
Chapitre 4 n DĂ©rivĂ©e et continuitĂ© dâune fonction n
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© éditions Belin, 2012.
Dérivée et continuité
dâune fonction
4
Ouverture
Aux xviie et xviiie siĂšcles les fonctions nâĂ©taient
connues que sous leurs seuls aspects graphiques.
Il sâagissait de « lignes », câest-Ă -dire de courbes
représentatives, et la continuité allait de soi.
Curieusement, seuls certains penseurs proches
de la physique, comme Newton, la mentionnent
(« La nature ne fait pas de saut ») mais ceci ne
conduit à aucune traduction mathématique.
En mathématiques la continuité était utilisée, sans
aucune formulation, par le biais du théorÚme
des valeurs intermédiaires et Lagrange et Gauss
admettaient comme une Ă©vidence quâun poly-
nĂŽme ne peut changer de signe quâen sâannulant.
Il faut attendre Bolzano et Cauchy pour voir appa-
raßtre la notion de continuité en un point et celle
de continuité uniforme : « La fonction f(x) restera
continue par rapport Ă x si un accroissement infi-
niment petit de la variable x produit toujours un
accroissement infiniment petit de la fonction ».
Mais ces formulations restent assez vaguesâŠ
Câest avec Weierstrass, mathĂ©maticien allemand,
que lâon vit apparaĂźtre au xixe siĂšcle une formu-
lation « moderne » de la continuitĂ© et câest Ă ce
moment que la rigueur devint le fondement de
lâanalyse.
Réponse à la question
Les problÚmes de partage sont trÚs souvent liés
au théorÚme des valeurs intermédiaires qui est
un point important de ce chapitre. Si lâon prend
le partage dâune tarte circulaire en trois parts
égales grùce à deux coups de couteau paral-
lĂšles entre eux, on peut ramener le problĂšme Ă
un disque de rayon R ayant pour centre lâorigine
dâun repĂšre orthonormĂ© et dĂ©fini par lâĂ©quation
x2 + y2 = R2, avec R > 0, ainsi quâĂ deux droites
horizontales partageant ce disque en trois parties
dâaires Ă©gales.
x
0B(R ; 0)A(âR ; 0)
VU(Rcos Ξ ; Rsin Ξ)
Ξ
y = t
On peut se limiter au demi-plan y ℠0 et considé-
rer la droite dâĂ©quation y = t, avec 0 †t †R, qui
coupe le demi-cercle en maximum deux points (un
seul lorsque t = R). On nomme ces points U et V,
de coordonnées U Rtt
22
-
; et V --
Rtt
22
;.
Intuitivement â et ceci nâaurait posĂ© aucun pro-
blĂšme avant Bolzano â lâaire du domaine ABUV
limitĂ© par le cercle et situĂ© entre lâaxe des abscisses
et la droite y = t, est une fonction continue de t qui
varie de 0 (quand t = 0) Ă pR2
(quand t = R). Cette
fonction prend donc la valeur pR2
pour une valeur
t0. La partie restante du disque au-dessus de la
droite y = t0 a pour aire pR2
â pR2
= pR2
et il est
clair que les droites y = t0 et y = ât0 partagent le
disque en trois parties dâaires Ă©gales.
On peut se montrer plus rigoureux en établissant
la continuité de cette fonction t a a(t), aire du
domaine ABUV. Cette aire est la somme de trois
aires : celle du triangle VOU et celles des deux
secteurs du disque AOV et BOU. Elle est donc la
somme de lâaire du triangle qui a pour valeur
, fonction clairement continue sur
[0 ; R], et de deux fois lâaire du secteur du disque
BOU.
Il ne reste quâĂ Ă©tablir la continuitĂ© de cette der-
niĂšre aire. Pour cela on envisage la fonction
j : 02
;p
Ă
Ë a R telle que q a j(q) = sinq. Elle est
continue, strictement croissante et prend ses
valeurs sur [0 ; 1]. On dispose ainsi dâune fonc-
tion y : [0 ; 1] a 02
;p
Ă
Ë qui Ă s ââŻ[0 ; 1] fait
correspondre lâunique q â⯠02
;p
Ă
Ë tel que s = sinq.
Les deux courbes décrites par (q ; j(q)) pour
q â⯠02
;p
Ă
ĂË
Ë et (s ; y(s)) pour s ââŻ[0 ; 1] sont symĂ©-
triques par rapport Ă la premiĂšre bissectrice.
Comme la premiĂšre est « dâun seul tenant »
(continuité de la fonction q a sinq), la seconde
aussi, ce qui définit la continuité dans le cadre de
ce chapitre. Lâaire du secteur disque BOV a donc
pour valeur 1
22
yt
RR
Ă
Ă
ÂŻ
Ëî ; cette aire est continue.