9843 UPS-Mag20 - Centre de Biologie du Développement

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Imagerie
moléculaire
La morphogenèse
en temps réel
Si la génomique découvre l’ensemble des macromolécules du vivant, un enjeu
majeur est de comprendre comment elles s’assemblent pour former des
structures tridimensionnelles organisées. Les avancées de l’imagerie
permettent maintenant d’analyser en temps réel les changements de forme
des cellules vivantes pour élucider les mécanismes impliqués.
>>> Equipe morphogenèse et signalisation
cellulaires, au Centre de Biologie du
Développement (CBD, unité mixte UPS/CNRS).
De gauche à droite au premier plan : Serge
PLAZA, Hélène CHANUT, Delphine MENORET,
François PAYRE, au deuxième plan : Pierre
FERRER, Yvan LATAPIE, Philippe VALENTI,
dOSSIER
Ahmad ALSAWADI, Emilie BENRABAH.
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Devenir adulte pour des cellules ou des tissus, consiste à
acquérir une forme spécifique nécessaire à leurs
fonctions dans l’organisme. Les cellules présentent ainsi
une grande diversité d’organisation tridimensionnelle.
L’altération de leur forme provoque même des maladies
génétiques (surdités, déficiences visuelles et neurales).
Les mécanismes responsables de la morphogenèse
restent cependant très mal connus aujourd’hui. En effet
les techniques d’observation nécessitaient jusqu’à
récemment de travailler sur des tissus fixés, ne
permettant pas d’analyser la dynamique de la
morphogenèse. La combinaison d’avancées scientifiques
et techniques ouvre aujourd’hui la porte de l’analyse
fonctionnelle des cellules vivantes par imagerie
fluorescente à haute résolution spatiale et
temporelle (5D).
La meduse
La fin du 20ème siècle a révolutionné la conception des
microscopes. Plus que l’illumination (lasers), les caméras
numériques et leur pilotage par ordinateur, c’est bien
la découverte d’une protéine fluorescente chez la méduse
(Green Fluorescent Protein ou GFP) qui a levé le verrou
de l’analyse de cellules vivantes. Grâce à la génétique
moléculaire, il est devenu possible de fusionner une
protéine d’intérêt avec des dérivés de la GFP pour suivre
sa distribution dynamique dans les cellules vivantes et
ainsi d’explorer sa fonction.
Division cellulaire
On peut par exemple suivre ainsi la division des cellules,
via une série stéréotypée de changements de leur forme
pour la séparation des cellules filles. Mais le mode de
contrôle de cette réorganisation tridimensionnelle restait
inconnu. En analysant la dynamique du « squelette »
des cellules vivantes normales, ou en absence de
différents facteurs, notre équipe du Centre de Biologie
du Développement a découvert l’importance des
protéines Ezrin, Radixin, Moesin (ERM) pour contrôler
la forme des cellules et la répartition des chromosomes
au cours de leur division. La fonction des ERM nécessite
un contrôle localisé de leur activité et l’équipe développe
des approches à large échelle dans les cellules vivantes
pour identifier ces régulateurs et leur fonction.
>>> Macrophages vivants en cours de migration dans
l’embryon de drosophile. Les filaments d’actine sont
observés par une fusion GFP, révélant l’impact de
l’absence de la Fascin (à droite) sur l’organisation
polarisée des cellules. © J. Zanet
Migration des cellules dans l’organisme
La morphogenèse embryonnaire nécessite aussi la
migration de certaines cellules, qui se déplacent sur les
autres tissus attirées par des gradients moléculaires.
Comprendre ces mécanismes nécessite donc leur analyse
directement au sein de l’embryon. Là encore, la
combinaison de protéines fluorescentes, d’imagerie
confocale vitale et de la génétique nous a permis
d’identifier la Fascin comme un régulateur clé de la
forme des cellules en migration dans l’embryon. Cette
protéine relie entre eux des filaments d’actine, pour
former de véritables câbles qui soutiennent
l’organisation polarisée des cellules en migration. En
absence de Fascin, les cellules perdent leur forme
spécifique et sont incapables de migrer.
Les protéines ERM et Fascin sont dérégulées dans de
nombreux cancers où elles favorisent la formation et
l’agressivité des métastases. Comprendre leur
dynamique chez des organismes modèles aidera à mieux
cerner leur impact pathologique. L’évolution constante
des approches d’imagerie vitale à l’Université Paul
Sabatier permettra encore de nouvelles avancées
fondamentales en lien direct avec la santé.
Pour en savoir plus : Carreno et al, 2008, Journal of
Cell Biology, 2009 Aug; 136(15):2557-65; Zanet et al,
2009, Development, 2008 Feb 25;180(4):739-46.
Contacts : [email protected] et [email protected]
Paul Sabatier — Le magazine scientifique — numéro 20
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