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évoquant « des garanties suffisantes données et prises que les armements nationaux seront
réduits à l’extrême limite compatible avec la sécurité intérieure du pays »3. Cet état d’esprit,
qui va faire du désarmement l’un des piliers de la Société, tant de son architecture que de son
action, tend à présenter le désarmement comme une finalité. Il n’est pas un moyen de
parvenir à la sécurité dans l’esprit de ces concepteurs voyant dans la course aux armements
l’une des raisons majeures au déclenchement et à l’horreur de la 1ère Guerre mondiale. Il est
l’une, et peut être, la principale des conditions de la paix internationale que doit instaurer la
Société.
ii. Le désarmement est donc l’un des piliers de l’action de prévention de la
guerre mise en place par le Pacte. Assistés des articles 13, 20 et 21, les articles 8 et 9
représentent le cœur des normes dites prophylactiques, c’est-à-dire celles visant à éliminer
les causes futures des guerres par une action générale de la communauté internationale4.
Le Pacte dresse ainsi deux liens fondamentaux avec la question du désarmement, permettant
alors au sujet de connaitre une avancée conceptuelle majeure. D’une part, elle est pleinement
intégrée (et elle en est même l’un des éléments essentiels) à la tentative nouvelle de mise en
place d’un système de sécurité collective. D’autre part, en voulant instaurer ce système, la
SdN va promouvoir une coopération internationale nouvelle qui sera l’occasion d’aborder de
façon bien plus décisive que précédemment la question du désarmement.
iii. Si l’échec de la SdN a des causes multiples et ne peut être imputé
uniquement aux faiblesses et limites du Pacte, le bilan de son action en matière de
désarmement apparait comme particulièrement faible. Ayant placée cette question au cœur
de son action, la Société n’a pu empêcher une nouvelle course aux armements pendant les
années 1930, débouchant sur un nouveau conflit mondial. La part redevable à un climat
international particulièrement défavorable à tout progrès en la matière est particulièrement
importante5, tout comme celle résultant des limites générales de la Société (et en tout premier
lieu, l’absence de mécanismes coercitifs d’une organisation qui souffrait d’une
internationalisation limitée). Ainsi, l’échec de la SdN est celui du désarmement tout autant
que l’échec du désarmement est celui de la SdN. Il est sans doute plus largement celui du
désarmement comme système de maintien de la paix.
Pour autant, les articles 8 et 9 connaissant leurs limites propres et une fois revenues sur
l’échec de la SdN, les Nations Unies n’ont pas repris ces dispositions. Au contraire, en
matière de désarmement, la Société apparait comme un précurseur négatif de l’ONU puisque
la Charte prend le contrepied du système du Pacte6. Le désarmement n’est plus l’un des
3 Cf. "Les 14 points du Président Wilson", message du 8 janvier 1918 in C. A. COLLIARD et A. MANIN,
Droit international et Histoire diplomatique-documents choisis, Tome 1 : Textes généraux, Paris,
Montchrestien, 1971, pp. 31-32. On remarquera la proximité de rédaction avec l’alinéa 1 de l’article 8
prévoyant notamment « la réduction des armements nationaux au minimum compatible avec la sécurité
nationale ».
4 Cf. Infra II. 2.
5 Sur l’importance du contexte international en matière de désarmement et pour une période plus
contemporaine, cf. Serge SUR, "L’entreprise du désarmement au péril du nouveau contexte international de
sécurité", Annuaire Français de Relations Internationales, Vol. V, 2004, pp. 727-747.
6 Le changement d’esprit s’observe dès 1941 dans la Charte de l’Atlantique établissant « qu’il est impossible de
sauvegarder la paix future tant que certaines nations qui la menacent – ou pourraient la menacer – possèdent des
armes […] ils considèrent que, en attendant de pouvoir établir un système étendu et permanent de sécurité
générale, le désarmement de ces nations s’impose », cf. Charte de l’Atlantique, 14 août 1941 in C. A.
COLLIARD et A. MANIN, Droit international et Histoire diplomatique-documents choisis, Tome 1 : Textes
généraux, Paris, Montchrestien, 1971, p. 83.