DOSSIER Effroyables Jardins + articles de Presse

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PRESSE UNANIME
Tournée
Théâtre Carpe Diem - 12 rue des Chasseurs 95100 Argenteuil
direction André Salzet
tél : 01 34 10 21 21 // 06 86 91 55 62
Association loi 1901- siret 482 867 025 00025 - licence Drac N° 2-1001429
cie subventionnée par la Ville d’Argenteuil et le Conseil Général du Val d’Oise
mail : [email protected]
site : http://theatre.carpediem.free.fr/
Effroyables Jardins
de Michel Quint
© Editions Gallimard (2000)
adaptation, scénographie et mise en scène
Márcia de Castro
interprétation
André Salzet
lumières
Ydir Acef
réalisation décor
Roger Ramery
audio – photos spectacle libres de droits
Michel Paret
visuel
Guy Maurette
graphisme
Françoise Genton
production
Théâtre Carpe Diem Argenteuil (direction André Salzet)
avec le soutien de la Ville d’Argenteuil et le Conseil Général du Val d’Oise
tournée
création en résidence au Théâtre de Muret (31) du 20 au 23/10/08
Théâtre du Petit-Saint Martin du 22/1/09 au 15/3/09
Foire Saint-Germain Paris 13/6/09
Festival d’Avignon du 8 au 31/7/09
Romorantin 24/9/09
Divonne les Bains 3/10/09
Théâtre du Lucernaire du 25/11/09 au 24/1/10
Château-Thierry 1/3/10
La Celle Saint-Cloud 12/3/10
Chartres du 25 au 28/3/10 et du 1er au 4/4/10
Saint-Jacques de la Lande 18/5/10
dossier accessible sur le site
http://theatre.carpediem.free.fr/
résumé de la pièce
texte paru en septembre 2000
Le protagoniste, un haut fonctionnaire de la Commission Européenne des finances, tout
jeune enfant, détestait les clowns et trouvait particulièrement ridicules et embarrassantes
les pitreries auxquelles s'adonnait son père, instituteur, qui passait son temps libre habillé
en auguste, allant jusqu'à délaisser sa vie familiale.
Un jour, son cousin Gaston lui raconte comment ce père et lui sont entrés dans la
Résistance pendant la seconde guerre mondiale, comment ils sont arrêtés et retenus
comme otages par les nazis, comment ils sont gardés par un soldat clown qui refuse de
perdre son humanité et comment ils sont sauvés in extrémis par le sacrifice extraordinaire
d’un inconnu.
Ce passé mouvementé mêlant quiproquo, humour, peur et amour éclaire l'esprit de
l'adolescent sur les faits et gestes de son entourage marqués par la guerre. Il comprend
alors la complicité muette de sa mère vis à vis de son père, les pirouettes clownesques de
celui-ci et, aussi sûrement le plus important, la grandeur de l’homme et le devoir de
mémoire que tout individu doit assumer durant sa vie.
En hommage au père disparu, le jeune garçon devenu adulte se rend sous le
déguisement d’un clown, à Bordeaux au procès de Maurice Papon, l’ancien fonctionnaire
du régime vichyste.
Des personnages d’une rare humanité, un texte d’une grande sensibilité.
Une histoire toute simple... Un épisode de la Résistance
raconté avec beaucoup de pudeur entre rires et larmes.
extrait
« À mon avis, quelles que soient vos responsabilités dans le sabotage, vous avez tort de
marcher dans la combine du Herr Oberst... L’idéal est de l'obliger à vous fusiller tous ou
aucun... Si vous lui offrez une victime expiatoire, vous collaborez, vous le justifiez, sa
proposition de choix inhumain devient raisonnable, presque charitable... »
Tous ces mots, tellement beaux, recherchés, que je m'en souviens comme des étoiles,
c'était Bernd, assis à nouveau au bord du trou. « Victime expiatoire, choix inhumain... »
T'en parles à ton aise, a dit Henri. Vaut mieux en sacrifier un pour en sauver trois que
faire les fiers et y passer tous les quatre !
« Consentir à autrui le pouvoir de vie et de mort sur soi ou se croire si au-dessus de tout
qu'on puisse décider du prix de telle ou telle vie, c'est quitter toute dignité et laisser le mal
devenir une valeur. Pardon d’être, avec cet uniforme, du côté du mal ! »
note d’intention
Quand André Salzet m’a proposé de mettre en scène le texte de Michel Quint, je me
suis demandé en quoi ce récit pourrait avoir un écho suffisamment profond en moi pour
que je puisse l’offrir au public.
D’origine brésilienne, j’ai vécu, quand j’étais adolescente dans les années 70, la
dictature militaire au Brésil. L’interdit, là-bas non plus, n’avait pas de limites comme la
violence d’ailleurs : interdits de se réunir, de parler, d’écrire, de lire certains ouvrages. La
censure et le silence étaient la règle ; la peur était vécue au quotidien par tous, peur la
nuit d’entendre les pas des paramilitaires venir vous enlever, peur le jour du regard du
policier ou du voisin, de l’autre qui pouvait, aussi, être du côté du mal...
Effroyables Jardins fait surgir en moi tout d’abord, les bribes de la mémoire oubliée, les
réminiscences de l’adolescence, ce « réveil fortuit de traces anciennes dont l'esprit n'a
pas la conscience nette et distincte » dont parle Sainte-Beuve.
Le narrateur, haut fonctionnaire à la Commission Européenne des finances se souvient
et « conte » son histoire : le rendez-vous manqué avec son père sur le quai de la gare de
Lille en partance vers Bordeaux où doit se dérouler le procès Papon. La mort sur ce quai
de ce père instituteur, pitre, clown triste et ridicule déclenche cet insoutenable besoin de
raconter et de susciter l’image de celui qui fut la cause de toutes ses douleurs et de toutes
ses hontes. Il comprend enfin la bravoure et la fraternité que son père, Résistant,
dissimulait derrière son humilité.
Ce fils qui, à la mort du père tellement rejeté, est capable de faire cet effort de résurgence
de la compassion, rejoint notre histoire à tous.
Ombres et lumières !
Un couloir de lumière dans la vie étriquée de ce haut fonctionnaire où les ombres
surgissent et s’imposent dans son présent, si soudaines et si réelles. Il lui est impératif de
se souvenir et de se raconter. Une mémoire oubliée qui se veut perdue dans le trop plein
de sentiments contradictoires, la mesquinerie de l’adolescent face à la présence de ce
père au passé dérisoire de Résistant.
Comme un mannequin, peut être une marionnette qui, tour à tour, représente le père,
l’oncle Gaston, Emile, Henri, Berndt, le « « conteur » peut, enfin se livrer sans retenue :
« J’ai tout ressorti, tout épousseté » avoue-t-il.
Ombres et lumières !
Un brouhaha de hall de gare, celle aussi d’une salle des pas perdus de palais de
justice.
Des images fugitives et subliminales d’une foule traversant l’espace.
Autant de fantômes évoqués par le souvenir de l’homme conteur …
Autant de fantômes surgissant dans les plaidoiries du procès Papon …
Autant de fantômes enfouis dans nos vies…
Márcia de Castro
André Salzet
Après des études d’ingénieur, il se consacre au théâtre en 1984 et suit les cours de
l'Ecole Dullin. Il a récemment adapté et joué Le Joueur d'Echecs de Stefan Zweig
ème
(1000
en mai 09), mise en scène d’Yves Kerboul et La Colonie Pénitentiaire de
Franz Kafka (07-08), mise en scène de Laurent Caruana.
Il a débuté au théâtre de l’Epée de Bois (1987 à 89) dans Volpone de Ben Jonson et
Tamerlan de Christopher Marlowe dans les mises en scènes d'Antonio Diaz Florian. Puis
il a joué dans La Nuit Miraculeuse, film du Théâtre du Soleil sur les droits de l’homme,
réalisé par Ariane Mnouchkine en 1989.
Il dirige la compagnie Théâtre Carpe Diem Argenteuil où ses activités de comédien,
metteur en scène et adaptateur l'amènent à côtoyer les textes et les auteurs les plus
divers (Maupassant, Stefan Zweig, Thomas Bernhard, Franz Kafka) dans une démarche
volontairement ouverte et éclectique.
Depuis 2008, il travaille en collaboration avec Márcia de Castro : de leur envie de porter
sur scène des textes littéraires, est né le spectacle Effroyables Jardins.
Márcia de Castro
Metteuse en scène associée au Théâtre Carpe Diem. Formée à l’Ecole Dullin et au
Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique de Paris, elle a joué, entre autres,
dans Veillée Irlandaise de Bob Maguire au Théâtre de l'Odéon, mise en scène de Philippe
Mercier, Les Acteurs de Bonne Fois de Marivaux, mise en scène de Philippe Adrien au
Théâtre de l’Athénée, Le Misanthrope de Molière mise en scène de Jean Luc Jeener
(tournée en Afrique, Europe et Moyen Orient).
Dans sa découverte du monde, elle participe, à Ouagadougou, à la création de la
première école de théâtre. A Dakar, elle crée et dirige la troupe de clowns sénégalais
Côté Jardin. A Madagascar, elle met en scène Mille francs de récompense de Victor Hugo
avec la Cie Landyvolafotsy et Anthropo-fagïa avec la chorégraphe Gaby Saranouffi.
Elle a adapté et mis en scène Effroyables Jardins au Festival d’Avignon 2009. Elle joue
actuellement Poivre et sel, scènes piquantes de vie de couple.
Michel Quint
Titulaire d'une licence de lettres classiques et d'une maîtrise d'études théâtrales, après
avoir enseigné le théâtre dans un lycée à Roubaix, il se consacre désormais
exclusivement à l'écriture.
Il a commencé par écrire du théâtre pour Théâtre Ouvert puis des feuilletons
radiophoniques pour France Culture.
Il a obtenu le Grand Prix de la littérature policière en 1989 pour Billard
à l'étage (Ed. Rivage).
Son plus grand succès est Effroyables Jardins (Ed. Joëlle Losfeld, 2000).
Ses dernières publications : Les Joyeuses (Ed. Stock 2009), Max (Ed. Perrin 2008),
Et mon mal est délicieux (Ed. Gallimard 2005), Aimer à peine (Ed. Joëlle Losfeld 2002),
A l'encre rouge (Ed. Rivages Noirs 2002)
note de l’auteur
« Je ne sais pas si j'ai bien fait de tout déballer cette vieille affaire de famille. Une
anecdote de la seconde guerre comme il y en a en mille, et même pas héroïque. D'abord
vous avez les vôtres, d'affaires, et puis vous allez peut-être m'en vouloir parce que c'est
quand même plus confortable, je le sais d'expérience, vu qu'avant d'écrire ce bazar,
j'avais ma tranquillité, c'était plus confortable d'ignorer, d'avoir oublié complètement.
Je veux dire : de plus faire le lien entre les effroyables jardins de nos mémoires et les
autres, qui continuent à fleurir sauvage, partout et sans cesse. Parce que la barbarie c'est
pas que de l'autrefois, une vieille maladie circonscrite dans l'Histoire et vaccinable à coups
de dépôts de gerbes et de commémorations. C'est du passé vivant. Evidemment, malgré
tout, vécue, racontée par un clown à trois ronds, cette affaire prend tout de suite une
tournure officielle ! D'ailleurs au fond, le problème est là : est-ce que vous pouvez,
vous spectateurs, nous faire confiance ? Croire que le pire n'arrête pas de survenir et
qu'on peut quand même croire en l'humanité ? C'est donc à cela qu'on vous convie :
mettez un nez rouge, ce soir, et sûrement que le monde ne sera pas moins cruel mais
peut-être qu'on sera un petit peu plus des hommes qui n'en détournent pas le regard. »
« André Salzet a bien semé, raclé, planté dans les Effroyables Jardins »
Michel Quint
point de vue pédagogique
Le roman de Michel Quint, publié en 2000, est d’un intérêt pédagogique incontestable,
comme l’affirment les professeurs qui l’ont fait découvrir à leurs élèves, en raison du
contact simple et familier qu’il entretient avec le lecteur. Il permet d’aborder de manière
efficace et originale la question du genre biographique, entre fiction et réalité.
L’environnement historique (la période de la Résistance et de l’Occupation) et ses
incidences sur l’actualité (le procès Papon et ses différents rebondissements) permettent
de relier cet ouvrage à une réflexion plus générale sur l’engagement politique et la
citoyenneté.
Des rencontres avec les élèves peuvent être organisées avant ou après la représentation
extraits presse Festival d’Avignon 09
La pièce opère une introspection pleine d'émotion portée par un comédien, les chairs à vif
au fur et à mesure que la chrysalide laisse naître le papillon.
Laissez-vous surprendre par cette mue.
Magazine Théâtral
La mise en scène est sobre, entre ombre et lumière, entre tragédie et espoir.
André Salzet, qui triompha dans « Le Joueur d’Echecs » plonge le public au cœur d’un
conte très… réel. La folie des hommes y prend souvent le pas sur la raison, mais, à la fin,
c’est l’amour et la tendresse d’un sourire qui gagnent. On dit alors un seul mot : bravo !
La Provence
Dans un décor dépouillé, le comédien parvient à travers un jeu subtil à nous transmettre
une tout autre image de cet épisode historique (la Résistance).
Le Comtadin
Le juste équilibre entre un réalisme induit par les situations et un soupçon de mystère
propre à l’univers du conte, souligne la richesse de ce texte mis en scène avec sobriété
par Márcia de Castro et auquel le comédien transmet toute la générosité, l’humour, la
tendresse et, précisons-le, toute la force ludique et pédagogique à la fois.
Une performance incandescente.
Rue du Théâtre
05/01/2010
Promenade émouvante dans
les «Effroyables jardins»
Nathalie Simon (Figaroscope)
Théâtre du Lucernaire
53 rue Notre Dame des Champs 75006 Paris
jusqu’au 24 janvier 2010
Sollicitée par le comédien André Salzet, le metteur en scène d'origine brésilienne
Márcia de Castro a adapté le livre à succès que Michel Quint a publié en 2000
(chez Joëlle Losfeld). L'histoire est à la fois banale et magnifique. Dans les années
1950, un instituteur se déguise en clown pour amuser les autres. Il ne sait pas que
son fils a honte de lui, de son « maquillage ridicule », et le considère comme
« le plus triste des clowns tristes ». Jusqu'au jour où son oncle Gaston lui raconte
qu'ils ont participé à la Résistance. D'abord « pour rigoler », puis sérieusement.
Après avoir saboté un transformateur électrique, ils sont faits prisonniers.
S'ils ne se dénoncent pas, tous les détenus seront fusillés.
Critique
Malgré le titre de la pièce éponyme présentée dans le salle du Lucernaire baptisée
« Théâtre noir », on sourit souvent face à André Salzet, seul sur une scène dépouillée.
Vêtu d'un costume classique sur une chemise jaune - la couleur de la perruque
de l'Auguste et de la Panhard familiale qui font le désespoir du fils -, l'acteur relate le
touchant destin d'un homme comme les autres avec un accent patois parfois
prononcé, mais toujours compréhensible. Il dit si bien les mots ciselés de Michel Quint
qu'il fait revivre au public l'arrestation des deux « héros », leurs souffrances dans la
fosse, le « trou » où ils sont détenus et espèrent un miracle. Une mèche sur le front,
le regard niais, il interprète avec un talent époustouflant le gardien, étonnamment
humain : « Pardon d'être, avec cet uniforme, du côté du mal », justifie le soldat
qui jongle avec des tartines de pain emballées dans du papier journal. Mine de rien, si
on peut l'écrire, André Salzet remue le cœur du spectateur en traitant de
l'importance de la vérité, de l'idée de transmission et, d'une certaine façon,
du devoir de mémoire. Répondant ainsi au vœu de l'auteur d'un ouvrage qu'on a
envie, du coup, de relire. Parti pour une carrière d'ingénieur, André Salzet a eu la
bonne idée de suivre des cours à l'École Dullin. Amoureux de littérature, il a
récemment présenté et joué Le Joueur d'échecs de Stefan Zweig et dirige la
compagnie Théâtre Carpe Diem à Argenteuil. C'est un homme rare, dont la
générosité se devine sur les planches.
Un film de Jean Becker
Professionnellement, Michel Quint a au moins deux raisons de se réjouir. Car son livre
a également fait l'objet d'une adaptation très réussie au cinéma. Elle a été réalisée en
2003 par Jean Becker avec une pléiade d'acteurs que n'importe quel metteur en scène
envierait : à commencer par Jacques Villeret, disparu en 2005, André Dussollier,
Benoît Magimel, Thierry Lhermitte, Isabelle Candelier, Damien Jouillerot...
Si Jean Becker a modifié certains éléments du texte original, il a en revanche fait
ressortir l'humanité de l'histoire, à l'instar de Márcia de Castro, laquelle a tout misé
sur le talent de son interprète.
Sylviane Bernard-Greish
SORTIR
Publié le 02/12/2009 à 17:32 Le Point.fr - Culture
THÉÂTRE / LUCERNAIRE
Entre effroi et tendresse, les jardins de Michel Quint
Effroyables jardins de Michel Quint. Mise en scène de Marcia de Castro. Avec André Salzet. Lucernaire,
Paris 6e jusqu'au 23 janvier 2010.
Mais pourquoi diable André, l'instituteur bonhomme, a-t-il toujours eu ce nez rouge
vissé sur la bouille, ce fard blanc et cette perruque ridicule ? Pourquoi a-t-il toujours
passé ses dimanches en goguette, à faire le pitre, plutôt qu'en famille, comme tous les
autres ? Son fils, qui tient en horreur les Auguste, le découvrira au fil du récit de
l'oncle Gaston. "Sans vérité, comment peut-il y avoir de l'espoir ?" Tendu, précis, le
texte de Michel Quint est magnifique. Dans une mise en scène de Gérard Gélas, JeanPaul Farré en offrait une superbe découverte, voilà quelques années. Il y eut ensuite
le film de Jean Becker. Pas forcément évident d'arriver après.
Pourtant, André Salzet se fait sa place dans ce jardin luxuriant, entre effroi et
tendresse. Costume de laine épaisse, chemise jaune, tignasse blanche, il déroule son
récit en douceur, l'oeil malicieux et le sourire timide. C'est un peu lent, long, au
départ, puis ça se resserre ensuite. L'acteur est tour à tour André, le soldat-clown
Berndt, et tous les autres personnages. Dans l'ombre et dans la lumière, il se
souvient. Candide, touchant, sur le fil, l'air de rien. C'est précisément de ce presque
rien que naît l'émotion. Sans pathos, sans trémolos dans la voix, il nous embarque,
dans un trou humide, dans un transfo EDF saboté, dans un Nord occupé, dans un
bistrot peuplé de Chtis, dans un tribunal, au procès de Maurice Papon. Et peu à peu, la
petite histoire dévoile la grande, avec dignité, et une farouche humanité.
Par Nedjma Van Egmond - 2 décembre 2009
Studio Théâtre - Laure Adler
Coup de Cœur de Mr Guy
Effroyables Jardins de Michel Quint
adaptation, scénographie et mise en scène: Márcia de Castro
avec: André Salzet
lumières: Ydir Acef
Théâtre du Lucernaire, 53 rue Notre Dame des Champs 75006 Paris, jusqu'au 24 janvier
Entre un aller à Bordeaux, où il va assister au procès de Maurice Papon, et un retour
introspectif à son adolescence, le narrateur d'Effroyables Jardins explore le lien entre le
jardin de son histoire intime et l'effroyable terrain de la guerre de 39-45, labouré par la
haine et l'inhumain.
Adolescent, bon élève, le narrateur se sent promis à un bel avenir, il rêve de hauteur.
Mais il aimerait être plus bas que terre lorsque son père s'accoutre de son costume de
clown. Dans ces moments, il se sent envahi par la honte.
C'est Gaston, l'ami de la famille, qui va l'entraîner dans les sous-couches du passé pas si
lointain, là où lui et André le père du narrateur, aujourd'hui instituteur, furent résistants et
otages. Les révélations de Gaston vont révolutionner autant le regard de l'adolescent sur
son père, que celui sur la vie.
En révélant à l'adolescent que son père et lui ont résisté et survécu à la haine, Gaston lui
révèle dans un même temps l'incongruité de sa honte.
A la fois roman initiatique et fable philosophique, Effroyables Jardins révèle au lecteur, ici
au spectateur, que l'identité de chacun prend ses racines dans le terreau de l'histoire et
de ses désordres. L'ignorer, c'est faire le lit de la peur et de la honte de l'autre. Pire, c'est
se retrouver désarmé lorsque l'ignorance métamorphosée en déni, donnera libre court à la
haine destructive et meurtrière.
Le clown, ici figure allégorique du vivant et de ses désordres, sort vainqueur en
introduisant du sens et de la pensée dans les rouages de la machine aux ordres de la
mort.
L'auteur, Michel Quint, a écrit des dramatiques pour la radio et enseigné le théâtre. C'est
peut-être une des raisons pour lesquelles ce texte supporte si bien l'adaptation sur un
plateau.
La scénographie et la mise en scène de Márcia de Castro, soulignent et accompagnent
tout en nuance les enjeux du texte.
Dans le rôle du narrateur, André Salzet est émouvant de justesse dans son habilité à
trouver un juste équilibre sur le fil de son jeu, qui l'empêche de sombrer dans le pathos.
Un spectacle d'une incroyable actualité, où l'identité n'est pas une fleur rêvée, renouvelée
à l'identique dans un jardin en ordre et aux ordres, où il suffirait d'obéir. L'identité, ici, est
synonyme de singularité, d'aléatoire, d'enracinement dans le vivant, où vivre c'est penser
sa place en incluant celle de l'autre.
Coup de Cœur de Mr Guy 18/12/09
Le Quotidien du Spectacle Vivant en Europe, depuis 2003.
EFFROYABLES JARDINS
UN SACRÉ COMEDIEN !
Avec la même fougue que pour « Le Joueur d’Echecs » qu’il interprète en alternance avec
« Effroyables jardins », André Salzet s’empare du texte de Michel Quint sur la scène du théâtre
Saint-Martin. Une performance incandescente.
Michel Quint, présent ce soir-là, fut catégorique : « C’est un texte
très difficile à mémoriser ». Tournures de phrases, pluralité des
registres de langues, multiplicité des personnages auxquels il faut,
sur la scène, insuffler corps, vie et identité : autant d’éléments qui
compliquent plus encore le « simple » travail de la mémorisation.
André Salzet relève ce défi. Ce double défi même, puisqu’il joue ce
texte en alternance une semaine sur deux avec « Le Joueur
d’Echecs » de Zweig sur cette même scène immense du théâtre
Saint-Martin.
Ecrits avec plus de 50 ans de distance, ces deux textes révèlent de
troublantes ressemblances qui éclairent le pari du comédien.
Même construction en abîme, même puissance narrative
romanesque d’un sujet à fort ancrage historique, potentiellement
lacrymogène mais traité avec dignité, sans pathos ni démagogie et
plaçant l’Homme au cœur du débat.
Photo Michel Paret
Romanesque et historique
Le narrateur se souvient de son père, l’instituteur de la commune, et de son incoercible
propension à se faire remarquer de ses co-villageois en se déguisant en clown à la moindre
occasion, sans se soucier du qu’en-dira-t-on populaire mais surtout du « qu’en-rira-t-on » des
camarades d’école du fiston. Qu’est-ce qui poussait cet homme à ainsi se grimer et amuser la
galerie ? C’est le cousin Gaston qui prend la parole et explique ce clownesque credo de l’instit’
que son fils prenait pour l’idiot du village.
« Ce texte, c’est quatre-vingts pour cent de fiction » affirme l’auteur. Le faible reliquat suffit
pourtant à ancrer ce récit magnifique dans une réalité historique prégnante et un sujet brûlant. Audelà du devoir de mémoire, c’est l’Homme qui intéresse Michel Quint comme il habite toute
l’œuvre de Zweig. Il est exploré ici sous la forme la plus romanesque, ce que Quint revendique
haut et fort : il est romancier avant tout, pas homme de théâtre.
Pourtant, sur la scène, le travail d’André Salzet nous en ferait presque douter. S’accaparant ce
noble terreau, le comédien y fait pousser des champs émotionnels rares. Avec la même aisance
que chez Zweig à se fondre dans tous les personnages, il est magistral. Aussi bouleversant dans
la peau de ce Gaston qui se délivre d’un secret pour rendre sa dignité à un homme qui l’a perdue
aux yeux de son fils que drôle et touchant en garde SS un peu lunaire, il livre une performance à
mi-chemin entre un réalisme induit par les situations et un soupçon de mystère propre à l’univers
du conte. Ce juste équilibre souligne les formes et la richesse de ce texte mis en scène avec
sobriété par Márcia de Castro et auquel le comédien transmet toute la générosité, l’humour, la
tendresse et, précisons-le, toute la force ludique et pédagogique à la fois.
Franck BORTELLE (Paris) - http://www.ruedutheatre.info/ - Vendredi 30 janvier 2009
PARKING DE NUIT Sophie Loubière 13/02/09
Invité de notre séance drive-in mensuelle, un écrivain
professeur, un homme de cœur au cœur amoureux : Michel
Quint.
Né en 1949 dans le Nord-Pas-de-Calais, le jeune Michel a tôt
fait de s’intéresser aux mots et aux actrices. Titulaire d'une
licence de Lettres classiques et d'une maîtrise d'études théâtrales, il devient
professeur de Lettres Classiques, et timidement, commence à écrire pour le
théâtre et la radio. Mais la littérature noire attire sa convoitise. En 1985, il
publie "À l’encre rouge" chez Rivages. Quatre ans plus tard, il obtient le
Grand Prix de la littérature policière pour son livre "Billard à l'étage".
Mais c’est avec "Effroyables jardins", paru en septembre 2000 aux éditions
Joëlle Losfeld que Michel Quint acquière sa notoriété auprès d’un large
public. Le roman est adapté au cinéma par Jean Becker en 2003. Il est de
nombreuses fois porté au théâtre.
Actuellement, le théâtre du Petit Saint-Martin dans le 10ème
arrondissement de Paris propose de redécouvrir jusqu’au 22 mars le texte
dans une mise en scène de Marcia de Castro avec le comédien André
Salzet.
"Une ombre sans doute" paru en 2008 a été salué par la critique. Son
dernier roman "Max", vient de paraître aux éditions PERRIN dans la
collection Singulier. Michel Quint enseigne encore aujourd'hui au Lycée
Baudelaire de Roubaix.
Pour nous, ainsi que le font chacun leur tour nos invités, Michel Quint révèle
LE film incontournable qui définit si bien ses deux marottes : sa passion
pour le cinéma et sa prédilection pour une période troublée de l’histoire de
France. Ce film est un des films majeurs du patrimoine cinématographique
français. Jean Gabin, Pierre Fresnay, Erich Von Stroheim et Dita Parlo
tiennent les rôles principaux. Il est signé Jean Renoir. C’est "La Grande
Illusion".
Titre : Mémoire agissante
« Effroyable jardins » est le type même du récit qui transcende tout débat partisan et rend
son humanité à chacun. Par ailleurs, ce texte est parfaitement servi par André Salzet.
Texte : « Effroyables jardins » (1) est au départ un livre de Michel Quint paru en 2000, avant de
devenir un film réalisé par Jean Becker en 2003, avec Jacques Villeret, André Dussolier, Thierry
Lhermitte, Benoît Magimel, Suzanne Flon, Isabelle Candelier, Damien Jouillerot, Bernie Collins et
Michel Cordes.
C’est aujourd’hui, grâce à l’adaptation et la mise en scène de Márcia de Castro (qui connut le
contexte des prises d’otages au Brésil dans les années soixante-dix) un seul en scène interprété par
André Salzet (2).
Ce dernier en effet raconte l’histoire connue de ces jeunes qui font sauter un poste d’aiguillage
durant la dernière guerre pour épater une fille, pris par ironie du sort en otage, maintenus humains
par les grimaces d’un soldat clown allemand et sauvés par le cheminot qu’ils ont grièvement blessé
dans l’explosion, lequel se dénonce comme auteur de l’attentat sur son lit de mort.
Ce qui frappe, dans le jeu du comédien, est d’abord ce mélange parfaitement équilibré entre distance
(il raconte une histoire qui n’est pas la sienne mais celle de plusieurs autres) et authenticité (on croit
immédiatement à chacun des sentiments de chacun des personnages évoqués), le tout étant coiffé
par une humanité palpable.
Cette dernière n’est d’ailleurs le monopole de personne, ce qui donne une valeur encore accrue au
devoir de mémoire du père : on ne rappelle pas la saga héroïque de l’ancêtre, comme c’est le cas
dans tous les récits depuis les débuts de l’humanité, mais l’humanité incroyable qui a plané sur le
sort de deux jeunes qui n’avaient que les défauts de leur âge à une époque où le moindre acte
pouvait avoir des conséquences mortelles.
Du coup, cette pièce devient aussi un spectacle sur les apparences trompeuses qui sont induites par
un uniforme, un silence, une situation…
La langue de l’auteur mélange habilement tournures littéraires et patois du nord, langage oral et
introspection, en y ajoutant un style qui manie volontiers le raccourci aussi saisissant que parlant :
« bourré de reconnaissance liquide et ivre par devoir », par exemple. On est captivé dès la première
seconde.
3/12/09, Pierre FRANCOIS
Note :
(1) « Effroyables jardins », de Michel Quint, adapté et mis en scène par Marcia de Castro. Avec André Salzet du mardi
au samedi à 18 h 30, dimanche à 15 heures jusqu’au 24 janvier au Lucernaire, 53, rue Notre-Dame des champs, Paris-6e,
M° Notre-Dame des champs, Vavin. Tél. : 01 45 44 57 34.
(2) dont les lecteurs de F.C. connaissent déjà le talent grâce au Joueur d’échecs (millième en mai 09) et à La colonie
pénitentiaire (07-08).
Effroyables jardins de Michel Quint mise en scène Marcia de Castro
Un solo d’acteur de la vieille école du théâtre français, joué par André Salzet que ne fait ni un
numéro à la Philippe Caubère ni dans les effets de manche.
Il est quelque part entre le conteur, le narrateur et le personnage et observe la plus grande dignité,
puisque le sujet le réclame.
Effroyables jardins est une histoire de l’occupation, comme seuls les romanciers peuvent en
inventer, ou bien la guerre, qui sait ?
On est à Douai, d’abord dans les années 1960, environ. Le récit est celui d’un enfant qui ne supporte
pas les attitudes de mauvais clown de son père.
Petit à petit on va comprendre par quel traumatisme le père en est arrivé à s’identifier à l’art du
clown.
C’est son compagnon de résistance, Gaston qu’il se nomme, qui va raconter au fils, qui est aussi son
neveu, leur histoire qui commence par le dynamitage du transformateur de la gare de Douai.
Ensuite, la captivité. Les nazis prennent en otage un groupe d’amis pour que la population livre les
résistants à l’origine du dynamitage.
C’étaient pourtant ceux qui sont pris en otage, mais les nazis ne le savent pas.
On arrive ensuite à a situation clé où les nazis demandent aux Résistants de désigner celui d’entre
eux qui sera exécuté le premier.
Et c’est leur geôlier nazi qui leur conseille de ne pas marcher dans la combine. C’est un nazi, de
surcroît un clown, qui leur donne une leçon en dignité humaine.
C’est en cela que je dis, seul un romancier peut inventer une telle histoire. Et Michel Quint ne
l’invente en aucun cas pour blanchir les nazis mais pour mieux donner à voir la petite flamme dans
les ténèbres.
Ce geôlier clown leur rappelle que consentir à désigner l’un d’entre eux à devenir une victime
expiatoire des nazis, c’est perdre toute dignité humaine et justifier le marché inhumain de l’officier
nazi. C’est même donner à ce marché les blasons du raisonnable.
Ensuite vous apprendrez comment les Résistants ont été sauvés, ce qui contient encore une grande
leçon en dignité humaine et sens du sacrifice.
Mais Quint décrit aussi toutes les médiocrités, les trahisons et surtout le silence qui s’abat sur les
petites hontes du quotidien.
Et il met en gardes contres ses secrets. Ils sont là, les effroyables jardins. C’est tout ce qu’on tait.
Et il rappelle que l’Histoire ne connaît pas de parenthèses, que sans vérité il ne peut y avoir d’espoir
parce qu’il ne peut y avoir de respect de soi.
C’est pourquoi la grande sobriété de la prestation d’André Salzet est plus que la bienvenue.
Elle est aussi une leçon en dignité qui résonne avec énormément d’humanité sur un plateau
immense, et pourtant très proche du public.
Son Joueur d’Echecs de Stefan Zweig (mes Yves Kerboul) est l’un des spectacles les plus joués, et a
dépassé la millième représentation.
Radio Libertaire, Thomas de Hambourg dans Tempête sur les planches du 22 février 2009
AVIGNON 2009
Effroyables Jardins, de Michel Quint
Les chairs à vif
Michel Quint est connu et reconnu pour son écriture, fine, précise, un véritable
scalpel qui scrute l'âme humaine à la recherche de son essence. Cette écriture
s'adapte bien hors du roman, au cinéma par exemple, ici au théâtre.
En effet le mode narratif utilisé par l'auteur permet ce transfert sur un plateau,
sur le mode du récit. Le comédien est d'abord le fils dont le souvenir du père est
particulièrement douloureux, le père ayant exercé la profession d'instituteur
après la 2ème guerre mondiale, une véritable institution de l'époque tout en
distrayant la population de son village en faisant le clown à ses heures perdues.
Le fils rapporte sa honte et transporte le public dans une histoire d'une autre
complexité, mêlant l'engagement dans la résistance, les drames connus par les
oppressés et les terreurs appliquées par les oppresseurs, sous la contrainte de la
guerre. La pièce opère une introspection pleine d'émotion portée par un
comédien, les chairs à vif au fur et à mesure que la chrysalide laisse naître le
papillon. Laissez-vous surprendre par cette mue.
Florent Saclier [8 juillet 2009]
Pièce de Michel Quint, mise en scène Marcia de Castro, avec André Salzet
Espace Roseau, 8, rue Pétramale 84000 Avignon, à 14h, 04 90 25 96 05
26/9/09
LA LETTRE DU SNES
« Effroyables Jardins »
Jusqu’au 24 janvier 2010, au Théâtre du Lucernaire
Enfant, je détestais les clowns, c’est ainsi que commence
« Effroyables jardins » et l’on entend un adolescent exprimer
la honte que lui inspirait son père instituteur lorsqu’il
s’affublait d’un nez rouge et du costume de l’Auguste pour
aller faire le clown dès qu’on le lui demandait, au point d’en
délaisser la vie familiale. Un jour, son oncle lui raconte les
circonstances qui, au cours de la guerre, ont conduit son père à
cette « mission » de clown. Devenu adulte et haut
fonctionnaire européen, cet homme tentera, en hommage à son
père, d’assister sous le déguisement d’un clown, au procès à
Bordeaux de Maurice Papon, l’ancien fonctionnaire de Vichy.
Adapté et mis en scène par Màrcia de Castro, le très beau texte
de Michel Quint trouve ici son tempo, sa grandeur et sa force.
Les trois temps - l’adolescent qui exprime son ressentiment
contre ce père un peu extravagant, la révélation, l’hommage au
père qui libère l’adulte de sa culpabilité d’adolescent qui
jugeait sans savoir - sont bien marqués par un détail
d’accessoire ou d’éclairage. André Salzet seul en scène nous
conte cette histoire où l’on croit partir sur une histoire
d’adolescent en crise contre son père, pour atterrir sur
l’évocation de la guerre et de la Résistance, à travers les
actions de héros discrets, qui ont fait des choix honnêtes, se
sont comportés dignement et n’en ont tiré aucune gloire. Par
quelques gestes, André Salzet arrive à incarner tous les
personnages présents dans la partie de la révélation. Grâce au
seul jeu de l’éclairage de son visage, on est au fond du trou
avec le père et l’oncle du narrateur quand Bernd, le soldat
allemand, leur parle. C’est une histoire forte de guerre, de peur,
d’amour, où l’humour n’est pas absent, portée par un excellent
comédien.
Micheline Rousselet 30/11/09
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