LE THÉORÈME de GÖDEL
Pour ce cours, G. Jorland s’est inspiré du livre de Pierre CASSOU-NOGUÈS1 : Gödel - Les
Belles Lettres (Janvier 2004)
Un des aspects qui est à l’arrière plan des paradoxes logico-mathématiques est ce qu’il y a
de rigueur en mathématiques que s’imposent les mathématiciens allemands de la fin du 19ème
siècle : cet idéal de rigueur est l’arithmétisation des mathématiques : la seule chose dont on
est sûr est que l’on sait compter, pour le reste on n’en sait pas grand-chose, car la rigueur
consiste à rationaliser les mathématiques.
Cet arrière plan est très important dans la mesure où il conduit à prendre au sérieux ces
paradoxes logico-mathématiques qui pourraient paraître relever de l’almanach Vermot.
Dans le cadre de l’arithmétisation des mathématiques, un personnage joue un rôle essentiel ,
c’est Georg Cantor (1845-1918)2, qui a été professeur de mathématiques à l'université de
Halle ( Allemagne) et qui a été l’auteur de la Théorie des ensembles qui montre qu’il y a non
pas un infini, mais plusieurs infinis, dans lesquels il y a des nombres transfinis. Or justement,
les paradoxes logico-mathématiques sont construits sur la méthode qu’emploie Cantor pour
montrer qu’il y a des nombres transfinis. Par conséquent, ce que remettent en question ces
paradoxes c’est l’existence même de ces nombres transfinis, c'est-à-dire qu’il y a plusieurs
infinis et donc toutes les mathématiques de l’infini (comme disait Cavaillès, les
mathématiques commencent avec l’infini) sont remises en cause par ces paradoxes, parce que
ils se servent du même argument que le fait Cantor qui est appelé l’argument de la diagonale.
publié en 1891. Il permit à ce dernier de donner une deuxième démonstration de la non-
dénombrabilité de l'ensemble des nombres réels, beaucoup plus simple, selon Cantor lui-
même, que la première qu'il avait publiée en 18741, et qui utilisait des arguments d'analyse, en
particulier le théorème des « segments emboîtés ». L'argument diagonal fut exploité dans un
cadre plus général par Cantor dans le même article pour son théorème sur la cardinalité de
l'ensemble des parties d'un ensemble.
Argument de la diagonale :
Approche du problème :
Choisissez quatre nombres de quatre chiffres
1 P. Cassou- Noguès , voir aussi Les démons de Gödel Logique et Folie (Sept 2007)
2 G. Cantor : Précisant des idées de Weierstrass, Cantor donne tout d'abord une définition rigoureuse des
nombres réels en les construisant par complétion à partir des nombres rationnels, puis s'attache à décrire et à
classer les ensembles exceptionnels. C'est à ce propos qu'il sera amené, dans une série de mémoires
échelonnés de 1872 à 1884, tout en mettant en évidence de nombreuses propriétés topologiques de la droite
et de l'espace (ensembles ouverts, fermés, parfaits...) et en abordant, le premier, le problème de la mesure, à
élaborer les bases de la théorie des ensembles ; les résultats inattendus qu'il obtenait, parfois à son plus grand
étonnement, pour les ensembles de nombres réels l'amenèrent alors à dégager sous forme abstraite les
mécanismes qui y conduisaient. (tiré de Encyclopedia Universalis)
On forme un nombre
en considérant les chiffres de la diagonale
pour choisir un chiffre différent (plus un par exemple)
Nous venons de créer un nouveau nombre obligatoirement différent des précédents.
Pourquoi?
Le premier chiffre et différent de celui du premier nombre
Le deuxième chiffre est différent de celui du deuxième nombre
4+1=5 ; 3+1=4 ; 7+1 =8 ; 5+1=6 ..Etc. Au final, chaque chiffre du nouveau
nombre est différent de celui d'un des nombres du tableau de départ
4 5 6 7
2 3 8 9
9 8 7 6
5 5 5 5
5 4 8 6
Le nombre 5486 est un nouveau nombre, différent de ceux déjà dans le tableau
C'est le principe de
la diagonale de Cantor
Cantor considère l’ensemble des nombres réels : il est compris entre 0 et 1 (la puissance du
« continu » c’est l’ensemble des nombres réels compris entre 0 et 1), donc l’idée de Cantor est
que l’on peut écrire l’ensemble des nombres compris entre 0 et 1
Avec cet argument de la diagonale, Cantor considère l’ensemble des nombres réels dont on
sait qu’ils sont compris entre 0 et 1
On a :
1 1 1 1 …
1 0 0 1 …
0 0 0 1 …
0 1 1 0 …
0 1 1 1 … on a un nouveau nombre et ainsi de suite
On peut donc concevoir un ensemble de nombres qui se situent entre 0 et 1 et on peut
numéroter ces ensembles avec des nombres entiers : 1,2,3,4, n et les numéroter comme des
objets. Et cela marche pour un tableau aussi grand que l’on veut, même infini.
Or, dit Cantor, je peux former un nombre tel que, par exemple, si la nième décimale est un 0,
alors, je la conserve comme telle : 0 et si la nième décimale (ici : la 4ème) est différente de 0,
alors je la remplace par 1
Colonne d’origine
1 0,00005 0,00005
2 0,00012 0,00002 par exemple :4ème décimale était
différente de 0
3 0,01071 0,00001 par exemple la 4ème décimale est 7 donc différente de
0, je la remplace par 0
Autrement dit dans cet ensemble je constate que sur le rang 2 la 4ème décimale de la
colonne d’origine est devenue 0 au lieu de 1 primitivement ; sur le rang 3: la 4ème décimale
est devenue 0 à la place de 7 ; C’est un nombre réel compris entre 0 et 1 qui n’est pas dans
cette énumération de la colonne d’origine.
Ainsi avec l’argument de la diagonale de Cantor il est toujours possible de former un
nouveau nombre
e1 =
0,
a11
a12
a13
a14
a16
...
e2 =
0,
a21
a22
a23
a24
a26
...
e3 =
0,
a31
a32
a33
a34
a36
...
e4 =
0,
a41
a42
a43
a44
a46
...
e5 =
0,
a51
a52
a53
a54
a56
...
etc.
Prenons le "nombre diagonal"
n =
0,
a11
a22
a 33
a44
...
On forme le nombre suivant
b =
0,
a11
a22
a33
a44
...
b est bien un réel compris entre 0 et 1 et, par construction il n'appartient pas au
tableau de correspondance. C'est un nombre en plus!
Nombres
L'application de la diagonale de Cantor montre que le tableau ne contiendra
jamais tous les nombres réels et on montre que les réels sont plus nombreux que
les rationnels; il y en même beaucoup plus.
Pour éviter toute confusion, la QUANTITÉ d'éléments dans un ensemble, est
appelée : Cardinal. On dit aussi : Puissance
De là, Cantor conclut que l’infini dénombrable, c'est-à-dire l’infini des nombres entiers est
plus petit (ce qui n’a pas grand sens puisque ce n’est pas fini), ou du moins n’a pas la même
puissance, d’où le cardinal3 de l’ensemble est moins grand que le continu. Le continu, c’est
l’intervalle entre 0 et 1 des nombres réels par opposition aux entiers naturels ; le continu
c’est aussi tous les points d’un segment de droite, c’est l’ensemble des nombres réels, encore
une fois, par opposition aux entiers naturels.
Pour signifier l'appartenance à E d'un élément x, on écrit : xE. Le signe se lit "appartient
à " ou "est élément de". Pour désigner les éléments d'un ensemble E, on peut écrire ces
éléments entre accolades :
Exemple : Soit E l'ensemble des multiples de 5 inférieurs à 33. On a E = {0 , 5 , 10 , 15 , 20 ,
25 , 30}. Si E possède une infinité d'éléments ; on peut aussi écrire : E = {0 , 1 , 2 , 3 , ...} ,
F = {1 , 3 , 5 , 7 , ...}. On exprime ici l'ensemble N des entiers naturels et celui des entiers
impairs.
On peut aussi représenter un ensemble de la façon suivante :
0 = {} (ensemble vide)
n+1 = n U {n}
Un entier positif est ainsi identifié à l'ensemble de ses prédécesseurs sur N.
Exemples :
1 = {0} = { {} }
2 = {0,1} = { {}, { {} } }
3 = {0,1,2} = {{}, { {} }, { {}, { {} } }}
4 = {0,1,2,3} = { {} , { {} }, { {}, { {} } } , {{}, { {} }, { {}, { {} } }}
On peut prendre l’ensemble des parties des ensembles de nombres réels, et de là, on
peut construire des infinis de plus en plus grands, mais l’hypothèse du continu c’est qu’entre
l’infini dénombrable et le continu, il n’y a pas d’autre infini c’est ce que les mathématiciens
du 20ème siècle essaient de démontrer, c’est ce qu’on nomme l’hypothèse du continu.
cardinal3 Le cardinal indique la quantité d'éléments d’un ensemble E = {x, y , z) donc 3
éléments: son cardinal s’exprime: Card (E) = 3; si l’ensemble est F = {1, 3, 5, 7, 9} , on écrit:
Card (F) = 5
Le cardinal d'un ensemble vide est 0.
Le cardinal de la suite des nombres de 1 à n est :n. On écrit : A = {1, 2, 3,…, n }.
On aura: Card (A) = n.
Réciproquement :Card (A) = n, si et seulement si :A est équipotent à {1, 2, 3,…, n }. C'est-à-dire
si : A contient n éléments. Deux ensembles qui ont une même cardinalité, donc une même
puissance, sont équipotents.
Or ce qui est important dans ce domaine c’est cet argument de la diagonale : on écrit
des nombres, on numérote ces nombres et en formant sur la diagonale un nombre qui pour
chaque chiffre prend un chiffre différent on arrive à former un nombre qui n’est pas compris
dans l’ensemble.
Rang : a. {0} soit :{ {} }
Rang :b …… .{0,1} soit { {}, { {} } }
.
.Rang :i ………{0,1,2,3} soit: { {} , { {} }, { {}, { {} } } , {{}, { {} }, { {}, { {} } }}
On peut voir qu’aussi loin on peut aller le long de cette diagonale, le nombre du rang qui
suivra sera différent jusqu’à un infini qui pour Cantor est un infini actuel et non un infini
potentiel, puisque l’on peut dire que l’ensemble N < R,4 il est borné par R, le cardinal de
N a moins de puissance que R, cela ne veut pas dire qu’au bout de N il y a R, au contraire
c’est dans N qu’il y a R, sa puissance, son cardinal est plus petit que R, moins d’éléments
que R
Bijection
Il est possible d'établir
une correspondance un
à un entre les éléments
des deux ensembles.
On dit, alors, qu'il y a
bijection de l'un des
ensembles sur l'autre
Équipotent
Deux ensembles sont
équipotents s'il existe
une bijection de l'un
sur l'autre
Ils ont la même
quantité d'éléments
Cet argument de la diagonale de Cantor est important et sera remis en question ce qui sera
utilisé pour les paradoxes dont s’inspire Gödel pour son théorème.
L’argument qui sera le nœud du paradoxe5 et qu’on appelle le cercle vicieux (Poincaré)
suppose donné avant de le construire cet ensemble des nombres réels puisque je le définis
comme un nombre réel : donc il y a présupposition de sa propre définition. Cela forme le
4 La notation originale de l'ensemble des nombres réels est . Cependant, les lettres grasses étant difficiles à
écrire sur un tableau ou une feuille, la notation s'est imposée
5 Paradoxe : forme d’assertion contraire à la doxa, à l’opinion commune, donc contraire à ce que l’on attend,
apparaît comme contradictoire
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