Au Canada, les critères de la mort cérébrale complète sont utilisés pour établir le décès. La mort cérébrale
complète est incontestable, car elle élimine toute possibilité d'activité neurologique provenant du tronc cérébral ou
d'un niveau supérieur, et donc toute possibilité d'état de conscience à quelque niveau. Le fait d'inclure le tronc
cérébral dans la détermination du décès permet de s'assurer qu'il y a mort cérébrale à tous les niveaux. Comme la
mort du tronc cérébral laisse supposer le fonctionnement des niveaux supérieurs du cerveau, comme le cortex et
le système neuroendocrinien, une personne ne peut être consciente et avoir sa pleine connaissance en l'absence
des fonctions du tronc cérébral. Enfin, la mort corticale avec maintien des fonctions du tronc cérébral suppose que
toutes les fonctions se situent au-dessus du tronc cérébral, un concept qui ne peut être prouvé.
La première série de critères pour la détermination de la mort cérébrale a été établie en 1968. Une certaine
incohérence et variabilité caractérisaient alors l'application de ces critères2, même si les principes déontologiques
étaient les mêmes3. Cette situation a incité un forum canadien à formuler une série de recommandations visant à
favoriser une détermination uniforme et fiable de la mort neurologique4. Ces recommandations définissent les
critères cliniques minimums qui, en l'absence de facteurs confusionnels, doivent servir au diagnostic du décès
neurologique. En tête des critères vient l'étiologie établie capable de causer un décès neurologique avec coma sans
réflexe et absence bilatérale des réflexes moteurs. Les réflexes spinaux peuvent toutefois être présents. Il doit
également y avoir absence (bilatérale s'il y a lieu) des réflexes du tronc cérébral, des réflexes de déglutition et de
toux, du réflexe cornéen, du réflexe photomoteur avec pupilles de taille moyenne ou en mydriase, ainsi que des
réflexes oculo vestibulaires. Enfin, un test d'apnée doit confirmer l'absence d'effort respiratoire.
Le test d'apnée consiste en la préoxygénation du patient par l'administration d'oxygène à 100 % durant une
période déterminée avant le test, puis en l'administration d'oxygène à 100 % dans la trachée durant le test. Les
gaz sanguins artériels sont mesurés au début du test, puis à intervalles déterminés tout au long du test. Le patient
est également observé de près pendant toute la durée du test pour que tout effort respiratoire soit détecté. On
considère que le test a une valeur de confirmation s'il n'y a aucun effort respiratoire, que la PaCO2 est supérieure
ou égale à 60 mm Hg (et > 20 mm Hg au dessus du niveau préalable au test d'apnée) et que le pH est inférieur ou
égal à 7,28, d'après la gazométrie artérielle.
Par ailleurs, la détermination neurologique du décès sur la base de ces critères cliniques minimums recommandés
par le forum canadien doit être faite en l'absence de facteurs confusionnels tels qu'un état de choc, une
hypothermie (température centrale > 34°C), des troubles ou anomalies métaboliques, une dysfonction des nerfs
périphériques ou des muscles ou l'effet de médicaments. Il est également recommandé qu'un deuxième examen
soit fait aux fins de confirmation. S'il existe un facteur confusionnel, il faut réaliser un test auxiliaire comme
l'angiographie cérébrale ou une scintigraphie de perfusion pour confirmer l'absence globale de circulation
intracrânienne.
L'utilisation des critères neurologiques pour établir la mort n'est toutefois pas acceptée par tous, et certaines
personnes rejettent ce concept pour des motifs religieux ou culturels. Même les éthiciens ne s'entendent pas sur
cette question. Ainsi, les tenants du diagnostic basé sur la mort cérébrale justifient leur position en invoquant la
perte permanente des fonctions essentielles de l'organisme entier, comme la respiration spontanée, le contrôle de
la circulation, l'homéostasie et la conscience5.
Ceux qui s'y opposent allèguent que le système somatique contrôle beaucoup plus de fonctions que le cerveau, et
rejettent ainsi la mort cérébrale comme critère valable pour établir le décès. Selon leur raisonnement, même si les
critères neurologiques recommandés s'appliquent, l'organisme conserve la capacité de lutter contre les infections,
de cicatriser ainsi que de maintenir l'homéostasie et le bilan énergétique. Les enfants conservent ainsi leur
capacité de grandir et de se développer sexuellement, alors que les femmes enceintes peuvent mener leur fœtus à
terme. Ils allèguent également qu'il demeure possible de réanimer ces patients et que ceux-ci peuvent survivre
avec peu d'intervention médicale6.
Néanmoins, les milieux juridique et médical ont accepté la détermination neurologique du décès comme un moyen
de diagnostiquer la mort avant d'interrompre les traitements ou de prélever des organes en vue de greffes. Il
importe cependant que les personnes qui participent aux soins et au traitement de ces patients soient conscientes
des controverses que suscite cette pratique, ainsi que des effets que ces controverses peuvent avoir sur
l'acceptation de la mort par les familles placées dans une telle situation. Il faut faire preuve de patience et de
compassion envers les familles éprouvées par la perte d'un être cher.
Le cas qui précède illustre comment le concept de la mort cérébrale se pose souvent en pratique clinique. Sam a
subi une atteinte neurologique importante qui semble avoir mené à une mort cérébrale, malgré un traitement
chirurgical et médical agressif. Selon l'évaluation clinique, Sam répondrait aux critères de mort cérébrale. Les
médecins qui le traitent peuvent, à ce stade, déterminer s'il répond on non aux critères de mort cérébrale, soit en