Emancipation et évolution de la sexualité de la femme en Afrique sub-saharienne Serigne Magueye GUEYE et Jeanne Joséphine DIAW Service d’Urologie et d’Andrologie Université Cheikh Anta DIOP et Hôpital Général de Grand Yoff Dakar – Sénégal [email protected] ISSM-SFMS Cairo 2006 INTRODUCTION • La sexualité est infiltrée de sens. Elle ne peut être comprise sans référence à une culture, ce qui confère sa forme particulière à l’expérience du désir et à l’expression de la sexualité de chacun (Braconnier A). • La culture est mouvante car elle est vivante. Elle évolue dans l’espace et le temps et est sujette à diverses influences. Exprimer sa féminité relève d’un processus de socialisation définie par les règles de la culture (Sow F) ISSM-SFMS Cairo 2006 Evolution de la sexualité en Afrique sub-saharienne • Traditionnellement – les rapports sexuels avant le mariage ont été découragés dans la plupart des sociétés africaines. – Dans la conception traditionnelle africaine, la sexualité des femmes est ordonnée en fonction de la procréation (Ombolo JP). • Mais actuellement en Afrique – Libération sexuelle qui pousse les jeunes à s’émanciper des contraintes traditionnelles – Désormais, l’acte sexuel ne semble plus impliquer un quelconque engagement moral. ISSM-SFMS Cairo 2006 Dans la société traditionnelle La sexualité et le mariage: • En Afrique, on ne conçoit pas la personne isolée, seule, • • • • indépendante. Mariage constitue une étape nécessaire dans la vie de chacun et revêt un caractère sacré. Proportion de femmes célibataires à 50 ans < 6%. (Nations Unies 1998) Sexualité de la femme ne se concevait pas en dehors du mariage. Mariage précoce = moyen de contourner ce risque. ISSM-SFMS Cairo 2006 Sexualité en dehors du mariage • Attitude variable selon les cultures, les us et coutumes • • • et la religion Tolérée voire acceptée en zone non islamisée Prohibée formellement en zone islamisée mais les filles s’affranchissent de ces interdits En Afrique sub-saharienne, plus de la moitié des adolescentes de 15 à 19 ans sont sexuellement actives. – Age moyen des premiers rapports sexuels • Ouganda : 15 ans et demi • Sénégal : 16 ans (Enquête EDS III) ISSM-SFMS Cairo 2006 Sexualité du couple en société africaine traditionnelle • Domination masculine – La sexualité en général était focalisée sur la sexualité du mâle avec l’idée fausse que les hommes savent automatiquement bien faire l’amour et savent ce qui fait plaisir à une femme ( Braconnier A) • L’homme avait l’initiative de l’activité sexuelle (où, quand, comment) • Peu de connaissances sur la sexualité féminine pouvant aider les femmes à réussir leur vie sexuelle, en influant sur leurs attentes et leur comportement. – Sexualité équivalait à pénétration. ISSM-SFMS Cairo 2006 L’inhibition sexuelle des femmes en Afrique • Femmes élevées dans le culte de la pudeur, de la • • • • réserve. L’inhibition féminine est souvent due à la déférence La femme « comme il faut » en Afrique croit qu’elle n’a pas de besoin ou que son besoin n’est pas important. Beaucoup n’osent pas demander de préliminaires poussées ou de caresses spécifiques (Sow F) Elle a du mal à prendre l’initiative à créer des moments d’intimité et à stimuler son désir (Betout N) ISSM-SFMS Cairo 2006 L’érotisme en Afrique • Sociétés africaines très érotisées – tout ce qui se rapporte à l’amour pour l’évoquer, le provoquer, l’exprimer et le satisfaire(Denis R) • Les africaines ont chacune leur secret pour séduire leur homme mais pas pour leur propre plaisir (compétition dans ménage polygames) (Film bal poussière) • Mais aussi, l’érotisme implique une certaine connaissance de son propre corps et de celui de l’autre (ce qui faisait défaut) ISSM-SFMS Cairo 2006 Les pratiques érotiques varient selon les femmes et les sociétés (Pour augmenter le plaisir sexuel de l’homme) • Introduction de parfums ou de fumées odorantes • d’encens dans le vagin, de produits à base de plantes ou de pierres. Les femmes sont initiées au « sexe sec » en Afrique Centrale et du Sud par assèchement vaginal pour le resserrer. – Les hommes préfèrent le vagin étroit dans lequel ils éprouvent du plaisir – Expressions servant à désigner la femme idéale sur le plan sexuel renvoyant à la virginité, l’étroitesse, la fraîcheur, la jeunesse.(Sow F) ISSM-SFMS Cairo 2006 Emancipation de la femme et mutation dans la sexualité ISSM-SFMS Cairo 2006 Pourquoi cette mutation ? • Conditions de vie en pleine mutation – – – – – – – – urbanisation galopante étude des jeunes filles loin des structures familiales Scolarité prolongée des jeunes filles Plus grande influence du travail salarié de la femme Exode rural des jeunes filles qui viennent chercher du travail en ville Augmentation constante des mariages monogames Fréquence des divorces Mondialisation de l’information • Cette évolution a des répercussions sur l’ensemble des comportements sexuels féminins (Betout N) ISSM-SFMS Cairo 2006 • Scolarisation plus importante des jeunes filles • Difficultés économiques des hommes (scolarisation, • emploi, logement) Activité des femmes dans le secteur moderne de l’économie Conduisent à de nouveaux comportements et à de nouvelles conceptions de la relation sentimentale avant le mariage (Isiugo abanihe et al 1991). ISSM-SFMS Cairo 2006 • Age du mariage passe de 18,8 ans à 23 ans en 11 ans en milieu urbain et de 16,5 ans à 17, 7 ans en milieu rural (M. P. Thiriat). • Le pourcentage des filles ayant eu des rapports sexuels avant 15 ans baissent au Burundi, Ghana, Kenya, Zimbabwe, et reste stable au Togo, Malawi Libéria ISSM-SFMS Cairo 2006 La mondialisation de la communication • Emergence de remises en cause puissantes. – Les femmes tentent de se poser comme actrice de leur vie en refusant les contraintes inhérentes à leur identité de femme. – Elles revendiquent un droit au plaisir sexuel, au choix du partenaire (Grenier 2003) – La sexualité a cessé d’être exclusivement focalisée sur le mâle ISSM-SFMS Cairo 2006 • La société africaine a évolué tendant à adopter et à s’approprier un mode de pensée et de vie de type occidental • Les femmes jeunes s’émancipent des contraintes traditionnelles en matière de sexualité ISSM-SFMS Cairo 2006 Synthèse La longue marche vers la conquête du pouvoir sexuel par les femmes en Afrique au Sud de Sahara ISSM-SFMS Cairo 2006 Avant les mouvements d’émancipation • Rapport sexuel pour procréer mais pas pour le plaisir (Femme – objet) • Vie de la femme africaine marquée par : – Pratiques néfastes : MGF – Mariages précoces sans consentement – Polygamie imposée (hommes compulsifs) – Répudiation facile ISSM-SFMS Cairo 2006 Fin années 60 : Mouvements de lutte pour l’égalité des genres • Scolarisation des filles • Introduction de la contraception pour un • meilleur contrôle des naissances Début timide de lutte contre les pratiques néfastes et la morbi-mortalité maternelle • Mais peu de changement dans la vie sexuelle des femmes qui restent encore sous le joug des hommes et subissent la rigueur des traditions ISSM-SFMS Cairo 2006 De 1980 à nos jours : Contrôle de leur sexualité par les femmes • Emergence de femmes « leaders » – Au plan intellectuel – Au plan économique • Développement de la communication – Meilleure connaissance par les femmes de leur corps et de leurs besoins sexuels • Accentuation de la lutte contre les pratiques néfastes et prévention des complications des accouchements ISSM-SFMS Cairo 2006 Double fistule vésico-vaginale et recto-vaginale ISSM-SFMS Cairo 2006 Prise de conscience de l’importance de la sexualité en tant que facteur d’équilibre conjugal et social • Investissement de la femme à visée érotique – Soins corporels en tous genres – Habillement – Artifices divers • Lingeries • Alimentaires : épices, etc.. • Odorat : Encens • Ceintures de perles et autres ISSM-SFMS Cairo 2006 Conclusion • Après avoir gagné le combat pour le vital (lutte pour la survie) et pour le fonctionnel (lutte contre les pratiques néfastes aux femmes et la morbidité des accouchements), les femmes sont en passe de gagner la lutte pour l’agrément (contrôle de leur sexualité) • Les femmes africaines à l’image de leur sœurs occidentales sont devenues économiquement nanties et de plus en plus mieux formées en Afrique, d’où leur indépendance de plus en plus marquée envers les hommes • L’homme africain doit accompagner cette mutation dans un esprit de partage sinon il sera réduit à un rôle de « chargé de mission sexuel » ISSM-SFMS Cairo 2006