K. Mazeau Karine Mazeau Préface de Jean-Claude Prinz Conception de vitrines Un panorama complet des pratiques de la scénographie de vitrine au sein des contextes professionnels les plus variés, des marques à réseau international aux commerces indépendants. Conception de vitrines 100 exemples de vitrines créatives et des maquettes complètes de projets illustrant les solutions artistiques et techniques des concepteurs en termes de merchandising, d’identité de marque et d’impact visuel. Un état des lieux de la filière de formation. Pour tout professionnel de la décoration, de l’architecture intérieure et du design d’espace désireux de se spécialiser, les enseignants et les étudiants de ce domaine, les commerçants, les responsables merchandising. Codes merchandising Scénographie Avant-projets Formations Conception de vitrines 20 témoignages de professionnels – scénographes, visual merchandisers, chefs déco, directeurs artistiques, intégrés ou consultants, fabricants spécialisés et professionnels de métiers connexes moins connus – sur les outils de conception, les conditions de réalisation, les évolutions du secteur et ses opportunités. Avec la collaboration de 27 E Couverture : Studio Eyrolles © Éditions Eyrolles Photographie et conception © Stéphanie Moisan pour John Lobb. Code éditeur : G13937 ISBN : 978-2-212-13937-2 agnès b. | À la Mère de Famille | Annick Goutal | Berluti | BHV Marais | Chevignon | Compagnie française de l’Orient et de la Chine (CFOC) | Comtesse du Barry | Diesel | diptyque | Filofax | Free | Givenchy | Hédiard | Ice-Watch | John Lobb | Kenzo | Koah | La Samaritaine | Le Bon Marché Rive Gauche | Les Galeries Lafayette | L’Occitane en Provence | Louis Vuitton | Morgan | Muji | Nature & Découvertes | Prada | Pylones | Van Cleef & Arpels | Vision Ka Arts appliqués G13937_ConceptionDeVitrines_CV2_EXE.indd 1 09/05/2016 11:37 PRÉFACE RECUP_p1-102_NEW.indd 4 21/04/2016 13:08 La conception d’un point de vente requiert une démarche de design global, consistant à établir le positionnement commercial, stratégique d’une enseigne ou d’une marque par le biais d’un projet créatif, original et innovant en termes à la fois de graphisme, d’architecture, d’aménagements, de merchandising et d’ambiance de magasin. La vitrine (du latin populaire vitrinus, « verre »), premier média du point de vente puisque cet espace aménagé derrière la vitre du magasin est visible depuis l’extérieur, fait partie intégrante de cette réflexion globale. LA VITRINE DANS L’HISTOIRE De tous temps, la vitrine a été conçue comme un outil de séduction commerciale. Au Moyen Âge déjà, la boutique, ouverte sur la rue, ménage une vitrine sur le rebord d’une fenêtre, sur une planche élargie appelée « étal », qui deviendra l’étalage. Mais ce n’est qu’au xviie siècle que l’on voit apparaître les devantures vitrées. Leur architecture se compose de boiseries sculptées, l’éclairage est déjà travaillé et les premières « présentations de produits » y sont installées. Dans les années 1830, les éclairages au gaz se développent, et grâce à la qualité de transparence du verre obtenue dès la fin du siècle précédent, les vitrines illuminent les rues, comme en témoigne Émile Zola dans Pot-Bouille (1882) : « Sur le pavé noir et boueux, les vitrines claires des magasins fraîchement décorés, flambant de gaz, jettent des carrés de vive lumière. » Les grands travaux du Second Empire favorisent l’élargissement des trottoirs. Parallèlement, les progrès techniques permettent d’augmenter les dimensions des vitrages. Les vitrines deviennent alors de plus en plus imposantes, elles sont claires et lumineuses, propices à créer le désir, le rêve et la magie. Les concepteurs des vitrines des grands magasins comme des boutiques des passages débordent d’imagination pour présenter les ­nouveaux produits et inciter les chalands à entrer. Dès 1870, l’industrie permet de développer de très grandes dimensions de vitrages. Il est donc possible d’ouvrir au maximum les boutiques situées en rezde-chaussée. Plus tard, l’Art nouveau utilise pour les vitrines des glaces biseautées et des plaques de verre pour dessiner des courbes et des contrecourbes. Les années 1930 apportent davantage de sobriété dans le décor, mais les vitrines occupent parfois toute la longueur de la façade du magasin, intégrant même la porte d’entrée, donnant ainsi à voir tout l’intérieur. Le magasin de chaussures Bally dessiné par Robert Mallet-Stevens, modifié depuis, était un des exemples de ces grandes vitrines dépouillées en saillie sur la façade. Au cours du xxe siècle, les tendances s’affrontent, entre les petites vitrines fermées avec allèges, bandeaux et stores pour les magasins de luxe, et les grandes vitrines transparentes et ouvertes pour les magasins populaires. Aujourd’hui, la prise en compte des aspects marketing, dans le cadre d’une démarche de design global, oriente différemment les choix décoratifs. La vitrine véhicule les valeurs et le positionnement d’une enseigne ou d’une marque en lui donnant du sens et de la cohérence. Elle est un vecteur de communication qui transmet une identité, une image, diffuse des messages, porte des évènements, des lancements de produits, etc. Leur renouvellement est permanent, en fonction des saisons, des promotions ou de la présentation de nouvelles marchandises. Cette évolution témoigne d’une créativité remarquable, souvent digne d’une œuvre d’art. LE LÈCHE-VITRINE ET L’ACTE D’ACHAT Le terme populaire de « lèche-vitrine » est né au milieu du xxe siècle. Alain Rey dans son Dictionnaire culturel en langue française le définit ainsi : « Action de flâner en regardant les étalages. » Il a pour synonymes « chalandage », ou encore « magasinage » au Canada. Certes, on ne « lèche pas » une vitrine, mais il s’agit là d’une façon de dire qu’on peut convoiter son contenu avec la force de nos désirs d’enfant. Notre fascination pour la vitrine elle-même joue un rôle primordial PRÉFACE RECUP_p1-102_NEW.indd 5 | 5 21/04/2016 13:08 dans cette envie de s’approprier les produits disposés derrière la vitre. Faire du lèche-vitrine tient également du loisir. C’est un moment de temps pour soi, ou à partager avec ses proches, et une occasion de redécouvrir les rues et les quartiers des villes. En assurant un spectacle permanent de lumière et de vie, de jour comme de nuit, les vitrines des magasins leur donnent une dimension poétique, voire magique. Elles attirent, elles animent, elles nous font rêver. Qui n’a jamais vu les regards émerveillés des enfants devant les vitrines de Noël ? Qui n’a jamais changé de trottoir pour aller contempler une vitrine de l’autre côté de la rue ? Le lèche-vitrine reste un plaisir qui ne s’inscrit pas systématiquement dans une logique d’achat. Il satisfait notre curiosité, notre regard, et peut nous inciter à vouloir posséder l’objet admiré. Si la vitrine crée la mode et se veut le témoignage d’une époque, afin de nous faire rêver et nous séduire, elle répond aussi à une finalité proprement commerciale : inciter le chaland à franchir le seuil du magasin. Mais y sommes-nous attirés uniquement par elle, ou aussi par les produits qui y sont présentés, la notoriété de l’enseigne, l’ambiance qui se dégage de l’intérieur ? L’acte d’achat est un passage délicat, et la vitrine est un des éléments de la logique de comportement du consommateur, où le design global d’un point de vente prend tout son sens et ses fonctions. Selon Jean Baudrillard (Le système des objets), « la vitre est une transparence sans transition, on voit, mais on ne peut toucher. La vitrine est féerie et frustration, mais aussi une information qui est la stratégie même de la publicité ». Elle est, en effet, une publicité qui est le reflet de l’image de l’enseigne. Par le désir qu’elle crée, elle participe à l’acte d’achat. Les professionnels de la conception de vitrines mobilisent toute leur imagination et leur créativité pour présenter et animer les produits. Ils mettent en œuvre des jeux de lumières, des éclairages, des matières et des matériaux, des couleurs, des scénographies fixes ou mobiles, des illusions d’optique, des animations, des techniques de communication sensorielle, ainsi que de nouvelles technologies de vitrines tactiles interactives. 6 | Les vitrines sont souvent de véritables œuvres d’art, des tableaux en trois dimensions. De grands designers comme Andrée Putman ou des artistes comme David Lynch ont réalisé des vitrines pour des événements spécifiques dans des grands magasins. Leur particularité est d’être toujours éphémères : leur durée de vie dépend d’une saison, d’une animation, d’une promotion ou de l’actualité de produits. Cette temporalité permet aux professionnels de la création d’évoluer continuellement et de laisser libre cours à leur imagination pour livrer des propositions créatives adaptées aux thématiques du moment. Le livre de Karine Mazeau offre un tour d’horizon complet de l’univers créatif des vitrines. Il détaille les méthodologies, les techniques et les matériaux utilisés, les critères de créativité et de communication, à travers le retour d’expériences de grands professionnels, concepteurs, visual merchandisers, agences de design, designers, artistes, plasticiens… qui contribuent aux succès esthétiques et commerciaux des enseignes. Premier ouvrage à proposer une telle synthèse, sa lecture ne pourra qu’être extrêmement profitable aux étudiants, enseignants, professionnels du commerce, réseaux de points de vente, et à tous les concepteurs et créateurs conscients que la scénographie et l’animation d’une vitrine sont des éléments fondamentaux de la réussite du commerce. Jean-Claude Prinz, architecte d’intérieur, designer d’espace, enseignant, spécialiste retail PRÉFACE RECUP_p1-102_NEW.indd 6 21/04/2016 13:08