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un degré moindre – la communication non verbale. Le premier problème de ces
personnes est d’accéder au « sens de la communication », de percevoir à quoi elle
sert. Ainsi Jim Sinclair
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, autiste de haut niveau, ayant accédé au langage, explique à
l’âge adulte « Je n’ai pas employé le langage afin de communiquer avant l’âge de
douze ans…Ce n’est pas parce que je n’en étais pas capable, mais simplement je ne
savais pas à quoi il servait. Pour apprendre à parler, il faut au préalable savoir
pourquoi on parle».
1a- La communication non verbale est donc altérée, et elle l’est sous ses deux
« versants ».
La compréhension de tout ce qui est non verbal est habituellement limitée. Déjà le
contact par le regard se fait très difficilement mais la personne autiste comprend
aussi très peu le sens du regard, celui du sourire et des expressions du visage, des
larmes (un enfant rit parce que c’est drôle de voir de l’eau couler sur les joues) ; mais
elle comprend difficilement aussi les gestes et seulement si ils sont très concrets
(c’est pourquoi la « langue des signes » des sourds, très complexe et pour une
grande part abstraite, ne peut être utilisée). Les repères visuels (objets, photos,
images) et le contexte peuvent être une aide précieuse dans la mesure où ils sont
visuels, concrets et stables. Les aspects non verbaux du langage, l’intonation et tous
ces signaux auxquels nous ne prêtons pas attention mais qui règlent l’échange ne
sont pas bien perçus non plus. Sean Baron
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évoque ses difficultés : « « Je me suis
rendu compte que les gens utilisaient la langue pour communiquer les uns avec les
autres. Mais je ne savais pas comment ils faisaient… Je ne comprenais pas les
signaux qui réglaient les discussions des gens…Je me sentais étranger aux autres,
tel un extraterrestre : je ne comprenais pas plus la communication entre les hommes
qu’une créature d’une autre planète… ».
Mais par ailleurs on s’aperçoit chez ces personnes que grâce à leur sensibilité
habituelle à tout ce qui est musical, la compréhension du langage peut être meilleure
lorsque l’intonation est accentuée, voire « chantée »
L’utilisation du non verbal est également altérée, mais elle peut en partie suppléer
à l’absence de langage, qu’il s’agisse du regard, de la mimique, des gestes, de sons
vocaux, ou plus facilement d’objets, images, etc. Mais bien souvent c’est le
comportement qui reste le seul moyen de se faire comprendre, avec tous les
malentendus que peuvent entraîner les gestes violents, les cris...
1b- La communication par le langage
Elle est encore plus touchée que le non verbal et cela sur ses deux « versants ».
La compréhension du langage oral est toujours altérée, mais de façon variable. Au
maximum il peut y avoir « surdité verbale » c’est-à-dire que le cerveau – en raison
d’anomalies touchant les régions et circuits concernés – ne reconnaît pas parmi tous
les sons perçus ceux qui appartiennent au langage. Au mieux une certaine
compréhension est préservée, mais elle reste toujours littérale (comme dans le stade
de « pensée concrète » évoqué par Anne), au « premier degré ». C’est l’enfant à qui
on demande « d’ essuyer ses pieds » sur le paillasson et qui retire donc ses
chaussures ; ou celui qui entend « la nuit va tomber » et se précipite pour ranger son
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Jim Sinclair « Don’t mourn for us » The Edmonds Institute 1993
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Judy Baron et Sean Baron « Moi l’Enfant Autiste » Ed. Plon 1993