Cours du 21/10/08 Lʼenjeu des guerres médiques aux yeux de ce grec mettait en péril lʼidentité politique grecque. La défaite est plus de lʼordre des pertes et profit compte tenu de lʼimmensité de cet empire. Le point de vue dʼHérodote est donc une sorte de filtre. Aller vers les guerres médiques de notre posture, de notre point de vue, est passer par Hérodote, apprécier, lire, interpréter, le recevoir avec nos propres contextes, nos propres filtres. Toute démarche historique est, au départ, constituée de subjectivité dans la mesure où, également, le choix du sujet par lʼhistorien, est lié à toute une série de conditions qui lui sont propre. Ce choix est dicté par sa sensibilité, son envie de choisir une portion du passé mais également en fonction des sources et traces disponibles. Un choix conditionné par les conditions matérielles au sens large du terme, accessibles à celui qui étudie le passé. Hérodote, avec les guerres médiques, pouvait disposer dʼun matériel humain accessible. Si ce sont les traces, les sources matérielles qui détermine le passé, il y a donc des pans entiers du passé qui sont dans le flou, dans le brouillard. Cela concerne, en particulier, des sociétés où lʼécriture nʼétait pas un mode de transmission privilégié. Il y a des parties du mondes où des sociétés se sont passées dʼécritures et où, sans doute, la mémoire orale à cheminé mais où cette mémoire orale est extrêmement aléatoire. Autre exemple: la mise en scène des vainqueurs et des vaincus. Hors, si le vainqueur impose sa vision du passé, cʼest aussi en général car le vaincu a pu voir ses sources, ses archives et ses traces ruinées, annexées, détruites par les vainqueurs. Dʼoù le problème de reconstituer après-coup un passé. Exemple: La Conquista. Lʼinvasion de lʼAmérique du Sud qui vont abattre les empires indiens dont les plus connus sont les Aztèques au Mexique, les Incas au Pérou. Cette Conquista qui, au départ, était militaire, était également spirituel dont la volonté était dʼintégrer les indiens dans des formes culturelles propres au conquistador. Une partie de cette Conquista consistait à détruire toute source de cette civilisation de telle manière que cela rend plus difficile une exploration historienne de ces société indiennes avant lʼarrivée des conquistadores. Dans ce cas précis, il y a un paradoxe dans la démarche dʼassimilation des indiens. Toute une série dʼintellectuels espagnols, chrétiens, ont à la fois assistés aux destructions mais ont voulu sauver en recopiant des textes indiens, en collectant des informations pour des raisons de compréhension intellectuelles des peuples quʼils découvraient et colonisaient en mettant par écrit dans un dictionnaire la ou les langes des indiens. Le choix de lʼhistorien est donc dicté par plusieurs paramètres: - Sa sensibilité - Les éléments matériels Vont conditionner la connaissance du passé. Tout enquête du passé est marqué par des a priori, des points de vue au sens propre du terme. Tout histoire commence par un choix, qui est subjectif, qui aurait pu être différent mais qui nʼest pas absurde. Ce choix est motivable. Puisque lʼenquête objective est dominé par la subjectivité de lʼhistorien, le discours est donc neutralisé par la subjectivité de lʼhistorien. Cela se complexifie là où, dans une démarche de type scientifique, cʼest sans doute de formuler des hypothèses, des questions mais aussi être capable de faire évoluer ces questions à la faveur de lʼenquête, de lʼanalyse des résultats au point de conduire à voir, se modifier, se transformer ces hypothèses de départ. Lʼenquête objective est suffisamment puissante pour corriger un certain nombre dʼeffets de subjectivité inévitable! 13 Le point de vue en question peut-être modifié à la lumière de lʼenquête menée. Cʼest pourquoi lʼobjectivité ne neutralise pas la subjectivité. Lʼobjectivité à la capacité de relativiser, de recentre la subjectivité. La différence entre Hérodote et nous est que ce dernier ne la savait pas. Nous avons conscience que nous pouvons changer, à la lumière dʼune enquête. Lʼhistoire est donc choix et peut-être raisonné au sens où le fil de lʼenquête peut modifier le point de vue de départ de lʼhistorien. Quand je choisi un élément du passé, une époque, pour lʼétudier, on extrait une matière qui est inscrit dans le continuum du temps. Extraire un sujet, un objet dʼétude du passé, cʼest déchirer ce continuum. Il faut arracher au temps des acteurs, des événements car si on ne le fait pas, le passé sera plat. Il est impossible dʼapprocher le passé sans provoquer une extraction qui le perturbe. Sʼil nʼy a pas dʼextraction, il ne saurait pas y avoir de connaissance du passé. Par cette extraction, cʼest lʼhistorien qui fait exister le passé. Dans le cas dʼHérodote, sʼil nʼavait pas extrait les guerres médiques pour nous les montrer, nous aurions sans doute une autre lecture des guerres médiques. Nous ne connaissons le passé que par des intermédiaires. En découvrant Hérodote, lʼhistoire est inséparable de lʼhistorien. Cʼest une phrase qui se retrouve dans un chapitre de Léon-Ernest Halkin. Le tout premier des historiens nous le témoigne par son choix: les guerres médiques. Par la rupture quʼil fait dans la trame du temps, en privilégiant tel ou tel événement et inévitablement, on établit une hiérarchie des événements du passé qui est assumée par lʼhistorien. Et enfin, cʼest lʼoeil dʼHérodote qui perçoit les guerres médiques et cʼest lʼoeil dʼHérodote qui confère un sens à ces guerres médiques. Cette question de la signification des événements est intimement lié à la question de la causalité. La causalité, avec lʼoeuvre dʼHérodote, mets en lumière les causes humaines des événements. Thucydide Il avait entendu, étant enfants, les histoires dʼHérodote. Par toute une série dʼaspect, Thucydide est différent dʼHérodote. Thucydide a vécu vers 460-395 ACN. Il est concerné par une autre guerre: Par la guerre du Péloponnèse qui sʼest déroulée entre 431 et 404 ACN. Cette guerre opposa Athènes à Sparte. Thucydide est un acteur de cette guerre car il était général Athéniens. Cʼest donc un acteur clé. Cʼest différent de la situation dʼHérodote car ici, nous avons un acteur témoin des faits quʼil va raconter par la suite car il va écrire une histoire des guerres du Péloponnèse. Il écrit une histoire de la guerre du Péloponnèse dans un état dʼesprit particulier dans la mesure où cʼest un général qui a été défait, qui a perdu, qui a été battu. A lʼépoque, on nʼacceptait pas la défaite de tel manière que ce général fut exilé comme punition à sa défaite. Du coup, dans son examen de la guerre du Péloponnèse, il y a une question sousjacente: “Pourquoi ai-je échoué?” Cette question est sous-jacente a son examen de lʼensemble de la guerre et cette question appelle des réponses et des causes de lʼéchec. Hors, chez Thucydide, il y a un effort de rationalisation très puissant. Chez lui, chercher les causes, ce nʼest pas se justifier. Il veut vraiment comprendre les causes comme sʼil nʼétait pas concerné. Il y a donc ce soucis de la causalité (comme chez Hérodote) et est extrêmement présent dans 14 lʼoeuvre de Thucydide. Il va proposer une analyse qui permettrait dans les mêmes conditions, dans une guerre future, de ne plus échouer. Il y a la volonté pédagogique, la volonté de tirer des leçons, au sens fort du terme, du passé pour ne plus recommencer certaines erreurs dans lʼavenir. Cʼest avec Thucydide quʼon amorce cette facette de lʼhistorien de savoir ce qui est pertinent. Est-ce quʼune pédagogie de lʼhistoire est porteuse, de tirer les conclusions de lʼhistoire permet de ne pas refaire les mêmes erreurs? Pourquoi les événements en histoire sont singuliers? Car les événements nʼarrivent quʼune fois. Parce que les causes, pour quʼils se produisent sont innombrables. Il nʼy a jamais deux fois le même événement car les causes pour produire un événement sont innombrables. Dʼune certaine manière, il nʼy a pas de leçons de tirer du passé car les événements de demain seront singulier et seront provoqués par des causes innombrables. La connaissance du passé, permet, quand elle est bien comprise, de percevoir des analogies entre les événements (mais avec beaucoup de prudence). Le processus même de lʼenquête comme Hérodote et Thucidyde aiguise la raison de tel manière que cette raison aiguise notre manière de percevoir lʼavenir. Numa Fustel de Coulanges. Présent dans Léon-Ernest Halkin. Il dit que lʼhistoire ne sert pas à prévoir mais lʼhistoire sert à mieux voir. 15