- 1 - Institut Montaigne - Le G20, et après… - Mars 2009
Le G20, et après…
Document complémentaire du briefing paper de l’Institut Montaigne
« Reconstruire la finance pour relancer l’économie »,
Mars 2009
« There is not a lot of adult supervision out there »
Barack Obama, le 18 décembre 2008, à propos des marchés financiers
adult supervision » signifiant « contrôle parental »)
- 2 - Institut Montaigne - Le G20, et après… - Mars 2009
Première Partie : Favoriser la renaissance d’un capitalisme de
long terme
1. Pourquoi le court-termisme doit être combattu en priorité
2. Supprimer les bonus annuels dans la finance
3. Encourager les banques à financer le long terme
4. Abolir les pratiques comptables favorisant le court-termisme
5. Primer les actionnaires durables
6. Ralentir le rythme de publications des résultats financiers
Deuxième Partie : Pérenniser le financement des Etats
Souverains
1. Le besoin de financement urgent du FMI
2. La « Contribution Montaigne » : principe et mécanismes
3. La création d’un marché souverain des euro-émissions
Troisième Partie : Les grands débats du G20 et la position de
l’Institut Montaigne
1. Le système monétaire, source première des déséquilibres financiers
2. Résoudre la question des paradis fiscaux
3. Réorganiser le marché des produits dérivés
4. Organiser la traçabilité des produits financiers
5. Réguler les hedge funds et les prime brokers
6. Mieux sanctionner les agences de notation
7. Renforcer les moyens de régulation, à l’échelle nationale et au niveau
international
Contexte de nos propositions
- 3 - Institut Montaigne - Le G20, et après… - Mars 2009
D’un sommet de Londres à l’autre : de 2009 à 1933
Le 2 avril 2009, les chefs d’Etat des pays membres du G20 se réuniront à Londres pour
discuter et décider de mesures nécessaires à l’endiguement de la crise économique et
financière actuelle. Le contexte de ce sommet est à la fois dangereux, inattendu, et
propice aux réformes les plus ambitieuses.
Un contexte dangereux : la dislocation du système financier mondial s’accompagne
d’un effondrement de l’économie américaine, moteur de la croissance mondiale, du
retour des nationalismes et du protectionnisme économique, en réponse à la montée
rapide du chômage dans toutes les grandes économies du monde (particulièrement aux
Etats-Unis et en Chine). De nombreux pays anticipent ou redoutent des désordres sociaux
significatifs en 2009.
Un contexte inattendu : sans l’avoir voulu, et sans y être préparés en termes d’idéologie,
de compétences humaines, techniques ou juridiques, les pays du monde entier –Etats-
Unis en tête – sont actuellement obligés de reprendre en catastrophe les manettes de leurs
économies, et en premier lieu les activités de crédit.
Un contexte propice aux réformes les plus ambitieuses : la conscience partagée du
caractère violent, systémique et mondial de la crise, l’élection d’un nouveau président
américain porteur d’un mandat de changement, l’émergence d’un exécutif européen enfin
capable d’initiatives concertées (en dehors d’une Commission européenne absente ou à
contre-emploi, notamment sur les questions de concurrence), l’inclusion des pays
émergents dans la gouvernance mondiale, sont autant de promesses et d’attentes pour le
sommet du 2 avril.
Ces attentes sont telles que de nombreux observateurs comparent ce sommet à un
« Bretton Woods II ». Il est plus juste de comparer le prochain sommet de Londres
avec celui de juin 1933, quelques semaines après l’entrée en fonctions de Franklin
Delano Roosevelt à la présidence des Etats-Unis, en pleine Grande Dépression. Les
puissances européennes voulaient enfermer la conférence dans un agenda contraire aux
intérêts américains, M. Roosevelt boycotta la conférence, avec les conséquences que l’on
sait sur l’économie et la paix mondiales. Quelle que soit la responsabilité des Etats-Unis
dans la crise actuelle, ce risque doit être évité à tout prix.
Dans cette perspective, l’Institut Montaigne formule trois séries de propositions
spécifiques pouvant être soumises au G20, dans un esprit de concertation prenant en
compte les intérêts américains, première puissance économique mondiale et qui devrait le
rester longtemps. Les propositions ci-après succèdent aux mesures d’urgence que nous
préconisons dans le briefing paper1 de mars 2009, en particulier le moratoire sur les
pratiques de marché qui contribuent à l’aggravation de la crise. Elles s’inscrivent aussi
dans notre anticipation d’un programme coordonné, nécessaire et temporaire de
nationalisations des grandes institutions financières américaines et européennes.
1" Reconstruire la finance pour relancer l’économie, briefing paper, Institut Montaigne, mars 2009."
Contexte de nos propositions
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L’Institut Montaigne pour le G20
L’Institut Montaigne formule deux séries de recommandations qui lui sont propres :
1. Favoriser la renaissance d’un capitalisme de long terme
Afin de lutter contre le court-termisme d’acteurs financiers s’étant sensiblement éloignés
des rythmes, réalités et obligations de nos économies et de nos sociétés, l’Institut
Montaigne formule les propositions suivantes :
- Remettre à plat le système d’incitations financières des opérateurs de marché
- Réorienter les banques vers le long terme
- Abolir les pratiques comptables favorisant le court-termisme
- Favoriser les actionnaires durables plutôt que les actionnaires de passage
- Inciter à ne plus publier de résultats trimestriels pour les sociétés cotées
2. Pérenniser le financement des Etats souverains tout en réorganisant les marchés
dérivés
Dans un contexte de pénurie croissante des capitaux disponibles pour des pays en
développement durement touchés par la crise, le fonds de réserve du FMI (250 milliards
de dollars à ce jour) risque de se révéler rapidement insuffisant pour subvenir aux besoins
croissants des pays émergents. Pour combler cette insuffisance, l’Institut Montaigne
propose la création d’une contribution assise sur les transactions de produits dérivés, à
commencer par les Credit Default Swaps.
L’Institut Montaigne propose aussi la création d’un marché souverain des euro-émissions
afin d’apporter une réponse à la situation préoccupante du financement de la dette
souveraine des pays de l’Eurogroupe et des pays voisins de la zone euro.
3. Les grands débats du G20 et la position de l’Institut Montaigne
Au-delà de ces recommandations propres a l’Institut Montaigne, nous reprenons dans la
troisième partie de ce document les débats qui animent aujourd’hui les principaux think
tanks mobilisés autour du G20 et donnons notre propre position sur chacun des sujets
évoqués. Nous identifions sept domaines de discussion:
- La nécessité de repenser le système monétaire international, principale source des
dérèglements financiers depuis 1971
- La lutte contre les paradis fiscaux
- La réorganisation du marché des produits dérivés
- L’organisation de la traçabilité des produits financiers
- La régulation des hedge funds et des prime brokers
- La réforme des agences de notation
- Le renforcement des moyens de régulation à l’échelle nationale et internationale
I. Favoriser la renaissance d’un capitalisme de long terme
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1. Pourquoi le court-termisme doit être combattu en priorité
La crise actuelle est, à de nombreux égards, le produit d’un système financier qui repose
essentiellement sur des incitations et des financements de court terme, au détriment du
long terme.
Omniprésence du court-termisme
Une culture du court-termisme s’est logée dans tous les compartiments de la finance,
qu’il s’agisse :
du financement d’actifs de long terme par des instruments de court-terme (CMBS,
CDOs, actifs titrisés, et pots-pourris d’actifs) ;
des primes annuelles des banquiers d’affaires, traders, courtiers, etc., étrangers à
l’intérêt de leur entreprise et de leurs clients ;
des rendez-vous trimestriels imposés aux sociétés cotées ;
des méthodes de mark-to-market utilisées pour valoriser des actifs ayant vocation à
être détenus sur plusieurs années (portefeuilles immobiliers, private equity,
portefeuilles d’assurances) ;
de la courte vue des investisseurs institutionnels, pour qui l’horizon de long terme
semble s’arrêter chaque année le 31 décembre ;
de la durée moyenne de détention d’une action de société cotée, qui se comptait hier
en années, aujourd’hui en mois ou en semaines.
Or, autant la recherche du profit et du gain individuels sont légitimes et souhaitables pour
créer de la richesse collective, autant la captation de richesses la plus immédiate possible
nous paraît porteuse de danger pour la pérennité même du système.
Dopage
Le court-termisme incite, entre autres choses, les entreprises comme les investisseurs au
« dopage » de leurs performances. Ce dopage se traduit notamment par des stratégies et
des communications financières souvent agressives, parfois trompeuses, rarement
soucieuses de la stabilité du système.
L’Institut Montaigne recommande de saisir l’occasion de cette crise systémique pour
remettre à plat un grand nombre de ces pratiques court-termistes. Impensable dans un
univers stable et prospère, la remise en cause d’ « acquis » tels que les bonus annualisés
dans la finance de marché, les résultats trimestriels, les approches comptables en « mark-
to-market », les ratios prudentiels de Bâle II et de Solvabilité II, l’égalité de traitement
entre simples actionnaires de passage et vrais actionnaires durables dans les entreprises,
apparaît aujourd’hui nécessaire, possible, urgente.
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