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d’une part aux conditions carcérales (révocations du sursis, peines supplémentaires…) qui prolongent
les durées de l’incarcération ; d’autre part, à la demande et la nécessité de la prise en charge du
patient. Ainsi, il nous arrive de faire + de séances à la M.A. qu’à l’extérieur ou inversement + de
séances à l’extérieur qu’à l’intérieur. De +, les suivis peuvent dépasser les 6 séances « imposées »
et aboutir à des suivis en démarche spontanée.
Au 1er RDV avec les détenus, nous nous présentons, leurs expliquons le cadre et leurs
faisons signer une feuille d’engagement dans un suivi psychologique volontaire avec nous incluant
les 6 séances obligatoires dont les 3 à l’extérieur. Cette feuille d’engagement permet aux détenus de
matérialiser leur engagement. Ceci est symbolique puisque la majorité d’entre eux n’ont en réalité
aucunes obligations judiciaires de poursuivre le suivi. Cependant, certains ont une injonction de
soins auprès de notre association, dans ce cas le suivi peut alors débuter lors de l’incarcération et se
poursuivre à l’extérieur. De plus, lors de chaque entretien, nous leurs remettons une attestation de
présence justifiant de leur présence du jour et indiquant la date du prochain RDV (à la MA ou à
l’extérieur).
Notre objectif avec les patients est de faire en sorte qu’ils reconnaissent leurs actes,
qu’ils se responsabilisent vis-à-vis de ces derniers et qu’ils entament un travail de réflexion par
rapport à ces comportements dans le but de réduire le risque de récidive.
Cela commence par une réflexion autour de la communication. C’est d’autant + important
en détention que c’est le seul moyen de liaison (encore le lien !) entre eux et l’extérieur (leur
femme…) que ce soit par la communication écrite (« le courrier ») ou orale (appels téléphoniques ou
faces à faces aux parloirs). Bien souvent, l’isolement dû à l’incarcération leur fait prendre conscience
qu’ils communiquent + et/ou mieux pendant leur incarcération qu’à l’extérieur. Cette cassure avec
l’extérieur, avec l’autre, permet à l’auteur de se positionner avec + de recul sur sa situation et de
faire un travail de réflexion + objectif. De plus, comme il ne leurs reste que cela, ils font davantage
d’efforts pour maintenir ce lien qu’est la communication. Il est donc nécessaire pour nous de
travailler à rétablir chez eux une bonne qualité de communication car nous nous rendons compte que
bien souvent dans les V.I. la communication fait défaut et les « maux » viennent remplacer les
« mots ». Ainsi la communication apparaît comme le seul antidote non violent à la violence. Le
respect et le partage que la communication suggère pallient aux passages à l’acte.
Sans vouloir dresser de profil type de l’auteur de violences puisqu’il n’y a pas, les violences
touchant tous les sexes, tous les âges, toutes les religions, toutes les classes sociales…nous
constatons cependant quelques caractéristiques communes chez cette population. En effet, une
majorité d’entre eux présente des troubles cliniques tels que : des troubles anxio-dépressifs et/ou
de dépendance (alcoolisme et/ou toxicomanie). Nous constatons par ailleurs un nombre élevé
d’automutilations et de tentatives de suicide. De plus, la plupart d’entre eux ont des antécédents
judiciaires (très majoritairement en lien avec la violence).
Malgré les craintes que nous avions au départ, les détenus se sont révélés être une
population clinique sérieuse. Nous avions peur que l’absence d’obligation de soins soit un frein
(comme c’est souvent le cas à l’extérieur (une infime partie de démarche spontanée)) et que les
détenus une fois sortis ne respectent pas leurs rendez-vous à l’extérieur. En réalité, nous constatons
une population davantage investie et respectueuse des RDV. En effet, malgré l’absence
d’obligation, ces derniers respectent le contrat moral qu’ils ont passé avec nous, à savoir les 6 RDV
et souvent même poursuivent le suivi de manière volontaire et cela sur le long terme. De plus,
nous observons une population davantage dans la reconnaissance des faits et davantage motivée
dans un suivi thérapeutique ayant pour objectif la réduction du risque de récidive.
A ce jour, 95 patients ont été pris en charge au sein de la Maison d’arrêt d’Amiens. Seuls 10
d’entre eux n’ont pas respecté le suivi dans son intégralité (parfois faute de ne pouvoir se déplacer
ou parce qu’ils ont été transférés dans d’autres centre de détention…) et la moitié d’entre eux ont
poursuivi dans le cadre d’une démarche volontaire sur le long terme. Ce constat positif nous conforte
dans la pertinence de notre action et nous ouvre à réfléchir à une extension de notre intervention
mais également à d’autres outils au sein du milieu carcéral.