Cours du 14/10/08
La déclaration des mythes contribue à la transmission dʼune forme de mémoire qui est
figée, perpétuelle. Lorsquʼarrive le Vième siècle en Grèce, il nʼy a pas de rupture absolue
avec lʼépoque précédente. Il y a cohabitation entre les mythes et un discours historien.
Les transformations de la pensée sont le fruit dʼélaboration lente.
Pourquoi lʼhistoire connaissance est-elle apparue en Méditerranée?
Les historiens dʼautrefois ont trouvé une formule: le miracle grec. Expression imagée qui
dénote leur intérêt à constater une série de mutations. Concernait les cités grecques, en
particulier Athènes. Elles nous mettent en liaisons avec les contemporains grecs du Vième
siècle.
On pourrait parler dʼémergence de la raison en tant quʼinstrument proprement humain
dʼanalyse et de compréhension du monde. Diverses formes de ce qui est appelé la
rationalité sont perceptibles dans une série de disciplines comme les sciences au sens où
nous lʼentendons aujourdʼhui. Il y a une interrogation rationnelle pour tenter de
comprendre le réel où lʼobservation devient aussi importante, sinon plus, que lʼintuition ou
la spéculation. La spéculation est plutôt une analyse intérieure qui ne fait pas
nécessairement appel au sens.
La rationalité et la raison touchent également la philosophie. A travers quelquʼun comme
Socrate qui, en quelque sorte, ramène la philosophie sur Terre et chercher à développer
une morale, cʼest-à-dire une conduite. Lʼémergence de la raison est perceptible dans
lʼorganisation politique de la cité.
Cette organisation politique nous est perceptible avec un sentiment dʼappartenance à la
cité qui est dʼune nature nouvelle. Cʼest-à-dire où les citoyens, qui composent la cité,
développent un sentiment dʼappartenance qui fait dʼeux des acteurs de la cité aujourdʼhui
mais également en prévision de demain, de lʼavenir. Sʼinscrit un projet politique dans
lʼorganisation de la cité et qui contribue à donner une direction et donc un sens, une
signification à la cité.
La cité nʼest plus seulement la somme de chaque citoyen. La cité met une plus-value qui
sʼincarne dans le projet politique, dans le projet démocratique.
Qui sʼincarne dans les affaires humaines sur Terre. Il y a donc un pragmatisme de la
politique qui se développe et qui organise la cité grecque. Cʼest un pragmatisme en liaison
avec la raison, pour comprendre la réalité.
Le citoyen a un nouveau sentiment dʼappartenance qui nʼest plus ce sentiment
dʼappartenance tribale mais qui est un sentiment dʼappartenance à un destin collectif.
Cʼest dans ce contexte que la discipline historienne va forger ses premières armes.
Exemple dʼhistorien à cette époque:
1. Qualifié comme père de lʼhistoire:
Hérodote
Il a vécu entre 484 et 425 ACN. Cʼest un grec né en Asie mineure. Il est contemporain de
lʼélévation du Parthénon à Athènes et également de Socrate. Hérodote va sʼintéresser, en
particulier, sʼinterroger sur une succession dʼépisodes qui se déroulèrent entre 490 et 479.
Une série dʼépisodes militaires connus sous le nom de guerres médiques. Les guerres
médiques opposèrent les cités grecques aux Perces.
Chronologiquement, Hérodote était enfant lorsque ces guerres touchèrent à leurs fins.
Cela ne fait pas de lui un observateur direct. Il y a donc un décalage entre les événements
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quʼil traitent et son récit. Un décalage qui nʼest pas considérable. Les guerres médiques
sont encore, dʼune certaine manière, dʼactualité lorsquʼil est adulte et cela lʼamène à
rencontrer des témoins de cette époque.
Pour faire comprendre le déroulement des guerres médiques, il va également prendre du
champ et sʼéloigner dans le temps puisque son oeuvre prend forme sous le règne de
Cyrus en 549.
Quel est la caractéristique de la démarche dʼHérodote?
Cʼest le mot dʼenquête. Hérodote va mener une enquête au sens premier du terme. Il va
mener une enquête, il va aller voir et le mot enquête, ce travail dʼenquête sʼappelle
“historie”. Celui qui mène lʼenquête est un mot nouveau quʼon nomme: “histore”, cʼest-à-
dire le personnage qui mène lʼenquête.
Il dévoile son objectif, très vite, à ses lecteurs. Son objectif est dʼempêcher que tombe
dans lʼoubli les grands exploits accomplis par les Grecs et les Barbares. Le but dʼHérodote
est de retarder lʼeffacement des traces des actions humaines.
Il nʼest donc pas dans la posture de celui quʼon appelait dans la Grèce Antique: “lʼAede”.
LʼAede est celui compteur, poète, qui chantait les exploits glorieux du passés, les
légendes, la gloire immortelle des héros.
Lʼambition dʼHérodote est plus modeste puisquʼil veut sauver quelque chose qui
disparaîtra.
Lʼouvrage dʼHérodote sur les guerres médiques est conçu comme un recueil de textes
destinés à être lu à autre voix, morceaux par morceaux et cʼest pourquoi la traduction de
lʼouvrage dʼHérodote utilise le mot Histoires au pluriel pour désigner son histoire, son
enquête des Guerres Médiques.
Que doit-on entre par le mot enquête?
Lʼenquête est une démarche qui, chez Hérédote, va impliquer de nombreux
déplacements. Il est un grand voyageur qui parcours le bassin méditerranéen. Il rencontre
plein de gens et est curieux de tout. Il fait mention, allusion de toute une série dʼéléments
qui lʼintéresse lorsquʼil rencontre des populations diverses. Il est un peu lʼancêtre des
ethnologues. Il sʼintéresse aux coutumes, aux moeurs, etc...
Sa réflexion sʼarticule sur ce quʼil appelle lʼopsis et lʼacoé.
Opsis: Optique, regarder, voir.
Acoe: Acoustique, écouter.
Aller voir les sources, aller voir les traces, aller voir les lieux, les populations concernées
par ces guerres. Aller voir les espaces, le terrain, écouter les récits, les témoignages
oraux, les mentions, les références à ces guerres médiques. Le souci dʼHérodote est de
sauver un souvenir sʼarticule sur une enquête qui repose sur une quête dʼinformation.
Ceci a déjà quelque chose de neuf mais ce qui devient encore plus novateur sont les
questions quʼil se posent. Il veut savoir le comment et le pourquoi de ces guerres. Il veut
connaître les faits et les événements et surtout, il veut connaître les causes des
événements.
Le problème de la causalité en histoire! Quʼest-ce qui provoque tels ou tels événements.
Expliquer, cʼest dʼabord faire état des lieux des causes des événements. Il veut dʼabord
expliquer, comprendre par les causes et ce qui est tout à fait neuf est quʼil ne va pas faire
remonter son explication et son récit à une cause première, à une cause divine, à une
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cause originaire. Hérodote ne va pas articuler son récit comme les mythes, il va sʼen tenir
à examiner, répertorier des causes humaines, pour des actions humaines pour lʼhistoire
des hommes. Il ne va pas céder à la tentation de trouver un mode dʼexplication qui fait
appel aux dieux, aux demi-dieux. La proximité des dieux sont tels quʼils font des enfants
avec les hommes et quʼaucun prince nʼa pas au moins un souverain qui soit un demi-dieu.
Non, Hérodote veut se référer quʼà des causes humaines.
Mais il y a plus, et cʼest cela qui est révolutionnaire:
Hérodote va formuler une idée dont la modernité est absolument extraordinaire. Il va tout
simplement dire, constater les choses auraient pu se passer autrement. Les Grecs ont
gagnés les guerres médiques mais Hérodote dit que les Perses auraient pu gagner.
Où est la nouveauté dans ceci?
Il a introduit lʼincertitude dans les actions humaines. Cela fait que lʼhistoire est accidentelle
donc quʼelle nʼest pas écrite. Y-a-t-il une destinée dans ce cas? Hors la pensée mythique
repose sur lʼidée quʼil y aie une destinée et quʼil y a un sens de lʼhistoire. Hérodote doute
sur ce point qui est la pensée dominante de son temps.
Quoi de plus rassurant quʼune histoire décrite à lʼavance où des événements sont
inévitables.
Les choses auraient pu se passer autrement, cʼest-à-dire que les Perses auraient pu
gagner. Et pour Hérodote, les guerres médiques sont un enjeu de civilisation. Si les
Perses avaient été vainqueurs, ils auraient détruits la cité, lʼorganisation démocratique
grecque. Et donc, en consignant les causes des événements, Hérodote décèle un enjeu
quʼil qualifie dʼenjeu de civilisation opposant un modèle, celui de la cité grecque, qui
repose sur la “dike” (cʼest-à-dire la mesure) où règne une loi commune. Ceci donc, opposé
au régime Perse qui repose sur lʼHubris (cʼest-à-dire la démesure). Cʼest donc le
despotisme des rois qui règnent en souverain absolu!
La mesure opposée à la démesure! Opposition de deux modèles dʼorganisation politique
dans lʼAntiquité en supposant que les guerres médiques étaient une guerre de civilisation.
Si les Perses avaient gagnées, les petites îles grecques auraient été barbarisées.
Hérodote reste un homme de son temps car il est incapable dʼadopter un autre point de
vue que le point de vue grec. Il est incapable de lire les événements avec un point de vue
qui ne serait pas grecs. Il est incapable dʼévaluer que peut-être, ces guerres médiques,
pour lʼimmense empire perses nʼont pas la même importance, la même dimension que
pour Hérodote. Pour lʼimmense empire Perse, cette défaite est profit et perte. Hérodote
nʼinterroge pas, à ce niveau-là, la vision et la pensée de lʼimpersonnel.
Quʼest-ce que cela signifie pour nous?
Dans lʼexemple dʼHérodote se combine, dʼune part, la volonté dʼenquête, de mener une
enquête objective qui repose sur les sens (ouïe, optique), sur les sources et ceci est
combiné avec une lecture “subjective” du sujet sur les guerres médiques. Une lecture
subjective dʼHérodote dans le cas présent. Lʼobjectivité de lʼenquête est intimement lié à la
subjectivité de lʼenquêteur. Toute démarche historique est entravée de cette subjectivité.
Il se trouve que les générations qui ont suivis et nous encore, pour connaître les guerres
médiques, nous allons passer par Hérodote et recevoir Hérodote avec notre subjectivité
également! Nous nʼallons projeter dans Hérodote notre propre subjectivité. Ce nʼest pas
un mot négatif car cʼest comme cela!
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