Haïti dans l’impasse des politiques de libéralisation commerciale L'opportunité d'un Moratoire aujourd'hui Campagne pour un Moratoire sur les accords de libéralisation commerciale en Haïti Décembre 2011 1 Table Des Matières 1. Introduction ...................................................................................................................... 3 2. Caractéristiques Sociales, politiques et économiques du pays......................................... 5 2.1. Profil Economique du Pays ........................................................................................... 5 2.2. Profil social et politique ................................................................................................ 6 2.3. 3. Profil environnemental ..................................................................................................7 Evolution de notre économie sous le poids du libéralisme ............................................... 7 3.1. Les réformes de 1983 à 1995 ........................................................................................8 3.1.1. Les mesures de stabilisation et d’assainissement des finances publiques ....................8 3.1.2. Les mesures de stabilisation de l’économie ................................................................8 3.1.3. Les mesures de démantèlement du système tarifaire ..................................................8 3.2. Les effets de ces mesures de libéralisation .....................................................................9 3.2.1. Un déficit commercial croissant .................................................................................9 3.2.2. Une augmentation disproportionnée des marges des commerçants ........................... 11 3.2.3. Une baisse relative des recettes publiques et une pression sur les taxes internes ....... 12 3.2.4. Une paupérisation des producteurs........................................................................... 13 3.2.5. Une réduction de l’accès au crédit ........................................................................... 14 3.2.6. Une menace pour les droits économiques, sociaux et culturels (DESC).................... 14 4. Aggravation de la situation avec le séisme du 12 janvier................................................16 4.1. En terme de gouvernance économique ........................................................................ 16 4.2. Un secteur productif affecté et des emplois durables perdus ........................................ 16 4.3. Aggravation de l’insécurité alimentaire ....................................................................... 17 4.4. Un secteur des Services atrophié ................................................................................. 17 4.5. Des ressources humaines drainées ou en fuite .................................................................. 17 5. Un moratoire aux mesures de libéralisation, une nécessité de l’heure .............................. 18 2 1. Introduction Le processus de libéralisation de l’économie, dans lequel le pays s’est engagé depuis une trentaine d’années, a fortement contribué au démantèlement de notre système productif. Il est clair que les dirigeants de ce pays se sont lancés dans ce processus sans aucune vision de développement nationale et en l’absence d’un débat public qui permettrait aux acteurs de se positionner sur une stratégie de développement et donc sur des choix nationaux à même de porter cette stratégie. En dépit de tout, les autorités continuent d’enfoncer le pays davantage dans cette spirale qui déstructure notre économie. La libéralisation de l’économie haïtienne a démarré en 1983 pour se poursuivre avec les coupes tarifaires de 1987 et de 1995. Et, dans ce même contexte, le pays se trouve, à partir de la deuxième moitié de la décennie 90, impliqué dans un enchevêtrement d’accords et de négociations d’accords commerciaux internationaux : Haïti devient membre de l’Organisation mondiale du commerce le 31 janvier 1996, membre de la Communauté caribéenne (CARICOM) en juillet 2002, participe au processus d’établissement du Marché économique unique de la Caraïbe. Et, en tant que partie à la 4ème Convention de Lomé en 1990 et signataire de l’accord de Cotonou en juin 2000, le pays a pris part au processus ayant conduit, le 15 décembre 2007, à la conclusion d’un accord de libre-échange, dénommé Accord de partenariat économique (APE), entre l’Union Européenne et le CARIFORUM, qui regroupe les pays de la Communauté caribéenne (CARICOM) et la République Dominicaine. La signature de l’APE, après diverses tergiversations, a eu lieu le 15 octobre 2008 entre l’UE et le CARIFORUM, à l’exception d’Haïti et Guyana qui a rejoint le groupe une semaine plus tard. Après plus d’une année d’hésitation, Haïti signe l’APE le 10 décembre 2009, soit un mois avant le séisme dévastateur du 12 janvier 2010 dont les conséquences seront ci-après exposées. Or, parallèlement l’intégration d’Haïti à la CARICOM offre des opportunités au pays, jusque là non exploitées, qui permettraient de réviser le système tarifaire national. D’autre part, le statut de PMA donne droit à des avantages quoique décidés unilatéralement qui permettraient de continuer à échanger avec les pays partenaires moyennant l’existence d’une production nationale suffisante. Fort de ce constat d’aucuns se posent la question à savoir: qu’est ce qui a motivé nos dirigeants à signer ces accords dans ces conditions ? En sachant que les conditions dans lesquelles ces accords ont été négociés ou mis en œuvre ne s’y prêtaient pas. Les négociations ayant donné lieu à l’OMC se sont tenues de 1986 à 1994 période à laquelle Haïti, en proie à une crise politique chronique, n’as pas su participer véritablement à ces négociations. Il en est de même pour les APE, cet accord a été négocié par une entité régionale en l’occurrence le CRNM (dont fait partie le CARICOM qui négociait pour le compte d’Haïti) alors que la CARICOM ne reconnaissait pas 3 les autorités haïtiennes de l’époque et en conséquence ne prenait pas en compte les désidératas du pays. Pourquoi les nouveaux dirigeants doivent-ils maintenir ces engagements ? Des engagements dont les mesures qui en découlent ont contribué à détériorer les conditions sociales et économiques de la grande majorité de la population. Le séisme du 12 janvier a retrouvé un pays totalement en crise, un pouvoir public affaibli et en butte à une crise structurelle et multidimensionnelle. L’ampleur de la catastrophe jointe à la crise de la société haïtienne soulèvent bien des questions et ont suscité des débats intenses sur les voies de relance de l’économie haïtienne. Ce rapport est commandité par la Coalition Nationale pour un Moratoire sur les Accords Internationaux1 dans la perspective de construire un argumentaire solide pour influencer les décideurs tant nationaux qu’internationaux, les partenaires de la société civile en prenant en compte l’urgence d’une remise en question de ces engagements et la nécessité de négocier un moratoire auprès des institutions internationales, blocs régionaux et ou pays du Nord. Un moratoire qui permettrait au pays de se retrouver dans des conditions non désavantagées en vue de pouvoir tirer avantage de ces accords. Ce rapport tente de montrer aux uns et aux autres les effets des politiques de libéralisation sur notre économie, tout en relevant leur accentuation après le séisme du 12 janvier 2010. Il sera présenté en trois parties. Tout d’abord, nous exposerons le profil du pays au niveau social et économique, dans un second temps, les mesures de libéralisation et leurs impacts sur notre économie et en dernier lieu, nous développerons les raisons pour une remise en question de ces politiques et un argumentaire pour la négociation d’un moratoire qui permettrait au pays de définir une politique d’intégration plus cohérente. 1 La coalition est composée des organisations suivantes : GARR – MODEP – KRD – FRAKKA – SAKS – PAPDA – CEAAL-Haïti, CRAD, Fondation Zanmi Timoun – POHDH – JILAP – CATH - REPT 4 2. Caractéristiques Sociales, politiques et économiques du pays 2.1. Profil Economique du Pays Les conditions socioéconomiques de la population haïtienne n’ont pas cessé de se détériorer au cours des 30 dernières années. Pour plus d’un, Haïti n’a jamais pu se relever de la crise du prix des matières premières de la fin des années 1970, particulièrement de la chute du prix du café qui représentait, avec la canne à sucre au début du XXème siècle, plus de 75% du Produit intérieur brut (PIB), dont plus de 50 % provenaient du café. Les difficultés du pays à honorer ses engagements avec ses créanciers internationaux nous ont amené à la signature du premier accord Standby avec le Fonds monétaire international en 1983. Le PIB réel de 1980 à 1986 a diminué de 0.6% annuellement et au cours de la même période, le PIB par habitant a non seulement décru de 10% mais encore ne cesse de décroître depuis. De 1996 à 2010, comme il est ressorti dans le graphe précédent, le PIB constant (au prix de 1987) est passé de 755 $Us/habitant à 330 $Us/habitant après avoir connu son niveau le plus bas en 2003 de 315 $Us/habitant. Pourtant en 2005, la reprise observée, selon les données fournies par la BRH, annonçait la fin d’une croissance négative avec des taux de croissance de 1.8, 3,3% et 2,9% pour les années 2006, 2007 et 2008 respectivement. Une amorce, cependant, interrompue avec les effets de la crise alimentaire et de la crise économique mondiale, avec les cyclones de 2008 et surtout avec le séisme du 12 janvier 2010 considérés dévastateurs pour le pays. Ces facteurs associés à d’autres plus structurels caractérisés par le désengagement de l’État 5 à accompagner le développement économique et l’absence d’investissements productifs ont conduit le pays à connaître le taux de croissance le plus bas de son histoire ; en dessous de -5%. Nous avons assisté au déclin du secteur productif où la part du secteur agricole au PIB est passée au cours de la période allant de 1998 à 2010 de 31% à 27%, et celle de l‘industrie manufacturière qui a vu sa contribution diminuer de 8,6 à 7,4% au profit du secteur des Services en totale hausse atteignant le niveau de 51.42% en 2010. Le secteur d’assemblage a pris un sacré coup avec l’embargo en perdant près de 30 mille emplois. Bon nombre d’entreprises, environ 20% des usines d’assemblage ont fermé leurs portes, en raison de l’instabilité politique pour se délocaliser. Il s’est produit une ouverture de notre économie au commerce extérieur qui porte les empreintes de la période coloniale (commerce de produits primaires) avec un déficit commercial de plus d’1,7 milliards de dollars US en 2008. Nous nous retrouvons avec un déficit public marquant car le pays consomme plus de richesses qu’il n’en produise et un déficit budgétaire croissant compensé en grande partie par «l’aide externe ». Au cours des exercices 2006-2007 et 20102011, le poids des ressources externes a dépassé les 2/3 du budget national. 2.2. Profil social et politique Haïti en 2008, le seul pays de la région figurant sur la liste des Pays Moins Avancés (PMA), se retrouve au 153ème rang parmi les 177 nations classées sur la base de l’Indice de Développement Humain (IDH). La population haïtienne, évaluée, selon les dernières estimations de l’IHSI de 2010 à 10 millions d’habitants avec un taux de croissance annuel avoisinant les 2,2%, se concentre de plus en plus dans les zones urbaines. Elle a cru plus fortement que la richesse nationale au cours des dernières décennies et il s’en suit une dégradation considérable de la situation socio-économique de la population caractérisée par une baisse de revenus et sa mauvaise répartition. Le pays s’éloigne de plus en plus de sa capacité à transformer cette réalité, caractérisée par un niveau d’analphabétisme et un accès très limité aux soins de santé primaires et aux services sociaux de base. Environ 52% de la population n’ont pas accès à l’éducation. Moins de 50% des femmes ont accès à l’éducation et pour les hommes moins de 40%. Près de 25% des enfants non scolarisés le sont en raison de la quasi inexistence d’écoles publiques, l’éloignement des écoles et de la précarité financière des parents. Plus de 50% des enfants abandonnent le circuit scolaire au bout de la cinquième année. Il est ressorti que les enfants des zones rurales ont encore moins accès à l’éducation avec une plus forte concentration des écoles dans les zones urbaines. Au niveau de la santé, la situation reste préoccupante avec un taux de mortalité maternelle de 630 pour 100 000 en 2009, un taux de mortalité infantile de 57 pour 1000 pour la même année et une couverture vaccinale pour les enfants de 12 à 23 mois avoisinant les 43%. 6 Avec une répartition aussi inégale des ressources, où 4 % de la population détient 66% de la richesse nationale et où 70 % de la population ont accès à seulement 20 % des richesses nationales, les chances d’accéder aux services sociaux de base, en particulier à l’éducation, l'habitat, l'éducation, l'alimentation sont compromises. Face à une population fortement appauvrie et confrontée aux difficultés d’accès aux services sociaux de base dont les coûts sont de plus en plus élevés, les conditions sont réunies pour connaître le niveau d’instabilité politique que nous avons vécu au cours des 20 dernières années. Elle n’est autre que le résultat d’une remise en question par la population du système politique et du pouvoir en place de plus en plus incapable de répondre à ses besoins fondamentaux et plus globalement de définir des politiques publiques autonomes adéquates prenant en compte les réels problèmes du pays. 2.3.Profil environnemental Les signaux d’un niveau de dégradation avancé de l’environnement n’ont cessé de clignoter à travers les dégâts enregistrés par les catastrophes engendrées tant par les inondations naturelles aux Gonaïves, à Fonds Verrettes et Mapou que par le séisme du 12 janvier à Port-au-Prince et d'autres villes de provinces (Léogane, Jacmel, etc). Dans un pays ayant une couverture forestière en dessous des 2%, où le bois est (avec une consommation annuelle de 2 millions de tonnes) et reste aujourd’hui encore la principale source d’énergie (71%) à coté des produits pétroliers (20%), de la bagasse (4%) et de l’hydro-électricité (5%), la situation est inquiétante. Elle l’est encore davantage au regard de la situation topographique du pays, marquée par des reliefs accidentés avec des massifs montagneux et des terres (60% du territoire) disposant des pentes de plus de 20% et de la disparition vertigineuse de la couverture boisée entrainant l’érosion des sols. Il est estimé à 2 mille tonnes la quantité de terre arabe qui est emportée annuellement par les eaux irréversiblement jusqu’à la mer. 3. Evolution de notre économie sous le poids du libéralisme Depuis environ une vingtaine d’années, le pays s’est lancé dans un mouvement d’intégration qui l’a amené à signer et à négocier une série d’accords commerciaux et d’intégration traversée par des idées diverses. Nous avons retrouvé le groupe des ACP en signant l’accord de Lomé qui va devenir plus tard l’accord de Cotonou, négocié notre intégration dans l’ALBA et intégré la CARICOM. Parallèlement, nous avons ratifié les accords donnant naissance à l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) et signé les Accords de Partenariat Economique (APE). Si dans les premiers cas, il y a eu une certaine préoccupation d’intégration, de développement économique des pays, comme c’est le cas notamment avec l’ALBA où la question d’une stratégie de développement et de solidarité régionale est au cœur du mouvement dans les derniers accords signés tant avec l’OMC qu’avec l’Union Européenne, la question commerciale est au 7 centre. Ces accords visent fondamentalement le développement du capitalisme sans préoccupation aucune des réalités des pays partie et de leur niveau de développement. Ils sont orientés et dominés par les intérêts des grandes puissances capitalistes et des multinationales. Globalement, les mesures de politiques que le pays a eu à prendre ont porté les empreintes de ces accords et ont cherché à libéraliser, et de fait libéralise à outrance, le commerce et l’économie nationale. 3.1.Les réformes de 1983 à 1995 La situation étant ce qu’elle est, les institutions financières internationales vont imposer au pays des mesures de « redressement » au cours de la période de 1983 à 1995, qui peuvent être décomposées en trois groupes i) le mesures de stabilisation, d’assainissement des dépenses publiques, ii) les mesures de libéralisation de l’économie iii) et enfin les mesures de démantèlement du système tarifaire liées au commerce . 3.1.1. Les mesures de stabilisation et d’assainissement des finances publiques Les mesures de stabilisation ont porté sur l’administration publique et les entreprises publiques, la construction et l’entretien des ouvrages publics comme les systèmes d’irrigation, le crédit agricole, la réduction des dépenses publiques, particulièrement les dépenses de fonctionnement, la réduction du crédit interne. Bon nombre d’entreprises publiques comme l’Usine Enarol et l’Usine sucrière de Darbone ont fermé leurs portes livrant au chômage une bonne partie de la main d’œuvre agricole et aussi la liquidation de la Minoterie, de la Cimenterie nationale, de la TELECO. Car ces usines représentaient un réel débouché pour les produits agricoles, une source d’emplois pour la main d’œuvre rurale. Elles constituaient une composante du secteur productif national et en tant que tel répondaient à une bonne partie de la demande alimentaire nationale. 3.1.2. Les mesures de stabilisation de l’économie Les principales mesures de stabilisation de l’économie adoptées se résument à la libéralisation du taux de conversion de la Gourde par rapport au Dollar en éliminant la parité de 5 gourdes pour 1 dollar et en adoptant le change flottant, à la libéralisation des taux d’intérêt et l’application d’une politique monétaire restrictive en vue de contrôler l’inflation et le taux de change au détriment de la croissance et/ou de la relance économique. Il s’en suit depuis un affaiblissement de la gourde par rapport au dollar et donc de tous les secteurs dont les transactions se font majoritairement en gourde. 3.1.3. Les mesures de démantèlement du système tarifaire Entre 1983 et 1995, les dirigeants du pays ont opté pour le démantèlement du système de protection commerciale avec l’élimination des barrières non tarifaires à l’importation, comme le contingentement, les interdictions d’importation et l’ouverture de tous les ports au commerce 8 extérieur. Les échanges commerciaux, à partir des ports des principales villes du pays, se faisaient sur fond de contrebande. D’autres mesures ont ciblé les tarifs sur les produits agricoles qui sont passés de 200% à moins de 50% avant de connaitre son niveau de démantèlement accru, caractérisé par la réduction de manière sévère des droits de douane au milieu des années ‘90. Les tarifs ont été réduits et simplifiés à six taux, 0%, 3,%, 5%, 10% 15% et un pic de 57,85 sur la gazoline. Dans la liste des concessions tarifaires soumises à l’OMC, les droits de douane ont été consolidés à des taux relativement bas, variant de 0 à 50%. La consolidation à zéro concerne plusieurs produits provenant de l’agriculture et de l’élevage en particulier le lait et le yogourt, une preuve de plus du réel mépris des dirigeants pour le secteur agricole. En septembre 2009, le gouvernement, en butte à des difficultés d’ordre budgétaire, a procédé à un léger relèvement des droits de douane sur certains biens : bon nombre de produits alimentaires accusant un taux de 0% ont été révisés à la hausse. Les différents taux sont passés à 3% pour certains et à 5% pour d’autres. Cette hausse a été enregistrée pour les produits dont les taux variaient entre 3 et 15% malheureusement pas pour le riz qui se trouve dans cette même catégorie. Cette mesure ne s’inscrit nullement dans une dynamique de correction de la politique de libéralisation dévastatrice pour l’économie nationale et l’exception concernant le riz ne fait qu’exprimer la nature du régime assurant la gestion du pouvoir plus enclin à défendre les intérêts des producteurs américains au détriment des producteurs locaux. 3.2.Les effets de ces mesures de libéralisation Le premier accord de Standby, signé par le régime dictatorial des Duvalier sous la pression des institutions internationales, a lancé le pays sur la voie d’un libéralisme auquel les différents régimes qui se sont succédé au pouvoir n’ont pas renoncé. Ils ont au contraire enfoncé le pays dans une crise en démantelant le système de protection commerciale et en ouvrant ainsi le marché national à la concurrence de produits importés de pays disposant d’un niveau de productivité nettement supérieure à Haïti et qui, en plus, pratique dans certains cas le dumping et la subvention aux importations. Ces mesures ont affaibli l’Etat et aggravé le système d’exclusion provoqué par l’appauvrissement des producteurs et renforcé la concentration de ce qui existe comme revenu national aux mains d’un groupe restreint de commerçants. 3.2.1. Un déficit commercial croissant La réduction des tarifs douaniers et l’ouverture de nos ports au commerce extérieur ont entrainé l’accès incontrôlé sur nos marchés de produits importés et provoqué ainsi une augmentation constante des importations. Celles-ci sont passées de 325 millions de dollars en 1983 à 2,266 milliards en 2008. Parallèlement, les exportations ont faiblement cru pour la même période passant de 266 millions de dollars à 490 millions. Le déficit commercial déjà amorcé à la fin des années 1970 par la lourdeur de la facture pétrolière, s’est aggravé et tend à devenir 9 chronique aujourd’hui avec une facture d’importation alourdie de plus en plus par les besoins alimentaires sans cesse croissants en raison de la croissance démographique et du déclin de la production agricole. Si avant 1986 le pays pouvait compenser les importations alimentaires par les exportations, en 2008 la situation s’est détériorée car les importations alimentaires au cours de cette année dépassent les exportations totales. En prenant en exemple la filière rizicole et la filière avicole la production nationale a fortement chuté au profit des exportations. La consommation annuelle de riz estimée en 2007 à 564 843 TM2 est assurée à 20% par la production nationale (105 100 tonnes métriques) et à 80% par les importations (440 268 TM d’équivalent en paddy). Alors qu’en 1985 les importations de riz étaient en dessous de 10 000 tonnes. Aujourd’hui, la quasi totalité de la consommation de poulets et de produits avicoles assurée avant 1986 par la production locale est reprise par les importations. Selon LARHEDO, les importations d’œufs sont estimées à 33 millions d’œufs par mois, coutant au pays plus de 2 millions de dollars US mensuellement, fournis à 90% par la République Dominicaine. Ce qui signifie une fuite nette de capitaux et de devises. 2 Bayard Budry La filière agricole en Haïti Diagnostic et Perspectives, ANDAH 2007 10 3.2.2. Une augmentation disproportionnée des marges des commerçants Une analyse de l’évolution des prix de certains produits agricoles comme le sucre, la farine et l’huile, évoquée par Baris dans le rapport sur la tarification des produits agricoles, pour la période succédant la réduction des tarifs, après février 1995, nous permet de constater que la réduction des tarifs n’a pas eu les effets escomptés sur le prix de détail. Les prix sont restés globalement stables avec une tendance à la hausse. En d’autres termes, ces mesures, en raison de la faible concurrence existant sur le marché des importations, n’ont nullement aidé à baisser les prix et augmenter la consommation des ménages, mais ont été plutôt favorables aux commerçants qui en ont profité pour augmenter leur marge de profit. Tableau 1 Répartition de la marge par acteur au niveau de la filière 1990 1990 Riz local Offre (000 tonnes) Prix en $/tonne Coût moyen de production Coût moyen importation Coût + marge des commerçants Marge/KG des producteurs Marge/KG des importateur 2005 Riz Importé % 129,000 % Riz local 114,000 580 100 130 22.4 310 53.4 140 24.2 573 % 80,000 100 500 87.2 33 5.8 40 2005 7 Riz Importé % 356,000 920 1.00 403 43.8 346 37.6 171 18.6 1,090 1.00 853 78.2 149 13.7 88 8.1 Il est ressorti du tableau 1 qu’au niveau du secteur agricole, les coûts d’opération et de production ont augmenté. Si en 1990 les coûts de production représentaient moins de 25% de la valeur du riz sur le marché de détail, en 2005 leurs poids ont quasiment doublé (43,8%). Cette hausse de coût, due à l’augmentation du prix des intrants, se répercute sur la marge de profit des producteurs qui a connu une baisse. Au niveau de la commercialisation du riz, on a observé une nette augmentation dans la marge des commerçants de riz importé et particulièrement les importateurs. Ils sont doublement bénéficiaires pour avoir connu une augmentation de marge sur le Kg et sur le volume de riz commercialisé. Le marché, avant les réformes, était approvisionné par 100 mille exploitants agricoles haïtiens alors qu’à présent plus de deux tiers de l’offre alimentaire de riz sont fournis par six (6) gros importateurs de la place ; ce que l’on appelle couramment « les commerçants du bord de mer », un mouvement qui tend à favoriser le monopole. 11 3.2.3. Une baisse relative des recettes publiques et une pression sur les taxes internes Avec la libéralisation des échanges et la réduction des tarifs douaniers, deux phénomènes se sont produits dans les recettes publiques. On a observé tout d’abord une augmentation du déficit budgétaire et une réduction du poids des recettes douanières dans les recettes totales qui sont passées de 37% à 29% de 1983 à 2007. Le déficit public basé sur les recettes courantes et les dépenses courantes de l’Etat est passé de 986,1 millions de gourdes en 1995 (67 Millions $US) à 4 milliards de gourdes (115 millions $US) en 2007, soit une augmentation de 171%. Cette augmentation du poids des recettes internes, particulièrement la TCA (Taxe sur Chiffre d’Affaires) en raison de son caractère non discriminatoire contribue à contracter l’activité économique interne, une contraction beaucoup plus forte sur les ménages à faible revenu. En prenant en compte les dépenses d’investissement, nous pouvons observer pour les trois derniers exercices 2006-2007, 2007-2008 et 2008- 2009, les recettes publiques ont avoisiné les 35 % du budget national et représente environ 20% du PIB pour ces périodes. Importance du déficit public dans les derniers exercices (en millions de gourdes) 2006-2007 2007-2008 2009-2010 Recettes Totales 21 944,00 26 017,00 34 925,00 Dépenses totales 60 675,00 77 159,00 88 197,00 déficit 38 731,00 51 142,00 53 272,00 PIB Totale 220 110 250 590 256 019 Déficit/PIB 0,18 0,20 0,21 12 Cette situation fragilise notre économie et la rend très dépendante de l’aide externe. Une aide qui tend à se raréfier sur le marché international avec la crise financière et économique internationale. 3.2.4. La paupérisation des producteurs Les politiques d’ajustement structurel prônant un État minimal, renforcées avec les mesures de libéralisation réduisant les recettes de l’Etat qui ont suivi, ont contribué à un affaiblissement de l’État devenu incapable d’offrir le moindre appui au secteur agricole et de fournir le moindre service de base aux producteurs et à la population contribuent à aggraver la crise du secteur agricole. Nous avons en face de nous un pouvoir public de moins en moins capable de réhabiliter les systèmes d’irrigation défectueux, les routes nationales et secondaires défoncées et impraticables, dans un pays où les pauvres représentent une majorité écrasante et surtout grandissante. Dans un tel contexte, les chances de retrouver à nouveau un secteur productif compétitif sont compromises. Les réformes sont intervenues à un moment où les agriculteurs connaissaient un niveau de paupérisation sauvage, leurs revenus au moment des réformes étant déjà bas. Le choc provoqué par l’abaissement des tarifs et l’augmentation des importations de produits à bon marché, ont davantage porté à la baisse les revenus des exploitants. L'abattage systématique de tous les porcs créoles au début des années quatre vingt, en raison d'une soi-disant épidémie de peste porcine africaine, a constitué aussi un coup dur porté à la paysannerie et constitué sans nul doute l'un des facteurs de l’appauvrissement de la paysannerie et de la population en générale. L’élevage de porcs représentait une source de richesse importante pour les paysans, ainsi que la forme principale d'épargne en milieu rural. L’élevage de porc jouait d'autre part le rôle d’amortisseur de crise, en permettant à la paysannerie de pouvoir absorber les chocs internes et externes s’attaquant à leur unité de production. Tous ces éléments ont eu des répercussions sur la productivité du secteur et sur la production globalement. La paupérisation des producteurs agricoles va de ce fait s’accentuer et compromettre les chances de modernisation du secteur. En plus de limiter la capacité du pays à s’intégrer dans l’environnement économique international, ces reformes vont entrainer la déstructuration du secteur agricole et le démantèlement du sous secteur agro-industriel embryonnaire avec comme corollaire le développement du chômage urbain et l’essor du secteur informel dans les grandes villes. Cela va aussi accélérer le démantèlement des structures économiques du pays et déconnecter les secteurs entre eux. Elles vont aussi augmenter la pression sur les ressources naturelles, la migration des paysans vers les villes en quête d’un avenir meilleur. Ils vont s’installer dans les bidonvilles dans des conditions très précaires contribuant à augmenter l’ampleur des dégâts provoqués par le séisme du 12 janvier 2010. 13 3.2.5. Une réduction de l’accès au crédit La libéralisation du système financier a conduit à une hausse en moyenne des taux d’intérêt, hausse plus élevée que l’indice moyen des prix à la consommation, entrainant une baisse de crédit au secteur productif dont le secteur agricole. Sur la période allant de 2000 à 2006, environ 63% du crédit était alloué au commerce de gros et de détail, aux services et à l’industrie manufacturière. La tendance est restée la même avec une baisse due à la réduction du montant de crédit investi dans l’industrie manufacturière qui est passé au cours de la période de 21.7% à 14.4%.. Un crédit utilisé surtout pour le commerce des produits importés et la consommation de bien de luxe. La révision ou les modifications apportées dans la stratégie du Bureau de Crédit Agricole (BCA), la seule institution de crédit finançant le secteur agricole, a constitué un coup dur porté à l’agriculture paysanne. Le BCA a suspendu ses opérations de financement direct de l’agriculture pour s’orienter vers une fonction de grossiste financier , redistribuant du crédit à des opérateurs financiers et à des ONGs, laissant libre choix à ces opérateurs financiers de financer les activités de court terme et celles considérées comme plus rémunératrices. En 1995, correspondant à la période de révision de la politique du BCA, les fonds d’investissement du BCA investis dans le secteur agricole dépassaient les 256 millions de gourdes3 et ont chuté pour l’exercice 2004-2005 à moins de 23 millions de gourdes et à moins de 17 millions pour celui de 2005-2006. Ainsi, la part du crédit venant des fonds du BCA alloué au secteur agricole est-elle passée de 100% à 9%. Pour l’exercice 2006-2007, moins de 1% du total du crédit formel (soit 5,8 millions de Gourdes) est dédié aux activités d’agriculture, de sylviculture et de pêche. 3.2.6. Une menace pour les droits économiques, sociaux et culturels (DESC) Selon les dernières statistiques de l’IHSI, de 1997 à 2003, correspondant au début de l’aggravation du déficit public, près de 90% des écoles sont des écoles privées, plus de 60% des établissements scolaires sont logés dans des bâtiments inadéquats (église, abris). Un accès différencié selon le sexe et le milieu. En effet, le taux d’alphabétisme de la population de plus de 15 ans est estimé par IHSI en 2003 à 54.1%, avec 60.1% pour les hommes et 48% pour les femmes. L’accès est quasiment le double selon que l’on soit en milieu urbain (71.8%) ou en milieu rural (38.6 %). Dans une économie où plus de 55% de la main d’œuvre active vivent dans le chômage, avec une prédominance des écoles privées, nous nous éloignons des objectifs du pouvoir public à assumer ses obligations envers les citoyens. La politique de marchandisation des services sociaux, renchérissant davantage le coût d’accès à l’éducation avec un doublement des prix en moins de 5 ans (de 1996 à 2000), le coût moyen est passé de 6,670 gourdes à 15,3434 3 256.207.708 gourdes repartis ainsi : i)Fonds de roulement 147.159.071 gourdes, ii) Fonds de garantie : 50.253.205 gourdes et iii) Fonds de participation : 60.795.432 gourdes 4 Moisset et Mérisier (juin 2001). ibid. p. 115 14 gourdes pour un ménage de trois enfants 5), contribue énormément à exclure la population à faible revenu du système éducatif. Une éducation de plus en plus coûteuse dont la qualité laisse à désirer avec une moyenne de 78 élèves par salle de classe et 1.87 classes par enseignant ce qui sous-entend que les enseignants interviennent en moyenne dans plus d’une salle de clase à la fois ou encore il y a environ une salle de classe qui ne dispose pas d’enseignant à plein temps. La situation est encore plus dramatique quand on sait que ce système fonctionne sans inspection scolaire puisque chaque conseiller pédagogique rayonne sur plus de 200 écoles. S’agissant de la santé, les statistiques affichent la même tendance avec une faible couverture sanitaire de 2 médecins, une infirmière, 2.5 auxiliaires pour 10000 habitants, un taux de mortalité infantile le plus élevé dans la caraïbe (59.7 pour 1000), une espérance de vie à la naissance 62.5, un taux de moralité maternelle 630 pour 100 000 habitants. Globalement, nous pouvons retenir un désengagement du pouvoir public à prendre en charge des soins médicaux qui demeurent de plus en plus chers pour les ménages. De 1996 à 2000, les dépenses globales de santé du pays ont augmenté et parallèlement, la part des dépenses consenties par les ménages a presque doublé. Elles sont passées de 21 % à 48%6 de leurs revenus. Ce qui implique une exclusion quant à l’accès aux soins de santé des catégories à faible revenu. Dans les zones rurales où vivent plus de 65 % de la population, seulement 10 % des médecins sont présents. Il est aussi remarqué que près de 90 % des médecins résident dans le département de l’Ouest principalement la zone métropolitaine. Les stratégies néolibérales conduites ont affaibli l’État et les Gouvernements, privant ces derniers des ressources nécessaires à la prise en charge du social. Nous nous retrouvons dirigés par des Gouvernements réduits et affaiblis et dépendants. L’Etat a ainsi hypothéqué toute son autonomie et sa souveraineté dans la définition des politiques publiques. Les dirigeants se retrouvent dans une situation d’attentisme, en incapacité de satisfaire les besoins fondamentaux de la population et surtout de propulser le développement social et économique. La capacité de l’Etat à intégrer les DESC dans la politique nationale s’est détériorée avec la libéralisation de notre économie. La prise en charge de ces droits par la mise en place des mécanismes de financement répondant aux exigences de justice sociale et de répartition équitable des richesses tend à être supplantée par l’établissement de "filets de sécurité sociale" dans un espace réglé par la marchandisation des services. Cet exercice devient de plus en plus difficile dans un Etat caractérisé par une politique de mépris et d’exclusion où la domination du pouvoir par une oligarchie n’ayant aucun souci quant aux besoins sociaux fondamentaux de la population. 5 Pour un ménage ayant trois enfants, un enfant par cycle ( 3000, 600 et 3070gourdes) en 1996 ( 2514, 3605, 7224) pour les cycles préscolaire, primaire et secondaire 6 MSPP, ibid. (p.87) 15 4. Aggravation de la situation avec le séisme du 12 janvier Le séisme du 12 janvier 2010, outre qu’il est la catastrophe la plus meurtrière de l’histoire du pays, a entrainé des pertes et dommages substantiels au pays évalués à 7.9 milliards de dollars, représentant 120% du PIB national de l’année 2009 et a touché divers secteurs, particulièrement les infrastructures à 39.5%, le secteur social à 19.8%. Les impacts sociaux et économiques sont énormes et contribuent à entraver le développement du pays. 4.1.En terme de Capacité institutionnelle de l’Etat Le séisme du 12 janvier a mis à nu le niveau de centralisation du développement du pays autour de la capitale car les dégâts sur deux des dix départements du pays ont paralysé toutes les activités économiques. La fermeture momentanée des ports et de l’aéroport de la capitale a bloqué les exportations des produits manufacturiers représentant 75% des exportations totales et réduit fortement les recettes du pays. Pour l’exercice 2009 -2010, le niveau de recette n’a pas dépassé les 60% des prévisions budgétaires. Une situation qui renforce le niveau de dépendance du pays par rapport à l’aide internationale et qui l’éloigne de sa capacité à prendre en main son propre développement, ajouté à cela le manque de vision claire et l’absence d’une politique globale capable de lancer le pays sur la voie d’un développement durable et endogène. Avec la création de la Commission Intérimaire pour la Reconstruction d'Haïti (CIRH) et le dispositif mis en place permettant aux ONG internationales d’évoluer sans aucun contrôle, nous avons assisté au renforcement du système de domination et à l’exclusion tant des institutions publiques que celles de la société civile de la chose publique. La CIRH et les ONG participent d’un seul et même projet qui est celui d’un affaiblissement de l’Etat prôné par les institutions internationales et la pénétration du capital international au mépris des intérêts fondamentaux de la population. Les témoignages des uns et des autres sont nombreux à évoquer que les milliards de dollars dépensés au cours des 18 mois suivant le tremblement de terre n’ont apporté aucune réponse concrète aux problèmes sociaux les plus urgents de la population, ils ont aussi signalé la précarité des personnes déplacées vivant dans les tentes, et les expulsions forcées des gens de bon nombres de tentes. 4.2.Un secteur productif affecté et des emplois durables perdus Les enquêtes menées dans les centres de réfugiés (couramment appelé à tort les "camps") ont fait ressortir que plus de 50% des gens qui s’y retrouvent menaient une activité économique avant le séisme. Ils étaient répartis dans des secteurs divers particulièrement l’agro-industrie affectés par le séisme. Nous pouvons, à titre d’exemple, citer la destruction à 50% des guildiveries de Léogâne et la perte de plus de 30% de la capacité productive de l’entreprise Rhum Barbancourt de renommée internationale et les différents bâtiments détruits au centre ville ou étaient logés un grand nombre de commerce de gros et de détail. 16 4.3.Aggravation de l’insécurité alimentaire Le MARNDR7 a fait ressortir comment les plaines irriguées autour de Léogâne, de Petit Goâve, de Grand-Goâve ont été affectées par le séisme avec la destruction des systèmes d’irrigation. Dans ce rapport, comme dans celui de la CNSA, il est fait aussi mention des pertes d’outils enregistrées, de la consommation des réserves alimentaires et des semences par les familles accueillant les déplacés et de leurs impacts sur la diminution de la capacité de production des exploitations agricoles. Il y a eu environ 600 000 déplacés abandonnant les zones touchées par le séisme qui se sont réfugiées dans les autres départements du pays l’Artibonite, le Nord, le centre et le Nord-Ouest pour ne citer que ceux là. Environ 100 000 ménages des zones rurales touchées par le séisme ont perdu leur stock. Certains ont du vendre leur bétail pour faire face aux besoins alimentaires de leurs ménages. Il y est indiqué que les besoins en ressources liées au remplacement, à la réparation des biens perdus vont entraîner des ponctions sur les revenus agricoles, induire des difficultés à financer les prochaines saisons agricoles, de surcroît affecter défavorablement la production et ainsi aggraver le niveau de déficit alimentaire. Outre les effets du séisme du 12 janvier, il convient aussi de relever ceux provoqués par le cholera et par le cyclone Thomas dont les impacts sont énormes sur le secteur agricole et sur la sécurité alimentaire de la population. Avec Thomas, certaines zones comme le Nord-Ouest, le Sud et la Grande Anse ont perdu une bonne partie de la récole (c’est le cas pour la banane, le pois congo et le bétail) entrainant une baisse de revenu au niveau des exploitations. 4.4.Un secteur des Services atrophié Le secteur des services représentant actuellement 61% du PIB, selon les chiffres officiels, n’est l’objet d’aucune réflexion portant sur son insertion dans une politique globale de développement. Des filières porteuses ont certes été identifiées dans le domaine de la communication, des assurances, de la gestion de documents et les industries créatives. Les quelques initiatives se sont limitées au tourisme et la communication de façon plus récente qui font face à des contraintes de taille comme l’absence de programme d’assistance technique et de crédit et la faible disponibilité de main d’œuvre qualifiée. Les efforts consentis en dépit de tout au cours de ces dernières années pour refaire l’image du pays et en faire une destination touristique ont pris un coup avec le séisme. Le pays a perdu plus de 300 chambres d’hôtel et a vu ainsi sa capacité d’accueil fortement réduite. Le risque-pays a augmenté d’un cran car le risque sismique s’ajoute aux autres risques sanitaire et sécuritaire contre lesquels le pays se démène déjà non sans difficultés. 4.5.Des ressources humaines drainées ou en fuite Outre les pertes en vie humaine, le séisme du 12 janvier a détruit la capacité installée d’enseignement aux niveaux primaire, secondaire et universitaire et occasionné des départs 7 Plan d’investissement agricole, mars 2010 17 importants de professionnels haïtiens migrant vers l’étranger; la fuite des cerveaux étant une conséquences directes des effets pervers de la libéralisation. Bon nombres d’entre eux ont migré avec toute leur famille privant ainsi le pays d’une bonne partie de cadres du système éducatif haïtien et entravant fortement la capacité du pays à se lancer dans la voie de la modernisation de son système éducatif et de son économie. 5. Un moratoire sur les mesures de libéralisation: une nécessité de l’heure Les principaux constats faits antérieurement confirment les conclusions des différents rapports d’organismes internationaux tels que l’OCDE, évoquant que les pays qui ont signé des accords prônant des mesures d’ouverture drastiques ne sont pas nécessairement ceux qui ont connu des progrès considérables en matière de croissance et de développement. Ces accords, visant à instaurer des régimes commerciaux basés sur la réciprocité tels que les Accords de Partenariat Economique (APE), ont grandement limité les possibilités de ces pays à disposer de stratégies de développement propres. Le statut de PMA d’Haïti, joint aux effets des mesures de libéralisation et combiné à la situation post-séisme, devraient nous guider pour engager des négociations avec les pays et Institutions financières internationales autour d’un Moratoire concernant la mise en œuvre de nos engagements de réciprocité liés aux accords commerciaux internationaux. La demande de moratoire ne constituera pas une innovation haïtienne car, dans le cadre du Système commercial multilatéral géré par l’OMC, représentant la référence aujourd’hui en matière d’accords commerciaux internationaux, il existe dans presque tous les accords des moratoires en faveur des PMA concernant la mise en œuvre. Ces moratoires se basent sur deux facteurs essentiels : les effets d’une brusque libéralisation de l’économie de ces pays et leurs faibles capacités d’administration de ces accords. C’est dans ce contexte qu’une initiative en faveur de ces pays en matière d’assistance technique portant sur le commerce a été adoptée en 1997. Cette initiative ayant débouché sur le Cadre intégré vise non seulement le renforcement de la capacité de production de ces pays mais aussi leurs capacités de gestion des accords commerciaux internationaux. Les résultats de cette initiative s’avèrent globalement mitigés et ceci particulièrement dans le cas d’Haïti pays pilote du processus. En plus de l’initiative Cadre intégré, bien des préférences commerciales ont été octroyées aux PMA. Parmi ces initiatives, nous pouvons citer celles dont Haïti est bénéficiaire : le TSA (Tout Sauf les Armes) autorisant les PMA à tout exporter, sauf les armes, en exemption de droits de douane sur le marché européen sans obligation de réciprocité. Aucun PMA ne saurait se targuer d’avoir su exploiter cette préférence. Dans le cas particulier d’Haïti, cette préférence n’a 18 su aucunement favoriser l’augmentation de ses exportations sur le marché européen. Si dans la situation d’avant le séisme le pays n’a pas su exploiter cette préférence unilatérale d’une portée aussi grande, on comprend très mal qu’il puisse, dans le contexte actuel marqué par les conséquences du séisme du 12 janvier 2010, envisager tirer avantage de la préférence réciproque que constitue l’APE entre l’Union Européenne et le CARIFORUM. Le développement inégal et les asymétries brutales, caractérisés par les déséquilibres entre les structures sociales et économiques des pays et par les contraintes financières et technologiques, constituent une véritable entrave au redressement des secteurs productifs et à la modernisation des pays à faibles revenus en vue de satisfaire les exigences sanitaires et techniques du système commercial international. Or, les dégâts provoqués par le séisme tant au niveau structurel qu’infrastructurel, les pertes en vies humaines, les pertes économiques (près de 120% du PIB), accentuant l’affaiblissement de l’Etat, exigé par les Institutions Financières Internationales, exacerbent le niveau de vulnérabilité et entravent ainsi les possibilités de redressement si des mesures drastiques ne sont pas prises en toute autonomie tant au niveau global que sectoriel. Le séisme du 12 janvier, suivi des déclarations de bonnes intentions de la part de la dite "Communauté internationale", en dépit de la meurtrissure de l'âme des Haïtiens, devrait être saisi comme une opportunité pour plaider en faveur d’un moratoire d’au moins une vingtaine d’années tout en renégociant ces accords, accompagné d’un vaste programme de refondation du pays par le remembrement et le renforcement des structures économiques et sociales. Le pays utilisera ce moratoire pour repenser les politiques économiques et sociales et mettre en place un ensemble de mécanismes devant lui permettre de pouvoir répondre aux défis de souveraineté de toutes sortes. Ce serait aussi le moment de définir d’autres stratégies d’intégration plus inclusive basée sur l’implication réelle des citoyens dans la définition, l’évaluation, le contrôle, le suivi des politiques nationales de développement. Il est aujourd’hui plus qu’impératif pour l’Etat de se lancer dans ce vaste chantier de refondation réelle du pays passant par l’élaboration de stratégies souveraines viables visant la relance de la production nationale, la construction d’infrastructures économiques, sociales (éducatives, sanitaires, environnementales…..). Ce vaste chantier doit aussi s’atteler à moderniser le secteur productif, lever son niveau de compétitivité et le placer dans des conditions techniques et sanitaires en vue de répondre aux besoins alimentaires de la population et faire face aux exigences d’un marché mondial de plus en plus contraignant. La priorité n’est pas à la stabilisation, au contrôle de l’inflation et du taux de change. L’heure est à au redressement de notre système productif voire de notre économie en vue de la transformation des conditions de vie de la population et des couches défavorisées en particulier. 19 6. Piste de Plaidoyer L’argumentaire pour un moratoire aux accords de commerce développé n’est autre qu’une action de portée limitée dans le temps qui doit s’inscrire dans une réflexion plus globale sur quelle politique publique qui pourrait redynamiser notre économie et qui garantirait un développement durable au service de la population. Enfin, nous avons jugé bon de compléter notre analyse en proposant un ensemble de mesures de nature à guider l’action des autorités et de la société. Ces mesures peuvent être sériées en cinq grands axes : 6.1. L’heure est au bilan et à la réflexion sur les accords commerciaux Dans les différents rapports des organismes internationaux tels que l’OCDE, il est mentionné que les pays qui connaissent un bond considérable en matière de croissance et de développement ne sont nullement ceux qui auraient adopté des mesures d’ouverture commerciale les plus radicales. Le cas d’Haïti peut être pris en exemple comme étant le pays le plus ouvert de la zone Caraïbe et pour lequel il est enregistré des indices de développement humains et des indicateurs macroéconomiques les plus faibles. Le Gouvernement haïtien devrait saisir l’opportunité post 12 janvier 2010 pour définitivement évaluer les 20 dernières années dominées par des politiques néolibérales et repenser l’orientation générale des accords commerciaux qui mettent trop l’accent sur la libéralisation commerciale et qui menacent la souveraineté alimentaire de la population haïtienne. 6.2. A la définition d’une stratégie de développement national Le Gouvernement haïtien devrait s’engager au plus vite dans un processus d’élaboration d’une stratégie nationale de relèvement et de développement définissant clairement ses choix en termes de politique, ses priorités, présentant les secteurs économiques sur les quels le pays pourrait se reposer pour la relance de la production nationale. Cette stratégie devrait être articulée autour d’une vision d’éradication de la pauvreté, de combat contre la polarisation des richesses et contre l’exclusion, marquée d’une volonté manifeste de prioriser le développement du marché interne avec comme boussole la défense de la production nationale et de la souveraineté alimentaire. Cette nouvelle stratégie doit chercher à tout prix à augmenter les recettes publiques, à augmenter les investissements dans le secteur productif dans la perspective de construction d’un Etat stratège à même de prendre en main la destinée de la nation. Elle aura aussi à œuvrer pour une meilleure protection des services sociaux en les préservant de tout processus de marchandisation en vue de garantir l’accessibilité et l’universalité de ces biens et services publics. 20 6.3. À la redéfinition des accords commerciaux par : 6.3.1. La négociation d’un MORATOIRE sur les Accords de libéralisation commerciale Le séisme du 12 janvier 2010 a mis en relief les conséquences néfastes de l’application des politiques néolibérales en Haïti. Pour répondre aux défis de la «construction alternative» du pays, mettre en place des politiques publiques viables de nature à renforcer les structures économiques et sociales et s’assurer de la remise en marche de l’Etat vis-à-vis de ses responsabilités, il y a urgence d’introduire un moratoire auprès des institutions financières internationales. C’est un momentum à saisir pour repenser les politiques économiques et sociales en vigueur et mettre en place un ensemble de mécanismes visant à renforcer les capacités du pays à répondre aux défis de la souveraineté alimentaire et à donner aux populations l’accès aux Droits Economiques, Sociaux et Culturels (DESC), en particulier, le droit à l'éducation, droit au logement, à un emploi décent, à l'alimentation, à la santé, à un environnement sain. Ce serait aussi le moment de définir d’autres stratégies d’intégration alternative du pays au niveau de la région et dans d’autres espaces économiques. 6.3.2. En sauvegardant à tout prix les avantages de PMA Le statut de PMA n'a rien de fierté, les mesures proposées tout au long de ce document sont de nature à sortir Haïti de cette classification. Cependant, chemin faisant, en tant que PMA, Haïti n’a aucun intérêt à signer et ratifier des accords qui mettent en cause partiellement ou totalement des avantages que le statut de PMA lui a conférés. Ces avantages lui ont permis de disposer d’un cadre normatif pour la mise en place de politiques tarifaires et douaniers en conformité avec sa politique globale en matière de production, de souveraineté alimentaire, ou de protection des secteurs les plus dynamiques de son économie. Beaucoup d'instruments internationaux, tant dans les accords qu'au niveau des Institutions financières internationales en particulier l'OMC, sont susceptibles de soutenir cette demande de moratoire en sauvegardant pour le moment le statut de PMA. 6.3.3. En révisant les Tarifs Appliqués à l’OMC et certains tarifs consolidés sur les produits agricoles Au niveau de l’OMC, Haïti dispose d’un Tarif Consolidé de 40% sur certains produits, alors que le Tarif appliqué est en moyenne 3%. En augmentant ce dernier d'au moins 30%, Haïti pourrait utiliser cette marge pour i) d’une part protéger les producteurs haïtiens dépourvus d’appui contre la concurrence déloyale des producteurs internationaux largement subventionnés. ii) ; d’autre part élargir l’assiette fiscale par l’imposition de taxes sur certains produits importés particulièrement les produits agricoles et laitiers. Enfin, le relèvement du Tarif appliqué permettrait au pays d’adresser la question du TEC (Tarif Extérieur Commun) au niveau du CARICOM, point qui pose problème pour l'intégration véritable d'Haïti au niveau de ce mécanisme régional 21 6.3.4. En négociant des périodes de transition plus longues Pour la remise à niveau de notre économie, on devrait profiter de ce moratoire pour négocier des périodes de transition plus longue à l’image de l’Afrique du Sud qui a pu obtenir une période de grâce de 18 ans au moment de rejoindre le forum des OMC. Ainsi, Haïti devrait négocier des périodes de transition allant jusqu'à 20 ans, le temps nécessaire pour rattraper le retard de développement occasionné par la mise en oeuvre des politiques d'ajustement structurel. 6.4. Une alliance entre les pays du SUD est incontournable Le Gouvernement haïtien devrait intensifier ses rapports avec les blocs de pays du SUD remettant en question le système libéral à outrance et proposant une vision alternative d’intégration basée sur le respect de notre histoire et sur la construction des avantages coopératifs et non sur des avantages comparatifs prônant la compétition à tout prix . L'ALBA, le CELAC sont entre autres blocs pouvant contribuer positivement à la nouvelle vision de développement du pays. 6.5. Sous contrôle du citoyen Le citoyen haïtien doit être l’acteur principal de son développement. En ce sens, il est impératif que l’Etat haïtien mette en place des dispositions légales et pratiques visant à garantir le contrôle et la participation effective des structures de la société civile haïtienne dans la définition, l’évaluation, le contrôle, le suivi des politiques publiques. Cela doit s'organiser de façon à permettre le renforcement des communautés locales, les collectivités territoriales et le développement intégré du pays par un processus de décentralisation réelle. 22 Bibliographie 1. ANDAH, Plateforme Haïtienne de Plaidoyer pour un Développement Alternatif (2000).(Portau-Prince). Impact de la libéralisation sur la sécurité alimentaire, l’environnement et la vie des petits producteurs Ruraux. 28 p. Document non publié disponible à ANDAH, Port-auPrince, 11 rue Montjoly. 2. Banque Centrale de la République d’Haïti (BRH) 2000. Indicateurs macro-économiques : Statistique 2000, 2007, 2010. Document non publié disponible à BRH ( Port-au-Prince). 3. 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