eurostat - Millions d'euros (à partir du 1.1.1999)/Millions d'écus (jusqu'au 31.12.1998). Cependant, la politique d’attractivité qui s’opère induit des situations de mise en concurrence entre pays. Il ne faut pas oublier qu’une entreprise s’installe sur un territoire pour deux raisons : bénéficier d’un avantage compétitif et avoir accès au marché local (Michalet, 1999). Cet effet de compétition entre territoires impose aux pays de satisfaire aux exigences des IDE, notamment à celle de leur libre circulation, induisant ainsi des difficultés lors de tensions financières. « Se mettent en place progressivement des politiques de "séduction" qui indiquent que les dirigeants de ces pays lient, à présent, les IDE aux dynamiques de croissance. La quasitotalité des PSEM tente aujourd’hui d’attirer les IDE par des "mesures incitatives" diverses et variées comme la stabilisation macroéconomique, des politiques de change et la signature d’accords de partenariat avec l’Europe, des mesures d’exonération fiscale ou la mise en place de zones franches, des privatisations sanctionnant le désengagement de l’État de certains secteurs d’activité, ou des réformes institutionnelles visant à l’amélioration du climat des affaires. » (Alaya, & al., 2009) La stabilisation macroéconomique et les politiques de change sont alors deux éléments particulièrement importants dans le cadre de notre problématique puisqu’ils vont être à l’origine de vulnérabilités pour ces pays lors de tensions financières internationales. 131 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Cette tendance se confirme dans les faits avec des modifications de la réglementation qui deviennent toutes favorables aux IDE (CNUCED, 2001) « L’assouplissement considérable du cadre réglementant les IDE a des incidences importantes sur les choix de localisation des entreprises : il permet aux entreprises de rechercher les sites qui correspondent le mieux aux différentes étapes de leur processus de production. Ceci est d’autant plus possible que les échanges commerciaux sont eux-mêmes libéralisés et que les progrès en matière de communication — notamment les nouvelles technologies de l’information et de la communication — permettent de lier à moindre coût les différents sites de production. » (Levasseur, 2002). Au final, les firmes multinationales qui dirigeront leurs capitaux vers les territoires les plus attractifs chercheront les avantages comparatifs au regard de différents critères qui ne reposent pas seulement sur la minimisation des coûts de production. Différentes variables importent également, comme le coût de la main d’œuvre, l’ouverture commerciale, la fiscalité, la taille du pays… (tableau 34). 132 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Tableau 34. Variables explicatives de l’implantation étrangère dans un pays Source : (Levasseur, 2002) 133 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Ces études mettent clairement en avant une diversité importante de variables sans pour autant justifier de la prédominance de l’une sur l’autre, excepté celle de la taille du pays. L’interprétation qui peut en être faite est qu’il n’existe pas d’éléments déterminants, au niveau macroéconomique d’un pays, pouvant attirer les flux de capitaux. Il convient plutôt de se pencher vers des secteurs d’activités pour établir une expertise et des compétences plus fortes, indispensables à la réalisation d’attractivité ciblée et non globale. Les PECO ont pu converser vers des spécialisations sectorielles précises pour attirer les IDE (tableau 35). Tableau 35. Spécialisation sectorielle au sein des PECO Source : Chelem, Natixis, en pourcentage du total – 2006 Cette orientation vers le commerce international s’est traduite par des spécialisations tournées vers l’énergie pour certains (Lituanie, Estonie et Lettonie), l’agroalimentaire (Lituanie et Lettonie), le textile (Roumanie et Bulgarie), le non ferreux (Bulgarie), la mécanique (République Tchèque, Pologne et Hongrie), les véhicules (République Tchèque et Slovaquie) et l’électronique (Hongrie). Ces éléments démontrent la matérialisation d’un positionnement stratégique dans le commerce international. La théorisation de la stratégie des firmes multinationales recoupe différents domaines : l’économie internationale traditionnelle, l’économie spatiale l’économie industrielle, l’économie de la firme (Krifa-Schneider, & al., 2007). Le but n’est pas de définir les courants théoriques les plus enclins à expliquer le processus de la localisation d’IDE sur un territoire mais plutôt de mettre en avant sa complexité, pour mieux l’appréhender. « Ces difficultés 134 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente d’appréciation se traduisent par une multiplication des scores et mesures de l’attractivité, atténuant davantage la visibilité/crédibilité des politiques publiques d’incitation des IDE. Dans ce sens, une réelle compétition entre les pays/territoires s’est instaurée à mesure que le contexte international accordait aux FMN une puissance leur permettant de transcender la souveraineté des États-nations. » (Cheriet, & al., 2007). La solution qui est adopté est de présenter un ensemble de classification de l’attractivité d’un territoire afin d’en décrire la complexité. Les travaux de Anne Musson (Musson, 2010) permettent, à travers un exemple de 30 pays avec sept méthodes de classifications les plus médiatisées, d’illustrer la divergence qui peut exister dans la détermination de l’attractivité d’un territoire par rapport à un autre (tableau 36). Tableau 36. Exemples de la diversité des classifications sur l’attractivité des territoires Source : (Musson, 2010) - °Utilisation de l’étude d’Ernest et Young portant sur les capitales économiques concurrentes à Paris. 135 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Le tableau ci-dessus reprend les classifications issues du rapport annuel du World Competitiveness Yearbook de l’IMD de Lausanne où l’attractivité territoriale est définie d’après la performance économique, l’efficacité du gouvernement, l’efficacité des affaires et les infrastructures. Il y a aussi l’Indice Global Competitiveness Index de l’organisme World Economic Forum qui repose sur l’efficience des institutions, des politiques publiques ainsi que de la productivité de l’économie. L’institut AT Kearney, quant à lui, définit un Indice de Confiance, utilisé pour faire ressortir l’attrait de certains territoires pour des dirigeants de firmes multinationales, ainsi qu’un Indice de Globalisation où l’intégration économique, la connectivité technologique et l’engagement politique sont déterminants. La Banque Mondiale, à travers, notamment, les études de la CNUCED avec l’Indice de Performance des IDE, travaille sur un indice d’attractivité au regard des flux d’IDE dont la publication se réalise dans le World Investment Report. Le dernier indicateur résulte des travaux d’Ernst&Young entre les pays européens. L’ensemble de ces classifications mettent en exergue un point important : la divergence des résultats. Il devient difficile pour les territoires émergents de mettre en place des politiques d’attractivité sans véritablement savoir quels sont les éléments essentiels leur permettant de devenir attractifs alors que les IDE apparaissent aujourd’hui déterminants dans l’impulsion d’une dynamique de rattrapage viable à moyen terme par le transferts de compétences et de technologies. Pourtant, la compétition entre territoires est forte. « Dans ce cadre, la stratégie de la firme se fonde sur la recherche des facteurs de production les plus compétitifs, leur organisation et leur mise en œuvre là où les conditions de production sont les plus favorables. Ce type de logique conduit les FMN à comparer systématiquement les avantages respectifs des territoires dans leur choix de localisation, sans hésiter à transférer leur activité (ou un segment d’activité) ailleurs lorsque les conditions de rentabilité ne leur paraissent plus requises. » (Krifa-Schneider, & al., 2007). La dynamique de rattrapage, à travers un endettement qui se matérialise par des prises de participation et la création de nouvelles structures avec les IDE, apparait vertueuse au regard de la spécialisation sectorielle qu’elle induit et aux transferts de technologies et de compétences qu’elle offre potentiellement. Cependant, même si cette ouverture commerciale et financière sur le reste du monde semble amplifier le processus de rattrapage 136 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente économique, elle place les pays dans des conditions de forte vulnérabilité du fait de la situation de concurrence qui se créée entre eux (notamment lorsque ces pays ont majoritairement un ancrage de leur taux de change ainsi qu’un compte de capital libéralisé afin d’attirer les capitaux étrangers). En effet, à la moindre tension financière, ces capitaux peuvent quitter le pays, mettant alors sous pression la balance courante : le déficit récurrent, a priori normal au regard du processus de rattrapage économique et induisant alors des tensions sur le taux de change, peut se trouver lui-même annonciateur d’une crise de change potentielle. 137 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Conclusion intermédiaire Le choix de définir une stratégie de rattrapage économique reposant sur l’intégration au commerce international à travers l’afflux d’IDE, comme source de financement mais aussi de transferts de technologies et de compétences, est pertinent pour bon nombre de pays émergents, et notamment les PECO. Comme le décrit le schéma 1, le processus de développement économique suppose l’acquisition d’une spécialisation sectorielle axée vers l’exportation qui va nécessiter des capitaux étrangers afin de restructurer le tissu économique. Le déficit récurrent de la balance courante qui en découle va être compensé par une attractivité de capitaux en IDE. La dynamique favorable qui s’y installe, comme par exemple depuis le début du processus d’intégration à l’Union européenne puis celle en cours à la zone euro pour les PECO, permet de renforcer les spécialisations afin d’espérer à terme une diminution des déficits de la balance courante. Schéma 1. Stratégie de développement économique Diminution déficit structurel balance courante. Spécialisations sectorielles axées vers les exportations. Déficit structurel de la balance courante Dynamique favorable. Développement tissu économique afin d'amplifier les exportations Attractivité capitaux internationaux. La littérature économique semble attester favorablement ce processus de rattrapage économique qui se traduit par une participation au commerce mondial et une intégration au marché financier internationale. Cependant, son appropriation par la quasi-totalité des pays 138 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente émergents met en avant une situation de compétition. Il s’agit de mettre en place des politiques d’attractivités territoriales qui se traduisent principalement par la libéralisation du compte de capital et la neutralisation du risque de dépréciation monétaire (stabilisation du taux de change). Cette dynamique est pourtant source de difficultés car elle implique des vulnérabilités fortes face à la capacité de régulation macroéconomique et macro-financière que ces pays peuvent exercer. Sans justifier d’une dégradation de leurs fondamentaux, ils sont sujets à l’instabilité financière internationale dont leur dépendance à travers l’octroi de capitaux étrangers ne fait qu’amplifier le potentiel d’effets de contagion. L’incompatibilité entre libéralisation du compte de capital et stabilisation du taux de change donne une place trop importante à l’afflux des IDE qu’il convient de perpétuer jusqu’à l’amélioration du solde de la balance courante dans le cadre du processus de rattrapage. D’autres éléments externes aux pays émergents peuvent justifier un arrêt des flux de capitaux à l’origine des premières tensions macroéconomiques et macro-financières qu’il peut subir. Afin de conforter le postulat de la problématique de ce travail, il conviendra d’approfondir cette démarche. 139 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Chapitre 4 Spécification de faits originaux : construction théorique pays développé/ays émergent d’après l’hypothèse d’instabilité financière de Minsky. Introduction intermédiaire Le chapitre précédant met en avant les principales bases nécessaires à la compréhension des vulnérabilités potentiellement induites par le processus de rattrapage économique des pays émergents, de par des interdépendances source d’une amplification des effets de contagions, qui deviennent difficilement maîtrisables au regard de l’instabilité de la sphère réelle. Nous allons maintenant décrire l’élément perturbateur qui matérialisera les tensions sur ces vulnérabilités apparentes. Tout d’abord se pose la question du comportement du marché financier international afin de créer des tensions externes au pays émergent sans pour autant se baser sur une dégradation de ses fondamentaux. Ensuite, il s’agira de comprendre la dynamique des effets de contagion en interne, notamment par les canaux qui y seront sollicités, pour aboutir à une crise de change pouvant être assimilée à la modélisation de première génération. L’approche théorique de l’Hypothèse d’Instabilité Financière (HIF) de Minsky (Minsky, 1974) apparait comme le cadre d’analyse le plus pertinent de la problématique. Selon le postulat de cette hypothèse, l’occurrence d’une crise financière n’est pas dû à la diminution du taux de rentabilité (qui peut être assimilé à la non dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers pour un pays) mais à celle du taux d’intérêt. Il est ici l’élément perturbateur puisque la configuration de l’endettement devenu international repose sur des échéances de court terme dans des pays développés (afin de minimiser le coût du capital) pour investir sur des placements de moyen voire long termes dans des pays émergent (afin de maximiser le taux de rentabilité). L’HIF de Minsky a pour habitude d’être utilisé sur un même territoire vis-à-vis de la nature temporelle de l’endettement puis de l’investissement. Il y a ici une recontextualisation théorique où l’endettement se fait dans un pays développé afin d’investir ces capitaux dans un pays émergent par cet effet de levier. La 140 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente difficulté va résider dans l’explication de la variation à la hausse du taux d’intérêt alors que la situation économique et financière reste favorable au contexte. Conjointement à l’instabilité de la sphère financière et aux effets de contagion qu’ils peuvent induire (notamment à travers l’HIF de Minsky), il faudra modifier les fondements de l’interprétation des crises de change de première génération pour en expliquer le nouveau cheminement. C’est surtout de leur besoin en capitaux pour palier leur manque d’épargne pourtant facteur de la dynamique de rattrapage économique qui les rend dépendants à ces aléas (cette caractéristique est appelée « le péché originel des pays émergents »). Le processus de développement économique des pays émergents repose sur la restructuration du tissu économique induisant des importations principalement de biens d’équipements, sources d’un déficit récurrent de la balance courante. La double contrainte de libéralisation du compte de capital et de stabilisation du risque de dépréciation monétaire pour bénéficier de ces capitaux internationaux met les pays dans une situation de vulnérabilité forte. La récurrence de ce déficit, légitime dans le cadre du processus de rattrapage, impose un afflux positif de capitaux étrangers, même lors de périodes de tensions, afin d’assurer la stabilité du taux de change. La poursuite de ce raisonnement va s’illustrer par une démonstration empirique des faits auparavant décrits théoriquement. La crise des Subprimes en est l’exemple type puisque l’origine de la crise en prend la configuration. Il s’agira de reprendre les principaux agrégats économiques et financiers afin de matérialiser la dynamique de la problématique dans l’occurrence de la crise de change qui a pu se profiler au sein des PECO. Une approche complémentaire sur l’histoire des PECO parachèvera cette description, d’une division internationale socialiste du travail durant la période communiste à la situation actuelle au sein de l’Union européenne. Cette démarche permettra de justifier des divergences actuelles de ces pays quant aux effets des tensions internationales. Pourtant, l’impact historique de ces spécialisations sectorielles fortement orientées par l’URSS a induit un héritage qu’il leur faudra exploiter au maximum afin de sortir favorablement de la période de transition qui s’en est suivie. 141 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente 1. L’apport de Minsky comme élément d’explication au déclenchement de la crise La logique de ce travail repose sur la nécessité d’apporter des réponses aux pays qui peuvent succomber à un choc externe suite à une crise financière internationale, alors qu’ils possédaient de bons fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers (forte croissance économique, chômage contenu, secteurs d’activités productifs et concurrentiels à l’international, …). Il convient donc de s’interroger plus sur les effets de contagion induits par l’instabilité financière du reste du monde et de son impact sur l’économie en question que sur le processus de création d’une crise financière ou sur son explication (déséquilibre macroéconomique, bulle spéculative, restructuration sectorielle…). La dépendance aux capitaux étrangers, indispensable pour lancer le processus de rattrapage économique des pays en voie de développement, justifie l’amplification de vulnérabilités potentielles par les canaux de contagion. Un retour historique sur les éléments théoriques des raisons de l’instabilité financière permet de faire émerger quelques interprétations intéressantes au regard de la problématique. Il s’agit des effets induits par les politiques monétaires sur l’endettement, l’inflation et le prix des actifs financiers comme éléments de perturbations de la sphère financière. Selon Wicksell (Wicksell, 1898), les politiques d’ajustements monétaires peuvent faire diverger le taux d’intérêt de sa valeur naturelle. Plus le coût du financement de l’investissement est faible, plus la masse monétaire augmente, ce qui, au final, offre un contexte de tension inflationniste et d’endettement à la base de tensions financières. Fisher (Fisher, 1911) s’intéresse au niveau d’endettement que peuvent induire les politiques monétaires lors de tensions. Un taux d’endettement trop important des agents économiques oblige les pays à vendre des actifs pour rembourser une partie de leurs dettes ou de leurs intérêts. La généralisation de ce comportement entraine une chute des prix des actifs qui, finalement, concourra à accroitre la valeur réelle de l’endettement (niveau d’endettement donné pour des placements en perte de valeur), source de vulnérabilités supplémentaires. Hayek (Hayek, 1931) définit alors deux types d’allongements du détour de 142 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente production : l’accroissement de l’épargne volontaire et la création monétaire pure. Dans le deuxième cas, l’insuffisance de fonds prêtables en début de période sera compensée par une création monétaire pure qui, en fin de période, ne sera pas validée comme source d’accumulation mais détruite par la consommation. Il ne peut pas perpétuellement y avoir de création monétaire (on parle de crédits purs) pour soutenir l’épargne (inflation, endettement, …). « Dans ces conditions, toute injection non homothétique de monnaie entraînera mécaniquement un déséquilibre temporaire de la production, qui se résoudra dans l’inflation de telle sorte que la partition initiale de la production soit finalement rétablie. » (Léonard, 1985) L’approche de Minsky (Minsky, 1974) compléte celle de Keynes (Léonard, 1985) tout en reprennant certains concepts d’Irving Fisher (Fisher, 1911) sur les niveaux d’endettement induits par les politiques monétaires. Pour Minsky, en période de prospérité, les agents économiques vont prendre plus de risques pour augmenter leurs profits (phase d’euphorie). Afin d’accroitre la rentabilité de leurs investissements, ils vont s’endetter à court terme (les taux sont plus faibles) et investir sur le moyen, voire long terme afin de maximiser les profits (Mynsky, 1986). Lorsque les agents économiques commencent à s’apercevoir qu’il y a une prise de risques trop importante, il y a une augmentation de la préférence pour la liquidité au sens de Keynes (Keynes, 1955). Celle-ci se traduire alors par une augmentation du taux d’intérêt et un rationnement du crédit (Arestis, & al., 2002) (Wolfson, 2002). La configuration de l’investissement par endettement peut nécessiter le renouvellement des crédits initiaux. Cette exigence va rendre instable la sphère financière en cas de choc de liquidité et/ou de taux d’intérêt sans pour autant justifier une diminution des taux de rentabilité des investissements. Le schéma 2 décrit cette répartition de l’investissement à travers des structures d’endettement pouvant devenir financièrement instables. Celles-ci vont évoluer en parallèle à une situation économique favorable de l’hedge vers la spéculative puis la ponzi finance jusqu’à ce que cette configuration deviennent trop risquée sans pour autant témoigner d’une dégradation de la rentabilité financière. 143 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Schéma 2. Typologie des situations financières de Minsky Typologie de la structure de vulnérabilité financière des investisseurs : Hedge Finance « Les cash flows espérés dépassent les charges financières à chaque période. Comme les revenus nets sont positifs à chaque période, l’espérance de la valeur nette actualisée peut rester positive pour les taux d’intérêt élevés. » Spéculative Finance « Les cash-flows courants sont inférieurs aux charges financières courantes, mais le revenu courant excède néanmoins les intérêts à pays de la dette. L’écart est donc dû à l’impossibilité de rembourser des dettes parvenues à échéances. Cette illiquidité peut rester transitoire et la valeur actualisée des revenus futurs être supérieure à la valeur actualisée des paiements futurs (unité illiquide mais solvable). Les unités spéculatives doivent continuellement reconduire leur dette afin de rembourser les principaux. Leur valeur actuelle n’est donc positive que pour des taux d’intérêt suffisamment faibles ou une inflation suffisamment élevée. » Ponzi Finance « Les cash flows ne suffisent à payer ni les principaux ni les intérêts. L’unité engagée dans ce type de financement doit alors accroître sa dette à chaque période. Ce type de financement n’est viable qu’en période d’inflation éleée et de faibles taux courts. Il ne s’agit pas cependant nécessairement d’un financement frauduleux. En effet, des projets d’investissement dont la période de gestation est très longue et le seuil de rentabilité très élevé peuvent engager les entrepreneurs dans ce type de situation pour le moins inconfortable. » Source : (Brossard, 1998) Par conséquent, l’approche de Minsky est bien la plus pertinente pour démontrer notre problématique. Bien au-delà de l’explication des raisons potentielles de vulnérabilités de la sphère financière, il faudra envisager cette approche par la suite dans un contexte international. Contrairement à l’hypothèse de Keynes (Keynes, 1955), Minsky suppose que l’émergence de la crise n’est pas le fruit d’une diminution des taux de rentabilité mais le résultat d’une augmentation des taux d’intérêt, mettant en difficultés le secteur financier de par la configuration qui s’est installé. « Chez Minsky, la bascule dans la crise est quasiexclusivement due à la hausse du taux monétaire de l’intérêt, (…) la variabilité des gains financiers prospectifs, leurs transformation en pertes en capital, autrement dit la crise financière et son articulation avec la crise d’accumulation qui se traduira par une régression de l’investissement productif, ne tiennent qu’au fil ténu de la hausse du taux monétaire de l’intérêt. » (Léonard, 1985). Il n’y a donc pas de dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers comme éléments justifiant les tensions, postulat dans lequel notre problématique s’inscrit. 144 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente La raison de l’augmentation des taux d’intérêt se doit d’être explicitée afin de comprendre la démarche de Minsky et celle de notre travail. Cette variable est l’élément clé dans la dégradation de la structure d’endettement de la sphère financière. Pour les keynésiens auxquels Minsky s’apparente, le taux d’intérêt est endogène à l’économie. Ses variations sont alors le fruit de la configuration qui va s’exprimer au regard des variables réelles de l’économie. Cependant, Minsky suppose qu’un rationnement des réserves ne peut conduire qu’à une augmentation des taux d’intérêt. Il suit alors la logique Wicksellienne (Wicksell, 1898) selon laquelle la demande est plus forte que l’offre, ce qui induit une augmentation du taux d’intérêt. Il s’agit d’une approche monétariste où le niveau de l’offre de monnaie détermine le taux d’intérêt. Or, il y a un problème de paradigme, puisque les postkeynésiens supposent que la monnaie est endogène au système et qu’elle est déterminée seulement par la demande (Léonard, 1985) (King, 1996) (Lavoie, 1997) (Mouakil, 2006). Dans ce contexte, comment le taux d’intérêt peut-il varier à la hausse puisqu’il est fonction de la préférence pour la liquidité qui elle-même ne peut augmenter qu’en cas d’anticipations négatives ? Il convient de proposer une alternative afin d’expliquer comment le taux d’intérêt varie à la hausse tout en restant dans une logique d’instabilité financière postkeynésienne. Celle-ci doit convenir à la théorisation de notre problématique, à savoir la non dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers donc des taux de rentabilité. Keynes (Keynes, 1955) en mettant en avant la notion de préférence pour la liquidité des agents économiques, a biaisé la logique classique et néoclassique selon laquelle la monnaie ne servait que d’intermédiaire à des échanges (Say, 1861). Les agents économiques pourraient refuser de consommer ou d’épargner une partie de leur monnaie afin de satisfaire quatre objectifs pouvant varier suivant les anticipations des agents (motifs de transaction, de précaution, de financement et de spéculation) (Keynes, 1955). La demande effective (consommation des salariées et investissement des entreprises) va alors déterminer le niveau d’emploi et de production puisqu’il n’y a plus reconduction de la richesse vers la production mais conservation de celle-ci en tant que liquidité par une thésaurisation possible. Ainsi, les investissements vont aussi être fonction des effets d’anticipations futurs, qui détermine alors le niveau de demande effective actuelle. 145 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Le courant postkeynésien, qui se caractérise par l’approfondissement des apports de Keynes (Mouakil, 2006), va tenter de poursuivre cette interprétation. Minsky va s’y inscrire, se qualifiant de keynésien financier. Son originalité sera de définir la monnaie tant en terme de stock que de flux. « Concevoir l’économie capitaliste comme un ensemble de bilans et de relevés d’opérations interdépendants, reconnaitre que les postes des bilans créent des flux monétaires à travers le temps et intégrer ensemble les modifications de bilan avec les flux de revenus. » (Minsky, 1996). La monnaie sera stock puisqu’elle va être détenue en tant qu’actif le plus liquide dans un monde incertain (principe de la préférence pour la liquidité et des effets d’anticipation de Keynes). On s’assure de sa solvabilité vis-à-vis de ses engagements par la réduction de l’incertitude lors de son stockage (Minsky, 1991). La monnaie sera un flux indispensable au financement de l’investissement. De nombreuses modélisations tenteront de reprendre cette interprétation (Lavoie, & al., 2001-2002). Ces deux caractéristiques de la monnaie, pour Minsky, se font dans un environnement qui a évolué. Le début de cette mutation a pu commencer avec la crise de 1966 aux USA qu’il considère comme l’ère de la fragilité financière (Minsky, 1986) (Wray, 1999). Le processus de libéralisation et de déréglementation a détruit la distinction entre économie d’endettement et économie de marchés financiers. La monnaie est régulée par la demande et non par l’offre. En effet, d’après Minsky, les innovations financières permettent d’augmenter la circulation de la base monétaire et de la masse monétaire. De nombreux auteurs vont travailler sur les intuitions de Minsky (Dymski, & al., 1992)(Papadimitriou, & al., 1997). La création de titres financiers, à travers des effets d’innovation, va permettre de faire circuler de la liquidité de manière à accroitre la quantité de financement. Il y a alors contournement de la création monétaire de la Banque Centrale. Ces innovations sont principalement utilisées pour financer des investissements par l’endettement. Le contexte de la libéralisation financière internationale, comme il a pu être développé auparavant à travers l’ouverture des comptes de capital et l’impact que cela peut avoir sur la stabilisation des taux de change de nombre de pays émergents, va renforcer d’autant plus cette tendance. L’augmentation ou la diminution de la masse monétaire lors de ses flux avec l’étranger grâce à la libéralisation des marchés de change confortent cette interprétation. Les travaux de Minsky s’inscrivent dans une volonté de stabiliser une économie devenue 146 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente instable par la configuration financière actuelle (Minsky, 1986). La situation présente rend toujours pertinente cette volonté de stabilisation du marché financier. Cette configuration de l’endettement cumulatif (hedge, speculative et ponzi finance) peut nécessiter le renouvellement des crédits initiaux, rendant instable la sphère financière en cas de choc de liquidité et/ou de taux d’intérêt. « Lorsque le financement de l’économie est en partie assuré par hausse de la vitesse de circulation de la monnaie, il se produit une réduction du rapport liquidités/titres qui implique un plus grand risque de voir se produire des ventes de titres contagieuses et une chute brutale des prix d’actifs. » (Brossard, 1998). Le schéma 3 décrit clairement le processus d’Hypothèse de l’Instabilité Financière de Minsky. Schéma 3. L’Hypothèse d’Instabilité Financière de Minsky (1974 ) Comportement spéculatif des acteurs financiers. Augmentation du profil de risque des investisseurs. Endettement à court terme pour investir à moyen voire long terme. Rupture à un moment (choc interne, externe, prise de conscience collective...). Phase d’euphorie (perspective de croissance forte). Elément perturbateur Cette exigence va rendre instable la sphère financière. Endettement de court terme implique le renouvellement des crédits initiaux. Augmentation du taux d’intérêt et Vulnérabilité renforcée par la rationnement du crédit. configuration de l’investissement. Augmentation de la préférence pour la liquidité. L’explication des postulats de Minsky, notamment la variation du taux d’intérêt dans un contexte économiquement favorable, va poser de nombreux questionnements au sein même de la pensée postkeynésienne. Deux courants de pensée coexistent (Mouakil, 2006). 147 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente D’un côté, il y a les structuralistes (Pollin, 1991) qui se rapprochent des idées de Minsky, qui regroupent Pollin (Pollin, 1991), Palley (Palley, 1994) (Palley, 1996) et Wray (Wray, 1995). De l’autre, les horizontalistes qui se rapprochent des idées de Kaldor (Moore, 1988), regroupant Lavoie (Lavoie, 1992) (Lavoie, 1995) et Moore (Moore, 1991) (Moore, 1994). Dans l’intérêt de la compréhension de la problématique de ce travail, il convient de décrire les principaux points de discordances de ces deux courants. Ils vont permettre d’expliquer les variations à la hausse du taux d’intérêt dans une phase d’euphorie, élément indispensable à l’occurrence des pressions internationales. Les structuralistes de Minsky vont avancer que seule la masse monétaire est endogène et vont à l’encontre des autorités monétaires qui ne sont pas totalement accommodantes (graphique 32). Graphique 32. Représentation des interprétations monétaires des structuralistes Source : (Mouakil, 2006) Le graphique 32 en illustre l’évolution. Les courbes I, II et III décrivent l’impact des différentes politiques monétaires restrictives de la Banque Centrale sur le taux d’intérêt où celui-ci augmente au regard de la contraction de la liquidité. Lorsque le taux d’intérêt s’accroit, il devient de plus en plus intéressant de diminuer les liquidités oisives afin de profiter de cette rémunération (justifiant l’amplification de la circulation de la monnaie). La courbe, d’abord horizontale, ne va pas tout de suite devenir verticale. La vitesse de 148 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente circulation de la monnaie ne pouvant pas augmenter à l’infini, les innovations financières (les contrats de réméré et l’essor du marché des fonds fédéraux pour Minsky, les flux de capitaux mondiaux pour nous) vont prendre le relais afin de maximiser l’utilisation de la monnaie. Au regard de l’efficacité limitée de la politique monétaire restrictive, la Banque Centrale va de nouveau interagir où la courbe va se déplacer de I à II puis à III et ainsi de suite. « Il apparait de cette manière un palier horizontal (a-b) caractérisant la période durant laquelle l’innovation institutionnelle se propage » (Mouakil, 2006). Quant aux horizontalistes de Kaldor, autant la masse monétaire que la base monétaire sont endogènes. La Banque Centrale et les banques commerciales restent toujours totalement accommodantes. Pour autant, cela ne signifie pas qu’elles sont passives puisque le taux d’intérêt va permettre de définir une contrainte de solvabilité (graphique 33) « L’offre de monnaie est infiniment élastique (par rapport au taux d’intérêt), ou plutôt elle ne peut pas être distinguée de la demande de monnaie. » (Kaldor, & al., 1981) Graphique 33. Représentation des interprétations des horizontalistes Source : (Mouakil, 2006) Les structuralistes vont aussi généraliser le concept de préférence pour la liquidité des banques commerciale. « L’augmentation de l’offre de monnaie dans l’économie se traduit par une dégradation des principaux ratios de liquidité des banques et des emprunteurs qui 149 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente entrainerait en retour une augmentation de la préférence pour la liquidité des banques d’où des taux d’intérêt de plus en plus élevés facturés aux emprunteurs. » (Mouakil, 2006). L’hypothèse d’instabilité financière de Minsky est définie ici comme une pro-cyclicité du levier d’endettement de l’ensemble des acteurs économiques. Les horizontalistes refusent ce lien entre augmentation de l’offre de monnaie et dégradation du levier d’endettement qui est à l’origine de l’amplification de la préférence pour la liquidité et qui se matérialise par le niveau du taux d’intérêt. La préférence pour la liquidité est un concept largement subjectif, dont la modulation de la préférence n’est pas automatique lors de l’augmentation des risques, surtout si l’on est dans une phase d’expansion (anticipations futures optimistes). L’approche de Minsky apparait dès lors incompatible avec le principe de demande effective. En effet, Minsky semble négliger « le paradoxe de la dette » de Kalecki. Selon cet auteur, l’endettement n’est pas systématiquement source d’augmentation de vulnérabilités financières (diminution de la solvabilité de l’agent économique) puisque l’endettement peut en retour accroitre la demande et donc engendrer les profits susceptibles d’augmenter les fonds propres des agents économiques. Dans ces conditions, une augmentation de la préférence pour la liquidité qui conduirait à une hausse du taux d’intérêt, comme le supposent les structuralistes, n’a pas lieu d’être. L’originalité que nous apportons, dans le prolongement du courant structuraliste, est d’intégrant la Banque Centrale comme l’un des acteurs économiques interagissant de façon endogène sur la demande de monnaie. Cette interprétation va permettre d’expliquer la relation de cause à effet sur le taux d’intérêt. Les structuralistes, et notamment Minsky, décrivent la Banque Centrale selon ses deux rôles, celui de « Big Bank » qui consiste à laisser chuter (sans les contrôler) les taux d’intérêt lors de période de crise et le rôle de gestion de la masse monétaire, imposant aussi la variation de ce même taux d’intérêt. Se pose alors la question de savoir comment accomplir ces deux rôles, a priori contradictoires mais ayant la même variable pour intervenir, le taux d’intérêt. Pour les horizontalistes, il n’y a pas de dilemme entre gestion de la politique monétaire et préteur en dernier ressort. La Banque Centrale peut tout à fait « resserrer » sa politique monétaire, 150 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente mais pour eux, cela ne signifie pas qu’elle va rationner les réserves. Ce n’est pas parce que la Banque Centrale est accommodante que le contrôle des taux d’intérêt lui échappe. Ainsi, les horizontalistes considèrent le taux directeur comme une variable exogène et visualisent l’offre de monnaie Banque Centrale comme étant parfaitement élastique à ce taux. A l’opposé de cette interprétation horizontaliste, il est supposé que la Banque Centrale n’est jamais totalement accommodante. Le taux directeur n’est pas exogène comme pourraient le décrire les horizontalistes mais il reflète une certaine endogénéité qu’il convient de définir. Dans le contexte actuel de mondialisation avec un processus déjà largement avancé de libéralisation et de dérégulation, les Banques Centrales n’ont plus les moyens d’encadrer « par la force » les flux monétaires. Il s’agit d’insister sur le degré de pouvoir des Banques Centrales. Elles contraignent moins les agents économiques à travers la régulation de la base et de la masse monétaire qu’elles influencent leurs comportements par la variation de leurs taux directeurs. On peut dès lors comparer la Banque Centrale à une « agence de notation spécifique » puisqu’elle est indépendante, publique et normalement neutre vis-à-vis de l’ensemble des agents économiques. C’est la variation du taux directeur qui va alors informer les agents économiques qui ne sont pas obligés de passer par elle pour se refinancer en période de forte croissance économique. Mais son rôle de préteur en dernier ressort lui permet, en parallèle à des prises de décisions sérieuses, d’assoir sa capacité d’influence. On peut alors supposer une « endogénéisation » de la Banque Centrale à l’économie afin de la considérer comme un agent économique « particulier ». Puisqu’elle n’a pas les moyens de déterminer la quantité de monnaie à mettre à disposition mais plutôt une capacité à influencer le degré de préférence pour la liquidité, elle influence les anticipations au regard de son statut d’agence de notation particulière mais aussi par son rôle de préteur en dernier ressort qui donne de l’importance à son interprétation. A la suite de tous ces éléments, on peut maintenant expliquer la dynamique de l’occurrence de l’instabilité financière de Minsky. Les schémas 4 et 5 vont les reprendre en décrivant le rôle essentiel que peut jouer une Banque Centrale. 151 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Schéma 4. Lors d’une période de spéculation positive Une prise de risque qui peut apparaitre logique puisque les perspectives de rentabilités présentes et futures sont fortes. La préférence pour la liquidité diminue, nous sommes dans un contexte d’anticipations favorables. Les taux d’intérêt entre les institutions financières et les agents économiques diminuent. La Banque Centrale peut être éventuellement accommodante et suivre cette tendance en diminuant ses taux directeurs. Les agents économiques prennent de plus en plus de risques en s’endettant sur le court terme pour investir sur le moyen voire le long terme. Schéma 5. Renforcement de la période de spéculation positive : l’euphorie Nous supposons que les taux de rentabilités présents mais aussi futurs restent attractifs (logique de l’HIF de Minsky, le déclenchement de la crise se fait par la structure de financement et non par une dégradation des taux de rentabilité). On suppose que le taux d’intérêt entre agents économiques et institutions financiers est toujours faible (la préférence pour la liquidité est toujours faible). La phase de spéculation positive devient de plus en plus forte. Cette période de spéculation quelque peu excessive va induire une source potentielle d’inflation. La Banque Centrale est ici dans l’un de ces deux rôles (stabilisation de la masse monétaire). Elle va avoir de l’influence par sa neutralité (public, indépendante…) mais aussi par son second rôle de preteur en dernier ressort. La Banque Centrale, qui n’a pas le pouvoir de réguler les flux monétaires par la force, va tenter d’informer les agents économiques du caractère potentiel de l’augmentation de l’inflation. On suppose que l’inflation n’est pas obligatoirement présente mais la Banque Centrale suppose qu’il y a un risque. Deux effets vont alors surgir au regard du comportement changeant de la Banque Centrale. Tout d’abord un effet sur la variation des taux d’intérêt induit par l’anticipation de l’inflation. On suppose que dans les prévisions de rentabilité du capital, il peut y avoir des pertes 152 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente induites par l’effet d’inflation (rôle d’agence de notation de la Banque Centrale qui informe sur ses prévisions). Cette anticipation va alors faire augmenter les taux d’intérêt entre les agents économiques et les institutions financières (pour pallier le risque de l’inflation, les prêts doivent être assortis de taux d’intérêt plus élevés). Il y a donc un calquage des taux d’intérêt sur les taux directeurs par effet d’anticipation. Le deuxième effet agit sur la contraction de la liquidité où il y a changement de rôle de la Banque Centrale. L’augmentation des taux directeurs de la Banque Centrale induit automatiquement son second rôle de préteur en dernier ressort. Même si l’économie réelle n’a pas pour le moment de difficultés (nous sommes dans une phase spéculative positive), les agents économiques et financiers anticipent qu’en cas de difficultés financières, ils devront se refinancer par l’intermédiaire de la Banque Centrale à des coûts plus élevés. Ils préfèrent donc diminuer leur endettement et garder des liquidités afin de se prémunir contre tous risques. Ceci amène donc à une contraction de la liquidité, de la masse monétaire mais aussi de la base monétaire (la préférence pour la liquidité augmente). La description de l’hypothèse d’instabilité financière de Minsky a permis d’illustrer dans quel cadre d’analyse théorique s’inscrit la problématique. La variation à la hausse du taux d’intérêt résultant de la structure instable d’endettement des agents économiques s’explique par le rôle que va jouer la Banque Centrale en tant qu’agent économique influençant la sphère réelle. Même si celle-ci ne peut rendre exogène la masse monétaire, puisque les innovations et la libéralisation financière ont offert l’opportunité de passer outre cette instance, sa capacité d’influence lors de risque d’inflation peut suffire à provoquer une rupture de la dynamique favorable alors que les taux de rentabilité étaient encore acceptables. On peut voir que le déclenchement d’une crise peut se réaliser sans dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers. Il s’agira alors de réinterpréter ces nouveaux éléments au regard de notre cadre d’analyse, à savoir une intégration commerciale et financière des pays émergents facteur d’amplification de l’interdépendance et des effets de contagion. 153 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente 2. Le processus de crise : mise en parallèle des modélisations de première génération La problématique de thèse repose sur l’analyse du comportement d’un pays en voie de développement doté de bons fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers mais soumis aux impacts d’une crise financière internationale (choc externe) issue d’un ou de plusieurs pays développés qui se transforme en crise domestique auto-entretenue. L’idée est de mettre en avant qu’un pays avec de bons fondamentaux macroéconomiques peut entrer en crise au regard de la vulnérabilité potentielle qui s’instaure à travers sa dynamique de rattrapage économique en parallèle à une structure instable de l’investissement international (principalement par la nature de l’endettement). Il convient de matérialiser cette dépendance aux vulnérabilités financières internationales (à l’aide d’une configuration à la Minsky) qui se manifeste par des pressions sur le taux de change du pays en voie de développement. Les vulnérabilités potentielles des pays en voie de développement ont déjà été évoquées (partie 2 chapitre1). Le choix d’axer le rattrapage économique, à travers des IDE, sur des spécialisations sectorielles basées vers l’exportation induit des fragilités fortes aux tensions financières potentielles externes. Cette insertion au commerce international impose de déréglementer le compte de capital, source d’attractivité devant permettre aux IDE de se localiser librement dans ces pays. Mais la nécessité de stériliser le risque de change pour les investisseurs étrangers conduit à stabiliser la monnaie de ces pays à une devise de référence. Ainsi deviennent-ils dépendants de la situation financière internationale (risque de fuite des capitaux mettant sous pression leur taux de change) sans pour autant témoigner, au regard de la problématique, de vulnérabilités apparentes de leurs fondamentaux. Le déficit récurrent de leur balance courante apparaissant normal lors d’un processus de rattrapage économique justifie l’obligation d’attractivité des IDE afin de maintenir l’ancrage. Le chapitre 2 de la 1ere partie a pu illustrer les multiples raisons pouvant justifier de la fuite de capitaux à travers les modélisations de première, seconde et troisième générations. Il convient ici d’expliquer la dynamique des tensions financières internationales qui vont impacter le pays émergent à travers ces vulnérabilités potentielles. Il s’agira de quantifier, non pas la qualité des fondamentaux macroéconomiques et macro-financières, puisque nous 154 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente réfutons leur dégradation comme élément justifiant de l’occurrence d’une crise, mais plutôt les effets de contagion induits par cette situation de dépendance aux capitaux étrangers. Le comportement spéculatif des acteurs financiers internationaux, dans le cadre de la libéralisation des flux, engendre une augmentation des risques, notamment par effets de contagion, sur la sphère financière internationale. L’originalité du raisonnement réside dans l’utilisation d’une approche de Minsky (Minsky, 1974) dans un contexte où les effets de contagion y sont déterminants (contagion financière à travers les canaux du taux d’intérêt et de la liquidité) entre un pays développé et un pays en voie de développement. L’endettement à court terme (afin de réduire le coût du capital) des agents économiques internationaux dans le pays développé est destiné à investir à moyen, voire long terme, dans le pays en voie de développement (afin de bénéficier de taux de rentabilité plus élevé). Ceci induit une vulnérabilité importante pour le pays d’accueil des capitaux, sans pour autant témoigner d’une dégradation de ses variables macroéconomiques et macrofinancières. Cependant, une telle vulnérabilité n’a jamais été véritablement analysée dans un contexte international (à plusieurs pays) et, surtout, il n’y a jamais eu de modélisation pour tenter de réaliser des tests économétriques, mis à part les travaux de Taylor et O’Connell (Taylor, & al., 1985) et Downe (Downe, 1987) qui reprend les bases du modèle de Taylor et O’connell. L’approche de Minsky n’a été développée que dans le cadre du territoire national américain (Taylor, & al., 1985) (Downe, 1987). Des travaux ont pu reprendre son approche mais il n’y a pas eu de réalisations économétriques dans un contexte international et plus spécifiquement entre des pays développés et émergents dans le cadre de l’Union européenne (Alves, & al., 2000) (Schroeder, 2002) (Arestis, & al., 2002) (Amann, & al., 2006) L’augmentation des taux d’intérêt et la contraction de la liquidité dans le pays développé, propre à l’Hypothèse d’Instabilité Financière de Minsky, va imposer aux agents économiques internationaux de rapatrier les actifs placés dans le pays en voie de développement puisqu’ils n’auront plus l’opportunité de renouveler leurs crédits nécessaires au remboursement de ceux arrivant à échéance. Ce rapatriement des capitaux, rendu possible 155 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente par la libéralisation des comptes de capital du pays en voie de développement, va induire des pressions sur l’ancrage du taux de change au regard du déficit récurrent de la balance courante, un déficit apparaissant néanmoins logique dans le cadre d’une dynamique de rattrapage. Il va donc y avoir des pressions sur le taux de change du pays en voie de développement qui peut s’assimiler à une crise de change de première génération à la Krugman (Krugman, 1979) par une diminution inquiétante des réserves de devises. La dynamique de la crise, par un effet de contagion des canaux financiers, ne s’apparente pas à une dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers du pays en voie de développement mais avant tout à une dépendance financière au pays développé, ce qui renforce l’interprétation initiale. La dynamique de l’Hypothèse d’Instabilité de Minsky sera ici interprétée dans une configuration de l’endettement et de l’investissement au niveau international. La crise est ici le fruit d’une régulation qui se réalise afin de répondre à des tensions qu’il n’a pas été possible soit d’envisager soit d’appréhender comme le chapitre 1 de la 1ere partie a pu le mettre en avant. Dans le cadre de cette problématique, la crise va mettre en difficulté certains agents économiques qui vont devoir adopter des comportements pouvant provoquer des effets de contagion auprès du pays en voie de développement au regard des vulnérabilités qu’il aura pu matérialiser, non pas en terme de dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers mais surtout en terme de degré de dépendance et de contagion à la structure de l’endettement devenue international. Le schéma 6 met en avant le processus de réalisation de la crise qu’il va convenir de développer. 156 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Schéma 6. Impact d’une contagion financière internationale dans la dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers Pays développé étant à l’origine d’une crise. Une crise peut être considérée comme un mécanisme de régulation face à la nécessité de répondre à des contraintes devenues incontrôlables (surinvestissement, mauvaise anticipation, incapacité à mettre en œuvre des solutions appropriées, …).. A l’origine, la crise peut être cantonnée à un secteur spécifique. Des effets de contagion s’exercent au sein même du pays développé. Canal des échanges commerciaux et des prix intérieurs (via la demande). Pays en voie de développement. Canal des taux d’intérêt dans un système de change fixe asymétrique. Canal de la liquidité dans un système interconnecté. Canal des interdépendances d’interprétation des informations. Canal de la concurrence des fonds d’investissements. Contagion financière par ces 2 canaux. Crise financière qui dégrade les fondamentaux macroéconomiques pour entrer dans un cercle vicieux de crise économique. Canal des arbitrages entre les marchés nationaux et les risques pays. La transmission du choc externe va se réaliser à travers la sphère financière internationale puisqu’elle repose sur une configuration de l’endettement et de l’investissement devenu mondiale. Il s’agira alors d’étudier deux canaux financiers prépondérants, plus particulièrement pour les PECO, dans l’effet de contagion du choc (schéma 7). Le canal des taux d’intérêt dans un système de change fixe asymétrique (l’adhésion à l’Union européenne mais aussi celle en cours à la zone euro indiquent une stabilisation voire même un ancrage des taux de change avec les PECO) ainsi que le canal de la liquidité dans un système interconnecté (la dynamique de rattrapage économique des PECO a amplifié les flux d’investissements étrangers ayant principalement pour origine l’Europe occidentale). Ces canaux sont d’autant plus significatifs que l’adhésion à l’Union européenne s’est faite sous condition de la libéralisation du compte de capital (Directive Européenne, 1988). A travers ces deux canaux financiers, une dépendance s’exerce et peut se matérialiser par des périodes d’attraction puis de répulsion, dont l’instabilité financière internationale sera l’élément perturbateur. 157 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Schéma 7. Les canaux significatifs au regard de la problématique de thèse Canal des taux d’intérêt dans un système de change fixe asymétrique : Canal de la liquidité dans un système interconnecté : L’adhésion à l’Union européenne mais Les flux d’investissements de l’Europe aussi celle en cours à la Zone euro occidentale vers l’Europe centrale et indiquent un ancrage des taux de orientale, à travers la dynamique de change entre ces pays. Le canal du taux rattrapage économique des PECO, d’intérêt est donc indéniablement justifient la prise en compte du canal de significatif dans des effets de contagion la liquidité. financière. Les modélisations dites de premières générations (Krugman, 1979) (Flood, & al., 1984) déterminent les éléments responsables de l’occurrence d’une crise financière à travers la diminution des réserves de change induite par une dégradation des fondamentaux monétaires, pour ensuite disparaitre totalement et rapidement lors de la fuite généralisée des capitaux (schéma 8). Ici, la baisse des réserves s’explique par le déficit récurrent de la balance courante qui était auparavant compensé par l’afflux de capitaux étrangers sous forme d’IDE. Or, on s’inscrit dans des vulnérabilités seulement potentielles en termes de dépendance et d’effets de contagion à travers la structure d’endettement vouée aux investissements internationaux. La perte de confiance, se confirmant lors de l’épuisement des réserves, va être à l’origine d’une attaque spéculative soudaine réduisant à néant la totalité des réserves alors restantes. Il n’y a pas ici de variables macroéconomiques et macro-financières justifiant la dégradation des réserves de change. Flood et Garber (Flood, & al., 1984), ont distingué la situation d’avant crise de celle d’après crise en y introduisant un prix d’équilibre du taux de change défini de « shadow price » 158 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente (Salant, 1983). Les agents économiques auront le même comportement que dans les modélisations de première génération de Krugman (Krugman, 1979) ainsi que Flood et Garber (Flood, & al., 1984). Ils vont spéculer lorsqu’ils anticiperont une source de gains ayant pour origine la différence entre le niveau du taux de change fixé par le gouvernement et le « shadow price », autrement dit le niveau d’équilibre. Les spéculateurs auront un comportement rationnel puisque, même sans dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers du pays émergent, la fuite des capitaux justifiée par l’Hypothèse d’Instabilité Financière de Minsky (Minsky, 1974) va mettre le taux de change sous pression. La matérialisation de la crise, lors de l’éclatement de l’ancrage, peut être source de gains. Schéma 8. Dynamique des modélisations de 1ere génération Contexte : Intérêt à la problématique : Les modèles fondateurs : • Les modélisations de première génération traduisent un déséquilibre sur le marché de la monnaie domestique : inflation causée par un déficit budgétaire ou/et par un excès de crédits domestiques qui rentre en conflit avec la contrainte d’un stock limité de réserves de devises nécessaires à assurer l’ancrage (fixe ou partiel) du taux de change. • L’impact d’un pays développé sur un pays émergent va se traduire par un retrait des flux d’investissements du pays développé, source de création monétaire dans le pays émergent, donc d’inflation. • Flood et Garber (1984) : supposent la Parité des Taux d’Intérêt (PTI) non couverte ; Cette divergence est pourtant fondamentale pour nous (HIF de Minsky). • Krugman (1979) : n’impose pas cette contrainte de PTI. Nous allons donc l’utiliser dans cette modélisation. Le timing de la crise reste toujours problématique, comme dans les premières, secondes et troisièmes générations de crises de change, au regard de la multitude de variables qu’il conviendrait de sélectionner. Même si Kaminsky a pu en énumérer 103 (Kaminsky, & al., 1998), dans le cadre de notre problématique, il s’agirait de se focaliser sur le degré de dépendance amplifiant les effets de contagion financière entre pays émergents et pays 159 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente développés (variables qui ne sont pas véritablement comptabilisées encore aujourd’hui dans le cadre des crises de change comme nous l’avons dit dans le chapitre 1 partie 1). A partir du moment où la source de l’occurrence de la crise du pays émergent est définie, à savoir la configuration de l’endettement des agents économiques internationaux, il devient difficile pour ces pays de la réguler puisqu’elle n’est pas de leur ressort comme nous l’avons déjà dit dans le chapitre 1 partie 1. La modélisation de première génération a pu être précurseur sur la dynamique de la rupture d’un taux de change lors de la fuite de capitaux. Les deuxièmes et troisièmes générations de modélisation viendront redéfinir des raisons de fuites généralisées des capitaux. Ici, il s’agit non pas de tenter de réexpliquer l’occurrence d’une crise de change, la dynamique de la 1ère génération le fait amplement, mais plutôt de recontextualiser la situation de vulnérabilité qui s’inscrit au regard de la sphère financière internationale en parallèle à des dynamiques de rattrapage économique des pays émergents. Le schéma 9 représente l’interaction entre les modélisations de premières générations associées à l’Hypothèse d’Instabilité Financière de Minsky dans le cadre d’un pays développé et d’un pays émergent. Schéma 9. Modélisation des spécificités de la problématique Le comportement spéculatif des acteurs financiers internationaux, dans le cadre de la libéralisation des flux, engendre une augmentation des risques (HIF 1974) . L’impact sur le taux de change va alors affecter la dynamique du pays émergent de la même manière qu’une crise traditionnelle de 1ere génération. Modélisation de 1ere génération associée à l’HIF de Minsky. Le déficit récurrent de la balance courante, induit par le processus de rattrapage économique, n’est plus compensé par les flux d’IDE mettant sous pression la stabilité du taux de change. 160 En cas de choc financier international, la vulnérabilité fondamentale se localise alors dans le processus de contagion (contagion par le canal du taux d’intérêt et par le canal de la liquidité), impactant l’ancrage du taux de change du pays émergent lors de la fuite des capitaux étrangers rendue possible par la libéralisation du compte de capital. Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Le profil des pays émergents répondant à notre problématique présente des caractéristiques qu’il peut convenir de lister afin de rappeler la pertinence de s’inscrire dans les modélisations de première génération. Elles incluent le déficit récurrent du compte courant, les flux de capitaux puissants vecteurs d’IDE ainsi qu’un ancrage fixe ou partiel du taux de change. La dynamique de rattrapage économique induit un processus d’importations nécessaire à l’industrialisation du territoire se concrétisant par un déficit de la balance commerciale et indirectement de la balance courante. En période d’attractivité, les flux d’IDE vont largement compenser ce déficit. Alors qu’en période de fuite généralisée des capitaux, il ne le sera pas, il sera en revanche à l’origine de la diminution mécanique des réserves de change. Le déficit de la balance courante n’est viable (à l’origine seulement), que par l’attractivité du territoire au regard des capitaux étrangers qui s’y localisent. L’importance de ces flux est déterminante dès le début du processus de rattrapage économique. La nature de l’ancrage définit le degré de vulnérabilité potentiel des pays émergents lors d’une fuite généralisé des capitaux. Un ancrage fixe devient d’autant plus difficilement tenable en situation de tensions. Ces éléments, dans le cadre du nouveau contexte financier international, permettent de lister les spécificités qui apparaissent déterminantes dans la concrétisation de cette nouvelle forme de crise de change, lors de son occurrence (tableau 37). Tableau 37. Les spécificités de la problématique de thèse La responsabilité des acteurs internationaux est cruciale. La libéralisation des capitaux rend tout comportement spéculatif global. La finance n’est pas neutre vis-à-vis de la sphère réelle. La notion de vulnérabilité est à conceptualiser en termes de dépendances qui vont se matérialiser en termes d’effets de contagion. Les effets de contagions financières sont primordiaux. L’interconnexion entre le système de production et le système financier à travers l’endettement international assure la pertinence de cette approche. La modélisation qu’il conviendra de réaliser se devra de reprendre ces éléments sans pour autant avoir l’ambition de créer une nouvelle génération. Il s’agira de réutiliser certains 161 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente éléments qui apparaissent déterminants dans la concrétisation de l’occurrence d’une crise de change au regard des vulnérabilités potentielles reflétant le nouveau contexte financier international. 162 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente 3. Matérialisation du phénomène de crise dans les PECO : un processus en deux étapes Les PECO ont des caractéristiques structurelles qui nous poussent à les adopter dans le cadre de cette problématique : passé socialiste sous l’emprise de l’URSS puis processus de libéralisation et d’intégration à l’UE (en 2004 et en 2007) puis à l’Union Monétaire européenne (actuellement en cours). La période de transition des PECO, de l’économie planifiée à l’économie de marché, s’est réalisée par une intégration économique et financière internationale à travers l’amplification de leurs attractivités notamment vis-à-vis de l’Europe occidentale (processus de délocalisation et perspective de croissance forte de ces nouveaux marchés émergents). La dynamique de développement économique s’est faite à travers l’attractivité des IDE avec des spécialisations vers des secteurs porteurs à l’exportation comme il a pu l’être décrit dans le chapitre 1 de la partie 2. Cette ouverture commerciale et financière s’est réalisée dans le cadre d’une implication de plus en plus forte à l’Union européenne où de véritables éléments de dépendances financières ont pu se matérialiser entre pays développés et pays émergent de cette zone. L’adhésion à la zone communautaire a été conditionnée par une libéralisation des flux financiers, économiques et monétaires. La relative bonne dynamique de ces pays justifie l’hypothèse de fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers robustes alors que les vulnérabilités potentielles en termes de dépendance par des effets de contagion n’ont cessé de s’amplifier. Les travaux déjà réalisés sur ces pays n’utilisent pas la même approche que la nôtre puisqu’il y est toujours question de la responsabilité du pays dans l’occurrence d’une crise (Brüggemann, & al., 2002) (Carriello & al., 2006) (Cartapanis, & al., 1999) (Kittelmann, &al., 2006) (Krkoska, 2000) (Ötker, & al., 1994) (Schardax, 2002) Ce travail souhaite s’appuyer sur une étude empirique concernant les PECO qu’il conviendra de sélectionner suivant les aspects suivants : bons fondamentaux macroéconomiques, libéralisation des flux financiers, économiques et monétaires et forte interdépendance avec des pays développés dans une situation d’instabilité financière internationale induite par un endettement à la Minsky. L’idée est de justifier empiriquement la problématique auparavant 163 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente décrite théoriquement. Ainsi, les PECO légitimement sélectionnés sont ceux ayant intégré l’UE en 2004 et 2007 (Bulgarie, Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Pologne, République Tchèque, Roumanie, Slovaquie, Slovénie) puisqu’ils abordent l’ensemble de ces caractéristiques. On peut donc distinguer deux étapes, comme la problématique a pu le décrire. La première dans laquelle les anticipations sont positives dans le cadre de l’intégration en cours à l’Union européenne et à l’Union Monétaire Européenne avec ancrage fixe/partiel du taux de change, se matérialisant par un afflux de capitaux étrangers (schéma 10). Cette situation permet de compenser le déficit récurrent de la balance courante. Le processus de rattrapage favorable de ces pays induit une diminution des risques à la source d’un endettement de plus en plus instable, comme peut l’exprimer l’Hypothèse d’Instabilité Financière de Minsky. Il en ressort un endettement de court terme dans le pays développé pour investir ces capitaux à moyen et long termes dans les PECO. Schéma 10. Dynamique de l’étude : étape 1 (spéculation favorable) Stabilisation voire ancrage fixe du taux de change. Pays développé étant à l’origine d’une crise. Endettement de plus en plus instable par les agents économiques internationaux dans le pays développé à court terme afin de diminuer le coût de financement. Processus d’attractivité internationale. Afflux de capitaux étrangers. Pays émergent. Investissement à moyen terme et long terme par les agents économiques internationaux dans le pays émergent afin de maximiser les profits. La seconde étape résulte d’un élément perturbateur dans le pays développé, à l’origine d’anticipations négatives qui vont faire fuir les capitaux étrangers dans le pays émergent 164 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente (schéma 11). C’est le début de la crise financière globalisée mettant sous pression la stabilité du taux de change du pays émergent. Schéma 11. Dynamique de l’étude : étape 2 (choc financier externe) Stabilisation voire ancrage fixe du taux de change . Pays développé étant à l’origine d’une crise. Difficultés des agents économiques internationaux à se refinancer, imposant la liquidation de leurs investissements. Dynamique d’un choc financier externe. Fuite des capitaux étrangers. Pays émergent. Crise financière qui dégrade les fondamentaux macroéconomiques pour entrer dans un cercle vicieux de crise économique. Le besoin de liquidités des agents économiques internationaux va induire une fuite des capitaux ne permettant plus de stabiliser le déficit récurrent de la balance courante. La création d’une instabilité financière va d’autant plus se renforcer que les PECO doivent à terme intégrer la zone euro, induisant des taux de change fixe voire fortement stabilisés (afin de diminuer le risque de change). En cas d’augmentation des taux directeurs de la zone euro par la Banque Centrale européenne (pour quelque raison que ce soit), le taux de court terme en euro va augmenter et la liquidité disponible se contracter. Les agents économiques internationaux vont voir la rentabilité nette des placements dans les PECO diminuer (l’augmentation du coût du capital induit une diminution de la rentabilité nette des placements), source de perte d’attractivité des PECO. De plus, la difficulté de se refinancer, de par la contraction de la liquidité, va imposer aux investisseurs de vendre des avoirs afin d’obtenir de la liquidité, induisant la chute de la valeur des actifs des PECO. L’ensemble de ces contraintes sur le taux de change (perte d’attractivité des placements, nécessité de vendre des actifs, déficits récurrents de la balance courante propre au processus de rattrapage des PECO) met sous pression l’ancrage 165 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente du taux de change. La crise de change alors induite peut s’apparenter aux modèles de première génération à la Krugman (Krugman, 1979) si les réserves de devises ne sont pas suffisantes pour assurer l’ancrage. Des faits empiriques viennent confirmer la viabilité de l’hypothèse qui est proposée ici. Les raisons qui vont pousser les investisseurs de la zone euro (des pays développés) à investir vers les PECO (pays émergents) s’expliquent par des taux de rentabilité plus élevés dans les PECO (graphique 34). Il va donc y avoir une forte attractivité des capitaux de la zone euro vers l’Europe centrale et orientale. Quant à l’endettement, les taux d’intérêt de la zone euro sont largement plus faibles que ceux des PECO (graphique 35). Les investisseurs internationaux vont donc s’endetter en euro et à court terme afin de diminuer le coût du capital (graphique 36). Graphique 34. Différence du taux de rentabilité du capital entre les PECO et la zone euro 4,00 Bulgarie 3,00 Rép Tchèque 2,00 Estonie 1,00 Hongrie 0,00 Lituanie -1,00 Lettonie -2,00 Pologne -3,00 Roumanie -4,00 Slovénie Slovaquie Source : Eurostat et calculs auteur. Le taux de rentabilité par pays est calculé à partir de l’Excédent Brut d’Exploitation du pays divisé par la Formation Brute de Capital Fixe de ce même pays. Le graphique met en avant des tendances intéressantes. La première tendance générale indique une relative amélioration des taux pour l’ensemble des PECO au regard de la rentabilité du capital de la zone euro (différentiel qui augmente). La seconde correspond au découpage en deux sous166 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente périodes : de 1995-2000, certains pays comme la Slovénie, la Roumanie, la Bulgarie et la Hongrie ont des différentiels négatifs alors que pour la période 2000-2008, nous n’avons plus aucun pays avec des différentiels négatifs (les plus mauvais suivent 0%). Enfin, la troisième tendance révèle la disparité des taux entre les PECO. Une majorité ont un différentiel entre 0 et 1% alors que la Roumanie, la Hongrie et la Pologne peuvent aller jusqu’à 3%. Graphique 35. Comparaison taux d’intérêt (à 3 mois) de la zone euro et des PECO 16 Bulgarie 14 Rép Tchèque Zone euro 12 Estonie 10 Hongrie 8 Lituanie 6 Lettonie 4 Pologne Roumanie 2 Slovénie Slovaquie Source : Eurostat La description de ce graphique démontre que pour une même échéance d’endettement (ici à 3 mois), le taux d’intérêt de la zone euro est toujours plus faible en comparaison des taux d’intérêt des PECO. Une petite divergence est à relever pour la République Tchèque. On peut expliquer cette situation par un risque-pays bien plus fort dans les PECO que dans la zone euro. 167 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Graphique 36. Comparaison entre les taux d’intérêt à différentes échéances en euro 5,5 5 Jour le jour 4,5 1 mois 4 3,5 3 mois 3 2,5 6 mois 2 12 mois Source : Eurostat L’analyse de ce graphique indique que le coût de l’endettement en euro matérialisé à travers les taux d’intérêt devient de plus en plus faible lorsque les échéances (au jour le jour jusqu’à 12 mois) diminuent. Cependant, il existe une relative corrélation entre tous les taux d’intérêt (à la hausse comme à la baisse) qui impacte en même temps toutes les échéances d’endettement. Une présentation plus synthétique de la problématique dans le cadre particulier des PECO est ainsi décrite à partir des schémas 12 et 13. Le processus d’intégration à l’Union européenne puis à l’Union Monétaire européenne en parallèle au rattrapage économique de ces pays a induit une structure économique et financière pouvant être qualifiée de particulière. Les effets de dépendance, sources de contagion potentielle en cas de difficultés, sont au cœur de l’interprétation de notre problématique. 168 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Schéma 12. La dynamique d’attractivité des capitaux des PECO : étape 1 Schéma 13. La dynamique de fuite de capitaux des PECO : étape 2 169 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente La récente crise des Subprimes permet d’illustrer, au titre de l’empirique, la dynamique qui a pu être jusqu’à présent décrite sous une approche plutôt théorique. En effet, la situation récente fait état de difficultés récurrentes suite à la crise financière internationale. Celle-ci, mis à part des effets de contagions induits par des interdépendances financières internationales fortes, n’a jamais mis en avant une vulnérabilité macroéconomique ou macro-financière au sein des PECO, mis à part peut-être sur le niveau de leurs réserves de devises nécessaires à la stabilisation de leur taux de change. Notre problématique a l’opportunité de pouvoir être calée sur le cas concret des PECO, d’une première période d’afflux massifs de capitaux étrangers qualifiée d’étape 1 prenant fin pour donner suite à une deuxième période de fuite généralisée des capitaux définie d’étape 2. Les graphiques suivants témoignent de ce découpage entre deux périodes distinctes. Graphique 37. Attractivité puis fuites généralisées des capitaux étrangers 110000 90000 Slovaquie Etape2 Etape 1 Slovénie Roumanie 70000 Pologne Hongrie 50000 Lituanie 30000 Lettonie Estonie 10000 République tchèque Bulgarie -10000 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 Source : Eurostat - Millions d'euros (à partir du 1.1.1999)/Millions d'écus (jusqu'au 31.12.1998). A travers le graphique 37, les capitaux ont pu se localiser de plus en plus fortement au sein des PECO depuis les années 2002 jusqu’en 2008 (étape 1). Ensuite, ils ont pu fuir de cette zone géographique avec un retournement de conjoncture important de 2008 à 2009 (étape 170 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente 2). Il y a donc bien eu un élément perturbateur à l’origine de ce retournement de conjoncture défavorable à ces pays. Graphique 38. Déficit récurrent du compte courant résultant du processus de rattrapage économique Bulgarie 10,00 Républiqu e tchèque Estonie 5,00 0,00 Lettonie -5,00 Lituanie -10,00 Hongrie Pologne -15,00 Etape1 Roumanie -20,00 Etape2 -25,00 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 2006 2008 2010 Slovénie Slovaquie Source : Eurostat et calculs auteurs – compte courant en pourcentage du PIB. Les comptes courants des PECO sont ici tous déficitaires depuis les années 1997 jusqu’en 2009, sauf peut-être pour la Slovénie en 2001, 2002 et 2003 (graphique 38). Cette situation, qui traduit le processus de rattrapage économique de ces pays, les met dans une position de vulnérabilité forte vis-à-vis des aléas du marché financier international lors des fluctuations des capitaux. Il leurs faut constamment un afflux positif de capitaux afin de stabiliser leur taux de change quelque soit la conjoncture économique du moment. Lors de périodes favorables (étape 1), l’attractivité se fait sans difficultés. Alors que durant les périodes de tensions internationales (étape 2), même si le processus de rattrapage économique peut marquer une pause au regard du contexte actuel, la balance courante reste déficitaire pour la majorité des PECO malgré une légère amélioration mais qui reste insuffisante. 171 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Graphique 39. Impact sur la croissance économique des turbulences financières internationales Etape2 Etape1 Source : Eurostat - Millions d'euros (aux prix de l'année précédente) Le graphique 39 est très intéressant car ils décrivent la dynamique de la croissance économique des PECO lors de la période favorable (étape 1) puis lors de tensions financières internationales (étape 2). Nous constatons que le retrait des capitaux à partir de 2008 impacte fortement la croissance économique puisqu’elle en devient même négative en 2009. Le processus de contagion financière qui a pu être décrit auparavant se concrétise ici avec un cercle vicieux se matérialisant par une chute de la croissance économique nationale. Pourtant, avant les tensions financières internationales, il n’y avait pas de vulnérabilités apparentes des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers dans les PECO. 172 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Tableau 38. Ancrage voire stabilisation des taux de change Ecart-type des taux de change avec l’euro (2000 2010) Bulgarie République Tchèque Nature officielle de l’ancrage Currency board avec l’euro Flottement administré Currency board avec l’euro dans le cadre du Estonie MCE2 depuis juin 2004 et adoption depuis janvier 2011 Hongrie Flottement Currency board avec l’euro dans le cadre du Lituanie MCE2 depuis juin 2004 Peg contre l’euro dans le cadre du MCE2 Lettonie depuis mai 2005 Pologne Flottement Roumanie Flottement administré Adhésion au MCE2 en 2004 puis adoption Slovénie de l’euro en 2007 Flottement dans le cadre du MCE2 depuis Slovaquie 2005 puis adoption de l’euro en 2009 Source : Eurostat, Natixis et calculs auteur. Variation nominal Variation réel 0,13 2,62 1,60 2,69 0,00 0,84 3,56 3,64 1,95 2,12 1,92 2,33 5,35 4,46 5,35 3,65 0,61 0,51 1,87 2,43 Le tableau 38 met clairement en avant la stratégie de stabilisation des taux de change de l’ensemble des PECO, officiellement à travers un ancrage fixe ou officieusement par une stabilisation de leur volatilité avec l’euro. Comme il a pu l’être décrit dans le chapitre 1 partie 2, la dynamique de rattrapage économique de ces pays repose sur l’attractivité d’IDE nécessaire à financer la restructuration de leur appareil productif. L’adoption de ce même processus par de nombreux pays en voie de développement les met en situation de concurrence. Cette dernière sera à l’origine de la mise en place d’une politique d’attractivité territoriale qui passe notamment par la neutralisation du risque de dépréciation monétaire. Pourtant, comme les graphiques précédents ont pu le décrire, l’afflux de capitaux n’est pas toujours possible, particulièrement lors de périodes de tensions financières internationales. Le déficit récurrent de la balance courante va alors induire des pressions sur la stabilité du taux de change pendant ces moments de tensions. Lorsqu’il n’est pas possible d’anticiper les tensions financières pouvant conduire à une crise (comme dans cet exemple, bien que hors de portée de la capacité de régulation des PECO), les pays vont devoir œuvrer pour tenter d’atténuer les impacts sur le risque de rupture de la stabilisation de leur taux de change. Le 173 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente chapitre 2 de la partie 1 avait décrit les méthodes d’intervention des pouvoirs publics et des Banques Centrales de ces pays pour contrer le risque de dépréciation monétaire. Pour reconstituer les stocks des PECO, il est possible de jouer sur l’appréciation des taux directeur, sur les réserves de devises ainsi que par l’endettement en devises étrangères des pouvoirs publics. Toutes ces stratégies ont été utilisées par les PECO. L’augmentation des taux directeurs a été mise en œuvre au risque d’accentuer la dégradation de la crise économique qui se profile au sein de ces pays (graphique 40), d’accroitre l’utilisation des devises de réserves (graphique 41) et finalement, aggraver l’endettement en devises internationales pourtant plus difficile à obtenir au regard du risque de défaut grandissant sur ces pays (graphiques 42). Graphique 40. Les taux directeurs comme outil de régulation du taux de change Bulgarie 15 Etape1 Etape2 13 11 République tchèque Estonie Lettonie 9 Lituanie 7 Hongrie Pologne 5 Roumanie 3 Slovénie 1 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 Slovaquie Source : Eurostat - Taux d'intérêt des banques centrales - Taux d'emprunt officiels. 174 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Graphique 41. Diminution des réserves de devises 70 000,00 Bulgarie 60 000,00 République tchèque Estonie Etape1 50 000,00 Lettonie Etape2 40 000,00 Lituanie 30 000,00 Hongrie Pologne 20 000,00 Roumanie 10 000,00 Slovénie 0,00 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 Slovaquie Source : Eurostat - Millions d'euros (à partir du 1.1.1999)/Millions d'écus (jusqu'au 31.12.1998) Graphiques 42. Niveau de risque souverain des PECO Etape 2 Etape 2 Etape 1 Etape 1 55 Les graphiques 40, 41 et 42 témoignent de nouveau par des faits empiriques de l’occurrence d’une crise sur le taux de change lors du phénomène de contagion des tensions financières internationales. Jusque dans les années 2008, la période est favorable (étape 1) avec une faible volatilité des taux directeurs, une amplification continue des réserves de devises et un risque souverain quasi-nul. Ensuite, lors de l’émergence des tensions financières 175 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente internationales (étape 2), la stabilisation des taux de change devient difficile (graphique 43) même avec l’utilisation des techniques de régulation décrites ci-dessus. Graphique 43. Appréciation des taux de change 20,00 Etape2 15,00 Lev bulgare Couronne tchèque Etape1 10,00 Forint 5,00 Litas 0,00 Lats -5,00 Zloty -10,00 Leu roumain Source : Eurostat L’augmentation du profil de risque des PECO, à partir de l’augmentation des vulnérabilités d’interdépendance avec la sphère financière internationale, impose une amplification du profil de risque des investisseurs internationaux ayant pu y localiser des capitaux. Même si ceux-ci peuvent supporter l’augmentation de leurs taux d’endettement, induits par l’augmentation des taux directeurs de la zone euro en terme de marge nette, ils vont avoir, malgré tout, des difficultés à trouver de nouvelles liquidités nécessaires pour se refinancer de par la nature court-termiste des échéances de leurs endettements au regard de l’amplification du risque de leur profil (principe de l’Hypothèse d’Instabilité Financière de Minsky décrit dans le chapitre 1 partie 2). Indirectement, ils devront vendre des actifs issus de ces pays, soit pour obtenir de nouvelles liquidités, soit pour diminuer leur exposition au risque souverain, ce qui amplifie la fuite des capitaux étrangers des PECO. L’ambition de se focaliser sur les PECO a permis de matérialiser par les faits empiriques l‘occurrence d’une crise dans ces pays sans pour autant justifier la dégradation de leurs fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers. Au contraire, il a pu être mis en avant que les interdépendances financières induites par une intégration internationale de 176 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente ces pays dans le cadre de leur processus de rattrapage économique ont été renforcées à travers le processus d’intégration à l’Union européenne et à la zone euro. Un aspect important a été soulevé : la récurrence du déficit de la balance courante de ces pays. Ce déficit, légitime dans le cadre du processus de rattrapage, impose un afflux positif de capitaux étrangers (même en période de tensions internationales), afin de stabiliser le taux de change des PECO. Les éléments précédant ont pu mettre en avant l’incapacité de s’assurer d’une attractivité permanente des capitaux étrangers même si la qualité de la croissance économique des PECO est bonne. Les possibilités d’intervention des Banques Centrales et des pouvoirs publics, à travers l’augmentation des taux directeurs, l’utilisation des réserves de change et leur capacité à s’endetter en devises étrangères apparaissent insuffisantes pour tenter de lutter contre ces pressions. La seule alternative est l’aide internationale dont la Roumanie, la Hongrie et la Lettonie ont bénéficié à cette période. 177 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente 4. Caractérisation des phénomènes d’interdépendance et de contagion dans les PECO Les PECO ont un passé commun important puisqu’ils font partie des pays ayant pu adopter la planification lors de l’après-guerre pour ensuite rentrer dans une période de transition à la chute du mur de Berlin en 1989 et se présenter aujourd’hui comme des pays de l’Union européenne fortement intégrés à l’économie de marché. Les caractéristiques historiques de ces pays ont créé un héritage d’interdépendances qu’il n’est pas possible d’effacer sans pour autant renier de grandes diversités entre leurs territoires. L’analyse de ces dépendances, à l’origine d’effets potentiels de contagion dans le cadre de notre problématique, se doit d’être présentée plus en profondeur afin d’expliciter des comportements pouvant être divergents entre les PECO lors de tensions internationales. « La globalisation financière a eu comme conséquence une forte mobilité des capitaux sans coûts, sans délai et sans égard aux frontières géographiques. La libéralisation financière, généralement non maîtrisée, que certains pays de l’Europe de l’Est ont connue, les a rendus très vulnérables à l’effet de contagion » (Ben Abdallah, & al., 2005) L’occurrence d’une crise financière à travers l’amplification des effets de contagion a induit une augmentation des vulnérabilités qui, à travers une structure de l’endettement international instable, peut impacter des pays sans pour autant témoigner d’une dégradation de leurs fondamentaux. La situation des PECO témoigne de l’amplification de cette forme de vulnérabilité, à travers les effets de contagion, et non d’une dégradation de leurs fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers. De récents apports déterminent la contagion comme « shift contagion » ou « contagion pure » uniquement (Forbes et Rigobon, 2000). L’idée ici n’est pas de prendre position sur ces aspects, orientant la présentation des effets de contagion potentiels au sein des PECO avec les deux approches aujourd’hui encore proposées. La première se veut non contingente aux crises. La contagion y est décrite comme le fruit de l’influence mutuelle. On peut parler d’interdépendance (Masson, 1998). La deuxième va plutôt se focaliser sur l’amplification des effets contingents aux crises. Il s’agit d’effets de contagion qui se matérialisent exceptionnellement et seulement pendant la période de tension (King, & al., 1990). On parle de « shift contagion » (Forbes, & al., 2000). 178 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Au regard des caractéristiques historiques communes des PECO, les deux styles de contagion, interdépendance d’avant crise et amplification lors de la crise, jouent pleinement leur rôle lors des tensions financieres internationales. La littérature met en avant cinq canaux potentiels de contagion (tableau 39) (Eichengreen, & al., 1996) (Kaminsky, & al., 2000) (Forbes, & al., 2001) (Dornbusch, & al., 2000) (Dehove, 2003) (Dehove, 2004). Cependant, dans notre problematique tous les canaux de contagion n’ont pas la même importance. Certains apparaissent plus significatifs que d’autres. Tableau 39. Enumération des différents canaux de contagion Les différents effets de contagion : Canal des échanges commerciaux et des prix intérieurs (via la demande). Canal des taux d’intérêt dans un système de change fixe asymétrique. Canal de la liquidité dans un système interconnecté. Canal des interdépendances d’interprétation des informations et concurrence des fonds d’investissement. Canal des arbitrages entre les marchés nationaux et les risques pays. Le canal des échanges commerciaux et des prix intérieurs est devenu fondamental pour les PECO qui fondent leur rattrapage économique sur une spécialisation axée sur l’intégration au commerce international. La nécessité de pallier le déficit de leur balance courante en parallèle au processus d’acquisition de compétences et de technologie amplifiant le phénomène de croissance justifie la sélection de ce premier canal. Le canal des taux d’intérêt dans un système de change fixe asymétrique est lui aussi pertinent au regard de l’ancrage des monnaies des PECO à la zone euro qui peut être considérée comme l’économie centre. L’adoption de cette stratégie d’ancrage fixe témoigne d’une volonté de stériliser le risque de change afin de devenir attractif. Le dernier canal significatif correspond à la liquidité dans un système interconnecté que forme l’ensemble des pays fortement intégrés à la finance internationale comme les membres de l’Union européenne. Les canaux suivant vont plutôt être le fruit d’effets de contagion avant ou pendant les crises financières internationales qui, au regard du mode de développement relativement similaire 179 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente de ces économies, vont globaliser les tensions individuelles à l’ensemble de la région. La transmission d’information et la concurrence (canal des interdépendances d’interprétation des informations et de la concurrence des fonds d’investissement) et celui de la répartition par zone/pays des fonds d’investissements (canal des arbitrages entre les marchés nationaux et les risques pays) seront les éléments qui activeront la diffusion et contribueront à amplifier les pressions déjà présentes à travers les premiers canaux de contagion sans pour autant en être les éléments déclencheurs. Les pays en question que sont les PECO, sélectionnés dans le cadre de notre problématique, ont adhéré au CAEM (Conseil d’Assistance Economique Mutuelle) lors de la période soviétique puis à l’Union européenne en passant par une période intermédiaire qui peut être qualifiée de transition (se pose néanmoins la question de savoir si cette période de transition est finie ou non). L’intérêt de faire un parallèle entre ces deux modes d’échanges internationaux est de faire ressortir les canaux commerciaux, d’intérêt et de liquidité qui sont devenus complémentaires dans la stratégie de rattrapage adoptée aujourd’hui par les pays émergents. Les spécialisations axées sur le commerce international (canal des échanges commerciaux et des prix intérieurs) ne sont rendues possibles que par une libéralisation des capitaux afin d’attirer des investissements étrangers (canal de la liquidité dans un système interconnecté) mais elles nécessitent de stabiliser le taux de change afin de stériliser le risque de dépréciation monétaire (canal des taux d’intérêt dans un système de change fixe asymétrique). Le CAEM été créé en 1949 en réponse au plan Marshall d’aide à la reconstruction proposée par les USA à l’Europe. Il a intégré l’URSS, la Pologne, la Tchécoslovaquie, la Hongrie, la Bulgarie et la Roumanie dans un premier temps pour ensuite y voir adhérer l’Albanie de 1949 à 1961 puis la RDA en 1950 ainsi que la Mongolie en 1962, Cuba en 1972 et le Vietnam en 1978. Son rôle était de répondre aux contraintes économiques du moment. « Dans un premier temps et dans le contexte d’après-guerre, il s’agit de favoriser le commerce extérieur et les échanges entre les Etats dont les relations économiques se faisaient traditionnellement plus avec l’Europe de l’Ouest qu’entre eux ou avec l’URSS. Puis, à partir de 1955, la transmission communiste des Etats de l’Est étant effectuée, le CAEM est chargé d’organiser une coordination des plans nationaux. » (Godard, 2011). 180 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Même s’il reste difficile, aujourd’hui, de définir le rôle du CAEM dans le cadre des échanges intra-pays soviétiques, souvent à l’origine d’un processus de spécialisation sectoriel imposé par l’URSS, de grandes tendances peuvent néanmoins être décrites ici afin d’illustrer la complémentarité qui a pu en naitre. Le graphique 44 décrit cette tendance de poussée de coordination entre les membres. « Les échangent résultent en fait d’une concertation dans le cadre de la coordination des plans au niveau du CAEM. Ils font toujours l’objet d’accords à long terme (cinq ans) conclus bilatéralement entre les Etats, et contingentés chaque année en quantités physiques. » (Tiraspolsky, 2004) Graphique 44. Evolution des exportations et des importations intra-CAEM Source : (Slim, 1997) Les échanges intra-CAEM, tant au niveau des exportations que des importations, ont toujours été importants puisqu’ils varient de 50% à 65% du total des échanges de ses membres jusqu’à son éclatement lors de la chute du mur de Berlin en 1989. L’importance permanente des échanges durant la période soviétique a poussé les membres du CAEM à amplifier leur intégration par le fruit d’une coordination des économies de tous les secteurs apparaissant fondamentaux à l’époque : constructions mécaniques, sidérurgie, métallurgie non ferreuse, industries du charbon, du pétrole et du gaz, industrie chimique, 181 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente industrie légère et agriculture (Martinowsky, 2004). L’idée était au final de se spécialiser par pays afin d’augmenter la rentabilité des investissements. « Et comme aucun des pays intéressés, en dehors de l’URSS, ne possédait des ressources suffisantes pour édifier à lui seul une économie moderne complète, la question qui vient très rapidement à l’ordre du jour fut celle de la spécialisation des productions par pays » (Martinowsky, 2004). On peut parler d’une division internationale socialiste du travail (XVème session du Conseil, 1961), où une comparaison pouvant être effectuée avec celle actuellement en cours au sein de l’Union européenne. Les graphiques 45 et 46 décrivent la nature même de ces spécialisations à l’exportation durant la période de planification. Graphiques 45 et 46. Evolution des spécialisations à l’exportation des membres du CAEM 182 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Source : (Slim, 1997) Les graphiques 45 et 46 mettent en avant des complémentarités fortes à travers ces échanges commerciaux. L’URSS y apparait spécialisée vers la mise à disposition de combustibles et de matières premières d’origine minérale (section 2) alors que les autres partenaires vont plutôt fournir des machines, équipements et moyens de transport (section1). Les problématiques soulevés ici sont les dépendances qui en découlent entre les PECO avec l’URSS où « de grands pans de leurs économies sont étroitement rattachés à l’appareil de production soviétique, par le biais notamment de la coproduction. Leur commerce est satellisé à 40% au moins. » (Tiraspolsky, 2004). Même si le degré d’intégration commerciale des pays du CAEM apparait fort, il ne témoigne pas véritablement de complémentarités potentiellement efficaces dans une répartition des spécialisations régionales. L’organisation même du CAEM a pu faire apparaitre des divergences entre l’efficacité économique et les choix politiques. « La section du plan consacrée aux échanges mutuels précisera notamment, outre le volume et la composition des livraisons, l’évolution des prix, les entreprises principalement responsables de la production destinée à l’exportation, de même que celles auxquelles sont destinées les importations. » (Lemoine, 2004). 183 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Dans ces conditions, les canaux de contagion commerciaux, conjointement à un ancrage entre les monnaies et à une allocation des capitaux fixée par planification, rend difficile toute tentative de définir leur potentiel de transmission. « Que représentent les concepts de coûts, de valeur, de cours officiel et taux de change, d’équilibre de la balance commerciale, de termes de l’échange dans des économies où le commerce extérieur, monopole d’état, est planifié ? » (Tiraspolsky, 2004). Pourtant, l’impact historique de ces spécialisations fortement orientées par l’URSS a induit un héritage pour ces pays qu’il leur faudra exploiter au maximum afin de sortir favorablement de la période de transition. La mutation des relations extérieures d’une économie planifiée à une économie de marché libéralisée devra être mise en parallèle à la stratégie qui avait déjà pu être adoptée par ces pays : celle des spécialisations sectorielles à l’exportation à travers des investissements étrangers importants. « …le CAEM a fonctionné jusqu’à sa disparition de façon autarcique, coupé du reste du monde par la non-convertibilité des monnaies, système de formation des prix spécifiques et des barrières commerciales. Il était basé sur des accords de spécialisation de la production entre pays membres. (…)» (Martinowsky, 2004). En plus de difficultés communes souvent héritées des faiblesses du CAEM (tableau 40), des divergences fortes entre pays apparaîtront. « (…) la caractéristique commune à leurs structures d’exportation en 1990 est la faible teneur en valeur ajoutée des productions exportés, comme par exemple les vêtements et les meubles, qui font appel à un travail peu qualifié. Ces exportations ont d’autres part un assez fort contenu en ressources naturelles (produits de l’agriculture, matières premières, combustibles), et en énergie (produits intermédiaires de la chimie et de la métallurgie). » (Leroy, & al., 1992) Tableau 40 : Bilan du CAEM dressé par les économistes Est-européens Le manque de technologies modernes. L’inadaptation de la coopération et de la spécialisation. La surconsommation industrielle en matériaux et énergie. La détérioration simultanée des situations énergétiques dans tous les pays est-européens. Les pénuries alimentaires absolues ou relatives. Le manque d’organisation dans la production industrielle. L’absence de coordination dans les relations économiques extérieures. L’inadéquation des mécanismes de coopération aux exigences modernes. Source : (Tiraspolsky, 2004) 184 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Le tableau 40 met en avant les limites qui ont mené à la désintégration du CAEM, obligeant les PECO à se restructurer afin de palier ces lacunes. Certains points apparaissent plus intéressants que d’autres, comme par exemple le manque de technologie modernes, l’inadaptation de la coopération et de la spécialisation ainsi que de l’inadéquation des mécanismes de coopération aux exigences modernes. La chute du mur de Berlin en 1989 marque la fin de l’ère de la planification et le début de la transition pour les PECO par un processus de libéralisation pouvant apparaitre brutal. « A permis le succès d’un scénario « libéral-étatiste » dont les traits principaux s’observent dans toute l’Europe centrale : une stratégie financière orthodoxe, un enchainement rapide de réformes structurelles, qui crédibilise de lui-même les pouvoirs publics, enfin un renforcement régulier de l’Etat de droit – respect de l’autorité de la loi, durcissement des droits de propriété, discipline contractuelle. » (Sgard, 1997) La fin de l’ère soviétique impose aux PECO la nécessité de poursuivre le développement de leurs exportations. Elles apparaissent en cette période de crise comme une solution à l’accompagnement de la transition. « Ensuite, l’exportation est, dans la crise économique qui accompagne la transition, un des moyens de relancer l’activité. » (Leroy, & al., 1992). Les spécialisations de ces pays ont dû s’adapter au nouveau contexte géopolitique. Pourtant, leur tissu économique n’était pas « optimal » dans ce nouveau contexte de concurrence internationale. Il s’est alors effectué une réallocation des exportations et des importations entre les membres de la CAEM, notamment de l’URSS et intra-PECO vers l’Union européenne comme peut le démontrer le tableau 41. 185 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Tableau 41. Evolution de la réorientation des échanges des PECO entre 1989 et 1991 ° Annuaires statistiques nationaux et sources douanières. ¹ Hors ex-RDA. ²OCDE Statistiques de commerce extérieur. Source : (Leroy, & al., 1992) La réorganisation de l’appareil productif a donné lieu à une allocation des marchandises mettant en lumière les avantages potentiels des PECO non plus en fonction d’une planification définie par les autorités soviétiques mais en fonction de la concurrence internationale du libre marché. Les graphiques 47 mettent en avant des tendances intéressantes : la nature des exportations vers l’Europe des 12 s’oriente principalement vers des secteurs où le degré technologique n’est pas décisif. Il apparait évident que le retard technologique engendré lors de la période soviétique explique cette situation. De plus, les spécialisations dans les secteurs d’exportation traditionnels de ces pays ont pu se maintenir dans une certaine mesure. « Cette augmentation des ventes aux pays occidentaux constitue un des principaux résultats favorables des pays en transition. Si elle se maintient, elle peut devenir un élément majeur de leurs perspectives de croissance, dans la mesure où la poursuite des politiques restrictives pèsera sur la demande intérieure. » (Holcblat, 1992). 186 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Graphiques 47. Evolutions des spécialisations à l’exportation des PECO après 1990 Source : (Leroy, & al., 1992) 187 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Les derniers éléments de comparaisons des graphiques ci-dessus mettent en avant une évolution entre 1990 et 1992. Il y a toujours de fortes spécialisations à l’exportation intensive en main d’œuvre (notamment les vêtements en tissus pour la Bulgarie, la Hongrie et la Pologne, les meubles pour la Hongrie, la Pologne et la République Fédérative Tchèque et Slovaque ainsi que les chaussures pour la Hongrie, la Pologne et la République Fédérative Tchèque et Slovaque). A cela, s’ajoute l’émergence d’une mutation du tissu industriel de ces pays avec des évolutions positives vers le secteur automobile (Pologne, Hongrie et République Fédérative Tchèque et Slovaque) ainsi que dans le matériel électrique (République Fédérative Tchèque et Slovaque). Mais l’existence de divergences fortes entre ces pays, qu’il convient d’expliquer par des fondamentaux hérités de l’ère soviétique, a différencié les chances, notamment dans le choix des spécialisations sectorielles imposées à chacun en parallèle à l’état de leurs agrégats macroéconomiques et macro-financiers. « Concrètement, ce scénario libéral et légaliste a conduit à une reprise de la croissance et de l’accumulation, en Pologne puis en République tchèque ; il en va de même en Slovaquie et en Slovénie (…). La Hongrie montre les mêmes tendances positives que ses voisins sur le plan de l’appareil productif et sur le plan institutionnel (…) Enfin, si les républiques baltes (notamment l’Estonie), ainsi que la Croatie, tiennent certes un discours économiques orthodoxe, il est sans doute trop tôt pour entériner cette option théorique. » (Sgard, 1997). Le graphique 48 met en avant cette divergence à travers des taux de croissance différents lors de la période de transition de ces pays. 188 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Graphique 48. Evolution du PIB des PECO entre 1989 et 1998 Source : (Boeri, & al., 2002) 1989=100 Deux avantages comparatifs apparaissent clairement dans les PECO. Un coût de la main d’œuvre bon marché et des spécialisations héritées du passé soviétique mais potentiellement intéressantes pour des reconversions nécessitant un minimum de savoirfaire et d’infrastructures. Au regard de l’intégration en cours de ces pays à l’Union européenne, se concrétisant par les accords de libre-échange dès 1992 (Accord de LibreEchange Centre Européen), ces pays sont aussi devenus de nouveaux marchés potentiellement attractifs en terme non seulement de production mais aussi de demande. La restructuration des PECO s’est alors accompagnée d’investissements étrangers massifs, et principalement de l’Union européenne. « Les restructurations de l’appareil productif nécessaires à la reprise de la croissance dans les PECO au cours des prochaines années exigeront des investissements en équipements et en machines dont une partie devra être importée. Elles s’accompagneront d’un déficit accru dans cette catégorie de produits qui constitue déjà le principal solde négatif des échanges des PECO avec l’Ouest, à savoir les machines et le matériel de transport » (Leroy, & al., 1992). Déjà à cette époque, la stratégie de rattrapage économique basée sur des exportations par l’attractivité des IDE qui a engendré un déficit de la balance courante et rendu potentiellement ces pays vulnérables aux tensions financières extérieures, a vu le jour. « Ces décisions d’investissement seront fonction non seulement des paramètres internes 189 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente déterminant leur rentabilité (évolution des prix, des coûts, du change) mais aussi des perspectives des marchés extérieurs. Les investissements étrangers auront un rôle décisif, à la fois en termes quantitatifs, car les ressources financières nationales sont clairement très limitées, et en termes qualitatifs, car ils seront, pour ceux opérés par les grandes firmes au moins, intégrés à des stratégies de long terme de délocalisation internationale de productions. » (Leroy, & al., 1992). Pourtant, à cette même période, il convenait de s’interroger sur la véritable portée de la réallocation des exportations à travers l’octroi de capitaux étrangers (canal des échanges commerciaux). Un processus de libéralisation des capitaux a pu être mis en place (canal de la liquidité) en parallèle à une stabilisation des taux de change (canal du taux d’intérêt) afin de garantir l’attractivité de ces territoires. L’accroissement de ces trois processus que sont les spécialisations sectorielles à l’exportation, la libéralisation des flux de liquidité et la stabilisation du taux de change ont été des vecteurs d’attractivité favorables aux capitaux étrangers. Le tableau 42 confirme cette attractivité pour certains des PECO. Le processus n’a cessé de s’amplifier jusqu’à aujourd’hui. Tableau 42. Stocks des flux d’IDE au sein des PECO entre 1990 et 2008 Source : (Richter, 2009) Néanmoins, pour certains économistes, la période de transition n’est pas terminée. Il devient difficile de la séparer du processus d’intégration à l’Union européenne qui a véritablement commencé au début des années 2000. La présentation de l’évolution des spécialisations au sein des PECO, largement héritées du passé soviétique mais restructurées 190 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente à l’aide des afflux des IDE, a permis de relater l’importance de ces flux vis-à-vis des canaux de contagion qu’ils ont pu amplifier. La volonté d’augmenter l’attractivité de ces pays au regard des IDE, source de gains de croissance considérables, s’est traduite par une libéralisation des comptes de capital des balances courantes en parallèle à la stabilisation des taux de change à l’euro. Ces trois canaux ont donc évolué conjointement pour parvenir à la configuration actuelle, source potentielle de vulnérabilité aux tensions financières internationales mais aussi avec une intégration commerciale finalement favorable des PECO (graphique 49 et tableau 43). Graphique 49. Evolution production manufacturière des PECO Slovaquie 1400 Slovénie 1200 Roumanie 1000 Pologne 800 Hongrie 600 Lituanie 400 Lettonie Estonie 200 République tchèque 0 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 Bulgarie Source : Eurostat Indices du chiffre d'affaires (2005=100) (NACE Rév.2) Tableau 43. Exportations par filière économique en 2006 des PECO (en % du total) Source : Chelem, Natixis (en pourcentage du total – 2006) 191 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Cette orientation sur le commerce international s’est traduite par des spécialisations tournées vers l’énergie pour certains (Lituanie, Estonie et Lettonie), l’agroalimentaire (Lituanie et Lettonie), le textile (Roumanie et Bulgarie), le non ferreux (Bulgarie), la mécanique (République Tchèque, Pologne et Hongrie), les véhicules (République Tchèque et Slovaquie) et l’électronique (Hongrie). Ces éléments démontrent bien la matérialisation d’un positionnement réel dans le commerce international mais, pour tous, issu de l’héritage des spécialisations antérieurement imposées par l’Union soviétique. 192 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Conclusion intermédiaire Le cheminement choisi ici a pour ambition de présenter des éléments théoriques, à travers l’HIF de Minsky, pour ensuite les confronter aux modélisations de premières générations dans l’occurrence d’une crise de change à l’origine de tensions financières internationales, notamment au regard de la structure instable de l’endettement. La recontextualisation de cette démarche d’abord théorique puis empirique, lors de la crise des Subprimes sur les PECO en 2008, a permis de justifier la cohérence de l’approche réalisée. Le retour historique des relations d’interdépendance entre les PECO et l’URSS tout d’abord puis vers l’Union européenne a ensuite permis d’expliquer l’héritage des spécialisations sectorielles de ces pays difficilement contournables dans leur nécessité de reconversion de leur tissu économique. De nombreux points se doivent d’être surlignés ici à la vue de la spécification de faits originaux qui ont été nécessaires à la compréhension de la problématique. Tout d’abord, l’HIF de Minsky reste l’élément central du mode de déclenchement des pressions du marché financier international. La dégradation du taux d’intérêt et non du taux de rentabilité permet de supposer que les fondamentaux macroéconomiques et macrofinanciers restent robustes. L’extrapolation qu’il convient de faire, au regard des limites de cette approche, est de la reconfigurer afin de l’inclure dans un contexte international avec des pays développés et d’autres émergents. L’endettement des agents économiques internationaux, dans notre exemple, se réalise dans la zone euro (afin de minimiser le coût de l’endettement) pour être investi dans les PECO (afin de maximiser la rentabilité des capitaux). Si les taux venaient à augmenter, cette structure de l’endettement serait alors instable car les agents économiques n’auraient pas les liquidités nécessaires pour satisfaire les échéances d’endettement à court terme. La variation du taux d’intérêt, dans un contexte économique et financier relativement favorable, est problématique dans l’approche de Minsky puisqu’il y est endogène à l’économie réelle. Le choix de se positionner dans le prolongement du courant des postkeynésiens, et plus spécifiquement des structuralistes, a permis de clarifier ce concept 193 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente en apportant des éléments complémentaires à notre problématique. La masse monétaire est décrite comme endogène à l’économie alors que la base monétaire est exogène. Le rôle de la Banque Centrale sera alors redéfini, d’une fonction pouvant être qualifiée « d’agence de notation spécifique » Celle-ci y est intégrée comme un acteur de l’économie particulier. La déréglementation et la libéralisation des flux financiers ne permettent plus à ce genre d’institution de réguler la masse monétaire « par la force » mais seulement par l’influence qu’elles peuvent potentiellement exercer de par leurs spécificités (indépendantes, publiques et neutres). Les innovations financières décrites par Minsky ainsi que les flux de capitaux étrangers entre territoires comme soulevées dans la problématique, offrent l’opportunité de faire augmenter l’utilisation de la masse monétaire (qualifiée d’endogène) pour augmenter l’endettement potentiel des agents économiques alors que la base monétaire reste exogène. En effet, une Banque Centrale n’est jamais totalement accommodante. Ainsi, la capacité d’intervention de la Banque Centrale ne vient pas de sa capacité de régulation de la base monétaire mais des signaux qu’elle adresse au marché à travers la variation de son taux directeur. L’influence qu’elle exerce repose donc sur la nature même d’une de ses deux fonctions de préteur en dernier ressort. Une fois l’explication du déclenchement des tensions financières internationales réalisée, il convenait de matérialiser les pressions sur le taux de change au regard des modélisations de crises. La fuite des capitaux étrangers des pays émergents s’explique par le besoin de liquidités des agents économiques internationaux au regard de leur incapacité à rembourser leurs échéances d’endettement à court terme. Cette dynamique va s’auto-renforcer puisque la liquidation des actifs détenus dans les PECO va amplifier les vulnérabilités sur le taux de change. La conduite rationnelle des investisseurs ayant pu adopter des comportements moins risqués (notamment dans la structure de leurs endettements) ira aussi vers la fuite de cette zone puisqu’elle en devient trop risquée. Cette situation s’explique par le déficit récurrent de la balance courante, apparaissant légitime dans le cadre d’un processus de rattrapage économique, tant en période de croissance forte que de tensions financières internationales. En effet, les graphiques 194 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente illustrant la situation des PECO décrivent clairement des déficits avant, pendant, et après les tensions sur le taux de change. La dynamique d’une crise de change de première génération se matérialise par l’incompatibilité d’une création monétaire (par des déficits publics ou par des crédits privés) avec l’ancrage du taux de change. Ici, c’est le processus de rattrapage économique qui induit un déficit récurrent de la balance courante ou l’afflux positif des capitaux étrangers se doit d’être continu. Au regard du contexte financier actuel, source de nombreuses instabilités à travers les canaux de contagion de la liquidité, du taux d’intérêt mais aussi des échanges commerciaux, les PECO ne peuvent garantir l’attractivité continue des capitaux étrangers. 195 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Conclusion de la deuxième partie La partie précédente avait pour ambition de mettre en lumière les stratégies de rattrapage économique adoptées par bon nombre de pays émergents, non pas pour en critiquer les fondements puisque les résultats en termes de croissance économique semblent attester de la viabilité de ce processus, mais plutôt le cheminement. Celui-ci apparait source de vulnérabilités non pas au regard des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers, mais par une intégration internationale commerciale et financière. Alors que ces secteurs sont aujourd’hui pleinement libéralisés, il apparait délicat de supposer qu’un pays émergent a les capacités de réguler les tensions venant du reste du monde s’il n’en est pas lui-même responsable. Ce processus suppose l’acquisition d’une spécialisation sectorielle axée sur l’exportation qui nécessite des capitaux étrangers pour restructurer le tissu économique. Le déficit récurrent de la balance courante qui en découle est alors compensé par une attractivité de capitaux en IDE. La dynamique favorable qui s’y installe permet de renforcer les spécialisations sectorielles afin d’espérer à terme une diminution des déficits de la balance courante. Mais l’adoption par la quasi-totalité des pays émergents de cette stratégie de développement induit une situation de compétition à travers la mise en place de politiques d’attractivités territoriales, se traduisant principalement par la libéralisation du compte de capital et la neutralisation du risque de dépréciation monétaire. L’incompatibilité entre libéralisation du compte de capital et stabilisation du taux de change donnent une place trop importante à l’afflux des IDE qu’il convient de perpétuer jusqu’à l’amélioration du solde de la balance courante dans le cadre du processus de rattrapage. Sans justifier d’une dégradation de leurs fondamentaux, ils sont sujets à l’instabilité financière internationale dont leurs dépendances à travers l’octroi de capitaux étrangers ne fait qu’amplifier le potentiel des effets de contagion. Par conséquent, la contrainte réside dans la capacité du marché financier à perpétuer cet afflux de capitaux, légitime pour des pays favorablement en cours de rattrapage économique. 196 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente La nature des pressions internationales, toujours dans un contexte de non dégradation des fondamentaux, repose sur l’HIF de Minsky puisque celui-ci y postule la dégradation du taux d’intérêt et non du taux de rentabilité. A partir de sa réappropriation, dans un contexte international entre pays développés et émergents, l’endettement des agents économiques internationaux devient source d’instabilité financière. L’endettement à court terme dans la zone euro minimise le coût de l’endettement, favorisant l’investissement dans les PECO afin de maximiser la rentabilité des capitaux. Cette structure de l’endettement rend instable la sphère financière en cas d’augmentation des taux d’intérêt puisque les agents économiques n’auraient plus les liquidités nécessaires afin de satisfaire les échéances d’endettement à court terme. Un positionnement postkeynésien, et plus spécifiquement structuraliste, a offert l’opportunité d’approfondir l’explication de la problématique. La Banque Centrale, en tenant le rôle « d’agence de notation spécifique » qui permet d’être un acteur de l’économie particulier, devient un acteur de l’économie à part entière. La nature de son intervention ne vient pas de sa capacité de régulation de la base monétaire, quasi-impossible dans le contexte de libéralisation financière actuelle, mais des signaux qu’elle adresse au marché à travers la variation de son taux directeur. Au regard de leur incapacité à rembourser leurs échéances d’endettement à court terme, le besoin de liquidités des agents économiques internationaux devient l’élément perturbateur à l’origine du processus de crise au sein de ces pays. Cette dynamique va s’auto-renforcer puisque la liquidation des actifs détenus dans les PECO va amplifier les vulnérabilités sur le taux de change. Il devient donc compréhensible de se retirer de ces pays car la zone est maintenant trop risquée. Le déficit récurrent de la balance courante, apparaissant légitime dans le cadre d’un processus de rattrapage économique, met sous pression le taux de change même en période de tensions financières internationales. Le processus de rattrapage économique induit un déficit récurrent de la balance courante où l’afflux positifs des capitaux étrangers se doit d’être continu. Au regard du contexte financier actuel, source de nombreuses instabilités à travers les canaux de contagion de la liquidité, du taux d’intérêt mais aussi des échanges commerciaux, il n’est pas sûr que ces PECO puissent bénéficier de ces flux en permanence. 197 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Les derniers éléments de cette 2eme partie s’orientent vers les caractéristiques d’interdépendances puis de contagion au sein des PECO depuis l’ère soviétique jusqu’à aujourd’hui. L’idée était d’expliquer les divergences de l’impact des tensions financières internationales, alors que l’ensemble des PECO ont adopté la même stratégie de développement. De par leurs spécialisations sectorielles imposées par l’URSS, ces pays ont des héritages divergents qui les ont poussés à prendre des chemins différents dans la nature de leurs spécialisations actuelles et de leur positionnement économique, financier et monétaire. La partie suivante tentera de décrire ces divergences par une décomposition analytique du positionnement des PECO qu’il conviendra de définir. La réalisation de tests économétriques permettra d’illustrer l’importance de la structure de l’endettement international comme élément perturbateur. Une mise en parallèle de ces interprétations, qualité du positionnement macroéconomique et macro-financier des PECO et nature des capitaux étrangers au sein des PECO, offrira l’opportunité de définir des scénarios de court et moyen terme à ces pays. 198 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Partie 3 Divergences de comportement au sein des PECO lors de tensions financières internationales : entre transferts de capitaux et positionnement structurel 199 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Introduction de la troisième partie Les principaux éléments permettant de contextualiser la problématique ont été décrits précédemment. L’approche théorique de l’HIF de Minsky vient conforter la description des faits mis en avant. Elle permet de justifier de la plausibilité de phénomènes de crises sans pour autant l’expliquer par une dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers dans les pays en question. La stratégie de rattrapage économique, à travers une intégration au commerce mondial, pousse à un financement par le reste du monde pour restructurer l’appareil productif. Le retrait de ces capitaux, induit par une structure instable de l’endettement international (échéance des créances à court terme en zone euro pour des placements à moyen voire long terme dans les PECO), met sous pression les taux de change de ces pays où un parallèle avec les modélisations de première génération peut être fait. De nombreux graphiques, illustrant la crise des Subprimes de 2008 dans les PECO, sont venus affirmer par des faits empiriques l’occurrence de ce genre d’événements. Ces pays émergents, avec l’intégration à l’Union européenne en 2004 et 2007 puis avec celle en cours à la zone euro, reflètent la création de vulnérabilités à travers des effets de contagion de taux d’intérêt et de liquidité. Afin de venir conforter ces interprétations, des modélisations économétriques vont être réalisées sur des faits empiriques récents. Il s’agira tout d’abord de confirmer l’importance de l’afflux positif des capitaux étrangers, même en période de ralentissement du processus de rattrapage économique, afin de neutraliser le déficit de la balance courante. L’obligation de stabiliser sa monnaie à l’euro, pour amplifier le processus de développement économique, impose des réserves de devises importantes mais tout aussi dépendantes du solde entre capitaux étrangers et déficit du compte des transactions courantes. Par la suite, il conviendra de tester les raisons de l’allocation des capitaux étrangers dans ces territoires. L’objectif de maximisation de la rémunération des placements tout en minimisant le coût du capital justifie la répartition de la structure de l’endettement en zone euro et de l’investissement dans les PECO. La spéculation favorable de Minsky (l’attractivité des capitaux est légitime puisque les gains potentiels sont importants) va être à l’origine de 200 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente la création de vulnérabilités avec la diminution temporelle des échéances d’endettement pour en amoindrir le coût. La justification empirique, à travers la construction de modélisations adéquates, est déterminante pour acter de la responsabilité de l’instabilité financière internationale comme élément déterminant de l’occurrence d’une crise. Le retournement de la période favorable, sans justifier d’une dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers dans les PECO, se doit aussi d’être validé par une modélisation supplémentaire. La fragilité de la sphère financière internationale, à travers la structure instable de l’endettement, va rendre propice la contraction de la liquidité internationale par le déclenchement d’un élément perturbateur. C’est l’augmentation du taux directeur de la Banque Centrale Européenne (BCE), au regard de son rôle de prêteur en dernier ressort, qui va précipiter le retournement de conjoncture. Un indicateur de pression sur le taux de change, issu des travaux de Cartapanis (Cartapanis, et al., 1999), illustrera la matérialisation des effets de contagion par le taux d’intérêt et la liquidité entre zone euro et PECO. L’impossibilité pour les PECO d’agir sur l’occurrence de ces risques a été mise en lumière lors de l’impact de la crise des Subprimes en 2008, avec la chute pour tous de leur taux de croissance. La configuration internationale du marché financier, instable au regard des stratégies d’endettement, ne semble pas offrir d’opportunité afin d’amoindrir les effets déstabilisants pour ces pays. Même si la contagion à travers les canaux du taux d’intérêt et de la liquidité a été forte pour tous, certains d’entre eux ont pu rebondir plus facilement que d’autres. Cette situation questionne sur des alternatives crédibles non dans le contournement des tensions financières internationales, tous les PECO ont opté pour une intégration renforcée au reste du monde, mais dans leur potentiel de rebond lors de l’après crise. Quels sont les éléments leur permettant de patienter favorablement, c’est-à-dire en évitant d’hypothéquer leur processus de rattrapage futur, face aux turbulences internationales ? Cette interrogation implique alors de satisfaire une étude analytique des exigences minimales à avoir pour dépasser les contraintes décrites par la problématique. La démarche consiste à présenter la méthode d’analyse des fondamentaux des PECO. La qualité du positionnement de chaque pays y sera soulevé toujours dans le but de rendre 201 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente viable leur processus de rattrapage économique. Deux aspects temporels y seront décrits. Tout d’abord à court terme afin de réguler au mieux les tensions financières internationales puisqu’elles apparaissent difficilement contournables. Puis à moyen terme au regard de la viabilité du processus de rattrapage économique de chacun. L’intégration des PECO au reste du monde a pour finalité la convergence économique vers les pays développés. Les divergences et convergences entre ces pays vont permettre de réaliser des regroupements, à l’origine de l’émergence des éléments apparaissant probants dans leur capacité de rebond lors de l’après crise. La description à court terme des pressions induites par l’instabilité financière internationale va confirmer l’inefficacité de la politique monétaire dans ce contexte. Celle-ci n’apparait plus opérante pour tenter de lutter contre les pressions sur le taux de change. Alors que la politique budgétaire semble une alternative crédible qu’il conviendra de justifier. Quant à la qualité du processus de convergence à moyen terme, celle-ci est la condition sine qua non pour bénéficier à nouveau et rapidement des capitaux étrangers lors de l’après crise. L’attractivité d’un pays en termes de potentiel de développement est en effet tout aussi importante à la suite de fortes tensions internationales. Cette dualité temporelle ne saurait être sous-estimée. L’incapacité de réguler à court terme les pressions internationales peut dégrader les fondamentaux du pays, le mettant en difficulté pour réamorcer sa dynamique économique lors de l’après crise. Inversement, une bonne régulation à court terme ne permettra qu’un faible retour des capitaux étrangers si la viabilité du rattrapage économique n’est pas suffisamment assurée. Cette double analyse, concernant d’abord les stratégies d’allocation des capitaux par les investisseurs internationaux, puis le positionnement structurel de chaque PECO, vise à confronter les différences d’objectifs de chacun. Les transferts de capitaux étrangers au sein des PECO sont déterminés par des logiques de rentabilité légitimes à tous placements financiers. Alors que l’allocation de ces mêmes capitaux doit permettre aux pays bénéficiaires de réaliser leur processus de convergence. La comparaison de ces deux modes d’interprétation permettra de confronter les stratégies de chacun à court puis à long terme. 202 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Chapitre 5 Modélisations économétriques comme approche empirique : focus sur les flux de capitaux Introduction intermédiaire La problématique a mis en avant l’importance des flux de capitaux étrangers, notamment de l’Union européenne, dans la dynamique de rattrapage des pays émergents, en l’occurrence les PECO. La structure d’endettement à court terme pour investir ces capitaux à moyen voire long terme, comme l’HIF de Minsky (Minsky, 1974) a pu le mettre en avant, est l’élément de vulnérabilité pouvant mettre en difficulté la dynamique de rattrapage de ces pays. Les interdépendances, à l’origine d’effets de contagion potentiellement importants, posent la question d’une régulation internationale plus poussée. La poursuite de cette étude consiste alors à réaliser des modélisations afin de tester la significativité des hypothèses émissent lors de la présentation puis de la conceptualisation de la problématique. L’importance de l’afflux des capitaux étrangers afin de compenser le déficit récurrent de la balance courante, même en période de crise, a été jusqu’à présent largement mise en avant. Ces capitaux sont aussi nécessaires afin de stabiliser voire d’ancrer le taux de change, indispensable pour rendre attractif le territoire. Pour valider ces postulats, l’équation (1) teste la significativité du solde positif des capitaux étrangers pour compenser le déficit récurrent de la balance courante. L’équation (2), complémentaire de la première, permet de confirmer le rôle régulateur des réserves de devises au sein des PECO en parallèle aux flux de capitaux étrangers. Les résultats de ces deux tests économétriques doivent venir compléter l’idée que l’on peut se faire concernant la prépondérance des capitaux étrangers et la nécessité pour les PECO d’avoir des flux toujours positifs. Les capitaux étrangers apparaissant déterminants, il convient de s’interroger sur les éléments justifiant leur localisation au sein des PECO. L’HIF de Minsky (Minsky, 1974) a été utilisée en la recontextualisant par rapport au cadre d’analyse de la problématique, à savoir une dimension internationale de la structure de l’endettement des agents économiques. 203 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente L’équation (3) a pour ambition de confirmer la prépondérance de l’endettement à court terme dans la zone euro afin d’investir dans les PECO au regard de l’attractivité dont ils font preuves. Il en découlera des possibilités de stratégies temporelles divergentes des agents économiques internationaux de court, moyen, voire long terme dans l’allocation des capitaux. Ici, la vulnérabilité des PECO n’est pas liée dans une quelconque dégradation de leurs fondamentaux macroéconomiques ou macro-financiers. C’est l’amplification du rôle des canaux de contagion ayant pour origine l’interdépendance entre ces économies qui devient déterminant. Deux possibilités de gains y sont soulevées : la rentabilité des investissements qui y sont effectués et les profits pouvant être réalisés sur les taux de change par rapport à l’euro. L’occurrence de la crise que nous décrivons est issue d’un élément perturbateur, engendrant la fuite des capitaux étrangers hors des PECO. Celle-ci a pour origine la zone euro, lors d’un resserrement de la politique monétaire de la Banque Centrale Européenne (BCE), qui se traduit par une augmentation des taux d’intérêt et met en difficultés les agents économiques internationaux pour se refinancer. L’équation (4) a pour ambition de soulever la plausibilité des effets de contagion de la zone euro dans le déclenchement des pressions sur les taux de change des PECO. Les canaux de la liquidité et du taux d’intérêt y apparaissent les plus adéquats au regard de l’intégration en cours de ces pays à l’Union européenne et à la zone euro. Des divergences de stratégies des agents économiques internationaux y apparaissent quant au degré de vulnérabilité induit dans les PECO. La crise des Subprimes de 2008 a illustré l’occurrence de ce phénomène de tensions financières internationales. Sans pour autant justifier de vulnérabilités apparentes des PECO, un retrait massif des capitaux étrangers a pu s’y réaliser. Logiquement, les équations (1), (2), (3) et (4) vont utiliser les fluctuations des capitaux étrangers depuis le début du processus de rattrapage économique des PECO jusqu’à cette date pour illustrer empiriquement ce phénomène. 204 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente 1. La détermination du rôle des capitaux étrangers au sein des PECO : une obligation d’attractivité pour ces territoires Il convient d’insister sur un point essentiel relatif à la vulnérabilité potentielle des PECO : le besoin en capitaux étrangers. Les pays d’Europe centrale et orientale ayant intégré l’Union européenne sont en cours de transition postsocialiste et de rattrapage économique (on peut parler de convergence). La nécessité des capitaux étrangers provient à l’origine (depuis la chute de l’URSS) du besoin de pallier le manque d’épargne nationale pour restructurer l’appareil productif, source future de gains de productivité à l’exportation nécessaire au rééquilibrage de la balance courante. Les flux d’investissements étrangers à destination des PECO sont alors indispensables à la dynamique de rattrapage économique. Cependant, la stabilisation, voire l’ancrage du taux de change, sont fortement recommandés pour les pays en voie de développement afin de stériliser le risque de dépréciation monétaire, et amplifier l’attractivité des flux de capitaux étrangers. La viabilité du processus de rattrapage économique est appréhendée à travers l’étude de la balance des paiements afin de comprendre comment le déficit induit est financé. Par définition, le solde de la balance globale des paiements est nul puisque l’ensemble des comptes qui la composent doivent s’équilibrer (les uns compensant les autres). « La balance des paiements est un document statistique, présenté suivant les règles de la comptabilité en partie double, qui rassemble et ordonne l'ensemble des transactions économiques et financières d'une économie - un pays ou une zone économique - avec le reste du monde au cours d'une période donnée. » (Banque de France, 2011). Dans le cas des PECO, il est supposé que le déficit récurrent du compte des transactions courantes, légitime dans le cadre d’un processus de rattrapage économique, est compensé par un compte financier positif induit par l’afflux de capitaux étrangers. La balance des paiements, à travers ses différents comptes (tableau 44), permet de retracer les échanges de biens et services mais aussi de capitaux étrangers avec le reste du monde, informations indispensables à l’appui de notre problématique. La composition de la balance des paiements est réalisée pour tous les pays afin d’homogénéiser les transactions nécessaires aux comparaisons. « C'est au Fonds Monétaire International (FMI) (…) qu'est 205 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente revenue la normalisation des concepts, des définitions, des classifications et des conventions. » (Banque de France, 2011). Tableau 44. Composition des comptes de la balance des paiements Compte de transactions courantes Biens Services Revenus Transferts courants Compte de capital Transferts en capital Acquisitions d'actifs non financiers (brevets) Compte financier Investissements directs Investissements de portefeuille Produits financiers dérivés Autres investissements Avoirs de réserve Erreurs et omissions nettes Source : Banque de France et INSEE. Le solde du compte de transactions courantes et du compte de capital correspond à la capacité de financement de la nation envers le reste du monde lorsque celui-ci est positif. Cela signifie que le pays va prêter des capitaux à l’étranger, matérialisé par le solde négatif du compte financier, qui va être investi vers le reste du monde. A l’inverse, s’il est négatif, on parle de besoin de financement de la nation où c’est le reste du monde qui prête au pays, avec un solde positif du compte financier. Dans le cadre spécifique des PECO, il est apparu légitime que le reste du monde prête des capitaux afin d’amorcer une dynamique de rattrapage économique pour restructurer l’appareil productif. Les graphiques 50, 51 et 52 présentent les comptes de transactions courantes, de capital et financiers des PECO de 1995 jusqu’à aujourd’hui. On peut y voir que le déficit de la balance courante y est de plus en plus important, décrivant une amplification du processus de rattrapage économique. Alors qu’en parallèle, les flux financiers, matérialisés par un compte financier positif, sont robustes. Le compte de capital, même s’il est positif, n’apparait pas déterminant pour tous les PECO durant ce lapse de temps. 206 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Graphique 50. Compte des transactions courantes des PECO avec le reste du monde Bulgarie 0 République tchèque Estonie -5 000 Lettonie -10 000 Lituanie Hongrie -15 000 Pologne Roumanie -20 000 Slovénie -25 000 1995 1997 1999 2001 2003 2005 2007 2009 Slovaquie Source : Eurostat (solde millions euros à partir 1.1.1999, millions écus jusqu'au 31.12.1998). Le graphique 50 décrit un solde de la balance courante largement déficitaire pour les PECO, témoignant d’une grande fragilité des échanges vis-à-vis du reste du monde, avec une accentuation de la tendance de 2000 à 2008. Apres 2008, la diminution de ce déficit se justifie par l’impact de la crise des Subprimes qui a ralenti le processus de rattrapage économique lors de la fuite des capitaux étrangers. Même dans ces conditions, les balances courantes restent déficitaires dans les PECO (sauf en Hongrie, Estonie, Lituanie et Lettonie). Graphique 51. Compte de capital des PECO avec le reste du monde 3 000 Bulgarie 2 500 République tchèque Estonie 2 000 Lettonie 1 500 Lituanie 1 000 Hongrie 500 Pologne 0 Roumanie -500 Slovénie -1 000 Slovaquie 1995 1997 1999 2001 2003 2005 2007 2009 Source : Eurostat (solde en millions d'euros à partir du 1.1.1999, millions d'écus jusqu'au 31.12.1998). 207 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Pour ce qui concerne le graphique 51, le compte de capital est stationnaire entre 1995 et 2004 (sauf pour la Bulgarie et la Rou1anie jusqu’en 2007). Ensuite, il y a un très léger trend haussier caractérisant tous les pays jusqu’en 2008. Les PECO ayant intégré l’Union Européenne en 2004 et 2007, la tendance à la hausse du compte de capital durant cette fin de période se justifie par les aides communautaires dont ils ont bénéficié. Un seul pays s’écarte de cette tendance, la Pologne. Mais les données du tableau étant en valeur et non en pourcentage, le poids économique de la Pologne justifie cette situation. Comme peut l’affirme la Banque de France, les fonds structurels d’aide au développement, destinés à faire converger leur économie, sont à intégrer dans le compte de capital. « Le compte de capital, qui regroupe les transferts en capital - remises de dettes, pertes sur créances, aides à l'investissement, transferts des migrants - et les acquisitions et cessions d'actifs non financiers non produits (brevets, marques, droits d'auteur...). » (Banque de France, 2011) Graphique 52. Compte financier des PECO avec le reste du monde 27 000 Bulgarie 22 000 République tchèque Estonie 17 000 Lettonie Lituanie 12 000 Hongrie 7 000 Pologne Roumanie 2 000 Slovénie -3 000 Slovaquie 1995 1997 1999 2001 2003 2005 2007 2009 Source : Eurostat (solde en millions d'euros à partir du 1.1.1999, millions d'écus jusqu'au 31.12.1998). Le graphique 52 met en avant le solde positif du compte financier des PECO, comprenant les flux de capitaux étrangers. On peut explicitement y voir une tendance haussière entre 1995 et 2008 pour l’ensemble des PECO, mis à part pour la Hongrie avec une petite chute en 2007 208 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente (qui se justifie par des problèmes de finances publiques à cette date). Cependant, dès 2008, le solde du compte financier diminue fortement, allant même jusqu’à être négatif pour la Hongrie, l’Estonie, la Lituanie et la Lettonie. Ces quatre pays sont dans l’obligation d’avoir un solde de leur balance courante à nouveau positif puisqu’ils n’ont plus de possibilité de financer leur endettement. Compte tenu de ces constats, il convient maintenant de tester la significativité du premier postulat émis dans cette étude. A savoir que les flux de capitaux, compris au sein du compte financier, vont compenser le déficit de la balance courante. Les autres éléments qui composent la balance des paiements, par exemple les aides européennes dans le compte de capital, ne seront soit pas assez dynamiques, soit insuffisants en montant pour réaliser cette compensation. L’équation (1) a été construite pour définir l’importance des flux de capitaux étrangers dans le financement du déficit récurrent de la balance courante des PECO (indispensable à leur processus de rattrapage économique). Les deux variables de périodicité trimestrielle sélectionnées sont le solde de la balance courante (puisque c’est son déficit qui va justifier l’attractivité des capitaux étrangers), et les flux d’investissement (totaux, court, moyen et long terme). La décomposition temporelle des capitaux doit permettre d’évaluer le rôle de chacune de ces variables dans le financement externe des PECO. Equation (1) : I(t) = 𝛼0 + 𝛼1.(-B(t)) avec I(t) total, Ct, Pf ou IDE I(t) Flux de capitaux étrangers totaux exprimés en millions d’euros I(Ct) Flux de capitaux étrangers de court terme exprimés en millions d’euros I(Pt) Flux de capitaux étrangers de portefeuille (moyen terme) exprimés en millions d’euros I(IDE) Flux de capitaux étrangers d’IDE (long terme) exprimés en millions d’euros B(t) Solde de la balance courante exprimé en millions d’euros Les résultats économétriques de cette équation, à partir des données d’Eurostat de 1995 jusqu’au début des pressions financières internationales lors de la crise des Subprimes en 2008, sont synthétisées dans le tableau 45. 209 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Tableau 45. Equation (1) : résultats des tests économétriques Pays Capitaux Périodicité BG Total Ct Pf IDE Total Ct Pf IDE Total Ct Pf IDE Total Ct Pf IDE Total Ct Pf IDE Total Ct Pf IDE Total Ct Pf IDE Total Ct Pf IDE Total Ct Pf IDE Total Ct Pf IDE (t) (t) (t-1) (t) (t-1) (t) (t) (t-1) (t) (t) (t) (t) (t) (t) (t) (t) (t) (t) (t) (t) (t) (t) (t) (t) (t) (t) (t) (t) (t) (t) (t) (t) (t-1) (t-1) (t) (t-1) (t) (t) (t) (t) CZ EE HU LT LV PO RO SI SK Significativité des coefficients (seuil 5% maxi) Oui Oui Oui Oui Oui Oui Non Oui Oui Oui Non Oui Oui Oui Non Non Oui Oui Oui Oui Oui Oui Non Oui Oui Oui Non Oui Oui Oui Non Oui Oui Oui Non Oui Non Non Non Oui Source : données Eurostat et calculs auteur. 210 Signe des coefficients + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + + - + Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente L’analyse du tableau 46 permet de décrire des divergences entre les PECO au niveau du rôle que peuvent jouer l’ensemble des capitaux et plus spécifiquement les investissements à court terme, de portefeuille et les IDE. On peut y voir des stratégies implicites divergentes ou convergentes menées par les agents économiques internationaux dans les investissements effectués au sein de ces pays émergents sachant que ce sont principalement les flux de court terme et d’IDE qui viennent financer les besoins des PECO. De plus, les coefficients de la variable B(t) sont tous positifs lorsqu’ils sont significatifs (avec quelques très faibles exceptions). Il y a bien un afflux positif des capitaux étrangers pour financer le déficit de la balance courante induit par le processus de rattrapage économique, et ce sans différenciation du point de vue de la nature de l’ancrage des taux de change des PECO. La Slovaquie est le seul pays avec des flux de capitaux étrangers totaux non significatifs. Ce pays est relativement en avance par rapport aux autres PECO. Il bénéficie maintenant de spécialisations sectorielles à l’exportation lui permettant de neutraliser en partie sa balance des paiements, diminuant dès lors sa dépendance aux capitaux étrangers. La Hongrie a des capitaux étrangers totaux et de court terme significatifs. Ses difficultés de régulation macroéconomique, notamment vis-à-vis de son endettement public, peuvent justifier un horizon de placement plus court des capitaux étrangers (des investissements à moyen et long termes peuvent apparaitre trop risqués au regard de ces faits). Quant aux autres pays (Bulgarie, République Tchèque, Estonie, Lituanie, Lettonie, Roumanie, Pologne et Slovénie), les capitaux étrangers sont significatifs pour les variables d’investissement total, de court terme et les IDE. Les flux de portefeuille ne semblent pas dépendre du déficit de la balance courante puisqu’ils sont majoritairement non significatifs. Les résultats de l’équation (1) permettent de valider l’hypothèse de la dépendance des PECO aux flux de capitaux, sauf peut-être pour la Slovaquie, afin de compenser le déficit récurrent de leur balance courante (la balance des paiements se doit d’avoir un solde nul). Sans financements extérieurs, l’achat de biens d’équipements au reste du monde devient inenvisageable et peut compromettre le processus de rattrapage économique de ces pays. 211 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Pour autant, l’analyse plus fine des flux de capitaux étrangers, de court terme, de portefeuille et d’IDE, met en avant des divergences de stratégies de la part des agents économiques étrangers qu’il convient d’expliquer. Les capitaux étrangers ne se limitent pas seulement au financement du déficit de la balance courante des pays émergents. Il y a aussi nécessité de stabiliser, voire d’ancrer leur taux de change. Même si les pouvoirs publics ont des outils à leur disposition pour rendre leur territoire attractif (variation du taux directeur, mesures fiscales incitatives, subventions à des secteurs stratégiques…), l’écart entre le déficit de la balance courante et l’afflux de capitaux étrangers à moyen et long terme est compensé au final pour partie par la variation des réserves de devises et pour autre partie par l’endettement en monnaie étrangère à court terme. Pour autant, la stabilisation du taux de change reste conditionnée à l’importance des devises en réserve. Cette relation d’interdépendance est prépondérante dans l’hypothèse d’une crise de change dans ces pays. Un solde négatif de la balance des transactions courantes suppose que les agents économiques de ce pays ont acheté plus qu’ils n’ont vendu de biens et services. L’afflux positif de capitaux étrangers vient compenser ce déficit à travers l’octroi de créances aux agents économiques locaux par le reste du monde. Cette dualité est indispensable (pour s’endetter, il faut que quelqu’un puisse prêter en même temps). Pourtant, à chaque période, le solde de ces deux composantes n’est pas toujours nul. C’est ici que les réserves de devises et l’endettement à court terme vont servir d’ajustement à la marge. Un surplus de financement extérieur va faire augmenter les réserves de devises, et inversement pour un manque de capitaux étrangers. Pour vérifier la plausibilité de ce second postulat, il convient d’analyser le compte financier des PECO. Celui-ci comprend l’ensemble des flux de capitaux (graphique 53), à savoir : les investissements directs, les investissements de portefeuille et les autres investissements. Mais il comprend aussi les avoirs de réserve (graphique 54) correspondant aux réserves de devises de chaque PECO. Elles offrent l’opportunité de réguler le solde entre le compte des transactions courantes et les flux de capitaux. 212 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Graphique 53. Capitaux étrangers du compte financier des PECO 30 000 Bulgarie 25 000 République tchèque Estonie 20 000 Lettonie 15 000 Lituanie 10 000 Hongrie Pologne 5 000 Roumanie 0 Slovénie -5 000 1995 1997 1999 2001 2003 2005 2007 2009 Slovaquie Source : Eurostat (solde millions euros à partir1.1.1999, millions d'écus jusqu'au 31.12.1998). Le graphique 53 décrit une tendance à la hausse des flux de capitaux des PECO, témoignant d’une perspective favorable du rattrapage économique, de 1995 à 2008. Même si la tendance s’inverse, lors de la crise des Subprimes en 2008 jusqu’à aujourd’hui, le solde est toujours positif (sauf pour l’Estonie, la Lituanie, la Lettonie et la Slovénie). Les capitaux étrangers compensent le déficit de la balance courante, comme l’équation (1) a pu le confirmer. Mais au regard de la volatilité de ces flux, il n’est pas toujours possible d’envisager un financement intégral à chaque période. Graphique 54. Avoirs de réserves du compte financier des PECO 4 000 Bulgarie 2 000 République tchèque Estonie 0 -2 000 Lettonie -4 000 Lituanie -6 000 Hongrie -8 000 Pologne -10 000 Roumanie -12 000 Slovénie -14 000 1995 1997 1999 2001 2003 2005 2007 2009 Slovaquie Source : Eurostat (solde millions euros à partir1.1.1999, millions d'écus jusqu'au 31.12.1998). 213 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Le graphique 54 illustre des fluctuations importantes des avoirs de réserves du compte financier des PECO. Lors de certaines périodes, le solde y est positif alors que pour d’autres, le solde devient négatif. Il n’est pas possible d’envisager la formation d’une tendance régulière à la haussière ou à la baissière. Cette illustration tend à démontre que les réserves de change des PECO assurent à la marge l’adéquation entre le solde de la balance courante et celui des capitaux étrangers. Mais cette variabilité du stock de devises impacte directement la stabilisation du taux de change. Une diminution dangereuse de ces réserves pourra créer un sentiment d’incertitude sur la viabilité à terme de l’ancrage, s’apparentant aux crises de première génération. L’équation (2) offre l’opportunité de tester la significativité de cette argumentation. Le solde des réserves de devises est d’autant plus important que la stabilisation du taux de change dépend de ces mêmes réserves. Le déficit de la balance courante B(t) est la variable explicative puisque c’est ce déficit qui va induire un besoin en capitaux étrangers, compensé à la marge par les variations des réserves de devises R(t). Equation (2) : ∆R(t) = 𝛼0 + 𝛼1.B(t) ∆R(t) Variations des réserves de devises du pays exprimées en millions d’euros B(t) Solde de la balance courante exprimé en millions d’euros Les résultats économétriques de cette équation, à partir des données d’Eurostat de 1995 jusqu’au début des pressions financières internationales lors de la crise des Subprimes en 2008, sont regroupés dans le tableau 46. Les tests ont été réalisés avec ou sans décalages (t, t-1 et t-2) puisque les résultats apparaissaient plus significatifs pour certains PECO. Il conviendra d’expliquer les raisons de ce décalage temporel. 214 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Tableau 46. Equation (2) : résultats des tests économétriques Pays périodicité BG (t) (t-1) (t-2) (t) (t-1) (t-2) (t) (t-1) (t-2) (t) (t-1) (t-2) (t) (t-1) (t-2) (t) (t-1) (t-2) (t) (t-1) (t-2) (t) (t-1) (t-2) (t) (t-1) (t-2) (t) (t-1) (t-2) CZ EE HU LT LV PO RO SI SK Significativité des coefficients (seuil 5% maxi) Non Non Oui Non Non Non Non Non Oui Non Oui Non Non Non Non Oui Oui Non Non Non Non Non Non Non Oui Non Non Oui Non Non Signe des coefficients Nature de l’ancrage Taux de change Fixe Flexible Fixe - Flexible Fixe - Fixe Flexible Flexible + Fixe + Fixe Source : données Eurostat et calculs auteur. Les résultats des tests économétriques de l’équation (2) du tableau 46 mettent en avant des faits intéressants, notamment vis-à-vis de la nature de l’ancrage des taux de change de chaque PECO. Les variables des pays avec des ancrages flexibles (République Tchèque, Pologne et Roumanie) ne sont pas significatives sur toutes les périodes (t, t-1 et t2). On peut supposer que les ajustements du déficit de la balance courante se font par les fluctuations à la marge des taux de change et non par les réserves de devises. La Hongrie fait exception puisqu’elle a 215 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente un change flexible mais les variables sont significatives. Les difficultés de politiques budgétaires de ce pays ont créé des tensions spéculatives sur son taux de change, poussant les pouvoirs publics à intervenir bien plus qu’en laissant fluctuer quelque peu le taux de change. Quant aux pays avec des ancrages fixes, ils ont des variables explicatives significatives (Slovénie, Slovaquie, Bulgarie, Estonie et Lettonie) sauf pour la Lituanie (les variables ne sont pas significatives). Quelques divergences apparaissent tout de même au sein de ce groupe. Les pays les plus avancés dans leur rattrapage économique (Slovénie et Slovaquie) n’ont pas de retard dans leurs variables (elles sont significatives en (t)) et leurs coefficients sont positifs). Le déficit de la balance courante fait diminuer les réserves de devises et inversement. Les flux de capitaux n’apparaissent plus ici comme financeurs/soldeurs des déficits puisque ces pays sont suffisamment développés pour rééquilibrer leur balance courante (sans compter nécessairement sur l’afflux des capitaux étrangers). Les pays qui sont encore en cours de rattrapage économique (Bulgarie, Estonie, Lettonie et l’exception hongroise) témoignent tous d’un décalage temporel entre le déficit de leur balance courante et la fluctuation de leurs réserves de change (Bulgarie (t-2), Estonie (t-2), Hongrie (t-1) et Lettonie (t, et t-1)), se justifiant par la nécessité de conserver le plus longtemps possible un montant élevé de devises. Les pressions du marché financier international au regard de la viabilité de leur ancrage peut justifier ce décalage temporel. Leurs coefficients sont aussi tous négatifs. Ces pays en cours de rattrapage économique, ont un fort besoin de capitaux pour neutraliser le déficit de la balance courante. Ces éléments peuvent être synthétisés pour plus de lisibilité dans le tableau 47. Il s’agit d’y présenter la nature des taux de change (fixe ou flexible) au regard de la significativité de la balance courante et des décalages temporels (t), (t-1) et (t-2). 216 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Tableau 47. Interprétation des tests économétriques de l’équation (2) Régime du taux de change Flexible Fixe Périodicité (t), (t-1) et (t-2) Pays Significativité B(t) République Tchèque Non Pologne Non Roumanie Non Hongrie Oui Lituanie Non Slovénie Oui (t) Slovaquie Oui (t) Bulgarie Oui (t-2) Estonie Oui (t-2) Lettonie Oui (t) (t-1) (t-1) Le tableau 47 illustre bien cette divergence entre les ancrages à taux fixe et ceux à taux variable, en plus des contraintes de stocks de devises imposées par le marché financier international (justifiées par les décalages temporels éventuels). Pour autant, même s’il apparait plus facile de réguler le solde entre le déficit de la balance courante et les flux de capitaux par des ancrages flexibles, cette possibilité comporte aussi des contraintes. Tout d’abord, et comme nous avons déjà pu le voir auparavant, les agents économiques internationaux sont plus enclins à investir dans des pays avec des taux de change fixes. Il n’est pas sûr que chacun des PECO puisse se permettre de libéraliser son taux de change. Ensuite, les capacités de fluctuation des monnaies doivent rester faibles afin de conserver leur crédibilité. L’exemple de la Hongrie témoigne des limites de cet ancrage flexible. Ce pays a dû utiliser ses réserves de devises in fine pour faire face aux tensions qu’il pouvait subir sur son taux de change. Les flux de capitaux étrangers sont indispensables aux pays émergents, et particulièrement aux PECO, afin de compenser le déficit de la balance courante (équation 1) et de stabiliser les taux de change (équation 2). Pour autant, cette stratégie de convergence, à travers une intégration économique et financière au reste du monde, ne peut se limiter au seul rôle joué 217 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente par les capitaux pour les PECO. L’objectif des agents économiques internationaux qui vont y localiser leurs capitaux n’est pas le même, bien au contraire. Ces divergences peuvent être à l’origine de l’instabilité financière dans ces territoires. 218 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente 2. Eléments d’attractivité des capitaux étrangers dans les PECO : croissance économique, rentabilité des investissements et variation des taux de change Les capitaux étrangers ont un rôle déterminant dans la viabilité du processus de rattrapage économique. Ils rendent possible le financement de la restructuration du tissu économique et le besoin en devises internationales pour permettre l’ancrage du taux de change. Pour autant, il convient d’expliquer les raisons de l’attractivité des PECO pour comprendre ensuite comment ces capitaux peuvent déstabiliser le marché financier international, comme l’HIF de Minsky (Minsky, 1974) le suppose. Dans la partie précédente, l’approche théorique de Minsky a été illustrée en parallèle à une démonstration graphique de la situation des PECO lors de la crise des Subprimes en 2008. Il y est apparu un processus en deux étapes. La première correspond à la période d’attractivité de ces pays par rapport aux capitaux étrangers, provoquant une augmentation des vulnérabilités dans la répartition de l’endettement des agents économiques internationaux. Pour autant, leurs fondamentaux apparaissent bons (dynamique de rattrapage économique favorable). La seconde étape est le moment de la matérialisation des tensions financières internationales par un élément perturbateur, l’augmentation des taux d’intérêt dans la zone euro. La libéralisation des flux tant économiques que financiers, à l’origine de l’interconnexion entre le système de production et le système financier à travers l’endettement international, va expliquer l’interdépendance entre ces pays et induire des effets de contagion de la zone euro vers les PECO. Avant de s’intéresser à l’occurrence de la crise, par des effets de contagion importants, il s’agit tout d’abord de justifier l’attractivité des PECO. Lors de la période de spéculation favorable selon Minsky (Minsky, 1974), des comportements plus risqués de la part des investisseurs internationaux sont induits, et ce même s’ils apparaissent a priori légitimes au regard des bonnes perspectives de rentabilités des placements effectués. 219 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Nos sociétés reposent sur des économies d’endettement. On parle d’effet de levier quand on s’endette pour réinvestir les capitaux dans des placements assortis d’une rentabilité espérée plus élevée que le coût de leur financement. La quasi-totalité des agents économiques internationaux utilise cette stratégie permettant de maximiser la rentabilité des investissements. La zone euro, territoire plus stable et développé, les conduit à s’y endetter pour minimiser les coûts de financement. Alors que les perspectives de développement favorables dans les PECO les poussent à y localiser les capitaux pour maximiser la rentabilité de ces placements. Le schéma 14 décrit cette première étape au sens de Minsky (HIF). Schéma 14. La période de spéculation positive au sein des PECO Le schéma 14 illustre la stratégie des agents économiques internationaux, logique qui s’inscrit dans la structure d’endettement en euro pour investir ensuite dans les PECO. Mais elle va rendre de plus en plus instable la sphère financière. Les perspectives relativement favorables de rattrapage économique des PECO vont conduire ceux-ci à réaliser des placements sur des échéances de plus en plus longues (de court terme à moyen, voire long terme) pour optimiser leurs investissements. Alors qu’en parallèle, la durée de l’endettement en euro va se réduire, toujours pour diminuer son coût, pouvant aller jusqu’à des échéances courtes (inférieures ou égales à 12 mois) qu’il faudra renouveler en permanence. 220 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Deux hypothèses se doivent d’être justifiées afin de mieux fonder le raisonnement au regard de la première période de spéculation favorable. Il faut d’abord analyser empiriquement la nature de l’attractivité des PECO par rapport aux capitaux étrangers, notamment sur les différentes échéances de placements (court, moyen et long terme). Il s’agit d’identifier la répartition des capitaux suivant les PECO alors que des divergences vont apparaitre au regard de l’héritage soviétique de chacun d’entre eux, en parallèle aux stratégies de développement qu’ils ont respectivement adoptées. Une fois la spéculation positive au sein des PECO confirmée (forte attractivité des PECO justifiée par les bonnes perspectives de croissance économique), il convient ensuite de se focaliser sur l’instabilité de la structure de l’endettement des agents économiques internationaux, notamment à court terme et dans la zone euro. L’analyse des graphiques 55, 56, 57 et 58 permet de conforter les différences de stratégies dans l’allocation des capitaux au sein des PECO. Ces faits empiriques vont permettre de justifier un découpage des capitaux dans la prochaine réalisation de l’équation économétrique. Graphique 55. Flux total des capitaux étrangers 35 000 Bulgarie 30 000 République tchèque Estonie 25 000 Lettonie 20 000 Lituanie 15 000 Hongrie 10 000 Pologne 5 000 Roumanie 0 Slovénie -5 000 1995 1997 1999 2001 2003 2005 2007 2009 Slovaquie Source : Eurostat (solde en millions d'euros à partir du 1.1.1999, millions d'écus jusqu'au 31.12.1998). 221 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Le graphique 55 retrace une augmentation quasi-continue de l’afflux des capitaux étrangers totaux au sein des PECO. Le solde est constamment positif jusqu’en 2008. Cependant, la nature de ces capitaux étrangers, vis-à-vis des échéances des investissements, n’est pas renseignée puisque ces données sont agrégées entre les placements de court, de moyen et de long terme. Une analyse plus fine apparait nécessaire pour faire ressortir les stratégies de différenciations temporelles des agents économiques internationaux. Graphique 56. Flux des capitaux étrangers à court terme 20 000 Bulgarie 15 000 République tchèque Estonie 10 000 Lettonie Lituanie 5 000 Hongrie 0 Pologne Roumanie -5 000 Slovénie -10 000 1995 1997 1999 2001 2003 2005 2007 2009 Slovaquie Source : Eurostat (solde en millions d'euros à partir du 1.1.1999, millions d'écus jusqu'au 31.12.1998). Le graphique 56 décrit une stabilité des capitaux de court terme entre 1995 et 2000. Puis, à partir des années 2000, un trend haussier s’amorce, témoignant d’une attractivité qui se renforce encore durant les années 2006, 2007 et 2008. En revanche, la période 2008-2009, marquée par le recul des flux, voire par des flux négatifs pour nombre de PECO, illustre les effets de la crise des Subprimes. 222 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Graphique 57. Flux des capitaux étrangers à moyen terme 15 000 Bulgarie 13 000 République tchèque Estonie 11 000 9 000 Lettonie 7 000 Lituanie 5 000 Hongrie 3 000 Pologne 1 000 -1 000 Roumanie -3 000 Slovénie -5 000 1995 1997 1999 2001 2003 2005 2007 2009 Slovaquie Source : Eurostat (solde en millions d'euros à partir du 1.1.1999, millions d'écus jusqu'au 31.12.1998). Le graphique 57 illustre la tendance des flux de capitaux de moyen terme, investissement de portefeuille. La volatilité de ces placements ne fait pas apparaitre de tendance. Sauf entre 2008 et 2010 où les courbes sont fortement haussières. Il y a bien ici une situation d’opportunité qui se créée lors de la crise des Subprimes : même fortement impactés, certains PECO apparaissent encore attractifs. Graphique 58. Flux des capitaux étrangers à long terme (IDE) Bulgarie 11 000 République tchèque Estonie 9 000 Lettonie 7 000 Lituanie 5 000 Hongrie 3 000 Pologne Roumanie 1 000 Slovénie -1 000 1995 1997 1999 2001 2003 2005 2007 2009 Slovaquie Source : Eurostat (solde en millions d'euros à partir du 1.1.1999, millions d'écus jusqu'au 31.12.1998). 223 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Le graphique 58 correspond à l’évolution des capitaux de long terme, les IDE à destination des PECO. Il en ressort des faits intéressants puisque le solde des IDE est toujours positif, sauf peut-être durant la crise des Subprimes à partir de 2008 pour certains des PECO. Il y a une forte augmentation de l’attractivité entre les années 2004 et 2008 où l’intégration à l’Union européenne entre en ligne de compte. Les graphiques 55, 56, 57 et 58 confirment une attractivité globale des capitaux étrangers vers les PECO, qu’ils soient de court terme, de portefeuille ou d’IDE. Mais les divergences d’intensité des tendances entre ces flux au sein de chaque pays font supposer des stratégies différenciées adoptées par les agents économiques internationaux. Elles conduisent à inclure ces éléments dans la réalisation des tests économétriques. La possibilité de s’endetter à court terme en zone euro pour investir ces capitaux dans les PECO à moyen et long terme conduit à découper les flux de capitaux au regard de ces aspects temporels. L’équation (3) a pour but de confirmer l’attractivité des PECO vis-à-vis des capitaux étrangers, dans une dynamique d’instabilité financière à travers l’endettement à court terme en euro. Attirés par l’espérance d’une rentabilité plus élevée dans les pays émergents que dans les pays développés, il convient d’affiner les variables justifiant cette hypothèse. La première variable explicative est le PIB. C’est l’augmentation du taux de croissance économique qui va justifier l’afflux des capitaux étrangers tant pour financer la restructuration du tissu économique que pour répondre à une demande interne de plus en plus forte. La deuxième et troisième variables reposent sur les sources potentielles de gains macroéconomiques dans ces pays : gains provenant des différences de rentabilité entre zone euro et PECO ; gains induits par la variation du taux de change (selon le régime du taux de change mais aussi selon sa capacité de stabilisation). Quant à la quatrième variable, elle vient compléter les trois premières puisqu’elle offre l’opportunité de financer à moindre coût les capitaux étrangers investis dans les PECO. Il 224 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente s’agit du taux d’intérêt en zone euro à court terme, offrant la capacité de minimiser le coût d’endettement pour investir ensuite ces capitaux au sein des PECO. Equation (3) : I(t) =𝛼0 + 𝛼1.(PIB) + 𝛼2.(r2) + 𝛼3.(tc2-P1) + 𝛼4.(ieuro-P1) avec I(t) total, Ct, Pf ou IDE I(t) Flux de capitaux étrangers totaux exprimés en % du PIB I(Ct) Flux de capitaux étrangers à court terme exprimés en % du PIB I(Pt) Flux de capitaux étrangers de portefeuille (moyen terme) exprimés en % du PIB I(IDE) Flux de capitaux étrangers d’IDE (long terme) exprimés en % du PIB PIB Produit intérieur brut du PECO exprimé en taux de croissance r2 Taux de rentabilité courant du capital fixe du PECO (EBE/FBCF) tc2 Variations du taux de change du pays de départ (zone euro) vis-à-vis du pays d’accueil (PECO) ieuro Taux d’intérêt à court terme du pays de départ (zone euro) (échéance inférieure ou égale à 12 mois) P1 Taux d’inflation du pays de départ (zone euro) Les résultats économétriques de l’équation (3) sont synthétisés dans le tableau 48 cidessous : 225 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Tableau 48. Equation (3) : résultats des tests économétriques Pays Nature capitaux étrangers BG Ct Pf IDE Total Ct Pf IDE Total Ct Pf IDE Total Ct Pf IDE Total Ct Pf IDE Total Ct Pf IDE Total Ct Pf IDE Total Ct Pf IDE Total Ct Pf IDE Total Ct Pf IDE Total CZ EE HU LT LV PO RO SI SK PIB R2 TC2-P1 Ieuro-P1 Significativité et signes des variables + + + - - - - + - + - + - + - + - - + + + - + + + - - + + - + - + + + + + - + + + + + + + + + + + + + + - - Source : données Eurostat et calculs auteur. 226 + Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente L’analyse du tableau 48 fait ressortir des faits pertinents vis-à-vis des variables sélectionnées. Le PIB apparait significatif avec un signe positif dans la quasi-totalité des PECO (sauf pour l’Estonie). Ce résultat légitime notre approche puisque c’est bien la convergence économique des PECO, à travers l’augmentation de leur croissance économique, qui justifie le besoin de capitaux étrangers. Quant aux gains réalisés sur les actifs placés (r2), cette variable est de nombreuses fois significative au sein des PECO sauf pour la Hongrie et la Slovaquie. La Slovaquie est à la fin de son processus de convergence économique, justifiant peut être cette faible attractivité pour r2. Alors que la Hongrie a connu d’importantes incertitudes quant à sa capacité à poursuivre son développement économique, hypothéquant la confiance que pouvaient lui accorder les agents économiques internationaux. Concernant les gains sur la variation des taux de change avec tc2-P1, les résultats ne font pas apparaître de réelles différentiations entre les ancrages fixes ou flexibles. Les investisseurs étrangers peuvent parier tant à la hausse qu’à la baisse sur les fluctuations de ces monnaies. La variable taux d’intérêt à court terme vient ici conforter l’endettement des agents économiques internationaux en zone euro pour investir dans les PECO. Cette composante est majoritairement significative quand les variables r2 et tc2-P1 sont elles aussi significatives. Ce constat vient conforter l’intérêt des agents économiques à optimiser leurs investissements, à travers des stratégies différenciées entre r2 et tc2, tout en cherchant à minimiser le cout de l’endettement induit par un effet de levier en zone euro. Les tests économétriques de l’équation (3) décrivent des variables significatives nombreuses dans l’affectation des flux de capitaux étrangers. Les hypothèses que nous avons émises prennent ici toute leur importance. L’existence de convergences ou divergences entre PECO ne peut se faire qu’entre les variables r2 et tc2-P1. En effet, le PIB est le résultat du besoin de capitaux induit par une croissance économique forte, présente dans tous les PECO (sauf pour l’Estonie). Quant aux taux d’intérêt à court terme en zone euro, il est corrélé aux besoins de financement pour les variables r2 et tc2-P1 comme nous avons pu le décrire auparavant. 227 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Pour autant, il apparait clairement des stratégies différenciées des investisseurs internationaux selon les PECO. La divergence de l’héritage soviétique et le degré de réussite de la période de transition expliquent largement cet état des faits. L’analyse des fondamentaux macroéconomiques devrait ultérieurement permettre de confirmer ces tendances. Le tableau 49 ci-dessous illustre les stratégies des agents économiques au regard des deux variables prépondérantes que sont r2 et tc2. Tableau 49. Stratégies d’allocation des capitaux étrangers dans les PECO Pays : Bulgarie - Rép. Tchèque - Estonie - Hongrie - Lituanie - Lettonie - Pologne - Roumanie - Slovénie - Slovaquie Descriptif : Faible coût de la main d’œuvre et marché interne faiblement développé (adhésion UE seulement en 2007) : stratégies favorables à toutes les périodes pour r2. Ancrage du taux de change à l’euro couplé à une perspective d’adhésion à la zone encore lointaine : pas de stratégies pour tc2. r2 et tc2 significatifs seulement pour les capitaux à court terme. Pays fortement développé laissant supposer une diminution potentielle de son attractivité. r2 et tc2 sont significatifs sur plusieurs périodes : pays en proie à une bulle spéculative sur la valeur de ces actifs et sur son taux de change. Stratégies intermédiaires. Pays fortement développé laissant supposer une diminution potentielle de son attractivité. Pressions spéculatives sur son taux de change, induites par des difficultés budgétaires, légitime la significativité de tc2 à moyen terme. r2 et tc2 sont significatifs sur plusieurs périodes : pays en proie à une bulle spéculative sur la valeur de ces actifs et sur son taux de change. Stratégies intermédiaires. r2 et tc2 sont significatifs sur plusieurs périodes : pays en proie à une bulle spéculative sur la valeur de ces actifs et sur son taux de change. Stratégies intermédiaires. r2 et tc2 significatifs à toutes les périodes. Pays de taille importante d’où de fortes potentialités de développement. Stratégies pariant sur la taille importante du marché polonais et sur l’appréciation de sa monnaie. r2 est significatif sur de nombreuses périodes, contrairement à tc2. Stratégies des agents économiques beaucoup plus sur la rentabilité des actifs placés que sur l’appréciation du taux de change (coût main d’œuvre et taille marché interne justifient ces choix). Significativités de r2 et tc2 à court et moyen terme. Pays déjà fortement développé mais le marché lui est encore favorable. tc2 est significatif seulement à long terme. Perte de potentialité au regard du niveau de développement de ce pays. 228 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Le tableau 49 illustre des stratégies d’allocation des capitaux des agents économiques internationaux globalement en concordance avec le niveau de développement et les spécificités des PECO. La temporalité des capitaux, à court, moyen et long terme en parallèle à la significativité des gains effectués sur les actifs placés ou sur la variation des taux de change, donnent suffisamment d’éléments pour conforter ce lien. Le comportement des investisseurs devient source de vulnérabilité pour les PECO non dans l’allocation de leurs capitaux, puisque ceux-ci y apparaissent légitimes, mais dans l’endettement à court terme en zone euro pour financer ces investissements au sein des PECO. La première étape de l’HIF de Minsky (Minsky, 1974) repose sur une situation de spéculation favorable, à l’origine de comportements de plus en plus risqués dans la structure de l’endettement des agents économiques. L’équation (3) a permis de tester la significativité de cette approche théorique au regard des faits empiriques lors du processus de rattrapage économique des PECO. La dynamique favorable de ces pays a fait ressortir une attractivité forte à l’égard des capitaux étrangers avec des échéances de court, moyen et long terme. Il en ressort des stratégies d’investissement différenciées entre ces pays, notamment avec les gains sur les investissements effectués et sur la variation des taux de change. Parallèlement, l’endettement des agents économiques a été réalisé en zone euro et à court terme pour financer ces investissements. Il s’agit bien d’une source de vulnérabilité potentielle, dans un contexte de non dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers, à travers un effet de levier déstabilisateur. C’est l’inadéquation de l’endettement à court terme en zone euro pour utiliser ensuite ces capitaux dans des placements de court mais aussi de moyen et long terme qui va poser problème en cas de choc financier externe à ces pays. L’augmentation des taux d’intérêt en zone euro va matérialiser la seconde étape au sens de Minsky. Dans ce contexte de raréfaction de la liquidité, il n’est pas sûr que les investisseurs étrangers puissent encaisser les tensions induites. L’utilisation de l’effet de levier à outrance pendant la période de spéculation favorable a conduit à des divergences d’horizons temporelles fortes (endettement à court terme et pour des investissements à moyen et long terme). L’instabilité de la sphère financière internationale qui en découlera n’aura en aucun 229 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente cas porté sur la dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers des PECO. 230 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente 3. Eléments de répulsion des capitaux étrangers dans les PECO : analyse des tensions financières par les canaux de liquidité et de taux d’intérêt La seconde étape de l’HIF de Minsky (Minsky, 1974) (schéma 15) correspond au retournement de la spéculation positive, non justifiée par une dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers au sein des PECO. L’élément perturbateur, l’augmentation du taux d’intérêt dans la zone euro, va contracter la liquidité internationale à des fins de précaution suite à la politique monétaire restrictive de la BCE. Cette augmentation de la préférence pour la liquidité induit une augmentation des taux d’intérêt entre agents économiques et un rationnement du crédit. Le profil des investisseurs devient de plus en plus risqué au regard de la dégradation, tant de la conjoncture internationale qui s’ensuit que de la structure instable de l’endettement à court terme de chacun. 231 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente L’instabilité de la sphère financière, va engendrer des effets de contagion importants ayant pour origine des interdépendances fortes entre économies. Les stratégies de minimisation du coût du financement de l’endettement (à court terme et dans la zone euro) et la maximiser de la rentabilité des investissements (à moyen voire long terme dans les PECO), a pu être démontré avec l’équation (3). Le schéma 16 en décrit la contagion à travers les canaux les plus pertinents que sont la liquidité et le taux d’intérêt. Schéma 16. Dynamique des effets de contagion de la zone euro aux PECO La contagion entre la zone euro et les PECO se réalise tout d’abord à travers le canal du taux d’intérêt. L’augmentation du taux directeur de la BCE va faire augmenter les taux d’intérêt, élevant le coût du capital, et faire diminuer la rentabilité nette des placements sans pour autant justifier d’une dégradation des actifs dans les PECO. Il s’en suit une diminution de l’attractivité des PECO où les gains nets espérés diminuent d’autant plus que les taux d’intérêt pratiqués entre agents économiques augmentent. L’endettement à court terme afin de minimiser son coût imposera des renouvellements incessants, source d’instabilité. 232 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Quant à la liquidité, les agents économiques de la zone euro vont constituer des réserves de monnaie par motif de précaution pour faire face à leurs propres difficultés présentes et futures, à l’origine de sa contraction. Le retournement de la conjoncture va renforcer cette contrainte de liquidité puisque la dégradation économique et financière augmente les profils de risque des investisseurs. Les agents économiques qui se sont endettés à court terme, ne trouvant plus les financements pour renouveler leurs échéances, vont devoir vendre leurs actifs localisés dans les PECO. La liquidation en catastrophe de ces placements conduit à une diminution de leur valorisation du fait d’une offre excessive face à une faible demande d’achats. Le profil de risque des investisseurs étrangers se renforce davantage, où la valeur de leurs dettes ne change pas alors que celles de leurs actifs diminuent. La fuite des capitaux étrangers est le résultat de la diminution de l’attractivité des PECO (augmentation du coût de l’endettement) mais aussi du besoin de liquidité des agents économiques internationaux. En parallèle au déficit de la balance courante de ces pays, récurent même en situation de tensions financières internationales, les taux de change sont sous pression. Le défaut de stabilisation ou le risque de rupture des ancrages fait peser un risque-pays trop élevé sur ces territoires. On retombe dans une dynamique de crise de première génération. L’anticipation future des difficultés sur le taux de change va faire précipiter le retrait des capitaux étrangers d’agents économiques qui n’avaient pourtant pas a priori de problèmes de refinancement. La dynamique de contagion entre la zone euro et les PECO étant bien réelle, il convient d’utiliser l’analyse économétrique pour illustrer la réalisation de l’instabilité financière à partir d’un choc financier dans le pays développé vers le pays émergent. Comme nous avons déjà pu l’illustrer, deux canaux sont ici privilégiés : le canal du taux d’intérêt dans un système de changes fixes asymétriques et le canal de la liquidité dans un système interconnecté de systèmes bancaires nationaux exposé au risque de transformation (ou de liquidité). Une modélisation s’apparentant à un « Early Warning System » issue des travaux de Cartapanis, Dropsy et Mametz (Cartapanis, & al., 1999) a été retenue, eux-mêmes issus de Sachs, Tornell et Velasco (Sachs, & al., 1996) ainsi que de Goldfan et Valdés (Goldfajn, & al., 1997). L’objectif est de vérifier si les canaux du taux d’intérêt et de la liquidité sont 233 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente pertinents lors de chocs financiers externes. Afin de mener à bien la modélisation, un indicateur de pression du taux de change est utilisé. Les tensions de l’instabilité financière entre le pays développé vers le pays en voie de développement, à travers les fuites de capitaux étrangers, vont se matérialiser par des pressions importantes sur l’ancrage du taux de change. Le recours à la modélisation de Cartapanis, Dropsy et Mametz (Cartapanis, & al., 1999) se justifie tant par l’utilisation de variables similaires à celles de notre problématique (à savoir les réserves de devises internationales, les variations du taux de change et le niveau des prix à la consommation) que par l’application de cette modélisation sur les PECO. L’objectif est de mettre en évidence des vulnérabilités à travers les effets de contagion impactant les fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers et non du fait de la qualité même de ces fondamentaux. Ainsi, l’illustration de ces vulnérabilités se matérialise par des tensions sur les taux de change des PECO qui, s’ils venaient à rompre, engendreraient une crise de change lors de la fuite généralisée des capitaux étrangers. Deux groupes distincts apparaissent dans la régulation des taux de change au sein des PECO. D’une part, les pays qui ont un ancrage fixe (ce sont les variations des réserves de devises qui vont être les plus pertinentes) avec la Bulgarie, l’Estonie, la Lituanie, la Lettonie, la Slovénie et la Slovaquie. D’autre part, les pays qui n’ont pas d’ancrage fixe mais qui assurent néanmoins une certaine stabilité du taux de change (ce sont alors les variations du taux de change qui vont être les plus pertinentes) avec la République Tchèque, la Hongrie, la Pologne et la Roumanie. L’indicateur de pression de crise sur le taux de change appelé CRISE (Cartapanis, & al., 1999) est défini par l’équation suivante : [ ( ) ] 234 [ ( ) ] Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente TCR = (TCN*Peuro)/P TCR Taux de change réel (une hausse correspond à une dépréciation réelle) TCN Taux de change nominal (unité de monnaie locale / euro) Peuro Prix à la consommation euro P Prix à la consommation du pays domestique RES Réserves internationales de change (en euro or exclu) 𝜎DTCR Ecart-type de log (TCRt/TCRt-1) 𝜎DRES Ecart-type de log (RESt/RESt-1) Cartapanis (Cartapanis, & al., 1999) identifie un ensemble de variables macroéconomiques et macro-financières pertinent suivi durant des périodes de crises et de non-crises (déterminé par l’indice CRISE). Le choix de ces indicateurs de vulnérabilité ne peut évidemment refléter l’ensemble des sources de tensions alors induites en périodes de crises. Cependant, l’objectif du modèle est d’utiliser des indices impactant et donc reflétant le comportement des investisseurs internationaux « dans l’anticipation et dans l’évaluation de la confiance accordée à la situation macroéconomique ou financière d’un pays. » (Cartapanis, & al., 1999). Les indicateurs d’alerte (comprenant plusieurs variables) sélectionnés sont les suivants : surévaluation du taux de change, déséquilibre commercial ou courant, endettement externe, déséquilibre budgétaire, déséquilibre monétaire et déséquilibre du secteur réel. Dans notre cas, l’idée est d’utiliser l’indice CRISE afin de tester les variables reflétant les canaux du taux d’intérêt et de la liquidité. La modélisation de Cartapanis (Cartapanis, & al., 1999) n’a pas testé ces canaux. Il convient de faire les modifications afin d’y faire correspondre le cadre d’analyse de notre étude. Cependant, les variables que nous avons à disposition sont trimestrielles et en euro (notamment les flux de capitaux) alors que dans les travaux de Cartapanis (Cartapanis, & al., 1999), l’indice CRISE est calculé en données mensuelles et en dollar. Nous réalisons alors les deux interprétations de détection des périodes de tensions sur les taux de change, en mensuelle et en dollar puis en trimestrielle et en euro. La comparaison des résultats de ces deux méthodologies met en avant avec la même exactitude les périodes de crises de celles de non crises. 235 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Le tableau 50, réalisé avec les données d’Eurostat, distingue les périodes de tensions, en bleu, de celles sans tensions, en blanc (les périodes sans données sont en jaune). Tableau 50. Résultats des tensions sur les taux de change des PECO Bulgarie République Tchèque Estonie Lettonie Lituanie 1996Q2 1996Q3 1996Q4 1997Q1 1997Q2 1997Q3 1997Q4 1998Q1 1998Q2 1998Q3 1998Q4 1999Q1 1999Q2 1999Q3 1999Q4 2000Q1 2000Q2 2000Q3 2000Q4 2001Q1 2001Q2 2001Q3 2001Q4 2002Q1 2002Q2 2002Q3 2002Q4 2003Q1 2003Q2 2003Q3 2003Q4 2004Q1 2004Q2 2004Q3 2004Q4 2005Q1 2005Q2 2005Q3 2005Q4 2006Q1 2006Q2 2006Q3 2006Q4 2007Q1 2007Q2 2007Q3 2007Q4 2008Q1 2008Q2 2008Q3 2008Q4 2009Q1 2009Q2 2009Q3 2009Q4 236 Hongrie Pologne Roumanie Slovénie Slovaquie Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Le tableau 50 indique des périodes de tensions sur le taux de change des PECO, avec des données trimestrielles, identiques aux résultats des périodes mensuelles des travaux de Cartapanis (Cartapanis, & al., 1999). Il y a bien similitude des périodes de tensions sur les taux de change, justifiant ainsi la cohérence entre les deux approches. L’indicateur de pression spéculative CRISE peut alors être testé sur les variables reflétant les canaux de contagion du taux d’intérêt et de la liquidité émise. Dans le cadre de notre hypothèse, c’est l’augmentation du taux d’intérêt en zone euro qui va mettre sous pression le taux de change des PECO (matérialisée par l’indice CRISE). Les deux canaux qui sont à privilégier, sans obligatoirement être simultanés, sont le taux d’intérêt et la liquidité. En effet, l’augmentation des taux en zone euro à court terme va mettre en difficulté les agents économiques qui ont pu s’endetter à court terme en zone euro pour investir à moyen et long terme dans les PECO. Comme nous avons pu le décrire auparavant, le retrait des capitaux va conduire à une diminution de l’attractivité des PECO et à la nécessité de satisfaire un besoin de liquidité pour rembourser les échéances d’endettement. Il n’est pas possible d’utiliser dans une même équation plusieurs variables de taux d’intérêt et/ou de capitaux (biaisant les résultats au regard du même sens de causalité de ces variables). L’idéal est alors de sélectionner une seule variable d’investissements étrangers (total, Ct, Pf et IDE) et d’en analyser l’impact avec une seule variable des taux d’intérêt à court terme pour une échéance de 12 mois maximum (journalier, 1 mois, 3mois, 6mois et 12 mois) pour avoir des équations plus lisibles. L’équation (4) repose sur l’utilisation de l’indice CRISE comme variable à expliquer avec le taux d’intérêt à court terme en zone euro et les flux de capitaux étrangers comme variables explicatives. Equation (4) : CRISE = 𝛼0 + 𝛼1.ieuro + 𝛼2.I(t) avec ieuro journalier, 1 mois, 3 mois, 6 mois ou 12 mois avec I(t) à court terme, portefeuille, IDE ou total. 237 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente CRISE Indice de pression sur le taux de change ieuro Taux d’intérêt à court terme en zone euro (périodicité inférieure ou égale à 12 mois) I(t) Flux de capitaux étrangers totaux exprimés en millions d’euros I(Ct) Flux de capitaux étrangers à court terme exprimés en millions d’euros I(Pt) Flux de capitaux étrangers de portefeuille (moyen terme) exprimés en millions d’euros I(IDE) Flux de capitaux étrangers d’IDE (long terme) exprimés en millions d’euros Des décalages temporels ont été réalisés (jusqu’à trois périodes) afin d’inclure l’ensemble des effets sur une durée d’un an maximum. Les données étant trimestrielles, cette amplitude permet d’inclure les conséquences d’un endettement à court terme pour des investissements à moyen, voire long terme. Le court terme est abordé avec des échéances journalières, 1 mois, 3 mois, 6 mois puis 12 mois au maximum. Les agents économiques qui se sont endettés à 12 mois seront en difficultés au maximum 12 mois après s’ils doivent se refinancer. Les résultats des tests économétriques de l’équation (4) sont donnés dans le tableau 51. Tableau 51. Equation (4) : résultats des tests économétriques Pays Canal du taux d’intérêt Significativité des variables BG CZ EE Canal de la liquidité Significativité des variables Pf Degré de vulnérabilité potentiel Moyen Total, IDE Fort Total, Ct Faible Total, Ct, Pf Moyen Pf, IDE Fort IDE Moyen Total, Ct, Pf, IDE Fort Pf Total, Ct Moyen Faible Ct, IDE Fort IEUROJ(-3), IEURO1M(-3), IEURO3M(-3) IEUROJ, IEURO1M, IEURO3M, IEURO6M, IEURO12M HU LT IEUROJ, IEURO1M, IEURO3M IEURO6M, IEURO12M LV PL IEUROJ, IEURO1M, IEURO3M, IEURO6M, IEURO12M, IEUROJ(3), IEURO1M(-3), IEURO3M(-3) RO SI SK IEURO1M(-2), IEURO3M(-2), IEURO6M(-2), IEURO12M(-2) Source : données Eurostat et calculs auteur. Le canal du taux d’intérêt (avec échéance journalière, à 1 mois, 3 mois, 6 mois et 12 mois), est significatif pour la République Tchèque, l’Estonie, la Lituanie, la Pologne et la Slovaquie. Il n’apparait pas de divergences assez fortes entre ces PECO pour permettre d’identifier des sous-catégories de pays. L’endettement des agents économiques à court terme en zone euro 238 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente pour ensuite investir dans les PECO semble se confirmer ici. La variation des taux à court terme dans la zone euro va directement mettre sous pression leur taux de change, posant de nombreuses interrogations quant à la viabilité de leur ancrage. Le canal de la liquidité se décompose en capitaux totaux, de court terme, de portefeuille et d’IDE. Les relations entre la fluctuation des capitaux étrangers et l’indice de pression CRISE sur le taux de change sont significatives pour tous les PECO. Ce résultat apparait logique puisque les pressions sur les taux de change et les réserves de devises sont issues de la fuite de ces mêmes capitaux. Il y a cependant quelques spécificités, à savoir que tous les pays (sauf l’Estonie et la Slovénie) ont des variables significatives à moyen et long terme (portefeuille et IDE principalement). Cet aspect met en avant des vulnérabilités fortes au sein de ces pays puisque ce sont les capitaux de moyen et long terme qui partent majoritairement et non ceux de court terme. L’endettement en zone euro à court terme (canal du taux d’intérêt) pour en investir le produit dans des investissements de moyen et long terme (canal de la liquidité) ne peut rendre la sphère financière qu’instable. Pour les pays qui ont des variables significatives pour ces deux canaux (effective pour la République Tchèque, la Lituanie, la Pologne et la Slovaquie), il y a bien illustration d’une vulnérabilité forte dans la structure de l’endettement des agents économiques internationaux. Pour autant, à aucun moment il n’a été question de la qualité de leurs fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers. Les pays de ce groupe sont les plus avancés économiquement de la zone. Les agents économiques prendraient-ils plus de risques pour des pays apparaissant macro économiquement plus stables ? Concernant les autres PECO, il n’y a que les variables des capitaux de moyen et long terme qui sont significatives (Bulgarie, Hongrie, Lettonie et Roumanie). Leur fuite peut se justifier par d’autres éléments que la contraction des taux d’intérêt de la zone euro, même si l’équation (3) a pu confirmer l’utilisation des taux d’intérêt en zone euro à court terme. L’Estonie fait exception puisqu’elle a un canal du taux d’intérêt significatif mais en parallèle à des capitaux de court terme qui se retirent (s’endetter à court terme pour investir aussi à 239 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente court terme apparait peu risqué). Quant à la Slovénie, il n’y a que les capitaux totaux et de court terme qui sont significatifs. Ce profil n’apparaît, lui non plus, pas risqué. Comme l’équation (4) a pu le démontrer, l’instabilité financière internationale repose sur un endettement en euro à court terme dont le produit est utilisé à travers des investissements à moyen, voire long terme, dans les PECO. Les effets de contagion, à travers les canaux de taux d’intérêt et de liquidité, sont fortement déstabilisateurs comme la crise des Subprimes de 2008 en témoigne. Il apparait difficile pour les PECO de lutter contre ces pressions puisqu’il ne s’agit pas de déséquilibres macroéconomiques ou macro-financiers internes mais relevant du fonctionnement de la sphère financière internationale. Pourtant, la viabilité d’une dynamique de rattrapage à moyen terme dépendra de la capacité des PECO à amortir ces chocs internationaux à court terme, récurrents au marché financier international. 240 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Conclusion intermédiaire Ce chapitre s’est approprié les hypothèses émises selon notre problématique à travers de réaliser des tests économétriques de données sur les PECO. Ces pays présentent des profils de vulnérabilité induits par leurs stratégies de rattrapage économique à l’origine d’une amplification des interdépendances. Les équations (1) et (2) confirment le rôle fondamental des capitaux étrangers, tout d’abord pour compenser le déficit de la balance courante, nécessaire à la restructuration du tissu économique de ces territoires, mais aussi dans la composition du stock de devises afin d’assurer la stabilisation, voire l’ancrage, du taux de change. Ces deux équations ont pu faire émerger des divergences d’allocation des capitaux au sein des PECO (totaux, court terme, portefeuille et IDE) qui semblent être le fruit de stratégies différenciées des agents économiques internationaux. De plus, la nature de l’ancrage fait apparaitre des différences légitimes et logiques entre les PECO, où l’utilisation des réserves de devises se fera beaucoup plus pour les ancrages fixes que flexibles. Quant à l‘instabilité de la sphère financière, reposant sur l’approche de l’HIF de Minsky (Minsky, 1974), elle peut être décrite en deux étapes. La première est qualifiée de spéculation favorable, confirmée par l’équation (3), et conduit à la création d’une structure d’endettement vulnérable (financement à court terme en zone euro pour utiliser ces capitaux dans des placements de moyen voire long terme dans les PECO). Les résultats mettent en avant des différences dans les stratégies d’allocation des capitaux opérées par les agents économiques internationaux vis-à-vis des PECO, notamment dans la recherche de gains dans les placements effectués et sur les variations des taux de change. La seconde étape dans l’HIF de Minsky (Minsky, 1974) illustre le retournement de cette dynamique où un élément perturbateur, l’augmentation des taux d’intérêt dans la zone euro, amplifie la préférence pour la liquidité. Il s’ensuivra des effets de contagion à travers les canaux de la liquidité et du taux d’intérêt, confirmés par l’équation (4) avec la fuite généralisée des capitaux étrangers. 241 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Un premier groupe apparait fortement vulnérable avec des placements à moyen et long terme en contrepartie d’endettements à court terme (majoritairement les PECO les plus avancés avec la République Tchèque, la Lituanie, la Pologne et la Slovaquie). Un deuxième groupe est dans une situation intermédiaire mais potentiellement risquée avec la fuite de placements à moyen et long terme (Bulgarie, Hongrie, Lettonie et Roumanie). Enfin, un dernier groupe n’apparait pas du tout vulnérable (Estonie et Slovaquie). Au regard de ces conclusions, les vulnérabilités potentielles des PECO ne peuvent être totalement sous leur contrôle puisqu’elles ont pour origine le reste du monde. Pourtant, les résultats des équations économétriques mettent en avant des divergences de stratégies entre pays par les agents économiques internationaux. Cette différenciation interpelle quant à la qualité du positionnement dans le rattrapage économique de ces pays. La viabilité de la dynamique de développement, en parallèle à des marges de manœuvres conjoncturelles suffisantes (afin d’assouplir les effets des tensions jusqu’au retour à la normale du marché financier international), pose la question d’une alternative crédible qu’il convient d’analyser. 242 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Chapitre 6 Détermination de la qualité du positionnement des PECO : entre turbulences financières et viabilité du rattrapage économique. Introduction intermédiaire La capacité des PECO à anticiper les tensions financières internationales, afin de leurs donner l’opportunité de s’adapter pour les atténuer, n’apparait que faiblement envisageable. D’abord, parce que l’élément perturbateur qui va contracter l’afflux des capitaux étrangers a pour origine le reste du monde. Ensuite, parce que la non dégradation de leurs variables macroéconomiques et macro-financières ne permet pas de témoigner d’une fragilité visible, et donc non ajustable, pouvant résulter de leurs fondamentaux. La crise des Subprimes en 2008 confirme cet état des faits, où tous ces pays ont été fortement impactés par la contraction de la liquidité internationale. Le graphique 59 illustre cette tendance où l’ensemble des PECO (Bulgarie, République Tchèque, Estonie, Lettonie, Lituanie, Hongrie, Pologne, Roumanie, Slovénie et Slovaquie) ont vu leur taux de croissance économique devenir négatif fin 2008. Graphique 59. Taux de croissance du PIB en pourcentage des PECO Source : Eurostat. 243 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Même s’il n’apparait que peu envisageable de contourner l’impact des tensions financières internationales, la capacité de rebond des PECO a pu apparaitre divergente lors de l’après crise. En effet, certains de ces pays ont pu bénéficier d’un retour rapide à la croissance (dès mi-2009 pour la République Tchèque, la Slovénie, la Slovaquie, la Hongrie et la Pologne) alors que d’autres plus tardivement et faiblement (au mieux début 2010 pour la Bulgarie, l’Estonie, la Lituanie, la Lettonie et la Roumanie). Au regard de ces éléments, le chapitre suivant a pour ambition d’analyser la qualité du positionnement économique pour comprendre l’alternative crédible qui se dessine pour certains PECO dans le contexte décrit par la problématique. L’hypothèse qui est soulevée est la suivante : les fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers n’étant pas dégradés avant la crise, si les PECO arrivent à résister aux pressions externes, leur sortie de crise pourrait leur être de nouveau bénéfique puisqu’ils seront encore attractifs (taux de rentabilités toujours plus élevés que dans la zone euro). La question sous-jacente est de savoir comment des pays qui ne peuvent éviter les tensions financières internationales sont capables de les supporter jusqu’au retour à la normale du marché financier international. Afin de juger de la capacité des PECO à perpétuer une attractivité favorable lors de l’après crise, il s’agira de définir la méthodologie de la démarche, reposant sur une sélection de fondamentaux adéquate à la problématique développé dans ce travail. Deux aspects importants vont émerger, avec des dualités temporelles divergentes, pour analyser puis définir la résistance des PECO. Il s’agit tout d’abord de l’efficacité des outils conjoncturels de court terme, permettant de sauvegarder les fondements du processus de croissance économique face aux pressions financières externes. Puis de la viabilité du processus de rattrapage économique de moyen terme, nécessaire à la restructuration du tissu économique pour faire émerger des spécialisations sectorielles à l’internationale. La qualité du positionnement des PECO, qu’il soit de court terme ou de moyen terme, ne peut empêcher les pressions internationales à l’origine des tensions sur le taux de change. Mais il va conditionner l’amplitude du rebond lors de l’après crise si le territoire a pu rester attractif. 244 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Le cheminement ainsi décrit illustre toute L’importance au regard de la vulnérabilité principale que ces pays abordent dans le retrait potentiel de capitaux étrangers. Le degré de rebond des PECO est alors conditionné par leur capacité à encaisser les chocs financiers externes, à travers des outils de régulation conjoncturelle, tout en maintenant un processus de développement viable, à travers la qualité de leurs fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers. Le retour rapide des capitaux étrangers, conditionné par la crédibilité des aspects temporels de court et moyen terme décrits précédemment, reste la meilleure alternative pour contrecarrer les pressions sur le taux de change. L’étude analytique de la qualité du positionnement de chaque PECO va permettre in fine de constituer des groupes de pays au regard des convergences et des divergences face aux facteurs de vulnérabilité. Ces éléments sont indispensables pour expliquer la nature des rebonds après la crise des Subprimes de 2008. 245 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente 1. Méthodologie de la démarche : une dynamique en trois thématiques Le développement des parties 1 et 2 a permis de faire ressortir un nombre de variables déterminantes pour répondre à l’hypothèse posée. Leur agrégation les synthétise en 3 thématiques de vulnérabilités potentielles qui caractérisent au mieux les PECO. Elles ont pour ambition d’exposer la viabilité du développement économique de chaque pays en parallèle à sa capacité de régulation dans le cadre de son positionnement tant externe qu’interne. Comme le décrit le schéma 17, il convient d’avoir un raisonnement dynamique où chacune des trois thématiques apparait essentielle vis-à-vis de la suivante. Cette typologie a pour ambition de distinguer les pays avec de bons fondamentaux, c'est-à-dire ceux qui ont un besoin de liquidité seulement durant la période transitoire afin d’améliorer leur processus productif, de ceux qui ont des fondamentaux plus faibles, c'est-à-dire des pays qui ont des besoins de liquidité mais ne justifiant pourtant pas d’amélioration économique. L’idée est de déterminer si les flux de capitaux étrangers sont utilisés au maximum de leur potentiel tout en étant en mesure d’en amoindrir les aspects négatifs (pressions spéculatives et instabilité financière principalement). Schéma 17. Agrégats sélectionnés afin d’illustrer chaque thématique Qualité de la régulation : Structure interne : Robustesse Economique. Pilotage de la dette publique. Robustesse bancaire. Pilotage de l’inflation. Qualité du positionnement international : Aspect commercial Aspects monétaire et financier. 246 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Le schéma 17 a pour ambition d’illustrer l’exposition de chacune des économies émergentes dans leur stratégie d’intégration au reste du monde adoptée. La qualité du positionnement international, au regard des aspects commerciaux, monétaires et financiers, permet de juger de la viabilité de l’intégration du pays vis-à-vis de l’extérieur dans sa dynamique de rattrapage économique. L’état de sa structure interne, économique et bancaire, décrit l’adéquation de son positionnement international avec son aptitude de transmission intérieure (qualité de la restructuration du tissu industriel et diffusion au reste de l’économie). Quant à la troisième et dernière thématique, la qualité de la régulation avec le pilotage de la dette publique et de l’inflation, il s’agit de la capacité du pays à réguler les périodes de tensions financières internationales de court terme afin de rendre viable la dynamique de rattrapage économique de long terme. Les vulnérabilités des PECO, dans le cadre de leur processus de convergence dans un contexte financier instable, suppose une sélection d’agrégats macroéconomiques et macrofinanciers offrant l’opportunité de les illustrer. Cependant, leurs spécificités se doivent d’être présentées afin de marier au mieux tout jugement de la qualité de leur fondamental tant à court terme qu’à moyen voire long terme. Il convient d’exposer les composants de chaque thématique afin d’en expliciter le fondement. La première thématique (schéma 18) a pour ambition de décrire le positionnement externe du pays. La double intégration commerciale et financière, complémentaire puisque ce sont les capitaux étrangers qui permettent d’acquérir des biens d’équipements afin de restructurer le tissu économique nécessaire à l’émergence d’une spécialisation sectorielle à l’international, suppose de sélectionner les variables suivantes : 247 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Sché ma 1 8 . Thé matique 1 : qualité du positionne ment inte rnational Thématique 1 : Qualité du positionnement international. As pect commercial. As pects monétaire et financier. Degré de soutenabilité de l’endettement extérieur de Ct Solde courant Taux d’ouverture commercial Choix du régime de change Indicateur de compétitivité -prix Degré de soutenabilité de l’endettement extérieur de Mt et Lt Les PECO ont tous un très fort degré d’ouverture commerciale avec une dépendance indéniable à l’UE. Afin de rendre l’analyse de cet indicateur plus pertinent, il a été choisi de décomposer son étude par secteurs au regard du solde des balances commerciales. Logiquement, certains secteurs doivent apparaitre déficitaires (Combustibles Minéraux, Lubrifiants et Produits Annexes ; Produits Alimentaires, Boissons et Tabac ; Produits de Base) et d’autres excédentaires en raison des spécialisations sectorielles basées sur l’industrialisation (Autres Articles Manufacturés ; Machines et Matériel de Transport ; Produits Chimiques et Connexes). L’indicateur de compétitivité-prix est l’un des éléments-clés de l’exposition concurrentielle des pays émergents vis-à-vis des pays développés, au regard du coût relativement faible de leur main d’œuvre. Il apparait cohérent de voir si l’appréciation du taux de change réel, effectif dans tous les PECO et source de perte de compétitivité-prix à l’export, est systématiquement synonyme de dégradation de la balance courante (totale, puis seulement pour les biens). Son évolution doit définir la nature du positionnement compétitif des PECO. Le solde négatif de la balance courante, commun à tous les PECO pousse à analyser cet 248 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente agrégat à travers l’évolution de sa tendance, de nature conjoncturelle ou structurelle, pour être plus pertinent. Le choix du régime de change est emblématique de la stratégie adoptée par les PECO vis-àvis de leur intégration à l’euro. Un ancrage à la monnaie unique est source d’amplification du processus de rattrapage économique (renforcement de l’effet d’attractivité) avec une volonté d’intégrer la zone monétaire rapidement. Mais il peut aussi s’avérer dangereux face aux pressions spéculatives, à la perte de la politique monétaire et à la non-utilisation de la politique budgétaire (respect des critères de Maastricht). La stabilisation voire l’ancrage du taux de change, nécessaire pour être attractif vis-à-vis des capitaux étrangers, suppose aussi de réguler au mieux l’exposition du pays à l’endettement en devises à court terme. Elle n’est potentiellement soutenable qu’au regard du différentiel entre le niveau des réserves de devises avec l’endettement à court terme. Quant à l’endettement en devises à moyen, voire long terme, sa viabilité dépend de la capacité du pays à créer de la richesse pour en assurer le remboursement ultérieurement. L’indicateur dette extérieure/PIB est l’agrégat qui permet de l’illustrer. La structure interne, deuxième thématique (schéma 19), interroge sur la qualité de l’utilisation des capitaux étrangers au sein du pays dans son ensemble. La reconversion en cours du tissu industriel est conditionnée par la diffusion des transferts de technologies et des compétences des secteurs centrés sur l’exportation, bénéficiant de l’attractivité des IDE, vers le reste de l’économie. Il y est aussi question des crédits accordés au niveau local, à travers les financements interbancaires, qui jouent pleinement leur rôle de diffusion dans le potentiel de développement local. Les éléments qui permettent de juger de l’effectivité de la dynamique de développement sont les suivants : 249 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Schéma 19. Thématique 2 : qualité de la structure interne Thématique 2 : Qualité de la structure interne. Robustesse Economique. Robustesse Bancaire. Stocks d’IDE/PIB Tiers one Efforts de R&D Prêts non performants Poids de l’industrie dans le PIB Présence des banques étrangères L’industrie, au regard du choix de la dynamique de rattrapage de ces pays, est l’élément moteur de la reconversion de l’économie par l’effet entraînant qu’il procure. Une analyse du poids de ce secteur, en comparaison des deux autres que sont l’agriculture et les services, informe de l’état d’avancement de la restructuration. En parallèle, la description de sa dynamique permet de juger de son potentiel de progression à court terme. La convergence économique de ces territoires suppose à terme la perte d’un avantage concurrentiel (une main d’œuvre peu coûteuse qui a tendance à s’apprécier avec l’augmentation des niveaux de vie). L’effort de R&D, renforçant la qualité des spécialisations vers des secteurs à plus haute valeur ajoutée, est l’alternative indispensable pour la réalisation de la convergence économique. La R&D étrangère n’est pas présente au sein des PECO, traduisant une localisation des capitaux vers des activités encore à faible valeur ajoutée. Mais la nature de la R&D nationale décrit la viabilité des efforts fournis pour poursuivre le développement économique. Sa répartition se fait en deux tendances distinctes au sein des PECO. La R&D peut être de nature fondamentale et peu productive, se localisant principalement dans l’enseignement supérieur et les services. Ou la R&D est de 250 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente nature appliquée et à vocation productive, au sein des entreprises avec une concentration dans l’industrie manufacturière. Les stocks d’IDE présent dans les PECO, par nature stables et à vocation productive, ne sont pas toujours destinés d’abord aux secteurs industriels au regard des stratégies adoptés par ces pays. Ils peuvent se localiser dans des secteurs plus spéculatifs (immobilier, construction…), démontrant la mauvaise allocation des capitaux étrangers et la défaillance de crédibilité du processus de rattrapage économique de certains. Quant à l’origine des capitaux, majoritairement issus de l’Europe occidentale, il peut exister une véritable dépendance vis-à-vis d’un ou de plusieurs de ces pays. Face à l’instabilité récurrente de la sphère internationale, une dépendance accrue à l’un de ces pays développés est synonyme de soutien potentiel lors des tensions. L’une des caractéristiques communes aux PECO réside dans la forte présence des banques étrangères. Ces filiales adoptent les méthodes de gestion internationale et bénéficient du soutien financier de leur maison-mère, favorable à une meilleure allocation des crédits. Elles ont la capacité de se faire refinancer par leur structure de rattachement et contourner les politiques monétaires locales, à l’origine de problèmes de régulation macro-prudentielle. Les différentes réglementations bancaires ont mis en avant l’obligation d’avoir des fonds propres afin de subvenir à la réalisation potentielle de ce genre de risques. L’intérêt du Tiers One, directement issu de ces réflexions, est d’informer sur la robustesse du secteur bancaire avant et après la crise. L’activité financière a été mise à rude épreuve. La dégradation de la conjoncture économique, en parallèle à un endettement en devises au regard de la stabilisation des taux de change avec l’euro, a renforcé leurs vulnérabilités. Quant aux prêts non performants, il permet de se focaliser sur la viabilité de l’activité de crédits à travers la défaillance des prêts au sein des PECO. Logiquement, la dégradation de la conjoncture économique induite par les tensions financières internationales, a fragilisé de nombreux agents économiques locaux. La qualité de la régulation est la troisième et dernière des thématiques développées ici (schéma 20). Les pouvoirs publics jouent un rôle déterminant dans la stabilité macroéconomique et macro-financière du pays. Le besoin en liquidité internationale peut 251 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente être la source de fortes tensions dans l’économie locale. Le gouvernement doit être capable d’utiliser les outils de la politique économique pour encadrer ces tensions à travers le pilotage de la dette publique et de l’inflation. Cependant, celui-ci n’a pas toujours les moyens d’intervenir efficacement (politique monétaire indisponible avec la stabilisation voire l’ancrage du taux de change et du contrôle du système bancaire par l’étranger, politique budgétaire atone face aux obligations du Traité de Maastricht pour intégrer la zone euro…). Autant de caractéristiques qui vont rendre délicates la régulation à court terme des variables de l’économie par des politiques conjoncturelles. Schéma 20. Thématique 3 : qualité de la régulation Thématique 3 : Qualité de la régulation. Pilotage de la dette publique. Pilotage de l’inflation. Taux d'inflation Endettement public Instabilité du solde budgétaire Instabilité de l'inflation La dette publique est un indicateur pertinent de la capacité pour un gouvernement à dynamiser son économie en cas de crise. Différents aspects interviennent pour juger de son efficacité : le niveau de l’endettement (un endettement trop élevé ne permettra pas de réaliser une politique budgétaire de relance), et la composition de l’échéance de l’endettement (à court, moyen ou long terme), qui traduit les difficultés de pérennisation des dettes publiques. L’outil budgétaire est par définition contra-cyclique. Il doit dynamiser l’économie en périodes de récession, afin d’amoindrir les effets macroéconomiques négatifs, et se 252 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente contracter en période de croissance, pour réduire l’endettement et reconstituer des marges de manœuvre. Pourtant, le solde budgétaire n’est pas toujours utilisé avec efficacité; s’en suit une pro-cyclicité induisant une amplification de la conjoncture économique, qu’elle soit favorable ou non. L’inflation détermine la capacité du pays à réguler les tensions monétaires au sein de l’économie au regard de l’afflux des capitaux étrangers et de l’optimalité de leur allocation sur le territoire national. Cet indicateur est d’autant plus important puisque l’inflation traduit une appréciation des prix, source de perte de compétitivité à l’international lorsque les taux de change sont stabilisés, voire ancrés à l’euro. Il faut d’abord apprécier si l’inflation totale apparait soutenable ou non puis si sa tendance, qui matérialise les efforts du pays, s’inscrit à la baisse ou à la hausse. La décomposition de l’inflation par secteurs permet d’affiner l’analyse afin de déceler d’une part des tensions structurelles et légitimes procédant à l’effet de rattrapage (Boissons Alcoolisées, Tabac et Narcotiques ; Electricité, Gaz et Autres Combustibles ; Energie…), d’autre part aux tensions procédant à une tendance conjoncturelle, voire spéculative, de la dynamique (Logement, Eau, Electricité, Gaz et Autres Combustibles ; Loyers d'Habitation Réels…). Il faut notifier l’existence de deux sous-périodes avec des origines différentes pour l’inflation : 1995/2000 relative à la stabilisation postsocialiste (forte diminution de l’inflation) et 2001/2009 relative à l’adhésion à l’Union européenne (forte augmentation de l’inflation). Nous n’étudierons que la 2ème période puisqu’elle s’inscrit dans la détermination de la qualité des fondamentaux d’avant crise pour envisager l’efficacité de la politique monétaire lors des tensions internationales en 2008. La description des trois thématiques permettra d’illustrer le positionnement des PECO tant à court terme, lors des tensions financières internationales, qu’à moyen terme, dans le cadre du processus de rattrapage économique. La volonté de définir une approche dynamique repose sur la complémentarité de la gestion à court terme pour s’assurer de la convergence économique à moyen terme, sachant que ces deux temporalités sont indissociables pour la viabilité du processus de croissance économique. Ces deux aspects informent de la capacité de rebond des PECO face à des tensions internationales qu’ils ne peuvent éviter. La 253 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente méthodologie du raisonnement ainsi décrite, il convient de structurer les agrégats macroéconomiques et macro-financiers par rapport aux cas spécifiques des PECO pour en tirer le maximum d’informations pertinentes pour l’interprétation de leur positionnement. 254 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente 2. Analyse ciblée de la qualité des fondamentaux des PECO La détermination de la qualité du positionnement des PEC0, nécessaire pour juger de leur capacité à rebondir après les turbulences financières internationales, impose de s’interroger sur les divergences mais aussi sur les convergences entre ces territoires. L’idée est d’expliquer le comportement de chacun, en particulier durant la crise des Subprimes en 2008, à travers la détermination des fondamentaux les plus probants. La démarche repose sur la description des agrégats composant les thématiques qui ont été décrites précédemment, à savoir la qualité du positionnement international, la structure interne et la qualité de la régulation. La dynamique favorable de ces pays, source d’attractivité avant la crise, le sera toujours si les PECO ont encore un fort potentiel de développement lors de l’après crise. Un grand nombre de ces territoires, même avec des profils spécifiques, laisse entrevoir la création de regroupements. Afin d’illustrer cet état des faits, dès à présent une présentation par groupe, puis par pays les composant, est réalisée pour plus de lisibilité (tableau 52). Tableau 52. Regroupement des PECO : entre qualité du positionnement à court et à moyen terme 255 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Le tableau 52 liste la répartition des PECO afin de clarifier les regroupements effectués. Le groupe A correspond aux pays qui ont de bons fondamentaux à court et moyen terme avec la République Tchèque, la Slovaquie et la Slovénie. Le groupe B intègre les pays intermédiaires, avec la Pologne et la Roumanie. Le groupe C comprend l’Estonie, la Lituanie, la Lettonie, la Bulgarie et la Hongrie, pays avec des faiblesses à court ou moyen terme dans la qualité de leur positionnement. Ces deux composantes de court et moyen terme doivent permettre de définir in fine leur capacité de rebond lors de l’après crise. Les caractéristiques groupe par groupe vont être effectuées, complétées par celles de chaque pays les composants, selon la classification réalisée dans ce tableau. Le groupe A, à savoir celui des pays les moins vulnérables, comprend la République Tchèque, la Slovaquie et la Slovénie. Ces pays ont su se restructurer favorablement depuis le début de la période de transition en tournant leur tissu industriel vers les exportations. Une véritable politique de restructuration a été effectuée, témoignant d’une viabilité de la qualité du processus de rattrapage économique. Aujourd’hui, ils sont fortement compétitifs mais ils n’ont pas encore achevé leur convergence face aux autres pays de l’Union européenne. La fuite généralisée des capitaux étrangers dans un premier temps, comme on a pu en rendre compte précédemment, puis l’impact du commerce international, ont induit une diminution de leur croissance (notamment dans les spécialisations relatives à l’industrie automobile). La régulation de la politique économique est efficace (faible endettement public et peu de tensions inflationnistes pour des pays en cours de rattrapage économique). Leurs déficits courants restent faibles, contenus et légitimes. La stabilité du taux de change n’est plus une contrainte pour la Slovénie et la Slovaquie (adoption de l’euro en 2007 et 2009). Pour la République Tchèque, un flottement administré lui permet une certaine flexibilité, même si elle bénéficie de suffisamment de réserves en devises au regard de son endettement externe à court terme, écartant l’hypothèse d’une crise de son taux de change. 256 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Les fondamentaux de ces pays sont suffisamment solides. Cependant, les effets de dépendance, tant vis-à-vis de l’Europe occidentale que des autres PECO, sont à la source de vulnérabilités potentielles. Différents schémas (schémas 21, 22 et 23) présentent la composition de leurs fondamentaux au regard des thématiques mises en avant précédemment. La qualité de leur positionnement international, de leur structure interne ainsi que de leur régulation y est largement favorable tant pour aborder les pressions à court terme de l’instabilité financière internationale que dans la viabilité à long terme de leur dynamique de rattrapage économique. Pour ce groupe de pays, on peut supposer un retour rapide des capitaux étrangers lors de l’après-crise rendant viable leur dynamique de convergence. Au début de la transition, la Tchécoslovaquie était l’un des pays les plus riches des PECO en termes de PIB par habitant. Elle a su tirer avantage d’une forte industrialisation héritée de l’ère soviétique, d’un faible endettement extérieur, d’une industrie nucléaire et d’un processus de réformes déjà en cours bien avant 1989. Ainsi, la République Tchèque actuelle bénéficie d’activités sectorielles dans l’industrie, orientées à l’internationale avec des soldes courant fortement excédentaires (schéma 21). Ces spécialisations sont bien intégrées au regard de l’absence de corrélation entre l’appréciation du taux de change et le solde de la balance courante, témoignant d’une conversion de la compétitivité-prix vers celle hors-prix (gage de réussite en cours du processus de développement économique). L’industrie joue un rôle déterminant avec un poids et une dynamique importante, soutenue par une R&D qui lui est affectée à 1.47% du PIB. Il existe une forte présence des Pays-Bas, signe d’une dépendance à l’un des pays d’Europe occidentale et preuve de soutien lors des périodes difficiles. Sans ancrage officiel à l’euro, et même avec la présence de banques étrangères (92% des actifs et 93% des crédits), le tiers one s’est peu dégradé durant les tensions de 2008 (15.15% en 2005 et 11.37% en 2008). L’ampleur de la régulation, qu’il 257 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente s’agisse du pilotage de la dette publique ou de l’inflation, est contenue, témoignant d’une marges de manœuvre optimale si besoin était. Contrairement à la Slovénie et à la Slovaquie, la République Tchèque n’a pas fait le choix d’adhérer rapidement à l’euro. Ce pari apparait aujourd’hui gagnant puisqu’elle peut encore faire fluctuer sa monnaie afin de s’adapter aux chocs externes. La stabilisation du déficit de la balance courante totale et la diminution du déficit de la balance courante des biens témoignent du succès du rattrapage. Les secteurs accès à l’exportation stabilisent, voire compensent en partie, le déficit de la balance courante, premier signe d’une indépendance en devenir aux capitaux étrangers. La Slovaquie s’est favorablement orientée vers le reste du monde à travers des secteurs industriels compétitifs (schéma 22). Même si l’appréciation de son taux de change, jusqu’à son adhésion à l’euro en 2009, est négativement corrélée au solde de sa balance courante totale, il ne l’est pas pour le solde de sa balance des biens. Il y a bien ici une relative amélioration de sa compétitivité-prix. Le degré de soutenabilité de son endettement externe est favorable, même si son adhésion récente à l’euro en 2009 la protège des tensions sur le change. La robustesse de son secteur bancaire ainsi que la qualité de la régulation de la dette publique et de l’inflation démontrent la forte capacité des politiques conjoncturelles. Au regard de ces caractéristiques favorable pour la Slovaquie, un aspect demeure cependant négatif. L’incapacité à réaliser des dépréciations monétaires, afin de sauvegarder son avantage concurrentiel de faible coût de la main d’œuvre, devrait la pousser à monter en gamme vis-à-vis de sa production pour se différencier non plus sur les prix mais sur le horsprix. Pourtant, la R&D y est faible avec 0.47% du PIB et principalement orientée sur l’industrie manufacturière et l’enseignement supérieur et public. La forte appréciation de l’euro vis-à-vis des autres monnaies internationales implique logiquement que l’ensemble des pays de la zone se déplace vers des productions à forte compétitivité hors-prix pour 258 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente continuer à exporter. Il s’agira pour la Slovaquie de faire de même pour espérer perpétuer cette dynamique favorable de rattrapage. La situation de la Slovénie repose sur une stratégie de spécialisations industrielles orientées à l’international, importante et dynamique (schéma 23). La poursuite de la dégradation du solde de la balance courante traduit un processus de rattrapage toujours en cours. La corrélation négative entre l’appréciation du taux de change et le solde déficitaire de la balance courante confirme encore l’importance de la compétitivité-prix pour ce pays. L’adhésion à l’euro en 2007 lui permet de stabiliser les tensions sur le change, même si les variables de régulation à court terme sont favorables (endettement et inflation contenus). La faible présence des banques étrangères, avec seulement 22% des actifs et 29% des crédits, est une marque de différenciation entre les pays de ce premier groupe. La domination de l’Autriche dans les stocks d’IDE, avec 14% du total, permet à la Slovénie d’avoir des soutiens lors des tensions financières internationales. La Slovénie se situe entre la République Tchèque et la Slovaquie, au regard de la qualité de ses fondamentaux. Elle n’a pas encore acquis de spécialisations hors compétitivité-prix ni commencé à renverser la tendance à la baisse du déficit de sa balance courante. Mais elle cherche malgré tout à monter en gamme avec une R&D forte (1.66% du PIB) à destination de l’industrie manufacturière. Concernant le groupe B, celui des pays intermédiaires, il comprend la Pologne et la Roumanie. Ces deux pays ont des caractéristiques communes dans de nombreux domaines, notamment dans le tissu industriel qui n’a pas encore achevé sa phase de transition, même si certains secteurs sont compétitifs à l’exportation (mécanique pour la Pologne et textile 259 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente pour la Roumanie). La grande taille de leur économie, de par leur dimension territoriale, a permis à ces pays d’être relativement épargnés par le choc commercial de 2008. La Pologne n’a pas subi de pressions inflationnistes ; quant à la Roumanie, elle a su maitriser son inflation pour passer à des taux plus acceptables (de 59.1% en 1998 à 5.6% en 2009). Ces pays n’ont par ailleurs pas subi de krach dans le secteur immobilier. Il existe tout de même des divergences entre ces deux économies. Les déficits courants sont importants en Pologne et acceptables en Roumanie, traduisant un processus de rattrapage beaucoup plus avancé pour le premier. Cependant, même sans ancrage du taux de change (seulement administré pour la Roumanie), l’endettement en devises à court terme est problématique au regard des réserves actuelles pour les deux pays (la Roumanie a déjà bénéficié d’aides internationales afin d’augmenter ses réserves de change lors de la crise des Subprimes). La Pologne est moins risquée que la Roumanie avec un niveau de développement plus élevé et la non intervention des instances internationales lors de la crise des Subprimes. La taille de ces économies leur a permis une plus large indépendance face aux turbulences du reste du monde. Apres description des schémas 24 et 25, les faiblesses de ces pays se trouvent beaucoup plus dans la viabilité du processus de rattrapage économique de moyen, voire long terme, que dans leur capacité à réguler à court terme les pressions du reste du monde. Leur taille, favorable lors des tensions financières internationales, devient source de difficultés pour engendrer une réelle dynamique de rattrapage avec des problèmes de diffusion à l’ensemble de l’économie. La Pologne avait les plus grandes difficultés économiques parmi les PECO au tout début de la transition (fort endettement extérieur, vétusté des équipements, déficits publics récurrents…), d’où une « thérapie de choc ». Elle possédait toutefois des ressources naturelles importantes dans l’agriculture et les ressources minières (charbon, cuivre, souffre, 260 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente argent, zinc, plomb…) ainsi qu’un début d’ouverture aux capitaux étrangers. Aujourd’hui, ce pays a su se spécialiser dans des secteurs à l’international (schéma 24). Mais sans taux d’ouverture excessif ni forte domination industrielle, même si celle-ci reste dynamique, il n’y a pas véritablement d’intégration significative au reste du monde. L’appréciation du taux de change négativement corrélée au solde de la balance courante témoigne d’un positionnement compétitif au niveau du prix. Pourtant, il n’y a pas d’efforts en R&D pour tenter de surpasser ce positionnement, avec seulement 0.61% du PIB. Il reste cependant le libre flottement de la monnaie nationale par rapport à l’euro pour ajuster les chocs externes afin de rester compétitif. Aucun des pays de l’Europe occidentale n’a de position dominante vis-à-vis des stocks d’IDE, même si les banques étrangères sont fortement présentes (62% des actifs et 75% des crédits). Quant à la qualité de la régulation à court terme, le taux d’endettement y apparait de plus en plus fort avec 47% du PIB alors que l’inflation est maitrisée. La situation de la Pologne interroge sur l’évolution de son positionnement. Elle donne l’impression que le rattrapage économique s’est stoppé en cours de route sans pour autant justifier de la finalité du processus. Le secteur industriel n’y est pas dominant, la R&D insuffisante, la compétitivité-prix toujours déterminante… Alors que le déficit de la balance courante, sans tendance, indique l’arrêt partiel des importations de biens d’équipements pour restructurer le tissu économique. Au début de la transition, la Roumanie était fortement spécialisée dans l’agriculture et faiblement dans l’industrie. Pourtant, ces deux secteurs étaient en crise. La politique de désendettement vis-à-vis de l’étranger appliquée avant 1979 a induit un manque d’investissement dans l’économie et une paupérisation forte de la population, devenant la plus pauvre des PECO. Le processus de réforme qui a suivi, lors de la transition, n’a pas été réalisé avec efficacité (problème de crédibilité, d’application des réformes…). Malgré ce retard pris, la Roumanie bénéficie aujourd’hui d’une dynamique plutôt favorable avec des 261 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente spécialisations industrielles concentrées sur le textile mais de nombreux efforts sont encore à faire (schéma 25). La Roumanie possède de nombreuses similitudes avec la Pologne, principalement avec leur grande taille. Le taux d’ouverture y est faible, le secteur industriel non dominant, la R&D insuffisante, aucune domination dans les stocks d’IDE de pays d’Europe occidentale et une forte présence des banques étrangères (avec 64% des actifs et 89% des crédits). La corrélation négative de l’appréciation du taux de change avec le solde de la balance courante témoigne d’un positionnement en compétitivité-prix où la libre fluctuation du taux de change permet de la conforter. La capacité de régulation des tensions financières est à l’opposé de celle de la Pologne. L’endettement public est faible alors que l’inflation, même si le trend est baissier, témoigne d’effets spéculatifs notamment dans « Les loyers d’habitation réels » avec 71,8% d’augmentation des prix en 2007. La Roumanie peut rencontrer les mêmes difficultés présentes actuellement en Pologne, pays plus en avance dans le cadre de son rattrapage économique. Leur grande taille offre une relative indépendance avec le reste du monde. Mais elle pose des problèmes pour créer des effets de diffusion significatifs au reste de l’économie. La Roumanie est au tout début de son processus de convergence, laissant encore place à de nombreuses possibilités. L’adhésion plus tardive à l’Union européenne en 2007 renforce cette interprétation. Quant au groupe C, les pays les plus vulnérables, il s’agit de l’Estonie, la Lituanie, la Lettonie, la Bulgarie et de la Hongrie. Les pays Baltes ainsi que la Bulgarie sont dans des situations difficiles malgré des politiques publiques efficaces (schémas 26, 27, 28 et 29). La volonté d’adhérer à l’euro rapidement est l’élément justifiant les faiblesses de la régulation conjoncturelle de ces économies. Ils ont opté pour une stratégie de court terme afin d’intégrer la zone euro sans pour autant s’interroger sur la viabilité du processus de leur rattrapage économique à moyen et long terme (l’industrie est quasi-inexistante dans les 262 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente pays baltes et insuffisante en Bulgarie). Dans le cadre de la Hongrie (schéma 30), il s’agit plutôt d’un discrédit dans la régulation alors exercée auparavant, principalement dans le pilotage de l’endettement public. La dynamique de moyen, voire long terme, dans le cadre du processus de convergence apparait toujours viable mais nécessite des réajustements importants à court terme afin d’offrir de nouvelles marges de manœuvre pour tempérer les tensions financières internationales. Les secteurs de spécialisations à l’international de l’Estonie (schéma 26) ne sont pas fortement excédentaires, alors que le taux d’ouverture du pays est élevé. L’industrie n’est ni dominante, ni dynamique. La corrélation négative de l’appréciation du taux de change avec le déficit de la balance courante confirme qu’il n’y a pas eu de convergence de la compétitivité-prix vers celle hors-prix. Pourtant, l’Estonie a décidé d’ancrer sa monnaie à l’euro pour gagner en attractivité et en stabilité, ne lui permettant plus de dévaluation compétitive. L’adhésion officielle à l’euro début 2011 ne laisse plus de possibilité pour faire marche arrière. Les perspectives de montée en gamme sont difficilement envisageables, alors que la R&D est forte avec 1.29% du PIB mais non productive (à destination des services et de l’enseignement supérieur). Même si l’Estonie a un endettement public faible, il est réalisé majoritairement à échéances courte, traduisant les difficultés de pérenniser les financements. Quant à l’inflation, son niveau est élevé et principalement spéculatif. L’Estonie a une configuration de son développement qui pose problème tant à court terme, dans sa capacité de réguler les tensions internationales, qu’à moyen terme, dans la viabilité de son processus de rattrapage économique. Pourtant, la dégradation continue de sa balance courante confirme l’allocation de capitaux toujours de plus en plus importants mais dont l’utilisation n’apparait pas optimale. L’adhésion récente à l’euro lui permet de mettre fin aux pressions sur son taux de change. Pourtant, il n’est pas sûr que le nouveau contexte macroéconomique et macro-financier induit par la zone monétaire lui offre l’opportunité de poursuivre sereinement sa convergence économique. La forte appréciation de l’euro face 263 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente aux monnaies des pays émergents, principaux concurrents des PECO au regard des stratégies de spécialisations sectorielles choisies, laisse peu de place pour ce pays toujours dans une disposition de compétitivité-prix. Comme l’Estonie, la Lituanie a des spécialisations à l’international faiblement excédentaires malgré des taux d’ouverture importants (schéma 27). La corrélation négative de l’appréciation du taux de change avec le solde de la balance courante, doublée d’une tendance déficitaire qui se renforce et témoigne d’un processus de convergence toujours en cours, indique que le pays est toujours dépendant de sa compétitivité-prix. L’industrie est faible et non dominante. Il n’y a pas de pays d’Europe occidentale prépondérant dans les stocks d’IDE même si la présence des banques étrangères est forte avec 79% des actifs et 94% des crédits du pays. La faiblesse de la R&D avec seulement 0.8% du PIB et l’ancrage du taux de change à l’euro mettant fin aux dévaluations compétitives, ne fait pas apparaitre d’alternative pour permettre un repositionnement au sein du commerce international. La Lituanie n’a pas de stratégie de rattrapage économique à moyen terme viable. Elle a des marges de manœuvre à court terme larges pour faire face aux tensions internationales, contrairement à l’Estonie. Son endettement public est faible avec des échéances de moyen terme, traduisant une plus grande confiance des investisseurs au niveau des prêts qui lui sont accordés. L’inflation est restée contenue au moins jusqu’en 2008, lors de la crise des Subprimes. Ces caractéristiques la placent au-dessus des deux autres pays baltes dans la qualité de ses fondamentaux, mais seulement à court terme puisque aucun d’entre eux ne raisonne à moyen terme pour le moment. 264 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente La Lettonie n’a pas de spécialisations internationales fortement excédentaires (schéma 28), comme le confirme la faiblesse de son industrie tant en taille qu’en dynamisme. La corrélation négative de l’appréciation de son taux de change avec le solde déficitaire de la balance courante confirme un positionnement encore centré sur la compétitivité-prix alors que ce pays s’est privé de tout repositionnement commercial. Son taux de change fixe à l’euro ne lui permet plus de dévaluations compétitives. La faiblesse de sa R&D avec 0.61% du PIB ne fait pas espérer de montée en gamme dans ses spécialisations sectorielles. Quant à l’inflation, avec 15.3% d’augmentation des prix en 2007, avant même la crise des Subprimes de 2008, est synonyme de perte de compétitivité à l’exportation dans le cadre d’un ancrage fixe. La description des caractéristiques de ce pays ont mis en doute la soutenabilité tant de son processus de développement à moyen terme que de la capacité à encaisser les pressions financières internationales à court terme. Même avec un endettement public contenu (20% du PIB), les échéances de son endettement se sont raccourcies pour s’orienter dangereusement vers du court terme (moins d’un an). Les investissements spéculatifs en IDE, capitaux normalement stables et productifs, sont orientés principalement vers les activités immobilières avec 24% des stocks, source de pressions inflationnistes dans l’ensemble des secteurs. Contrairement à l’Estonie, la Lettonie n’a pas de soutien fort d’un pays d’Europe occidentale, puisque aucun n’est prépondérant au niveau des stocks d’IDE. La Bulgarie n’a pas encore de spécialisations internationales fortement excédentaires (schéma 29), mais possède une industrie dynamique, contrairement aux pays baltes. Le retard pris dans la mutation industrielle, au début de la période de transition explique cet état des faits, même si quelques secteurs sont de plus en plus compétitifs à l’exportation (notamment le textile et le non-ferreux). Son positionnement commercial est indéniablement basé sur la compétitivité-prix bien que le pays ait choisi d’ancrer sa monnaie à l’euro. La R&D y est faible avec 0.49% de son PIB et non productive (principalement 265 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente tournée vers les services et le public). Il n’est pas envisagé pour le moment une montée en gamme de sa production au regard de ces faits. La balance courante déficitaire se renforce, traduisant la poursuite de son rattrapage économique, en parallèle à une forte présence de pays européens dans les stocks d’IDE (19% de l’Autriche et 16% des Pays-Bas) et dans le secteur bancaire (96% des actifs et 98% des crédits du pays). La Bulgarie se démarque des pays baltes par l’existence d’une petite dynamique industrielle, faisant espérer une amplification de la viabilité de son processus de rattrapage économique. Cependant, la qualité de sa régulation à court terme est trop vulnérable. Même avec un endettement public faible de l’ordre de 14% du PIB, l’inflation y est forte (12% en 2008) et d’origine spéculative (loyers d’habitation réels avec 10.4% d’augmentation des prix en 2009). Les investisseurs étrangers intègrent cet aspect puisque 18% des stocks d’IDE sont localisés dans les activités immobilières et 9% dans la construction, secteurs non productifs. La dégradation des ratios du secteur bancaire le confirme (tiers one passant de 17.91% en 2005 à 13.48% en 2008 et prêts non performants de 2.54% en 2007 à 5.96% en 2009). Lors de la chute du mur de Berlin, en 1989, la Hongrie était en avance puisqu’elle s’était déjà ouverte aux IDE (notamment avec General Electric, Suzuki et General Motors), en parallèle à un processus de réformes déjà en cours. La Hongrie s’est spécialisée à l’international sur des secteurs industriels fortement excédentaires et dominants dans son économie (schéma 30). Les caractéristiques de son positionnement sont favorables puisqu’il converge d’un avantage compétitif-prix vers celui hors-prix (corrélation positive de l’appréciation du taux de change et du solde de la balance courante pour les biens). La balance courante pour les biens est sans tendance, témoignant d’une compensation partielle de ses importations de biens d’équipements par les excédents de ses exportations. La R&D est moyenne avec 1% du PIB à destination de l’industrie manufacturière, donc productive. L’Allemagne est prépondérante dans les stocks d’IDE, source de dépendance mais aussi de soutien lors des tensions internationales. 266 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Au regard de ces caractéristiques, la Hongrie a un rattrapage économique à moyen et long terme enviable, posant la question de son intégration à ce groupe décrit comme vulnérable. Il s’agit surtout pour ce pays de son incapacité à réguler à court terme les tensions externes posant la question de sa capacité à viabiliser sa dynamique économique. La robustesse bancaire informe d’une dégradation inquiétante de ses ratios (tiers one à 11.65% en 2004 puis à 5.94% en 2007). L’endettement public devient inquiétant avec 73% du PIB et des échéances majoritairement à court terme, bien avant la crise de 2008 (42% en 2003 sur du 1 à 5 ans). Ces données traduisent une perte de confiance à long terme des investisseurs dans la capacité du pays à renverser la situation. L’analyse de la qualité des fondamentaux des PECO, pour résister aux tensions financières internationales qu’ils ne peuvent éviter, a permis de faire émerger des convergences et des divergences entre les pays. Afin de mettre en œuvre une dynamique de rattrapage viable, condition pour être de nouveau et rapidement attractif lors de la fin des turbulences, il leur faut aussi être capable d’intervenir lors des perturbations issues du reste du monde pour les réguler et amoindrir leurs effets. Pourtant, seules la République Tchèque, la Slovénie et la Slovaquie sont aujourd’hui en mesure de réaliser ces deux exigences dans la qualité de leur positionnement à court et moyen terme. D’autres ont les moyens d’intervenir à court terme mais la viabilité à moyen terme de la dynamique de rattrapage se pose, notamment dans la capacité de diffusion au reste de l’économie comme en Pologne et en Roumanie. Quant aux autres pays, ceux-ci ne semblent pas capables de réguler les tensions financières internationales à court terme. Se pose alors la question de la viabilité de leur rattrapage économique lorsqu’il a été favorablement amorcée comme en Hongrie, faiblement en Bulgarie, voire pas du tout pour les pays Baltes. Maintenant que ces divergences ont pu être décrites, il convient de les confronter au degré de rebond de chacun lors de l’après crise, pour en faire ressortir les éléments les plus probants. 267 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Schéma 21. Descriptif des vulnérabilités propres à la République Tchèque Qualité du positionnement international : Aspect commercial Taux d'ouverture commerciale: Indicateur de compétitivité-prix: Solde courant: Secteursspécialisationsinternationales: fortementexcédentairesavec des taux d’ouvertureélevés. Corrélation taux de change solde de la balance courante totale : non. Corrélation taux de change solde balancecourantebiens: positive. Balancecourantetotale : sans tendance.Balancecourantedes biens: tendanceà la hausse. Aspect monétaire et financier Choix du régime de change: Flottementadministré. Degré de soutenabilitéde Ratioréserves/endettementCT : ; Augmentationdes réserves. l’endettement extérieur de Ct : Degré de soutenabilitéde Ratio endettement/PIB: 42,7% PIB (2007). l’endettement extérieur de Mt et Lt : Structure interne : Robustesse Economique Poids industrie dans PIB : Efforts de R&D : Stocks d'IDE/PIB : Secteurindustrieldominant(41% CA). Industriedynamique. R&Dtotale forte (1.47% du PIB).R&D principalementindustriemanufacturièreet entreprises. Stock IDE pays : Pays-Bas (17%). Secteurs productifs : Fabrication (38%) ; Total automobiles et autre matérielde transport (10%) ; Commerce, réparations(10%). Robustesse Bancaire Présence banques étrangères: Tiers one : Prêts non performants : Forteprésence (92% des actifs et 93% des crédits). Ratiotiersone total avant crise (2005) : 15,15%. Ratio tiersone total après crise (2008) : 11,37% Donnéesnon disponibles. Qualité de la régulation : Pilotage de la dette publique Endettement public : Instabilité du solde budgétaire: Endettement total : favorable (30% PIB). Endettement CT (41% 2002 et 7.6% 2008) pour progresser MTet LT. Endettement total : tendance à la hausse. Solde primaire : faible tendance hausse et non pro-cyclique (impactstructurel). Pilotage de l'inflation Taux d'inflation: Instabilité de l'inflation : Inflation totale : faible. Secteurs : Electricité, gaz et autres combustibles (14,2%) ; Logement, eau, électricité,gaz et autres combustibles(9,9%) ; Loyersd'habitationréels(16,6%). Inflation totale : Pas de tendance. Secteurs spéculatifs : Tendance à la baisse (Loyers d'habitation réels). Source : Bnpparibas, Natixis, Eurostat, Banque Mondiale, FMI, JEDH, Bankscope et OFCE. 268 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Schéma 22. Descriptif des vulnérabilités propres à la Slovaquie Qualité du positionnement international : Aspect commercial Taux d'ouverture commerciale : Indicateur de compétitivité-prix: Solde courant : Secteurs spécialisations internationales : fortement excédentaires avec des taux d’ouvertureforts. Corrélation taux de change solde de la balance courante totale : négative. Corrélation taux de change solde balance courante biens : positive. Balance courante totale : tendance à la baisse. Balance courante des biens : sans tendance. Aspect monétaire et financier Choix du régime de change : Adhésion à l’euro. Degré de soutenabilité de Ratio réserves/endettement CT : ; Augmentation des réserves. l’endettement extérieur de Ct : Degré de soutenabilité de Ratio endettement/PIB: 48,9% (2007). l’endettement extérieur de Mt et Lt : Structure interne : Robustesse Economique Poids industrie dans PIB : Efforts de R&D : Stocks d'IDE/PIB : Secteur industriel dominant (48% CA). Industrie dynamique. R&D faible (0.47% du PIB). R&D industrie manufacturière et quasi-égale entre entreprises, enseignement supérieur et publique. Stocks IDE pays : Pays-Bas (10%). Secteurs productifs : Fabrication (36%) ; Electricité, gaz et eau (13%) ; Commerce, réparations (11%). Robustesse Bancaire Présence banques étrangères : Tiers one : Prêts non performants : Forte présence (73% des actifs et 91% des crédits). Données non disponibles. Ratio prêts non performants avant crise (2007) : 3,02%. Ratio prêts non performants après crise (2009) : Données non disponibles. Qualité de la régulation : Pilotage de la dette publique Endettement public : Instabilité du solde budgétaire: Endettement total : favorable (28% PIB). Endettement MT (39%). Endettement total : tendance à la baisse. Solde primaire : faible tendance hausse et non pro-cyclique (impact structurel). Pilotage de l'inflation Taux d'inflation : Instabilité de l'inflation : Inflationtotale : faible. Secteurs : aucun Inflation totale : Tendance à la baisse. Secteurs spéculatifs : Tendance à la baisse (Logement, eau, électricité, gaz et autres combustibles, Loyers d'habitation réels). Source : Bnpparibas, Natixis, Eurostat, Banque Mondiale, FMI, JEDH, Bankscope et OFCE. 269 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Schéma 23. Descriptif des vulnérabilités propres à la Slovénie Qualité du positionnement international : Aspect commercial Taux d'ouverture commerciale : Indicateur de compétitivité-prix : Solde courant: Secteurs spécialisations internationales : fortement excédentaires avec des taux d’ouverture forts. Corrélation taux de change solde de la balance courante totale : négative. Corrélation taux de change solde balance courante biens : négative. Balance courante totale : tendance à la baisse. Balance courante des biens : tendance à la baisse. Aspect monétaire et financier Choix du régime de change : Adhésion à l’euro. Degré de soutenabilité de Adhésion zone euro en 2007. l’endettement extérieur de Ct : Degré de soutenabilité de Adhésion zone euro en 2007. l’endettement extérieur de Mt et Lt : Structure interne : Robustesse Economique Poids industrie dans PIB : Efforts de R&D : Stocks d'IDE/PIB : Secteur industriel dominant (40% CA). Industrie dynamique. R&D forte (1.66% du PIB). R&D industrie manufacturière et entreprises. Stocks IDE pays : Autriche (14%). Secteurs productifs : Fabrication (37%) ; Commerce, réparations (21%) ; Fabrication de produits chimiques (14%). Robustesse Bancaire Présence banques étrangères : Tiers one : Prêts non performants : Présence faible (22% des actifs et 29% des crédits). Ratio tiers one total avant crise (2004) : 14,05%. Ratio tiers one total après crise (2007) : 8,95%. Ratio prêts non performants avant crise (2007) : 4,32%. Ratio prêts non performants après crise (2009) : 7,13%. Qualité de la régulation : Pilotage de la dette publique Endettement public : Instabilité du solde budgétaire: Endettement total : favorable (23% PIB). Endettement MT (à 50%). Endettement total : pas de tendance. Solde primaire : faible tendance hausse et pro-cyclique (impact conjoncturel). Pilotage de l'inflation Taux d'inflation : Instabilité de l'inflation : Inflation totale : faible. Secteurs : aucun. Inflation totale : Tendance à la baisse. Secteurs spéculatifs : Tendance à la baisse Loyers d'habitation réels). Source : Bnpparibas, Natixis, Eurostat, Banque Mondiale, FMI, JEDH, Bankscope et OFCE. 270 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Schéma 24. Descriptif des vulnérabilités propres à la Pologne Qualité du positionnement international : Aspect commercial Taux d'ouverture commerciale : Indicateur de compétitivité-prix : Solde courant : Secteurs spécialisations internationales : fortement excédentaires avec des taux d’ouverture faibles. Corrélation taux de change solde de la balance courante totale : négative. Corrélation taux de change solde balance courante biens : négative. Balance courante totale : sans tendance. Balance courante des biens : sans tendance. Aspect monétaire et financier Choix du régime de change : Degré de soutenabilité de l’endettement extérieur de Ct : Degré de soutenabilité de l’endettement extérieur de Mt et Lt : Libre flottement. Ratio réserves/endettement CT : Forte augmentation (35% 2000 et 104% 2008). Les réserves de devises ont augmenté en parallèle. Ratio endettement/PIB: 40,2% (2007). Structure interne : Robustesse Economique Poids industrie dans PIB : Efforts de R&D : Stocks d'IDE/PIB : Secteur industriel non dominant (38% CA). Industrie dynamique. R&D faible (0.61% du PIB). R&D quasi-égale entre industrie manufacturière, services et enseignement supérieur, publique, entreprises. Stocks IDE pays : aucun. Secteurs productifs : Fabrication (35%) ; Commerce, réparations (19%). Robustesse Bancaire Présence banques étrangères : Tiers one : Prêts non performants : Forte présence (62% des actifs et 75% des crédits). Ratio tiers one total avant crise (2004) : 25,03%. Ratio tiers one total après crise (2008) : 12,25% Ratio prêts non performants avant crise (2007) : 3,88%. Ratio prêts non performants après crise (2009) : 4,2% Qualité de la régulation : Pilotage de la dette publique Endettement public : Instabilité du solde budgétaire: Endettement total : intermédiaire (47% PIB). Endettement MT (41%). Endettement total : tendance à la hausse. Solde primaire : faible tendance baisse et non pro-cyclique (impact structurel) Pilotage de l'inflation Taux d'inflation : Instabilité de l'inflation : Inflation totale : faible. Secteurs : aucun. Inflation totale : Pas de tendance. Secteurs spéculatifs : Tendance à la baisse (Loyers d'habitation réels). Source : Bnpparibas, Natixis, Eurostat, Banque Mondiale, FMI, JEDH, Bankscope et OFCE. 271 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Schéma 25. Descriptif des vulnérabilités propres à la Roumanie Qualité du positionnement international : Aspect commercial Taux d'ouverture commerciale : Indicateur de compétitivité-prix : Solde courant : Secteurs spécialisations internationales : pas fortement excédentaires avec des taux d’ouverture faibles. Corrélation taux de change solde de la balance courante totale : négative. Corrélation taux de change solde balance courante biens : négative. Balance courante totale : tendance à la baisse. Balance courante des biens : tendance à la baisse. Aspect monétaire et financier Choix du régime de change : Degré de soutenabilité de l’endettement extérieur de Ct : Degré de soutenabilité de l’endettement extérieur de Mt et Lt : Flottement administré. Ratio réserves/endettement CT : Forte augmentation (18% 2002 et 78% 2008). Les réserves de devises ont augmenté en parallèle. Ratio endettement/PIB: 42,2%. Structure interne : Robustesse Economique Poids industrie dans PIB : Efforts de R&D : Stocks d'IDE/PIB : Secteur industriel non dominant (31% CA). Industrie dynamique autant que les 2 autres secteurs. R&D totale faible (0.59% du PIB). R&D industrie manufacturière et entreprises. Stocks IDE pays : aucun. Secteurs productifs : Fabrication (32%) ; Commerce, réparations (13%). Robustesse Bancaire Présence banques étrangères : Tiers one : Prêts non performants : Forte présence (64% des actifs et 89% des crédits). Ratio tiers one total avant crise (2004) : 25,65%. Ratio tiers one total après crise (2007) : 11,77% Ratio prêts non performants avant crise (2007) : 2,59%. Ratio prêts non performants après crise (2009) : Données non disponibles. Qualité de la régulation : Pilotage de la dette publique Endettement public : Instabilité du solde budgétaire: Endettement total : favorable (14% PIB). Endettement CT MT LT. Endettement total : tendance à la baisse. Solde primaire : faible tendance baisse et pro-cyclique (impact conjoncturel). Pilotage de l'inflation Taux d'inflation : Instabilité de l'inflation : Inflation totale : faible. Secteurs : Boissons alcoolisées, tabac et narcotiques (21,2%) ; Loyers d'habitation réels (71,8%). Inflation totale : Tendance à la baisse. Secteurs spéculatifs : Tendance à la baisse (Logement, eau, électricité, gaz et autres combustibles, Loyers d'habitation réels). Source : Bnpparibas, Natixis, Eurostat, Banque Mondiale, FMI, JEDH, Bankscope et OFCE. 272 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Schéma 26. Descriptif des vulnérabilités propres à l’Estonie Qualité du positionnement international : Aspect commercial Taux d'ouverture commerciale : Indicateur de compétitivité-prix : Solde courant : Secteurs spécialisations internationales : pas fortement excédentaires malgré des taux d’ouvertures importants. Corrélation taux de change solde de la balance courante totale : négative. Corrélation taux de change solde balance courante biens : négative. Balance courante totale : tendance à la baisse. Balance courante des biens : tendance à la baisse. Aspect monétaire et financier Choix du régime de change : Fixe (currency board avec intégration au MCE2). Degré de soutenabilité de Ratio réserves/endettement CT : Pas de données. Augmentation des réserves. l’endettement extérieur de Ct : Degré de soutenabilité de Ratio endettement/PIB: 116,7%. l’endettement extérieur de Mt et Lt : Structure interne : Robustesse Economique Poids industrie dans PIB : Efforts de R&D : Stocks d'IDE/PIB : Secteur industriel non dominant (23% CA). Industrie non dynamique. R&D forte (1.29% du PIB). R&D services et enseignement supérieur. Stocks IDE pays : Suède (28%) Finlande (16%). Secteurs productifs : Fabrication (29%) ; Commerce, réparation (27%). Secteurs spéculatifs : Activités immobilières (10%). Robustesse Bancaire Présence banques étrangères : Tiers one : Prêts non performants : Forte présence (69% des actifs et 97% des crédits). Ratio tiers one total avant crise (2004) : 12,84%. Ratio tiers one total après crise (2008) : 12,52% Ratio prêts non performants avant crise (2007) : 0,61%. Ratio prêts non performants après crise (2009) : 5% Qualité de la régulation : Pilotage de la dette publique Endettement public : Instabilité du solde budgétaire: Endettement total : favorable (5% PIB). Endettement CT (66% 2006 échéance 1 à 5 ans). Endettement total : pas de tendance (stable). Solde primaire : pas de tendance et pro-cyclique (impact conjoncturel). Pilotage de l'inflation Taux d'inflation : Instabilité de l'inflation : Inflation totale : forte (10.6% en 2008). Secteurs : Boissons alcoolisées, tabac et narcotiques (16,0%) ; Electricité, gaz et autres combustibles (25,5%) ; Energie (23,8%) ; Logement, eau, électricité, gaz et autres combustibles (16,6%) ; Loyers d'habitation réels (26,8%). Inflation totale : Pas de tendance. Secteurs spéculatifs : pas de tendance. Source : Bnpparibas, Natixis, Eurostat, Banque Mondiale, FMI, JEDH, Bankscope et OFCE. 273 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Schéma 27. Descriptif des vulnérabilités propres à la Lituanie Qualité du positionnement international : Aspect commercial Taux d'ouverture commerciale : Indicateur de compétitivité-prix : Solde courant : Secteurs spécialisations internationales : pas fortement excédentaires malgré des taux d’ouvertures importants. Corrélation taux de change solde de la balance courante totale : négative. Corrélation taux de change solde balance courante biens : négative. Balance courante totale : tendance à la baisse. Balance courante des biens : tendance à la baisse. Aspect monétaire et financier Choix du régime de change : Degré de soutenabilité de l’endettement extérieur de Ct : Degré de soutenabilité de l’endettement extérieur de Mt et Lt : Fixe (currency board avec intégration au MCE2). Ratio réserves/endettement CT : Forte augmentation (82% 2001 et 127% 2008). Les réserves de devises ont augmenté en parallèle. Ratio endettement/PIB: 70,9%. Structure interne : Robustesse Economique Poids industrie dans PIB : Efforts de R&D : Stocks d'IDE/PIB : Secteur industriel non dominant. Industrie non dynamique. R&D faible (0.8% du PIB). R&D industrie manufacturière et enseignement supérieur. Stocks IDE pays : aucun. Secteurs productifs : Fabrication (36%) ; Produits pétroliers raffinés et autres traitements (16%) ; Commerce, réparations (11%). Robustesse Bancaire Présence banques étrangères : Tiers one : Prêts non performants : Forte présence (79% des actifs et 94% des crédits). Ratio tiers one total avant crise (2004) : 21%. Ratio tiers one total après crise (2007) : 7,35% Ratio prêts non performants avant crise (2007) : 0,82%. Ratio prêts non performants après crise (2009) : 7,76%. Qualité de la régulation : Pilotage de la dette publique Endettement public : Instabilité du solde budgétaire: Endettement total : favorable (16% PIB). Endettement MT (44%). Endettement total : tendance à la baisse. Solde primaire : faible tendance hausse et non pro-cyclique (impact structurel). Pilotage de l'inflation Taux d'inflation : Instabilité de l'inflation : Inflation totale : faible (sauf en 2008 avec 11.1%). Secteurs : Boissons alcoolisées, tabac et narcotiques (15,2%) ; Electricité, gaz et autres combustibles (20,2%) ; Logement, eau, électricité, gaz et autres combustibles (19,3%) ; Loyers d'habitation réels (36,3%) ; Produits alimentaires et boissons non alcoolisées (15,8%). Inflation totale : Tendance à la hausse. Secteurs spéculatifs : Tendance à la hausse (Logement, eau, électricité, gaz et autres combustibles, Loyers d'habitation réels). Source : Bnpparibas, Natixis, Eurostat, Banque Mondiale, FMI, JEDH, Bankscope et OFCE. 274 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Schéma 28. Descriptif des vulnérabilités propres à la Lettonie Qualité du positionnement international : Aspect commercial Secteurs spécialisations internationales : pas fortement excédentaires malgré des taux d’ouvertures importants. Corrélation taux de change solde de la balance courante totale : négative. Corrélation taux de change Indicateur de compétitivité-prix : solde balance courante biens : négative. Solde courant : Balance courante totale : tendance à la baisse. Balance courante des biens : tendance à la baisse. Taux d'ouverture commerciale : Aspect monétaire et financier Choix du régime de change : Degré de soutenabilité de l’endettement extérieur de Ct : Degré de soutenabilité de l’endettement extérieur de Mt et Lt : Fixe (peg sur l’euro avec intégration au MCE2). Ratio réserves/endettement CT : Fort taux (309% 2000 et 269% 2008). Les réserves de devises ont augmenté en parallèle. Ratio endettement/PIB: 123,4%. Structure interne : Robustesse Economique Poids industrie dans PIB : Efforts de R&D : Stocks d'IDE/PIB : Secteur industriel non dominant. Industrie non dynamique. R&D faible (0.61% du PIB). R&D services et enseignement supérieur. Stocks IDE pays : aucun. Secteurs productifs : Commerce, réparations (26%) ; Fabrication (20%). Secteur spéculatifs : Activités immobilières (24%). Robustesse Bancaire Présence banques étrangères : Tiers one : Prêts non performants : Forte présence (63% des actifs et 74% des crédits). Ratio tiers one total avant crise (2005) : 18,43%. Ratio tiers one total après crise (2008) : 10,07% Ratio prêts non performants avant crise (2007) : 0,67%. Ratio prêts non performants après crise (2009) : 11,5%. Qualité de la régulation : Pilotage de la dette publique Endettement public : Endettement total : favorable (20% PIB). Endettement MT vers CT (36.5% 2008 échéance moins d’un an). Endettement total : pas de tendance. Solde primaire : pas de tendance et pro-cyclique (impact Instabilité du solde budgétaire: conjoncturel). Pilotage de l'inflation Taux d'inflation : Instabilité de l'inflation : Inflation totale : forte (15.3% en 2007). Secteurs : Boissons alcoolisées, tabac et narcotiques (36,9%) ; Electricité, gaz et autres combustibles (35,7%) ; Energie (27,3%) ; Enseignement (21,1%) ; Hôtels, cafés et restaurants (17%) ; Logement, eau, électricité, gaz et autres combustibles (29,4%) ; Loyers d'habitation réels (24,7%) ; Produits alimentaires et boissons non alcoolisées (18,2%). Inflation totale : Tendance à la hausse. Secteurs spéculatifs : Tendance à la hausse (Logement, eau, électricité, gaz et autres combustibles, Loyers d'habitation réels). Source : Bnpparibas, Natixis, Eurostat, Banque Mondiale, FMI, JEDH, Bankscope et OFCE. 275 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Schéma 29. Descriptif des vulnérabilités propres à la Bulgarie Qualité du positionnement international : Aspect commercial Taux d'ouverture commerciale : Indicateur de compétitivité-prix : Solde courant : Secteurs spécialisations internationales : pas fortement excédentaires malgré des taux d’ouvertures importants. Corrélation taux de change solde de la balance courante totale : négative. Corrélation taux de change solde balance courante biens : négative. Balance courante totale : tendance à la baisse. Balance courante des biens : tendance à la hausse. Aspect monétaire et financier Choix du régime de change : Degré de soutenabilité de l’endettement extérieur de Ct : Degré de soutenabilité de l’endettement extérieur de Mt et Lt : Fixe (currency board lié à l’euro). Ratio réserves/endettement CT : Forte augmentation (33% 2001 et 103% 2008). Les réserves de devises ont augmenté en parallèle. Ratio endettement/PIB: 76%. Structure interne : Robustesse Economique Poids industrie dans PIB : Efforts de R&D : Stocks d'IDE/PIB : Secteur industriel non dominant (30% CA). Industrie dynamique. R&D totale faible (0.49% du PIB). R&D principalement dans services et publique. Stocks IDE pays : Autriche (19%) Pays-Bas (16%). Secteurs productifs : Commerce, réparation (18%) ; Fabrication (25%). Secteurs spéculatifs : Activités immobilières (18%) ; Construction (9%). Robustesse Bancaire Présence banques étrangères : Tiers one : Prêts non performants : Forte présence (96% des actifs et 98% des crédits). Ratio tiers one total avant crise (2005) : 17,91%. Ratio tiers one total après crise (2008) : 13,48% Ratio prêts non performants avant crise (2007) : 2,54%. Ratio prêts non performants après crise (2009) : 5,96% Qualité de la régulation : Pilotage de la dette publique Endettement public : Instabilité du solde budgétaire: Endettement total : favorable (14% PIB). Endettement MT (41.8%) et LT (30%). Endettement total : tendance baisse. Solde primaire : pas de tendance et pro-cyclique (impact conjoncturel). Pilotage de l'inflation Taux d'inflation : Instabilité de l'inflation : Inflation totale : forte (12% en 2008). Secteurs : Autres biens et services (11,8%) ; Boissons alcoolisées, tabac et narcotiques (17,9%) ; Enseignement (15,1%) ; Loyers d'habitation réels (10,4%). Inflation totale : Pas de tendance. Secteurs spéculatifs : pas de tendance. Source : Bnpparibas, Natixis, Eurostat, Banque Mondiale, FMI, JEDH, Bankscope et OFCE. 276 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Schéma 30. Descriptif des vulnérabilités propres à la Hongrie Qualité du positionnement international : Aspect commercial Taux d'ouverture commerciale : Indicateur de compétitivité-prix : Solde courant : Secteurs spécialisations internationales : pour certains fortement excédentaires et d’autres déficitaires avec des taux d’ouverture élevés. Corrélation taux de change solde de la balance courante totale : négative. Corrélation taux de change solde balance courante biens : positive. Balance courante totale : tendance à la baisse. Balance courante des biens : sans tendance. Aspect monétaire et financier Choix du régime de change : Libre flottement. Degré de soutenabilité de Ratio réserves/endettement CT : Pas de données. Augmentation des réserves. l’endettement extérieur de Ct : Degré de soutenabilité de Ratio endettement/PIB: 91%. l’endettement extérieur de Mt et Lt : Structure interne : Robustesse Economique Poids industrie dans PIB : Efforts de R&D : Stocks d'IDE/PIB : Secteur industriel dominant (moins de 40%). Industrie non dynamique. R&D totale moyenne (1% du PIB). R&D industrie manufacturière et entreprises. Stocks IDE pays : Allemagne (13%). Secteurs productifs : Fabrication (38%) ; Commerce, réparations (15%) ; Total automobiles et autre matériel de transport (11%). Robustesse Bancaire Présence banques étrangères : Tiers one : Prêts non performants : Présence moyenne (58% des actifs et 53% des crédits). Ratio tiers one total avant crise (2004) : 11,65%. Ratio tiers one total après crise (2007) : 5,94% Ratio prêts non performants avant crise (2007) : 0,43%. Ratio prêts non performants après crise (2009) : Données non disponibles. Qualité de la régulation : Pilotage de la dette publique Endettement public : Instabilité du solde budgétaire: Endettement total : défavorable (73% PIB). Endettement CT (42% 2003 échéance de 1 à 5 ans). Endettement total : tendance à la hausse. Solde primaire : faible tendance baisse et non pro-cyclique (impact structurel). Pilotage de l'inflation Taux d'inflation : Instabilité de l'inflation : Inflation totale : faible. Secteurs : Electricité, gaz et autres combustibles (23,3%) ; Energie (13,6%) ; Produits alimentaires et boissons non alcoolisées (12%) ; Hôtels, cafés et restaurants (17,5%). Inflation totale : Pas de tendance. Secteurs spéculatifs : Tendance à la baisse (Loyers d'habitation réels). Source : Bnpparibas, Natixis, Eurostat, Banque Mondiale, FMI, JEDH, Bankscope et OFCE. 277 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente 3. Turbulences financières de court terme : focus sur la politique budgétaire L’incapacité d’éviter la dégradation financière importée du reste du monde pousse à s’interroger sur la façon de réagir de ces territoires. L’alternative crédible est d’utiliser au mieux les politiques économiques à court terme afin d’en atténuer les effets négatifs. La principale fragilité réside dans le retrait des capitaux étrangers, lors de la contraction de la liquidité dans la zone euro, mettant sous pression l’ancrage des taux de change. La libéralisation des comptes de capitaux devient incompatible avec l’objectif de stabilisation monétaire. Le degré de rebond de ces pays, qu’il va convenir de définir, est alors fonction de leur capacité à réguler au mieux leur taux de change. La section précédente a mis en avant trois thématiques issues des variables significatives dans ce travail afin de déterminer la qualité des fondamentaux de chaque PECO. L’une d’elles, la qualité de la régulation à travers le pilotage de la dette publique et le pilotage de l’inflation, décrit l’efficacité des politiques monétaires et budgétaires. Le tableau 53 synthétise le positionnement de chacun des PECO. Il convient de centrer notre analyse sur ces deux aspects afin de déterminer comment et dans quel sens les PECO peuvent utiliser ces leviers pour atténuer au maximum les effets négatifs de court terme en provenance du reste du monde. Le degré d’efficience du pilotage de l’inflation se fait par la politique monétaire principalement. Alors que celle-ci sert aussi à réguler et stabiliser le taux de change. Quant au pilotage de la dette publique, il amène à une meilleure régulation de l’activité économique par des politiques contra-cycliques. Mais il permet aussi d’augmenter les réserves de devises par la contraction d’endettements internationaux. Tableau 53. Thématique 3 : qualité de la régulation au sein des PECO Agrégats : Positionnement favorable Pilotage de l’inflation Hongrie, Pologne, Slovénie et Slovaquie. Endettement public République Tchèque, Lituanie, Slovaquie, Slovénie et Pologne. Positionnement défavorable République Tchèque, Lituanie et Roumanie. Mais surtout Bulgarie, Estonie et Lettonie. Roumanie, Estonie, Lettonie et Hongrie. La décomposition de la thématique sur la qualité de la régulation à court terme décrit des divergences entre les PECO. La maitrise de l’inflation apparait favorable à la Hongrie, la 278 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Pologne, la Slovénie et à la Slovaquie. Alors que la régulation de l’endettement public est plus efficace pour la République Tchèque, la Lituanie, la Slovaquie, la Slovénie et la Pologne. Il n’y a que pour la Slovénie et la Slovaquie que ces deux dimensions sont convenables. Il convient maintenant de s’interroger sur l’aptitude des politiques correspondantes, monétaires et budgétaires, à atténuer les tensions financières internationales. L’outil d’abord privilégié est la politique monétaire. La variation du taux directeur de la Banque Centrale doit permettre d’attirer les capitaux étrangers avec l’augmentation de la rémunération des placements effectués. Le triangle d’incompatibilité de Mundell-Fleming (Fleming, 1962) (Mundell, 1963) confirme son importance dans le cadre de l’ancrage du taux de change. Il postule qu’une économie dans un contexte international a l’obligation de sacrifier l’un des trois objectifs que sont un taux de change fixe, la libre circulation des capitaux et l’autonomie de la politique monétaire. Dans le contexte actuel des PECO, où la libéraliser des flux de capitaux a été imposée lors de l’adhésion à l’Union européenne et l’ancrage du taux de change fortement conseillé pour rendre attractif le territoire, l’abandon de l’autonomie de la politique monétaire est légitimement choisi. L’objectif est de faire varier les taux directeurs de la Banque Centrale afin d’influencer l’attractivité du pays pour maintenir l’équilibre externe de l’économie. L’aspect théorique ainsi décrit, il convient de regarder si cet outil conjoncturel est efficace au sein des PECO. La démarche consiste à analyser l’impact du taux directeur dans chaque PECO vis-à-vis de l’attractivité effective du pays par rapport aux capitaux étrangers. L’étude est menée sur le total des capitaux mais aussi, en structure, sur les capitaux à court, moyen et long terme pour tenter d’éviter les biais induit par l’agrégation des données. Ce choix apparait légitime puisque les tests économétriques du chapitre précédent ont conforté ce découpage. La sélection des données repose uniquement sur les taux d’intérêt du marché financier à 3 mois (tableau 54). Afin de compléter l’analyse mais aussi de consolider la problématique, la réactivité des capitaux étrangers au sein des PECO est aussi testée par rapport aux taux directeurs de la BCE (tableau 55). L’influence peut-être trop forte de la zone euro vis-à-vis des PECO, à l’origine de la structure internationale de l’endettement, fait supposer des interactions importantes entre les deux territoires. Les résultats interpellent puisqu’ils sont uniformes pour tous les pays, confortant ainsi la problématique. 279 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Tableau 54. Influence de la politique monétaire des PECO dans les flux de capitaux Coefficient de corrélation : I(t) total I(t) Ct I(t) Pf (Taux directeur Banque Centrale/flux capitaux étrangers) Bulgarie Données non disponibles République Tchèque -0,04 -0,18 0,08 Estonie Données non disponibles Hongrie Données non disponibles Lituanie -0,28 -0,37 0,10 Lettonie -0,17 -0,17 0,02 Pologne -0,16 -0,25 0,10 Roumanie -0,81 -0,78 0,12 Slovénie -0,47 -0,81 0,58 Slovaquie -0,26 -0,31 -0,02 Source : Eurostat et calculs auteur (1995 2010 - taux d’intérêt à 3 mois) I(t) IDE 0,05 0,05 -0,10 0,00 -0,75 0,26 0,05 L’efficience de la politique monétaire vis-à-vis de l’attractivité des capitaux nécessaires à stabiliser l’équilibre externe, mis à part pour les flux de capitaux de portefeuille, est nulle. Bien au contraire, toute augmentation des taux directeurs dans ces pays émergents fait majoritairement fuir les capitaux à court terme, mais aussi les capitaux représentatifs d’investissement direct à l’étranger, ainsi que le total général de ces capitaux. La nature des fondamentaux de chaque pays n’apparait pas déterminante, alors même que nous avions pu précédemment définir des groupes reflétant la qualité de leur positionnement (République Tchèque, Slovaquie et Slovénie pour le groupe A ; Pologne et Roumanie pour le groupe B ; Estonie, Lituanie, Lettonie, Bulgarie et Hongrie pour le groupe C). Les résultats plus spécifiques aux PECO dans leur capacité à contrôler l’inflation, pourtant divergents entre pays, n’apportent pas non plus de solutions. Il y a un aspect intéressant à mettre en avant. Les flux de capitaux réagissent en sens contraire de l’effet voulu. Normalement, l’augmentation des taux directeurs doit permettre d’attirer les capitaux en offrant une meilleure rémunération. Pourtant, nous constatons le contraire. La politique monétaire n’apparait pas efficace dans sa capacité à réguler l’ancrage du taux de change dans le contexte de libéralisation des capitaux au sein des PECO. Cette situation est inquiétante puisque pour ces pays, non seulement ne peuvent éviter le choc du reste du monde, mais sont en outre incapables de réagir avec cet outil. 280 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Tableau 55. Influence de la politique monétaire de la zone euro dans les flux de capitaux Coefficient de corrélation I(t) total I(t) Ct I(t) Pf taux directeur Banque Centrale et flux de capitaux étrangers : Bulgarie 0,23 0,20 0,06 République Tchèque 0,21 0,11 0,13 Estonie 0,01 0 0,13 Hongrie -0,17 -0,06 -0,12 Lituanie 0,16 0,11 -0,05 Lettonie 0,13 0,11 -0,13 Pologne 0,36 0,44 -0,23 Roumanie 0,15 0,18 0,22 Slovénie 0,16 0,15 -0,07 Slovaquie 0,03 -0,09 0,10 Source : Eurostat et calculs auteur (1995 2010 – taux d’intérêt à 3 mois) I(t) IDE 0,19 0,14 -0,20 -0,03 0,27 0,31 0,29 0,02 -0,03 0,13 Les analyses de corrélations entre le taux directeur de la BCE et les flux de capitaux des PECO, mis à part les flux de portefeuille, apparaissent beaucoup plus pertinentes. Il y apparait une attractivité par rapport aux capitaux étrangers qui est fonction de la politique monétaire de la zone euro. Le caractère spécifique de ces économies, à travers une intégration poussée à l’Union européenne, peut justifier ce résultat. Le chapitre précédent a confirmé l’importance de cette dépendance à la zone euro à travers les tests économétriques (notamment vis-à-vis de l’endettement à court terme). Mais il n’est pas sûr que l’influence de la BCE soit prise en compte quant à son impact sur les PECO. Celle-ci se doit déjà de réguler les fortes divergences des membres qui la composent. Pourtant, mis à part le cas de la Hongrie, la corrélation est positive pour tous les PECO. Les caractéristiques de ces pays, au regard de leurs fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers ainsi que de la qualité de régulation de l’inflation, ne sont nullement des éléments déterminants. Les résultats présentés mettent en avant l’inefficacité de la politique monétaire afin de réguler à court terme les tensions financières internationales, à l’origine de la fuite généralisée des capitaux étrangers. Précédemment, la description analytique des PECO a fait émerger trois principaux groupes de pays (groupes A, B et C), avec des positionnements de court et moyen terme différents. Mais même au regard de ces divergences, aucun n’est en mesure de bénéficier d’un retour favorable de l’utilisation de sa politique monétaire. 281 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente L’amplification du risque de rupture se généralise à l’ensemble de la région. La fuite des capitaux étrangers, parallèlement au déficit récurrent de la balance courante, fait supposer légitimement l’incapacité à maintenir l’ancrage à terme sans retour rapide des capitaux étrangers. Les graphiques 60 confirment cet état des faits, avec un risque-pays qui s’est renforcé dans l’ensemble des PECO dès fin 2008. Graphiques 60. Un risque-pays trop élevé rend la politique monétaire inefficace Etape 2 Etape 2 Etape 1 Etape 1 55 La crise des Subprimes a pu mettre en avant cette situation de vulnérabilité. L’Estonie, la Hongrie et la Roumanie ont fait appel à l’aide internationale pour obtenir des crédits nécessaires à la reconstitution de leurs stocks de devises pour stabiliser leur taux de change. L’incapacité de retenir des capitaux pour ces pays pose la question de la régulation de la politique monétaire dans des situations de tensions. Les Banques Centrales augmentent les taux de manière considérable, étouffant la dynamique économique interne par la même occasion, le coût de l’endettement augmentant d’autant plus pour les acteurs locaux. Entre les investisseurs internationaux qui ont des besoins de liquidité pour satisfaire des contraintes de refinancement et ceux qui voient le risque-pays de ces territoires augmenter dangereusement, il n’est pas sûr qu’une politique monétaire conjoncturelle soit appropriée. Les interprétations mises en évidence apparaissent légitime. La fuite des capitaux n’est pas la conséquence d’une dégradation de la rentabilité au sein des PECO, comme la problématique le postule depuis le début. Une augmentation des taux directeurs, offrant de meilleures rémunérations dans les placements effectués, n’est pas la réponse à apporter. 282 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Dans ces conditions, l’outil de substitution à court terme est la politique budgétaire. La possibilité pour un gouvernement de s’endetter en devises internationales afin d’augmenter ses réserves pour assurer l’ancrage du taux de change est alors décisive. La facilité à obtenir des liquidités dans des moments de fortes pressions internationales viabilise un peu plus l’ancrage du taux de change. Tout d’abord, l’augmentation quantitative du montant des devises permet la reconstitution des stocks. Mais aussi par l’aspect qualitatif où des agents économiques acceptent encore de prêter des capitaux à ces pays, notamment aux instances publiques, laissant entendre que le marché a toujours confiance dans ces territoires. La politique budgétaire, même si elle permet d’augmenter les réserves de devises, a d’abord pour principale objectif le soutien de l’activité économique, lorsqu’elle est utilisée comme un outil de régulation conjoncturelle. Ainsi, la capacité à atténuer les tensions financières internationales, à travers les déficits publics, dépend tant des politiques budgétaires discrétionnaires que des politiques budgétaires automatiques. Les deux styles de politiques sont étroitement liés. Les stabilisateurs automatiques peuvent diminuer l’impact d’une récession et permettre un retour à la normale plus rapidement. Mais ils vont mécaniquement alourdir le déficit public. Alors qu’une intervention discrétionnaire du gouvernement ne sera possible qu’au regard de son taux d’endettement qui aura pu se dégrader par les stabilisateurs automatiques. Les marges de manœuvre qui vont rester, au regard de la capacité d’endettement des gouvernements, conditionneront alors l’intervention sur le taux de change. Les caractéristiques d’optimisation d’une politique budgétaire dans ce genre de situation supposent un comportement contra-cyclique. La fuite des capitaux étrangers, mettant sous pression le taux de change, va faire diminuer l’activité économique avec la baisse de la liquidité dans le territoire. Les dépenses de l’Etat doivent alors augmenter et ses recettes diminuer, source d’un creusement des déficits et du poids de l’endettement total, pour soutenir l’activité. A contrario, lors de périodes favorables les recettes se doivent d’augmenter et les dépenses de diminuer pour permettre aux gouvernements de recouvrir leurs marges de manœuvres afin de faire face aux prochaines difficultés. Tout l’intérêt est alors de déterminer comment les instances publiques utilisent cet outil conjoncturel, que ce 283 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente soit lors des périodes favorables ou non, puisque de leur solvabilité dépendra leur capacité d’intervention. Les variables les plus pertinentes à analyser dans ce cadre d’analyse sont présentées dans le tableau 56. Elles permettent de déterminer le potentiel de réactivité de la politique budgétaire face aux tensions financières internationales dans le contexte particulier des PEC0. Tableau 56. Description des variables vis-à-vis de l’efficacité de la politique budgétaire Variables : Déficits budgétaires des pouvoirs publics. Poids de l’endettement Endettement total des pouvoirs publics. Nature de la politique Budgétaire Difficulté du refinancement Politique budgétaire contra-cyclique. Echéances de court terme de l’endettement public. Niveau des intérêts à payer par les pouvoirs publics. Interprétations : Les déficits budgétaires et l’endettement total indiquent les capacités financières pouvant être mises en place lors de tensions sur le taux de change. La nature contra ou pro cyclique de la politique budgétaire (à partir des taux de croissances économiques et des déficits publics) décrit l’utilisation conjoncturelle des capacités financières de l’Etat durant des périodes optimales ou non. Les échéances de court terme de l’endettement public et le niveau des taux d’intérêts à payer sont des indicateurs complémentaires vis-à-vis de la facilité ou non des pouvoirs publics à se refinancer. La liste des variables du tableau 56 est regroupé en trois grands points : le poids de l’endettement public (avec le déficit budgétaires et l’endettement total), la nature de la politique budgétaire (avec l’analyse de la pro-cyclicité des politiques menées) et la difficulté du refinancement public (avec les périodes des échéances d’endettement ainsi que l’augmentation des taux d’intérêt demandés). Ces trois approches ne sont pas toujours complémentaires. La politique budgétaire peut être inefficace par des marges de manœuvre inexistantes (poids de l’endettement trop fort), par un manque de confiance du marché international (difficulté de refinancement) ou simplement par le souhait de ne pas utiliser la politique budgétaire, même lors de périodes de récession, pour ne pas dégrader les finances publiques (nature de la politique budgétaire). 284 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Cette analyse fait apparaitre des résultats intéressants au sein des PECO lors de la crise de 2008 (tableau 57). Les divergences entre ces pays sont fortes, tant à l’origine de stratégies de rattrapage économique différentes (intégration rapide à l’euro ou non) que de marges de manœuvre devenues inexistantes face à l’endettement continu de certains pouvoirs publics. Ces résultats viennent compléter la régulation du pilotage de la dette de la thématique 3. Même si le poids de l’endettement public y est pour certains faible, l’utilisation non contracyclique des dépenses publiques et/ou les difficultés de refinancement auprès des marchés financiers ne permettent pas de réguler efficacement les tensions subies dans ces pays. Tableau 57. Qualité des variables de la politique budgétaire au sein des PECO PECO : Poids de l’endettement Bulgarie Favorable République Tchèque Favorable Estonie Favorable Lettonie Favorable Lituanie Favorable Hongrie Défavorable Pologne Favorable Romanie Favorable Slovénie Favorable Slovaquie Favorable Source : Eurostat et calculs auteurs Nature de la politique Budgétaire Défavorable Favorable Défavorable Défavorable Favorable Favorable Favorable Défavorable Favorable Favorable Difficulté du refinancement Favorable Favorable Défavorable Défavorable Favorable Défavorable Favorable Favorable Favorable Favorable Le tableau 57 décrit des faiblesses pour un nombre précis de pays. L’endettement total est élevé pour la Hongrie. La nature contra-cyclique des dépenses publiques est défavorable à la Bulgarie, la Lettonie, l’Estonie et la Roumanie. Quant à l’endettement, principalement à échéance de court terme, il est inquiétant en Estonie, en Lettonie et en Hongrie. L’adhésion des PECO à l’Union européenne en 2004 et en 2007 doit logiquement aboutir à terme à l’intégration à la zone euro. Pour ceux d’entre eux qui ont opté pour une intégration rapide, ils ont déjà ancré leur monnaie à l’euro (Bulgarie, Estonie, Lettonie et Lituanie). La contrainte sous-jacente est le respect des critères de Maastricht avec des taux d’endettement et des déficits annuels contenus. Ils sont dans l’incapacité d’utiliser leur politique budgétaire, imposant la stérilisation de cet outil de régulation conjoncturelle. 285 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente C’est le poids excessif de l’endettement pour la Hongrie, pays sans volonté d’adhésion à l’euro dans l’immédiat, qui explique ses difficultés de refinancement. La Roumanie est à considérer à part puisqu’elle n’a pas d’endettement excessif, ni de difficultés de refinancement. Mais l’adhésion tardive de ce pays à l’Union européenne en 2007, couplée à des difficultés de régulation surtout dans le pilotage de son inflation, justifie son objectif d’endettement faible et non contra-cyclique. La description analytique de la politique budgétaire des PECO permet maintenant de comparer les résultats obtenus avec les conséquences de la crise des Subprimes de 2008. La politique budgétaire apparait comme une alternative crédible pour amoindrir les effets négatifs dans l’économie (politique contra-cyclique pour soutenir l’activité économique) ainsi que sur la viabilité de l’ancrage du taux de change (augmentation des réserves de devises par la contraction de prêts internationaux). Afin de conforter cette interprétation, une majorité de PECO incapables d’utiliser efficacement l’outil budgétaire ont fait appel à l’aide internationale lors de la crise de 2008 (Roumanie, Estonie et Hongrie). Le schéma 31 en retrace la répartition. Schéma 31. Mise en parallèle de l’instabilité financière au sens de Minsky avec l’efficacité de la politique budgétaire 286 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Le schéma 31 illustre les effets de l’instabilité financière au sens de Minsky en rapport avec l’efficacité conjoncturelle de la politique budgétaire pour chaque PECO. Il n’y a ici aucun lien avec la qualité de leurs fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers. C’est la capacité de régulation à court terme, principalement en utilisant la politique budgétaire comme outil d’intervention, qui apparait déterminante. Les pays qui n’ont pas la possibilité de l’utiliser ont été soumis à de fortes pressions vis-à-vis de leur taux de change (Hongrie, Estonie et Roumanie et dans une moindre mesure la Bulgarie et la Lettonie). Quant aux autres pays (République Tchèque, Slovaquie, Slovénie, Lituanie et Pologne), ils avaient des marges de manœuvres budgétaires plus importantes, expliquant certainement une plus grande facilité de rebond. Indépendamment de la viabilité de moyen, voire long terme, du processus de rattrapage économique de ces pays, le choc financier à mis en avant l’importance de la régulation à court terme par les politiques budgétaires, au détriment de la politique monétaire rendue inefficace. La fuite des capitaux étrangers n’ayant pas pour origine une dégradation des fondamentaux de ces pays, l’augmentation des taux directeurs au sein des PECO pour rendre les territoires plus attractifs n’apparait pas comme une solution pertinente. A l’inverse, la politique monétaire de la zone euro explique largement plus les fuites de capitaux au sein de ces pays, comme la problématique de ce travail a pu le défendre. Afin de préserver les bénéfices d’un processus de rattrapage économique en cours, la politique budgétaire, à travers le soutien de l’activité économique et la reconstitution des réserves de devises par l’endettement international, devient déterminante pour éviter le risque de rupture des ancrages de change. Pourtant, l’intégration à la zone euro impose une stérilisation de cette même politique budgétaire alors que la politique monétaire est inefficace. Il devient difficile dans ces conditions de trouver un équilibre viable pour les PECO. 287 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente 4. Viabilité du rattrapage économique à moyen terme : focus sur les flux d’IDE Les pressions internationales, dans le cadre de l’hypothèse soulevée, peuvent mettre à mal les agrégats des PECO. La politique budgétaire apparait comme l’élément permettant d’atténuer ces tensions à court terme. Mais elle n’est pas suffisante pour déterminer la viabilité du rattrapage économique de ces pays à moyen et long terme. Le retour à la normale dans le reste du monde sera d’autant plus bénéfique aux PECO, avec le retour des capitaux étrangers, s’ils ont des taux de rentabilité toujours plus importants que dans la zone euro. La capacité d’attractivité lors de l’après crise, de préférence préservée par l’efficacité de la politique budgétaire, devrait logiquement correspondre à la qualité du positionnement des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers. Deux des trois thématiques déjà décrites précédemment rentrent en compte dans la détermination de la viabilité du processus de rattrapage économique de chaque PECO : la qualité du positionnement international avec les aspects commercial, monétaire et financier ; la qualité de la structure interne avec les robustesses économique et bancaire. La présentation des fondamentaux des PECO à travers ces agrégats et à l’aide des regroupements déjà effectués (groupe A, B et C) doivent permettre de dessiner l’exposition de chacun pour ensuite les confronter à l’évolution de l’attractivité des capitaux étrangers lors de l’après crise. Il sera effectué un découpage au regard des capitaux totaux, à court, moyen et long terme. Les tests économétriques effectués précédemment ont pu confirmer l’importance de ce choix afin d’en tirer le maximum d’interprétations. Le tableau 58 définit la qualité du positionnement international autour de l’aspect commercial (indispensable lors des spécialisations sectorielles basées sur l’exportation), et les aspects monétaire et financier (nécessaire à la soutenabilité de l’endettement avec le reste du monde pour financer l’économie). 288 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Tableau 58. Thématique 1 : qualité du positionnement international au sein des PECO Agrégats : Taux d’ouverture commerciale Compétitivité-prix Déficit de la balance courante Endettement devise court terme Endettement devise moyen long terme Positionnement favorable République Tchèque, Hongrie, Slovénie, Slovaquie et spécifique pour Pologne. République Tchèque, Hongrie et Slovaquie. République Tchèque, Bulgarie, Pologne, Hongrie et Slovaquie. Pologne, Hongrie, République Tchèque et Roumanie (Slovénie et Slovaquie adhésion euro avant crise). Pologne, République Tchèque et Roumanie (Slovénie et Slovaquie adhésion euro avant crise). Positionnement défavorable Bulgarie, Estonie, Lituanie, Lettonie et spécifique pour Roumanie. Bulgarie, Estonie, Lituanie, Lettonie, Pologne, Roumanie, Slovénie. Estonie, Lituanie, Lettonie, Roumanie et Slovénie. Estonie, Lettonie, Lituanie, et Bulgarie. Hongrie, Lituanie, Bulgarie, Estonie, Lettonie. L’aspect commercial vis-à-vis du reste du monde est favorable principalement pour la République Tchèque, la Slovénie, la Slovaquie et la Hongrie. Ces quatre pays abordent un taux d’ouverture fort, une compétitivité-prix favorable et un déficit de la balance courante qui s’améliore voire se stabilise. La Pologne est dans une situation intermédiaire, à l’origine de la taille de son économie. La Bulgarie contient la dégradation de sa balance courante sans pour autant témoigner d’une réussite dans son positionnement commercial international. Quant à l’aspect monétaire puis financier, la Slovénie et la Slovaquie ont pu adhérer à l’euro, mettant ces pays à l’écart de l’analyse. L’endettement en devises à court terme est favorable en Pologne, Hongrie, République Tchèque et en Roumanie. Alors que l’endettement en devises à moyen et long terme reprend les mêmes pays sauf la Hongrie. Quant à la thématique 2 (tableau 59), concernant la qualité de la structure interne, elle reprend la robustesse économique et bancaire. Son but est de définir le degré de diffusion au reste de l’économie lors de l’intégration internationale, qu’elle soit commerciale ou financière. Le stock d’IDE (de nature productif et stable), les efforts de R&D (nécessaires pour monter en gamme dans les spécialisations sectorielles) et le poids de l’industrie dans le PIB (stratégie de développement choisie qui passe par l’industrialisation) sont un ensemble d’éléments déterminant dans la capacité de diffusion des gains de productivité au tissu 289 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente économique dans sa globalité. Les ratios de solvabilités et la présence des banques étrangères viennent renforcer la bonne gestion des projets économiques puisqu’ils reposent sur l’endettement des agents économiques locaux. Tableau 59. Thématique 2 : qualité de la structure interne au sein des PECO Agrégats : Poids de l’industrie dans le PIB Efforts de R&D Stocks d’IDE/PIB Robustesse bancaire Positionnement favorable République Tchèque, Hongrie, Slovénie, Slovaquie, Bulgarie et Pologne. République Tchèque, Hongrie, Roumanie et Slovénie. Lituanie, Pologne, Roumanie, République Tchèque, Hongrie, Slovénie et Slovaquie. Forte présence des banques étrangères dans l’ensemble des PECO (effet stabilisateur) Positionnement défavorable Estonie, Lituanie et Lettonie. Bulgarie, Estonie et Lettonie. Bulgarie, Estonie et Lettonie. Dégradation généralisée des ratios de solvabilité dans tous les PECO (impact conjoncturel). Le tableau 59 décrit des effets de diffusions importants dans le reste de l’économie pour ce qui est de la République Tchèque, de la Hongrie, de la Slovénie et de la Slovaquie. La Pologne et la Roumanie sont dans des conditions intermédiaires, toujours au regard de la taille de leur économie rendant plus difficile le processus de diffusion. La robustesse bancaire est dans une situation de dualité, où la forte présence de banques étrangères dans ces économies assure des méthodes de gestions rigoureuses en plus du soutien de leur maisonmère. Mais la détérioration des ratios de solvabilités s’est parallèlement réalisée dans tous les PECO face à la dégradation de la conjoncture économique fin 2008. Les résultats que nous venons de présenter, à travers les tableaux 58 et 59, témoignent de divergences fortes entre les PECO dans les stratégies de convergence adoptées. Un premier regroupement concerne les pays qui ont choisi d’industrialiser leur économie avec de réels efforts dans les effets de diffusion au reste de l’économie. Il s’agit du groupe A décrit précédemment avec la République Tchèque, la Slovénie, la Slovaquie mais aussi la Hongrie. Ce dernier pays avait été classé dans le groupe C puisqu’il témoignait de fortes vulnérabilités dans ses capacités de régulation de court terme. Cependant, la qualité de son positionnement à moyen et long terme, ici définie par la viabilité de son rattrapage économique, reste encore favorable. Le second groupe comprend la Pologne et la 290 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Roumanie, dans une situation intermédiaire. Le troisième groupe est composé de l’Estonie, de la Lituanie et de la Lettonie, pays sans stratégie de développement crédible à moyen terme, ainsi que la Bulgarie qui commence tout juste son processus de rattrapage économique. La qualité des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers maintenant décrite, il convient de s’interroger sur l’attractivité effective vis-à-vis des capitaux étrangers lors de l’après crise, fin 2008, au sein des PECO. La difficulté engendrée par la contraction de la liquidité internationale pousse les agents économiques internationaux à retirer leurs capitaux afin de satisfaire leurs difficultés de refinancement en zone euro. Leur fuite généralisée fait fortement diminuer la valeur des actifs sans pour autant remettre en cause leur potentiel de rentabilité présente et future (la crise n’a pas pour source la dégradation des taux de rentabilité). Logiquement, certains capitaux étrangers devraient revenir rapidement dans les pays les plus prometteurs lors de l’après crise. Il convient d’y regarder de plus près pour confirmer cette interprétation. Le potentiel de rebond dans ces pays, au regard de la qualité de leur processus de rattrapage économique mis en avant à travers les thématiques 1 et 2, va offrir des opportunités de gains non négligeables pour les capitaux de retour rapidement, lors de la fin des tensions financières internationales. L’évolution des flux de capitaux totaux, à court, moyen et long terme est présentée dans les graphiques 61, 62, 63 et 64. De nombreuses tendances émergent au regard de ces faits, dont certaines largement plus intéressantes que d’autres. Pour plus de lisibilité, les résultats sont synthétisés dans le tableau 60 qui les récapitule pour chaque PECO. Il peut déjà être décrit ce que l’on entend par retour rapide des capitaux étrangers. La crise a pu impacter tous les PECO fin 2008, sans exception. Mais l’analyse graphique décrit le retour de certains capitaux (principalement les IDE) dès mi-2009 dans le meilleur des cas et seulement début 2010 pour les autres. Les pays qui ont pu rebondir rapidement ont bénéficié des capitaux étrangers mi2009, mettant fin aux pressions sur le taux de change par la même occasion. 291 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Graphique 61. Flux de capitaux étrangers totaux (% du PIB) Source : Eurostat (solde) Graphique 62. Flux de capitaux étrangers à court terme (% du PIB) Source : Eurostat (solde) Graphique 63. Flux de capitaux étrangers de portefeuille (% du PIB) Source : Eurostat (solde) 292 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Graphique 64. Flux de capitaux étrangers IDE (% du PIB) Source : Eurostat (solde) Le tableau 60 illustre la décomposition des tendances favorables ou non par le retour rapide des capitaux jusqu’à mi-2009 dans tous les PECO, par échéance des capitaux étrangers (totaux, à court terme, de portefeuille et d’IDE). Tableau 60. Description des tendances des PECO par échéances des capitaux étrangers Echéances des capitaux étrangers I(t) totaux I(t) Ct Tendance favorable Tendance défavorable Aucun. Aucun. Tous les PECO. Tous les PECO. Estonie, Lettonie, Bulgarie, Lituanie, Roumanie, Hongrie, Slovaquie. Lituanie, Roumanie, Lettonie et dans une moindre mesure l’Estonie (annonce adhésion euro en 2009). I(t) portefeuille Slovénie, Pologne, République Tchèque. I(t) IDE Slovénie, Slovaquie, République Tchèque, Hongrie. Dans une moindre mesure la Pologne. Globalement, les capitaux étrangers ne reviennent pas dans les PECO lors de l’après crise puisque le total des investissements étrangers est défavorable pour tous les pays. Cette tendance se confirme aussi avec les flux de capitaux de court terme. Cette situation apparait logique puisque la région est encore instable et peut témoigner de risques importants pour des investissements de court terme. En ce qui concerne les flux de capitaux de portefeuille, nous pouvons y voir une tendance qui correspond partiellement aux pays ayant de bons 293 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente fondamentaux macroéconomiques, tels que la Slovénie, la Pologne et la République Tchèque. Quant aux IDE, par nature plus stables et productifs, il y a un regroupement reprenant totalement la répartition des pays suivant la qualité de leurs fondamentaux. La Slovénie, la Slovaquie, la République Tchèque, la Hongrie et dans une moindre mesure la Pologne bénéficient favorablement du retour de ces capitaux. L’Estonie va bénéficier de l’annonce de son intégration à la zone euro pour début 2011, témoignant d’un rebond isolé de son attractivité seulement au 4eme trimestre 2009. Quant à la Bulgarie, Lituanie, la Lettonie et la Roumanie, ces pays sont encore dans une situation de diminution forte de leur attractivité en IDE jusqu’en 2010. L’hypothèse émise dans le retour à l’attractivité des PECO lors de l’après crise confirme ici l’importance de la qualité des fondamentaux émis par les thématiques 1 et 2. Le schéma 32 décrit le positionnement de chaque PECO autour de cette interprétation, entre la viabilité du processus de rattrapage économique et le retour des IDE lors de l’après crise de 2008. Schéma 32. Relation entre la qualité du rattrapage économique avec le retour rapide des IDE lors de l’après crise de 2008 294 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Le schéma 32 illustre clairement la relation entre la qualité du rattrapage économique et le retour rapide des IDE lors de l’après crise. Les pays bénéficiant de nouveau de ces capitaux sont la République Tchèque, la Slovénie, la Slovaquie et la Hongrie. Alors que la Lituanie, la Lettonie, la Bulgarie et la Roumanie n’en bénéficient pas aussi rapidement. La Pologne est dans une situation intermédiaire et l’Estonie a pu bénéficier succinctement de l’annonce de son intégration à la zone euro. La nature des IDE conforte cette interprétation. Logiquement, ce genre d’investissement n’a pas vocation à être rentabilisé rapidement, se concentrant vers des placements principalement productifs. Les PECO sont des territoires qui bénéficient d’effets de convergence positifs depuis l’intégration à l’Union européenne et celle en cours à la zone euro. La crise a pu les toucher indifféremment mais la non dégradation de leur fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers pour certains, lors de la contraction de la liquidité dans la zone euro, peut les rend encore attractifs lors de l’après crise. Les conséquences de ce retour rapide des IDE dans des PECO ont permis d’atténuer les effets de la crise financière internationale. Les taux de croissance économique qui repartent à la hausse dès mi-2009 pour la République Tchèque, la Slovénie, la Slovaquie, la Hongrie et la Pologne justifient cette interprétation (graphique 65). Alors que cette même analyse dans les autres pays, à savoir la Bulgarie, l’Estonie, la Lettonie, la Lituanie et la Roumanie, témoigne d’une croissance économique faible sur cette même période (graphique 66). 295 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Graphique 65. Premier groupe de pays avec des taux de croissance favorables Source : Eurostat (en pourcentage du PIB) Graphique 66. Second groupe de pays avec des taux de croissance défavorables Source : Eurostat (en pourcentage du PIB) 296 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente La description de la viabilité du processus de rattrapage économique a permis d’accentuer le rôle fondamental des flux de capitaux, principalement sous forme d’IDE, et ce avant, pendant et après la crise. Ceux-ci sont indispensables au financement de la restructuration du tissu industriel des PECO, neutralisant ainsi le déficit de la balance courante. Leur fuite durant la crise des Subprimes de 2008 conforte l’impossibilité pour eux de les retenir dans un contexte de libéralisation de leur compte de capitaux. Les pressions sur les taux de change témoignent de l’incompatibilité des ancrages dans ce contexte d’instabilité, pourtant indispensable à l’attractivité des territoires d’avant crise. L’alternative qui a pu se dessiner ici repose de nouveau sur la nécessité pour ces pays de rester attractif pendant la crise afin de voir les capitaux revenir le plus rapidement possible lors de l’après crise. Mais cette attractivité est fonction de la qualité des fondamentaux de chacun. Pourtant, toute convergence économique viable est un processus de long terme à mettre en œuvre. Les deux aspects temporels mis en avant, régulation conjoncturelle à court terme et qualité des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers à moyen terme, apparaissent indispensables. Le juste équilibre n’est pourtant pas facile à réaliser pour les PECO face aux tensions qu’ils peuvent subir. 297 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Conclusion intermédiaire L’alternative proposée ici était de s’interroger sur la capacité des PECO à patienter à court terme lors des tensions internationales, pour bénéficier à nouveau des investissements étrangers lors de l’après crise. Les capitaux sont nécessaires à la poursuite de leur rattrapage économique lors du retour à la normale des marchés financiers, poursuite conditionnée par la non dégradation de leurs fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers. La crise financière de 2008 illustre l’aptitude de certains d’entre eux à dépasser ces tensions au regard de leur positionnement. Elle a pu d’abord toucher indifféremment les PECO lors des retraits des capitaux étrangers. Mais certains pays émergents de la zone se sont retrouvés par la suite en difficulté alors que d’autres beaucoup moins. Cette situation a conduit à étudier la qualité de leurs agrégats sous la forme de trois thématiques pour refléter les divergences et convergences entre les PECO, à l’origine de la formalisation de trois groupes (A, B et C). Puis ces mêmes éléments ont servi à la justification de différenciation à court et moyen terme dans la capacité de rebond de ces pays. La possibilité de réguler les tensions issues du marché financier international à court terme s’est structurée autour de la thématique 3. L’incapacité pour certains à utiliser avec optimalité l’ensemble des outils conjoncturels de la politique économique (sacrifice de la politique monétaire afin de stabiliser le taux de change et atomicité de la politique budgétaire pour respecter les critères de Maastricht) a renforcé les tensions face aux faibles marges de manœuvre qui pouvaient leur rester (endettement public important et inflation forte). Dans ces conditions, la détermination de scénarios à court terme n’est nullement fonction de la qualité du processus de rattrapage économique mais seulement du potentiel de réactivité de la politique budgétaire des PECO. La mise en parallèle de l’instabilité financière au sens de Minsky avec le degré d’efficacité de la politique budgétaire des PECO décrit les regroupements à court terme suivant : La République Tchèque, la Slovénie, la Slovaquie, la Lituanie et la Pologne ont des marges de manœuvre budgétaires qu’ils ont pu utiliser lors des pressions sur leur taux de change. Quant aux autres pays, ils sont beaucoup plus exposés, avec des capacités d’intervention budgétaires trop faibles. La Hongrie, l’Estonie et la Roumanie ont ainsi pu demander l’aide 298 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente internationale afin de stabiliser leur taux de change. La Bulgarie et la Lettonie n’ayant pas fait cette démarche, apparaissent moins exposés à l’instabilité financière internationale. Pour ce qui est des perspectives à moyen terme, la qualité du rattrapage économique des PECO devient déterminante. Ce point est important puisqu’il confirme de nouveau l’intérêt de l’alternative mise en avant face aux tensions internationales. La qualité de leur positionnement macroéconomique et macro-financier détermine le retour, lors de l’après crise, des capitaux étrangers les plus stables que sont les IDE. Ce retournement lorsqu’il s’opère s’explique par l’opportunité d’acquérir des actifs à faible coût. La diminution du prix des actifs et la non dégradation des taux de rentabilité des placements effectués peuvent légitimer cette stratégie, stoppant les pressions sur les taux de change. Tous les PECO n’ont pas fait le choix d’une stratégie de convergence en fonction de l’attractivité vis-à-vis des capitaux à long terme, pourtant moins volatils. Ceux-ci ont pour principales destinations les secteurs productifs majoritairement industriels, comme en République Tchèque, Slovénie, Slovaquie, Hongrie et dans une moindre mesure en Pologne. Mis à part la Roumanie, pays en retard dans son processus de transition postsocialiste, les pays Baltes et la Bulgarie ont plutôt opté pour une stratégie d’intégration rapide à l’euro, sans pour autant s’interroger sur la viabilité à moyen terme de la convergence de leur économie. La présentation de la qualité du positionnement des PECO, à court terme puis à long terme, au regard des leurs fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers, explique les rebonds plus rapides pour une partie d’entre eux. Les éléments les plus pertinents, entre la politique budgétaire et l’attractivité vis-à-vis des IDE, donnent suffisamment matière pour réaliser des perspectives de développement à l’aide de scénarios. 299 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Conclusion de la troisième partie L’alternative qui apparait réalisable aujourd’hui pour les PECO, tant au regard des stratégies d’allocations des capitaux des agents économiques internationaux que de leurs propres politiques de développement économique, consiste à patienter lors des tensions financières internationales pour rebondir le plus rapidement lors de l’après crise. Il est difficilement envisageable pour eux d’intervenir sur les éléments perturbateurs internationaux entrainant l’occurrence des crises, comme les tests économétriques ont pu le mettre en avant. La configuration de l’endettement « à la Minsky » des agents économiques, à court terme auprès de la zone euro pour investir à moyen et long terme dans les PECO, exprime les vulnérabilités par l’interdépendance qui en résulte entre ces pays. Lors d’une contraction de la liquidité internationale, les PECO, sans même justifier d’une dégradation de leurs fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers, se voient impactés par les canaux de la liquidité ainsi que des taux d’intérêt au regard du processus d’intégration en cours tant au niveau de l’Union européenne qu’à celui de la zone euro. Bien que tous les PECO ne soient pas aujourd’hui dans la même situation, fruit de l’héritage de l’ère soviétique mais aussi de la plus ou moins bonne réussite de leur période de transition, ils ont tous un potentiel de développement favorable avec des effets de convergence vers l’Europe occidentale. Leur capacité de régulation à court terme, à travers la politique budgétaire, et le retour rapide des capitaux étranger lors de l’après crise, fonction de la qualité du développement économique de moyen terme, sont les éléments d’une alternative crédible pour dépasser les contraintes induites par l’instabilité financière. Au regard de ces faits, et de la qualité des fondamentaux macroéconomiques et macrofinanciers de ces pays, leurs perspectives d’évolution à moyen terme peuvent être définies par la détermination de scénarios reposant sur les analyses effectuées précédemment. Les pays relevant d’un premier scénario sont la République Tchèque, la Hongrie, la Slovénie et la Slovaquie. Ils ont choisi la stratégie d’industrialisation sur des secteurs compétitifs à l’exportation afin de réguler à terme la balance courante à l’aide d’IDE productifs. Avec un tissu industriel déjà développé et dynamique, couplé à une R&D tournée vers ce secteur, la balance courante commence déjà à s’améliorer, la compétitivité ne se basant plus 300 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente seulement sur les prix mais aussi sur la qualité technologique. L’ancrage du taux de change semble sous contrôle avec des taux d’inflation corrects et une politique budgétaire efficiente (sauf pour la Hongrie) même si la Slovénie et la Slovaquie ont déjà adopté l’euro. A moyen terme, la dynamique de rattrapage de la République Tchèque, la Slovénie et la Slovaquie semble favorable. Cependant, même avec des atouts encore forts, la Hongrie devra faire face à sa contrainte budgétaire pour ne pas réitérer sa défaillance lors de la crise de 2008. La Bulgarie et la Roumanie composent un second scénario. Ces pays sont plutôt dans une situation intermédiaire en raison d’une intégration plus tardive (en 2007) à l’Union européenne. Il n’y a pas encore de stratégie véritablement définie, bien que le secteur industriel soit dynamique mais encore faible (démontrant en particulier un fort potentiel en raison d’un coût de la main d’œuvre des plus bas). Ces pays restent fragiles (endettement public pro-cyclique notamment), mais les flux de capitaux de moyen et long termes semblent pourtant parier sur leur potentiel de développement. Chacun d’eux entre suit une démarche spécifique : ancrage à l’euro pour la Bulgarie et flottement administré pour la Roumanie. Il apparait peu probable que ces pays intègrent l’euro à court terme au regard de leur degré de développement. Une orientation vers une industrialisation compétitive à l’exportation peut apparaitre comme une solution pertinente à terme. Dans cette logique, la Roumanie apparaitrait relativement mieux positionnée que la Bulgarie puisque l’ancrage bulgare à l’euro, néanmoins source de stabilité, ne lui permet plus de réaliser des dévaluations compétitives. Dans ce dernier cas, une réorientation de l’ancrage avec un flottement encadré, ou des marges de fluctuation limitées, serait sans doute nécessaire afin d’assurer la viabilité du processus de développement. Le troisième et dernier scénario regroupe les pays baltes. Ils ont opté pour une stratégie d’intégration rapide à la zone euro avec l’ancrage de leur monnaie. Mais sans projet réel d’industrialisation ni d’effort particulier en termes de R&D. Dès lors, la résorption progressive des déficits de balance courante est difficilement envisageable. Ces pays n’ont pas profité des avantages concurrentiels qu’ils auraient pu avoir (main d’œuvre peu chère) afin de se spécialiser dans des secteurs compétitifs à l’exportation. Il s’en est suivi une pression spéculative importante démontrant une dynamique d’attractivité des capitaux sur des secteurs non productifs (immobilier, bâtiment…). La crise financière a confirmé la 301 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente vulnérabilité de la stratégie de l’Estonie, de la Lituanie et de la Lettonie. L’intégration à l’euro, effective depuis 2011 pour l’Estonie, élimine de fait le problème d’instabilité du taux de change mais interdit du même coup d’éventuel recours à des dévaluations compétitives. Bien au contraire, l’appréciation récurrente de l’euro face aux monnaies des autres pays émergents est susceptible de poser des problèmes au niveau de la restructuration de l’économie, que ce soit ou non par l’industrialisation. Dans ces conditions, le scénario d’après crise pour ces pays apparait a priori relativement défavorable. La Pologne a un modèle de développement à part. Sa stratégie aurait pu être clairement définie depuis plusieurs années (industrialisation ou intégration rapide à l’euro), mais il semble que ce pays se soit orienté vers un autre modèle. C’est pourquoi elle ne fait partie d’aucun des scénarios précédemment décrits. Ce pays a su se spécialiser sur des secteurs industriels compétitifs à l’exportation sans pour autant y accorder trop d’importance (le poids de l’industriel n’est pas dominant mais reste dynamique dans l’économie). S’agirait-il alors d’une stratégie qui n’est envisageable qu’au regard des caractéristiques internes de la Pologne (territoire et population importants) ? La taille du marché domestique permet d’être moins dépendant des chocs internationaux, comme nous avons pu le vérifier durant la dernière crise. Il semblerait qu’à court terme cette stratégie de développement soit pertinente. Cependant, les taux de croissance de la Pologne de 1995 à aujourd’hui sont restés moins attractifs que ceux des autres PECO. Sur le moyen/long terme, le processus de développement qui s’est engagé semble à la fois relativement moins rapide que dans le cas de la plupart des PECO mais aussi et peut-être plus sûr en termes de viabilité. 302 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Conclusion Générale La pensée dominante postule l’existence d’un lien fort de cause à effet entre la dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers d’un pays et l’occurrence d’une crise financière. Historiquement, cette démarche a démontré à de multiples reprises sa pertinence. De nombreux travaux théoriques et empiriques sont venus conforter cette idée. Mais le contexte économique et financier n’était pas le même qu’aujourd’hui. Les prémices de la globalisation et de la mondialisation de nos sociétés ont pu engendrer des changements dans les modalités d’occurrence des tensions il y a quelques années déjà. Pour autant, le degré d’imbrication des territoires n’avait pas atteint le niveau que nous lui connaissons aujourd’hui. La libéralisation des flux économiques, financiers et humains a conduit à une intégration de la quasi-totalité des sociétés au marché international. Face à ces nouvelles caractéristiques, il devient légitime de s’interroger sur l’importance à accorder à la notion d’interdépendance. Des faits empiriques récents sont venus questionner sur la façon dont nous pouvions appréhender ces nouvelles formes de crises. La grille de lecture établissant le lien entre la qualité des fondamentaux et l’émergence d’une crise est apparue inadéquate voire inappropriée pour quelques une des crises de ces dernières années. La justification graduelle de cette approche par des caractéristiques empiriques de plus en plus concomitantes, Corée du Sud (1997-1998), Brésil (fin 1990 début 2000) et particulièrement au sein des PECO (2008), témoignent de l’insuffisance des modes d’interprétation que nous avions pris pour habitude d’utiliser. Pis encore, la non dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers de ces pays n’a malheureusement pas permis d’annoncer en amont les pressions latentes. L’originalité de notre démarche a été de s’interroger sur l’interprétation de ces quelques faits empiriques qui divergent par rapport à l’explication donnée habituellement par la littérature économique. La problématique qui s’y dégage suppose de conceptualiser d’une autre façon l’occurrence de crises financières pour les cas particuliers soulevés précédemment. L’hypothèse est que des pays peuvent entrer en crise sans pour autant témoigner d’une dégradation de leurs fondamentaux, laissant place à la prépondérance des 303 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente effets de contagion. L’observation empirique interpelle sur ce phénomène à travers l’illustration qu’elle offre dans la perception macroéconomique des faits. Mais elle n’apporte pas suffisamment d’éléments constructifs dans l’appropriation et la structuration du raisonnement. La notion de crise en Sciences Economiques, avec un regard critique face au contexte spécifique de nos exemples empiriques, a donné l’opportunité de dresser des limites indispensables à la construction de notre raisonnement. Les méthodes actuelles d’interprétation des crises, reposant sur ce lien de cause à effet, permettent de les déterminer, de les mesurer pour enfin les anticiper. La dégradation de variables qui reflètent les fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers définit les écarts par rapport à une moyenne jugée normale. Celles qui vont fluctuer bien avant l’occurrence d’une crise seront pertinentes dans l’anticipation du phénomène pour tenter de le contourner en y apportant les réponses adéquates. Dans le cadre précis de notre hypothèse, à savoir la non dégradation des fondamentaux et donc dans l’incapacité de formuler de quelconques anticipations à partir de leurs évolutions constatées, cette approche méthodologique communément admise ne nous permet pas de façonner notre réflexion. Le besoin de s’approprier différemment les concepts émis nous oblige à nous orienter vers un autre cadre d’analyse plus structurant dans notre démarche. La réalisation d’un cadre reflétant les caractéristiques de notre environnement a reposé sur l’intégration des éléments reflétant les spécificités majeures de l’architecture financière actuelle. Ce sont bien les évolutions des modes d’organisation et d’échange entre les économies qui sous-tendent la constitution de vulnérabilités potentielles dans l’occurrence d’une crise. La sphère financière n’est plus neutre dans son rôle d’allocation des capitaux vers les placements les plus efficients dans l’économie réelle. La libéralisation des comptes de capitaux dans nombre de pays permet de réaliser librement des investissements dans le reste du monde. Quant aux choix des agents économiques internationaux, individuels ou collectifs, ils deviennent déterminants et sont souvent à l’origine de comportements spéculatifs globaux. Le renforcement de l’intégration financière qui en découle amplifie les dépendances entre économies. Se créent alors des vulnérabilités que nous qualifions de potentielles lors de la matérialisation d’effets de contagion. Dans ce nouveau contexte 304 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente globalisé et mondialisé, les stratégies des agents économiques internationaux deviennent prépondérantes face aux capacités de réactivités des instances publiques. Le besoin de compréhension du constat ainsi opéré, en particulier lors de l’étude des pays évoqués ci-dessus (Corée du Sud, Brésil et PECO), a permis l’identification de leurs principales caractéristiques en parallèle à la spécification du nouvel environnement économique et financier. Ils sont tous entrés dans un processus de convergence économique largement favorable. En conséquence, la littérature les répertorie au titre de pays émergents. Chacun d’entre eux est fortement intégré au reste du monde, que ce soit commercialement ou financièrement. Ils ont sélectionné une stratégie de rattrapage économique axée sur des spécialisations sectorielles orientées à l’international. Ils bénéficient d’une attractivité importante en termes de capitaux étrangers. Ils ont opté pour une libéralisation de leur compte de capital alors que leur taux de change a été ancré à des devises de références. L’ensemble de ces éléments a permis de façonner un profil des pays pouvant subir ce genre de crise. Cette contextualisation entre l’environnement global et les caractéristiques propres à ces pays a permis de constituer les premiers arguments dans l’explication de l’origine des crises financières qu’ils ont pu subir. L’imbrication des faits empiriques donnant naissance à des crises sans témoigner de dégradation dans les fondamentaux, suppose de s’appuyer sur un cadre théorique nécessaire à la clarification des concepts émis. L’HIF de Minsky fournit des éléments théoriques offrant l’opportunité de structurer le développement de la problématique afin de conforter l’hypothèse de travail. Le raisonnement de Minsky repose sur le choix d’un endettement à court terme des agents économiques afin d’utiliser ces mêmes capitaux dans des investissements de moyen, voire de long terme. Les perspectives de croissance économique favorables poussent avec légitimité les acteurs à prendre de plus en plus de risques, à l’origine d’une structure de leur endettement instable. La contraction de la liquidité, lors de l’augmentation des taux d’intérêt, va mettre sous pression les agents économiques qui ont pu opter pour cette divergence de temporalité entre l’endettement qu’ils contractent et les investissements qu’ils réalisent. 305 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente L’appropriation théorique de l’HIF de Minsky implique d’apporter des modifications dans l’interprétation conceptuelle des faits. C’est surtout dans la structure de l’endettement des agents économiques, principalement dans les pays développés afin d’en amoindrir le coût, et dans la destination des investissements à moyen, voire long terme, principalement dans les pays émergents pour en augmenter la rentabilité. Cette internationalisation des modes d’investissement va être amplifiée par les caractéristiques des pays émergents. La libéralisation de leur compte de capital et la stabilisation de leur taux de change vont conforter l’intérêt, pour les investisseurs, d’adopter ce type de stratégies internationales. Pour autant, cette démarche, même si elle a pour but de garantir l’attractivité financière de ces pays, interpelle quant à sa viabilité. Tout ancrage apparait fortement risqué s’il ne permet pas au pays qui le pratique de maitriser les flux internationaux de capitaux auxquels il se soumet. L’intérêt de cette approche renforce le constat de l’instabilité financière internationale sans pour autant la justifier par une dégradation des taux de rentabilité (assimilable à la non dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers). L’effet de levier attendu sur ce type d’opération repose sur une contrainte de temporalité à l’origine d’une structure financière potentiellement fragile et instable. Lors d’une augmentation des taux d’intérêt sur les marchés des pays prêteurs, l’incapacité de refinancer les échéances d’endettement à court terme peut fragiliser nombre d’acteurs et les pousser à liquider leurs actifs en catastrophe. Ce mode d’interprétation offre l’opportunité de structurer le développement de la problématique. L’occurrence de la crise prend alors pour origine la contraction du crédit par la Banque Centrale du pays développé et nullement la dégradation des fondamentaux des pays émergents. La dualité temporelle entre l’endettement et l’investissement des agents économiques les fragilise face aux difficultés de refinancement qu’ils vont rencontrer. Ceux-ci vont être dans l’obligation de rapatrier leurs capitaux investis au sein des pays émergents alors que ces territoires n’ont toutefois pas connu une quelconque dégradation de leurs fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers. Mais la libéralisation des comptes de capital permet aux prêteurs de réaliser cette fuite, mettant sous pression l’ancrage des taux de change des pays emprunteurs. Le déficit récurrent de la balance courante de ces pays, même en période d’accalmie des tensions sur le taux de change, rend l’ancrage insoutenable à terme. Les 306 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente modélisations de crise de change de première génération viendront contextualiser ce dernier aspect puisque l’anticipation de l’épuisement des réserves de devises va précipiter l’ancrage à travers une panique généralisée. L’approche de l’HIF de Minsky, couplée aux modélisations de première génération de crise de change, offre l’opportunité de structurer méthodologiquement la problématique de ce travail. L’hypothèse que l’on sous-entend à travers l’interprétation décrite a ensuite été validée empiriquement pour légitimer sa pertinence. Les PECO ont été sélectionnés au niveau de l’application empirique dans la mesure où ils présentent l’ensemble des critères méthodologiques décrits précédemment : pays émergents prometteurs libéralisant leur compte de capital et stabilisant leur taux de change vis-à-vis de l’euro, intégration commerciale et financière forte, principalement tournée vers l’Union européenne. La démarche s’est d’abord voulue structurante vis-à-vis du rôle que l’on a pu donner aux capitaux étrangers, puisque ceux-ci vont les impacter indifféremment. La divergence forte des rebonds économiques des PECO lors de l’après crise a conduit à nous interroger sur la réactivité de chacun, tant à court terme au niveau de la réception des chocs externes, qu’à moyen terme pour juger de la qualité de leur convergence économique. Le choix d’intégrer les marchés internationaux afin d’impulser une dynamique de rattrapage économique au sein des PECO rend les capitaux étrangers indispensables à la viabilisation de ce processus. Ces flux de financement sont essentiels vis-à-vis de deux aspects dans l’amorçage du processus de rattrapage économique des pays émergents. Ceux-ci permettent de financer le déficit de la balance courante, légitime dans le cadre d’un rattrapage économique afin d’importer des biens et services nécessaires à la restructuration du tissu industriel (équation 1). Ils sont aussi déterminants dans la stabilisation des taux de change puisque le différentiel entre l’afflux de capitaux et le déficit de la balance courante est compensé par les réserves de devises. Ainsi, plus les entrées de capitaux sont importantes face au montant du déficit courant à financer, plus les réserves de devises seront importantes, et inversement (équation 2). Il y a bien ici création d’une vulnérabilité potentiellement forte au sein des PECO au regard du rôle accordé aux capitaux étrangers. Ces flux financiers doivent servir à financer le solde 307 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente de la balance courante qui reste déficitaire même en période de contraction des capitaux étrangers. Le différentiel qui va en résulter pousse les autorités à utiliser les réserves de devises afin de stabiliser le taux de change. La diminution des réserves, mettant sous pression la stabilisation des taux de change, est assimilable à une crise de première génération par la fuite généralisée des capitaux lors de l’anticipation de l’incapacité à maintenir l’ancrage à terme. La dépendance au marché financier international, source de dynamisme en période favorable, devient problématique pour ces pays face aux deux rôles accordés aux capitaux étrangers. Les modélisations suivantes se sont attachées à démontrer l’instabilité de la structure financière internationale qu’engendre la répartition de ces capitaux au sein des PECO. L’attractivité des capitaux étrangers est indispensable pour les PECO mais ce sont les investisseurs internationaux qui décideront de leur localisation. Il a été établi que leur attractivité dépendait à la fois du coût de l’endettement à court terme dans la zone euro, afin de le minimiser, et du différentiel de rentabilité économique entre les PECO et la zone euro, pour le maximiser (équation 3). Il y a bien une stratégie assimilable à l’HIF de Minsky dans la répartition effectuée par les agents économiques internationaux. La création de vulnérabilités potentielles se concentre alors dans les effets de contagion pouvant être induits entre les marchés financiers de chacun de ces pays. Lors de l’augmentation des taux d’intérêt en zone euro, par l’action de la Banque Centrale Européenne pour lutter contre des risques inflationnistes, l’augmentation du coût de l’endettement et la diminution de la liquidité vont poser de nombreuses difficultés de refinancement à des investisseurs internationaux dont les structures de financement sont instables. L’incapacité de renouveler leurs dettes à court terme va les obliger à liquider leurs placements au sein des PECO, engendrant la fuite généralisée des capitaux et mettant sous pression les taux de change. La construction d’un indice de pression sur les taux de change a permis d’identifier la nature des pressions d’après les canaux de liquidité (fuite des capitaux de court, moyen et long terme) et les canaux de taux d’intérêt (échéances inférieures ou égales à 12 mois). Il s’est notamment avéré que certains de ces pays bénéficiaient de capitaux à moyen et long terme alors que ceux-ci avaient été initialement financés sur des échéances de court terme (équation 4). 308 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente L’importance des flux de capitaux pour les PECO, en parallèle aux stratégies d’allocation des investisseurs internationaux, a mis en avant l’incapacité pour ces pays de maitriser leur risque de change. Pour autant, le comportement des PECO vis-à-vis de l’occurrence d’une crise financière, sans pour autant témoigner d’une dégradation de leurs fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers, a pu témoigner d’effets discriminants entre eux. Ils ont tous été impactés par le retrait des capitaux étrangers, mais des attitudes divergentes d’après-crise ont pu apparaitre. L’analyse du positionnement à court terme, puis à long terme, de chacun d’eux a permis de porter un regard critique quant à leur capacité de rebond. L’étude analytique des PECO a permis de retenir deux aspects pertinents dans l’explication des différences de rebond lors de l’après crise. L’endettement à court terme des agents économiques internationaux pour investir ces mêmes capitaux à moyen et long terme dans les PECO impose à ces pays une gestion des pressions induites par cette temporalité divergente. Ces deux contraintes sont réutilisées ici à travers la capacité des PECO à en amoindrir les effets. La régulation conjoncturelle des pressions sur le taux de change va être conditionnée par les marges de manœuvre de court terme de la politique budgétaire. La non dégradation des fondamentaux de ces pays rend inefficiente toute forme de manipulation des taux directeurs par la Banque Centrale. La fuite des capitaux ne s’expliquant pas par un manque de rentabilité mais par un besoin de liquidité au sein de la zone euro, la politique monétaire apparait inadéquate. La politique budgétaire offre l’opportunité de reconstituer les capacités de devises à travers l’endettement et d’assouplir les effets de la crise par des politiques contra-cycliques. La reconstitution des réserves nécessaires à la viabilité de l’ancrage monétaire va déterminer le degré de résilience des PECO face aux tensions financières internationales. Quant à la qualité de la convergence économique de chacun, processus plus structurel et de long terme, la stratégie de spécialisations industrielle orientée à l’exportation apparait comme la plus attractive lors de l’après-crise. En particulier, les IDE vont revenir d’autant plus vite vers les PECO ayant adoptés cette méthode de développement permettant a priori de mettre fin aux pressions sur les taux de change beaucoup plus rapidement. 309 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Les résultats qui ont été obtenus dans les études économétriques et analytiques ont conforté la structuration méthodologique de notre approche. La composition instable de la sphère financière, couplée à une dépendance aux capitaux étrangers pour les PECO, a été confirmée par l’observation des flux de capitaux, validant l’hypothèse que nous avons émise. Quant aux comportements divergents entre PECO, au niveau de la capacité de rebond lors de l’après crise, et donc au niveau de leur positionnement à court puis à moyen terme, a offert l’opportunité de les discriminer favorablement. La constitution de scénarios a été réalisée suivant des regroupements issus de ces divergences. L’approche théorique de l’HIF de Minsky a structuré l’analyse. Mais la validation de l’hypothèse, qui en est ressortie, connaît néanmoins des limites dans la justification empirique choisie. Des pistes de réflexions peuvent être identifiées afin de repérer les potentialités futures d’approfondissement de la recherche. La sélection d’un nombre réduit d’équations au niveau des tests économétriques apparait excessivement limitative. La constitution d’un système d’équations plus complet permettrait la modélisation de l’ensemble des interactions entre les agents économiques concernés et les principales variables. Quant aux modélisations de crises de change de première génération, une investigation plus approfondie offrirait vraisemblablement l’opportunité de décrire plus précisément la temporalité des éventuelles ruptures d’ancrage du taux de change, en la restituant par rapport à notre problématique. Pour ce qui est des variables que nous avons pu sélectionner afin de rendre compte de l’attractivité des effets de levier financier, celles-ci reposent sur le calcul du différentiel de rentabilité entre la zone euro et les PECO dans les placements effectués. La désagrégation de ces données permettrait notamment d’analyser les effets par secteurs d’activité. Le développement économique des PECO est concentré sur des spécialisations industrielles fortement orientées vers l’exportation. Une analyse plus fine des capitaux alloués et des taux de rentabilités susceptibles d’être attendus permettrait sans doute de mieux conforter la problématique. D’autres propositions sont aussi à avancer quant à l’utilisation de variables plus spécifiques à notre problématique. Nous avons pu parler de vulnérabilités potentielles puisque c’est à 310 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente travers les effets de contagion que la contraction de la liquidité internationale peut impacter les pays émergents. La détermination d’un indicateur agrégé reflétant la pondération d’un panel de dépendances de ces pays aux flux de capitaux étrangers permettrait d’informer sur le degré de risque de chacun. L’origine des capitaux étrangers, l’importance de la corrélation des taux d’intérêt avec certaines économies développées, la divergence temporelle vis-à-vis de la nature de la périodicité entre les investissements effectués et les endettements réalisés sont déjà quelques pistes de réflexions. Un second indicateur d’agrégation informerait sur le degré de résilience de ces pays pour ce genre de phénomène à travers les marges de manœuvres budgétaires, les accords de refinancements internationaux (Union européenne, FMI, Banque Mondiale…), le positionnement de la productivité du pays face au reste du monde afin de devenir à nouveau et rapidement attractif lors de l’après-crise… Pour aller plus loin, l’’intégration de la prime de risque avec l’évolution des CDS à 5 ans des PECO autoriserait la quantification des anticipations des agents économiques pour ces pays afin de conforter les effets discriminants ou non. Tout d’abord lors de la fuite généralisée des capitaux en parallèle des modélisations de première génération dans le moment de rupture de l’ancrage. Puis dans le retour des capitaux lors de l’après crise, principalement sous forme d’IDE. Au-delà des quelques pistes identifiées et susceptibles d’assurer un prolongement efficace de cette recherche, deux thématiques complémentaires mériteraient selon nous d’être explorées. D’une part pour ce qui concerne la manière même de déterminer, mesurer puis anticiper les crises financières. Les variables habituellement utilisées, lors de leurs dégradations anticipées, doivent permettre d’appréhender l’occurrence d’une crise. L’affirmation de la non dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macro-financiers dans ce genre de phénomènes nous oriente plutôt dans la détermination d’un degré de vulnérabilités potentielles de ces pays lors d’une crise de liquidité internationale. Le retrait des capitaux étrangers ne prenant pas pour origine leur situation économique, il convient plutôt de s’interroger sur l’importance de leur dépendance au marché financier international. 311 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente D’autre part pour ce qui est des stratégies d’endettement et d’investissement des agents économiques, stratégies aujourd’hui globales, un minimum de coopération réglementaire entre les différents territoires pourrait permettre d’éviter des prises de risques trop importantes. L’Union européenne offre l’opportunité de le réaliser à travers ses instances supranationales. La dépendance de certains de ses membres face au laxisme des autres aboutira à terme à plus de collaboration. La libéralisation du compte de capital des pays émergents en parallèle à un ancrage de leur taux de change apparaissent incompatibles par nature. Il faut les modérer pour en atténuer les effets négatifs lors d’une fuite généralisée des capitaux étrangers. Pourtant, l’adhésion à l’Union européenne a imposé d’ouvrir les comptes de capitaux alors que l’intégration à la zone euro doit être précédée d’un ancrage à la monnaie unique. Beaucoup plus de souplesse est à envisager dans les modalités d’intégration de ces pays afin de viabiliser leur processus de convergence économique. 312 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Bibliographie Abraham-Frois, G. et Desaigues, B. 2003. Du "consensus de Washington" au "consensus Stiglitzien". Revue d'économie politique. 2003, Vol. 113, 1, pp. 1-13. Adler, M. et Dumas, B. 1983. International Portfolio Choice and Corporation Finance : A Synthesis. Journal of Finance. 1983, 38, pp. 925-984. Aglietta, M. 2000. L'économie mondiale 2000 : La globalisation financiere. Paris : La Découverte collection Repères. Aglietta, M. 2001. 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Définition, détermination, anticipation et récurrence des crises financières ...... 19 Introduction intermédiaire....................................................................................................... 19 1. Une approche générale des crises comme définition........................................................ 21 2. Détermination et anticipation des crises financières en Sciences Economiques .............. 27 3. Historique des crises financières : une récurrence continue ............................................. 34 Conclusion intermédiaire ......................................................................................................... 39 Chapitre 2. La vulnérabilité des régimes de change face aux tensions financières internationales ......................................................................................................................... 41 Introduction intermédiaire....................................................................................................... 41 1. Les nouveaux éléments du contexte financier international ............................................ 43 2. La place prépondérante des effets de contagion dans l’environnement financier ........... 54 3. Des stratégies d’ancrage du taux de change par nature source de vulnérabilité ............. 60 4. La contrainte du change fixe dans un contexte de tensions financières internationales . 68 5. Synthèse des différentes modélisations de crises de change............................................ 73 6. Contextualisation de la problématique à travers des faits récents : focus sur la Corée du Sud, le Brésil et les PECO .................................................................................................... 84 Conclusion intermédiaire ......................................................................................................... 94 Conclusion de la première partie ............................................................................................. 96 Partie 2. Identification et modélisation des faits originaux : un processus de développement source d’interdépendances et d’effets de contagion .............................................................. 99 Introduction de la deuxième partie ....................................................................................... 100 Chapitre 3. Une stratégie de rattrapage économique basée sur l’attractivité des IDE, source de vulnérabilités potentielles ? .............................................................................................. 103 Introduction intermédiaire..................................................................................................... 103 1. Enjeux de l’intégration au commerce international : des perspectives favorables de développement économique ........................................................................................... 106 329 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente 2. La nécessité de contracter des endettements externes, facteur de dépendance au marché financier international ........................................................................................ 116 3. Le rôle prépondérant des IDE : entre attractivité, croissance économique et stabilité macro-financière .............................................................................................................. 126 Conclusion intermédiaire ....................................................................................................... 138 Chapitre 4. Spécification de faits originaux : construction théorique pays développé/pays émergent d’après l’hypothèse d’instabilité financière de Minsky ........................................ 140 Introduction intermédiaire..................................................................................................... 140 1. L’apport de Minsky comme élément d’explication au déclenchement de la crise ......... 142 2. Le processus de crise : mise en parallèle des modélisations de 1ere génération ........... 154 3. Matérialisation du phénomène de crise dans les PECO : un processus en deux étapes . 163 4. Caractérisation des phénomènes d’interdépendance et de contagion dans les PECO ... 178 Conclusion intermédiaire ....................................................................................................... 193 Conclusion de la deuxième partie .......................................................................................... 196 Partie 3. Divergences de comportement au sein des PECO lors de tensions financières internationales : entre transferts de capitaux et positionnement structurel ....................... 199 Introduction de la troisième partie ........................................................................................ 200 Chapitre 5. Modélisations économétriques comme approche empirique : focus sur les flux de capitaux .................................................................................................................................. 203 Introduction intermédiaire..................................................................................................... 203 1. La détermination du rôle des capitaux étrangers au sein des PECO : une obligation d’attractivité pour ces territoires ..................................................................................... 205 2. Eléments d’attractivité des capitaux étrangers dans les PECO : croissance économique, rentabilité des investissements et variation des taux de change .................................... 219 3. Eléments de répulsion des capitaux étrangers dans les PECO : analyse des tensions financières par les canaux de liquidité et de taux d’intérêt............................................. 231 Conclusion intermédiaire ....................................................................................................... 241 Chapitre 6. Détermination de la qualité du positionnement des PECO : entre turbulences financières et viabilité du rattrapage économique ................................................................ 243 Introduction intermédiaire..................................................................................................... 243 1. Méthodologie de la démarche : une dynamique en trois thématiques .......................... 246 2. Analyse ciblée de la qualité des fondamentaux des PECO .............................................. 255 3. Turbulences financières de court terme : focus sur la politique budgétaire ................... 278 4. Viabilité du rattrapage économique à moyen terme : focus sur les flux d’IDE ............... 288 Conclusion intermédiaire ....................................................................................................... 298 330 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Conclusion de la troisième partie........................................................................................... 300 Conclusion générale ............................................................................................................... 303 Bibliographie .......................................................................................................................... 313 Table des matières ................................................................................................................. 329 Table des illustrations ............................................................................................................ 332 Annexe 1 : équation économétrique (1) ................................................................................ 339 Annexe 2 : équation économétrique (2) ................................................................................ 344 Annexe 3 : équation économétrique (3) ................................................................................ 347 Annexe 4 : équation économétrique (4) ................................................................................ 352 331 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Table des illustrations Partie 1. Présentation synthétique des modèles de crises de change : un retour vers les crises financières comme élément d’interprétation Liste des tableaux : Tableau 1. La dynamique des crises : une interprétation globale ........................................... 22 Tableau 2. Tableau de répartition des signaux des variables prédictives ............................... 31 Tableau 3. Classification des variables suivant leur pouvoir prédictif ..................................... 33 Tableau 4. Fréquence par période de régulation internationale divergente .......................... 36 Tableau 5. Capitalisation boursière sur les marchés d’actions ................................................ 44 Tableau 6. Facteurs d’intégration ............................................................................................ 46 Tableau 7. Évolution en longue période de la durée et de la profondeur des crises .............. 50 Tableau 8. Les effets de la déréglementation financière ......................................................... 50 Tableau 9. Enumération des différents canaux de contagion ................................................. 55 Tableau 10. Présentation de toutes les formes de contagion ................................................. 57 Tableau 11. Caractéristiques des pays vulnérables aux contagions ........................................ 59 Tableau 12. Fréquence des crises de change d’après des méthodologies différentes ........... 61 Tableau 13. Exemples de pressions sur le marché des changes .............................................. 63 Tableau 14. Liste des indicateurs potentiels dans le cadre de crises de change ..................... 65 Tableau 15. Énumération des taux de change par régime ...................................................... 69 Tableau 16. Devises internationales de référence dans la nature des régimes de change ..... 70 Tableau 17. Liste non exhaustive d’indicateurs de vulnérabilités issus des modélisations de seconde génération .................................................................................................................. 78 Tableau 18. Liste non exhaustive d’indicateurs financiers de vulnérabilités issus de modélisations de 3ème génération ......................................................................................... 82 Tableau 19. Principaux indicateurs économiques de la Corée du Sud (en %) ......................... 85 Tableau 20. Principaux indicateurs économiques du Brésil (en %) ......................................... 86 Tableau 21. Caractéristiques économiques et financières de l’intégration des PECO à l’Union européenne en 2008 ................................................................................................................ 88 Tableau 22. Données sur les fondamentaux macroéconomiques des PECO (moyenne 2000/2008) ............................................................................................................................... 89 332 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Liste des graphiques : Graphique 1. Crise de change : volatilité des taux de change ................................................ 28 Graphique 2. Crises boursières : volatilité des cours boursiers ............................................... 28 Graphique 3. Exemple d’analyse par « event » sur un taux d’intérêt réel .............................. 29 Graphique 4. Fréquence des crises financières ....................................................................... 35 Graphique 5. Fréquence des crises sur une période plus récente........................................... 36 Graphique 6. Fréquence des crises par région ........................................................................ 37 Graphique 7. Fréquence des crises dans les pays émergents par période .............................. 38 Graphique 8. Indice de libéralisation financière ...................................................................... 44 Graphique 9. Libéralisation des pays en voie de développement ........................................... 48 Graphique 10. Evolution du ratio crédit/PIB et de son instabilité par période et par continent (1966-2000) ............................................................................................................................. 51 Graphique 11. Variation des réserves de change en Amérique Latine.................................... 75 Graphique 12. Taux de croissance du PIB (en %) des pays asiatiques ..................................... 79 Graphique 13. Taux de croissance consommation finale (en %) des pays asiatiques ............. 79 Graphique 14. Taux d’inflation (en %) des pays asiatiques ..................................................... 80 Graphique 15. Valeur des cours boursiers (en % du PIB) des pays asiatiques ........................ 80 Graphique 16. Endettement public (en % du PIB) des pays asiatiques ................................... 80 Graphique 17. La fuite généralisée des capitaux au sein des PECO ........................................ 92 Graphique 18. Baisse des réserves de change (or y compris).................................................. 92 Partie 2. Identification et modélisation des faits originaux : un processus de développement source d’interdépendances et d’effets de contagion Liste des tableaux : Tableau 23. Les quatre grandes périodes de l’économie du développement....................... 106 Tableau 24. Les dix propositions de Williamson du « Consensus de Washington » ............. 108 Tableau 25. Taux d’ouverture commerciale des PECO avant tensions internationales 2008 109 Tableau 26. Meilleures performances commerciales globales des pays en voie de développement (2000) .......................................................................................................... 110 Tableau 27. Meilleure amélioration des performances commerciales des pays en voie de développement (1996-2000) ................................................................................................. 111 333 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Tableau 28. Les dix moins bonnes performances commerciales globales pour les pays en développement (2000) .......................................................................................................... 111 Tableau 29. Une convergence trop faible pour parler d’un effet de corrélation .................. 113 Tableau 30. Nature de l’endettement international des pays en voie de développement .. 120 Tableau 31. Proposition de classification des travaux sur l’attractivité des IDE ................... 127 Tableau 32. Les théories IDE-croissance économique ........................................................... 128 Tableau 33. Variables significatives issues de la littérature économique (non exhaustive) . 129 Tableau 34. Variables explicatives de l’implantation étrangère dans un pays ...................... 133 Tableau 35. Spécialisation sectorielle au sein des PECO........................................................ 134 Tableau 36. Exemples de la diversité des classifications sur l’attractivité des territoires ..... 135 Tableau 37. Les spécificités de la problématique de thèse ................................................... 161 Tableau 38. Ancrage voire stabilisation des taux de change ................................................. 173 Tableau 39. Enumération des différents canaux de contagion ............................................. 179 Tableau 40 : Bilan du CAEM dressé par les économistes Est-européens .............................. 184 Tableau 41. Evolution de la réorientation des échanges des PECO entre 1989 et 1991 ....... 186 Tableau 42. Stocks des flux d’IDE au sein des PECO entre 1990 et 2008 .............................. 190 Tableau 43. Exportations par filière économique en 2006 des PECO (en % du total) ........... 191 Liste des graphiques : Graphique 19. Corrélation entre l’ouverture commerciale et la croissance économique .... 112 Graphique 20. Evolution du PIB des PECO ............................................................................. 114 Graphique 21. Evolution de la productivité du travail par tête des PECO ............................. 114 Graphique 22. Impact de l’endettement sur la croissance économique............................... 117 Graphique 23. Niveau d’épargne des PECO (en % du PIB) .................................................... 117 Graphique 24. Placement des résidents à l’étranger ............................................................. 118 Graphique 25. Solde des flux de capitaux étrangers des PECO ............................................. 120 Graphique 26. Solde des flux d’IDE des PECO ........................................................................ 121 Graphique 27. Evolution de la balance commerciale des PECO ............................................ 122 Graphique 28. Solde des balances courantes des PECO ........................................................ 122 Graphique 29. Evolution des exportations des PECO ............................................................ 123 Graphique 30. Evolution des importations des PECO ............................................................ 124 Graphique 31. Solde des flux de capitaux étrangers des PECO ............................................. 131 334 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Graphique 32. Représentation des interprétations monétaires des structuralistes ............. 148 Graphique 33. Représentation des interprétations des horizontalistes................................ 149 Graphique 34. Différence du taux de rentabilité du capital entre les PECO et la zone euro 166 Graphique 35. Comparaison taux d’intérêt (à 3 mois) de la zone euro et des PECO ............ 167 Graphique 36. Comparaison entre les taux d’intérêt à différentes échéances en euro ....... 168 Graphique 37. Attractivité puis fuites généralisées des capitaux étrangers ......................... 170 Graphique 38. Déficit récurrent du compte courant résultant du processus de rattrapage économique............................................................................................................................ 171 Graphique 39. Impact sur la croissance économique des turbulences financières internationales ....................................................................................................................... 172 Graphique 40. Les taux directeurs comme outil de régulation du taux de change ............... 174 Graphique 41. Diminution des réserves de devises ............................................................... 175 Graphiques 42. Niveau de risque souverain des PECO .......................................................... 175 Graphique 43. Appréciation des taux de change ................................................................... 176 Graphique 44. Evolution des exportations et des importations intra-CAEM ........................ 181 Graphiques 45 et 46. Evolution des spécialisations à l’exportation des membres du CAEM 182 Graphiques 47. Evolutions des spécialisations à l’exportation des PECO après 1990 ........... 187 Graphique 48. Evolution du PIB des PECO entre 1989 et 1998 ............................................. 189 Graphique 49. Evolution production manufacturière des PECO ........................................... 191 Liste des schémas : Schéma 1. Stratégie de développement économique ........................................................... 138 Schéma 2. Typologie des situations financières de Minsky ................................................... 144 Schéma 3. L’Hypothèse d’Instabilité Financière de Minsky (1974) ....................................... 147 Schéma 4. Lors d’une période de spéculation positive.......................................................... 152 Schéma 5. Renforcement de la période de spéculation positive : l’euphorie ....................... 152 Schéma 6. Impact d’une contagion financière internationale dans la dégradation des fondamentaux macroéconomiques et macro-financier ........................................................ 157 Schéma 7. Les canaux significatifs au regard de la problématique de thèse ........................ 158 Schéma 8. Dynamique des modélisations de 1ere génération.............................................. 159 Schéma 9. Modélisation des spécificités de la problématique .............................................. 160 Schéma 10. Dynamique de l’étude : étape 1 (spéculation favorable) ................................... 164 335 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Schéma 11. Dynamique de l’étude : étape 2 (choc financier externe) .................................. 165 Schéma 12. La dynamique d’attractivité des capitaux des PECO : étape 1 ........................... 169 Schéma 13. La dynamique de fuite de capitaux des PECO : étape 2 ..................................... 169 Partie 3. Divergences de comportement au sein des PECO lors de tensions financières internationales : entre transferts de capitaux et positionnement structurel Liste des tableaux : Tableau 44. Composition des comptes de la balance des paiements ................................... 206 Tableau 45. Equation (1) : résultats des tests économétriques ............................................ 210 Tableau 46. Equation (2) : résultats des tests économétriques ............................................ 215 Tableau 47. Interprétation des tests économétriques de l’équation (2) .............................. 217 Tableau 48. Equation (3) : résultats des tests économétriques ............................................ 226 Tableau 49 : Stratégies d’allocation des capitaux étrangers dans les PECO .......................... 228 Tableau 50. Résultats des tensions sur les taux de change des PECO ................................... 236 Tableau 51. Equation (4) : résultats des tests économétriques ............................................ 238 Tableau 52. Regroupement des PECO : entre qualité du positionnement à court et à moyen terme ...................................................................................................................................... 255 Tableau 53. Thématique 3 : qualité de la régulation au sein des PECO ................................ 278 Tableau 54. Influence de la politique monétaire des PECO dans les flux de capitaux .......... 280 Tableau 55. Influence de la politique monétaire de la zone euro dans les flux de capitaux . 281 Tableau 56. Description des variables vis-à-vis de l’efficacité de la politique budgétaire .... 284 Tableau 57. Qualité des variables de la politique budgétaire au sein des PECO ................... 285 Tableau 58. Thématique 1 : qualité du positionnement international au sein des PECO ..... 289 Tableau 59. Thématique 2 : qualité de la structure interne au sein des PECO ..................... 290 Tableau 60. Description des tendances des PECO par échéances des capitaux étrangers ... 293 Liste des graphiques : Graphique 50. Compte des transactions courantes des PECO avec le reste du monde ....... 207 Graphique 51. Compte de capital des PECO avec le reste du monde ................................... 207 Graphique 52. Compte financier des PECO avec le reste du monde ..................................... 208 Graphique 53. Capitaux étrangers du compte financier des PECO ....................................... 213 336 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Graphique 54. Avoirs de réserves du compte financier des PECO ........................................ 213 Graphique 55. Flux total des capitaux étrangers ................................................................... 221 Graphique 56. Flux des capitaux étrangers à court terme .................................................... 222 Graphique 57. Flux des capitaux étrangers à moyen terme .................................................. 223 Graphique 58. Flux des capitaux étrangers à long terme (IDE) ............................................. 223 Graphique 59. Taux de croissance du PIB en pourcentage des PECO ................................... 243 Graphiques 60. Un risque-pays trop élevé rend la politique monétaire inefficace ............... 282 Graphique 61. Flux de capitaux étrangers totaux (% du PIB) ............................................... 292 Graphique 62. Flux de capitaux étrangers à court terme (% du PIB) .................................... 292 Graphique 63. Flux de capitaux étrangers de portefeuille (% du PIB) .................................. 292 Graphique 64. Flux de capitaux étrangers IDE (% du PIB) ..................................................... 293 Graphique 65. Premier groupe de pays avec des taux de croissance favorables.................. 296 Graphique 66. Second groupe de pays avec des taux de croissance défavorables ............... 296 Liste des schémas : Schéma 14. La période de spéculation positive au sein des PECO ........................................ 220 Schéma 15. La période de retournement conjoncturelle au sein de la zone euro................ 231 Schéma 16. Dynamique des effets de contagion de la zone euro aux les PECO ................... 232 Schéma 17. Agrégats sélectionnés afin d’illustrer chaque thématique................................. 246 Schéma 18. Thématique 1 : qualité du positionnement international .................................. 248 Schéma 19. Thématique 2 : qualité de la structure interne .................................................. 250 Schéma 20. Thématique 3 : qualité de la régulation ............................................................. 252 Schéma 21. Descriptif des vulnérabilités propres à la République Tchèque ......................... 268 Schéma 22. Descriptif des vulnérabilités propres à la Slovaquie........................................... 269 Schéma 23. Descriptif des vulnérabilités propres à la Slovénie............................................. 270 Schéma 24. Descriptif des vulnérabilités propres à la Pologne ............................................. 271 Schéma 25. Descriptif des vulnérabilités propres à la Roumanie .......................................... 272 Schéma 26. Descriptif des vulnérabilités propres à l’Estonie ................................................ 273 Schéma 27. Descriptif des vulnérabilités propres à la Lituanie ............................................. 274 Schéma 28. Descriptif des vulnérabilités propres à la Lettonie ............................................. 275 Schéma 29. Descriptif des vulnérabilités propres à la Bulgarie ............................................. 276 Schéma 30. Descriptif des vulnérabilités propres à la Hongrie ............................................. 277 337 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Schéma 31. Mise en parallèle de l’instabilité financière au sens de Minsky avec l’efficacité de la politique budgétaire ........................................................................................................... 286 Schéma 32. Relation entre la qualité du rattrapage économique avec le retour rapide des IDE lors de l’après crise de 2008 ................................................................................................... 294 338 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Annexe 1 : équation économétrique (1) Pour des raisons de simplicité dans la compréhension des résultats, le test le plus significatif par pays est présenté. Bulgarie Dependent Variable: KTOTAL Method: Least Squares Date: 01/14/12 Time: 14:33 Sample: 1995Q1 2008Q4 Included observations: 56 ITOTAL=C(1)+C(2)*(-B) C(1) C(2) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. 201.1514 1.250474 106.7375 0.116351 1.884543 10.74745 0.0649 0.0000 0.681430 0.675531 658.7733 23435045 -441.9035 115.5076 0.000000 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat 849.8571 1156.510 15.85370 15.92603 15.88174 1.622775 République Tchèque Dependent Variable: KTOTAL Method: Least Squares Date: 01/14/12 Time: 14:46 Sample (adjusted): 1999Q2 2008Q4 Included observations: 39 after adjustments ITOTAL=C(1)+C(2)*(-B(-1)) C(1) C(2) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. 2309.139 -0.818783 389.4169 0.337137 5.929734 -2.428634 0.0000 0.0201 0.137494 0.114183 1671.476 1.03E+08 -343.7491 5.898262 0.020134 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat 339 1622.179 1775.939 17.73072 17.81603 17.76133 1.693655 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Estonie Dependent Variable: KCT Method: Least Squares Date: 01/14/12 Time: 14:57 Sample: 1995Q1 2008Q4 Included observations: 56 ICT=C(1)+C(2)*(-B) C(1) C(2) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. -44.05951 1.214931 33.70074 0.111776 -1.307375 10.86935 0.1966 0.0000 0.686307 0.680498 166.2856 1493149. -364.8098 118.1427 0.000000 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat 231.3393 294.1831 13.10035 13.17269 13.12840 1.928273 Hongrie Dependent Variable: KTOTAL Method: Least Squares Date: 01/14/12 Time: 15:09 Sample: 1995Q1 2008Q4 Included observations: 56 ITOTAL=C(1)+C(2)*(-B) C(1) C(2) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. -104.3974 1.712533 349.3890 0.263474 -0.298800 6.499808 0.7662 0.0000 0.438946 0.428557 1300.416 91318450 -479.9869 42.24750 0.000000 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat 340 1865.750 1720.267 17.21382 17.28615 17.24186 2.150087 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Lituanie Dependent Variable: KCT Method: Least Squares Date: 01/14/12 Time: 15:20 Sample: 1995Q1 2008Q4 Included observations: 56 ICT=C(1)+C(2)*(-B) C(1) C(2) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. -96.55964 1.054628 47.57953 0.097787 -2.029437 10.78491 0.0474 0.0000 0.682939 0.677068 230.5338 2869874. -383.1045 116.3143 0.000000 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat 294.5000 405.6756 13.75373 13.82607 13.78178 1.822569 Lettonie Dependent Variable: KTOTAL Method: Least Squares Date: 01/14/12 Time: 15:26 Sample: 1995Q1 2008Q4 Included observations: 56 ITOTAL=C(1)+C(2)*(-B) C(1) C(2) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. 3.586035 1.732339 48.38643 0.098214 0.074112 17.63838 0.9412 0.0000 0.852100 0.849361 266.6955 3840832. -391.2643 311.1124 0.000000 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat 341 580.8571 687.1439 14.04515 14.11749 14.07320 1.898414 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Pologne Dependent Variable: KCT Method: Least Squares Date: 01/14/12 Time: 15:36 Sample (adjusted): 2000Q1 2008Q4 Included observations: 36 after adjustments ICT=C(1)+C(2)*(-B) C(1) C(2) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. -1335.546 1.239046 711.2155 0.273562 -1.877836 4.529312 0.0690 0.0001 0.376315 0.357971 2268.916 1.75E+08 -328.2270 20.51466 0.000069 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat 1392.694 2831.660 18.34594 18.43392 18.37665 0.934576 Roumanie Dependent Variable: KCT Method: Least Squares Date: 01/14/12 Time: 15:51 Sample (adjusted): 1996Q1 2008Q4 Included observations: 52 after adjustments ICT=C(1)+C(2)*(-B) C(1) C(2) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. -95.51311 0.768497 88.78337 0.044668 -1.075799 17.20450 0.2872 0.0000 0.855489 0.852599 459.5263 10558223 -391.5353 295.9947 0.000000 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat 342 968.0577 1196.906 15.13597 15.21102 15.16474 1.997723 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Slovénie Dependent Variable: KTOTAL Method: Least Squares Date: 01/14/12 Time: 15:58 Sample (adjusted): 1995Q2 2008Q4 Included observations: 55 after adjustments ITOTAL=C(1)+C(2)*(-B(-1)) C(1) C(2) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. 348.8967 1.117595 68.50393 0.317655 5.093090 3.518261 0.0000 0.0009 0.189332 0.174036 437.3599 10138034 -411.4646 12.37816 0.000900 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat 471.5273 481.2363 15.03508 15.10807 15.06330 1.603232 Slovaquie Dependent Variable: KIDE Method: Least Squares Date: 01/14/12 Time: 16:10 Sample (adjusted): 1999Q1 2008Q4 Included observations: 40 after adjustments IIDE=C(1)+C(2)*(-B) C(1) C(2) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. 250.0858 0.417416 137.0433 0.194947 1.824867 2.141175 0.0759 0.0387 0.107659 0.084177 556.6666 11775355 -308.6103 4.584631 0.038735 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat 343 475.0000 581.6870 15.53052 15.61496 15.56105 1.972381 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Annexe 2 : équation économétrique (2) Pour des raisons de simplicité dans la compréhension des résultats, le test le plus significatif par pays est présenté. Bulgarie Dependent Variable: RF Method: Least Squares Date: 01/14/12 Time: 16:31 Sample (adjusted): 1997Q4 2008Q4 Included observations: 45 after adjustments RF=C(1)+C(2)*(B(-2)) C(1) C(2) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. 97.61577 -0.230117 107.0234 0.117444 0.912098 -1.959373 0.3668 0.0566 0.081964 0.060615 568.9651 13920013 -348.3012 3.839144 0.056573 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat 225.5044 587.0346 15.56894 15.64924 15.59888 1.995484 République Tchèque Equation (2) non significative. Estonie Dependent Variable: RF Method: Least Squares Date: 01/14/12 Time: 16:39 Sample (adjusted): 1995Q3 2008Q4 Included observations: 54 after adjustments RF=C(1)+C(2)*(B(-2)) C(1) C(2) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. 4.926435 -0.173305 21.19152 0.069932 0.232472 -2.478192 0.8171 0.0165 0.105629 0.088430 103.9199 561566.3 -326.3592 6.141434 0.016489 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat 344 44.03889 108.8438 12.16145 12.23512 12.18986 2.773486 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Hongrie Dependent Variable: RF Method: Least Squares Date: 01/14/12 Time: 16:41 Sample (adjusted): 1995Q2 2008Q4 Included observations: 55 after adjustments RF=C(1)+C(2)*(B(-1)) C(1) C(2) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. -395.2765 -0.648231 335.0298 0.258641 -1.179825 -2.506293 0.2433 0.0153 0.105961 0.089092 1227.905 79910725 -468.2415 6.281503 0.015304 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat 334.7018 1286.552 17.09969 17.17269 17.12792 1.587053 Lituanie Equation (2) non significative. Lettonie Dependent Variable: RF Method: Least Squares Date: 01/14/12 Time: 16:44 Sample (adjusted): 1995Q2 2008Q4 Included observations: 55 after adjustments RF=C(1)+C(2)*(B) C(1) C(2) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. -1.077209 -0.170013 26.97236 0.054257 -0.039938 -3.133462 0.9683 0.0028 0.156301 0.140382 146.1367 1131864. -351.1728 9.818581 0.002814 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat Pologne Equation (2) non significative. Roumanie Equation (2) non significative. 345 56.63455 157.6182 12.84265 12.91564 12.87087 1.453904 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Slovénie Dependent Variable: RF Method: Least Squares Date: 01/14/12 Time: 16:49 Sample (adjusted): 1995Q2 2008Q4 Included observations: 55 after adjustments RF=C(1)+C(2)*(B) C(1) C(2) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. 21.65169 0.102594 5.701078 0.024380 3.797823 4.208180 0.0004 0.0001 0.250447 0.236304 35.80342 67939.91 -273.8154 17.70878 0.000100 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat 8.890909 40.96985 10.02965 10.10264 10.05788 2.193911 Slovaquie Dependent Variable: RF Method: Least Squares Date: 01/14/12 Time: 16:51 Sample (adjusted): 1999Q1 2008Q4 Included observations: 40 after adjustments RF=C(1)+C(2)*(B) C(1) C(2) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. 848.8323 1.161490 284.5966 0.404845 2.982580 2.868972 0.0050 0.0067 0.178041 0.156410 1156.025 50782983 -337.8414 8.231001 0.006689 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat 346 222.9925 1258.640 16.99207 17.07651 17.02260 1.937876 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Annexe 3 : équation économétrique (3) Pour des raisons de simplicité dans la compréhension des résultats, le test le plus significatif par pays est présenté. Bulgarie Dependent Variable: KTOTALPIB Method: Least Squares Date: 04/03/12 Time: 11:38 Sample (adjusted): 1998Q1 2008Q4 Included observations: 44 after adjustments ITOTAL=C(1)+C(2)*(PIB)+C(3)*(R2)+C(4)*(TC2-P1)+C(5)*(IEURO-P1) C(1) C(2) C(3) C(4) C(5) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. 23.40249 2.423219 -10.93201 -1.117798 -1.277201 7.868243 1.437906 2.108173 0.357885 0.365743 2.974297 1.685242 -5.185539 -3.123344 -3.492073 0.0050 0.0999 0.0000 0.0032 0.0011 0.601346 0.560458 9.824271 3764.136 -160.3131 14.70729 0.000000 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat 16.94513 14.81837 7.514234 7.716983 7.589423 1.964411 République Tchèque Dependent Variable: KCTPIB Method: Least Squares Date: 04/03/12 Time: 11:43 Sample (adjusted): 1999Q1 2008Q4 Included observations: 40 after adjustments KCT=C(1)+C(3)*(R2)+C(4)*(TC2-P1)+C(5)*(IEURO-P1) C(1) C(3) C(4) C(5) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. 19.48655 -12.89378 -0.243396 -0.216506 8.840555 6.072720 0.127111 0.119668 2.204222 -2.123229 -1.914831 -1.809226 0.0340 0.0407 0.0633 0.0785 0.169440 0.100226 4.214512 639.4360 -112.1917 2.448075 0.079465 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat 347 1.519977 4.443044 5.809584 5.978472 5.870649 1.982413 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Estonie Dependent Variable: KCTPIB Method: Least Squares Date: 04/03/12 Time: 11:55 Sample: 1995Q1 2008Q4 Included observations: 56 KCT=C(1)+C(3)*(R2)+C(4)*(TC2-P1)+C(5)*(IEURO-P1) C(1) C(3) C(4) C(5) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. 36.42804 -19.75559 1.812136 -1.706348 7.202610 5.468356 0.795846 0.797544 5.057616 -3.612711 2.276992 -2.139505 0.0000 0.0007 0.0269 0.0371 0.226015 0.181362 7.653750 3046.155 -191.3565 5.061595 0.003763 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat 8.900294 8.459183 6.977018 7.121686 7.033105 1.570196 Hongrie Dependent Variable: KPFPIB Method: Least Squares Date: 04/03/12 Time: 12:00 Sample: 1995Q1 2008Q4 Included observations: 56 KPF=C(1)+C(4)*(TC2-P1)+C(5)*(IEURO-P1) C(1) C(4) C(5) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. 4.165634 0.396042 -0.446393 1.345692 0.213847 0.217721 3.095534 1.851983 -2.050302 0.0031 0.0696 0.0453 0.080360 0.045657 6.053689 1942.299 -178.7563 2.315623 0.108611 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat 348 2.139082 6.196804 6.491296 6.599797 6.533361 1.979231 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Lituanie Dependent Variable: KCTPIB Method: Least Squares Date: 04/03/12 Time: 12:01 Sample (adjusted): 1995Q2 2008Q4 Included observations: 55 after adjustments KCT=C(1)+C(2)*(PIB)+C(3)*(R2)+C(4)*(TC2-P1)+C(5)*(IEURO-P1) C(1) C(2) C(3) C(4) C(5) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. 18.06532 0.420346 -9.294533 -0.781775 0.584661 3.852396 0.215407 2.079596 0.273018 0.304675 4.689372 1.951404 -4.469395 -2.863458 1.918966 0.0000 0.0566 0.0000 0.0061 0.0607 0.424254 0.378194 4.927480 1214.003 -163.1361 9.210969 0.000012 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat 5.999546 6.248814 6.114040 6.296525 6.184609 1.392665 Lettonie Dependent Variable: KTOTALPIB Method: Least Squares Date: 04/03/12 Time: 12:03 Sample (adjusted): 1995Q2 2008Q4 Included observations: 55 after adjustments KTOTAL=C(1)+C(2)*(PIB)+C(3)*(R2)+C(4)*(TC2-P1)+C(5)*(IEURO-P1) C(1) C(2) C(3) C(4) C(5) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. 30.69356 1.865327 -18.55723 -2.594793 2.964664 6.883188 0.530385 3.741331 0.874924 0.950461 4.459207 3.516928 -4.960060 -2.965736 3.119185 0.0000 0.0009 0.0000 0.0046 0.0030 0.405061 0.357466 11.69194 6835.074 -210.6601 8.510555 0.000026 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat 349 18.88037 14.58608 7.842185 8.024669 7.912753 1.533230 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Pologne Dependent Variable: KCTPIB Method: Least Squares Date: 04/03/12 Time: 12:04 Sample (adjusted): 2000Q1 2008Q4 Included observations: 36 after adjustments KCT=C(1)+C(2)*(PIB)+C(3)*(R2)+C(4)*(TC2-P1)+C(5)*(IEURO-P1) C(1) C(2) C(3) C(4) C(5) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. -1.410114 1.183183 -1.404652 -1.189174 1.000697 2.533623 0.375926 0.702973 0.375324 0.395920 -0.556560 3.147381 -1.998159 -3.168394 2.527522 0.5818 0.0036 0.0545 0.0034 0.0168 0.416131 0.340793 2.993715 277.8322 -87.86476 5.523524 0.001778 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat 1.827157 3.687224 5.159153 5.379086 5.235916 1.528148 Roumanie Dependent Variable: KPFPIB Method: Least Squares Date: 04/03/12 Time: 12:05 Sample (adjusted): 2000Q2 2008Q4 Included observations: 35 after adjustments KPF=C(1)+C(2)*(PIB)+C(4)*(TC2-P1)+C(5)*(IEURO-P1) C(1) C(2) C(4) C(5) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. -1.793784 0.339235 -0.174204 0.212200 1.026715 0.137154 0.094966 0.115303 -1.747109 2.473377 -1.834390 1.840364 0.0905 0.0191 0.0762 0.0753 0.165062 0.084262 1.760701 96.10208 -67.33895 2.042836 0.128261 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat 350 0.447706 1.839924 4.076511 4.254265 4.137872 2.102975 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Slovénie Dependent Variable: KPFPIB Method: Least Squares Date: 04/03/12 Time: 12:07 Sample (adjusted): 1998Q1 2007Q1 Included observations: 37 after adjustments KPF=C(1)+C(2)*(PIB)+C(3)*(R2)+C(4)*(TC2-P1)+C(5)*(IEURO-P1) C(1) C(2) C(3) C(4) C(5) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. -2.137425 -1.287698 -0.924075 -0.905711 0.870492 2.419526 0.673622 0.495187 0.520315 0.451197 -0.883406 -1.911604 -1.866115 -1.740698 1.929294 0.3836 0.0649 0.0712 0.0913 0.0626 0.309508 0.223197 3.044145 296.5382 -91.00400 3.585942 0.015893 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat -1.207895 3.453900 5.189405 5.407097 5.266152 2.274535 Slovaquie Dependent Variable: KIDEPIB Method: Least Squares Date: 04/03/12 Time: 12:10 Sample (adjusted): 1999Q1 2008Q4 Included observations: 40 after adjustments KIDE=C(1)+C(4)*(TC2-P1)+C(5)*(IEURO3-P1) C(1) C(4) C(5) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. 3.072636 -1.162414 1.330156 2.042636 0.598377 0.612205 1.504250 -1.942610 2.172730 0.1410 0.0597 0.0363 0.113616 0.065704 8.408467 2615.986 -140.3679 2.371323 0.107400 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat 351 5.878056 8.699104 7.168394 7.295060 7.214192 1.940516 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Annexe 4 : équation économétrique (4) Bulgarie Dependent Variable: CRISE Method: Least Squares Date: 02/01/12 Time: 21:46 Sample (adjusted): 1997Q4 2008Q4 Included observations: 45 after adjustments CRISE=C(1)+C(2)*(IPF) C(1) C(2) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. -0.894567 -0.001864 0.170371 0.000922 -5.250712 -2.022353 0.0000 0.0494 0.086853 0.065617 1.065176 48.78782 -65.67064 4.089912 0.049388 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat -0.769691 1.101943 3.007584 3.087880 3.037518 2.161945 République Tchèque Dependent Variable: CRISE Method: Least Squares Date: 02/01/12 Time: 22:11 Sample (adjusted): 2000Q1 2008Q4 Included observations: 36 after adjustments CRISE=C(1)+C(2)*(ITOTAL)+C(3)*(IEUROJ(-3)) C(1) C(2) C(3) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. 1.187737 -0.000306 -0.467541 0.744270 0.000113 0.228115 1.595842 -2.699798 -2.049587 0.1201 0.0109 0.0484 0.276955 0.233134 1.230319 49.95158 -56.97742 6.320151 0.004745 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat 352 -0.771769 1.404940 3.332079 3.464039 3.378136 1.722406 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Estonie Dependent Variable: CRISE Method: Least Squares Date: 02/01/12 Time: 21:54 Sample (adjusted): 1996Q2 2008Q4 Included observations: 51 after adjustments CRISE=C(1)+C(2)*(ITOTAL)+C(3)*(IEURO12M) C(1) C(2) C(3) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. 0.772569 -0.001096 -0.439300 0.683709 0.000486 0.171484 1.129967 -2.256054 -2.561751 0.2641 0.0287 0.0136 0.191086 0.157382 1.196728 68.74360 -79.97910 5.669419 0.006161 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat -1.244522 1.303707 3.254082 3.367719 3.297506 2.242261 Hongrie Dependent Variable: CRISE Method: Least Squares Date: 02/02/12 Time: 22:02 Sample (adjusted): 1996Q2 2008Q4 Included observations: 51 after adjustments CRISE=C(1)+C(2)*(IPF) C(1) C(2) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. -0.295922 -0.000429 0.150338 0.000116 -1.968377 -3.708447 0.0547 0.0005 0.219156 0.203220 1.033772 52.36554 -73.03966 13.75258 0.000532 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat 353 -0.446418 1.158125 2.942732 3.018489 2.971681 1.569922 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Lituanie Dependent Variable: CRISE Method: Least Squares Date: 02/04/12 Time: 10:55 Sample (adjusted): 1996Q2 2009Q1 Included observations: 52 after adjustments CRISE=C(1)+C(2)*(IIDE(-1))+C(3)*(IEURO1M(-1)) C(1) C(2) C(3) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. 0.058053 0.003335 -0.409451 0.760120 0.001359 0.202287 0.076373 2.454345 -2.024106 0.9394 0.0177 0.0484 0.163844 0.129716 1.448272 102.7771 -91.49908 4.800765 0.012475 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat -0.905973 1.552456 3.634580 3.747152 3.677737 2.269078 Lettonie Dependent Variable: CRISE Method: Least Squares Date: 02/04/12 Time: 11:16 Sample (adjusted): 1996Q2 2009Q2 Included observations: 53 after adjustments CRISE=C(1)+C(2)*(IIDE(-2)) C(1) C(2) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. -0.201203 -0.003780 0.286777 0.001624 -0.701600 -2.328436 0.4861 0.0239 0.096091 0.078367 1.424691 103.5169 -92.94398 5.421616 0.023891 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat 354 -0.689308 1.484026 3.582792 3.657142 3.611383 1.491916 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Pologne Dependent Variable: CRISE Method: Least Squares Date: 02/04/12 Time: 11:54 Sample (adjusted): 2000Q2 2008Q4 Included observations: 35 after adjustments CRISE=C(1)+C(2)*(IPF)+C(3)*(IEUROJ) C(1) C(2) C(3) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. 1.536618 -0.000389 -0.517506 0.937831 0.000138 0.276388 1.638480 -2.814166 -1.872385 0.1111 0.0083 0.0703 0.219740 0.170973 1.447488 67.04712 -61.03868 4.505978 0.018873 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat -0.292317 1.589757 3.659353 3.792669 3.705374 1.436845 Roumanie Dependent Variable: CRISE Method: Least Squares Date: 02/04/12 Time: 17:29 Sample (adjusted): 1996Q2 2008Q4 Included observations: 51 after adjustments CRISE=C(1)+C(2)*(IPF) C(1) C(2) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. -0.502940 -0.002415 0.225526 0.000752 -2.230070 -3.211108 0.0304 0.0023 0.173849 0.156989 1.585413 123.1632 -94.84883 10.31121 0.002336 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat 355 -0.630463 1.726736 3.797993 3.873751 3.826943 1.435268 Crises financières et fondamentaux macroéconomiques : une relation ambivalente Slovénie Dependent Variable: CRISE Method: Least Squares Date: 02/04/12 Time: 17:50 Sample (adjusted): 1996Q2 2008Q4 Included observations: 51 after adjustments CRISE=C(1)+C(2)*(ITOTAL) C(1) C(2) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. -0.777729 0.001178 0.285248 0.000410 -2.726502 2.871682 0.0089 0.0060 0.144053 0.126585 1.420029 98.80768 -89.23028 8.246556 0.006016 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat -0.190420 1.519452 3.577658 3.653416 3.606607 2.015279 Slovaquie Dependent Variable: CRISE Method: Least Squares Date: 02/05/12 Time: 09:59 Sample (adjusted): 1999Q4 2009Q3 Included observations: 40 after adjustments CRISE=C(1)+C(2)*(ICT(-3))+C(3)*(IEURO12M(-2)) C(1) C(2) C(3) R-squared Adjusted R-squared S.E. of regression Sum squared resid Log likelihood F-statistic Prob(F-statistic) Coefficient Std. Error t-Statistic Prob. -2.205472 0.000513 0.456603 0.780610 0.000244 0.213471 -2.825319 2.100420 2.138942 0.0076 0.0426 0.0391 0.192323 0.148665 1.373932 69.84446 -67.90537 4.405190 0.019226 Mean dependent var S.D. dependent var Akaike info criterion Schwarz criterion Hannan-Quinn criter. Durbin-Watson stat 356 -0.493263 1.489069 3.545268 3.671934 3.591067 1.748584