MEMOIRE ECORESPONSABILITE de PHIL SKOLLE

publicité
PHILIPPE SKOLLE
21 rue des Mathias
17000 LA ROCHELLE
06 23 67 14 96
[email protected]
Éco-responsabilité : Comment amener
le changement comportemental
au sein d’un organisme ?
STEGE ENVIRONNEMENT – DEC. 08 - JUIN 09
Directeur scientifique du STEGE : François PETIT
Mémoire mineur
1
2
Table des matières
Remerciements………………………………………………………....P.4
INTRODUCTION………………………………………………………….P.5
PARTIE I – LE L’ÉGO À L’ÉCO……………………….………………….P.7
TRENTE ANS D’INERTIE………………………….……………………P.7
CONSCIENCE ET ACTION : DEUX CHAMPS PARFOIS ÉLOIGNÉS…….P.8
LES COMPORTEMENTS……………………….……………………...P.14
PARTIE II – ANIMER LES INDIVIDUS……………………….…………...P.18
LES ENTRETIENS……………………….……………………………...P.19
LES RÉSISTANCES……………………….……………………………P.25
DE L’ÉDUCATION À L’ACTION : LES PERSPECTIVES………………….P.27
CONCLUSION……………………….…………………………….……..P.30
Annexes……………………….…………………………….……………P.32
Sources et Bibliographie……………………….……………………...P.35
3
Quelques sigles utilisés dans ce mémoire
SME (Stratégie de Management de l’Environnement = Politique environnementale interne)
RE (Responsable Environnement)
DD : Développement durable
PDE : Plan de Déplacement Entreprise (transports alternatifs en interne/externe)
Remerciements
Je suis très reconnaissant aux personnes suivantes pour leur aimable
contribution dans ma démarche de recherche :
François
Petit, mon maître de STEGE,
Geneviève Desprées, IFREE, ma tutrice pour ce mémoire,
Olivier Naccache et Benjamin Grosbois, spécialistes en Environnement,
pour les conseils et les échanges d’idées enrichissants.
Pour les entretiens qualitatifs :
Jean-Robert Lebrun, EDF
M. Rouch, Rhodia
Sophie Lecor/Damien Chaubit, Wartsila
Odile
Blanchard, CNRS/Université Pierre Mendès-France, Grenoble
Valérie Prévost, ESCEM Tours-Poitiers
Jeoffrey Amiot, UCO d’Angers
Raphaël Romi, Université de Nantes
Alban Bourcier, Université du Havre
J.-C.
Brianceau, Sèvres Environnement
J.-L. Jamet , CDA-La Rochelle
4
INTRODUCTION
L
orsqu’on écoute autour de soi, force est de constater que tout le monde
parle d’environnement. Les médias se sont fait l’écho de ce qui ressemble
à un éveil des mentalités. Mais vient le moment de regarder si ce discours
ambiant est suivi d’effet. Et là, une sorte d’ambiguïté se fait jour. Les gens
trient leurs déchets, en effet, mais les quantités produites restent
faramineuses. Les entreprises y vont toutes de leurs annonces vertes, mais le
pillage des ressources perdure plus que jamais. Les voitures hybrides se
multiplient, mais les forages pour le pétrole continuent. Les enfants sont
éduqués dans le sens du respect de la Terre, mais personne ne songe à les
désintoxiquer de l’hyperconsommation. Dès lors, comment espérer que l’écoresponsabilité (ou éco-citoyenneté) devienne une seconde nature ?
Pour mener mon étude, j’ai opté pour un microcosme ─ en principe
miroir de la société ─ et j’ai replacé ma question dans le cadre d’organismes,
tels que les écoles, les entreprises ou les collectivités. Ma question centrale
s’est donc imposée : “Eco-responsabilité : Comment amener le changement
comportemental au sein d’un organisme ? ”
J’ai d’abord tenté de comprendre les mécanismes psychosociologiques par lesquels un groupe de personnes adopte ou résiste au
geste éco-citoyen. Puis une série d’entretiens avec des acteurs – RE pour la
plupart – de la démarche environnementale, m’a permis de détailler et de
confirmer l’observation et la perception générale que j’en avais. Pour ces
deux parties de mon travail je me suis livré à une analyse des causes de tel ou
tel comportement et j’ai pu dégager quelques éléments de réponse utiles à
qui souhaite s’engager dans une SME, soit en tant que responsable, soit en
tant que « résident » d’un organisme.
Il existe peu de littérature sur cette question, peut-être parce qu’elle est
au confluent de l’économie, de la sociologie et de l’environnement. Et parce
qu’elle concerne le facteur humain, encore peu abordé dans le domaine de
l’environnement, lequel est souvent approché par ses aspects techniques.
J’ai néanmoins pu trouver des éléments épars émanant d’organismes tels
que des universités, souvent noyé dans d’autres propos, la question au cœur
de mon interrogation étant, la plupart du temps, frôlée de manière
anecdotique. La question était donc immédiate : pourquoi le
“ Comment… ? ”, pourtant primordial pour appréhender l’immense problème
de l’environnement et de notre survie, est-il si peu analysé ?
5
La réponse a fini par poindre au fil de mes entretiens : parce que les
acteurs du changement des mentalités avancent dans ce domaine de
manière empirique. La réponse au “ Comment… ? ” vient avec la pratique
du terrain. Aucune étude préalable n’est là pour assister les agissants, inscrite
sur un mode d’emploi tenu en main tandis qu’ils progressent dans leur
politique d’éco-responsabilité. Pour autant, cela signifie-t-il qu’aucune forme
d’étude n’a jamais été mise à contribution ? Certes non. En effet, les études
socio-psychologiques, connues depuis longtemps, servent d’appui à tous
ceux et celles qui sont chargés d’animer des populations internes.
Néanmoins, ces études n’ont jamais été mentionnées par mes interlocuteurs
lors des entretiens.
Si la méthode idéale, et son efficacité, sont loin d’être une évidence, il
ressort toutefois de cette étude quelques pistes pratiques propres à
approcher au plus près de la réalité intime de toutes les parties prenantes. Tel
est le but ultime de ce travail : avoir un outil concret pour agir sur une réalité
assez abstraite. Car le geste écologique dans un organisme dépend avant
tout du cheminement de la psyché de chacun. Parvenir à relier la tête à la
main dans ce vaste et écrasant territoire qu’est la sphère environnementale
est une première étape vers un salutaire changement de société.
6
P A R T IE I
D E L ’E G O A L ’E C O
‘‘Mieux vaut prendre le changement par la
main avant qu’il nous prenne par la gorge.’’
Winston Churchill
TRENTE ANS D’INERTIE
S
i l’on se réfère au Chef Seattle, s’adressant au Congrès américain en 1854 :
‘‘Quand le dernier brin d’herbe aura disparu, quand le dernier arbre aura
été coupé, quand le dernier poisson aura été pêché, quand la dernière
rivière aura été empoisonnée, alors seulement l’homme réalisera que l’argent
ne se mange pas.’’, on réalise combien la conscience écologique n’est pas
une idée neuve. Le Sierra Club et Cowles, aux Etats-Unis à la fin du 19e siècle,
l’apparition du concept d’« écologie humaine » en 1920 à Chicago, le
Britannique Tamsley avec la notion d’écosytèmes en 1935, avaient posé les
bases de la proto-écologie. Au sortir de la Seconde Guerre Mondiale, Edgar
Morin avait déjà introduit une appréhension du monde propre à inclure la
nature dans le développement, laquelle a débouché dans les années 60 puis
70 sur l’écologie moderne. La prise de conscience a eu, dans les 40 dernières
années, plusieurs vecteurs : les scientifiques, les mouvements contestataires
des années 60 et 70, les mouvements alter-mondialistes des années 90,
certaines instances gouvernementales (Ministère de l’Environnement, créé en
1971), les associations (Combat Nature, dans les années 70, Que Choisir, Les
Amis de la Terre), les organismes « conférences » tels que le Club de Rome
(1972).
La mouvance écologique émerge en 1968 (je me souviens en 1970
d’un étudiant américain parlant de « pollution » : ce mot était totalement
nouveau pour nos oreilles.), et avec elle l’idée que le productivisme ne
menait à rien de bon pour l’homme, d’où la critique de la société de
consommation, laquelle société de consommation n’a cessé de s’imposer
comme mode unique à travers le monde depuis lors. Les alertes exprimées
par les scientifiques – Haroun Tazieff, P.E. Victor, Cousteau, H. Reeves –
ignorées à l’époque, étaient incompatibles avec les intérêts économiques,
incompatibles avec l’esprit du temps, qui n’appréhendait le monde qu’en
termes de conquête, et incompatibles avec l’image de doux rêveurs
colportée par les écolo-gauchistes.
La première question à se poser est celle-ci : pourquoi notre quasi
inertie a-t-elle duré 30 ans ? Si l’on fait abstraction d’une évolution naturelle
vers les questions environnementales, nous avons continué à consommer,
donc à piller la Terre, alors même que des voix s’élevaient déjà dans les
années 50 et 60 pour nous mettre en garde ! Pourquoi n’avons-nous pas réagi
7
en masse plus tôt ? La réponse est d’une implacable simplicité : d’abord,
parce que le confort acquis à l’issue des « trente glorieuses » était
pratiquement impossible à remettre en question, le monde étant infini et la
notion de responsabilisation absente. La Terre était une vaste marmite dans
laquelle il suffisait de se servir. Ensuite, parce que les effets de la dégradation
environnante n’étaient pas visibles. Certes on mesurait bien, dans les années
80, les résultats des pluies acides – lesquelles ont disparu depuis, remplacées
par d’autres périls, comme le réchauffement climatique –, mais seuls les
experts en avaient une perception tangible . Bref, tout allait (à peu près) pour
le mieux dans le (presque) meilleur des mondes, le tout couronné par les
diktats de l’économie et les financiers : pas touche au business, pas touche à
la croissance, pas touche aux bénéfices et aux dividendes des actionnaires.
Enfin, parce que ces dispositions mentales nous ont confortés dans des
stratégies de court terme. La notion même d’avenir n’étant à l’ordre du jour
qu’en regard du gain, jamais de la perte. Or, c’est à la réalité de perte que
nous sommes désormais confrontés.
Il ne s’agit pas ici de condamner aveuglément ces trois décennies de
développement, car elles nous ont apporté beaucoup sur le plan des
conquêtes sociales et médicales. Il s’agit de faire le bilan de ce qu’elles ont
forgé en nous en termes de « dû ». Et maintenant, ce bilan positif est entaché
par l’addition qui sanctionne ce que nous avons prélevé. Et c’est là que le
réveil est douloureux. Il n’est pas dans mes habitudes de citer les Ecritures
Saintes, mais je ne peux m’empêcher de penser à Jésus disant “ Ils ont des
yeux mais ne veulent pas voir ; ils ont des oreilles mais ne veulent pas
entendre. ”
CONSCIENCE ET ACTION : DEUX CHAMPS PARFOIS ÉLOIGNÉS
O
n pourrait penser qu’en quelques décennies, la conscience s’est
néanmoins éveillée de façon progressive. Or, en réalité, elle a fluctué en
fonction des priorités : au sortir des « trente glorieuses », l’intérêt pour la nature
a bien trouvé un ancrage dans les esprits, mais avec une connotation
politique forte, et limité à une certaine population marquée par les années
du Flower Power. Mais dans les années 80, la crise efface pendant quelques
temps les préoccupations écologiques, qui ne réapparaissent
"Le pire n’est pas ce que
qu’au fil des années 90 avec la
nous avons fait à la
réaction anti-mondialisation et la
révolte devant les catastrophes
planète : c’est ce que
écologiques qui ont émaillé la
nous ne faisons pas
période 1979-1999, dont Three Mile
maintenant."
Island, Bhopal (+ de 2000 victimes),
Tchernobyl, les tankers éventrés et
les marées noires, le mercure de
Sandoz dans le Rhin, les CFC dans
Trou dans la couche
la couche d’ozone…
d’ozone en Antarctique
8
Les années 2000 voient l’avènement d’une conscience écologique à
l’échelle planétaire, ce qui ne signifie pas pour autant des actes multilatéraux
suivis d’effet. On se souvient du blocage des Etats-Unis et de la Chine lors des
Accords de Kyoto. Mais l’information circule à grande échelle et rien ne
pourra l’arrêter. Rien d’étonnant à cela : premièrement, les moyens de
communication (télévision et internet) se sont multipliés, et avec eux les
associations écologiques, qui ont relayé l’information auprès du public ;
deuxièmement, les effets de la dégradation de la terre sont devenus
évidents : fonte des glaces, trou de la couche d’ozone, catastrophes
climatiques… Pour la première fois, le
résultat du développement des activités
humaines saute aux yeux. Le discours
scientifique trouve donc ─ enfin ─ un
écho à l’échelle mondiale. Suivent
nombre de gouvernements et les partis
politiques, bien obligés de « répondre » à
leurs populations et aux relais de
l’information en matière de dispositifs
écologiques. Non qu’ils aient été
totalement inactifs pendant trente ans.
Mais assez peu réactifs, notamment quand il s’agissait de mettre au pas les
pollueurs. Rappelons que ce sont les associations de défense de la nature qui
ont souvent attaqué les multinationales responsables de catastrophes. Une
exception, les pays nordiques, toujours en avance dans ce domaine, et ce,
pour des raisons simples : ce sont des sociétés avancées, en mesure de se
« payer le luxe » de l’écologie, favorisées par une population limitée dont le
sens civique n’est plus à démontrer. Trois atouts majeurs qui leur ont permis de
mettre en place au plus haut niveau de l’Etat des politiques
environnementales avec les moyens idoines.
Quoi qu’il en soit, l’éveil des consciences est un phénomène de fond,
et non un effet de mode, comme on pourrait le penser. En effet, de
nombreux sondages réalisés dans les années 90 révèlent que les
préoccupations écologiques sont prises au sérieux par les populations, quel
que soit le pays où ces études ont été menées [V. TAB 1 ET 2 page suivante]. Il
ne s’agit donc pas d’un éveil réservé aux pays occidentaux développés. Pour
exemple, en 1992, avant le Sommet de la Terre à Rio, une enquête Gallup
intitulée Health of the Planet Survey fut menée sur un échantillon de 1000
personnes dans 22 pays. Les questions étaient axées de telle sorte que les
gens interrogés ne sachent pas qu’il s’agissait d’un sondage sur
l’environnement. Or, la plupart ont répondu spontanément que l’état de la
planète était à leurs yeux une préoccupation. Mieux : dans 20 pays sur 22,
l’environnement passait en priorité devant l’économie. Enfin, cet intérêt pour
l’environnement n’était pas circonscrit à l’Amérique du Nord et à l’Europe,
mais concernait également l’Asie, l’Europe de l’Est et l’Amérique Latine. Par
conséquent, croire que seuls les pays nantis peuvent développer une
9
conscience écologique est une idée reçue, démentie par les chiffres. En tout
cas en termes d’opinion, car il n’en demeure pas moins qu’en termes de
moyens, les pays en développement consacrent leur budget à la croissance
de leur économie davantage qu’à la préservation de leur patrimoine naturel.
TAB 1
Dans 24 pays, avancés ou en
développement, la question
posée était : “ Les problèmes
d’environnement représentent-ils un
problème très grave dans votre
pays ? ”
TAB 2
Dans 24 pays, avancés ou en
développement, la question
posée était : “Vous sentez-vous assez
concerné par les problèmes
d’environnement?”
% totaux
Pays industrialisés en 1993
Allemagne
67
Suisse
63
Canada
53
USA
51
Portugal
51
Japon
42
Norvège
40
GB
36
Irlande
32
Pays-Bas
27
Danemark
26
Finlande
21
Pays en développement en 1993 % totaux
Corée Sud
67
Pologne
66
Mexique
66
Russie
62
Turquie
61
Chili
56
Hongrie
52
Inde
51
Brésil
50
Nigéria
45
Uruguay
44
Philippines
37
% totaux
Pays industrialisés en 1993
Allemagne
63
Suisse
42
Canada
89
USA
85
Portugal
90
Japon
66
Norvège
77
GB
81
Irlande
73
Pays-Bas
71
Danemark
53
Finlande
63
Pays en développement en 1993 % totaux
Corée Sud
80
Pologne
25
Mexique
83
Russie
78
Turquie
40
Chili
70
Hongrie
79
Inde
77
Brésil
80
Nigéria
87
Uruguay
82
Philippines
94
Source : Health of the Planet Survey, Gallup
Ces sondages qui datent sont intéressants malgré tout, car ils indiquent
que la prise de conscience écologique n’est pas née de la dernière pluie. Elle
est ancrée depuis plus de 15 ans. A mi-chemin des trente ans qu’il a fallu pour
que « tout le monde en parle ». Ils indiquent surtout le gouffre qui sépare le
moment M où l’homme admet son souci pour l’état de la planète et le
moment M’ que nous vivons actuellement où le cerveau commande enfin à
la main, c'est-à-dire où un certain nombre de nos contemporains ─
notamment dans les pays occidentaux et dans quelques pays émergents ─
transforment l’idée en action. Par la demande clairement exprimée de
concrétisation des gestes éco-responsables. Un exemple pour illustrer ce
10
changement : un client lambda qui se présente dans un Leroy-Merlin pour
acheter un ensemble de jardin en bois exige que ce bois soit certifié « forêt
gérée selon les principes du développement durable », et n’achète plus en
aveugle un joli bois exotique de provenance incontrôlée. Si, dans ce
domaine, nous sommes encore loin de la certitude absolue de provenance
écologique, nous avançons néanmoins vers l’exigence exprimée à l’échelon
du consommateur. Bref, celui par qui tout peut enfin arriver. Le principe de
base de toute économie étant que la demande crée l’offre (même si selon
les lois artificielles du marketing on sait que l’inverse est vrai), on peut alors
espérer à ce niveau un début d’inflexion. Il est donc primordial que le
consommateur soit bel et bien un consommacteur. Toutefois, cet éveil se
manifeste en tant que prise de conscience lente et en aucun cas comme un
sursaut brutal face à la réalité de la dégradation ambiante. Là où l’on
pourrait espérer une révolution radicale des esprits, nous assistons à une
gradation pas à pas vers un constat global négatif. Mais l’inertie est encore
prégnante. Rien de massif, rien de spectaculaire. On sait, mais on fait peu. La
représentation graphique ci-dessous illustre ce décalage entre l’évolution
cognitive du problème (A’) et celle de l’action réelle (B’) au lieu d’une
évolution présumée qui n’a pas eu lieu (AB).
Urgence
(2030 ?)
AB
A’
B’
1970
1985
2000
Changement
Ce constat, confirmé par un sondage de l’ADEME en 2008 sur l’attitude
des Français face au réchauffement climatique, est la sanction d’une
attitude mentale résultant de l’histoire du développement qui s’est accéléré
à partir de la Révolution Industrielle de 1850. Le cheminement est donc ardu
vers un revirement. Pierre Rabhi dans Consience et environnement (éd. du
Relié, 2006) l’exprime parfaitement : “ Le problème n’est pas de changer
notre organisation matérielle, nos structures ou nos outils. Ce qui sauvera
l’humanité, c’est une conscience. Il faut que chaque être humain prenne
conscience de ses responsabilités. ” Il va plus loin encore : “ Du cursus scolaire
en l’entrée en fonction, ils [les enfants] évoluent dans le canal hermétique de
11
leur conditionnement et s’imaginent que leur construction théorique et
l’élégance de leurs propos sont valeur de changement. (…) L’enfant se
trouve prisonnier d’un monde tétanisé par la compétition et dont la finalité
est de porter cette compétition au plan international pour le plus grand
échec de l’humanisme planétaire. ”
La question de la compétition est primordiale pour comprendre les
difficultés qui sous-tendent la révolution des esprits. Tout simplement parce
que la notion même de compétition est incompatible avec celle de mesure.
Produire et conquérir des marchés implique une forme d’économie fondée
sur l’effet bulldozer. Or, cet effet bulldozer est destructeur et ne comprend
pas la nécessité de préservation. Elle lui est non seulement opposée, mais
totalement étrangère. Comment, dès lors que des générations d’humains ont
été élevés dans l’idée que le bien-être matériel, exploiteur de ressources
naturelles, se posait en nec plus ultra
de la civilisation, pourrions-nous
maintenant remettre en cause ce
modèle de pensée, donc de
société ?
Au point où nous en sommes,
c’est pourtant cette question-là qui
"L’un des pires maux de
prime : la planète a atteint les limites
de ses capacités de fourniture,
la civilisation technologique
surtout à une époque où les pays
est la soif de croissance."
émergents, réclamant leur part du
René Dubos
gâteau, ce gâteau se révèle
restreint. En d’autres termes, c’est non seulement tout un processus mental
qui est à réviser, mais partant de là, tout un système économique qui est à
repenser. Et cependant, qu’entend-on actuellement si ce n’est un discours
économique entièrement axé sur la compétitivité ? L’équation est donc
claire : s’entêter à promouvoir l’idée que la course profite à tous, c’est
entériner celle que nous pouvons continuer à piller les ressources naturelles
pour produire toujours plus pour avoir toujours mieux. Or, cela est une illusion
que nous mesurons en constatant la dégradation ambiante. Il est donc
prioritaire, sinon de tourner le dos à la notion de compétition, du moins de la
déplacer vers une autre forme de développement orienté vers le partage
global. Pourquoi ne pas se diriger vers une compétition créative, soucieuse
de l’environnement ? Mon propos ici n’a d’autre raison d’être sinon celle de
mettre en relation le contexte général, qu’il soit tourné vers le
développement durable ou non (selon les pays qui l’appliquent), avec
l’obstacle que constituent les comportements des populations. Ces
comportements demeurent, à l’heure actuelle, très malaisés à bouleverser.
En résumé, la prise de conscience est déjà là, mais les actes sont encore hors
de portée. Une forme de passivité persiste.
Alors que la panique devrait saisir chacun, un paradoxe surgit,
corollaire du risque de dévastation : une banalisation de ces effets et une
12
baisse de leur impact dans les esprits. Bref, on s’habituerait presque à l’idée
de cette épée de Damoclès climatique et planétaire. C’est, à mon sens, la
masse d’information qui circule à cet égard qui en est responsable. Et
pourtant, ce sont les mêmes médias qui, à force de marteler les
avertissements sur l’urgence à se préoccuper, puis à s’occuper du sort de la
planète, sont parvenus à imprimer les mentalités pour la bonne cause. D’un
côté, la banalisation et l’affaiblissement qu’elle implique dans les esprits ; de
l’autre, l’effet répétition qui conforte la prise de conscience généralisée. Les
médias suscitent une réflexion sur le plan personnel et déclenchent aussi des
échanges entre les personnes. Cette combinaison semble être moteur
d’évolution à défaut de changement véritable. Deux exemples récents
illustrent très bien ce phénomène : Une vérité qui dérange d’Al Gore et Home
de Yann Arthus-Bertand. Deux approches, l’une « catastrophiste », l’autre
« intimiste » vont au cœur des débats et font battre les cœurs. Les deux ont
fait consensus ; c’est peut-être là le signe que l’humanité est en partie prête à
voir et à écouter. En partie seulement, parce que nous ne devons pas oublier
que, même si l’ensemble de la planète a pris connaissance des enjeux
écologiques, les deux tiers ont pour priorité de développer leur économie afin
de survivre sur la plan des besoins élémentaires : manger, se loger, avoir un
emploi… Développer une conscience parmi ces populations, puis les
amener à l’action quotidienne en éco-responsabilité prendra encore du
temps. C’est tout le défi de la révolution économique espérée par ceux
d’entre nous qui peuvent se payer le luxe d’avoir un regard critique. L’ouvrier
chinois ou le paysan africain, qui auraient pourtant tout à gagner si les fruits
de la mondialisation étaient mieux répartis et si l’économie globalisée prenait
davantage en compte des stratégies de long terme bénéfiques à sa santé
financière, sociale et environnementale, cet ouvrier et ce paysan, donc, sont
pour l’instant très loin de ces préoccupations. L’urgence étant pour eux de
« faire tourner la boutique », fût-ce au prix de leur environnement immédiat.
On comprendra donc pourquoi nous sommes encore à bonne distance d’un
consensus généralisé sur l’échéance écologique planétaire qui se traduise en
actes.
Peut-on reprocher au reste du monde de ne pas s’activer davantage
en faveur de la planète quand nous, Occidentaux, avons traîné en chemin ?
Non. Il n’est plus temps de faire la morale quand nous avons profité des
largesses naturelles de manière égoïste. Nos tentatives de rattrapage du
temps perdu ne nous affranchissent pas. Si le reste du monde est désormais
dans la même galère, c’est pour que nous ramions ensemble. A cet égard,
nous devons donc les guider et être exemplaires. Ils suivront le mouvement
parce qu’ils n’auront pas le choix. En aucun cas parce que nous aurons
brandi sous leur nez la menace que nous avons nous-mêmes mise en
mouvement et qui s’est emballée. Passer du mode « égo » au mode « éco »
sera un moteur des changements à venir, et les nations émergentes
prendront le train en marche, et nous surprendront sans doute. Je ne serais
pas étonné que l’Inde et la Chine nous dépassent dans les vingt années à
venir en termes de solutions écologiques tant elles seront confrontées à
13
l’urgence. Ce sera d’ailleurs pour elles, comme pour nous, un champ
d’innovations propres à stimuler l’économie du futur. Mais c’est un leurre de
croire que notre salut viendra exclusivement de la technologie ! En
attendant, nous échoît le rôle de pionniers dans l’exemplarité en question.
Reste donc à déterminer lesquels d’entre nous seront les acteurs les plus
crédibles, c'est-à-dire les plus éco-responsables.
LES COMPORTEMENTS
Q
uels individus sont sensibles à la question écologique ? Les sondages
prennent en compte le quantitatif. Or, il est important de préciser les
typologies des sujets concernés. Catégorie sociale, niveau d’éducation,
niveau de vie, entrent également en ligne de compte. Enfin, le type de
question posée influe sur l’image finale qui en résulte. Par exemple, « Seriezvous prêt à voir votre niveau de vie baisser pour protéger l’environnement ? »
ne recueille pas le même score positif qu’elle s’adresse à un professeur
d’université au sommet de sa carrière, ancien combattant du Larzac, ou bien
à un jeune artisan peu instruit qui débute au sortir d’un lycée technique…
C’est donc le traitement de ces paramètres : sondage quantitatif, catégorie
sociale, typologie « socio-psychologique », qui vont fournir une radiographie
précise permettant d’appréhender le « Qui est concerné par quoi » en
matière de défense de la planète. Ce n’est pas l’objet de mon étude, mais je
présenterai néanmoins ici quelques typologies et outils existants, de façon très
schématique.
Les écotypologies et les outils socio-psychologiques
Dans la décennie passée, la SOFRES avait établi la typologie
suivante :
Les radicaux : souvent caricaturés, car présentés comme des intégristes de
l’écologie. Proches de la nature, ils ne font aucune concession au
consumérisme.
Les impliqués : critiques de la société, ils ne la rejettent pourtant pas. Leur
cible : les errements de celle-ci. Ils sont plus réalistes que les radicaux et
agissent avec pragmatisme.
Les terre-à-terre : matérialistes, mais positifs, ils cherchent à profiter du monde
mais sans lui être nuisible.
Les détachés : en retrait par rapport aux problèmes environnementaux, ils
restent neutres et s’engagent peu. On peut les qualifier de « masse inerte ».
Les productifs : combinés de détachés et d’efficacité rigoureuse, ils
fonctionnent à l’autorité.
14
Parallèlement à la typologie de la SOFRES, la SECODIP avait identifié
des catégories sous l’appellation « euro-sociostyles » :
Les planétaires utopistes : l’environnement est leur dada. Ils agissent en tout
en fonction de cela.
Les conservateurs : c’est le progrès qui est cause de trouble écologique. Ne
changeons pas le monde afin de lui garder son équilibre ancien.
Les égotistes : seul les intéresse leur propre environnement, à préserver avant
tout le reste. Ils ont une vision individualiste de ce qu’il faut protéger.
Les autruches : l’environnement est certes présent, mais faisons comme si de
rien n’était afin de ne pas remettre en question le confort acquis.
Les confiants : l’environnement est à considérer au même titre que d’autres
valeurs, comme la religion, la famille, la morale. Les institutions sont là pour y
pourvoir. Ils acceptent de participer à sa sauvegarde, dans un cadre
contrôlé.
Une troisième sorte de typologie a été mise en avant par Odile
Blanchard, Maître de Conférences en économie pour le CNRS/Université
Mendès-France de Grenoble, dans un rapport de 2008 intitulé Des attitudes
aux comportements : une recherche interdisciplinaire en sciences sociales. Il y
est question du « comportement pro-social », défini comme « volontaire,
intentionnel, visant à aider l’autre ; c’est donc un comportement qui dépasse
l’intérêt égoïste… » Dans le cadre de ce comportement pro-social, une autre
typologie apparaît : l’altruisme pur et l’altruisme impur. Le premier correspond
à des individus dont le comportement bénéficie au bien public
exclusivement, tandis que le second décrit des individus dont le
comportement altruiste renvoie une satisfaction personnelle d’estime de soi
ou de déculpabilisation. Dans ces comportements, la notion de réciprocité
tient un rôle : je contribue au bien public si les autres agissent de même ; ma
contribution doit être proportionnelle à celle des autres.
Cette typologie est intéressante, car appliquée à l’éco-responsabilité
elle explique bien pourquoi il est si difficile de mouvoir les masses. En effet, une
population étant constituée d’une multitude d’individus de caractères,
d’éducations, de capacités morales, d’expériences, d’ouvertures mentales,
très diverses, il devient quasiment impossible de les faire adhérer « comme un
seul homme » à des habitudes nouvelles en termes de consommation et de
mode de vie.
Il existe une manière d’aborder la mise en mouvement d’une
population donnée en ayant recours au management situationnel, par
exemple. Dresser le graphique ci-après permet, dans un organisme
maîtrisable sur le plan du nombre, de dégager quelques personnalités que
15
l’on mettra à contribution selon leur place optimale(). C’est une approche
limitée à l’équipe centrale d’une SME, mais réaliste et pointue si tant est
qu’on l’applique véritablement.
MANAGEMENT SITUATIONNEL
MOTIVATION
Apprenti
Mobilisateur +
Informatif
Délégatif
COMPÉTENCE
Directif
Participatif
Boulet
Mobilisateur ─
A bien considérer ces typologies diverses, plusieurs difficultés apparaissent.
Premièrement,
elles ne sont pas figées et tendent à évoluer avec le
temps et les bouleversements sociologiques.
Deuxièmement,
ont peut en inventer presque autant qu’il y a de
caractères et certaines vont s’interpénétrer. La frontière devient floue.
Troisièmement,
sur laquelle va-t-on fonder une étude fiable des
« personnalités » face au problème de l’environnement ?
Quatrièmement,
aucune de ces catégories ne semble prise en
compte sur le terrain.
D’abord par ignorance. En effet, qui, dans une école, une entreprise,
une collectivité, connaît les typologies ? Elles seraient pourtant utiles, et
permettraient de cibler les parties prenantes et feraient gagner en efficacité
toute SME digne de ce nom.
Ensuite, ces catégories exigent de se pencher sur la question en détail
et, lors de la mise en place d’une SME, il semble que personne n’ait les outils
ni la volonté d’optimiser son application en décortiquant le type de chacun.
Il en résulte que la méthode employée est du genre massif plutôt que sélectif.
On jette les filets à la mer et on ratisse large. Les poissons se trieront d’euxmêmes : les actifs des passifs, les bonnes volontés des exécutants,…
Enfin, une autre approche, l’autodétermination des comportements
éco-citoyens , me semble intéressante. Elle émane de Luc Pelletier, de l’Ecole
16
de Psychologie de l’Université d’Ottawa, et prend appui sur la « Théorie de
l’autodétermination » de Deci et Ryan (1985-2001). Le postulat fondateur est
qu’une personne équilibre sa psychologie en société sur l’autonomie, la
compétence et la relation. Vient se greffer sur cette base une gradation dans
la motivation :
1 L’amotivation (« Je ne fais aucun lien entre mes actes et leurs
conséquences, donc à quoi bon ? »),
2 La motivation extrinsèque (« j’agis pour éviter ou obtenir quelque chose. »),
3 La motivation intrinsèque (« j’agis pour la satisfaction procurée par le geste
en soi. »)
L’automotivation consiste donc à évoluer de 1 vers 3. (V. Annexe 1)
Une manière de s’auto-éduquer, en quelque sorte. Un véritable
cheminement mental vers l’acte éco-responsable.
A ce stade de ma recherche, quel est donc l’intérêt de mentionner les
typologies ou une théorie psycho-sociologique ? J’avancerais une réponse
prudente : en avoir connaissance ouvre des pistes pour comprendre
pourquoi et comment les personnes réagissent au sein d’un groupe. On peut
ainsi mieux cerner ses interlocuteurs lors de la mise en œuvre d’une SME. Il ne
sert à rien de tenter de mobiliser une « autruche boulet » pour une opération
de sensibilisation si l’on peut faire appel à un « impliqué mobilisateur + ». J’ai,
dans mon expérience récente, l’exemple d’une fausse route lors d’une
tentative de motivation auprès d’une personne dont le statut et les intentions
affichées laissaient entendre qu’elle pouvait promouvoir une SME. Cette
personne s’est révélée être l’inverse, et la SME en question a calé après la
phase d’élan. Il faudrait déjà connaître les gens avant de les positionner sur
de quelconques missions Environnement, chose parfois malaisée, car ils se
révèlent souvent lorsqu’on les place devant la tâche à accomplir. Je
préconiserais donc de mettre les candidats à l’épreuve sur des tentatives
d’actions légères afin de déterminer à qui l’on a affaire, et, dans la mesure
du possible, de passer ces bonnes volontés au tamis des typologie. Ainsi, les
risques de se tromper en seraient diminués et le lancement d’une SME y
gagnerait en efficacité.
Toutefois, les typologies, outil fluctuant, ne peuvent constituer qu’un
apport à d’autres méthodes d’appréhension du comportement humain dans
le cadre d’une vaste politique environnementale. Pour un éclairage réaliste
de la question, il convient d’en savoir plus sur l’expérience-terrain…
17
P A R T IE II
A N IM E R L E S IN D IV ID U S
‘‘L’exemplarité n’est pas une façon d’influencer.
C’est la seule.’’
Dr. Albert Schweitzer
A
fin de répondre à la question centrale de ce mémoire, et puisque la
littérature spécialisée était peu prolixe en la matière, j’ai opté pour une
série d’entretiens sur le terrain, à laquelle j’ai adjoint quelques éléments
statistiques, notamment un questionnaire interne de Sup de Co-LR. A du
quantitatif, j’ai préféré du qualitatif. En effet, la question du comportement
exige une approche psychologique, donc un dialogue ouvert. Les chiffres
sont de peu de secours à qui veut comprendre le pourquoi et le comment –
et d’ailleurs, mes interlocuteurs ont été souvent dans l’incapacité de me
donner des chiffres quant aux pratiques éco-responsables dans leurs
organismes. Il ressort généralement toutefois que c’est une minorité active qui
tire le train du changement dans un organisme de plusieurs milliers de
personnes.
Mes interlocuteurs sur le terrain, sélectionnés pour leur exemplarité en
termes de SME, labellisés ‘Campus Responsable’ pour la plupart, ont donc
été les suivants :
Ecoles & Universités :
ESCEM Tours-Poitiers
UCO d’Angers
CNRS-Université de Grenoble
Université de Nantes
Université du Havre
Organismes en charge de collectivités locales :
Sèvres Environnement
Réseau Grand Ouest (Angers)
CDA de La Rochelle
Entreprises :
EDF-Région
Rhodia-La Rochelle
Wartsila-Surgères
Par ailleurs, j’ai pu consulter des rapports sur la SME des universités
étrangères suivantes :
Oxford
Stanford
Berkeley
18
Mon questionnaire se limitait à quelques ouvertures (5 au total) dans
lesquelles mes interlocuteurs pouvaient s’engouffrer et s’exprimer librement :
1/ Dans quels domaines avez-vous mis en place une SME ? (Déchets, Eau,
Energie, Transport, Achats Responsables, etc.)
2/ Pouvez-vous évaluer le nombre de personnes concernées et le nombre de
personnes impliquées ?
3/ Comment parvenez-vous à impliquer votre population interne dans le sens
de l’éco-responsabilité ? (Education, Persuasion, Coercition)
4/ Avez-vous constaté des résistances ? Lesquelles ? A quoi les attribuezvous ?
5/ Etes-vous optimiste quant à l’éco-responsabilité au sein de votre
organisme en particulier et dans la société en général ?
LES ENTRETIENS
P
lutôt que de lister chaque organisme et les résultats qui le concernent, ce
qui serait d’une lecture fastidieuse, j’ai préféré passer en revue chacune
des 5 questions larges et en donner le bilan.
Ce bilan est suivi d’une analyse générale, cœur de la question posée
par ce mémoire.
1/ Dans quels domaines avez-vous mis en place une SME ? (Déchets, Eau,
Energie, Transport, Achats Responsables, etc.)
De manière générale, tous les organismes ont mis en place une SME
pour les déchets et les économies d’énergie. L’eau n’est pas partout l’objet
d’une politique d’économie. Ce sont les entreprises qui la prennent en
compte pour des questions de coûts évidents. Les transports sont traités
principalement par les universités puisque les populations jeunes habitent en
majorité à proximité. Les achats responsables sont aussi surtout l’affaire des
écoles. On constate que les organismes privilégient donc ce qui est le plus
pertinent au regard de leur population interne.
Universités : Nantes traite tous les domaines pré-cités, avec effort sur les
déplacements à vélo, mais assez peu la question de l’eau. Bilan carbone en
projet. Le Havre mène des actions multiples, avec achats responsables et
prise en compte de la consommation d’eau. Ce campus a inauguré une
originalité : des ruches sur les toits, avec récolte du miel. PDE et Bilan Carbone
sont au programme. L’UCO d’Angers travaille sur le problème de l’eau avec
des solutions techniques associées à une sensibilisation. Le compostage des
déchets verts et l’utilisation massive de produits à base de papier recyclé sont
affaire courante. La solution « vélos » y a été adoptée avec un dispositif très
large. Sup de Co-La Rochelle a lancé une consultation pour un projet
« vélos » (V. Annexe 2). La gestion du papier et le recyclage sont des projets
avancés. L’eau y est à l’étude. L’ESCEM Tours-Poitiers pratique les achats
responsables, et mène une action solide en matière d’énergie et de maîtrise
19
de l’eau utilisée. Un PDE y est engagé. A Oxford, Par ailleurs, on encourage
l’usage des verres et des tasses à la place des gobelets en plastique, et
l’usage des emballages non biodégradable est limité à l’extrême.
Collectivités : La CDA de La Rochelle travaille avec l’ADEME pour l’énergie,
puis a mis en place un Agenda 21. Les déchets sont un gros poste de progrès.
Les vélos, Après les voitures Lisélec sont apparus de nouvelles générations de
vélos en libre-service et de passeurs électriques pour traverser le chenal du
port, sous l’appellation Yélo. Sèvres Environnement a mis en place des
dispositifs dans les communes pour tous les domaines cités, notamment les
déchets, les économies d’énergie, la gestion écologique des espaces verts et
des espaces publics.
Entreprises : Rhodia-La Rochelle applique une politique HSE cadrée ainsi
qu’un « Plan de Progrès » annuel, sorte d’Agenda 21 maison, par thème,
avec mesures adéquates. L’eau, l’énergie et les déchets sont prioritaires. Un
plan de déplacement interne est opérationnel avec des vélos (le site est
immense). EDF a beaucoup communiqué, mais en interne, la révolution verte
ne semble pas appliquée partout. Toutefois, EDF avance depuis peu grâce à
sa nouvelle fondation pour l’environnement. Wartsila pratique le tri à la
source, une politique de réduction de la consommation d’eau (moyen
technique) pour un résultat de – 50%. L’électricité pose encore problème du
fait que les bureaux sont en open space, rendant impossible la gestion
individuelle de la consommation en éclairage. Pas de PDE car l’usine est
isolée en campagne.
2/ Pouvez-vous évaluer le nombre de personnes concernées et le nombre de
personnes impliquées ?
Les interlocuteurs n’ont pas toujours su me dire le nombre total des
personnes de leur organisme (je n’ai donc pas indiqué de chiffres
approximatifs). Cependant, tous les organismes contactés ont sous leur
gouverne des volumes de populations élevés. Et toutes sans exception
fonctionnent avec la même contrainte : une poignée d’individus convaincus
et persévérants qui tiennent les SME à bout de bras.
Universités : Pour exemple, l’Université de Nantes compte 33 000 étudiants. Le
nombre de personnes qui viennent aux réunions d’environnement : 100 à 150,
dont des associations. Les « impliqués » sont quelques dizaines. On le voit, le
ratio n’est pas spectaculaire… A contrario, au Havre, sur 238 membres du
personnel concernés par le recyclage, seules 2 ont opposé une résistance de
principe. L’UCO compte 6200 étudiants sur site, 280 salariés pour 25 services.
Moins de 30 personnes animent la SME, sous forme de groupes de travail qui
font office de relais. Sup de Co-LR a vu naître sa Charte Environnement et DD
et sa SME grâce à un projet associatif interne, Le Défi Citoyen. Cette initiative
est entièrement issue d’un petit groupe de 5 étudiants, avec prise de relais
par des responsables de l’école.
Collectivités : Pour les collectivités ce sont les moyens techniques plus que les
ressources humaines qui font force de loi. Leur population-cible est plus variée
que celle des lieux d’enseignement, et plus homogène. Une CDA doit
20
amener quelques 100 000 à 300 000 personnes à l’éco-citoyenneté ;
l’approche est donc plus massive.
Entreprises : Chez Rhodia, quelques personnes isolées sont parfois à l’origine
d’une initiative écologique : tri sélectif des plastiques et des bouchons, projet
de panneaux photovoltaïques… Une forme de volontariat spontané qui
mène à des réalisations très positives. Wartsila compte une centaine de
salariés dont la moitié participe au tri sélectif.
3/ Comment parvenez-vous à impliquer votre population interne dans le sens
de l’éco-responsabilité ? (Education, Persuasion, Coercition)
Voilà la question au cœur de l’éco-responsabilité : « Comment ? ». Tous
les organismes interrogés sont unanimes : il n’y a pas de recette miracle, mais
un mélange de plusieurs approches du public concerné.
Universités : L’UCO lance des campagnes internes par thème, via intranet,
des expositions, des stands. C’est une pratique courante en milieu éducatif,
car elle permet de fédérer quelques bonnes volontés chez les étudiants, ce
qui est bien perçu. Nantes semble tout miser sur les étudiants, car le
répondant parmi les personnels est très faible. Chez eux, en privé, ils seront un
peu actifs. Sur leur lieu de travail, il y a peu à espérer. L’explication tient peutêtre au fait que les campus sont sans vie, sauf en centre ville. Le Havre a mis
en place un Comité de Pilotage avec des programmes d’actions proposés
aux personnels. On y fait appel à la bonne volonté, en faisant valoir que les
besoins et la visibilité en seront bénéficiaires. C’est donc une approche de
séduction qui stimule le volontariat et permet aux gens de venir à l’écoresponsabilité. En revanche, là comme dans d’autres écoles, on constate
que ce sont les étudiants qui se sentent les moins concernés par une politique
environnementale interne. Bref, ils ne sont ni demandeurs, ni acteurs. Par
ailleurs, l’Université du Havre prône d’inclure le DD dans tous les cursus au
même titre qu’une matière classique.
Dans ce microcosme éducatif, la concertation reste un point fort, car
rien n’est plus démotivant que de se voir ordonner telle pratique quand on a
l’âge de ruer dans les brancards. Il faut caresser (parfois à tort) le jeune dans
le sens du poil. Et surtout, faire appel à une force interne : les associations
d’étudiants, qui ont une crédibilité et une justification utiles. Mais cela vaut
aussi pour convaincre ses pairs de monter au front de l’environnement. Donc,
en milieu universitaire, négocier, échanger, proposer, et déculpabiliser. Les
susceptibilités y sont parfois proportionnelles aux égos… Là aussi,
communiquer ses actions et ses résultats est capital. Ce sont ces retours
d’information qui ont valeur de récompense.
Les universités anglo-américaines ont innové dans le domaine de
l’incitation et de l’émulation. Oxford a réussi à motiver les étudiants et
personnels au covoiturage (Programme Oxshare). Les propriétaires de ces
voitures mises en commun ont droit à du stationnement – gratuit – sur un
campus quasiment interdit aux véhicules motorisés (tout le monde s’y
déplace à vélo ou à pied). Berkeley joue l’émulation avec le « Green Room
Tour », où chacun peut visiter des chambres d’étudiants aménagées avec
des produits issus du DD, vitrines des bonnes pratiques ; les « Blackout Battles »
21
sont des compétitions entre bâtiments sur la réduction de consommation
énergétique. Les gains y sont économiques, mais surtout d’ordre moral. On
imagine peu cette sorte de disposition d’esprit en France… Stanford, qui a
payé une facture d’eau et d’électricité de 4 millions de dollars en 2004, fait
de même en jouant la carte de l’émulation et de l’incitation. Les bâtiments
les moins consommateurs sont récompensés par un prix financé grâce à
l’argent économisé. Il y a là une touche de vénalité, mais ça responsabilise
les usagers de ces bâtiments. Idem avec les photocopies, dont l’usage
systématique en recto/verso se traduit en tarifs réduits.
Collectivités : Sèvres Environnement couvre deux populations distinctes : les
employés municipaux des communes couvertes par l’organisme et les
populations publiques. Le recours à la politique de « la carotte et du bâton »
est de rigueur : on incite, puis, le cas échéant, on oblige. Face à une cible
massive, convaincre chacun et chacune est illusoire. Cela ne signifie pas
pour autant que Sèvres Environnement impose des pratiques. L’éducation est
le fer de lance auprès des écoles, des mairies, des associations… La
coercition n’est qu’une ultime option quand l’approche douce a échoué. A
ce stade, on met la population visée devant le fait accompli, c'est-à-dire
face à des dispositifs d’économie, de recyclage ou d’usage qui ont valeur
de règlement ou d’obligation. Le tri sélectif – les sacs poubelles jaunes – sont
l’exemple type de « l’état de fait ». Les populations ont été informées du bienfondé de recycler et, dans la foulée, priées de bien vouloir obtempérer.
L’avantage évident de ce genre de mise en route d’une pratique, c’est
qu’en quelques mois une large population y adhère de facto. Et c’est
l’autorité municipale ou départementale qui permet cela : le citoyen
comprend vite qu’une disposition officielle devient incontournable. La CDA
de La Rochelle a eu recours à ce type de coercition par le fait accompli. Par
ailleurs, elle a mis en place une « Administration Eco-Responsable » avec
éducation interne à la clé, et une stratégie structurée : transversalité de l’info
et des projets d’un service à l’autre et synchronisation ad hoc, soutien des
instances d’en haut et communication externe. Cette triple combinaison
couvre bien le terrain de l’éco-citoyenneté en interne. Et celle-ci rejaillit en
externe vers le public. La gestion des déchets a été efficace, à tel point que
les directions et les employés des sites de retraitement étaient déstabilisés
lorsqu’ils ont constaté une baisse spectaculaire des volumes traités. Ils
avaient l’impression que les usines tournaient à perte et qu’il en résultait une
sous-rentabilité ! Il a fallu leur expliquer que c’était, sur le plan écologique, un
excellent signe au contraire ! Enfin, la CDA a œuvré dans le sens d’une
appropriation de la démarche environnementale en interne par ses salariés
plutôt que de se poser en donneur de leçon. C’est la consultation de la base
qui permet cela.
Entreprises : EDF a mis en place le minimum, semble-t-il assez peu suivi sur le
site régional. Un employé m’a même dit : “La com’ externe, ça marche à
fond, mais en interne, il n’y a rien”. Difficile à croire et il s’agit d’un seul regard.
Mais si la SME n’est pas plus visible, on peut s’interroger. EDF ferait-elle du
greenwashing ? Mon propos n’est pas de trancher ici. Rhodia-LR a recours à
des réunions-formation qui sont en fait des modules de sensibilisation. Le suivi
22
consiste à contrôler que les règles de HSE sont respectées, avec rappels
réguliers, pression et vigilance. Parfois, un dérapage ou un manquement
survient, sans logique apparente. “L’humain, ça ne se règle pas comme une
machine.” m’a dit le Responsable HSE. Les incitations sont d’ordre
« responsabilisant » : ne pas respecter le dispositif SME a un coût pour la
communauté. Wartsila procède à des échanges éducatifs et informatifs
(notamment sur la Norme 14001), pour les nouveaux arrivants en particulier.
Nous sommes en milieu industriel et, malgré la lourdeur des réglementations,
la population interne suit.
4/ Avez-vous constaté des résistances ? Lesquelles ? A quoi les attribuezvous ?
Dans son acception étymologique, « animer » signifie « donner une
âme », et selon le sens ancien, c’est l’âme qui donne la vie, et donc anime.
Cette définition est importante parce qu’elle indique bien combien la tête et
la main sont liées. Sans âme, sans esprit, il n’y a pas d’action de valeur qui
tienne. La pensée préside à l’acte. C’est pourquoi il n’est pas de politique
éco-responsable sans une adhésion réfléchie. Et c’est cette adhésion qui
pose problème : atteindre les esprits avant tout, c’est donner une chance
aux actes de suivre. Or, remuer les mentalités et les transformer de telle sorte
qu’elles traduisent ensuite leur cheminement en actes concrets est un défi de
taille.
La première épreuve consiste donc à passer les résistances.
Universités : Pour l’Université de Nantes, une forme de résistance s’est
exprimée lors de la mise en place d’un traiteur bio. L’argument massue
opposé à cette option était que « le bio est trop cher ». C’est le cas typique
d’une réalité économique immédiate qui prime sur le gain ultérieur. Là où l’on
pourrait estimer que le bio est un investissement sur le long terme, au bénéfice
de la santé publique, on préfère le voir comme un obstacle d’ordre
budgétaire. Certes, il s’agit des finances de l’université, différentes de celles
de la santé des particuliers. Mais jamais on ne semble réaliser qu’en devenant
client du bio sur des volumes importants, on permet son développement et
donc la baisse des prix. Les autres résistances sont classiques : confort ou
incompréhension. Bref, pourquoi sacrifier les habitudes ? Et pourquoi utiliser
moins d’énergie ? Là encore, il faut expliquer, démontrer que l’écoresponsabilité est l’instrument d’un gain. Au Havre, on a compris aussi que les
concertés doivent devenir les acteurs de leurs idées. Vous proposez une
solution alternative ? Mettez-la en application. Soyez des exemples. Et,
comme ailleurs, toujours cette nécessité de justifier les choix de la SME mise
en place.
Collectivités : “La remise en cause personnelle est difficile.” (CDA-LR). Voilà,
exprimé de façon claire, ce que chaque RE vit au sein de son organisme.
Sèvres Environnement confirme ce constat. Les anciennes générations (c'està-dire celles qui approchent de la retraite actuellement) ne peuvent pas
opérer un revirement de mentalité. Pour nombre d’entre eux, les « écolos »
portent toujours l’étiquette de doux rêveurs et de casse-pieds. Bref,
d’empêcheurs de polluer en rond. Pour ces rétifs au changement, l’écologie
23
va encore dans le sens inverse de l’histoire, et notamment du Saint Progrès.
Les mettre devant la réalité planétaire ne sert à rien. Pour vaincre les
résistances, une seule solution : leur expliquer et leur expliquer encore que
l’environnement est régi par la loi et qu’à ce titre ils doivent s’y conformer. Les
maires, les préfets « réactionnaires » (dans le sens non politique) ne se plient
aux exigences environnementales que sous la pression réglementaire.
Lorsqu’ils quitteront la scène, une nouvelle génération prendra le relais, plus
ouverte, mais pas forcément plus active. Il y a encore de l’inertie entre la tête
et la main. Mais en tout état de cause, expliquer semble le maître-mot.
Donner du sens à ce qui est exigé. Après quoi « ça bouge ».
Entreprises : La personne d’EDF m’a dit : “Les esprits sont vieux, et chez les
jeunes, ce n’est pas évident.” Le sous-entendu est assez pessimiste, indicateur
d’une désintérêt générationnel : les uns sont trop marqués au fer par une vie
passée au service du progrès et ont du mal à s’extraire d’une vision utilitariste
du monde, tandis que les autres, imprégnés par vingt années de
consumérisme technologique, n’ont pas la capacité à bifurquer
mentalement vers un modus vivendi économe. Cependant, loin d’entériner
ce retour négatif à l’emporte-pièce, j’aurais tendance à donner quelque
crédit à la SME d’EDF, même si nombre de salariés laissent à désirer sur le plan
de l’engagement éco-citoyen. EDF n’est peut-être pas exemplaire en interne,
mais l’entreprise semble s’être engagée dans la voie du DD. J’en veux pour
preuve un souvenir personnel, celui d’avoir vu des employés d’EDF venir
assister à Sup de Co-LR à une conférence sur le DD. C’était en soi un geste
éco-citoyen. Chez Wartsila, on pointe cet esprit de contradiction parfois
systématique (nous sommes en territoire gaulois, rappelons-le), assorti du « A
quoi ça sert ? » qu’il faut contrer de façon permanente par de l’explication.
Cet esprit de frein à la nouveauté, peut-être plus proche du râlage français
que de l’opposition raisonnée, se retrouve toutes générations confondues, ce
qui tend à contredire l’expérience vécue par Sèvres Environnement. Une
étude pourrait être lancée sur cette question du facteur « génération »
devant l’éco-citoyenneté. Une autre forme de résistance vient de la
direction, soucieuse d’un retour sur investissement rapide. Les projets de
panneaux solaires sont donc reportés, car ils impliquent une vision à long
terme. “A 2 ans, ça coince déjà. Alors sur 5 ans, le retour est trop loin !” Et
pourtant l’entreprise a bénéficié d’aides de l’ADEME pour tous ses dispositifs !
Mais ce n’est pas encore assez.
5/ Etes-vous optimiste quant à l’éco-responsabilité au sein de votre
organisme en particulier et dans la société en général ?
Chez l’ensemble des interlocuteurs l’optimisme est tempéré par la
lourdeur massive des états d’esprit.
Universités : J’ai senti les RE assez découragés. Dans un milieu intellectuel, on
s’attendrait à une assimilation rapide et dynamique de l’éco-responsabilité.
Or, il règne là souvent une immobilité – voire une indifférence – suspecte. Pas
d’optimisme béat chez les RE, mais une volonté de se battre.
24
Collectivités : Les personnes interrogées soulignent surtout la lenteur, doublée
de la difficulté, de faire pénétrer dans les esprits l’utilité et la nécessité des
pratiques éco-citoyennes. Ni optimisme, ni pessimisme, mais du réalisme.
Entreprises : Chez Wartsila l’optimisme est là, sous condition de patience.
Chez Rhodia également, sous condition de vigilance et de répétition du
message.
LES RÉSISTANCES
C
ependant, les résistances demeurent et présentent deux inconvénients
majeurs : elles sont polymorphes et elles sont profondément installées. Les
principales sont les suivantes :
Devant les moyens de réduire son impact sur l’environnement des
attitudes primaires telles que la flemme, le je-m’en-foutisme, seront toujours
l’apanage d’une frange de population plus « brute » avec laquelle, sans
doute, la persuasion reste peine perdue. Pour ces clients-là, le « Je ne savais
pas que… », « Je n’y ai pas pensé… », « Je n’avais pas vu que… » ne peut
être combattu que par l’obligation quand le contexte matériel le permet.
Ces gens doivent être, hélas, non seulement supportés, mais portés par les
autres.
De la part des directions, réticence à financer un dispositif
écologique non rentable sur le court-terme, d’où la démonstration que sur le
long terme, le bénéfice sera plus grand, en termes de santé comme en
budget. Les décideurs ne comprennent que les chiffres et les gains : toute
SME peut être source d’économies budgétaires substantielles. On peut
appuyer aussi sur l’image positive qui découle d’une exemplarité écoresponsable… à condition de ne pas tomber dans le piège facile du
greenwashing.
De la part des populations internes, (étudiants, employés, citoyens)
on s’attend à peu de volontaires actifs rapporté au nombre total alors qu’on
souhaiterait qu’au moins 80% d’entre eux « se réveillent » ! Elles nourrissent
inertie et désintérêt pour des pratiques qui semblent inutiles ou insuffisantes, le
sentiment d’être « seul à faire quelque chose ». D’où l’impérative nécessité
de démontrer que mille gestes individuels font une somme d’effets réels et
mesurables (comme d’éteindre les voyants et les lumières, fermer les robinets,
recycler tout ce qui peut l’être, optimiser les trajets en voiture, etc.). Ce
paramètre est primordial : l’individu de nos sociétés, qui a déjà bien du mal à
remettre en cause son mode de vie fondé sur l’acquis, se sent impuissant
face au défi environnemental planétaire. Il a le sentiment que seul contre
tous, son effort est négligeable dans la masse inactive. C’est pourquoi on ne
peut exiger d’une personne que des petits pas, de petites initiatives à son
échelle, en lui expliquant bien qu’au final, « ça paye » et qu’il en sera le
premier bénéficiaire. Et surtout le conforter dans le lien social que constitue la
25
pratique éco-responsable, considérée comme norme : « Tout le monde le
fait, donc je le fais. »
Dans ces mêmes populations, le corollaire du faible retour sur
investissement décrié par la Direction, est le manque d’incitations, en clair, le
manque de récompense. La vénalité étant un moteur de l’âme humaine, on
ne s’étonnera pas de voir le citoyen, l’étudiant ou l’employé s’ébrouer
devant un gain pécuniaire ou un avantage en nature s’il souscrit au geste
éco-responsable. Ainsi des PDE dont les usagers tirent quelque intéressement
(cartes de transport gratuites,…), ou des gobelets à café recyclés dont la
machine rend 10 centimes… Ce point n’est pas anodin, car il s’ajoute à la
longue liste des avantages financiers qui stimulent le futur éco-citoyen, qu’il
soit PDG ou subalterne. Le déclenchement du geste éco-responsable est
tributaire de l’argument « argent ». Il ne viendrait pas à l’idée de l’un ou de
l’autre que le geste en question est en soi un gain pour l’environnement,
donc pour lui, pour sa vie, pour ses enfants, pour son avenir. Je suis donc
toujours chagriné de voir quelqu’un s’engager dans la bonne voie parce qu’il
y a un profit monétaire à la clé. C’est, à mon sens, une perversion de l’écoresponsabilité. Le récompense devrait se mesurer en termes de vie future.
Par ailleurs, pour tout subalterne, un ordre venu d’en haut de se mettre
au pas éco-citoyen est perçu comme une obligation hiérarchique
supplémentaire. Cette coercition n’est qu’un ultime recours dans un contexte
de résistance injustifiable. Quand l’alternative « Déclic ou des claques »
survient, privilégier la remontée des initiatives par la base s’avère infiniment
plus efficace, couplée avec l’éternelle nécessité d’expliquer le pourquoi.
Mais on sait que parfois il faut passer en force.
Les idées reçues constituent aussi parfois un frein à la réussite d’une
SME, comme de croire, par exemple, que les populations jeunes sont les plus
sensibles aux questions écologiques. Cette idée reçue est peut-être vraie
statistiquement dans la société en général, mais elle tombe quand on
observe l’attitude des étudiants en particulier. Ils se révèlent en réalité les
moins éco-responsables de tous ! Comment l’expliquer ? Une réponse vient à
l’esprit : ils sont consommateurs avant tout. Et la logique des aînés, qui ont
(pour partie) pris conscience du facteur investissement sur le long-terme ne
touche pas les jeunes pour qui le futur est une chose acquise. Autrement dit,
ils se contrefichent de s’investir dans des efforts et des sacrifices pour un
avenir qui leur paraît lointain. Comment leur faire comprendre qu’ils se
trompent ? En revanche, on trouvera dans les facs et les écoles une poignée
d’ayatollahs de l’environnement prêts à en découdre avec quiconque
crache par terre. Nous sommes donc là devant deux attitudes extrêmes. Une
forme d’apathie aveuglée par le « tout tout de suite », résultat de 40 ans de
matérialisme débridé, transmis par les parents, et une forme d’intégrisme
impatient dénué de toute capacité de persuasion. Il faudrait, pour résoudre
le problème, mettre en application une maïeutique patiente, bref faire appel
à Socrate pour la cause verte.
26
Une autre explication possible tient au fait que nous sommes dans une
société incivique, de déficit éducatif parental, et que cela s’ajoute au
consumérisme dont les jeunes sont imbibés. Le mélange rend la persuasion
éco-citoyenne pour le moins ardue. Déresponsabilisation des générations +
cynisme commercial ambiant = éco-citoyenneté presque impossible.
DE L’ÉDUCATION À L’ACTION : LES PERSPECTIVES
D
ans un organisme, quel qu’il soit, la condition première de toute
tentative de SME est l’adhésion des instances directrices. Sans la tête,
aucun espoir de voir les couches subalternes prendre les décisions, donner les
moyens et soutenir une politique quelconque. Une fois cette étape franchie, il
devient plus aisé de faire redescendre l’expression d’une volonté vers les
branches de l’organisme. Un président ou un présent aux réunions, qui
confirme l’engagement, motive indiscutablement les troupes. Cet « élu
porteur » transmet son énergie aux exécutants et légitime l’action.
Ensuite, les relais s’enclenchent : information, concertation, mise en
action. Il s’agit d’une stratégie de longue haleine qui exige des modalités de
fonctionnement très structurées. Un Agenda 21 ou une démarche de
labellisation en Campus Responsable, par exemple, offrent un cadre qui
évitera l’éparpillement et rassurera les acteurs à tous les niveaux.
Il s’agit dès lors de mettre en route le processus. D’abord, l’information.
Expliquer. Voire justifier, tant les résistances sont lourdes et les indolences
rampantes… Puis la consultation : cette information ascendante ou « retour »
permet à chacun(e) de se sentir valorisé(e) et donne aux décideurs un
éclairage utile sur les questions à traiter. Ensuite vient la concertation, fondée
sur l’échange, la mise en commun des idées, des critiques et suggestions, le
plus souvent par des réunions physiques, parfois par des sondages internes,
suivie de la co-décision qui mène à la mise en application de la SME. Un
comité de pilotage est alors un instrument de coordination souvent
indispensable.
L’erreur fatale dans ce domaine reste l’approche moralisatrice.
J’appelle cela (qu’on veuille me pardonner les termes) « la stratégie du malbaisé ». Comment suivre une face de carême dont la didactique repose sur
l’injonction acerbe, la répression divine, l’alarmisme docte, le pointage de la
honte, le discours acrimonieux et l’intégrisme vert… ? Non qu’il faille
systématiquement éviter toute confrontation avec les mauvaises volontés ! Ni
qu’il faille renoncer à mettre chacun face à ses propres manquements ! Mais
cela peut être fait avec un humour ravageur qui passera souvent bien auprès
du public visé. En tout cas, l’important est de toujours laisser le choix aux
personnes : « Vous pouvez, si vous le souhaitez… Aucune obligation. Vous êtes
bienvenus à… »
Les partenaires internes entrent alors en jeu : associations d’étudiants
qui relaient la sensibilisation, enseignants-chercheurs qui « tutorent » des
27
projets, personnels administratifs et techniciens qui apportent leur concours à
la mise en place de solutions matérielles, les volontaires convaincus parmi les
employés municipaux fédèrent leurs collègues sur des opérations
d’information ou proposent des projets. Une méthode consiste à mettre à
contribution les quelques volontaires qui vont aller chercher les hésitants et les
passifs, bref rameuter quelques forces insoupçonnées qui se révèlent utiles en
fin de compte. Il est possible de rallier les franges de cette population en lui
présentant le projet sous une autre forme, et sans qu’ils aient affaire au RE.
Une opération d’hygiène ponctuelle sera le parallèle d’un dispositif de
recyclage, la distribution de tracts pour un documentaire écologiste ne sera
pas commanditée par le RE, une consultation sur l’optimisation des transports
sera menée par ces « acteurs secondaires » sans que ce soit forcément
rattaché à un projet de covoiturage. Il existe une voie périphérique pour faire
participer les indécis.
Les partenaires externes, comme l’ADEME, le WWF, les bureaux
d’études, sont invités lors d’opérations éducatives ou apportent un soutien
matériel à la mise en route d’une solution technique.
Enfin, il faut insister sur la nécessité d’intégrer à tout cursus scolaire une
véritable éducation à l’éco-civilité et à l’éco-responsabilité. Eduquer les
enfants afin qu’ils répercutent la bonne parole auprès de leurs parents,
parfois encore imperméables à ces notions. Ou l’inverse. La clé du problème
réside assurément dans la combinaison éducative « maison » + « institution »,
c'est-à-dire « parents » + « référents », l’une se nourrissant de l’autre par le
transfert de l’exemplarité. Le sujet peut « importer » de l’école ou de la
maison les pratiques vertueuses qu’on lui a enseignées. C’est ainsi que se
construit la norme sociale qui sert de terreau à la réussite éco-citoyenne.
Quoi qu’il en soit, dans un organisme, le RE ou l’autorité territoriale tient
le rôle de chef d’orchestre qui anime cet ensemble de synergies humaines.
Partant du principe que “Patience et longueur de temps font plus que
force ni que rage.” on admet donc que les parties prenantes doivent
d’abord être des parties apprenantes. On souhaiterait même à l’avenir
qu’elles deviennent des parties surprenantes tant le temps presse et la tâche
est démesurée. Hélas, pour citer Odile Blanchard : “Comme l’attestent de
nombreuses études, les campagnes d’information et d’éducation, aussi
bonnes soient-elles, peuvent contribuer à une prise de conscience des
individus. Mais ces campagnes ne suffisent pas pour changer le
comportement des individus.” L’auteur fait référence aux études McKenzieMohr de 1999 et Bartiaux de 2006. Et d’ajouter que la sensibilisation peut avoir
davantage d’impact si elle s’accompagne d’échanges et du soutien social
mentionné plus haut. En définitive, les personnes ont besoin d’accompagnement pour s’engager dans une véritable modification de leur
fonctionnement vis-à-vis de l’écologie.
28
On peut donc schématiser l’itinéraire de l’éco-responsabilité comme
suit. Le but du jeu étant de parvenir à l’Action Verte sans avoir recours à la
Coercition Rouge. Dans tous les cas, l’exemplarité fait œuvre de conduction.
Il s’agit en effet de « se montrer », dans toutes les étapes du processus, c'està-dire de communiquer sur les actions en tant qu’organisme, et de se poser
en exemple à titre individuel. C’est donc d’une combinaison de divers types
d’exemplarité qu’il s’agit de mettre en avant.
ITINÉRAIRE DE L’ÉCO-RESPONSABILITÉ
ACTION
ÉDUCATION
PERSUASION
Information
Sensibilisation
Exemplarité
informative
Consultation
Concertation
Incitation
Exemplarité
incitative
Participation
Exemplarité
active
COERCITION
Obligation
Exemplarité
défective
Une ultime piste peut , enfin, être explorée : celle de la recherche
en neuro-sciences. En effet, les découvertes récentes sur le cortex
cérébral tendent à ouvrir des voies d’explication sur la mécanique des
comportements. Et en particulier des comportements individuels et/ou
collectifs, des écarts entre hommes et femmes, etc. L’ « homme
neuronal » révélé dans les années 80 a permis de dégager une piste
nouvelle où il est devenu possible de comprendre pourquoi telle
personne, avec son patrimoine acquis et inné, sa culture, ainsi que des
paramètres extérieurs (milieux divers), verra ses processus mentaux la
mener à des évolutions comportementales plus ou moins rapidement.
Ainsi, des blocages au changement d’attitude ( et d’habitudes), ainsi
de l’adoption aisée de l’éco-responsabilité, bref, de la capacité du
cerveau à modifier ce qui est ancré. A ce stade, les neuro-sciences
nous disent que la répétition, l’éducation, la « gymnastique » neuronale
sont les alliés du processus de déclic. Il est donc envisageable de savoir
appuyer sur le « bon bouton » un certain nombre de fois pour
conformer la démarche cérébrale. Si cette compréhension débouche
sur une exploitation positive de la connaissance en question, et non sur
la manipulation mentale, on peut espérer accélérer l’adhésion
générale pour la cause de notre survie.
29
CONCLUSION
L
a question finale se révèle double défi : comment changer les esprits de
telle sorte qu’ils commandent à l’acte, et comment accélérer le processus
pour que l’éco-responsabilité entre dans les mœurs sans tarder davantage ?
Nous avons passé 30 ans à faire des petits pas, maintenant est venu le temps
de faire de grands sauts. Tout simplement parce que l’échéance fatale est
proche, confirmée par les études scientifiques : une vingtaine d’années. Audelà de quoi…
Il ressort, à l’observation des comportements, que malgré les premiers
signes visibles d’une dégradation de la Terre, l’humanité traîne encore des
pieds. Les Brésiliens qui vivent du défrichage de la forêt amazonienne en
voient les effets, mais sont prisonniers de la nécessité économique. Même
schéma pour les Chinois et les Africains. Les Européens et les Nord-américains
voient bien, par les médias, que la calotte glacière fond à vue d’œil, mais ils
persistent à rouler seuls dans leurs véhicules et n’ont pas encore tout à fait
abandonné le 4X4, parce que la fonte des pôles, c’est loin. Beaucoup
pensent encore que les émissions de CO2 sont le fait des industries, et
personne ne pointe du doigt son propre usage de l’automobile. L’homme ne
changera que confronté au danger immédiat. Dos au mur et les pieds dans
l’eau, l’instinct de survie prendra alors le relais de la raison qu’il avait mise en
veilleuse tant que « ça passait encore ». On peut donc douter de l’efficacité
réelle de l’info éducative déployée par les médias et les SME, insuffisante
pour « botter le derrière » à l’homme. Seule l’imminence physique de la
catastrophe annoncée aura l’effet escompté. Il sera sans doute trop tard. Et
je ne suis pas certain qu’en absence de souci plus flagrant pour la
préservation de la Terre, la planète aura, dans sa réaction de survie, le souci
de la préservation de l’homme.
Avant de nettoyer la planète, il est indispensable de nettoyer d’abord
les esprits. De les débarrasser des blocages que sont les égoïsmes, les
habitudes, les idées reçues et les vues à court terme. Leurs démontrer, sans
brusquerie mais avec fermeté, que le geste écologique au quotidien se solde
par un avantage et non par une perte, que le sacrifice d’un peu de confort
peut se solder par le bénéfice d’une vie plus saine. Et ne pas perdre de vue
que l’exemplarité à tous les niveaux finit par induire, même à dose
homéopathique, une avancée vertueuse dans les esprits, et qu’avec
l’instauration d’une norme sociale dans la pratique, les réticences peuvent, à
terme, finir par tomber.
Nous devrions nous souvenir que l’éco-responsabilité existe déjà dans
les sociétés agraires et primitives, là où les ressources sont souvent rares et
difficiles à atteindre. La révolution espérée des mentalités et des mœurs
n’aura pas lieu, tant elle semble impossible chez nous d’abord, chez les
autres ensuite, car c’est de 9 milliards d’humain dont il s’agira en 2050 ! Seule
30
la patiente éducation des cerveaux neufs ouvrira un horizon plus clair et plus
beau, par le binôme gagnant « éducation parentale + cursus scolaires
intégrant l’éco-civilité », avec l’appoint éventuel des neuro-sciences.
Tout cela sera réaliste et réalisable à condition de sortir de
l’hyperconsommation, et pas seulement en temps de récession, sous la force
majeure. L’éco-responsabilité est donc l’objet d’un double effort : d’une part
les petits pas de chacun, chez soi, au travail, et dont le cumul à l’échelle
mondiale peut avoir un réel impact positif sur la planète, et d’autre part les
grands sauts impulsés par les gouvernements et les organismes officiels,
renforcés par des réglementations multilatérales, et notamment financières.
C’est assurément cette combinaison, soutenue par les médias et les
associations, qui permettra d’avancer plus rapidement vers un modus vivendi
mondial acceptable à défaut d’être vertueux. Nous sommes parvenus à
mondialiser l’économie, mus par nos intérêts. Nous devons parvenir à
mondialiser l’éco-responsabilité, mus par un égal intérêt commun. C’est une
condition obligatoire, car sans la prise en compte de ce souci partagé par
tous pour la Terre qui nous fournit de quoi faire fonctionner nos sociétés, il n’y
aura plus d’économie viable. C’est donc tout l’intérêt de développer
farouchement une économie verte, le social business inventé par
Muhammad Yunus, et autres solutions réalistes et bénéfiques à la fois, pour la
survie et le bien communs.
Cesse de t’inquiéter pour le
petit… Je considère qu’on
le prépare au type de planète
qu’on va lui laisser en héritage…
Les 4x4 critiqués pour la forte augmentation
des émissions de gaz à effet de serre…
31
Annexe 1
THÉORIE DE L’AUTODÉTERMINATION
AUTOMOTIVATION
POURQUOI ADOPTEZ-VOUS DES COMPORTEMENTS ÉCOLOGIQUES?
Plaisir de maîtriser de nouvelles façons d'aider l'environnement.
Plaisir de trouver nouvelles façons d'améliorer l'environnement.
Aime le sentiment lorsque je fais des choses pour l'environnement
Plaisir lorsque je contribue à la préservation de l'environnement.
Prendre soin de l'environnement fait partie intégrale de ma vie.
Prendre soin de moi et de l'environnement sont inséparables.
Etre conscient de l'environnement est une partie de qui je suis.
Fait partie de la façon dont j'ai choisi de vivre ma vie.
Me semble raisonnable d'aider à préserver l'environnement.
Ces comportements constituent des stratégies raisonnables.
Moyens que j'ai choisis afin de contribuer.
Je pense que c'est une bonne idée de faire quelque chose.
J'ai des remords quand je ne fais rien.
J’ai l'impression de mal agir lorsque je ne fais rien.
Je me sentirais mal à l'aise si je ne faisais rien.
Je me sentirais coupable si je ne faisais pas ces comportements.
Les autres seront contrariés si je ne fais rien.
Pour la reconnaissance que les autres auront envers moi.
Mes amis insistent pour que je fasse ces comportements.
Pour éviter d’être critiqué(e).
Je ne sais pas vraiment, je ne vois pas ce que j'en retire.
Je me demande pourquoi; la situation ne s'améliore pas.
J’ai l'impression que je perds mon temps
Je ne vois pas comment mes efforts améliorent la situation.
______________________________________________________________________________________
(Pelletier & al., 1998)
32
Annexe 2
Questionnaire sur l’usage du vélo
1. Comment viens-tu à l’école ?
Voiture
Bus
Vélo
2 roues motorisé
A pied
2. A quelle distance habites-tu de l’école?
Moins de 500 m
Entre 500 m et 1 km
Entre 1 et 2 km
A plus de 2 km
3. Possèdes-tu un vélo à La Rochelle?
Oui
Non
4. Si oui, à quelle fréquence utilises-tu ton vélo?
Jamais
Moins de 15 fois par semaine (2 fois/jour)
Plus de 15 fois par semaine
5. Sinon, pourquoi ?
____________________________________________________________
6. Si l’école mettait un vélo à ta disposition, tu serais…
Très intéressé(e)
Intéressé(e)
Peu intéressé(e)
Pas du tout intéressé(e)
7. Si l’école mettait un vélo à ta disposition, serais-tu prêt à l’utiliser pour venir à
l’école ?
Oui
Non
8. As-tu sérieusement envisagé le covoiturage ?
Oui
Non
9. Sexe : H F
10. Ton Programme d’Etudes :
BI
BB
ESC
LRBST
Master
Merci d’avoir répondu à ce questionnaire
33
Synthèse des résultats du sondage
338 étudiants au total ont répondu.
Question 1 : 34,3 % viennent en voiture 36,7% à pied 15,4% à vélo
Question 2 : 42 % habitent à moins d’1 km
Question 3 : 47,3 % ont un vélo 52,7 % n’en ont pas
Question 4 : 25,1 % ne l’utilisent jamais 48,6 % moins de 15X /semaine
Question 5 : Les motifs de non-usage sont variés :
Habite trop loin
Préfère la voiture
Utilise un autre mode Trop de
vols N’a pas de place chez lui/elle En a un chez ses parents
Et même : « Flemme »
« Ne sais pas pédaler »
« Pas un grand sportif »
« Les pneus sont dégonflés »
Question 6 : 67,6 % seraient intéressés de s’en voir mettre un à disposition par
l’école
Question 7 : 62,1 % affirment qu’ils l’utiliseraient pour venir à l’école
Question 8 : 61,2 % affirment avoir envisagé le covoiturage
Question 9 : 57,7 % de femmes 42,3 % d’hommes ont répondu
Question 10 : (NC)
Commentaire
Les questions 6, 7 et 8 interpellent : il y a une volonté exprimée, qui est en
totale contradiction avec l’usage réel et les motifs précédents.
Quelle foi y donner ? Cela illustre bien le décalage entre les intentions et
l’action, entre la prise de conscience et le passage au réel.
34
Sources & Bibliographie
Les démarches de campus responsables, L’exemple de l’Université de Stanford,
C.Souchon, J. Sitbon, A. Zana, HEC, 2006.
Les démarches de campus responsables, L’exemple de l’Université de Berkeley, M.
Bouzoubaa, HEC, 2006.
Les démarches de campus responsables, L’exemple de l’Université d’Oxford, C.
Dambricourt, A.-M. Poyet, H. Debry, HEC, 2006.
Consience
et environnement, Pierre Rabhi, éd. du Relié, 2006.
Des attitudes aux comportements : une recherche interdisciplinaire en sciences
sociales, Odile Blanchard, CNRS/Univeristé Mendès-France, Grenoble, 2008.
La stratégie du projet latéral : comment réussir le changement quand les forces
politiques et sociales doutent ou s’y opposent, O. d’Herbemont, B. César, Dunod,
1998.
Lutte contre le changement climatique : quels messages pour quelles cibles dans
les universités ? A. Renuy, L. Strus, E. Troille, CIES, Grenoble, 2008.
Objectif du DD – Comprendre, agir sur son territoire, Réseau des Agences
Régionales de l’Energie et de l’Environnement, 2008.
Ce travail a été mené sans aucune consultation Internet. C’est un choix et un défi, justifié
par la volonté de ne pas me laisser entraîner dans la jungle trop riche du web mondial.
Ce n’est en aucun cas un rejet systématique de cette option.
35
Téléchargement