Capacités - Espace Educatif - Rennes

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Dossiers de l’EPS de l’Académie de Rennes
N°1 OCTOBRE 2009
LES CAPACITÉS AU CŒUR DU PROCESSUS D’APPRENTISSAGE ET D’ÉVALUATION
Jacques Salaün
________________________________________________________________________
Introduction :
possibilité d’anticiper sur la direction par observation de
l’orientation de l’adversaire……
Plus concrètement, les deux exemples ci-dessous
propose une articulation compétence / capacités /
connaissances en opérant des choix dans les acquisitions
visées pour deux niveaux de compétence dans la même
activité physique :
Pour apprendre, un élève devrait de façon simultanée,
s’investir dans l’action et réfléchir à sa stratégie pour
réaliser et réussir ses apprentissages (Voir préambule).
Dans ces trois domaines, l’élève sollicite alors ses
capacités pour accéder à des compétences attendues.
Mais les mêmes capacités sont impliquées dans plusieurs
compétences. C’est là que réside leur fondamentalité :
elles sont réexploitables dans différents contextes.
Le but de cet article est donc de montrer que ce sont
bien les capacités qui sont au cœur de l’acte
d’apprentissage. Parce qu’en les articulant, l’élève
devient compétent, mais surtout parce qu’elles sont
transversales et par conséquent permettent à l’individu
de s’adapter à de nouvelles situations complexes.
Se pose alors tout naturellement la question de
l’évaluation avec son double objectif de déterminer au
mieux les besoins des élèves et d’en faire retour à ces
derniers. Il s’agira donc ici d’envisager celle-ci dans sa
version formative et formatrice, et non sommative ou
certificative.
Ces évaluations soulèvent des questions auxquelles nous
tenterons d’apporter des éléments de réponses : peut-on
observer une capacité ? Evalue-t-on une capacité de
manière isolée ? Quels outils utiliser ? Quelles capacités
évaluer prioritairement dans une situation complexe ?
Des exemples complets et concrets permettront de
mettre en évidence deux dimensions fondamentales
dans la recherche d’acquisition de capacités : le niveau
de développement et le degré d’adaptabilité. Le point de
vue ici défendu est d’imaginer des situations d’évaluation
permettant de situer l’élève sur ces deux axes pour
déterminer ses besoins et l’engager dans des
apprentissages porteur de sens et de progrès.
Volley-ball – classe de troisième – niveau 1 :
Compétence attendue :
S'engager seul dans la recherche du gain de la rencontre
en construisant stratégiquement le renvoi et utiliser la
largeur du terrain afin de mettre l'adversaire en
difficulté, en cherchant à minimiser les pertes de balle
directes et en s'appliquant dans le travail d'observation
(pour le rendre utilisable)
Capacités ciblées :
- Lire des trajectoires de balles montantes et lentes
- Contrôler force et direction dans la frappe d'une balle
arrivant haute et lentement
- Ressentir l'action exercée sur la balle
- Coordonner des actions des bras et des jambes
- Décider et mettre en œuvre une stratégie
- Apprécier ses actions par rapport à des critères
d’efficacité
- S'engager avec l'intention nécessaire au progrès dans
l'activité
Connaissances à construire :
- La vigilance pour intervenir (appuis dynamiques pour
réagir vite)
- Le rapport entre l’orientation de l’adversaire au
moment de la frappe et la direction de celle-ci.
- Le dosage de la frappe en fonction de son énergie lors
du contact
- Le choix de la touche de balle en fonction de sa
localisation par rapport à soi (à 10 doigts les balles
arrivant au-dessus des épaules, en manchette endessous)
- Le contrôle sensitif du contact à 10 doigts
- La surface de réception en manchette
- La simultanéité de la poussée des bras et des jambes (si
l'on veut envoyer la balle haut et/ou loin).
- Les possibilités stratégiques pour déséquilibrer
l’adversaire : la fixation de l’adversaire pour pouvoir
ensuite le déséquilibrer ; la construction de fausses
informations pour surprendre ; le déséquilibre spatial ou
temporel de l’adversaire
1.Pourquoi mettre les capacités au
cœur du processus d’apprentissage ?
Devenir compétent, c’est mobiliser des capacités et des
connaissances pour répondre à des situations complexes.
Pour acquérir des compétences, l’élève a donc besoin de
faire émerger des capacités, de les développer et
d’intégrer les connaissances nécessaires pour cela.
Dans les activités de balle, la capacité à lire des
trajectoires est fondamentale. Elle nécessite de
construire un certain nombre de connaissances comme la
perception de la hauteur de la trajectoire ou encore la
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N°1 OCTOBRE 2009
- La précision des indices d'efficacité individuelle (le
résultat de chaque action)
- L’intention d’aller à la rencontre de la balle plutôt que
l'attendre
- La volonté de ne pas laisser tomber une balle au sol
sans essayer de la toucher
opérationnelles dans un contexte défini et complexe,
ainsi que dans des contextes proches.
Lire des trajectoires est nécessaire dans toutes les
activités duelles mettant en jeu un mobile (balle, ballon,
volant,…). Décider, mettre en œuvre et analyser les effets
d’une stratégie permet, quelle que soit l’APSA ou la
discipline, de s’engager dans une démarche de projet.
Contrôler ses émotions peut permettre de mieux gérer
des situations de stress liées à toutes sortes d’activités,
physiques ou non.
Le caractère ré-exploitable des capacités est ici mit en
lumière.
Elles disposent d’un caractère fondamentalement
transversal puisqu’elles se veulent ré-investissables dans
différents contextes :
- Entre les différentes disciplines (plus particulièrement le
domaine de la pensée et de l’investissement)
- Entre les APSA (dans les 3 domaines de la réalisation, de
la pensée et de l’investissement)
Tout l’intérêt de mettre les capacités au cœur du
processus d’apprentissage repose sur la philosophie de
formation d’un individu capable de s’adapter tout au
long de sa vie. (voir élève physiquement éduqué). Cette
volonté de former des individus adaptables est par
ailleurs clairement affichée dans le texte relatif au socle
commun : « maîtriser le socle commun, c’est être
capable de mobiliser ses acquis dans des tâches et des
situations complexes, à l’école puis dans sa vie ».
Faire entrer les élèves dans un processus d’apprentissage
nécessite alors d’identifier les capacités à développer
pour acquérir des compétences attendues. Cibler les
capacités prioritaires permet :
- D’identifier plus précisément les besoins des élèves.
- De faire des choix par rapport à des moments dans le
développement des élèves (Voir article « Une
programmation réussie)
La vision du caractère adaptable et transversal des
capacités influence grandement la conception de
l’apprentissage puisqu’elle rejaillit directement sur la
construction de situations d’apprentissage ainsi (Voir
article « De la situation d’expression au contexte
d’apprentissage ») que sur les pratiques d’évaluation.
Volley-ball – classe de troisième – niveau 2 :
Compétence attendue :
S’organiser et mettre en place une stratégie collective
pour construire la situation favorable d'attaque du
terrain adverse par des balles placées ou accélérées, face
à une défense qui s'organise pour occuper l'espace, et en
respectant les rôles d'arbitres et d'observateurs
Capacités ciblées :
- Lire des trajectoires de balles tendues et rapides
- Contrôler force et direction dans la frappe d'une balle
arrivant vite
- Se situer dans l'espace (par rapport au terrain et à ses
partenaires)
- Décider et mettre en place une stratégie collective
- Apprécier ses actions par rapport à des critères objectifs
et précis
- Coopérer pour permettre à chacun de s'exprimer en
fonction de ses possibilités
Connaissances à construire :
- La position pré active d’attente ; la fixation visuelle sur
l’action du (des) bras de l’adversaire au moment de la
frappe
- L’anticipation du point de chute ou de rencontre avec la
balle
- L’orientation des segments au moment de la frappe
(vers l'endroit où l'on veut envoyer la balle)
- La zone de responsabilité individuelle en défense
- Les organisations défensives possibles pour en
appliquer une (avant/arrière ; côte à côte)
- La volonté de minimiser les pertes de balles pour
augmenter son efficacité individuelle
- Les codes de communication entre partenaires pour
définir les responsabilités dans la construction de
l’attaque
- Les codes de communication entre partenaires pour
définir les responsabilités dans la défense de son terrain
L’exemple ci-dessous décrit une articulation de situations
pouvant servir de support à l’évaluation. Il procède à des
choix de capacités prioritaires sur lesquelles l’enseignant
souhaiterait positionner ses élèves pour définir leurs
besoins. Pour resituer ces choix, on se reportera au
chapitre I illustrant ce qu’un élève doit apprendre et
articulant compétence / capacités / connaissance.
L’élève doit donc développer ses capacités s’il veut
devenir compétent. Les connaissances sont les éléments
nécessaires pour cela. Enrichir son éventail de capacités,
et donc acquérir des connaissances supplémentaires,
permet d’accéder à un niveau de compétence plus élevé.
La non acquisition d’une compétence peut être alors le
plus souvent liée à un déficit dans le champ des capacités
et/ou à les mobiliser et/ou à les articuler entre elles.
La compétence devient alors le lieu d’expression des
capacités, la preuve faite par l’élève que celles dont il
dispose sont réellement mobilisables, c’est à dire
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En Volley-ball :
Une stratégie pour marquer un (ou plusieurs) des points
du contrat est annoncée avant la rencontre et peut être
modifiée lors du temps mort de 30 secondes au milieu de
la rencontre. Chaque joueur ou équipe dispose d’un
coach-arbitre.
Les coach-arbitres notent les scores, la stratégie
annoncée, l’éventuelle modification lors du temps mort
et l’atteinte ou non de cet objectif sur la fiche ci-dessous.
La stratégie peut être puisée dans un premier temps à
l’intérieur d’un répertoire proposé par l’enseignant.
Classe de troisième. Compétence attendue de niveau 1
ou 2 des programmes de collège applicable à la rentrée
2009.
Capacités ciblées ici prioritairement et par conséquent
devant données lieu à évaluation :
- Lire des trajectoires de balles montantes et lentes
(niveau1) ou tendues et rapides (niveau2)
- Mettre en place une stratégie individuelle (niveau 1)
ou collective (niveau 2)
- S'engager avec l'intention nécessaire au progrès dans
l'activité
Par exemple :
1.
Alterner droite / gauche jusqu’à la rupture
2.
Fixer l’adversaire sur un coté avant de
surprendre de l’autre coté
3.
Alterner droite / gauche pendant x échanges,
puis changer (ex : D/G/D/G/D/D)
4.
Donner une fausse information pour surprendre
(ex : orienter ses épaules vers la zone droite et jouer dans
la zone gauche)
5.
Prendre le risque d’attaquer (smasher) dès la
première réception
6.
Jouer lent (trajectoires hautes) puis accélérer
(trajectoires tendues ou descendantes)
7.
Renvoi direct dès la réception du service
8.
……
Objectif pour l’élève : gagner le match en marquant
directement au sol, sans que l’adversaire ne touche la
balle
Conditions d’obtention de la victoire : remplir son contrat
de points directement au sol
Le score « normal » de la partie est également tenu pour
départager les joueurs en cas d’égalité.
Le contrat est de 5 points directement au sol. Le premier
à avoir rempli son contrat est déclaré vainqueur, quel
que soit le score à ce moment de la partie.
Si au bout d’un temps donné, aucun joueur n’a rempli
son contrat, celui qui mène au nombre de points contrat
est déclaré vainqueur. En cas d’égalité, le gagnant est
celui qui mène au score.
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JOUEUR (S) :
Adversaires
Nombre de points
Nombre de « contrat »
Résultat final
123Stratégie annoncée
Validation
Stratégie modifiée
Validation
Adv 1
Adv 2
Adv 3
Dispositif :
Trois phases successives :
Les rencontres peuvent éventuellement se dérouler en
montante / descendante par poules. A l’issue des
matchs, le 1er de la poule monte, le 2ème reste, le 3ème
descend. Pour le passage du terrain A au B, les deux 1er
montent et forment une équipe.
A-
1 contre 1 sur un terrain plus large que
long ; 3 zones ; aucun point marqué balle « directement
au sol » dans la zone centrale ; filet au plus haut possible.
(Voir schéma ci-dessus)
Cette succession de situations, engage les élèves dans un
apprentissage visant les capacités et connaissances
ciblées dans des contextes variés : un contre un ; deux
contre deux ; terrain et zone de point contrat plus ou
moins grands. Elle permet dans un même temps
d’effectuer une évaluation du niveau d’acquisition de ces
mêmes capacités répertoriées dans les trois domaines de
la réalisation, de la pensée et de l’investissement.
Mais avant d’aborder plus précisément cette question de
l’évaluation, un détour par la caractéristique
fondamentale des champs capacitaires, liée à la notion
de compétence s’impose.
B2 contre 2 sur un terrain de même
configuration qu’en A mais plus long.; aucun point
marqué balle « directement au sol » dans la zone
centrale ; filet à 2m35-2m40.
C2 contre 2 sur un terrain de même
configuration qu’en B mais encore un peu plus long et un
peu plus large ; aucune zone délimitée ; point marqué
balle « directement au sol » n’importe où sur le terrain ;
filet à 2m20-2m30.
2.Capacités et adaptabilité
Les élèves jouent plusieurs matchs en A, puis plusieurs
matchs en B et en C.
Les élèves en difficulté en A peuvent y rester dans la 2ème
phase en changeant d’adversaires. Même chose pour le
passage de B en C.
Les critères pour repérer les élèves en difficulté sont au
nombre de deux et se réfèrent à deux capacités (lire des
trajectoires et s’engager avec l’intention nécessaire) :
- Une grande difficulté à venir au point de chute de la
balle pour renvoyer
- Un nombre important de points « contrat » subis
La vision présentée depuis le début de cet article fait
apparaître une certitude : plus un individu disposera de
capacités, plus il pourra s’adapter à une variété de
situations.
Prenons un exemple dans un champ autre que celui de
l’EPs pour bien comprendre les enjeux :
En menuiserie, on peut être compétent pour fabriquer
un type de meuble. Pour cela, il faut disposer des
capacités à représenter un objet dans l’espace pour
établir les plans de celui-ci, à assembler ses différentes
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parties, à utiliser différentes machines, … Les
connaissances nécessaires sont relatives à la
représentation graphique pour établir les plans, aux
techniques d’assemblage, aux réglages des différentes
machines à utiliser, aux règles de sécurité concernant
leur utilisation,……Les capacités, enrichies des
connaissances complémentaires, permettront au
bricoleur de s’adapter à de nouvelles machines, d’utiliser
de nouvelles techniques d’assemblage, …… permettant
alors d’élargir son champ de compétence à la fabrication
d’autres types de meubles.
On peut aisément faire, en EPs, le parallèle avec les
APSA. Un élève peut disposer d’un certain niveau de
compétence dans les sports collectifs, à effectif (par
exemple en 2 contre2) et terrain réduits. Pour ce faire, il
faut mobiliser des capacités à lire les trajectoires, à
coordonner des déplacements avec des conduites de
balle, à mettre en place une stratégie, à coopérer à 2, ……
Les connaissances associées sont liées à l’organisation de
la prise d’informations, aux transferts d’appuis, aux
différentes stratégies possibles, aux communications
entre partenaires, …… Enrichir ses capacités et ses
connaissances permettra de prendre davantage
d’informations (plus de partenaires, trajectoires variées,
……), d’enrichir ses possibilités de déplacements, de
mettre en place un nombre croissant de stratégies,
d’exploiter au mieux les différences au sein de l’équipe,
…… L’élève acquiert alors un niveau supérieur de
compétence dans diverses activités collectives aux
contraintes de jeu variées (nombre de joueur, taille du
terrain, contraintes réglementaires, ……).
contextes auxquels ils peuvent être confrontés, dans le
cadre scolaire, mais aussi tout au long de sa vie.
Si le développement des capacités permet à l’individu
d’être plus adaptable et plus compétent dans de
multiples domaines, il devient alors essentiel pour
l’enseignant d’être capable d’évaluer les acquisitions de
ses élèves dans ce champ capacitaire afin de mieux
orienter le travail à mener et les engager dans le
processus d’apprentissage.
Les capacités deviennent alors les déterminants, les
piliers du projet d’acquisition.
Acquérir des compétences revient à développer et
articuler des capacités. On voit bien ici que cette
approche permet de clarifier ce qu’il y a à apprendre, à la
fois pour l’enseignant, pour l’élève, mais aussi pour
l’institution et les familles.
Pour autant, encore faut-il pouvoir évaluer et identifier
les capacités prioritaires à développer à un moment
donné. Bien des écueils persistent.
3.Ecueils à lever pour évaluer les
capacités
Il faut préciser ici la conception qui anime cette réflexion.
L’idée centrale est que l’évaluation doit servir en priorité
à aider les élèves dans leurs apprentissages. Le travail de
l’enseignant consiste alors à fournir à l’individu des
informations utiles, en lui révélant ses points faibles sur
lesquels il doit travailler, mais aussi ses points forts pour
qu’il puisse s’y appuyer. Lui faire identifier les domaines
où il est efficace et ceux où il ne l’est pas. Il semble
important que ces retours d’informations soient
déconnectés d’un classement entre les élèves. Ils doivent
relever davantage de suggestions concrètes concernant
ce sur quoi il faudra se focaliser pour progresser. Les (ou
la) situations d’évaluation doivent prendre en compte
cette orientation. Evaluation et apprentissage sont donc
entremêlés.
Plusieurs écueils sont à prendre en considération.
A nouveau est souligné ici le caractère transversal des
capacités. Celles-ci doivent pouvoir être exploitées dans
différents contextes et permettre ainsi à l’individu lui
même de s’adapter à des variétés de situations, de les
mettre en œuvre dans différentes compétences et de fait
élargir son champ de compétence. Parallèlement, un
haut niveau de développement des capacités permet
d’accéder à des niveaux de compétence élevés. En clair :
- Plus le nombre de contextes d’exploitation d’une
capacité est important, plus celle-ci offrira à l’individu la
possibilité de s’adapter à de nouvelles situations.
- Plus une capacité aura un haut degré de
développement, plus l’individu pourra disposer d’un
large éventail de compétences plus pointues.
Exemple :
Plus un individu disposera de la capacité à lire des
trajectoires rapides, tendues, paraboliques, freinées,
accélérées…, plus il pourra acquérir des compétences en
VB, Ultimate, badminton, tennis de table,… et au-delà,
dans des situations inédites, dans des situations de la vie
quotidienne : conduite automobile, découverte de
nouveaux jeux de balle, réaction à la chute d’un objet…
En tout cas, c’est le pari qui est fait ici.
Chaque individu exploitant ses capacités de manière
singulière, il s’agit donc de donner aux individus les
possibilités de s’adapter personnellement aux différents
Les deux premiers sont d’ordre pratique :
- Une capacité n’est pas directement observable.
Ce sont les actions que produisent les élèves qui
traduisent la présence ou non d’une capacité et le degré
de développement de celle-ci. Comment évaluer la
capacité à lire des trajectoires autrement qu’en
observant les actions et les procédures misent en œuvre
par les élèves dans des situations concrètes ?
Encore faut-il être bien conscient qu’il n’y a jamais de
situation mettant en jeu une seule capacité. Nous ne
sommes pas dans le cadre d’une étude expérimentale en
laboratoire.
Par exemple en volley-ball : Sauf à perdre tout sens de
l’activité, la lecture de trajectoire d’une balle n’est pas
dissociable de la capacité à coordonner ses actions pour
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renvoyer celle-ci. Pour cela, il n’existe pas une réponse
idéale
unique,
ce
que
défend
l’option
comportementaliste. Ce n’est pas ici la vision de
l’apprentissage défendue, mais plutôt celle d’une
construction par l’individu lui-même de ses
connaissances, capacités et compétences. (voir cadre
général)
Il ne s’agit pas d’effectuer les actions idéales pour
effectuer une réception de service en VB ou pour
exécuter un « top spin » en tennis de table, mais
d’utiliser ses connaissances et capacités personnelles
pour le faire lorsque la situation s’y prête, à sa manière,
lorsque les conditions spécifiques à chacun sont remplies
pour engager l’action.
Par exemple, en le guidant, laisser chaque élève
déterminer les conditions qu’il estime être favorable
pour lui pour déclencher une attaque smashée en tennis
de table (hauteur de la balle, vitesse de la balle,
placement de l’élève par rapport à celle-ci…).
puiser dans un répertoire de réponses programmées »
(P. PERRENOUD). D’où la nécessité de concevoir des
situations d’apprentissage comme d’évaluation qui
mettent en jeu une articulation de capacités. Nos deux
élèves pourront donc être évalués et travailler sur des
situations similaires, comme celles proposées plus haut.
Ce sont les connaissances qui sont à construire pour
développer leurs capacités respectives qui seront
différentes et sur lesquelles il faudra engager les élèves.
Où l’on voit bien la complexité de l’acte d’évaluation
puisqu’il s’agit d’identifier dans la pratique de nos élèves
ce qui fait obstacle à la construction de compétences, et
que la seule réussite ou non de la situation ne suffit plus.
Deux autres écueils relèvent de la pratique même de
l’évaluation.
Disposer des outils nécessaires pour une évaluation
fonctionnelle
Il s’agit de permettre, dans des situations complexes,
d’extraire les informations qui permettront d’identifier
les besoins des élèves en termes de capacités à
développer.
Nous l’avons constaté précédemment, le résultat ne
suffit pas. Il faut aussi relever les raisons de l’échec ou de
la réussite pour continuer de construire et de développer
des capacités.
Il faut également disposer d’outils permettant d’identifier
et d’évaluer les procédures mises en œuvre par les élèves
pour parvenir au résultat. Quelles procédures ? Quelles
pertinences ? Que révèlent-elles de l’activité de l’élève ?
Autant de question qui doivent être posées et qui
doivent trouver des éléments de réponse. Il est alors
facilement compréhensible qu’il n’est pas réaliste de
vouloir tout évaluer.
- Faire des choix et définir des priorités.
Lorsqu’une situation met en jeu plusieurs capacités, la ou
lesquelles semble-t-il judicieux de cibler ?
C’est sans doute à ce niveau que doit se préciser le projet
d’acquisition.
Tout n’est pas développable à tout moment. La
sempiternelle question de l’éternel débutant peut
trouver ici quelques éléments de réponse. Eviter le plus
possible de continuer à voir cet élève, qui d’année en
année semble ne pas évoluer, passe sans doute par
l’abandon de vouloir tout enseigner à tout moment et
par le souci de définir des capacités prioritaires à
développer à différents moments de la scolarité (Voir
article « Une programmation réussie), mais aussi de
l’année et du cycle.
Autrement dit, avant même de concevoir des
évaluations, il convient de définir clairement ce que l’on
souhaite voir développer et acquérir par nos élèves et
par conséquent imaginer ce qu’il va falloir chercher à
relever comme éléments significatifs dans leurs actions.
-
Une capacité doit s’évaluer, non de manière isolée,
mais dans des situations complexes.
Parce qu’est défendue ici une volonté de développer des
capacités plastiques nécessitant de penser l’articulation
entre plusieurs d’entre-elles, évitant par là même une
trop forte dépendance au contexte.
Tel élève peut parvenir au même résultat que tel autre
en compensant son faible développement de la capacité
à lire la trajectoire par la rapidité et la coordination de
ses actions pour se déplacer et frapper, et inversement. Il
convient alors, en s’appuyant sur les actions produites,
d’identifier les champs d’intervention, la ou les capacités
à cibler prioritairement pour tel ou tel élève. Notons au
passage que c’est le sens donné par les PPRE dans le
cadre du socle commun.
-
Par exemple en VB :
Deux élèves peuvent révéler un même constat d’échec
dans un type de situation duelle, mais pour différentes
raisons.
Le premier, parce qu’il éprouve de grosses difficultés à
lire les trajectoires dès lors que celles-ci sont trop
rapides, du fait qu’il ne parvient pas à localiser le point de
chute de la balle afin d’engager les actions pour aller à sa
rencontre.
Le deuxième, parce qu’alors qu’il est très capable
d’apprécier la trajectoire d’une balle, ne peut, dès que
celle-ci est trop rapide, coordonner suffisamment
rapidement les actions nécessaires pour se déplacer et
aller frapper.
Néanmoins, ce constat n’implique pas nécessairement de
faire travailler les élèves sur des situations différentes.
Comme il a déjà été précisé plus haut, il est important de
penser l’apprentissage comme une construction de
réponses adaptées et adaptables. « Une compétence
permet de faire face à une situation singulière et
complexe, de construire une réponse adaptée sans la
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Si l’on souhaite évaluer les besoins des élèves en terme
de capacités à développer, que peut-on, que doit-on
évaluer et comment ?
initial. Les capacités, moteurs de la compétence à
atteindre, sont alors différenciées entre les deux niveaux
selon deux axes :
4.Pistes pour l’évaluation des capacités
Le niveau de développement des capacités qui
représente, sur un axe vertical, la possibilité pour
l’individu de répondre, dans des situations, à des
difficultés élevées.
Le but est donc de cibler les capacités nécessaires à
l’atteinte d’une compétence pour définir le projet
d’acquisition en fonction des besoins des élèves. C’est
l’articulation compétence / capacités / connaissances qui
est ici à nouveau soulevée. Les deux exemples
préalablement décrits (Volley-ball collège, niveau 1 et 2 –
chapitre I) témoignent de cet emboîtement.
Le degré d’adaptabilité, que l’on peut positionner sur un
axe horizontal, et qui témoigne de la possibilité pour
l’individu d’exploiter ses capacités acquises dans des
situations variées et complexes.
La réalité nous oblige à reconnaître que les élèves d’une
même classe proposent la plupart du temps à
l’enseignant ces deux niveaux de pratique.
L’emboîtement compétence / capacités / connaissances
présenté ici permet de mieux appréhender ce que
chaque élève doit apprendre en fonction de son niveau
Ces deux niveaux peuvent être ainsi schématisés : des
élèves (A) et (B) peuvent être positionnés par rapport à
leur niveau de développement et d’adaptabilité respectif
dans une capacité donnée, ainsi que leur évolution
souhaitée
Niveau de développement
A
Evolution capacitaire recherchée
B
Niveau d’adaptabilité
Ces deux niveaux sont donc également à différencier lors
des situations supports de l’évaluation (Voir article :
« Les niveaux de compétences attendues des
programmes de collège »).
- Le niveau de développement.
Ce type d’évaluation s’effectuera en sollicitant une même
capacité dans des situations de plus en plus difficile, c’est
à dire mettant en jeu la dite capacité à différents degrés
de performance. Il est plus aisé de lire une trajectoire
lente et haute (niveau 1) que rapide, voir descendante
(niveau 2).
- Le degré d’adaptabilité.
Cette fois-ci, c’est la complexité et la variété des
situations présentées à l’élève et sa faculté de réexploiter ses capacités dans ces nouveaux contextes qui
témoigneront du caractère plastique des acquisitions.
Lire des trajectoires de même nature dans un contexte
d’affrontement individuel (niveau 1) ou collectif (niveau
2), avec des contraintes d’organisation, de placement ou
de marque augmente le nombre de capacités auquel
l’élève doit faire appel, nécessite de nouvelles
articulations entre elles et met donc en lumière le degré
de dépendance au contexte.
Toute la difficulté dans l’évaluation des capacités des
élèves réside donc dans la nécessité de tenir compte de
ces deux dimensions de façon concomitante.
Il faut donc concevoir la situation d’évaluation sous cette
double "focale". Elle doit à la fois être complexe et
solliciter plusieurs capacités, permettre d’identifier le
niveau de développement de celles qui sont ciblées par
l’enseignant et offrir un degré de complexification qui
révèlera le degré de dépendance au contexte. Par
conséquent, une situation unique d’évaluation de ce
type n’existe pas ! Ce qui est à mettre en place, c’est une
hiérarchisation de situations à l’intérieur desquelles les
élèves évolueront et pourront montrer leurs acquis.
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C’est ce que tente la situation présentée précédemment
mais aussi d’utiliser l’enchaînement des situations
comme outil d’apprentissage pour l’élève.
La hiérarchie de situations proposée plus avant sert de
support à l’évaluation. Les critères sont répertoriés dans
le tableau ci-dessous.
Il est alors nécessaire de définir des critères et des
indicateurs d’évaluation qui vont permettre d’identifier
les besoins des élèves au niveau des capacités ciblées,
Critères de l’évaluation par capacité :
Degré de développement
Degré d’adaptabilité
Justesse du déplacement vers la balle quelle que Constance de la justesse du déplacement quel
soit la qualité du renvoi
que soit l’adversaire (1c1) ou les adversaires et
le partenaire (2c2), ainsi que le terrain.
place une Conformité entre la stratégie annoncée et mise Modification de la stratégie si elle ne fonctionne
effectivement en œuvre
pas
avec Nombre de points « contrat »
Constance de l’engagement quelle que soit la
configuration de jeu
Constance des points « contrat »
Lire des trajectoires
Mettre en
stratégie
S’engager
l’intention
nécessaire
Les éléments en gras sont donc directement pris en charge par l’enseignant en observation directe. Les autres éléments
sont révélés par les relevés des fiches.
Critères
Indicateurs
Justesse du déplacement vers la balle quelle que soit la Le joueur est toujours en temps et en heure au point de
qualité du renvoi
rencontre avec la balle*
Constance de la justesse du déplacement quel que soit
l’adversaire (1c1) ou les adversaires et le partenaire (2c2),
ainsi que le terrain.
Conformité entre la stratégie annoncée et mise
effectivement en œuvre
Modification de la stratégie si elle ne fonctionne pas
Le changement de contexte n’influence que peu la justesse
du déplacement vers la balle*
Validation par le coach-arbitre de la stratégie annoncée par
le joueur
Modification annoncée et éventuellement suivi d’effet
(réussite après modification)
Nombre de points « contrat »
Plus il y a de points « contrat », plus le joueur s’engage avec
des intentions de jeu manifestes
Constance de l’engagement quelle que soit la configuration Attitudes de renoncement ou non en fonction des
de jeu
modifications de la configuration du jeu*
Constance des points « contrat »
Moins il y a de variations dans le nombre de points
« contrat », plus le joueur est constant dans son engagement
face aux modifications des conditions de jeu
* Les éléments d’appréciation peuvent apparaître subjectifs, mais à l’instar de P.PERRENOUD, l’enseignant doit « …
s’accorder à soi-même la confiance voulue pour établir un bilan de compétences fondé sur un jugement expert plutôt que
sur un barème… » (construire des compétences dès l’école – ESF – 1997).
Exemple d’organisation
On voit bien ici que le type de structure de situations
présentée est à la fois un lieu d’apprentissage comme
d’évaluation. Elle pourrait d’ailleurs dans ce sens être
apparentée à une structure (situation) de référence. « Au
lieu d’être imposée de l’extérieur, de temps en temps
durant l’année, l’évaluation devrait être incluse dans
l’environnement naturel de l’apprentissage. Dans la
mesure du possible, elle interviendrait « au vol », comme
partie intégrante de l’engagement naturel de l’individu
dans une situation d’apprentissage » (H. GARDNER – Les
intelligences multiples – 1993).
Il est en effet raisonnable de penser qu’un bon outil
d’évaluation permet aussi d’apprendre en situation. Les
élèves sont alors évalués dans un contexte porteur de
sens, qui concerne concrètement les problèmes qu’ils ont
à résoudre et par là même, motive leur engagement dans
l’apprentissage.
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Dossiers de l’EPS de l’Académie de Rennes
N°1 OCTOBRE 2009
Conclusion :
les acquis des premiers et permettre au second de
répondre au mieux à leurs besoins. Il convient donc de
proposer des situations d’évaluation qui vont dans le
sens de cette double focale.
Le principe à retenir, est qu’une situation unique pour cet
objectif n’est sans doute pas suffisante. C’est davantage
une hiérarchie de situations qui est à construire.
L’évolution de la difficulté rendant compte de la limite (le
niveau) de développement, la complexité croissante
(davantage de capacités à articuler) témoignant du degré
d’adaptabilité.
Dans sa recherche d’efficience, l’enseignant devra être
imaginatif à ce niveau pour situer les besoins de ses
élèves et mieux y répondre. Il est question ici de
différenciation, puisqu’il s’agit de déterminer ce que les
élèves devront apprendre pour devenir compétent,
chacun à leur manière. Peut être alors, cela contribuerat-il à atténuer la question récurrente de « l’éternel
débutant ».
Tout évaluateur se doit d’évaluer que ce qu’il enseigne
pour rendre compte des acquisitions de ses élèves. Mais
l’évaluation a aussi pour fonction de permettre la
détermination de ce que les élèves ont besoin
d’apprendre et de les renseigner sur ces besoins
personnels. Si l’on considère, comme cet article veut le
montrer, que les capacités sont au cœur de l’acte
d’apprentissage, alors, elles sont également au centre de
l’acte d ‘évaluation.
Enrichir ses capacités c’est, de façon concomitante,
accéder à un haut niveau de développement et un haut
degré d’adaptabilité de celles-ci. C’est ce qui peut
permettre à l’élève, s’il parvient à articuler ses
connaissances et capacités pour répondre à des
situations complexes, d’être performant et adaptable
dans de multiples contextes.
L’évaluation doit donc tenir compte de ces deux
dimensions pour renseigner l’élève et le professeur sur
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