J Maroc Urol 2010 ; 18 : 15-23 MISE AU POINT PROLAPSUS GENITAUX CHEZ LA FEMME : VOIE HAUTE OU VOIE BASSE ? PROTHESE OU NON ? HYSTERECTOMIE OU NON ? Y. EL HARRECH, F. HAJJI, J. CHAFIKI, A. JANANE, M. GHADOUANE, A. AMEUR, M. ABBAR Service d’Urologie, Hôpital Militaire Universitaire Mohammed V, Rabat, Maroc INTRODUCTION - DEFINITION 3]. Cependant en pratique cette prévalence demeure très variable et varie en fonction de la population et de la tranche d’âge étudiées ainsi que de la définition du prolapsus utilisée. Certaines études ont utilisé une définition uniquement anatomique, d’autres ont pris en compte les signes fonctionnels, d’autres enfin sont basées sur le nombre de corrections chirurgicales. Le prolapsus génital est une migration anormale permanente ou transitoire d’un ou plusieurs organes pelviens modifiant la forme et/ou la situation des parois vaginales pouvant aller jusqu’à leur extériorisation à travers la fente uro-génitale [1]. Les organes des trois étages du pelvis peuvent être concernés : la vessie (cystocèle), l’utérus (hystérocèle), le rectum (rectocèle). Le prolapsus peut également concerner le dôme vaginal en cas d’antécédent d’hystérectomie, le cul-de-sac de Douglas seul (élytrocèle) ou associé à des anses intestinales (entérocèle) ; l’élytrocèle antérieure (prolapsus du cul de sac vésico-utérin) est exceptionnelle. Dans les 30 ans à venir, le pourcentage des patientes âgées ira en augmentant et l’on estime un nombre de consultations pour cette pathologie multiplié par 10. B. Mécanismes de la statique pelvienne Le maintien d’une anatomie pelvi-périnéale “normale” repose sur trois systèmes d’action synergique : un système suspensif (structures ligamentaires), cohésif (accolements conjonctifs entre les différents organes) et de soutien (plancher pelvien constitué des muscles releveurs de l’anus, s’unissant entre vulve et anus pour former le noyau fibreux central du périnée) [1, 4]. Normalement, la résultante des forces de pression intraabdominale est orientée vers le périnée postérieur et la concavité sacrée, préservant le point faible que constitue la fente uro-génitale [1, 4]. Ces troubles de la statique pelvienne sont rarement responsables de morbidité sévère ou de mortalité. En revanche, ils affectent directement la qualité de vie des patientes. De nombreuses techniques existent et sont adaptées régulièrement en même temps que progressent les connaissances physiopathologiques et qu’apparaissent de nouveaux matériaux. Cependant, malgré les évolutions majeures qu’ont connues ces techniques, de nombreuses questions demeurent : Lorsque la statique pelvienne est perturbée, la résultante des forces de pression sollicite la fente uro-génitale [4]. - Quelle voie d’abord choisir : haute ou basse ? - Faut-il ou non mettre des prothèses ? C. Mécanismes du prolapsus génital - Faut-il ou non faire systématiquement une hystérectomie ? L’étiologie des prolapsus est multifactorielle, avec schématiquement deux éléments à l’origine de la rupture d’équilibre de la statique pelvienne : dégradation des structures anatomiques et surcharge de pression imposée à celles-ci [4]. Le facteur essentiel est le traumatisme obstétrical : l’accouchement est responsable de lésions pelvi-périnéales plus ou moins importantes. Les autres facteurs sont : une prédisposition congénitale (laxité ligamentaire, anomalies du tissu conjonctif), le vieillissement, la carence hormonale ménopausique, une lordose lombaire, l’hypotonie de la paroi abdominale, les causes d’hyperpression abdominale (asthme, bronchite chronique, constipation sévère, efforts physiques importants), l’obésité, des facteurs iatrogènes (hystérectomie, cure d’incontinence urinaire d’effort) [1, 4]. RAPPELS Avant d’essayer d’apporter une réponse à ces différentes questions, un bref rappel s’impose. A. Epidémiologie Le prolapsus génital est une pathologie fréquente. La prévalence du prolapsus urogénital est de 30,8% dont 21% sont au stade 3 à 70 ans. Le risque global de la chirurgie du prolapsus est de 11,1% à 80 ans et la récidive d’une réintervention est estimée à 29,2% [2, Correspondance : Dr. EL HARRECH. Bloc F, n°28, Lot El Haouzia, Kenitra, Maroc. E-mail: [email protected] -15- Prolapsus génitaux chez la femme : voie haute ou voie basse ? prothèse ou non ? hystérectomie ou non ? Y. EL HARRECH et coll. vaginale associant hystérectomie avec fixation vaginale aux ligaments utéro-sacrés et colporraphie antérieure et/ou postérieure et chirurgie abdominale par promontofixation. 41 patientes ont été opérées par voie abdominale et 41 par voie vaginale. En termes de résultats anatomiques, un an après l’intervention, le taux de récidive était de 5% dans les deux groupes pour le prolapsus utérin, de 37% pour le fond vaginal et de 32% pour la cystocèle. Les deux groupes étaient comparables en termes de résultats anatomiques mais un avantage pour la voie vaginale en termes de satisfaction des patientes était observé. La défaillance du système de soutien peut être segmentaire ou globale, constituée (patente) ou potentielle (risque de décompensation). QUELLE VOIE D’ABORD CHOISIR : HAUTE OU BASSE ? Le choix de la voie d’abord dépend des conditions générales et locales, mais également parfois de choix d’école. Etant donné les avantages et inconvénients propres à chaque voie d’abord, il faudra insister avant tout sur les polyvalences chirurgicales permettant de proposer tout un éventail de techniques et donc de voies d’abord en fonction de chaque cas particulier. Cette polyvalence demande, par conséquent, la maîtrise des différentes techniques ou au moins des différentes voies d’abord par un chirurgien ou tout du moins par une équipe. La deuxième étude a été publiée par Maher et al. [8]. Elle comparait promontofixation et sacrospinofixation dans le traitement du prolapsus du fond vaginal après hystérectomie. Au total, 48 patientes étaient opérées par voie vaginale et 47 par voie abdominale. Le suivi moyen était de 24 mois dans le groupe abdominal et de 22 mois dans le groupe vaginal. Le taux de succès subjectif (absence de symptomatologie) était de 94% dans le groupe abdominal et de 91% dans le groupe vaginal (différence statistiquement non significative). Le taux objectif (absence de prolapsus de stade supérieur à 1) était de 76% dans le groupe abdominal et de 69% dans le groupe vaginal (différence statistiquement non significative). En termes de satisfaction, le taux était de 85% dans le groupe abdominal et de 81% dans le groupe vaginal (différence statistiquement non significative). A noter que dans cette étude, le taux de dyspareunie de novo était très faible dans les deux groupes (5 et 7%) et que près de 40% des dyspareunies préopératoires se sont résolues après chirurgie avec l’une ou l’autre des techniques. Les études ayant comparé la voie abdominale et la voie vaginale sont peu nombreuses et leurs conclusions confuses. Dans une étude rétrospective publiée en 1996, Hardiman et Drutz [5] ont comparé les résultats à long terme de la sacrospinofixation selon Richter à la promontofixation. Un total de 205 patientes ont été étudiées avec un suivi moyen de 2,2 ans dans le groupe Richter et de 3,9 ans dans le groupe promontofixation. Aucune différence en terme de récidive (respectivement de 2,4 et 1,3%) n’a été mise en évidence entre les deux groupes. Au plan sexuel, toutes les femmes ayant des rapports avant l’intervention ont continué à en avoir après. Aucune différence n’était constatée sur ce plan entre les deux groupes sans qu’aucune précision ne soit donnée par les auteurs. Cette revue de la littérature permet de constater que la supériorité de la voie abdominale sur la voie vaginale n’est en fait pas démontrée. Quelle que soit la voie d’abord utilisée, les résultats semblent satisfaisants y compris à long terme pour le traitement du prolapsus du fond vaginal ou de l’hystéroptose. En revanche, le traitement de la cystocèle reste un challenge non encore résolu. Trois études prospectives randomisées comparant voie abdominale et voie vaginale ont été publiées. La plus ancienne a été réalisée par Benson et al. en 1996 [6]. Cette étude comparait sacrospinofixation (associée si besoin à une colporraphie antérieure et/ou postérieure) et promontofixation (associée si besoin à une colpopexie rétro-pubienne). Dans cette étude, 48 patientes ont été opérées par voie vaginale et 40 par voie abdominale. Le suivi moyen était de 2,5 ans (1 à 5,5 ans). Le groupe vaginal a présenté des récurrences plus précoces et plus fréquentes, un taux moindre de satisfaction des patientes et plus de dyspareunie que le groupe abdominal. Le taux de récidive des cystocèles était de 29% dans le groupe vaginal et de 10% dans le groupe abdominal. Le taux de récidive de prolapsus de l’utérus ou du fond vaginal était de 12% dans le groupe vaginal et de 3% dans le groupe abdominal. Le taux de dyspareunie était de 15% dans le groupe vaginal (sur 26 patientes sexuellement actives) et de 0% dans le groupe abdominal (sur 15 patientes sexuellement actives). En pratique, la voie abdominale est supposée avoir des résultats plus durables à très long terme et provoque moins de cicatrices vaginales, au prix d’un risque général plus important : elle est donc souvent proposée à la femme jeune. La voie périnéale est indiquée de préférence à partir de la ménopause et chez les femmes à haut risque chirurgical en raison du moindre retentissement postopératoire et, en particulier, d’un risque d’embolies pulmonaires moindre par rapport aux laparotomies. Cette voie est préférée de même qu’en cas d’obésité morbide, pour des questions de facilité technique. Ne pas oublier aussi que la voie basse a profité ces dernières années de l’évolution apportée par l’utilisation de nouvelles prothèses et par l’apparition de nouveaux concepts chirurgicaux permettant de meilleurs résultats notamment chez la femme jeune. C’est ainsi que Deux autres études ont été publiées en 2004. La première par Roovers et al. [7], comparait chirurgie -16- J Maroc Urol 2010 ; 18 : 15-23 A. Intérêt des prothèses dans la voie basse Benhaim et al. [9] rapportent sur un suivi moyen de 21 mois (de 6 à 52 mois) une seule récidive de cystocèle chez 17 femmes âgées toutes de moins de 50 ans ayant eu la mise en place d’une prothèse antérieure. On a observé que même en complétant la procédure de colporraphie antérieure et postérieure traditionnelle par des interventions complémentaires comme l’urétropexie à l’aiguille, des réparations de lésions bilatérales transvaginales et para-vaginales, fixation du ligament sacro-épineux ou réparation pré-rachidienne, réparation ou prévention d’entérocèle, les taux de récidive atteignent 40, voire 50% à long terme [10, 11]. La nécessité d’apporter de nouvelles solutions pour le traitement des prolapsus par voie vaginale a poussé plusieurs auteurs à utiliser des prothèses. L’implantation d’un treillis vise donc à abaisser le taux de récidive, mais a aussi d’autres objectifs : obtenir une réparation sans tension, diminuer le plus possible la douleur postopératoire, réduire les difficultés de défécation et éviter sténose et dyspareunie. Deux solutions ont été proposées, l’une utilisait des prothèses résorbables et l’autre des prothèses non résorbables. Il est donc certain que l’évolution rapide des matériaux et la simplification des techniques opératoires viendront bouleverser toutes ces données dans les années à venir, mais seule une évaluation rigoureuse et prolongée permettra d’en vérifier les bénéfices potentiels pour les patientes. PROTHESE OU NON ? Une large gamme de matériaux est actuellement disponible. L’avantage attendu de l’utilisation des prothèses est d’optimiser les résultats sans compromettre la capacité vaginale ou la fonction sexuelle. L’objectif d’un biomatériau étant de remplacer les tissus natifs défectueux, un matériel idéal se doit d’être inerte, stérile, non cancérigène, durable mécaniquement, ne pas entraîner de réaction inflammatoire ni de réaction immunitaire, doit résister à des modifications des tissus, doit être pratique et facile à utiliser. Aucun des matériaux actuellement disponibles ne répond à tous ces critères mais beaucoup s’en approchent. Deux études prospectives ont comparé chirurgie prothétique et chirurgie classique. Dans ces deux études, les prothèses utilisées étaient faites de matériaux résorbables. La première étude a été publiée par Sand et al. [12]. Il s’agit d’une étude prospective randomisée comparant traitement classique par colporraphie et utilisation de prothèse résorbable de polyglactine 910. Le groupe traitement classique a présenté des taux de récurrence au stade 2 ou 3 de 43% à 1 an alors que ce taux n’était que de 25% dans le groupe utilisant une prothèse. Malgré la supériorité des résultats obtenus, le taux de récurrence reste important avec ce type de matériau. La seconde étude également prospective randomisée a été publiée la même année [15]. Elle a confirmé le taux très élevé de récidive lors du traitement classique des cystocèles par voie vaginale (plus de 50% de récidive), mais n’a pas montré d’avantage significatif du traitement utilisant une prothèse résorbable de polyglactine 910. Les prothèses peuvent être classées en fonction de différentes caractéristiques : • Le type de prolapsus pour lequel elles ont été indiquées : hystérocèle, cystocèle, rectocèle, ou traitements combinés associant divers types de prolapsus. • Le matériau utilisé : - Matériaux résorbables synthétiques (polyglactine). - Matériaux non résorbables, soit d’origine porcine soit synthétique classés selon le type de matériel, la taille des pores et s’ils sont mono ou multifilaments. La taille des pores influence la flexibilité de la prothèse et l’ancrage mécanique. L’avantage des prothèses résorbables n’a pas ainsi été prouvé, mais avec l’arrivée de nouveaux matériaux offrant une meilleure tolérance, plusieurs études concernant le traitement du prolapsus par voie vaginale avec utilisation de prothèses non résorbables ont été publiées [9, 13, 14, 15, 16, 17, 18, 19]. Leurs résultats s’accordent et montrent des taux de succès dans le traitement des cystocèles de 94 à 100% avec des reculs variant de 14 à 29 mois. Malheureusement, ces publications donnent très peu d’informations sur les conséquences fonctionnelles et notamment sexuelles de ces traitements. - Implants composites associant 2 matériaux : 1 résorbable (polygactine ; collagène, polyéthylène glycérol et glycérol) et 1 non résorbable (mono ou multifilament). - Leur principe de pose, avec ou sans fixation par des sutures résorbables ou non. - Leur forme. - Leur caractère “prédécoupé” ou “découpé en extemporané”. Ces résultats ne font pas l’unanimité. Dans leur étude, Handel et al. [20] ont comparé trois techniques de réparation des cystocèles utilisant ou non des prothèses: colporraphie antérieure traditionnelle, réparation avec prothèse d’origine porcine et avec mesh de polypropylène. 36% des patientes avec prothèse porcine ont récidivé contre seulement 4% et 6% dans le groupe polypropylène et colporraphie respectivement. Le délai La variété des prothèses résultant des combinaisons possibles de ces différentes caractéristiques est telle qu’il existe pratiquement un type d’implant par étude publiée. Afin de dégager l’intérêt d’utiliser des implants dans la prise en charge chirurgicale des prolapsus génitaux, les 2 types de voie d’abord doivent être distingués : -17- Prolapsus génitaux chez la femme : voie haute ou voie basse ? prothèse ou non ? hystérectomie ou non ? moyen de récidive était de 4,9 mois. 12 patientes ont eu une exposition de la prothèse porcine contre seulement une dans le groupe polypropylène. Cette étude ne montre pas de bénéfice de la prothèse de polypropylène par rapport à la technique classique. Y. EL HARRECH et coll. connaissances, les implants de renfort dans la chirurgie du prolapsus génital relèvent donc de la recherche clinique”. B. Intérêt des prothèses dans la voie haute Devant ces résultats hétérogènes, une évaluation technologique menée par la HAS sur les implants de renfort posés par voie vaginale dans le traitement des prolapsus génitaux a été réalisée en 2007 [21]. Les conclusions sont les suivantes : “Etant donné la variété des types d’implants testés, des indications traitées, les durées de suivi moyen qui dépassaient rarement 2 ans, l’absence d’études comparatives avec des techniques alternatives dans la plupart des cas et l’utilisation de critères de jugement imprécis et hétérogènes, les données de la littérature ne permettent pas d’évaluer l’efficacité sur le plan anatomique et fonctionnel des implants dans le traitement des prolapsus génitaux par voie vaginale. Des complications, certaines graves, ont été recensées. La littérature analysée ne permet pas d’évaluer leur fréquence. En l’état actuel des La voie haute est dominée par la colposacropexie ou promontofixation. Elle était réalisée initialement par laparotomie. Elle consiste en la suspension du col utérin, ou du dôme vaginal, ou de l’isthme utérin, au ligament longitudinal antérieur en avant du promontoire, à la jonction L5-S1, par l’intermédiaire de deux prothèses antérieure et postérieure. Elle peut être associée à différents gestes comme une hystérectomie, une douglassectomie, une myorraphie postérieure ou une colposuspension de type Burch. Beaucoup d’articles ont rapporté les résultats de la promontofixation à plus ou moins long terme et en utilisant différentes prothèses. Le tableau I rapporte quelques uns de ces résultats. Tableau I. Résultats et complications de la voie haute Etude Caractéristiques des patientes Traitements Recul Résultats Complications Limb et al., 2005 [22] Rétrospective Prolapsus vaginal n = 61 IUE n = 52 Promontofixation Mersilene n = 61 polyester multifilament 26 mois 3 perdues de vue Succès anatomique : 91% Satisfaction : 89,6% Abcès pelvien : 2/58 (3,4%) Erosions vaginales : 1/58 (1,7%) Leonardo et al., 2002 [23] Rétrospective Prolapsus vaginal n = 25 Promontofixation Mersilene n = 25 polyester multifilament 4 ans Satisfaction : 100% Pas d'abcès, ni d'érosion vaginale Gadonneix et al., 2004 [24] Prospective Prolapsus vaginal n = 46 IUE Promontofixation Mersilene n = 46 polyester multifilament plaque découpée 24 mois Succès anatomique Plaie vésicale : 3/41 (7,3%) Syndrome fébrile : 1/41 Obstruction à la défécation : 1/41 Sullivan et al., 2001 [25] Rétrospective Prolapsus n = 236 Promontofixation Marlex n = 236 polypropylène monofilament 5,3 ans Pas de récurrence de prolapsus rectal ni entérocèle sur les 205 patientes suivies Satisfaction globale : 72% Plaie rectale : 7/205 (3,4%) Erosions vaginales : 8/205 (3,9%) Culligan et al., 2002 [26] Rétrospective Prolapsus génital n = 245 Promontofixation acrylique n = 245 3 ans Echec : 37/245 (15,1%) entre 6 mois et 2 ans Succès : 208/245 (84,9%) Plaie vésicale : 1/245 (0,4%) Transfusion : 2/245 (0,8%) Plaie intestinale (grêle) : 2/245 (0,8%) Erosions vaginales : 6/245 (2,4%) Dubuisson et al., 2002 [27] Prospective Prolapsus génital n = 47 Promontofixation coelioscopique Vicryl Composite n = 25 polyglactine + polyester Mersuture n = 19 polyester VYPRO n = 2 polyglactine + polypropylène Prolene n = 1 polypropylène monofilament plaque découpée 15,2 mois Succès : 37/47 (78,7%) Satisfaction à 21,3 mois : 42/47 (89,4%) Plaies vésicales : 2/47 (4,2%) Abcès pelvien : 1/47 (2,1%) Erosions vaginales : 3 avec VICRYL Dyspareunies de novo : 2/47 (4,2%) Fox et Stanton, 2000 [28] Prospective Prolapsus génital n = 29 Promontofixation Teflon Bard n = 29 PTFE 14 mois Prolapsus : 26/29 Plaie vésicale : 1/52 Infection de l'implant : 1/52 Erosions vaginales : 1/52 Altman et al., 2006 [29] Rétrospective Prolapus du dôme vaginal stade II ou + (Baden et Walker) n = 52 Promontofixation G1 : polypropylène ou PTFE n = 25 G2 : Pelvicol n = 27 collagène porcin G1 : 4,3 ans G2 : 2,5 ans Echec à 7 mois : G1 : 6/25 (24%) G2 : 8/27 (29%) Complications postopératoires : Syndrome fébrile : G1 : 1/25 et G2 : 12/27 Infection de paroi : G1 : 0 et G2 : 3/27 Pas d'érosion ni de rejet -18- J Maroc Urol 2010 ; 18 : 15-23 A. Rôle gravitationnel de l’utérus sur la statique pelvienne La durée de suivi de ces études est comprise entre 14 mois et 5,3 ans. Le succès anatomique varie entre 71 et 91% selon la définition du succès, le type d’implant et la durée du suivi. L’évaluation subjective rapporte des taux d’efficacité compris entre 72 et 100%. Un rapport du National Institute for Health and Clinical Excellence de 2007 [30] conclut que les données d’efficacité et de sécurité disponibles sont suffisantes pour recommander l’utilisation de la promontofixation dans le prolapsus génital. Il précise que les médecins devraient s’assurer que les patientes ont bien été informées du risque de récidives de prolapsus génital, quelle que soit la technique chirurgicale utilisée et y compris la promontofixation et qu’il existe néanmoins un risque de complications, dont les érosions vaginales. Le rapport précise que les données d’efficacité disponibles sont limitées à 5 ans et qu’il serait utile de disposer de données au-delà de 5 ans ainsi que de données sur les différents types d’implants utilisés. La collaboration Cochrane a réalisé une revue systématique de la littérature sur le traitement chirurgical des prolapsus génitaux de la femme en 2008 [31]. Cette revue traite des différentes techniques chirurgicales de prise en charge du prolapsus avec ou sans recours à des prothèses. 22 études contrôlées randomisées ont été analysées, soit 2368 femmes au total. Les conclusions sont les suivantes : “La promontofixation abdominale est associée à un taux de récidive du prolapsus du dôme vaginal et de dyspareunie inférieur à celui de la sacrospinofixation vaginale. Ces avantages doivent être contre-balancés par une durée opératoire plus longue, un retour aux activités plus tardif et un coût plus élevé. L’utilisation de prothèses lors de la réparation de la paroi vaginale antérieure peut réduire le risque de récidive de cystocèle. Dans la prise en charge des rectocèles, la réparation de la paroi postérieure du vagin diminuerait le risque de récidives par rapport à la réparation transanale. Des études contrôlées randomisées sont nécessaires…”. Le prolapsus semble être dû à un défaut de suspension du fond vaginal et non de l’utérus, mais où ce dernier pourrait jouer un rôle physiopathologique gravitationnel. La conservation utérine lors d’une réparation chirurgicale voulant redonner une position et une anatomie physiologique correcte du dôme vaginal, pourrait apparaître alors comme une contrainte permanente du fait de la gravité et du poids de l’utérus lors de sa conservation. Cela est vraisemblablement un des premiers arguments importants qui plaident pour la pratique d’une hystérectomie systématique lors de la cure chirurgicale d’un prolapsus génital, mais non démontré à ce jour. En effet, une étude non randomisée comparant l’hystérectomie à l’hystéropexie par voie vaginale n’a pas montré de différence significative en termes de succès ou de récidive sur un suivi de six ans [32]. Ces mêmes résultats ressortent pour la voie haute après un suivi moyen de 51 mois dans une étude également non randomisée de Constantini et al. [33], même s’il semble exister une tendance non significative à la récidive de la cystocèle après conservation utérine (14,7 versus 2,6% après hystérectomie). Cependant, la méta-analyse de la Cochrane Database se fondant sur une seule étude randomisée comparant la promontofixation avec conservation utérine à la sacrospinofixation avec hystérectomie montre un avantage significatif à l’hystérectomie : davantage de récidive et davantage de réintervention dans le groupe conservation utérine [7, 34]. La prise en compte de cette seule étude randomisée sur un effectif réduit (41 patientes dans chaque groupe) représente un argument de faible poids statistique en faveur de l’hystérectomie, d’autant que la comparaison des deux groupes est fondée sur une technique chirurgicale différente. Deux études prospectives randomisées comparant hystérectomie totale versus hystérectomie subtotale pour pathologie utérine bénigne montrent à un an de suivi plus d’incontinence urinaire à l’effort dans le groupe hystérectomie subtotale (p = 0,043) [35] et une tendance non significative au prolapsus dans ce même groupe [36]. FAUT-IL REALISER UNE HYSTERECTOMIE LORS DE LA CURE DE PROLAPSUS ? L’évolution de la chirurgie du prolapsus au cours des dernières décennies, avec entre autres la diffusion des techniques coelioscopiques et l’utilisation de renfort prothétique par voie vaginale, a relancé le débat, et la question de l’hystérectomie ou de la conservation utérine est plus que jamais d’actualité, prenant en compte, outre les considérations techniques, des arguments économiques et des notions de qualité de vie. Tous ces éléments sont des arguments indirects en faveur du rôle gravitationnel que pourrait jouer l’utérus dans la statique pelvienne, mais à ce jour aucune étude ne montre réellement sa responsabilité dans le prolapsus imposant de façon indiscutable l’hystérectomie. En revanche, l’hystérectomie augmente significativement la morbidité peropératoire et postopératoire précoce. Comparativement à l’hystérectomie totale, l’hystérectomie subtotale réduit cette morbidité en diminuant la durée opératoire et l’importance du saignement peropératoire. On ne dispose pas aujourd’hui de travaux rigoureux, prospectifs et randomisés, susceptibles de prouver la supériorité de l’hystérectomie ou de la conservation utérine sur les résultats anatomiques à long terme quelle que soit la voie d’abord choisie. -19- Prolapsus génitaux chez la femme : voie haute ou voie basse ? prothèse ou non ? hystérectomie ou non ? B. Complications et difficultés opératoires ultérieures Y. EL HARRECH et coll. est de 0,005% [39]. Il semble donc que le seul argument d’une prévention du cancer sur col restant ne suffit pas à justifier la réalisation systématique d’une hystérectomie totale. Néanmoins, un suivi régulier doit être proposé à ces patientes et il faut s’attacher, en peropératoire, à limiter au maximum le reliquat de tissu endométrial endocervical. a. Exposition des matériaux L’exposition des matériaux est évaluée aux alentours de 8% en cas d’ouverture du vagin lors de l’hystérectomie totale associée à la promontofixation [37]. Ce type de complication ne semble pas exister lors de l’absence d’ouverture vaginale, comme c’est le cas dans la réalisation de l’hystérectomie subtotale. La série française du groupe TVM (groupe de 9 chirurgiens ayant participé à l’élaboration et à l’évaluation d’une technique de réparation par large treillis de Gynemesh®) a fait l’objet d’une communication au congrès de l’ICS (International Continence Society) de 2005 [38]. L’analyse rétrospective de 687 patientes réparties dans les neuf centres apporte quelques éléments de discussion : E. Avantages de la conservation utérine • Un antécédent d’hystérectomie chez la patiente majore le risque de complications peropératoires avec un odds ratio de 3,153. Au total, Les données actuelles disponibles ne suffisent pas à apporter une réponse tranchée à notre interrogation initiale. Aucun travail prospectif ne démontre la supériorité d’une tactique sur l’autre en termes de résultats sur la statique pelvienne. L’hystérectomie a une morbidité propre, elle allonge de façon significative la durée de l’intervention et expose à un risque de saignement peropératoire plus important. Elle augmente aussi le coût global de l’acte chirurgical : coût direct plus élevé, durée d’hospitalisation augmentée avec une reprise plus lente du transit intestinal, reprise d’activité plus tardive. • La conservation utérine réduit notablement le risque d’exposition prothétique avec un odds ratio calculé à 0,263. Si l’on exclut les pathologies utérines associées qui constituent des indications d’hystérectomie et le cas particulier de la femme jeune qui doit faire privilégier la conservation, quand peut-il être licite de préférer l’une ou l’autre de ces options ? La conservation utérine a donc un effet protecteur face aux risques d’exposition secondaire du treillis. b. Difficultés opératoires ultérieures A la lumière de ces constats et dans le respect des règles de bonne pratique, il paraît légitime, aujourd’hui [40] : Ces difficultés opératoires pourraient se rencontrer quand une hystérectomie s’impose chez des patientes ayant été traitées antérieurement par la pose de prothèse vaginale exclusive. La réintervention chez des patientes opérées et porteuses de matériels prothétiques est toujours un acte chirurgical complexe avec de nombreuses difficultés de dissection dans des zones antérieurement opérées, scléreuses et cicatricielles, entraînant une augmentation de la morbidité de l’acte chirurgical. • Au cours de la chirurgie du prolapsus par voie laparotomique ou coelioscopique, de recommander une hystérectomie subtotale qui allie les critères de sécurité en termes de tolérance prothétique et de prévention carcinologique endométriale. • Au cours de la chirurgie vaginale : - De préférer, en cas d’hystérocèle largement extériorisée, de col utérin très volumineux où siègent d’importants troubles trophiques, une hystérectomie totale. Si rien ne prouve que la réintroduction vaginale d’un utérus largement prolabé puisse obérer les résultats anatomiques, ces hystérectomies sont habituellement techniquement faciles, permettent l’annexectomie sans grande difficulté, suppriment le risque carcinologique et celui d’une réintervention secondaire pour pathologie utérine ou cervicale (y compris pour allongement secondaire du col). C. Résultats fonctionnels Deux séries prospectives, celle de Costantini et al. [33] pour la voie haute et celle de Hefni et al. [32] pour la voie basse n’ont trouvé aucune différence sur les résultats fonctionnels (digestifs, urinaires ou sexuels) selon que l’on conserve ou non l’utérus. D. Risque carcinologique - De privilégier, dans tous les autres cas, une conservation utérine en respectant les précautions d’usage. Reste le plus redouté. L’incidence annuelle du cancer de l’endomètre est estimée à 20/100 000. Les facteurs de risque sont bien connus (âge, obésité, hypertension artérielle [HTA], diabète) et peuvent être pris en considération au moment du choix tactique. CONCLUSION En cas d’hystérectomie subtotale, il existe un risque de cancer sur col restant. Le risque actuel dans les pays développés de présenter un cancer du col pour une femme monogame justifiant de trois frottis normaux L’évolution de la chirurgie du prolapsus au cours des dernières décennies, avec entre autres la diffusion des techniques coelioscopiques et l’utilisation de renfort -20- J Maroc Urol 2010 ; 18 : 15-23 11. Weber AM, Walters MD, Piedmonte MR, Ballard LA. Anterior colporrhaphy : a randomized trial of three surgical techniques. Am J Obstet Gynecol 2001 ; 185: 1299-304. prothétique par voie vaginale a relancé le débat sur la stratégie chirurgicale à adopter devant cette pathologie. Malgré la richesse de la littérature en publications, il n’existe pas à l’heure actuelle de consensus. Ceci est certainement la conséquence de la variabilité des indications traitées, des critères de jugement, des questionnaires, des implants utilisés et de l’absence d’études comparatives rigoureuses. Ceci souligne la nécessité de travaux prospectifs randomisés permettant d’apporter des réponses aux questions toujours en suspens. 12. Sand PK, Koduri S, Lobel RW, Winkler HA, Tomezsko J, Culligan PJ, Goldberg R. Prospective randomized trial of polyglactin 910 mesh to prevent recurrence of cystoceles and rectoceles. Am J Obstet Gynecol 2001; 184 : 1357-62. 13. Julian TM. The efficacy of Marlex mesh in the repair of severe, recurrent vaginal prolapse of the anterior midvaginal wall. Am J Obstet Gynecol 1996 ; 175: 1472-5. REFERENCES 1. 14. De Tayrac R, Gervaise A, Fernandez H. Cure de cystocèle voie basse par prothèse sous-vésicale libre. J Gynecol Obstet Biol Reprod 2002 ; 31 : 597-9. Prolapsus génital. In : Delcroix M, Guérin du Masgenet B, ed. Décision en gynécologie obstétrique. 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