considérations qui vont suivre. 3
En 2004-2005, Jacques Bouveresse a donné au Collège de France un séminaire sur « la
littérature, la connaissance et la philosophie morale », dont il a publié de larges extraits en
2008 sous le titre « La connaissance de l’écrivain - Sur la littérature, la vérité & la vie ». Ce
dois-je le confesser, déraisonnablement sensible aux titres). En passant de la conférence au
glisse de la « littérature » « écrivain », de la « connaissance » à la « vérité », et de la
« philosophie morale » à la « vie »
ces travaux est son ambivalence : cette « Connaissance de l’écrivain » pouvait aussi bien
annoncer une étude sociologique sur la condition du littér
plus
particulièrement le romancier. La détestation bien connue de Jacques Bouveresse pour ce
l’illusion textualiste corde avec Jose Guilherme
Merquior4 « obsédés textuels
prendre à rêver, comme il nous arrive de le faire à la lecture des circonstances qui
« Quand le sage montre la lune, l'imbécile regarde le doigt », dit un proverbe fameux. Je
pense pour ma part que l'imbécile est en cela le plus sage des deux. Car il n'est nul besoin
d'un doigt pointé pour voir la lune, qui se voit comme le nez du clown au milieu de sa figure.
Rien n'est donc étrange et intéressant comme ce doigt pointé pour rien sur la lune. Le doigt
pointé dit beaucoup de choses sur celui qui le pointe, tandis que la lune ne dit rien d'elle-
par les apparences. Désignez-moi une évidence, je vous regarderai le doigt.
Le dramaturge est comme ce clown qui cherche dans la lumière (de la piste) ce qu'il a perdu
pense avoir perdu, mais dont il
ne sait rien. Il est très peu probable que cette chose (cet état, ou ces êtres) ait été perdue
3 Je tire pour ma part grand bénéfice de telles prises de champ par rapport au plateau et à
la salle de théâtre. Les gens de théâtre - dont je suis - cèdent aisément au « bavardage de
sacristie sur la mission de l’artiste » raillé par Musil. À écouter nombre d’entre nous dire tout le
bien qu’ils pensent de leurs propres ouvrages, on pourrait légitimement s’étonner de ce que le
monde ne soit pas, depuis longtemps, plus vivable qu’il n’est…
4 « From Prague to Paris. A critique of Structuralist and Post-structuralist Thought », Verso,
Londres-New York, 1986. Cité et traduit par J. Bouveresse, « La connaissance de l’écrivain »,
Éditions Agone, 2008