Amour, gloire et beauté au cœur des enjeux de l`art actuel

Le 18 février 2010
Amour, gloire et beauté au cœur des enjeux de l’art actuel
Monsieur Jean-Philippe THEYSKENS, licencié en histoire de l’art et archéologie,
spécialiste de l’art contemporain, professeur au CREPAC et à l’ISELP
L’objectif poursuivi est de défendre l’art contemporain, qui est parfois considéré comme
vulgaire, scandaleux voire « histrionique ».
Pour cela, la conférence comporte 3 volets : Amour, gloire et beauté, titre repris au soap
opera américain par le biais de 100 dias.
Il faut dépasser l’image crue, provocante dans un monde saturé d’images. Il s’agit d’une
génération d’artistes influencés par les médias, la publicité et la télévision.
Dès la première dia, nous sommes plongés dans le patio du Musée d’art contemporain de
Kanasawa au Japon où l’artiste d’origine argentine Leandro Erlich a inséré une piscine
surprenante. Elle permet de voir par dessus et par dessous et donc de percevoir d’une
autre façon, en un trompe l’œil parfait, le clapotis de l’eau, de se mouvoir dans l’eau, dans
l’œuvre, comme un poisson. L’objectif est donc d’être dans l’art contemporain comme un
poisson dans l’eau.
1. AMOUR:
Trois œuvres de Tim Nobel et Sue Webster, couple britannique : « I love You, » « Le
dollar en ampoules électriques », et une sculpture faite à partir de déchets plastiques.
Ils jouent avec notre perception grâce à un jeu de lumières et d’ombres. Côté kitsch
assuré, ils parasitent la publicité, car à partir de ce qui apparaît comme un tas
d’ordures, se détache l’autoportrait d’un couple en ombre chinoise.
Jenny Holzer détourne des maximes, des proverbes. Sur un T-shirt d’un touriste
devant l’acropole est inscrit : « tout ce qui est intéressant est neuf » différent de « tout
ce qui est neuf est intéressant ». Elle nous indique aussi que ce monument bien que
pas neuf est toujours intéressant. Elle utilise les mots, l’écriture féminine.
Ghada Amer, artiste égyptienne, évoque l’amour par un banc public « tête à tête»
dans un parc, entouré paradoxalement, de deux pancartes : l’amour, c’est regarder
ensemble dans la même direction et si tu m’apprivoises, nous aurons besoin l’un de
l’autre… » dépasser la fusion, aller de l’avant….
L’autre œuvre présentée de cette artiste est une broderie dont un magma de fils qui
brouille la lecture, évoque, lorsque l’on regarde bien, des images pornographiques
comme une bombe à retardement. Elle s’inspire de la littérature érotique, essaie de se
défaire de certains préjugés reçus par sa culture.
Adel Abdessemed, algérien, filme des ébats de couples enlacés, met ce film en
boucle, ce qui fait que le baiser n’en finit pas. Nudité cachée. Art éphémère.
Constantin Brancusi, sculpteur, présente «le baiser», un couple s’embrassant, dans
une étreinte jusqu’à la fusion. Sculpture allant vers l’abstraction. Art primitif.
Wilfred Mille, artiste croate, art éphémère.
Gilles Barbier : cerveau évoquant l’amour sous toutes ses formes par des mots écrits
en cartographie cérébrale.
Jessy Irving : tente de camping couverte d’un journal amoureux, graphique
comprenant tous les prénoms de ses conquêtes y compris inceste, amour très
précoce… Cette œuvre est donc la dénonciation de pratiques de la société. Elle a
obtenu le Turner price.
Kiki Smith, sculptrice américaine née en Allemagne, la « spider woman » accrochée à
un mur, regard en verre, femme araignée.
2/2
Alain Séchas : portrait robot de la société des années 60 au travers de chats : peace
and love, et puis les générations suivantes versent dans : murder, suicide, bitch
(salope) ;gore ( horreur sanglante).
Robert Gober fixe l’actualité dramatique d’un journal en la contrecarrant par une
aquarelle d’un acte d’amour.
Felix Gonzales-Torres, artiste cubain décédé en 1996 du sida, photographie de 2
horloges sur un mur, « perfect lovers », couple idéal, symbolisant l’harmonie parfaite
bien qu’il y ait toujours un décalage dans la perception des 2 horloges. Il parle de
l’amour en prenant des objets. Par exemple, panneau d’affichage avec le lit vide mais
dont on voit qu’il vient d’être déserté : mort programmée, séparation, disparition,
identification possible. Contraste entre la tendresse du lit et le lieu où l’œuvre est
placée (banlieue avec fils barbelés…)
Art simple, conceptuel que tout le monde peut faire. « Portrait de papa » tas de
bonbons que chacun est invité à manger.
Nan Golding : photo de journal intime, révoltée contre son milieu, photos d’amis, de
couples, elle rentre dans l’intimité de ses modèles. On pourrait parler d’une étude des
corps à l’instar du Caravage ! « Ballade de la délinquance sexuelle » ce qui rapproche
et ce qui sépare.
2. GLOIRE:
Araki, Andy Warhol, Picasso, Schnabell sont des artistes très courtisés. Reconnus
grâce à leur look, parfois aussi à leurs frasques, « chacun a droit à 15 minutes de
célébrité au 20ème siècle. »
Maurizio Cattelan, artiste le plus côté dans les salles de vente d’art, se déguise en
Picasso à l’entrée d’un musée. Il se moque de la gloire, du succès mais il est lui-même
reconnu grâce à cette moquerie. Il vole par exemple l’exposition voisine de celle où il
devait exposer et désigne cela comme œuvre d’art.
Jeff Koons : ancien trader, le plus coté des artistes contemporains. Lapin gonflable
en couleur inox. Monumental bouquet de fleurs en bois, Cicciolina, œuvres entre
tentation et désir. Il entre dans la collection de François Pinault ou à Versailles. Il y a
une liste d’attente pour acheter ses œuvres !
3. BEAUTE
Jackson Pollock : On n’ose plus donner une définition de la beauté. La peinture
devient brute, physique.
Autres noms : Carol Knorr, David Lachapelle, Valérie Beulin. : Beauté étrange,
définition à partir de mannequins à la fois personnage animé et inanimé. La beauté est
personnalisée.
Marc Quinn : beauté physique d’une personne, beauté d’une œuvre d’art (socle
devant la National Gallery), confrontation de la beauté et de la nature humaine, image
sublimée de la beauté. Œuvre à partir de rognures, de morceaux de peau … fondus,
cela devient « une pierre précieuse » « enfin, je deviens parfait » dit-il.
* * * * *
Quelques réponses aux questions:
Sans galéristes, sans le marché de l’art, ces œuvres n’existeraient pas.
L’Art est effectivement quelque chose de construit mais toute œuvre demande
réflexion ou provoque une réflexion qui se prolonge.
Wim Delvoye, artiste belge. Œuvres : « Cloaca », « tout est bon dans le cochon »
cochons vivants tatoués…deviennent des sculptures. On élève le cochon comme
œuvre d’art.
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