Hommages, souvenirs et remerciements
Quand Paul Pélissier est décédé au printemps 2010, j’ai vu défiler quelques moments de ma
vie de chercheur. J’ai repensé à sa proposition, en juillet 1984, de m’attribuer une bourse de thèse
à la condition qu’un autre candidat qu’il soutenait obtienne le CAPES et me laisse la place
vacante. Le jour des résultats, j’étais devant le ministère de l’Education nationale, à Paris, pour
vérifier que cette personne était bien reçue. Deux ans plus tard, il m’a fait venir dans son bureau et
m’a annoncé qu’il avait trouvé quelques fonds pour financer une de mes missions au Sénégal,
histoire que je reprenne mes enquêtes en pays sereer. Le jour de la soutenance, en janvier 1988,
cet homme qui m’impressionnait, surtout quand il gardait ses lunettes de soleil durant la dizaine
d’entrevues que j’ai eues avec lui, est arrivé en retard. Cela ne l’a pas empêché de défendre
ardemment mon projet et de me « tendre quelques perches » quand j’hésitais. Je le revois, lors du
pot de remerciement, discuter avec mon père, soulagé pour moi et déjà ailleurs. Je ne l’ai jamais
recroisé ou, peut-être, une ou deux fois, à l’Institut de géographie. Néanmoins, tous les deux ans
environ, nous échangions des mots, des lettres, des cartes postales, à l’occasion des vœux, de la
naissance de mes filles, d’un voyage au Sénégal. Un de ses billets, en 2000, m’annonçait qu’il
était à Saint-Louis pour un colloque. En 2008, il me répondait qu’il avait parcouru avec intérêt
l’ouvrage que j’avais coédité sur la mondialisation. C’était un grand monsieur, qui va manquer à la
géographie africaine comme il manque déjà aux analyses sur le monde rural sénégalais, cet
univers qu’il a parcouru dès les années 1950 et qui demeure un peu oublié aujourd’hui.
Si je pense à Paul Pélissier avec lequel j’ai dialogué durant 25 ans, je place à ses côtés Joseph
Diatte, l’infatigable compagnon des enquêtes menées dans le Sénégal rural, celui qui m’a initié à
la compréhension de la société sereer, à sa géographie, celui qui a attendu avec moi dans la nuit
de Fatick les camions des transporteurs que nous voulions interroger, celui qui demandait chaque
jour à son épouse de préparer un repas de midi pour notre retour, même si nous arrivions à dix-
sept heures, celui qui est retourné en 2004 aux Terres neuves, dans l’est du pays, là où il avait
officié dans les années 1970 à l’installation des colons et qui, devant moi, n’a plus reconnu cette
terre défigurée par les charbonniers et brisée par la faillite de l’économie arachidière. Il est décédé
un soir de novembre 2005 et a emporté nos souvenirs communs. Avec lui, je pourrais mentionner
Emilie Ndiaye, Takhy Diop, Ernest Faye, Emile Ndiaye, Michel Ndiaye, Antoine Ndour, Oumar Sall,
tous compagnons de fortune à l’ORSTOM et à l’IRD, qui m’ont aidé, conseillé, disputé, soigné.
Les collègues de l’époque, les hôtes, les amis, Chantal Blanc-Pamard, Charles Becker,
Jacques Faye, André Lericollais, Jean-François Werner, ont été rejoints, lors de mon passage à
l’INRETS, par Sylvie Abours, Sylvie Bredeloup, Marielle Cuvelier, Geneviève Marotel, Etienne
Henry, Xavier Godard, Patrick Hamelin, Pascal Mauny, Patrick Niérat, Christophe Rizet, avec
lesquels j’ai partagé nombre de questions, hésitations et voyages sur les transports en Europe et
en Afrique. A ceux-là sont venus se mêler les collègues et amis du Sénégal, du Burkina Faso, de
Mauritanie, Cheikh Oumar Ba, Momar Coumba Diop, Ndiacé Diop, Mohamed Diyah, Abdoulaye
« Kédian » Keita, Pape Sakho, Cheikhou Issa Sylla, Mohamadou Zongo, puis ceux de France,
Sophie Bava, Armelle Choplin, Marion Viel, Jean-Louis Chaléard, Frédéric Dumont, Emmanuel
Grégoire, Michel Lesourd, Géraud Magrin, Olivier Ninot. S’y sont joints ceux des Etats-Unis ou