05/09/08 P. 6 International ZONE EURO Jean-Claude Trichet a douché hier les espoirs de ceux qui comptaient sur une réduction rapide des taux d’intérêt. Pour le président de la Banque centrale européenne, les risques inflationnistes sont toujours présents et méritent de rester sous haute surveillance. La BCE continue de donner la priorité à la lutte contre l’inflation Tous droits réservés − Les Echos − 2008 L a Banque centrale européenne ne nie pas la réalité du ralentissement économique dans la zone euro. Son président, Jean-Claude Trichet, a même annoncé hier, à l’occasion de la réunion mensuelle du conseil des gouverneurs, la révision à la baisse de ses prévisions de croissance : la progression du PIB a été ramenée, en moyenne, à 1,4 % pour cette année (au lieu de 1,8 % en juin) et à 1,2 %, au lieu de 1,5 %, pour 2009. Mais son principal combat, il l’a redit hier, à Francfort, c’est l’inflation. Or cette dernière constitue à moyen terme une menace suffisante pour que les taux d’intérêt, relevés en juillet à 4,25 %, restent à leur niveau au cours des prochains mois. « Les taux d’inflation annuels devraient rester largement au-dessus des niveaux cohérents avec la stabilité des prix », a expliqué Jean-Claude Trichet dans son langage quelque peu technique, avant d’ajouter que « les risques à la hausse » pesant sur les prix prévalaient toujours. D’ailleurs, les prévisions d’inflation ont, elles aussi, été révisées à la hausse, de Les taux de la BCE La croissance dans la zone euro En % 5 4 Nouvelle prévision Ancienne prévision 5,25 Marginal Refinancement Dépôt 4,25 3,25 3 1,8% 1,4% 1,5% 1,2% 2 1 0 2005 2006 2007 4 sept. 08 2008 2009 idé Si la hausse des prix a marqué un décrochage en août, la BCE n’entrevoit le retour au chiffre mythique de 2 % qu’en 2010. 0,1 point, à 3,5 %, pour cette année et de 0,2 point, à 2,6 %, pour 2009. Même si la hausse des prix a marqué un décrochage au mois d’août (3,8 %, après 4 % en juillet), la BCE constate que ces chiffres restent très supérieurs à l’objectif de 2 % et n’entrevoit le retour à ce chiffre mythique qu’en 2010. D’ici là, le taux d’inflation devrait rester élevé, « se modérant seulement graduellement durant l’année 2009 ». Il a aussitôt ajouté que « la hausse des salaires s’est accélérée au cours des derniers trimestres alors que la progression de la productivité du travail s’est ralentie, ce qui se traduit par des hausses des coûts unitaires du travail » et a appelé, comme à chacune de ses interventions, les gouvernements et les partenaires sociaux à la modération sur les salaires. « Nous pensons que les prévisions de croissance de la BCE pour 2009 sont encore trop optimistes, et celles sur l’inflation trop agressives », compte tenu de la réduction attenduedes prix du pétrole,a commenté Maccario Aurelio, de la banque italienne UniCredit qui soupçonneainsila BCE de« tenter d’écarter les spéculations sur une réduction rapprochée des taux ». Les économistes pensent majoritairement qu’il faudra attendre le premier ou le deuxième trimestre 2009 pour voir la BCE relâcher la pressionsurles tauxd’intérêt.« Le prochain mouvement de la BCE sera quasi certainement une baisse », assure en revanche Sylvain Broyer, de Natixis. Petite inflexion dans le discours D’ailleurs, les « faucons » de la banque, comme l’Allemand Axel Weber, qui avaient déclaré récemment que les taux d’intérêt actuels étaient « accommodants » − donc susceptibles d’être durcis −, ont perdu du terrain. Ils ont été remis à leur place par le président Jean-Claude Trichet, qui a rappelé durant la conférence de presse qu’il était « le seul à parler au nom du conseil des gouverneurs ». Pour la banque UniCredit, la ligne de la majorité des gouverneurs est désormais « neutre », le niveau des taux étant jugé « adapté » à la donne conjoncturelle. Elle note toutefois une petite inflexion dans le discours de la banque centrale sur la masse monétaire et l’expansion du crédit, longtemps qualifiée de « vigoureuse ». Jean-Claude Trichet a estimé hier qu’elle montrait « des signes de modération ». La BCE semble s’être très prudemment mais clairement engagée sur la voie de l’assouplissement de sa politique. CATHERINE CHATIGNOUX i Retrouvez le discours de Jean-Claude Trichet et les prévisions de la BCE sur www.lesechos.fr/documents La Banque d’Angleterre ne baisse pas sa garde Préoccupation. Comme la BCE, la Banque d’Angleterre n’a pas jugé nécessaire, hier, de baisser le loyer de l’argent et a donc maintenu son principaltauxdirecteur à5 %.LePIB a pourtant stagné au deuxième trimestre outre-Manche et pourrait, selon les économistes, reculer aux troisième et quatrième trimestres. Labanquecentralebritanniques’inquiète toujours des pressions inflationnistes. Son rapport trimestriel sur l’inflation, publié le 13 août, estimait quelahaussedesprixpour- rait dépasser 5 % avant la fin 2008, soit bien au-delà de son objectif de 2 %. Malgré la baisse récente des cours des matières premières, en particulier du pétrole, l’inflation reste le principal sujet de préoccupation de la Banque d’Angleterre pour le moment. Les économistes prédisent qu’elle changera d’attitude d’ici à la fin de l’année pour s’intéresser de plus près au niveau de l’activité économique. Avec, à la clef, une diminution de son taux directeur.