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– Désarmement classique et sécurité en Europe
auxquelles il assujettissait les États parties en matière de réduction
d’équipements militaires classiques, d’échanges d’informations militaires
détaillées et de vérification poussées, le traité FCE, par le nombre d’États
parties4 et son champ d’application5, entendait remplir l’intégralité d’un
mandat sans précédent dans lequel on pouvait trouver plusieurs concepts
sous-jacents. Il y avait d’abord l’idée de l’équilibre. Le traité, effective-
ment, visait la réduction du matériel à caractère offensif, ceux à même
d’être utilisés dans une attaque surprise : chars, véhicules blindés de
combat (VBC), artillerie, avions et hélicoptères. Puis, venait celle de la
sécurité éloignée. Les règles étaient ainsi complétées par des mesures
d’accompagnement, notamment des échanges d’informations et des
mesures de vérification hautement intrusives qui permettaient aux États
parties de s’assurer que les armements seraient bel et bien détruits et
non utilisés dans d’autres endroits. Il y avait, en plus, l’idée de décon-
centration. Le traité obligeait chaque groupe d’États parties (Alliance
atlantique et Pacte de Varsovie) à procéder à une certaine répartition
des matériels terrestres soumis à limitations dans toute la profondeur
d’une zone donnée. Était aussi présente l’idée de la suffisance. Le régime
FCE entendait, effectivement, éviter qu’un seul pays pût avoir plus de
matériels que tous les autres réunis. Il y avait, enfin, l’idée du refus
d’intimidation. Le traité voulait ainsi imposer un plafond aux forces
stationnées à l’extérieur du territoire national.
Le succès du régime FCE, dans sa composante téléologique, est
incontestable : grâce à l’instauration d’une parité numérique entre l’Est
et l’Ouest, on évalua, lors de la première Conférence des États parties
en mai 1996, à plus de 58 000 le nombre de pièces d’armements éli-
minées6. Déjà, le chef de la délégation soviétique, au moment de la
signature du traité FCE, avait déclaré qu’« aucune bataille dans l’histoire
de l’humanité, même la plus grande, n’a pu détruire un aussi grand
nombre de chars, de pièces d’artillerie, de véhicules blindés et d’aviation
de combat7 ».
4. Tous les pays membres du Pacte de Varsovie (on se souviendra que l’Allemagne de
l’Est, intégrée à l’Allemagne de l’Ouest le 3 octobre 1990, n’en était plus membre)
et de l’Alliance atlantique étaient parties au traité (22 États). Les membres du groupe
des États occidentaux étaient les 16 membres de l’Alliance.
5. Il englobait l’ensemble du territoire terrestre des États parties situés en Europe de
l’océan Atlantique aux monts Oural et comprenant le territoire de toutes les îles
européennes des États parties : « Dans le cas de l’Union soviétique, la zone d’appli-
cation comprend tout le territoire situé à l’Ouest de la rivière Oural et de la mer
Caspienne. » (ATTU)
6. Les plafonds maximaux de dotations autorisés par le traité FCE ont été respectés à
la date prévue du 15 novembre 1995. On estime que quelque 48 000 équipements
d’importance majeure ont ainsi été détruits dont 32 000 pour le Groupe d’États parties
Est. Le traité, globalement bien appliqué, a rendu les résultats escomptés (plafonds
globaux à des niveaux plus bas que par le passé, application du régime de vérification
intrusive, transparence assurée par les échanges d’informations).
7. Cité par M. Luizet, « Des chars à la casse », Armées d’aujourd’hui, no 156, décembre-
janvier 1990-1991, p. 5.