ARTICLE ORIGINAL Progrès en Urologie (2002), 12, 219-225
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PSA Nadir et cinétique de décroissance du PSA entre les 3ème et
6ème mois après radiothérapie externe pour cancer de prostate
localisé T1 T2 Nx M0 : intérêts dans la prédiction
du risque de progression biologique
Christophe ALMERAS (1), Marc ZERBIB (1), François ESCHWEGE (2), Bernard DEBRÉ(1)
(1) Clinique Urologique, Hôpital Cochin, Paris, France, (2) Service de Radiothérapie, Institut Gustave Roussy, Villejuif, France
La radiothérapie externe fait partie de l’arsenal théra-
peutique du cancer de prostate localisé. C’est l’hétéro-
généité des définitions d’évolution de la maladie et des
populations étudiées qui rendent les comparaisons dif-
ficiles entre les différents articles publiés concernant
les résultats et les facteurs prédictifs de réponse à l’ir-
radiation. La définition de l’ASTRO (3 élévations
consécutives du PSA avec 6 mois de délai entre chaque
élévation) a permis cependant d’uniformiser les cri-
tères d’évolution biologique, qui survient plusieurs
années avant la récidive clinique. Les facteurs pronos-
tiques le plus couramment reconnus en dehors de la
dose délivrée sont : le stade clinique [1-3, 5, 7, 9-11,
14, 15, 17, 19, 21], le taux de PSA initial [1-3, 5, 7, 9-
11, 13-20, 23], le score de Gleason [1-3, 5, 7, 9, 10, 13-
17, 19-21, 23], la valeur du PSA Nadir [2, 4-6, 8, 15,
18] et le délai d’atteinte du Nadir [2, 4-6, 15]. Plusieurs
études ont rapporté une valeur seuil de PSA Nadir à 0,5
ng/ml, corrélée avec 95-98% d’absence de progression
biologique à plus de 5 ans [4, 5, 8, 18].
Cette étude urologique a pour objectifs : l’analyse des
Manuscrit reçu : décembre 2001, accepté : janvier 2002..
Adresse pour correspondance : Pr.M. Zerbib, Clinique urologique, Hôpital
Cochin, 27, rue du Faubourg Saint Jacques, 75014 - Paris
RESUME
Introduction : Cette étude analyse les résultats de la radiothérapie externe dans les
stades T1 T2 Nx M0 de cancer de prostate, en se référant au PSA Nadir et à la ciné-
tique de décroissance du PSA.
Matériel et Méthodes : 65 patients porteurs d’un cancer de prostate localisé T1 T2 Nx
M0 ont reçu une radiothérapie externe entre 1990 et 1999 (conventionnelle ou de
conformation). Deux populations de 22 et 25 patients ont été distinguées suivant la
valeur du Nadir atteint : Population A avec un Nadir 0,5 ng/ml ou non encore
atteint mais avec un PSA 0,5 ng/ml ; Population B avec un Nadir > 0,5 ng/ml. Les
différents paramètres cliniques et paracliniques ont été comparés par des tests sta-
tistiques (chi-2, t de Student) ainsi que la cinétique de décroissance du PSA (calcul
basé sur l’évolution du PSA entre les 3 et 6 premiers mois après irradiation ). Suivant
les critères de l’ASTRO, les résultats en terme d’absence de progression biologique
ont été évalués par l’estimation non paramétrique de Kaplan-Meier.
Résultats : La population A n’a eu aucune évolution biologique avec un suivi moyen
de 29,5 mois. L’absence de progression biologique dans la Population B à 42 mois
était de 52,8%. Le PSA initial (p=0,009), la dose délivrée (p=0,027), et la cinétique de
décroissance du PSA (p=0,0069) ont été identifiés comme facteurs prédictifs. Le
patient dont la cinétique était nulle a évolué, tandis qu’avec une cinétique < 0,35
ng/ml/mois, 91,3% sont restés sans progression biologique. Un groupe de malades
(Nadir médian 0,8 ng/ml, PSA initial < 10 ng/ml et cinétique < 0,35 ng/ml/mois) se dis-
tingue par son bon pronostic.
Conclusion : Dans les stades T1-T2, la valeur du Nadir est essentielle pour le pro-
nostic. La cinétique de décroissance du PSA paraît avoir un rôle prédictif précoce.
Mots clés : Nadir, cinétique, PSA, radiothérapie.
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résultats de la Radiothérapie externe exclusive
(conventionnelle et/ou de conformation) sur le cancer
de prostate dans les stades T1-2 Nx M0 en fonction du
taux de PSA Nadir atteint ( ou > 0,5 ng/ml) et l’iden-
tification des facteurs pronostiques de succès comme
ceux prédictifs d’un PSA Nadir 0,5 ng/ml.
MATERIEL ET METHODES
Entre 1990 et 1999, 65 patients, porteurs d’un cancer
de prostate T1 ou T2 Nx M0, ont reçu une radiothéra-
pie externe (conventionnelle ou de conformation) sans
hormonothérapie néo-adjuvante. Parmi ces patients, 47
d’entre eux ont été sélectionnés de manière rétrospecti-
ve en fonction de leur PSA Nadir > ou 0,5 ng/ml.
Deux populations se sont alors distinguées selon la
valeur du Nadir : Population A de 22 patients (Nadir
0,5 ng/ml ou Nadir non encore atteint avec dernier PSA
0,5 ng/ml, prédisant par conséquent un Nadir 0,5
ng/ml) et Population B de 25 patients (Nadir > 0,5
ng/ml). Le bilan d’extension a comporté en dehors de
l'examen clinique : une tomodensitométrie abdomino-
pelvienne, une scintigraphie osseuse et une IRM endo-
rectale (9 cas). Les consultations de contrôle ont été
réalisées à 3 mois, 6 mois, 12 mois puis tous les ans par
le même urologue. Elles ont comporté un examen cli-
nique ainsi qu’un dosage sanguin du PSA. Le rythme
des consultations de contrôle est passé à 6 mois en cas
d’élévation des valeurs de PSA. Le suivi moyen était
de 40,91 mois (9-98 mois).
Les pourcentages, moyennes, et dianes pour chaque
paramètre clinique et paraclinique ont é calculés : âge,
stade, PSA initial, score de Gleason, pourcentage de
biopsies positives et leurs caracristiques anatomopatho-
logiques (atteinte bilarale, envahissement périnerveux,
et atteinte "massive" des carottes biopsiques (évaluation
subjective, >60-70% de chaque carotte)), type d’irradia-
tion, dose et nombre de ances délivrées, citique de
croissance du PSA, PSA Nadir, délai d’atteinte du
N a d i r. La cinétique de croissance du PSA consiste en
un calcul ba sur l’évolution du PSA entre le 3e et le 6e
mois après radiothérapie. Ce calcul a été réali selon
lévaluation quantitative suivante (en ng /ml/mois):
(PSA à 3 mois – PSA à 6 mois) / 3
Les résultats en terme d’absence de progression biolo-
gique (ou contrôle biologique) ont été évalués par l’es-
timation non paramétrique de Kaplan-Meier. Le délai
d’évolution a été déterminé selon la définition de
l’ASTRO:
Délai [fin Rth-1er PSA élevé] - (Délai [Nadir-1er PSA
élevé] / 2).
Une analyse statistique par les tests de t de Student, et
Chi-2 a été ensuite réalisée entre les différentes popu-
lations, comparables en terme de suivi, d’âge, de stade
TNM , de score de Gleason, de pourcentage de biopsies
positives.
RESULTATS
L’âge moyen des 47 patients sélectionnés était de 69,91
ans, le PSA initial moyen de 15,14 ng/ml (3,3-51
ng/ml), et le Gleason moyen de 6,15 (4-10).
Population A
L’âge moyen était de 69,04 ans, les stades étaient répar-
tis en 13,6% de T1 et 86,4% de T2, le PSA initial
moyen était de 11,77 ng/ml, le score de Gleason moyen
de 6,04, le pourcentage moyen de biopsies positives de
45,88%, et leurs caractéristiques étaient réparties entre
6 atteintes bilatérales, 0 envahissement péri-nerveux et
2 atteintes "massives". Une radiothérapie externe a été
réalisée entre 1993 et 1999. Elle était de type conven-
tionnel dans 82% des cas et de conformation dans 18%.
La dose moyenne délivrée était de 66,3 Gy (65-70 Gy)
et le nombre moyen de séances était 27,7. La cinétique
de décroissance du PSA entre les 3e et 6e mois après
irradiation rapporte une valeur moyenne de 0,209
ng/ml/mois (0,011-0,42 ng/ml/mois). Le PSA Nadir
moyen était de 0,226 ng/ml (0,05-0,4 ng/ml), atteint
dans un délai moyen de 19,7 mois (10-35 mois). Il a été
atteint chez 14 patients, soit 63,6% de la population A.
Les 36,4% restant (8 patients) n'ont pas encore atteint
leur Nadir, avec un dernier PSA 0,5 ng/ml, prédisant
par conséquent un Nadir 0,5 dans cette même caté-
gorie. Les personnes ayant atteint un Nadir 0,5 ng/ml
représentent 21,54% de la population T1-2 Nx M0 (65
patients), tandis que leur association avec les personnes
n'ayant pas encore atteint le Nadir mais avec leur der-
nier PSA 0,5 ng/ml en représentent 33,84%.
A l’analyse, selon les critères d'évolution après irradia-
tion de l’ASTRO, aucune évolution biologique n’a été
constatée avec un suivi moyen de 27,86 mois (9-64
mois).
Population B
L'âge moyen était de 70,68 ans (61-76 ans), le PSA ini-
tial moyen de 18,09 ng/ml (3,3-51 ng/ml), et le score de
Gleason moyen de 6,25 (4-10). Une radiothérapie
externe (conventionnelle ou de conformation) a été réa-
lisée entre 1991 et 1998. Le suivi moyen était de 52,4
mois (23-98 mois). A l’analyse, selon les critères
d’évolution de l’ASTRO, deux groupes se sont distin-
gués : groupe B1 sans évolution biologique (15
patients) et B2 en progression biologique (10 patients).
Le PSA Nadir a été atteint par la totalité de ces patients.
Groupe B1 : l’âge moyen était de 70,8 ans (63-76 ans),
C. Almeras et coll., Progrès en Urologie (2002), 12, 219-225
les stades étaient répartis en 40% de T1 et 60% de T2,
le PSA initial moyen était de 13,58 ng/ml (3,3-32
ng/ml), le score de Gleason moyen de 6,28 (4-10), le
pourcentage moyen de biopsies positives était de
41,63% et leurs caractéristiques étaient réparties entre 5
atteintes bilatérales, 2 envahissements péri-nerveux et 2
atteintes "massives". La radiothérapie externe était
conventionnelle dans 92,9% des cas et de conformation
dans 7,1%. La dose moyenne délivrée était de 65,35 Gy
(65-70 Gy) et le nombre moyen de séances était 26,1.
La cinétique de décroissance du PSA entre les 3e et 6e
mois après irradiation rapporte une valeur moyenne de
0,429 ng/ml/mois (0,071-1,157 ng/ml/mois). Le PSA
Nadir moyen était de 1,54 ng/ml (0,57-3,7 ng/ml),
atteint avec un délai moyen de 19,6 mois (3-46 mois).
Le suivi moyen était de 40,5 mois (23-79 mois).
Groupe B2 : l’âge moyen était de 70,5 ans (61-75 ans),
les stades étaient répartis en 30% de T1 et 70% de T2,
le PSA initial moyen était de 24,87 ng/ml (10-51
ng/ml), le score de Gleason moyen de 6,2 (4-7), le pour-
centage moyen de biopsies positives était de 46,67% et
leurs caractéristiques étaient réparties entre 3 atteintes
bilatérales, 1 envahissement péri-nerveux et 1 atteinte
"massive". La radiothérapie externe était convention-
nelle dans 100% des cas. La dose moyenne délivrée
était de 65,125 Gy (65-66 Gy) et le nombre moyen de
séances était de 25. La cinétique de décroissance du
PSA entre les 3ème et 6ème mois après irradiation rap-
porte une valeur moyenne de 0,824 ng/ml/mois (0-
2,816 ng/ml/mois). Le PSA Nadir moyen était de 2,107
ng/ml (0,7-4,5 ng/ml), atteint avec un délai moyen de
14,8 mois (5-22 mois). Le suivi moyen était de 70,2
mois (51-98 mois) tandis que le délai moyen d’élévation
du PSA était de 25,2 mois (12-57 mois).
Les comparaisons par les tests statistiques (Chi-2
(Pearson, Yates, ou méthode exacte), t de Student), de
ces variables entre les groupes B1 et B2 ne mettaient
pas en évidence de différence significative pour l'âge
(p=0,41), le stade T1/2 (Pearson: p=0,609), le score de
Gleason (p=0,44), le pourcentage de biopsies positives
(p=0,141), les caractéristiques des biopsies (atteinte
bilarale (p=0,345), envahissement périnerveux
(p=0,763), envahissement "massif" (p=0,763)), le type
d'irradiation (méthode exacte : 2p= 1,27), la dose reçue
(p=0,246), le nombre de séances (p=0,135), la valeur
du Nadir (p=0,135), ni pour la cinétique de décroissan-
ce du PSA (p=0,122).
Les seules différences significatives ont été constatées
pour la valeur du PSA initial (p=0,006) et le délai d'at-
teinte du PSA Nadir (p=0,042).
La dernière évolution a été observée à 39 mois et il n'a
été rapporté aucun décès. L’absence de progression bio-
logique estimée par l’estimation non paramétrique de
Kaplan-Meier à 12 mois était de 88%, à 24 mois de
71,8%, à 30 mois de 63,3%, et à 42 mois de 52,8%.
Comparaison des populations A et B
Ont été comparés : l’âge, le PSA initial, le score de
Gleason, le pourcentage de biopsies positives ainsi que
leurs caractéristiques , le type d’irradiation, la dose
délivrée, le nombre de séances, la valeur du Nadir et
son délai d’obtention, la cinétique de décroissance du
PSA.
Une différence significative a été constatée pour : le
PSA initial (p=0,0115), la dose délivrée (p=0,024), le
nombre de séances (p=0,046), la valeur du PSA Nadir
(p=0,000001), la cinétique de décroissance du PSA
(p=0,0069).
En revanche, aucune différence n’a été constatée pour
l’âge (p=0,159), le score de Gleason (p=0,294), le
pourcentage de biopsies positives (p=0,237), les carac-
téristiques des biopsies positives (atteinte bilatérale
(p=0,582), envahissement périnerveux (p=0,249),
envahissement "massif" (p=0,677)), le type d’irradia-
tion, et le délai d’atteinte du Nadir (p=0,276).
Comparaison de la population A et du Groupe B1
On ne met en évidence qu’une différence significative
pour la valeur du PSA Nadir (p=0,0001) et la cinétique
de décroissance du PSA (p=0,01). Il n’existe pas de
différence significative pour le PSA initial (p=0,222),
le score de Gleason (p=0,296), le pourcentage de biop-
sies positives (p=0,21), les caractéristiques des biop-
sies positives (atteinte bilatérale (p=0,888), envahisse-
ment périnerveux (p=0 ,3669), envahissement "massif"
(p=0,787)), la dose délivrée (p=0,717), et le délai d’at-
teinte du Nadir (p=0,491).
L’ensemble population A et groupe B1 représente
56,9% de la population initiale.
Patients et cinétique de décroissance du PSA éva-
luée entre les 3ème et 6ème mois après irradiation
Le patient dont la cinétique de décroissance du PSA
était égale à 0 ng/ml/mois a évolué. On constate cer-
taines valeurs seuils de cinétique de décroissance du
PSA devant la distribution des patients issus de la
population de départ (après exclusion du patient dont la
cinétique était égale à 0 ng/ml/mois) (Figure 1) :
- 0,35 ng/ml/mois : 61,11% n’ont pas évolué (16,6 %
issus du groupe A et 44,4 % issus du groupe B1).
- <0,35 ng/ml/mois : 23 patients (48,9 % de l’ensemble
de la population (A+B)) sont concernés, et 91,3 %
n’ont pas évolué (69,5 % issus du groupe A et 21,74 %
issus du groupe B1) avec un recul moyen de 29,3 mois.
- <0,05 ng/ml/mois : 4 patients (8,51 % de l’ensemble
de la population (A+B)) sont concernés, et 100 % n’ont
pas évolué (100 % issus du groupe A) avec un recul
moyen de 23,75 mois.
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C. Almeras et coll., Progrès en Urologie (2002), 12, 219-225
La population de 23 patients ayant une cinétique de
décroissance du PSA < 0,35 ng/ml était composée de
21 malades en absence de progression biologique et de
2 en évolution, avec un suivi moyen de 31,6 mois (9-64
mois). Concernant la sous-population n’ayant pas
d’évolution biologique, le suivi moyen était de 29,3
mois (9-64 mois). L’âge moyen était de 68,8 ans (49-74
ans), le PSA initial moyen de 10,38 ng/ml (3,3-28,5
ng/ml), le score de Gleason moyen de 6,25 (4-8), la
radiothérapie était conventionnelle dans 85,7% et de
conformation dans 14,3% des cas, la dose moyenne
délivrée était de 66,2 Gy (65-70), le nombre moyen de
séances 28,14 (24-35), le PSA Nadir moyen était de
0,502 ng/ml (0,05-2,1 ng/ml), le délai moyen d’atteinte
du Nadir de 18 mois (3-35 mois). Concernant la sous-
population en progression biologique, le suivi moyen
était de 31,6 mois (9-64 mois). L’âge moyen était de 71
ans (69-73 ans), le PSA initial moyen de 25,45 ng/ml
(17,9-33 ng/ml), le score de Gleason moyen de 4, la
radiothérapie externe était conventionnelle dans 100%
des cas, la dose moyenne délivrée était de 65 Gy, le
nombre moyen de séances 19, le PSA Nadir moyen
était de 1,115 ng/ml (1,03-1,2 ng/ml), le délai moyen
d’atteinte du Nadir de 12,5 mois (7-18 mois).
La comparaison (t de student) des deux groupes avec
et sans évolution biologique mettait en évidence une
différence seulement pour le PSA initial (p=0,0026).
Sous-population (Nadir > 0,5 ng/ml) de bon pronos-
tic
Aucune évolution n’a été constatée avec un recul
moyen de 36,8 mois (26-64 mois) dans la sous-popula-
tion qui a atteint un PSA Nadir > 0,5 ng/ml : le PSA
Nadir médian était de 0,8 ng/ml (0,6-2,1 ng/ml), et le
PSA initial médian de 6,2 ng/ml (3,3-9,4 ng/ml).
DISCUSSION
De nombreuses études ont déjà été réalisées concernant
les facteurs pronostiques des malades irradiés pour
cancer de prostate localisé. C’est l’hétérogénéité des
définitions d’évolution de la maladie et des populations
étudiées qui rendent les comparaisons difficiles entre
les différents articles publiés. La définition de
l’ASTRO a permis cependant d’uniformiser les critères
d’évolution biologique, qui survient plusieurs années
avant la récidive clinique.
Les facteurs pronostiques les plus souvent retrouvés
sont :
- Le stade clinique [1-3, 5, 7, 9-11, 14, 15, 17, 19, 21],
avec un pronostic proche pour les stades T1 et T2 [1, 3,
9, 16, 18, 23], mais une distinction pour le stade T2c qui
serait plus péjoratif [1, 7, 9]. C
HUBA
[3] a rapporté des
taux de contrôle biologique à 5 ans de 56 et 52% pour
les stades T1 et T2, et de 36 % pour les stades T3-4.
- Le taux de PSA initial avant irradiation [1-3, 5, 7, 9-
11, 13-20, 23, 24], avec des valeurs seuils à 10, 20 et
30 ng/ml [23]. Le taux de PSA initial n’a pas de valeur
prédictive dans une population où tous les taux sont <
10 ng/ml [1, 23].
- Le score de Gleason [1-3, 5, 7, 9, 10, 13-17, 19-21,
23, 24], avec une distinction pronostique entre deux
groupes de scores 2 à 6 et 7 à 10 [1, 3, 23]. PEREZ [18]
ne rapporte pas de valeur prédictive du score de
Gleason pour les patients porteurs d’une tumeur de
stade T1-2, et son intérêt serait aussi limité en cas de
dose délivrée > 67 Gy [20].
- La valeur du PSA Nadir [2, 4-6, 8, 15, 18]. CRITZ [4]
a observé que 98% des patients sans récidive après 5
ans avaient un Nadir 0,5, et 95% à 40 mois pour
CROOK [5]. Cette valeur de Nadir 0,5 a été aussi
retrouvée par d’autres auteurs [8, 18], mais un autre
critère semble être important, c’est le temps durant
lequel est maintenu le Nadir [8, 15] avec 91 % de sur-
vie sans évolution à 10 ans pour les patients T1-4 ayant
maintenu un Nadir < 0,5 ng/ml pendant au moins 5 ans
[8].
- Le délai d’atteinte du Nadir, plus court pour la popu-
lation en évolution [2, 4-6, 15]. AREF [2] a rapporté un
délai moyen de 18,8 mois pour le groupe sans récidive
222
Figure 1. Distribution des cinétiques de décroissance du PSA
entre les 3ème et 6ème mois.
C. Almeras et coll., Progrès en Urologie (2002), 12, 219-225
contre 10,9 mois pour le groupe avec récidive. Pour
CROOK [5], le délai est de 13 mois en cas de récidive
locale et de 7 mois en cas de récidive à distance, tandis
que les patients indemnes de récidive ont atteint un
Nadir moyen de 0,4 ng/ml (médiane : 0,3) avec un
délai moyen de 33 mois [6].
Dans notre étude, dans la Population A (Nadir 0,5
ng/ml ou Nadir non encore atteint avec dernier PSA
0,5 ng/ml) : aucune évolution n’a été constatée avec un
suivi moyen de 27,86 mois. Cette population au bon
pronostic représente 33,84% de la population T1 T2
Nx M0 traitée par radiothérapie externe exclusive.
Dans la Population B (Nadir > 0,5 ng/ml) : la valeur du
PSA initial et le délai moyen d’atteinte du Nadir sont
les seuls facteurs pronostiques identifiés. L’absence de
progression biologique à 42 mois était de 52,77%.
L’atteinte d’un PSA Nadir 0,5 ng/ml constitue ainsi
un facteur pronostique essentiel. Cependant, le pour-
centage représenté par la population A ne peut expli-
quer à elle seule le taux de patients indemnes de pro-
gression biologique (67,37% à 42 mois) observé dans
la population initiale de 65 patients.
Une sous-population qui a atteint un Nadir > 0,5 ng/ml
semble cependant se distinguer par son bon pronostic,
proche de celui de la population A : Nadir médian à 0,8
ng/ml (0,6-2,1 ng/ml), PSA initial médian à 6,2 ng/ml
(3,3-9,4 ng/ml) et cinétique < 0,35 ng/ml/mois, pour
laquelle aucune évolution n’a été constatée avec un
recul moyen de 36,8 mois (26-64 mois).
Lorsqu’on compare la Population A à la Population B,
en dehors de la valeur de PSA Nadir, une différence
significative a été observée pour le PSA initial, la dose
délivrée, la cinétique de décroissance du PSA. Il faut
cependant interpréter ces derniers résultats concernant
la cinétique de décroissance du PSA avec prudence, les
PSA initiaux n’étant pas comparables.
Parmi tous les paramètres comparés entre les popula-
tions A et B1, dépourvues d’évolution biologique,
seule se distingue la cinétique de décroissance du PSA.
La cinétique de décroissance du PSA, évaluation
simple et reproductible en pratique courante, a été ins-
pirée par l’atteinte plus tardive du PSA Nadir par la
population indemne de récidive [2, 4-6, 15]. Z
AGARS
[25] a étudié cette décroissance entre le PSA initial et
le PSA à 3 mois. Lui aussi a retrouvé que les valeurs
élevées étaient corrélées à un pronostic plus péjoratif,
mais qu’elles étaient en rapport avec le taux de PSA
initial, facteur pronostique reconnu. Z
AGARS
a donc
conclu au peu d’intérêt de la cinétique de décroissan-
ce du PSA. Cependant le dosage du PSA avant 3 mois
semble être sans intérêt, ce dernier ne diminuant pas
avant 3-4 semaines après radiothérapie [22], ainsi la
période avant 3 mois ne se prête pas bien à l’évalua-
tion de la cinétique de décroissance du PSA, alors que
les valeurs de PSA à 3 et 6 mois seraient importantes
pour le pronostic avec pour le PSA à 3 mois, une pro-
gression biologique à 4 ans de 20% s’il est 2 ng/ml,
de 58% s’il est compris entre 2 et 10 ng/ml, et de 90%
s’il est >10 ng/ml [25, 26]. C’est entre 3 et 6 mois que
la cinétique doit être calculée pour avoir un indice pro-
nostique précoce supplémentaire. Dans notre étude, la
comparaison des populations A (Nadir 0,5 ng/ml ou
Nadir non encore atteint avec dernier PSA 0,5
ng/ml) et B1 (Nadir > 0,5 ng/ml), sans progression
biologique, ne rapportait pas de différence concernant
le PSA initial alors qu’il existait une différence signi-
ficative pour la cinétique de décroissance du PSA.
Cette différence ainsi observée n’est donc pas essen-
tiellement due à la valeur du PSA initial. A l’analyse
de nos résultats, le patient dont la cinétique de décrois-
sance du PSA était égale à 0 ng/ml/mois a évolué.
Parmi les 23 patients qui ont atteint une cinétique de
décroissance du PSA <0,35 ng/ml/mois, 91,3% n’ont
pas évolué avec un recul moyen de 29,3 mois (69,5 %
issus de la population A et 21,74% issus du groupe
B1). Aucun des 4 patients qui ont atteint une cinétique
de décroissance du PSA <0,05 ng/ml/mois, n’a pro-
gressé biologiquement avec un recul moyen de 23,75
mois (100% issus de la population A). Ces résultats
montrent que pour une valeur de cinétique de décrois-
sance du PSA <0,35 ng/ml/mois et >0 ng/ml/mois,
correspondent 91,3% de sujets sans évolution biolo-
gique, tout en concernant une large partie de la popu-
lation. Plus la valeur de cinétique du PSA décroît, plus
les sujets concernés ont de chance d’appartenir à la
population A, dépourvue de progression biologique.
La cinétique de décroissance du PSA pourrait, dans ce
cadre, avoir un rôle pronostique par un calcul simple
basé sur les deux premiers dosages du PSA à 3 et 6
mois après la fin de l’irradiation.
La comparaison des facteurs étudiés chez les malades
avec et sans progression biologique de la population
avec une cinétique < 0,35 ng/ml/mois n’a mis en évi-
dence une différence significative que pour le PSA ini-
tial . Tous les patients qui ont évolué avec une cinétique
< 0,35 ng/ml/mois avaient un PSA initial >10 ng/ml.
Ce résultat paraît être compatible avec une améliora-
tion du caractère prédictif de la cinétique de décrois-
sance du PSA lorsqu’elle est couplée au taux de PSA
initial (seuil fixé à 10 ng/ml au vu des résultats de cette
étude et des publications[23]).
CONCLUSION
L’atteinte d’un PSA Nadir 0,5 ng/ml détermine un
groupe de patients indemnes de progression biolo-
gique. Un groupe de malades dont le PSA Nadir est
> 0,5 ng/ml est cependant remarquable par son bon
pronostic.
223
C. Almeras et coll., Progrès en Urologie (2002), 12, 219-225
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