Mackie, McCulloch et Pascal (1996) ont enregistré
les potentiels évoqués visuels chez des enfants
dyspraxiques pour évaluer l’intégrité du système
visuel et déterminer la présence de lésions neurolo-
giques susceptibles d’influencer les afférences
visuelles. Les résultats de cette étude n’ont pas
permis de mettre en évidence un problème de l’inté-
grité du système visuel afférent, et illustrent acces-
soirement la difficulté à mettre en évidence des
signes neurologiques discrets dans ce trouble de
coordination.
Par ailleurs, les troubles du traitement visuel
s’étendent également à l’attention sélective. Wilson,
Maruff et McKenzie (1997) ont testé des enfants
TAC pour l’orientation cachée (c’est-à-dire, non
observable par des mouvements de la tête ou des
yeux) à la tâche attentionnelle visuo-spatiale COVAT
développée par Posner (1980). Dans cette tâche, le
sujet garde les yeux fixés sur un point central et doit
répondre manuellement à l’apparition d’un stimulus
impératif périphérique horizontal. Au préalable, un
indice spatial dirige l’attention du sujet vers la locali-
sation périphérique où apparaîtra le stimulus (indice
valide), ou au contraire vers la localisation controla-
térale (indice non valide). Si l’intervalle temporel
indice-stimulus impératif est suffisamment court, les
temps de réponse sont plus rapides à la suite des
indices valides, démontrant une orientation cachée
de l’attention visuo-spatiale vers des régions spéci-
fiques du champ visuel. De plus, les études avec la
COVAT utilisent deux types d’indices spatiaux pour
diriger l’attention vers la localisation périphérique :
centraux symboliques (c’est-à-dire, une flèche poin-
tant dans la direction désirée) ou périphériques
(c’est-à-dire, un accroissement de la luminosité d’un
des deux cercles concentriques situés en périphé-
ries du stimulus central. Ces deux types d’indice
opèrent à travers des réseaux de traitement atten-
tionnels différents. Les indices périphériques déclen-
chent un mode d’orientation automatique et
exogène, tandis que les indices centraux symbo-
liques donnent lieu à un mode d’orientation contrôlé
ou endogène. Les résultats des études de Wilson et
Maruff (1999 ; Wilson
et al.
, 1997) montrent que les
enfants souffrant de troubles de la coordination sont
désavantagés par rapport aux enfants du groupe
contrôle uniquement lorsque des indices centraux
sont présentés. Cela suggère que les troubles de la
coordination puissent être associés à un déficit
d’attention contrôlée, et plus spécifiquement à une
difficulté à désengager volontairement l’attention
visuo-spatiale cachée (Posner, 1980). Notons
toutefois que ce déficit attentionnel n’est pas présent
chez tous les enfants présentant un trouble de la
coordination.
Schoemaker
et al.
(1998) ont administré à un
groupe d’enfants TAC des tâches de perception
visuelle, de perception tactile, et de pointage
manuel. Ils ne trouvent pas de déficit pour les tâches
visuelles perceptives dans lesquelles aucune
réponse motrice n’est demandée, à l’exception de
tâches de complètement visuel et de discrimination
de figures ayant subi une rotation. D’autre part, les
problèmes des enfants TAC sont plus prononcés
pour les tests visuo-moteurs impliquant la coordina-
tion œil-main et les relations spatiales, mais la
présence d’une large variabilité interindividuelle met
en doute la validité clinique de ces épreuves. Ces
résultats sont à contraster avec ceux plus récents de
Sigmundsson, Hansen et Talcott (2002) qui montrent
que des déficits pour des tâches de sensibilité
visuelle (c’est-à-dire, traitement global du mouve-
ment dans un ensemble de points au déplacement
aléatoire ou pseudo-aléatoire, traitement global de la
forme dans un ensemble de points randomisés ou
structurés), caractéristiques de certaines catégories
d’enfants dyslexiques, sont également caractéris-
tiques d’enfants diagnostiqués uniquement sur la
base de difficultés dyspraxiques. Ce dernier résultat
suggère que les enfants « maladroits » présentent,
outre des problèmes évidents de contrôle moteur,
des anormalités concomitantes de la sensibilité
visuelle tant pour le traitement de la forme que du
mouvement.
Par contre, les tests de vitesse visuo-motrice (par
exemple, marquer en temps limité le plus grand
nombre possible de larges cercles (diamètre 10 mm)
et de petits carrés (6*6 mm) sur une feuille qui
contient également des petits cercles et des grands
carrés) sont déficitaires de manière nettement plus
consistante (Schoemaker
et al.
, 2001), en accord
avec l’hypothèse d’un ralentissement du mouvement
dans le TAC. En outre, les enfants TAC semblent
avoir plus de difficultés que la normale à reconnaître
la forme d’un objet par la voie tactile lors de la mani-
pulation, et à positionner correctement cet objet
dans un tableau de formes. Ce résultat s’accorde
avec celui de Sigmundsson
et al.
(2003) qui obser-
vent que les troubles moteurs comportementaux des
enfants TAC sont associés à des déficits visuels
pour la détection de mouvements et de formes, ce
qu’ils interprètent comme un déficit de sensibilité
visuelle affectant simultanément les voies visuelles
corticales ventrale et dorsale (voir également
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LES TROUBLES DES PRAXIES