1. Questionnement et question de recherche
1.1. Situation d'appel
Dans l’hôpital de jour oncologique (HDJ), une patiente (que l'on nommera Madame A
dans une volonté d'anonymat) de 30 ans, mariée et maman de deux enfants est admise pour
traitement de chimiothérapie adjuvante à la suite d'un diagnostic de cancer du sein.
Madame A est d'abord reçue par l'oncologue pour l'entretien pré-chimio, puis je
l'accompagne dans un salon composé de 6 fauteuils, et l'invite à s'installer. Cette après-midi
là, il y avait déjà deux patientes qui recevaient leur chimiothérapie. Ces rencontres peuvent
aider certaines femmes à mieux appréhender le vécu de la maladie, ou bien confronter des
vécus différents et amener des affects douloureux.
Après quelques minutes, je réalise "l'entretien d'intercure", et utilise les transmissions
ciblées comme support de traçabilité. Sur le plan psychologique Madame A présente une
image corporelle perturbée suite à la chirurgie et aux effets indésirables de la chimiothérapie.
Fatiguée, elle a l'impression de ne plus assumer son rôle de mère et d'épouse, en se
déchargeant sur son mari. De plus, Madame A, a due arrêter son travail suite au cancer. Cette
rupture a entraîné une perte de contact avec ses amis, et aujourd'hui une baisse de l'estime de
soi et un sentiment d'inutilité sociale. D'autre part, les effets indésirables de la chimiothérapie
qu'elle perçoit sont nombreux : les nausées sont fréquentes et perturbent ses habitudes
alimentaires, les réactions cutanées des corticoïdes sont notables (rougeur, sensation de
brûlure). Autre résultante, la perte de ses cheveux (alopécie) la désole, et l'endeuille. Madame
A ne se reconnaît plus en tant que femme, et porte aujourd'hui une prothèse capillaire. Au delà
de ses propres souffrances, de ses douleurs, c'est une pathologie qui touche ses interactions
avec son entourage.
J'ai de ce fait été surpris face à ces mots et interpellé professionnellement. Je n'avais
jamais rencontré cette patiente et le dossier de soins ne comporté que très peu d'informations
sur son état de santé. J'ai alors essayé d’être le plus attentif à ses inquiétudes afin d’offrir un
espace d’écoute et de reformulation dans l’espoir d’accompagner, de la façon la plus juste
possible, la patiente dans les épreuves qu’elle traversée à ce moment (baisse de l'estime de
soi, regard des autres vécu difficilement, modifications socio-familiale,...).
Cependant cela m'interroge, comment se fait t-il qu'une patiente suivi régulièrement
pour ses chimiothérapies verbalise un vécu aussi difficile du traitement ? Quel peut-être le
rôle de l'infirmière (IDE) dans l'acceptation de l'image de soi chez une femme lors d'une
chimiothérapie adjuvante ?