Recherche clinique - Une fonction infirmière à découvrir

Une fonction infirmière à découvrir
L
orsqu’un procédé thérapeu-
tique a fait ses preuves en labo-
mente les conditions de réalisa-
tion de la recherche biomédicale,
et protège les personnes qui s’y
prêtent.
Le législateur distingue deux ca-
tégories de recherche biomédicale
sur les personnes selon qu’on en
attend, ou non, un bénéfice indi-
viduel. Dans tous les cas, les re-
cherches sont conduites sur des
personnes saines ou malades,
mais librement consentantes.
Certaines investigations sont me-
nées dans l’attente d’un béné-
fice individuel direct, qui peut
être d’ordre préventif, diagnos-
tique ou thérapeutique. D’autres
sont généralement entreprises
sur des volontaires sains ou ma-
lades acceptant de participer à
une évaluation dont chacun sait
qu’il ne retirera pas de bénéfice
personnel.
Les études précliniques
Elles permettent d’évaluer la sé-
curité d’emploi in vivo des pro-
duits testés chez l’animal.
Avant de commencer les essais
cliniques chez l’être humain, il
faut impérativement pouvoir dis-
poser des résultats des études :
– de toxicité aiguë ;
– de toxicité chronique ;
– sur la reproduction ;
– de cancérogenèse ;
– de mutagenèse ;
– de pharmacodynamie ;
– de pharmacocinétique.
Il s’agit de réunir pour le produit
testé un effet thérapeutique, une
sécurité d’emploi et un dévelop-
pement commercial intéressant.
Les essais cliniques
Ce terme désigne tous les essais
systématiques d’un médicament
chez l’homme, qu’il s’agisse de
volontaires malades ou sains, afin
d’identifier tout effet indésirable
et d’étudier les caractéristiques
de l’absorption, la distribution,
le métabolisme et l’élimination
du médicament, afin, aussi,
d’évaluer l’efficacité et la sécurité
d’emploi.
Toutes ces études publiques ou
privées sont développées par un
promoteur qui finance, initie et
fait réaliser l’essai par un ou plu-
sieurs investigateurs.
En prenant l’initiative de la re-
cherche biomédicale, le promo-
teur (personne physique ou, plus
souvent, morale) en assume la
responsabilité légale.
L’investigateur, lui, est toujours
une personne physique, un doc-
teur en médecine qui dirige et
surveille la réalisation de la re-
cherche. La professionnalisation
de la recherche clinique est née
de la complexité des protocoles,
d’où la nécessité de s’appuyer sur
des équipes et, notamment, sur
des infirmières formées à la re-
cherche clinique (IRC).
La recherche clinique réunit les essais cliniques et thérapeutiques
menés sur des hommes sains mais aussi sur des patients. Quels
rôles jouent les infirmières de recherche clinique (IRC) ?
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Recherche clinique
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Professions Santé Infirmier Infirmière - No39 - août-septembre 2002
ratoire et a été l’objet d’études
convaincantes, la recherche de-
vient clinique. Cette phase est né-
cessaire afin d’appliquer en toute
sécurité la nouvelle thérapeutique
chez les patients. Les objectifs sont
l’amélioration du diagnostic, la pré-
vention de certaines maladies,
l’amélioration du pronostic, voire
la guérison du patient.
La recherche clinique réunit donc
les essais cliniques et thérapeu-
tiques menés tant sur l’homme
sain, pour une meilleure connais-
sance de ses fonctions physiolo-
giques, que sur les patients, pour
une meilleure compréhension
des pathologies. La recherche est
soumise à des lois strictes.
La loi Huriet-Sérusclat du 20 dé-
cembre 1988 définit et régle-
Les quatre phases de développement d’une nouvelle molécule
Phase I :
vise à définir la toxicité de la molécule chez l’homme et ses propriétés
pharmacologiques ;
définit la dose minimale efficace et la dose maximale tolérée ;
permet d’apprécier la tolérance chez l’homme sain.
Phase II :
confirme les propriétés pharmacologiques thérapeutiques observées
chez l’animal ;
étudie les propriétés pharmacodynamiques.
Les essais de phase II s’attachent à montrer l’efficacité thérapeutique
du nouveau médicament chez l’homme sain.
Phase III :
précise l’efficacité thérapeutique dans les différentes indications
préconisées ;
apprécie la tolérance chez la personne malade. Cette phase recourt
au principe de randomisation.
A l’issue de la phase III, une demande d’Autorisation de mise sur le
marché sera effectuée auprès de l’AFSSAPS.
Phase IV :
évalue l’efficacité du médicament dans des conditions réelles d’utili-
sation après l’AMM (beaucoup moins stricte que dans des protocoles) ;
poursuit l’évaluation de la tolérance, même après la commercialisation.
Les missions de l’IRC
L’infirmière de recherche clinique
coordonne, organise et réalise les
soins spécifiques aux essais sui-
vant un guide de bonnes pra-
tiques cliniques (BPC) (1).
L’IRC et le promoteur
L’objectif principal du promoteur
est la qualité de l’essai clinique. L’in-
firmière, garante de cette qualité,
analyse et étudie la faisabilité de
l’étude sur le terrain. Elle élabore
en partie, voire en totalité, le cahier
d’observation ou CRF (2), rédige
les procédures opératoires stan-
dard (POS) (3) correspondantes.
Lors des visites des assistants de
recherche clinique, elle veille à
mettre à disposition les dossiers
sources (4) des patients ou vo-
lontaires sains
.
L’IRC et l’investigateur
L’infirmière a un rôle d’aide et de
contrôle auprès de ce médecin.
Elle vérifie le respect des critères
d’inclusion et de non-inclusion
du protocole, le recueil du
consentement éclairé du patient
ou du volontaire selon les BPC.
Avec le médecin investigateur,
elle met à jour les cahiers d’ob-
servation de l’essai, remplit et dé-
clare les “événements indésirables
graves” ou “non graves” des mé-
dicaments dans les délais impo-
sés par la loi au promoteur.
C’est encore elle qui organise l’ar-
chivage des documents de l’étude
au terme de celle-ci.
L’IRC et le pharmacien
L’infirmière établit avec le phar-
macien hospitalier chargé des es-
sais cliniques la traçabilité des
médicaments de l’essai de façon
à ne jamais manquer de produits
et à attribuer les bons médica-
ments aux bons patients (selon la
randomisation).
L’IRC et le volontaire
Elle s’assure qu’il a bien été in-
formé et qu’il a bien compris les
enjeux de l’essai. Si ce n’est pas le
cas ou si elle ressent la moindre
appréhension de sa part, elle doit
de nouveau lui expliquer – en
langage simple – le déroulement
de l’étude, les contraintes et les
bénéfices qu’on peut en attendre.
L’instauration d’un climat de
confiance permet une meilleure
observance des traitements.
L’infirmière exécute les soins re-
latifs à l’essai – tels les cinétiques
(prélèvements rapprochés) du
médicament, les ECG et tous les
soins relevant de sa compétence -
selon les procédures établies au
début du protocole avec le pro-
moteur lors de la mise en place
de l’étude.
Comment devenir IRC ?
Les IRC sont d’abord infirmières
diplômées d’État.
Ensuite, elles se spécialisent par
l’obtention du diplôme inter-
universitaire de formation d’as-
sistants de recherche clinique
(DIU-FARC). Cette formation
peut s’effectuer dans le cadre de
la formation continue.
Le DIU-FARC regroupe :
un enseignement théorique sur
la recherche biomédicale, c’est-à-
dire sur les bases méthodolo-
giques des essais cliniques, les as-
pects éthiques et réglementaires
(loi Huriet-Sérusclat), le déve-
loppement des médicaments ;
un enseignement pratique du
rôle de l’assistant de recherche cli-
nique (BPC, etc.).
L’association du diplôme d’État
d’infirmière et du DIU-FARC per-
met d’assurer la fonction d’IRC
au sein des hôpitaux. Pour obte-
nir ce diplôme, il faut se rensei-
gner auprès des universités de
Bordeaux, Lyon-I, Nantes, Aix-
Marseille-II, Paris-VI, Paris-VII ou
Strasbourg afin de connaître la
date de pré-inscription.
Il faut savoir que cette spécialisa-
tion n’est toujours pas reconnue
à ce jour. Il n’existe donc aucun
statut au sein des hôpitaux publics
qui permette de différencier une
IRC d’une infirmière de soins...
Espérons que cette compétence
spécifique sera bientôt reconnue
comme elle le mérite.
Patricia Détré
IRC, Centre d’investigation clinique,
hôpital Saint-Antoine.
1. Bonnes pratiques cliniques : listing de recom-
mandations internationales visant à garantir la qua-
lité des données recueillies lors d’un essai clinique.
2. CRF (Case Report Form) : document anonyme
recueillant toutes les données de l’étude.
3. POS : documents permettant de suivre une
ligne directive unique pour tous les actes ou soins
de l’essai.
4. Dossier source : documents originaux relatifs
aux patients, tels que le dossier médical, les
examens complémentaires, les comptes rendus
d’hospitalisation.
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Qu’est-ce que le CCPPRB ?
Le CCPPRB (Comité consultatif de
protection des personnes dans la re-
cherche biomédicale) joue un rôle
clé dans la protection des personnes
qui se prêtent aux recherches bio-
médicales. Il est composé de ma-
nière à garantir son indépendance et
la diversité des compétences, aussi
bien dans le domaine biomédi-
cal qu’en regard des questions
éthiques, sociales, psychologiques
et juridiques. Ses membres sont
nommés par le préfet de région.
Le CCPPRB donne son avis sur les
conditions de validité de la re-
cherche en considération de la pro-
tection des personnes, et notam-
ment sur :
la pertinence générale du projet ;
l’adéquation entre les objectifs
poursuivis et les moyens humains et
techniques mis en œuvre ;
la qualification du ou des inves-
tigateurs ;
la protection et la sécurité des
participants ;
les modalités de l’information des
personnes se prêtant à la recherche,
avant et pendant celle-ci ;
les modalités de recueil du
consentement ;
les indemnités éventuellement
versées par le promoteur en cas de
recherche sans bénéfice individuel
direct pour la personne.
Source : Guide pratique, loi du 20 dé-
cembre 1988 modifiée, Guide de l’AP-HP.
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