Production : Cie La Grappa - Avec le soutien d’Arcadi Ile-de-France - des centres culturels Rébérioux et Village de Créteil Création lumières : Thibault Petit Résidence de création : Centres culturels Rébérioux et Village de Créteil - Plateau 31 – Gentilly (Plateaux Solidaires – Arcardi ) NOTE D’INTENTION Nouvelle création de LA GRAPPA, dans la continuité des thèmes abordés dans notre précédent spectacle Si nous ne pouvons changer le monde… créé au Théâtre de La Loge (Paris 11) en janvier 2016. Autobiographie collective Poétique Fantasmée Qu’est-ce qui est réel ? Sur quoi peut-on s’appuyer ? Qu’est-ce qui existe ? Pourquoi est-ce que parfois, un mot, un geste, une histoire d’amour rompue en plein vol vient tout effondrer ? Moi dans ma vie, un jour, un homme m’a dit : « tout ce qu’on a vécu ensemble c’était de la fiction ». Alors la douleur a été immense et j’ai eu la sensation que cette douleur d’une intensité tellement nouvelle pour moi, proche d’une mort, n’était pas loin d’une bénédiction. Enfin je goûtais la saveur du réel, tout était tellement tangible. Douloureux mais réel. Donc joyeux. Vous me suivez ? Enfin, ce n’était plus des mots, c’était la vie que je sentais en moi. Alors la réalité a commencé à me parler et je l’ai regardée avec admiration. C’est le point de départ de cette création. Se rassembler pour parler du monde autrement. Refuser le point de vue général qui affirme que tout va mal. Et si la fin du monde était une bénédiction ? Pour aller se chercher, trouver le point lumineux en soi d’où tout redémarre. C’est l’histoire d’une femme qui pensait avoir enfin posé ses valises quelque part, où la chose qu’elle cherchait lui était enfin donnée. Mais après cette histoire d’amour défaite, elle se dit « ah c’est comme ça alors il va falloir à nouveau reprendre ses valises ». C’est l’histoire d’une femme qui toutes les nuits rassemblent ses os, les morceaux épars de son corps mais chaque jour les morceaux se séparent, il lui manque quelque chose. Une clé, une porte, une ouverture. Pendant ce temps, elle erre, longtemps, dans le noir, la forêt, elle se perd, rencontre des inconnus, joue avec eux, fait l’amour parfois, discute, argumente. C’est l’histoire d’une femme dans le monde qui ne sait pas comment l’habiter. C’est l’histoire d’une femme qui cherche, qui enquête, avide de quelque chose dont elle ne connaît pas le nom mais qui la tire dans une direction puis une autre. C’est une femme à la recherche de sa propre histoire mais elle n’a à sa disposition que des lambeaux de vie, éparpillés, en miettes. Et face à cet éparpillement c’est comme si elle se sentait trahie. Par qui ? Il y a une phrase dans La Mouette de Tchekhov qui dit « il y a un passage dans Tourgueniev « Heureux celui qui par de tels nuits a un toit au-dessus de sa tête, qui a un coin chaud » Oui Tourgueniev et que Dieu vienne en aide à tout ceux qui errent sans abris » et à ce moment l’héroïne de l’histoire, Nina, se met à pleurer. Quelle est mon histoire ? se demande Marianne. Tout à coup, sa vie devient l’objet d’une quête, une aventure dont elle cherche à décrypter le sens. Qu’est-ce qui est réel ? Qu’est-ce qui est vrai ? Sur quoi s’appuyer ? Comment aller vers son propre désir quand tout semble obstrué ? Où est le sens ? Au terme d'une longue nuit, s'étant défaite d'une histoire qui n'était pas la sienne, qui venait l'entraver, elle va pouvoir enfin poser un pas sur le seuil de la porte et raconter sa propre histoire. Et la recherche de vérité devient une obsession qui la mènera jusqu’à remettre en question cette recherche. Passer d'une vision où on cherche ce qui est vrai à une vision où on invente ce qui est vrai. Pour peu qu’on veuille bien aller à la rencontre de son pouvoir créateur. TRAITEMENT L’histoire Si nous ne pouvons changer le monde…OPUS 2, en quelques mots A la suite d'un bouleversement, Marianne voit son monde s’écrouler. Tout, soudainement, lui paraît extraordinairement réel. C’est une femme qui a l'impression brutale de se réveiller. Comme si elle avait dormi toute sa vie, ou vécu en songe, hors de la réalité. En touchant la mort en elle, quelque chose de vivant jaillit, et la joie avec. Aussitôt, la voici embarquée dans une histoire qu'elle n'avait pas prévue, entre figures de rêves et de réalité. Et la vie devient, sous ses yeux, une aventure étonnante dont elle cherche à décrypter le sens pour pouvoir se trouver. Mais comme toute héroïne, Marianne suit un parcours initiatique semé d’obstacles pour atteindre son objectif. C'est l'histoire de sa traversée. Quelle serait votre vie, si comme Marianne, vous cherchiez à redevenir le personnage principal de votre histoire ? Un parcours initiatique C'est le parcours initiatique d'une femme pour arriver jusqu'à elle-même. L’histoire part d'un bouleversement, la rupture avec son premier grand amour, son monde tombe et de là elle va devoir reconstruire. Nous suivons cette femme, sa perdition, son incompréhension, ses révoltes contre une société qui ne lui a pas donné ce qu'il fallait pour qu'elle soit pleine, repue. Et puis nous assistons à ses prises de conscience. Au cours de sa traversée, il y a des êtres qu'elle rencontre qui l’obligent à fouiller en elle-même et la réalité qui commence à lui parler autrement. Elle n’est plus active vers le monde, cherchant à le débusquer, cherchant à faire sa place à tout prix, le monde vient à elle : elle rencontre des êtres, fait des rêves....et finit par comprendre qu'elle va devoir rencontrer la partie qui crie et qui désire en elle pour se transformer. Comment une fin de monde peut-elle être une bénédiction ? L'occasion de devoir tout réapprendre depuis les tous débuts, refaire son alphabet pour poser ses propres gestes et non ceux que l’éducation nous a appris. Cesser d'attendre qu’un autre nous donne ce dont nous manquons, plonger en soi pour se donner ce dont nous avons besoin. Une quête pour quoi ? Peut-être pour faire œuvre de cette simple phrase : « L’arbre qui fait verser aux uns des larmes de joie n’est aux yeux des autres qu’une chose verte qui se dresse en travers du chemin ». (William Blake) Enjeux de la création Opus 2 Il s’agit de l’Opus 2 d’une réflexion déjà amorcée la saison dernière au Théâtre de La Loge avec le spectacle Si nous ne pouvons changer le monde… dont le héros principal était un personnage masqué homme, Marius, interprété successivement par nous quatre. L’Opus 2 est pensé comme un nouvel essai autour des thèmes déjà abordés dans le premier opus. Et si la fin du monde était une bénédiction ? Nous nous sommes rassemblés pour tenter de parler du monde autrement, pour chercher à parler, via la création, d’un autre rapport au monde. Nous y répondons par la fiction et avec nos moyens d’artistes : une histoire, des corps mis en situations, des images, du son, de la lumière… Nous y suivrons la trajectoire d’un autre personnage, Marianne, seul point fixe autour d’une réalité mouvante. L’histoire part d’un bouleversement et d’un effondrement, une histoire d’amour rompue en plein vol, pour arriver à une reconstruction et un nouveau monde possible. En tout, trois acteurs au plateau, une actrice jouant Marianne et les deux autres acteurs interprétant tour à tour ses amis, un narrateur, ses parents, un médecin, une figure de rêve… Changer de vision « Dans ces temps-là, j'ai besoin de douceur, de respect, la compétition m'est insupportable, l'ordre de mes priorités s'inversent, la course à réussir ou à avoir un bon job me paraît dérisoire. À quoi s’occupent-ils tous ? Que poursuivent-ils ? Savent-ils qu’ils peuvent mourir demain ? » (Marianne) Nous, acteurs de la Grappa, avons réfléchi ensemble à ce que c’est : changer de vision. Avoir été habitué à voir le monde d’une certaine manière et puis tout à coup changer de manière d’appréhender les choses et d’être peut-être un peu plus apaisé d’être là, d’être né ici, d’avoir la vingtaine/trentaine et de vivre ici, en France, en 2017. Qu’est-ce qui est réel ? Qu’est-ce qui est vrai ? Sur quoi s’appuyer ? Où est le sens ? Cet Opus 2 doit être pensé comme un essai sur le réel et notre rapport à la réalité. Une quête c’est aussi, au cours du chemin, apprendre à se délester des « fausses questions ». C’est évoluer vers un autre chemin, une autre appréhension du monde, un autre soi. Le véritable ? Qu’est-ce qui est réel ? Qu’est-ce qui est vrai ? Sur quoi s’appuyer ? Où est le sens ? Fausses questions ?? Nous partons du postulat que notre réalité fonctionne à partir des images intérieures que nous projetons sur le monde. Celles-ci sont en partie façonnées par notre imaginaire, nos perceptions, nos ressentis, notre inconscient. Le passage par la fiction nous permet de poser cette question : peut-être l’imagination détermine t-elle davantage notre rapport à la réalité que la vérité elle-même ? En allant à la rencontre de ces images, nous pouvons en apprendre davantage sur qui nous sommes car nous réalisons ce que nous projetons sur le monde. Accepter ces images peut nous permettre ensuite d’en choisir la perception qui nous convient. Autrement dit, créer, se créer, inventer sa réalité. Si nous créons notre réalité à chaque instant, la maxime « tout est possible » commence à faire sens… EXTRAIT (écriture en cours) LE DOCTEUR : Mademoiselle, je comprends votre votre euh désarroi, votre envie de hurler et de crier à l’injustice. Vous pouvez choisir de crier « pourquoi moi ? » jusqu’à la fin des temps et vous pouvez toujours confondre votre voix avec cet écho mais en vérité, c’est à vous de décider. Vous ne pouvez pas attendre que je vous délivre de votre mal. Seule vous-même en êtes capable. Si vous parvenez à dialoguer avec vos images intérieures, vous pourrez commencer à vous guérir. MARRIANE : mais puisque ces images ne correspondent à rien de connu ? si elles ne sont qu’un délire de mon imagination ? si au moment où je tente de les mettre en mots je vous mens ? Je ne peux pas me baser sur des choses dont on ne peut pas assurer la véracité ! LE DOCTEUR : Si vous entrez dans le dédale de vos images intérieures… MARRIANE : Elle marmonne Hamlet de Shakespeare comme si un souvenir lui revenait « Calme, calme, esprit tourmenté. …. Rentrons ensemble et toujours le doigt sur les lèvres je vous prie. Le temps est disloqué. Ô destin maudit, pourquoi suis-je né pour le remettre en place ! » LE DOCTEUR : mademoiselle ? MARRIANE : quoi ? LE DOCTEUR : Vos images intérieures ne sont pas la vérité, vous avez raison, mais parfois l’imagination a plus de valeur que la vérité absolue. MARRIANE : alors là c’est la meilleure ! je suis tombée où là ? je parle à un docteur, je suis bien à l’hôpital R Debré ? allo ? Je suis bien en train de demander un diagnostic à Mr Dr Levine certifié en xxxxxxx LE DOCTEUR : Laissez moi finir….car c’est votre imagination et pas la mienne. Je m’explique. Vos images intérieures sont une projection de vous-mêmes et de ce que vous êtes capable de vous représenter. En dialoguant avec elles, vous pouvez d’abord les voir, les identifier, les reconnaître comme étant vôtres. Puis vous serez en capacité de les nettoyer au lieu d’être manipulée par elle. Vous comprenez ? Marianne s’est soudainement endormie Répondre à notre monde d’aujourd’hui « Crétins intellectuels ! Vous n'êtes pas ici ! ... Vous êtes dans les illusions de l'esprit au service de l'égoïsme du cœur. [...] Nombrils puants ! Vous enchaînez les concepts selon un arrogant ordre de raison ! Et la vie coincée qui en résulte n'a rien à voir avec l'existence vécue. » A. Jodorowsky Nous les enfants de ceux qui ont voulu changer le monde, où en sommes-nous ? Nous sommes dans un monde en mutation. Certains de nos pères et mères ont voulu changer le monde. Ils y allaient avec optimisme, ils se réunissaient avec l’espoir d’enfin le libérer. Mais aujourd’hui cet enthousiasme a de moins en moins de prise. Non pas que ce combat soit obsolète mais peut-être parce qu’il ne se situe pas autant à l’extérieur. Changer le monde, oui mais comment y parvenir si je ne change pas moi-même ? Il semble qu’à l’heure actuelle nombre d’entre nous cherchent d’abord à se libérer de es entraves pour oser se dire. Est-ce une question générationnelle ? Un symptôme de notre époque ? Il s’agit aussi d’une réflexion sur notre société. Dans quel monde vivons-nous pour que la nourriture dont nous avons tant besoin ne nous soit pas donnée ? Nombre d’entre nous semblent perdus. Nous posons les mêmes questions que Marianne. Qui sommes-nous ? Comment se connaître ? Comment se réaliser ? Nous avons soif mais comment faire ? Nous cherchons en aveugle et nous nous cognons partout car cela ne nous est pas appris. L’école nous a donné les lois de la société. Mais qu’en est-il des « lois du vivre », des lois du vivant ? Pourquoi sont-elles autant niées par l’éducation, voire bafouées ? Il va falloir se cogner et se recogner à l’épreuve du monde, tenter, échouer, se relever, tomber, s’ouvrir, viser mal, puis comprendre… pour enfin, peut-être se trouver. Choix artistiques Le processus de création Une aventure collective Nous nous sommes rassemblés à quatre pour créer cette histoire. Trois femmes, un homme. Trois acteurs, un metteur en scène pour une création collective. Certaines scènes sont écrites par les acteurs, d’autres apparaissent et émergent sur le plateau lors des répétitions. Un bon nombre de scènes sont écrites par Emel Hollocou puis réinventées, ré-agencées, réexploitées en direct par les comédiens. Le processus de création se fait dans le vivant, il naît d’une rencontre entre une écriture, une intention et des acteurs créateurs. C’est dans cette rencontre que la notion de collectif prend tout son sens. Ce qui émerge au plateau résulte de qualités mêlées et diverses (qualités d’écriture, de proposition au plateau, d’intériorité, de fantaisie, d’humour) qui en s’associant permettent la réalisation d’une œuvre véritablement commune. Méthode de travail et influences Notre matière première est d’abord notre vécu, nos parcours de vie, nos virages, nos prises de conscience, les livres non directement liés au théâtre qui ont joué un rôle important dans notre construction personnelle (Où cours-tu ? Ne sais-tu pas que le ciel est en toi ? C. Singer ; Réveiller le tigre, Peter Levine ; une relecture des Evangiles : Un évangile pour guérir, La Danse de la réalité, A. Jodorowsky ; Femmes qui courent avec les loups, C Pinkolas Estès), certaines pratiques qui ont pris de l’importance au sein de nos vies (travail sur soi, soins énergétiques, chant, relaxation). Ensuite nous nous sommes intéressés aux questions actuelles qui traversent certains champs de recherche comme la psychanalyse, la philosophie, la médecine, la sociologie ou la politique. Notre travail repose également sur l’observation scrupuleuse des diverses pratiques de notre époque (explosion du développement personnel, prolifération de l’information sur internet, généralisation des bilans du monde catastrophistes, virtualisation des rapports humains, etc.). Dans le processus de création, certaines œuvres nous inspirent : des pièces de théâtre comme Ivanov, Tchekov sur l’absence de sens ou de goût à l’existence ; Hamlet, Shakespeare sur le mensonge, la conscience, le clan familial, le fait de devoir régler un destin ; Le Roi Lear, Shakespeare sur le combat des générations, la tempête intérieure, la folie pleine de vérités ; des films : Huit et demi, F. Fellini, A. Jodorowsky La Danse de la réalité, Poésie sans fin ; des parcours d’artistes et des poètes qui proposent des « visions nouvelles » : William Blake, Rimbaud,… 1ère étape : Travail à la table, définition des enjeux de la création, écriture d’un bref synopsis. Premières improvisations 2ème étape : Ecriture de scènes éparses. Improvisation au plateau avec comme support ces scènes. Sur la base de la matière plateau, écriture d’une trame détaillée. 3ème étape : A partir de la trame détaillée, écriture de la pièce dans son ensemble. Réécriture de scènes. 4ème étape : Improvisation sur la base de la trame autour de la traversée du personnage principal. Réécriture finale sur la base du travail de plateau. Univers, esthétique Le fil de la mise en scène : notre rapport au réel Le début du spectacle s’ouvrira sur une scène où un groupe d’amis vient disputer des visions du monde, argumente sur l’état du monde, s’empoigne sur des sujets. Le spectateur est alors témoin objectif d’une réalité qui se passe devant ses yeux. La dimension réaliste est clairement assumée et fait écho à une certaine manière de s’approprier la scène aujourd’hui dans la jeune création : ACTEUR 2 : Bon on pourrait faire ça. Bon. Aujourd’hui, les jeunes compagnies elles aiment bien tuer l’illusion, on veut tuer l’illusion, on veut que tout soit réel, que tout soit vrai, on cherche à être vrai, on ne veut plus d’histoire. ACTEUR 3 : Non, non pas la jupe ; Mais arrête… ACTEUR 1 : On ne veut plus d’histoire parce qu’en vérité on ne veut plus qu’on nous mente. ACTEUR 2 : Emel, tu peux ramener du sel s’il te plaît ? La réunion dérape et une histoire se construit en direct sous nos yeux. CELLE QUI MENE LE JEU : Février 2017. St Brieuc. Il pleut. Entre Marianne. (Marianne entre avec la vaisselle à la main) Elle s’arrête. Regarde la fenêtre. Elle repart en cuisine. (« Celle qui mène le jeu » fait signe à Léo d’attendre) Dans un autre plan, on voit Léo qui marche dans la rue, sous la pluie, brève apparition, il fume et sourit, il sort. Entre Marianne, elle met la table (Marianne siffle) Elle regarde l’heure et ressort. Entre Léo, il éteint sa cigarette (Léo la regarde et n’éteint pas sa cigarette). Il éteint sa cigarette. (Léo s’exécute) Il prend un air plus sérieux, déterminé et sonne à une porte. Ding dong. Il attend. Entre Marianne. Elle a entendu sonner. Elle sourit. (Marianne ouvre une porte imaginaire) Trop rapide (Marianne la regarde. Marianne réouvre la porte et fait semblant de se cacher derrière. Léo entre dans une autre porte imaginaire. (« Celle qui mène le jeu » vient vers lui. Elle ouvre grand les bras et montre où se trouve la porte que Marianne a créée. Sur un ton excédé.) Non, tu vois la porte, elle est là, là, comme ça, là !! En entrant dans une histoire, nous basculons vers une fiction. Et nous embarquons le spectateur dans l’histoire de Marianne. A partir de là, un autre rythme s’instaure et nous entrons dans la tête de Marianne. Nous suivons une subjectivité. Le spectateur voit désormais par les yeux du personnage principal, réalité déformée donc car « sous point de vue ». Nous travaillerons tout au long du spectacle sur cette notion de « déformation / perception ». Au moment où le monde de Marianne s’écroule, un personnage, miroir de sa conscience apparaîtra. Il est à la fois le narrateur, le « grand orchestrateur » mais aussi celui qui en Marianne se voit vivre, commence à prendre conscience de ce qu’il vit et de ce qu’il sent. Son rôle permettra parfois de faire un point en direct sur l’histoire qui est en train de se raconter : LE NARRATEUR : Bon là on arrive à un moment de flottement. En tout état de cause, notre héroïne ne sait pas ce qu’elle cherche (elle cherche, c’est certain, elle est avide de quelque chose mais elle n’en connaît pas le nom). Donc son objectif n’est pas clair, en tous cas à ce stade du spectacle, il n’est absolument clair pour personne, il est ce qu’on pourrait appeler flou. On est bel et bien en train de vivre un moment de flou. Dans les films, dans la littérature, on sait que le flou amènera toujours vers une résolution, le lecteur ou le spectateur peut trouver consolation car il suit des héros dont la trajectoire crée un sens. Le petit humain qu’il est peut donc s’enivrer de sens et dormir tranquille. Mais dans la vie, le sens est absolument invisible, on le cherche partout, on avance dans le noir à tâtons. Vous avez remarqué combien les philosophes, ceux qui réfléchissent sur les questions d’existence, ont souvent des grosses lunettes qui leur permettent de ne plus voir flou. C’est-à-dire qu’ils réfléchissent pendant des heures peut-être simplement pour corriger leur défaut initial, physiologique, biologique de vision. C’est-à-dire que leurs œuvres sont le fruit d’un défaut initial de vision qu’il tente de corriger par l’élaboration d’une pensée ou d’un système de pensée. Il ne faut jamais croire aux apparences, nous venons tous résoudre quelque chose ici. (Le père de Marianne apparaît) MARIANNE : Mais Papa qu’est ce que tu fais ici ? La mise en scène cherchera à traduire au plateau la réalité selon le prisme du personnage principal. Nous traduirons au plateau une « perception du monde ». Nous travaillerons donc tout au long du spectacle sur les allers retours entre « perception/déformation » de la réalité, scènes sans point de vue subjectif et éclairage objectif de l’histoire en train de se raconter. La lumière et le son participeront pleinement à ce travail. Un univers poétique, entre réalité et imaginaire Sur le chemin de Mariane, il y aura : une fête, des parents figés dans une réalité, l’apparition mystérieuse d’une femme Ophélie, un narrateur qui se questionne sur l’histoire qu’il raconte, miroir de la conscience de Marianne et de ce qui « dirige » sa vie, un accident de voiture, l’apparition de personnages du passé de Marianne, un conférencier qui se questionne sur le réel. Il s’agit de chercher à créer un miroir de notre monde extérieur (créer une sorte de rumeur du monde) et de notre monde intérieur. Réalité et imaginaire se côtoieront, en cherchant souvent l’humour, le fantasque, le surréalisme de chaque situation. Nous travaillons également à faire parler le langage de l’inconscient, du rêve, et celui de la « conscience éveillée ». Nous travaillerons à représenter non pas de manière strictement réaliste mais à infiltrer une dose de déformation dans le quotidien. Les symboles, les visions, les fantasmes, les mêmes visages rencontrés plusieurs fois sous des apparences différentes sont un chemin pour tenter de nous faire voir au-delà des apparences. Lumières, son et scénographie Pour cette création, un plateau brut, une table, des chaises, un micro, quelques lampes, un ventilateur. Le mur du théâtre comme support pour écrire à la craie les étapes du personnage, ses questionnements ou encore son arbre généalogique. C’est le lieu de son brouillon, son espace mental exorcisé sur le plateau et c’est surtout le lieu de son histoire, celle qui se construit pas à pas, qui se noircit d’écritures ou qui s’efface, celle qui peut s’inventer à tout moment. La lumière sera à l’image du monde intérieur de Marianne et de sa perception du monde, elle pourra traduire son espace mental comme ses états sensibles ou ses fantasmes. Comme si le spectateur entrait dans sa tête. Le son et la lumière mêlés permettront de travailler sur le rapport au réel du personnage principal, déformer certaines situations qui, sous le regard de Marianne, prennent une coloration naturaliste, onirique, angoissante ou « brutalement réelle ». Le son participera à la création d’états hypnotiques et nous emènera vers des ailleurs (mer, vent…). LA GRAPPA Qui sommes-nous ? La compagnie Grappa dite LA GRAPPA naît en 2013 lors de la mise en scène de Britannicus d’après Racine, avec des comédiens venant d’horizons différents mais ayant des envies de théâtre communes. Sous l’impulsion de Nicolas Grosrichard, metteur en scène et d’Emel Hollocou, collaboratrice artistique, la pièce est l’occasion d’un laboratoire qui sera les prémices de LA GRAPPA. Au cours de la saison 2013/2014, la pièce co-mise en scène par Nicolas Grosrichard et Emel Hollocou sera jouée sous une forme chaque fois différente dans chaque lieu investi (Ecole du Louvre, mars 2013, Festival Sorbonne Nouvelle, mai 2013, Théâtre de La Jonquière, novembre 2013, Théâtre de Coye la Foret - Oise, avril 2014). Nicolas Grosrichard monte ensuite J’étais dans ma maison et j’attendais que la pluie vienne de Jean-Luc Lagarce. Repérée par le Théâtre de Vanves, la pièce y est programmée dans le cadre du festival Préliminaires en mai 2014 puis reprise en novembre de la même année. Elle fera aussi l’objet d’une résidence au Centquatre en 2015. Au sein de la Grappa, un noyau de comédiens issus du Laboratoire de Formation au Théâtre Physique (LFTP) se dessine peu à peu : Nicolas Grosrichard, Emel Hollocou, Laura Lascourrèges et Coraline Mages. En 2015, ces quatre comédiens décident de questionner plus essentiellement leur rôle d’artiste et d’humain au sein de LA GRAPPA. Naît alors Si nous ne pouvons changer le monde…, qu’ils choisissent d’écrire, de mettre en scène et de jouer ensemble. Le spectacle inaugure une nouvelle étape pour la compagnie : nouvelles manières de faire, ouverture à des inspirations non directement théâtrales, écriture au plateau, création collective. Il est créé les 19, 20, 21 et 22 janvier 2016 au Théâtre de la Loge (Paris), en collaboration avec Mathilde Saubole. Le spectacle est repris pour quatre dates en avril 2017 au Théâtre de la Loge et fait l’objet d’une recréation. Il est cette fois-ci mis en scène par Emel Hollocou. Emel Hollocou, metteure en scène, comédienne Après une formation à Sciences-Po Paris, Emel Hollocou se perfectionne au Laboratoire de Formation au Théâtre Physique où elle travaille avec J.P Garnier, T. Bouvet, A. Ethève, F. Jessua, T. Condemine, M. Franzetti puis complète sa formation à l'Ecole du jeu (Master classes). Elle travaille ensuite comme assistante à la mise en scène de D’ de Kabal sur Comme une isle écrit par Leïla Cukierman (Th. A. Vitez d’Ivry et tournée). En 2013 elle crée LA GRAPPA qu'elle dirige avec Nicolas Grosrichard. Elle co-met en scène Britannicus de Racine avec N. Grosrichard puis avec cette compagnie, joue dans J'étais dans ma maison et j'attendais que la pluie vienne de J.L Lagarce mes par N. Grosrichard (Théâtre de Vanves, 2014), Si nous ne pouvons changer le monde…(Théâtre de la Loge, 2016, écriture et création collective), spectacle repris en avril 2017 au Théâtre de la Loge et qui fait l’objet d’une recréation qu’elle met en scène. Elle joue également pour la compagnie Les Mistons dans Les Z'Habitants mis en scène Marie Dupleix (en 2015 résidence MAC de Créteil et Théâtre de Maisons Alfort). Elle est actuellement dramaturge et assistante à la mise en scène sur « Peau d’âne, création mise en scène par Pénélope Lucbert (Théâtre du Lucernaire, fev-mars 2017). Depuis 2014, elle anime plusieurs ateliers enfants et adolescents à Créteil et monte avec eux Les Petits Princes (écriture et mise en scène), Cendrillon d'après J. Pommerat (adaptation et mise en scène), Il y en a qui croient pas au destin d’après Littoral de Wajdi Mouawad, La Petite balle jaune (co-mise en scène avec Coraline Mages). Thibault Petit, créateur lumière A Paris, il se forme en tant que régisseur de spectacle option lumière en alternance au CFPTS de Bagnolet. Il entre en apprentissage pendant deux ans au 104 à Paris et en parallèle de son travail rencontre la compagnie Grappa dont il devient le créateur lumière pour tous ses spectacles depuis J’étais dans ma maison… Il a fait la création lumière pour L’Affaire Calas, de la compagnie Grand Théâtre, a travaillé en tant que régisseur de site au théâtre des Barriques d’Avignon, et en tant que chef électricien sur la grande scène du festival Môme en Théâtre. Il travaille actuellement en tant que régisseur lumière au théâtre du Palais Royal sur Edmond, adaptation de Cyrano par Alexis Michalik et signe la création lumière du spectacle de dernière année des Ateliers du Sudden. Nicolas Grosrichard, comédien Après avoir étudié le cinéma à Paris III, il entre aux cours Florent puis au Laboratoire de Formation au Théâtre Physique. Il tourne dans plusieurs courts-métrages notamment dans La Promenade de Noé qui obtient le prix du scénario au festival d’Aubagne. Au théâtre, il joue dans J’éprouve de Léon Masson (Théâtre 95),Platonov, m.e.s Benjamin Porée (Théâtre de Vanves 2012, reprise aux ateliers Berthier en 2014), travaille sur Le Bal des Stenborg m.e.s Mathilde Gentil de la Compagnie Gosh (2015). Il est le directeur artistique de la compagnie Grappa. Il met en scène J’étais dans ma maison… de J-L Lagarce pour les saisons 13-14 puis 14-15 au Théâtre de Vanves. Il travaille avec le festival du Théâtre du Roi de Cœur - Maurens fondé par Chloé de Broca et Félix Beaupérin chaque année depuis 2014. Il y monte La Noce de Brecht. Récemment, il a assisté à la mise en scène Benjamin Porée sur Trilogie du Revoir de B. Strauss, créé pour Avignon In 2015 et produit par leThéâtre des Gémeaux. En 2017, il jouera dans l’adaptation de La Mouette, mise en scène par Benjamin Porée au Quartz, scène nationale de Brest. Laura Lascourrèges, comédienne Elle se forme d’abord aux Cours Florent puis au Laboratoire de Formation au Théâtre Physique avec Jean-Pierre Garnier, Thomas Bouvet, Alexandre Ethève, Frédéric Jessua... Aux prémices de la compagnie, elle joue Junie dans Britannicus et la plus jeune dans J’étais dans ma maison… de JeanLuc Lagarce, mis en scène par Nicolas Grosrichard au Théâtre de Vanves. Elle donne sa voix pour des pièces radiophoniques, notamment Name Dropping, Autotelie, Impératifs et Total Vrac de Daniel Martin-Borret (Prix de la Fiction Francophone aux Phonurgia Nova Awards 2016). Elle fait également partie du Collectif Nash et y est dirigée par Camille Durand-Tovar dans une réécriture de Douze hommes en colère du collectif NASH. Elle tourne dans divers courts métrages, série TV, projets vidéo… Début 2017 elle joue la fiancée dans Les Noces de sang mis en scène par Antonio Diaz-Florian au Théâtre de l’Epée de bois. Elle a également travaillé comme scénariste et pratique le chant lyrique depuis cinq ans. Coraline Mages, comédienne Elle se forme à l’IECA (Nancy) en cinéma et production de films documentaires. Elle intègre en 2009 l’équipe du GRAND JOURNAL de CANAL+ comme assistante de production. Elle se forme ensuite au Laboratoire de formation au théâtre physique sous la direction de Maxime Franzetti. Elle participe à la création Stabat Mater Furiosa de J.P Siméon, mis enscène par Charles d’Oiron lors du Festival Mise en Bouche au Théâtre du Baléti, à Montreuil. En 2012, elle prête sa voix au projet Bodycombat, premier long métrage de la réalisatrice croate Yelena Remetin. Elle suit également les Ateliers du Lundi, mis en place par le Théâtre de la Colline sous la direction de Sharif Andoura. En janvier 2016, elle co-créée avec Nicolas Grosrichard, Emel Hollocou et Laura Lascourrèges l’écriture et la mise en scène de Si nous ne pouvons changer le monde… initié et joué au Théâtre de La Loge. Elle travaille le clown avec LA ROYAL CLOWN COMPANY, dirigée par Hervé Langlois et codirige des ateliers de théâtre pour enfants avec Emel Hollocou à Créteil. Annexe : Article dans Le Souffleur sur l’OPUS 1 – Si nous ne pouvons changer le monde… La Compagnie Grappa se lance dans une audacieuse création présentée pour la première fois au théâtre de La loge. Si nous ne pouvons changer le monde… Tel en est le titre. Comme si, de façon implicite : si nous ne pouvons changer le monde, que pouvonsnous faire ? Que pouvons-nous changer ? Que nous reste-t-il ? Fable Marius est un homme. Ou plutôt Marius est un masque. Marius est un nez de Commedia del Arte qui se balade de visage en visage et sur chacun devient un personnage. Le personnage. Monsieur tout le monde. Marius est sympa, mais un peu pataud. Pas tellement gracieux. Pas vraiment très beau. Marius a une femme et un fils. Mais voici qu’au début de la pièce il apprend justement qu’il perd sa femme d’une façon qui nous demeure inconnue. On rencontre donc Marius au top de sa forme. Faute de pouvoir changer la réalité toujours plus sévère avec lui, il tente donc de se changer lui-même. Ce qui n’est pas une mince affaire. Plateau Marius est un homme. Ce pourrait être une femme, un enfant, un adulte, un vieux. Marius, c’est toi, c’est moi, c’est tout le monde. Le fait d’assigner le personnage au masque lui donne une portée universelle, il devient une figure mythologique. Le choix d’un demi-masque est très juste puisqu’il conserve le sexe de celui qui le porte et par là lui donne un supplément d’universalité. Ainsi chaque spectateur peut projeter son empathie et s’identifier à ce personnage principal que l’on suit dans ses péripéties. Ses péripéties sont multiples, comme vous le verrez, et les quatre comédiens, à l’aide de simples costumes, jonglent avec les peaux de différents personnages pour nous emmener tantôt au bar, tantôt au parc pour faire un jogging, tantôt chez lui. Apprécions donc ici la virtuosité et le talent de Nicolas Grosrichard, Emel Hollocou, Laura Lascourrèges et Coraline Mages qui, à eux quatre seulement et avec très peu de moyens, nous emmènent dans de multiples lieux, font jaillir différents personnages, alternant entre le jeu de masque et le jeu sans masque avec une précision et un brio rare et novateur. La fable qu’il raconte est drôle et pleine de vie. Le travail des comédiens, leur hargne à nous faire voyager est à la hauteur du message d’espoir que communique simplement la pièce. Une curiosité à voir avec plaisir par Sébastien Thevenet http://www.lesouffleur.net/12918/si-nous-ne-pouvons-changer-le-monde/ LA GRAPPA Contact administration Emel Hollocou / [email protected] / 06 88 48 82 74 Contact technique Thibault Petit / [email protected] / 06 83 84 05 65 Contact diffusion : Laura Lascourrèges / [email protected] / 06 83 92 62 59 Contact communication : Nicolas Grosrichard / [email protected] / 06 17 55 46 97 Compagnie Grappa – siège social : 4 square Henri Delormel - 75014 Paris N° Siret : 795-214-964 00012 / Code APE : 9001Z