Intermédiation de marché et financement des entreprises par

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Séminaire franco-russe 3-5 octobre 2002
Rostov sur le Don
Intermédiation de marché et financement des entreprises par actions
Françoise Renversez
Université Paris X-Nanterre
MODEM CNRS UMR 7545
Les systèmes financiers français et allemand ont connu une évolution rapide d’abord
amorcée en France, puis depuis 1995 très marquée en Allemagne. La place des banques dans le
financement de l’économie et la croissance rapide des marchés financiers associée à l’ouverture
des économies ont eu pour conséquence en Allemagne comme en France une forte
participation des intermédiaires financiers à ces marchés tant du côté de l’offre que de la
demande. Si cette évolution a été accompagnée d’une certaine régression du crédit dans le
financement des entreprises, ce mode de financement reste le seul accessible à une part
importante des entreprises et aux ménages. On assiste plutôt à une évolution de la fonction
d’intermédiation qu’à une désintermédiation, l'intermédiation évoluant vers une intermédiation
de marché. Le fonctionnement des marchés de capitaux en est sensiblement modifié. D'autant
que la part des non-résidents s'y est fortement accrue dans les deux pays. L'architecture des
systèmes financiers se modifie et continue à évoluer en particulier en raison des fusions entre
banques et compagnies d'assurances et des alliances entre places boursières. Celles-ci, telle
Euronext modifient la géographie financière et devraient à terme impliquer une spécialisation
des places.
Cette évolution des structures financières a eu un impact important sur les modes de
direction et les objectifs de gestion des entreprises que l'on regroupe actuellement sous le terme
de gouvernance des entreprises. Ce qui importe c'est la modification des processus de décision
et de contrôle qui résultent pour les entreprises d'un financement par actions fortement
internationalisé. En effet, les expériences françaises et allemandes récentes en matière de
financement des entreprises par actions ont manifesté les risques dans une économie financière
globalisée d'un appel prépondérant à cette forme de ressources en particulier quant à la
propriété et au contrôle des entreprises. Si la constitution de fonds propres peut-être
développée par appel du marché, il est important de préciser dans quelles limites celle-ci doit
s'inscrire.
C'est pourquoi une première partie de cette contribution prenant les économies
française et allemande en référence (au départ moins internationalisées que celle de la Grande
Bretagne) examinera les relations entre intermédiation de marché et financement par actions,
une seconde partie traitera des rapports entre marchés des actions intermédiés et gouvernance
des entreprises.
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I. Intermédiation de marché et financement par actions
Les relations entre banques et marchés s’inscrivent dans le cadre de systèmes
financiers marqués tant par l’histoire économique que par les évolutions politiques.
Si les nouveaux segments du marché du capital ont été organisés en prenant en
compte l’intervention des intermédiaires financiers ceux-ci participent également aux marchés
traditionnels. La mesure de l'intermédiation financière permet d'appuyer l'analyse comparative.
1.1. En Allemagne et en France des marchés des actions fortement intermédiés
I.1.1. L’intermédiation sur les marchés traditionnels
En France, à partir de 1990, les entreprises ont diversifié leurs sources de
financement au détriment du crédit bancaire et au bénéfice du marché des actions. Ce
financement sur les marchés n’induit pas la non participation des banques au financement des
entreprises, mais une évolution importante de la relation des banques aux entreprises. A la
relation bilatérale entre la banque et le bénéficiaire du crédit impliquant le savoir faire de la
banque (Guille [1994]) se substitue l’acquisition de titres négociables émis par les entreprises
sur les marchés de capitaux et en particulier d’actions. Cette source de financement n’est
accessible qu’à partir d’une certaine taille si bien que les statistiques financières françaises font
apparaître un important volume d’actions non cotées et de parts (environ 30 %) dans
l’épargne des ménages français. En revanche, les grandes entreprises se sont très largement
engagées dans la voie du financement par actions sur les marchés et l’activité du marché
primaire a été renforcée à partir de 1993 par les privatisations.
Les marchés financiers sont désormais, en particulier en France, le lieu privilégié
d’intervention des banques qui y agissent par l’offre et la demande d’actifs financiers, de titres
négociables, et, non pas par le crédit. Certains marchés, et notamment les marchés à terme et
d’option sont devenus de véritables marchés interbancaires, plus exactement des marchés
d’intermédiaires financiers car les banques ne sont pas les seuls agents financiers en cause.
Actuellement les intermédiaires financiers détiennent le quart de l’encours des actions
françaises cotées (25,7 % en 1999 selon les données du rapport CNCT [2000]). En particulier
les OPCVM, entités juridiques autonomes, souvent gérées par des banques constituent des
portefeuilles diversifiés incluant des actions, voire constitués uniquement d’actions pour ce qui
concerne les OPCVM actions.
Mais il s’agit ici des intermédiaires financiers résidents. En effet les “ non-résidents ”
qui sont pour l’essentiel des intermédiaires financiers et notamment des fonds de pension
détiennent une part plus importante des actions cotées françaises – plus du tiers soit 35,3 %
en 1999 selon un trend ascendant pour 32,4 % en 1998, d’après les données du CNCT.
Les intermédiaires financiers sont de très loin les premiers détenteurs d’obligations :
72,5% de l’encours total en 1999, ils distancent ainsi très largement les non résidents qui
détiennent 15 % de l’encours total.
En Allemagne, dans la période, le marché des actions connaît un grand essor,
surtout marqué à partir de 1995. L’encours des émissions a été multiplié par plus de 4,5 entre
1991 et 1999. Ce dynamisme s’explique essentiellement par le développement de l’ouverture
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des marchés, qui existait auparavant mais dans une moindre proportion pour les transactions
portant sur les titres étrangers. Les comptables nationaux ont regroupé l’activité des non
résidents, essentiellement des établissements financiers, au sein d’un secteur institutionnel, le
Reste du Monde. Il est ainsi possible de constater la très forte croissance des émissions
étrangères, + 84,3% entre 1991 et 1999. Pour la seule année 1999, elles représentent 23,8 % de
l’encours total plaçant ainsi le Reste du Monde à la deuxième place sur le marché primaire
après les entreprises non financières qui détiennent la première place avec 55,6 %. En encours,
les émissions d’actions par les sociétés non financières constituent depuis 1998 la première
source de financement, devant le crédit bancaire. Il n’y a donc plus de prédominance du crédit
dans la structure financière des ressources des entreprises. En revanche, en flux, le crédit
bancaire reste la principale modalité d’obtention de ressources, 65,1 % en 1999 contre 9,9 %
pour les émissions d’actions. Enfin, le secteur financier occupe la dernière place en détenant
20,6% du marché primaire, (11,1 % pour les IFM et 9,5 % pour les entreprises d’assurance).
Sa part de marché est assez fluctuante sur la période entre 18,1% en 1991 et 25,5 % en 1997.
Du côté des souscripteurs, le plus gros acheteur reste le secteur non financier avec
47,8 % en 1999, même si sa part diminue régulièrement sur la période : 29,3 % pour les
entreprises non financières, 17,5 % pour les ménages et 1 % pour l’Etat. Il existe donc un
nombre important de participations croisées au sein des sociétés allemandes. Le secteur
financier est le deuxième grand souscripteur d’actions. Sa part ne cesse de progresser sur la
période pour atteindre 36,2 % en 1999 : 13,5 % pour les IFM, 13,6 % pour les institutions
financières et 9 % pour les compagnies d’assurance. Enfin, le Reste du Monde, avec 16 %,
part en nette progression depuis 1995, occupe la troisième et dernière place.
Ainsi, l’essor du marché des actions s’est, en partie, fait au détriment des
intermédiaires financiers monétaires dans la mesure les sociétés non financières effectuent
un réel arbitrage depuis 1998 entre le recours aux crédits bancaires et les émissions d’actions.
Précisons enfin que l’analyse des données en flux montre la suprématie du “ Reste du Monde
en tant qu’émetteur avec 77 % des émissions en 1999 contre 17,6 % pour les entreprises non
financières et seulement 5,6 % pour le secteur financier. En tant que souscripteur avec 31,6 %
sa part est comparable à celle du secteur non financier (31,9 %) et du secteur financier
(36,5 %).
Dans l’ensemble, malgré tout, sur la période 1990-1999 et à partir des données en
encours, le secteur financier a consolidé sa position sur le marché avec en moyenne 21,1 % des
émissions et 28,7 % des souscriptions.
Il apparaît que les marchés financiers traditionnels qu’ils soient de court terme
comme le marché monétaire ou de moyen et long termes sont fortement intermédiés et laissent
finalement assez peu de place aux ANF, exception faite des entreprises non financières sur le
marché primaire des actions et de l’Etat sur le marché primaire des obligations.
L'évolution récente des marchés financiers dans les deux pays est en activité par le
dynamisme du marché des actions. Les actions sont en France l'objet privilégié de l'activité de
la place de Paris comme en témoigne sa spécialisation dans Euronext.
A cette participation aux marchés traditionnels du capital s’ajoute une activité
intense sur les nouveaux segments du marché du capital.
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I.1.2. L'intermédiation sur les nouveaux segments du marché du capital
Dans un article récent Allen et Santomero [1998] soulignent qu'alors que les coûts de
transaction et l'asymétrie d'information ont diminué l'intermédiation s'est accrue au contraire
des justifications données par la théorie des marchés efficients et l'intervention des IF. La
diminution des coûts de transaction et l'amélioration de l'information sont en grande partie
imputables à l'informatisation de la gestion des données. Dans le même temps ces progrès ont
été favorables à la croissance de l'intermédiation parce qu'ils permettent la gestion rapide de
produits financiers complexes à coût très bas pour les intermédiaires financiers. En particulier,
les marchés à terme et d'options paraissent pour Allen et Santemero être plutôt des marchés
d'intermédiaires que des marchés d'épargnants individuels.
Leur point de vue se vérifie particulièrement en France le MATIF et le MONEP
sont essentiellement des marchés d'intermédiaires financiers. Créés au milieu des années 80
pour donner à la place de Paris la gamme complète des opérations à terme et sur options, le
MATIF et le MONEP ont connu au départ un succès certain. Le MATIF est devenu le 3ème marché
à terme d'instruments financiers mondial. L’avenir du MATIF paraît très incertain dans le cadre
de la nouvelle répartition de compétences issue de l'alliance Paris-Bruxelles-Amsterdam de
mars 2000 et de la création d'Euronext.
La réponse à la concurrence européenne a été organisée avec le concours des banques
avec la mise en place d'une structure d'animation réunissant de grands établissements teneurs
de marché (BNP, CDC Marchés, Crédit Agricole, Indosuez-SG). En effet, marchés de
spécialistes, les marchés dérivés sont d'abord des marchés interbancaires. Une enquête de la
BRI [CNCT, 1999] montre la suprématie sur ces marchés des opérations sur taux d'intérêt
suivies des opérations de change (23,3 %). Les opérations interbancaires sont en croissance
continue et représentaient en 1998 pratiquement les _ du marché des taux d'intérêt (74,4 %).
Les co-échangistes sont d'autres intermédiaires financiers (Sociétés de bourse, Compagnies
d'assurances, OPCVM). Il en va de même du Nouveau Marché ” compartiment récent du
marché des actions réservé aux entreprises innovantes. Il apparaît essentiellement comme un
marché d'intermédiaires financiers. Ses conditions de fonctionnement qui réservent, pour
couvrir le risque spécifique résultant de l'objet de l'activité et de l'âge des entreprises, un rôle
particulier aux intermédiaires financiers teneurs de marché dans l'introduction et la gestion de la
liquidité des titres entérinent cette prépondérance des intermédiaires financiers.
En Allemagne les nouveaux marchés du capital ont connu un développement sans
précédent ces dernières années après un démarrage lent au début des années 90. Une des
explications de ce phénomène vient du fait que les investisseurs institutionnels - compagnies
d'assurance, OPCVM et fonds de pensions - veulent développer leurs participations sur les
marchés financiers allemands.
Ces investisseurs ont une double demande : d'abord trouver une gamme de produits
leur permettant de diversifier suffisamment leur portefeuille, ce qui signifie que les titres
disponibles doivent couvrir un vaste champ de rendement et de risque. Ensuite, il doit être
possible de prendre, en contrepartie des positions de risques flexibles, particulièrement à
travers les contrats “ futures ”. Finalement, les investisseurs institutionnels veulent aussi des
conventions de marché transparentes et des durées de transactions (trading) suffisamment
longues.
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La DTB (Deutsche-Termine-Börse) a su attirer de nouveaux intervenants en
élargissant la gamme des produits afin d'animer le marché et de rester le premier marché
européen d'options sur actions. Le succès de la DTB est lié au fait que tous ses produits sont
distribuables. Il y a des traders qui sont dans toutes les places directement connectés à la
DTB. Le système électronique est généralisé à tous les contrats. Il permet de fournir une
liquidité accrue avec 165 adhérents-banques et brokers-, une visualisation rapide des
fourchettes de prix et assure une rapidité d'exécution grâce à des interfaces de connexions
directes.
La DTB a également su négocier des accords avec d'autres bourses : avec le Swiss
exchange donnant naissance à Eurex, un des plus large marché de produits dérivés en Europe,
avec le Simex (Singapore International Monetary Exchange) pour la négociation des contrats
de taux longs (2 à 10 ans) allemands en Asie, avec la City dans le but de créer à terme un
marché unique pour les principales valeurs européennes (actions).
Les options sur l'Eurex (basées sur l'Euribor, European Interbank offered rate) se
composent en particulier des options sur actions et aussi, sur l'indice des options allemand
DAX, des options en euro de l'Etat fédéral (Euro Bund Future), des options en euro sur
obligations de l'Etat fédéral (Euro-Bobl-Future). Ces deux dernières sont par leur nombre
importantes. S'y ajoutent les Dax-Future, les Euro-Bund-Future et les Euro-Bobl-Future. Pour
ces deux dernières le nombre de contrats est particulièrement élevé. La dette publique et plus
précisément celle de l'Etat fédéral contribue ainsi beaucoup à la dynamique du marché.
I.2. La mesure de l'intermédiation financière
La mesure de l'intermédiation financière sous la forme de la construction de taux
d'intermédiation financière permet une approche globale de la place et du rôle des
intermédiaires financiers à la fois dans leur fonction de distributeurs de crédits et dans leur
activité de participation aux marchés.
L’intérêt de cette mesure est double, elle permet de quantifier la participation des
intermédiaires financiers au financement de l’économie mais elle permet aussi de distinguer la
part prise par les banques dans ce financement intermédié. La période actuelle a été marquée
dans toutes les économies développées par la croissance du rôle des intermédiaire financiers
non bancaires (IFNB). Il faudrait également prendre en compte l’intervention des fonds de
pension en particulier américains, certes très fluctuante, mais qui peut représenter certaines
années près du quart des transactions des marchés financiers français. Ces fonds de pension
sont analytiquement des intermédiaires financiers mais sont recensés statistiquement comme
non résidents par le Conseil National du Crédit et du Titre (CNCT).
Quelles variables retenir dans cette perspective pour une mesure économétrique de la
convergence de l’intermédiation bancaire dans le financement de l’économie. Est-il tout d’abord
pertinent de distinguer intermédiation financière bancaire et non bancaire ? La régulation par les
taux pratiquée par la BCE n’atteint-elle pas au travers des anticipations les IFNB ? Le service
de liquidité rendu par les banques, avec le recours possible au prêteur en dernier ressort, dont
on a vu tout récemment encore l’importance dans le fonctionnement de l’économie, plaide en
faveur de la distinction banque non-banque.
La mesure de l'intermédiation financière s'inscrit dans le cadre de la saisie des données
financières adopté par les systèmes normalisés de comptabilité économique. Ceux-ci reposent,
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