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Bulletin du CEPOD
CEPOD
CEPOD, renforcement de capacités
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Mécénat public des Arts et de la Culture
Aliou FAYE, Directeur du CEPOD
Dans les faits, le mécénat culturel consiste en des dons
en numéraire, en compétences, en nature ou en tech-
nologie au profit d’organismes et d’œuvres d’intérêt
général. Il se traduit par :
la sauvegarde, l’enrichissement et la valorisation
de monuments, musées, archives, livres, archéologie
etc. ;
la diffusion du spectacle vivant : musique, danse,
théâtre, cinéma, cirque etc. ;
le soutien à la création contemporaine par l’ac-
quisition d’œuvres originales d’artistes vivants dans
les domaines des arts plastiques, audiovisuels, numé-
riques etc. ;
le soutien à l’interprétation musicale par l’achat
et le prêt d’instruments de musique à des musiciens
de haut niveau, ou à fort potentiel ;
la diffusion de la littérature, de la langue et des
connaissances scientifiques nationales ;
les actions au croisement de la culture et du so-
cial.
Ainsi défini, le mécénat culturel interpelle tous les ac-
teurs : Etats, organisations, entreprises et individus. Il
se retrouve également dans ce que Abdou SYLLA
dans le numéro 80 de la Revue Ethiopiques appelle le
mécénat d’Etat pour désigner la politique culturelle au
Sénégal des années 1960-1980. Sous l’impulsion et la
supervision du Président Senghor, a été progressive-
ment mis en place tout un ensemble de textes législa-
tifs et réglementaires qui devaient servir de
fondements aux structures et institutions de prise en
charge et de dynamisation de la vie culturelle natio-
nale. Egalement, ont été progressivement installées
ces structures et institutions chargées tant de préserver
que de promouvoir et de diffuser tout un ensemble de
formes d’expression artistique, nationales et étran-
gères, traditionnelles et modernes, sous le double
éclairage de l’enracinement et de l’ouverture.
Ainsi, le ministère de la Culture a été créé en 1966,
le Service des archives culturelles en 1967, le Centre
d’études des civilisations en 1964, la Manufacture na-
tionale de tapisserie en 1966 avant de devenir la Ma-
nufacture sénégalaise des arts décoratifs, le Théâtre
national Daniel Sorano en 1965 avec une salle de
spectacle, une troupe nationale dramatique, un ensem-
ble lyrique spécialisé dans le chant et la musique tra-
ditionnelle et de deux corps de ballets (Linguère et
Sidra Badral), le Musée dynamique en 1966 dans le
cadre du premier Festival mondial des arts nègres de
1966, l’Institut national des Arts (Beaux Arts, Conser-
vatoire de Musique, danse, arts dramatiques) en 1972.
Le Musée ethnographique, créé par l’administration
coloniale en 1938, a été régulièrement enrichi et mo-
dernisé et des centres culturels régionaux ont été ins-
tallés dans les capitales régionales. Le Mécénat d’Etat
en direction des artistes a été à l’origine de la mise en
place de l’Ecole de Dakar des arts plastiques (peinture,
sculpture, architecture, arts graphiques et communi-
cations, environnement et tapisserie). Les produits des
membres choisis sur arbitrage direct du Président Sen-
ghor étaient montrés dans les expositions à l’étranger
ou tissés par les manufactures et les tapisseries puis
achetés par l’Etat.
En appui, la loi du 1% de 1968 faisait à tout construc-
teur obligation de consacrer 1% du coût total de toute
construction publique à financer la décoration des bâ-
timents publics. De même, le Fonds d’aide aux artistes
et au développement de la culture de 1978 était chargé
d’accorder des aides et des subventions aux artistes
dans le cadre d’actions diverses.
Sur le plan financier, l’investissement global pour
l’ensemble du secteur culturel couvrait 30% du budget
national. C’est dire donc que plus qu’un mécénat,
c’était une option politique qui avait choisie de confé-
rer à la culture un rôle stratégique dans le processus de
développement économique et social.
Soumis quasi exclusivement aux critiques du Prési-
dent Senghor, l’Ecole de Dakar n’a, cependant, pas eu
à s’exposer aux exigences d’une demande multi-cul-
turelle et ne fut pas en marge des critiques. Par ail-
leurs,cette politique ne pourra se poursuivre au-delà
des années 1970, période pendant laquelle la tutelle
de l’Etat s’essouffle sous l’effet de l’ajustement struc-
turel et de la libéralisation économique. De dirigiste,
l’Etat devient au plus accompagnateur, d’abord dans
l’élaboration de la Charte culturelle dans le cadre d’un
processus de construction consensuel ; ensuite, à tra-
vers l’édition de la Biennale de Dakar (Dak’Art) ; le
tout dans une perspective globale d’aménagement cul-
turel du territoire à travers la décentralisation de l’ac-
tion culturelle, et la défense de la diversité culturelle.