angio-technique Angio-Technique L’exploration ultrasonore du rein J. Lajou *, M. Thiollet * Anatomie topographique L L’examen, réalisé en temps réel avec une sonde de 3,5 ou 5 MHz, est d’abord effectué en décubitus dorsal puis en décubitus semi-latéral ou complet avec surélévation du bras. Ces voies d’abord latérales sont utiles pour obtenir des coupes bivalves (ou coupes coronales). Les reins doivent être complètement explorés par des coupes longitudinales et transversales. La voie postérieure en procubitus ou sur un sujet assis sur le plan d’examen, courbé en avant, est également possible lorsque les conditions d’exploration sont difficiles : superpositions digestives, absence de fenêtre acoustique, patient obèse. Le pôle supérieur du rein est souvent mieux visualisé lors de l’inspiration profonde. D’une façon générale, le rein droit est bien visible par voie antérieure chez un sujet en décubitus dorsal et en prenant alors le foie comme fenêtre acoustique ou par les coupes passant par le flanc droit. L’étude du rein gauche est en revanche plus difficile, nécessite une voie d’abord latérale et il est souvent utile d’utiliser la rate comme fenêtre acoustique. L’étude des flux intraparenchymateux requière une bonne coopération du patient qui doit pouvoir maintenir une apnée suffisamment longue pour permettre un enregistrement correct des flux. ’exploration des artères ou des veines rénales par l’examen Doppler n’est plus concevable aujourd’hui sans l’étude conjointe du parenchyme rénal et de sa vascularisation. Les renseignements fournis par cet examen, qu’il s’intègre dans le cadre du bilan d’une hypertension artérielle ou d’une insuffisance rénale rapidement progressive, sont en effet souvent plus contributifs que les données du simple Doppler. À titre d’exemple, il est fréquent, notamment chez le sujet âgé, de retrouver des arguments en faveur d’une néphropathie lors d’un examen initialement motivé par la recherche d’une sténose des artères rénales. Les reins sont facilement accessibles à l’examen ultrasonore et quelques principes simples régissent leur exploration. Les reins sont des organes pairs, rétropéritonéaux, appliqués sur la paroi abdominale postérieure en regard des fosses lombaires en avant des muscles psoas et carrés des lombes. Leur axe longitudinal est oblique de haut en bas et de dedans en dehors. Les deux faces convexes, l’une antérieure et l’autre postérieure, le bord externe convexe et le bord interne échancré au niveau du hile donnent aux reins une forme globalement ovoïde, comparable à celle d’un haricot. Le rein droit est en rapport en avant avec le foie situé en haut et la deuxième portion du duodénum qui croise la face antérieure du pédicule rénal. L’angle colique droit répond au pôle inférieur du rein. Le foie et le rein sont séparés par un repli péritonéal formant un cul-de-sac constituant l’espace de Morisson ou recessus hépato-rénal. Le rein gauche, plus haut que le droit, est habituellement situé entre la onzième côte et la seconde vertèbre lombaire. Sa face postérieure répond surtout au diaphragme et à la plèvre pariétale alors que sa face * Service de médecine interne, hôpital PitiéSalpêtrière, Paris. ** Association hospitalière “Les Cheminots”, Service de médecine,Draveil. antérieure est en rapport avec l’estomac dont il est séparé par l’arrière cavité des épiploons, la queue du pancréas au niveau du hile et l’angle colique gauche en bas. La rate est en haut et en dedans. En arrière, les deux reins s’appliquent en haut sur le diaphragme et en bas sur la paroi lombaire. Les surrénales coiffent les reins en haut, en dedans et en avant. Au niveau du hile on trouve d’avant en arrière la veine, l’artère puis l’uretère situé dans un plan plus postérieur et descendant en avant du muscle psoas dans le rétropéritoine. Technique d’examen Le jeûne n’est habituellement pas nécessaire pour l’exploration des reins. Une préparation digestive débutée 24 à 48 heures avant l’examen (régime sans résidu destiné à limiter le météorisme abdominal ; patient à jeun depuis six heures) est cependant préférable pour l’étude couplée des artères et des veines rénales. 215 Résultats normaux La taille des reins varie en fonction de la morphologie du sujet et de son état d’hydratation (10 x 4 cm en moyenne). Le dia- angio-technique Angio-Technique mètre longitudinal est compris entre 9,5 et 12 cm (figure 1) et son diamètre transversal entre 3,5 et 6 cm (figure 2). L’épaisseur moyenne du parenchyme périphérique est de 1,5 cm (1 à 2 cm) mais celle-ci peut atteindre 3 cm en regard de la rate (bosselure splénique du rein qui lui donne une forme triangulaire : rein dromadaire) (figure 3). À l’inverse, il est fréquent d’observer une diminution physiologique de l’épaisseur du parenchyme, inférieure ou égale à 1 cm, chez les sujets âgés. La différence de taille entre les deux reins ne doit pas excéder 1,5 cm. calices correspond à la persistance des lobulations fœtales si l’échostructure du parenchyme est par ailleurs normale. Sinon, il peut s’agir d’une hypoplasie rénale secondaire d’origine vasculaire ou infectieuse ; le petit rein d’origine congénitale restant bien proportionné, harmonieux. Enfin, le rein en fer à cheval est facilement reconnu grâce au pont fibreux ou de parenchyme fonctionnel unissant les deux pôles inférieurs. Figure 3 : Rein gauche “dromadaire”. parfois distinguées des colonnes de Bertin chez les sujets minces. La stéatose hépatique en accentuant l’échogénicité du foie majore le gradient hépatorénal (figure 4). La région centrale hyperéchogène, ou sinus du rein, est faite de tissu adipeux et de tissu conjonctif au sein duquel on retrouve le bassinet anéchogène ainsi que les structures vasculaires facilement reconnues par le codage couleur du signal Doppler. Au niveau du hile, les uretères ne sont visibles que s’ils sont dilatés. Figure 1 : Rein normal, coupe longitudinale. Figure 4 : Rein normal. L’échogénicité normale du cortex est en fait artificiellement atténuée par rapport à celle du parenchyme hépatique rendu hyperéchogène par la stéatose. Act. Méd. Int. - Angiologie (16) n° 3, mars 2000 L’agénésie rénale unilatérale est difficile à affirmer et bien souvent il est nécessaire de compléter l’échographie par l’urographie intraveineuse ou la tomodensitométrie pour éliminer une ectopie pelvienne surtout, mais aussi sous-diaphragmatique ou lombaire. L’examen controlatéral permet d’éliminer un rein double sigmoïde ou retrouve l’hypertrophie compensatrice d’une agénésie ou d’une hypotrophie rénale. Principales pathologies L’échogénicité du parenchyme rénal périphérique (cortex) est homogène, un peu inférieure à celle du foie (figures 1 et 2). Au sein de celui-ci, les pyramides de la médullaire apparaissent moins échogènes, de forme arrondie ou conique et peuvent être Figure 2 : Rein normal, coupe transversale. Variantes anatomiques Les contours du rein sont habituellement réguliers et entourés par la graisse périrénale très échogène et homogène. La présence d’encoches corticales sur le bord externe du rein se projetant entre les 216 On distingue schématiquement les masses liquidiennes (anéchogènes) et les masses solides (échogènes) mais toute masse anéchogène ne correspond pas obligatoirement à un kyste simple. À l’inverse, toute masse échogène n’est pas toujours solide. On estime à 0,6 % dans une consultation non spécialisée l’incidence des masses rénales échogènes. Masses liquidiennes Les masses liquidiennes bénignes du rein correspondent à une lésion parenchymateuse non tumorale dont l’enveloppe, fine et tapissée d’un épithélium, renferme un contenu purement liquidien. Le kyste simple présente les quatre critères échographiques suivants : formation arrondie, anéchogène, homogène ; renforcement angio-technique Angio-Technique postérieur des échos ; contours réguliers et bien définis ; paroi fine, non visible (inférieure à 1 millimètre). Le doppler couleur permet d’affirmer le caractère avasculaire du kyste. Tout kyste ne répondant pas à ces quatre critères est dit atypique et doit être considéré comme suspect et faire pratiquer un scanner. Le kyste atypique est uni ou multiloculaire, contient des échos internes, présente une paroi individualisable ou des cloisons épaisses, calcifiées, avec ou sans végétation. Il faut néanmoins connaître les pièges classiques : artefact de répétition à l’origine de fausses images de cloison intrakystique ; artefact de bord avec aspect de faux échos internes ; absence de renforcement postérieur pour les petits kystes de moins de quatre millimètres de diamètre ; différenciation parfois très difficile avec les pyramides de Malpighi qui peuvent être très hypoéchogènes. Enfin, le volumineux kyste à développement exorénal constitue un piège topographique classique du fait d’une zone de connexion rénale parfois punctiforme difficile à mettre en évidence. Masses liquidiennes bénignes Le kyste cortical simple est très fréquent et correspond à une formation anéchogène liquidienne entraînant un renforcement postérieur des échos (figure 5). De contours nets mais sans paroi individualisable ou parfois constitués d’une paroi très fine et régulière, ces kystes sont uniques ou multiples et ne nécessitent généralement aucune exploration complémentaire. Les autres formations kystiques ont une localisation pararénale ou parapyélique et doivent être différenciées dans ce dernier cas de l’hydronéphrose (figure 6). La dysplasie multikystique unilatérale ou la polykystose rénale bilatérale sont plus rares et présentent un aspect caractéristique (figure 7). Enfin, il est fréquent d’observer une polykystose rénale acquise chez l’hémodyalisé (un tiers des cas). telles que le cancer kystique d’architecture multiloculaire, le cancer nécrosé pseudokystique ou le néphrome kystique multiloculaire qui présente un potentiel de malignité (20 % des cas). Masse solide Figure 5 : Kyste cortical polaire inférieur. Figure 8 : Adénocarcinome à développement hilaire. Figure 6 : Hydronéphrose rénale. Figure 7 : Polykystose rénale. Masses liquidiennes suspectes Le bilan des kystes atypiques est fait par le scanner. Certains kystes peuvent présenter des remaniements à la suite d’hémorragies intrakystiques ou d’infections mais on trouve également parmi ces masses suspectes d’authentiques tumeurs 217 Les tumeurs malignes du rein, qui représentent 90 % des formations solides, sont en revanche le plus souvent isoéchogènes, hypoéchogènes, hyperéchogènes ou rarement hétérogènes et sont à l’origine d’un syndrome de masse et de l’infiltration de la graisse péri-rénale en cas d’envahissement de la capsule (figures 8). Leurs caractéristiques ultrasonores justifient l’aphorisme suivant : toute tumeur solide d’un rein est un cancer jusqu’à preuve du contraire. Il s’agit d’un adénocarcinome trois fois sur quatre. Un piège classique est constitué par l’hypertrophie rénale compensatrice dun rein controlatéral non fonctionnel et par l’hypertrophie dune colonne de Bertin. Une fois ces pièges écartés, c’est le scanner qui permettra de trancher en fonction du caractère vascularisé ou non de la masse entre un authentique cancer, un kyste atypique dense, une tumeur bénigne (adénome ou fibrome), un angiomyolipome ou une masse inflammatoire focale (abcès, néphrite, pyélonéphrite xanthogranulomateuse focale). L’angiomyolipome est la tumeur bénigne la plus fréquente du rein et s’observe prin- angio-technique Angio-Technique mais qui présente parfois des atypies (masse hypoéchogène, hétérogène). Grâce au codage couleur, l’échographie permet enfin de mettre en évidence l’extension d’une tumeur rénale à la veine rénale voire à la veine cave inférieure. Figure 9 : Masse solide discrètement hyperéchogène, homogène et à contours nets évoquant un angiomyolipome. cipalement chez la femme (figure 9). Il s’agit le plus souvent d’une masse solide hyperéchogène, homogène, bien délimitée Processus inflammatoires La plupart des lésions diffuses du parenchyme rénal susceptibles d’entraîner une hypertension artérielle n’ont pas de caractère spécifique en échographie et seule la biopsie rénale permet de porter un diagnostic de certitude. Les processus parenchymateux diffus inflammatoires aigus induisent parfois une augmentation de taille homogène du POURQUOI VOUS ABONNER ? parenchyme rénal. Le rein conserve cependant souvent une taille normale à ce stade pour ne devenir hypotrophique qu’aux stades chroniques de la maladie. L’échogénicité du rein augmente habituellement et s’associe alors à une dédifférenciation corticomédullaire mais, dans certains processus aigus, le cortex rénal devient franchement hypoéchogène par rapport au parenchyme hépatique. Une image de tonalité calcique avec ombre acoustique évoquera une lithiase rénale. Enfin, l’hypotrophie rénale congénitale ou dorigine vasculaire conserve habituellement des contours réguliers alors que le petit rein secondaire à une pyélonéphrite chronique est irrégulier. ➭ Et aujourd’hui... Parce que votre abonnement nous engage : ◆ à être plus indépendants ◆ à être plus performants ◆ à être plus innovants Parce que notre revue est engagée depuis toujours dans la FMC* : ◆ comité de lecture permanent ◆ rubriques : mises au point, fiche, revue de presse, image… ◆ “cahier FMC” numéro thématique ◆ diaporamas - réunions régionales ◆ charte du rédactionnel du Syndicat National de la Presse Médicale et des professions de Santé ◆ mise en place d’une grille d’auto-évaluation ◆ Site Internet : http://www.edimark.fr – Base de données de tous les articles indexés avec moteur de recherche – un e-mail offert ([email protected]) – l’actualité en ligne des grands congrès de chaque spécialité * Pour votre information, les critères d’accréditation n’ont pas été publiés au J.O. 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