Domaines de recherches 1. Première lecture /Premières impressions 2. Analyser le paratexte : - titre de l’œuvre - nom de l’auteur - date de publication 3. La lecture « balayage - genre du texte - la forme et la mise en page du texte - la situation d’énonciation (Qui parle ? Qui écrit ? A qui ? De quoi ? Pourquoi ?) Exemples analysés Procédés : Registre, lexique, grammaire, figures de style, syntaxe Significations, Effets produits. Ionesco : théâtre de l’absurde Rhinocéros en 1957 Monologue réflexif même si les verbes d’action abondent. Récurrence du pronom « je », l’abondance des futurs (« aurai, pourrai, deviendront ») . Bérenger à lui-même. Didascalies (« Il va vers la glace », il Aucune marque du discours dialogué, contemple sa poitrine dans la glace ») fréquemment utilisé au sein d’un monologue : il n’y a aucun destinataire, même potentiel.( faillite de la parole présente dans toute la pièce). Bérenger réfléchit à son avenir. La forme est atypique. Le dénouement, puisqu’il est l’ultime image que reçoit le spectateur, doit marquer les esprits. Il doit être dynamique et spectaculaire. Or le monologue est une forme théâtrale statique. Le recours au monologue est justifié par l’évolution du drame qui a conduit à la métamorphose progressive de tous les personnages. Bérenger est le dernier homme, il n’a plus d’interlocuteur. Un accessoire souligne cette situation (« la glace ») : Bérenger se parle de fait à lui-même. Disposition spécifique du discours théâtral qui confère au public une place particulière et problématique : est-il l'ultime destinataire de la parole de Bérenger (et de Ionesco), selon le jeu de la double énonciation, ou est-il inclus, par une sorte de manoeuvre provocante et déstabilisante du dramaturge, dans cet espace rhinocérique qui encercle Bérenger ? En effet, celui-ci n'est pas exactement seul sur scène : il est cerné par les rhinocéros, figurés par les têtes accrochées au mur et dont la présence est accentuée par les barrissements. D'ailleurs, à la fin du monologue, Bérenger semble s'adresser à ces rhinocéros, dans une forme de défi final : « Il se retourne face au mur du fond [...] tout en criant ». Le ou les thèmes du texte - le(s) registre(s) dominant(s) La solitude de Bérenger Bérenger et les autres La tentation de la métamorphose La volonté de résister . Des monstres peuplent l’atmosphère théâtrale. Bérenger aspire à devenir une bête. Fantastique (thème de la métamorphose) Comique Onomatopées : « aah, ahh, brr » Tragique - la visée globale du texte Un dénouement ouvert. Scène de dénouement qui ne remplit pas sa fonction traditionnelle. Il ne résout pas l’intrigue. Ici tout reste en suspens. Barrissements maladroits de Bérenger , les rhinocéros, emblème de la beauté. Bérenger, héros solitaire qui lutte contre un destin qui cherche à la broyer .Mais au contraire du héros tragique, il ne se résigne pas. Didascalies : « brusque sursaut » et Nulle mort ou retrouvailles « se tourne face au mur où sont fixées les têtes » Futurs : « je me défendrai »l.38, « je le resterai »l.38, « je suis le dernier homme »l.38 Présent : (« je ne capitule pas ») Problématique : qu’est-ce qui fait de ce monologue une scène originale improbables dans ce dénouement, nulle métamorphose de Bérenger mais une délibération angoissée. Cependant le dénouement reste ouvert. Ce monologue ne consacre pas le triomphe de Bérenger et de l'humanité ; l'issue paraît être fatale : « jusqu'au bout » (c'est-à-dire peut-être jusqu'à la mort), même si le futur (« je le resterai ») laisse une petite place à l'espoir. La faillite de l'humanité n'est pas non plus ici totale ; malgré lui, Bérenger dit son sens inné de l'humain et en proclame la dignité. Domaines de recherches thèmes Procédés : Registre, lexique, grammaire, figures de style, syntaxe Significations, Effets produits. La solitude radicale et tragique de Bérenger A travers le monologue Bérenger et les autres Laideur physique de Bérenger qui s’oppose à la beauté des autres Champ lexical de la laideur : « pas beau, laid, traits tombants, corps trop Bérenger , anti-héros, caractérisé par sa médiocrité blanc, peau flasque, manque de vigueur » qui s’oppose au champ lexical de la beauté qui caractérise les autres : « très belles, beau, magnifique couleur, nudité décente ». Le contraste entre la beauté et la laideur est développé à travers les oppositions de formes (« corne », « Front plat » et « traits tombants »), de texture (« moites », « rugueuses » / « flasque », « dure » / « sans poils », « poilu ») ou de couleur (« trop blanc », « magnifique couleur vert sombre »). Un éloge des rhinocéros. Les barrissements apparaissent comme des « chants » opposés à la faiblesse de sa propre voix, humaine On aboutit dès lors à un éloge des rhinocéros qui révèle que la solitude et la différence, c'est-à-dire le simple fait d'être soi, sont difficiles à porter, à assumer. Solitude de Bérenger contre tous Bérenger se considère comme un monstre, se compare aux rhinocéros. Laideur morale Le sentiment de honte Opposition du singulier et du pluriel : « je » et « eux » ; « je » et « tout le monde » Solitude de Bérenger contre tous Comme Bérenger est le dernier de son espèce il est devenu « l’anormal » alors que les rhinocéros constituent la Déplacement de la norme norme de référence. Modalités négatives et interrogatives : « deviendront-elles rugueuses ? /ça ne pousse pas ». Verbe « pouvoir » utilisé à la forme négative (« je ne peux plus ») et le modalisateur « vouloir » au conditionnel (« voudrais »). « j’ai trop honte », « comme j’ai mauvaise conscience », « j’ai eu tort » Ponctuation expressive : phrases exclamatives, interjection « Hélas », « ah », répétitions désespérées ( « jamais, jamais ») Bérenger est un être impuissant incapable de réaliser sa volonté. Il ne peut qu’interroger son corps à défaut de le changer. Le désir de Bérenger ne parvient jamais à se réaliser. Le monologue exprime la douleur de Bérenger, qui est d’abord douleur d’être luimême. La tentation de la métamorphose Volonté de conformisme de Bérenger : devenir rhinocéros Le souhait de la métamorphose Ceci confère à la scène une véritable s'exprime fortement dans ce final : dimension de farce tragique. répétition du verbe vouloir au conditionnel « je voudrais » + propositions introduites par « comme » ou par « si ». De même, les formules comparatives révèlent le désir de devenir rhinocéros : « être comme eux » « faire comme eux » . Enfin, Bérenger tente d'adopter le barrissement (« il essaie de les imiter « ahh ! ahh ! brr ») Son discours évolue le début du passage reste empreint d'un espoir de changement « ça viendra peut-être », puis après la tentative de barrissement, c'est le constat d'échec : « je ne deviendrai jamais rhinocéros ».Bérenger ne parvient pas en effet à se transformer en rhinocéros. Le monologue multiplie aussi les aveux directs d'impuissance Abondance des phrases négatives : « non, ce n'est pas ça », « je n'arrive pas à » , « je ne peux plus » , « je ne peux pas ». Le caractère définitif de cette impossibilité à être rhinocéros est enfin souligné par les adverbes « jamais », « plus » « trop tard ». Bérenger, une nouvelle figure héroïque ? Si Bérenger reste homme, c'est d'abord non par héroïsme, mais « Malheur à celui qui veut conserver par impossibilité profonde de son originalité » céder au « charme » (au sens d'envoûtement) des barrissements et de suivre les autres. Bérenger sort dans ses derniers mots de sa léthargie et de ses tentations de céder à la rhinocérite. Ce changement apparaît dans la gestuelle du personnage qui « a un brusque sursaut »et « se tourne face au mur où sont fixées les têtes » . De même, le futur et les phrases affirmatives semblent marquer le temps de l'engagement « je ne capitule pas » ,« je me défendrai, je suis, je resterai » . La seule phrase négative devient ici expression, non pas de son impuissance mais d'une position revendiquée (« je ne capitule pas »), qui annonce le passage à l'action (« ma carabine, ma carabine »). Modalité affirmative : « je me L'attitude de Bérenger ne relève pas du simple anticonformisme. Ce serait plus amoindrir la portée de la pièce qui est, il faut le rappeler ici, une représentation de tous les totalitarismes, et notamment des idéologies nazies (ainsi, le culte du corps et de la force dans le monologue est une allusion claire à l'idéologie nazie). Sans doute faut-il alors comprendre le mot « originalité » non pas au sens d'anticonformisme, mais au sens premier de celui qui conserve ce qu'il est « à l'origine », c'est-àdire ici son humanité. II y a donc bien une progression de la figure de Bérenger qui assume une forme de résistance parce qu'il n'a d'autre choix que d'être un homme. Ces dernières répliques constituent un renversement ultime de situation et renvoient les rhinocéros à leur monstruosité réelle Bérenger sort dans ses derniers mots de sa léthargie et de ses tentations de céder à la rhinocérite ). Certes, Bérenger décide in fine de résister et la modalité affirmative vient supplanter les abondantes négations initiales .Mais cette décision semble fragile. En effet peu de temps avant le personnage martelait sa volonté de conformisme. En « un brusque sursaut, il fait volte-face ». Plus de réponse ce dénouement Etude du mélange des registres Fantastique Bérenger aspire à devenir une bête « à la peau dure ». Motif de la difformité . La scène recèle d’éléments propres à l’atmosphère fantastique : des monstres peuplent l’atmosphère théâtrale. Le désir d’animalisation du personnage se lit également dans défendrai, je suis, je resterai » apporte donc des interrogations : Bérenger tiendra-t-il face aux autres ? Réussira-t-il à affirmer sa différence ? Les habitants de la ville se sont transformés en rhinocéros, dont Bérenger écoute les « barrissements ». Bérenger aspire à leur ressembler : thème de la métamorphose, motif de la littérature fantastique. Verbes « pousser », « devenir » ainsi que le lexique du corps (« paumes, mains, peau, corps, poils, nudité »). Désir de changement corporel. Le verbe « barrir » cherche à supplanter le verbe « hurler ». l’évocation de la parole. Comique Tragique Les gestes de Bérenger « Il jette par terre avec fureur les tableaux. » Gestes instinctifs d’un animal, gestes non commandés par la raison. Comique de mots : barrissements maladroits de Bérenger Onomatopées : aah, ahh, brr Bérenger transformé en un rhinocéros balbutiant. Comique de situation : les normes esthétiques sont inversées. Didascalie initiale : « vieillard, grosse femme ». Bérenger a « les mains moites, le corps poilu » qui ne correspond pas à la beauté plastique et parfaite des rhinocéros. Opposition : moiteur /ruguosité ; peau flasque/peau dure/blanc ; vert ; pilosité excessive/ nudité sans poils. Rhinocéros= emblème de la beauté et de la grâce. Cette inversion des valeurs esthétiques prêtes à rire car elle surprend et déroute le spectateur, qui voit Bérenger s’enfermer dans un rêve absurde et insensé. Le personnage de Bérenger revêt une dimension tragique. Héros solitaire, il lutte contre un destin qui semble le broyer. C’est le conformisme qui le menace. Interjection « oh ! » et intensif « comme » soulignent l’admiration fascinée que ressent le protagoniste pour ces rhinocéros si différents de lui. Mais l’interjection déplorative « hélas » + le conditionnel « voudrais » qui exprime l’irréel font entendre le désespoir de Bérenger. Bérenger vit sa différence comme une souffrance. Cependant , tel un héros tragique, il ne se résigne pas. Les ultimes paroles L’adjectif « brusque » dit la soudaineté de cette révolte. Bérenger, héros conquérant, prêt à mourir pour défendre sa différence. de la pièce montrent ce ressaisissement spectaculaire du héros. Didascalie « tout en criant » Lexique du combat : « carabine, défendrai, capitule » Le pronom « je « résonne cinq fois dans les ultimes paroles de Bérenger. Le lexique dit sa détermination à agir, à résister. Cri de révolte.