Bibliothèque
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vis-à-vis à la fois nécessaire et pro-
blématique du lecteur, c’est la défi-
nition de l’humani (comme qua-
lité) d’êtres singuliers et collectifs et
la transmission de cette qualité.
Le judaïsme apparaît, en miroir
de cette exploration du lien entre les
Juifs et la Bible, comme une quête
infinie de cette définition, non pas
seulement de son énonciation, mais
aussi de ce qui peut lui permettre de
se maintenir, de se transmettre d’où
toute la Tradition qui accompagne,
entoure, voire met à distance la
Bible. Telle est sans doute, à l’heure
où, comme l’écrit Attias, Dieu est
peut-être mort, non pas la définition,
mais le travail de l’élection pour que
perdure ce grain de sable dans les
rouages d’un monde sans lequel ce
monde ne serait pas tout à fait lui-
même.
Jean-François Bouthors
John R. Bowen
L’Islam à la française.
Enquête
Paris, Steinkis éd., 2011, 382 p., 22
Le grand intérêt de cet ouvrage
vient de l’enquête de terrain, pré-
cise et sur une durée de plusieurs
années, effectuée par J. R. Bowen,
professeur à la Washington Univer-
sity de Saint-Louis et spécialiste des
islams dans le monde. Elle révèle
d’autres facettes de cet « islam fran-
çais » que nous ne connaissons sou-
vent qu’à travers le prisme des ban-
lieues dangereuses et les usages
politiques qui en sont faits. Bowen
rappelle d’abord que les musulmans
français sont aussi et avant tout des
gens qui, par exemple, se marient
et sont tenus en se mariant de res-
pecter la loi française, qui leur
demande de se marier civilement
avant de le faire religieusement. Qui
ont des enfants (parfois non désirés),
qui divorcent, prient, étudient, achè-
tent à crédit (des maisons et d’autres
objets), meurent… et sont confrontés
aux prescriptions spécifiques de leur
religion. Que faire devant ces choses
de la vie dans un pays l’islam
manque de contexte, quels accom-
modements intérieurs avec la foi sont
envisageables, lesquels sont impos-
sibles ?
Il faut préciser toutefois : l’en-
quête de Bowen vise une minorité,
celle des musulmans et des res-
ponsables musulmans concernés
personnellement par la question d’un
« islam à la française », et donc en fin
de compte ceux qui sont acteurs du
changement. Dans ce cadre, il s’in-
téresse avant tout aux lieux d’études
et de formation, aux mosquées, aux
instituts de recherche, à ceux qui
dirigent et animent ces institutions ou
y participent en tant qu’intervenants,
à leurs discours, à leurs différences,
aux méthodes de travail qu’ils
emploient, aux sources et aux auto-
rités islamiques dont ils se récla-
ment pour pondre à ceux des
fidèles qui posent des questions ou
exposent des scrupules. Dans ces
lieux d’enseignement, l’arabe et le
français sont utilisés, mais il ne faut
pas surestimer l’usage du premier,
car souvent il n’est pas connu des
Français musulmans. La tradition
juridique, le fiqh, y est l’objet de
réinterprétations différentes, de
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