N°17 n° ISSN : 1959-2167 Juin 2014 VigiNantes Chers Confrères, Le Centre Régional de Pharmacovigilance de Nantes a le plaisir de vous adresser le numéro 17 de son bulletin d’information sur le bon usage des médicaments, VigiNantes. N’hésitez pas à exprimer vos souhaits de voir certains sujets de pharmacologie et de pharmacovigilance traités et à nous donner vos impressions sur les thèmes qui vous intéressent. Le CRPV reste biensûr à votre disposition pour toutes vos questions sur le bon usage du médicament et vos notifications d’effets indésirables. Cordialement Le CRPV de Nantes Tél. : 02 40 08 40 96 – Fax : 02 40 08 40 97 email : [email protected] Sommaire Comité rédactionnel Responsable : Pr Pascale JOLLIET Gwenaëlle VEYRAC Anne Lise RUELLAN Julien MAHE Caroline JOYAU Interne : Nicolas SERANDOUR • Le CRPV de Nantes en chiffres – Année 2013 p. 2 • Interaction d’issue fatale entre acide fusidique et statine p. 3 • Le réveil du sarcopte p. 4 • Informations ANSM p. 5 • Réévaluations du bénéfice/risque par l’EMA p. 6 • ASMR de nouveaux médicaments p. 7 • Revue de la littérature p. 8 Le CRPV de Nantes en chiffres – Année 2013 Dr Caroline JOYAU • Bilan des notifications Au cours de l’année 2013, 1496 nouveaux signalements d’effets indésirables médicamenteux (soit + 39% par rapport à 2012) ont été rapportés au CRPV de Nantes et transmis à l’ANSM, avec une forte progression des notifications émanant du CHU. Les médecins spécialistes et les pharmaciens sont à l’origine de la majorité des déclarations. Plus de la moitié des signalements proviennent du CHU (Graphiques 1 et 2). Environ 40 % des notifications concernent des effets graves. Médecins spécialistes CHU 1% 3% Médecins généralistes 1% 29% Pharmaciens 3% 1% 2% Hôpitaux secondaires 33% 51% 57% Infirmières 9% Clinique 10% Institutionnel Autres professionnels de santé Autres Patients et Associations de patients Graphique 1 : Répartition des notifications par type déclarants sur l’année 2013 • Libéral Graphique 2 : Répartition des notifications par affiliation sur l’année 2013 Bilan des demandes de renseignements Au cours de l’année 2013, 633 questions ont été posées au CRPV de Nantes provenant en majeure partie des professionnels de santé libéraux. Environ 21% des demandes de renseignements ont abouti à une notification d’effet indésirable. Les questions posées sont d’ordre divers (grossesse, interactions, allaitement…), ou en lien avec un effet indésirable (Graphiques 3 et 4) dans la plupart des cas. Effets indésirables Praticiens CHU 0% Grossesse 40% 45% Interactions Praticiens autres hospitaliers 29% Industrie 15% 7% Allaitement 1% 47% 6% Autres (cinétique, mécanisme d'action, identification, conseils de bon usage …) Graphique 3 : Nature des demandes de renseignements (2013) 9% Professionnels de santé libéraux Patients et associations patients Graphique 4 : Répartition des Questions par affiliation (2013) Le CRPV de Nantes est à votre disposition pour répondre à vos questions sur le médicament (prescription, interaction, effet indésirable, population à risque, grossesse, allaitement,…), recueillir et analyser les suspicions d’effet indésirable médicamenteux et pour vous aider dans le diagnostic et la prise en charge des effets indésirables médicamenteux. VigiNantes 2014 (17) – p2 Interaction d’issue fatale entre acide fusidique et statine Dr Julien MAHE Homme de 67 ans aux antécédents de fibrillation auriculaire, d'hypertension artérielle et d'hypercholestérolémie. Le traitement habituel de ce patient comporte entre autres de la pravastatine (40 milligrammes par jour) depuis 2007. En février 2014, une infection à Staphylococcus aureus méticilline sensible est mise en évidence, nécessitant un traitement antibiotique avec de l'acide fusidique per os (500 milligrammes 2 fois par jour) et de la lévofloxacine (750 milligrammes par jour). Dix jours après cette instauration, un bilan biologique met en évidence une insuffisance rénale. Le patient est hospitalisé six jours plus tard pour syncope avec insuffisance rénale aigue sévère. La pravastatine est arrêtée et l'acide fusidique poursuivi. Neuf jours après le début de son hospitalisation un dosage de CPK est effectué, mettant en évidence une rhabdomyolyse (confirmée par la biopsie musculaire) avec des CPK à 4587 UI/L. Le patient s'aggrave rapidement vers une défaillance multiviscérale et décède quelques jours plus tard. Les dernières valeurs des CPK étaient à 160 000 UI/L. (VN 15 - 130 UI/L). Les effets indésirables à type de myalgies, crampes, élévation des CPK sont fréquents avec les statines. Plusieurs facteurs favorisent leur survenue comme l'âge supérieur à 70 ans, l'insuffisance rénale et/ou hépatique, la pratique intensive d'un sport, la posologie élevée ou encore certaines associations médicamenteuses. Le RCP (Résumé des Caractéristiques du Produit) de l'acide fusidique indique à la rubrique des effets indésirables un risque de survenue de rhabdomyolyse et le Thésaurus des interactions de l'ANSM indique que la toxicité musculaire des statines est favorisée par la colchicine, les fibrates et l'acide fusidique. Pour ce dernier, le niveau d'interaction est différent selon l'indication : l'association est contre-indiquée avec les statines dans les indications cutanées de l'antibiotique et déconseillée dans les indications ostéo-articulaires. L’arrêt prolongé d’un traitement par statines n’est en effet pas recommandé. En 2011 au Royaume-Uni, l'agence nationale de sécurité des médicaments (MHRA) recommandait de ne pas utiliser l'acide fusidique per os avec les statines en raison de l'augmentation du nombre et de la sévérité des cas de rhabdomyolyse survenant dans ce contexte. Vingt-huit cas décrivant la survenue d'une rhabdhomyolyse lors d'une co-prescription sont retrouvés dans la littérature, dont 8 sont associés à une issue fatale. (1-15) Les statines majoritairement retrouvées sont l'atorvastatine et la simvastatine laissant supposer en premier lieu à un mécanisme impliquant l'inhibition de l'isoenzyme CYP3A4, ces deux statines étant partiellement métabolisées par cette voie. Cependant, les cas rapportés avec la rosuvastatine et notre cas impliquant la pravastatine, ne peuvent pas trouver d'explication à travers cette hypothèse : la pravastatine n'est pas métabolisée par le cytochrome P450 et la rosuvastatine est partiellement métabolisée par l'isoenzyme 2C9. D'autres auteurs (Kearney et al., Gabignon et al.) avancent une compétition entre la statine et l'acide fusidique au niveau de la glucuronidation hépatique intervenant dans le métabolisme de ces deux molécules. Ces cas de rhabdomyolyses impliquant l'interaction entre statine et acide fusidique suggèrent donc un effet de classe. Les prescripteurs et les pharmaciens doivent donc être alertés quant au risque d'apparition de complications sévères voire fatales. Pour les indications cutanées dans lesquelles l'antibiotique est prescrit sur une courte période, la contre-indication suppose un arrêt temporaire de la statine. Mais dans les indications nécessitant une durée de traitement prolongée avec l'acide fusidique, la conduite à tenir pour améliorer la prise en charge est discutée au niveau de l'ANSM. Références bibliographiques : 1- Dromer C et al. Rhabdomyolysis due to simvastatin. Apropos of a case with review of the literature. Rev Rhum Mal Osteoartic1992;59:281-3. 2- Wenisch C et al. Acute rhabdomyolysis after atorvastatin and fusidic acid therapy. Am J Med2000;109:78. 3- Kotanko P et al. Rhabdomyolysis and acute renal graft impairment in a patient treated with simvastatin, tacrolimus, and fusidic acid. Nephron2002;90:234-5. 4- Yuen SL et al. Rhabdomyolysis secondary to interaction of fusidic acid and simvastatin. Med J Aust2003;179:172. 5- Kahri J et al. Rhabdomyolysis in a patient receiving atorvastatin and fluconazole. Eur J Clin Pharmacol2005;60:905-7. 6- O’Mahony C et al. Rhabdomyolysis with atorvastatin and fusidic acid. Postgrad Med J2008;84:325-7. 7- Burtenshaw AJ et al. Presumed interaction of fusidic acid with simvastatin. Anaesthesia 2008;63:656-8. 8- Herring R, et al. Rhabdomyolysis caused by an interaction of simvastatin and fusidic acid. BMJ Case Rep2009 9- Saeed NT et al. Rhabdomyolysis secondary to interaction between atorvastatin and fusidic acid. BMJ Case Rep2009 10- Magee CN et al. Severe rhabdomyolysis as a consequence of the interaction of fusidic acid and atorvastatin. Am J Kidney Dis2010;56:e11-5. 11- Collidge TA et al. Severe statin-induced rhabdomyolysis mimicking Guillain-Barre syndrome in four patients with diabetes mellitus treated with fusidic acid. Diabet Med 2010;27:696-700. 12- Teckchandani S et al. Rhabdomyolysis following co-prescription of fusidic acid and atorvastatin. J R Coll Physicians Edinb 2010;40:33-6. 13- Kearney S et al. Northern Ireland Neurology Network. Rhabdomyolysis after co-prescription of statin and fusidic acid. BMJ. 2012 Oct 9;345:e6562. 14- Gabignon C et al. Rhabdomyolysis following the coprescription of atorvastatin and fusidic acid Rev Med Interne. 2013 Jan;34(1):39-41.16 15- Cowan R et al. A timely reminder about the concomitant use of fusidic acid with statins. Clin Infect Dis. 2013 Jul;57(2):329-30. VigiNantes 2014 (17) – p3 Le réveil du C Sarcopte Dr Domitille DARNIS La gale, ce parasite humain obligatoire, fait un retour fracassant sur le territoire français. Alarmé par les signaux émis par nombre de professionnels de santé, l’InVS a tenté de réaliser un état des lieux de l’épidémie. Les résultats de plusieurs enquêtes menées entre 2008 et 2010 montrent une augmentation des signalements d’épisodes de gale en collectivités (écoles, établissements médico-sociaux, etc…). Un autre indicateur confirme la recrudescence des épisodes de gale : l’accroissement des ventes des antiparasitaires externes (+ 11% par an) et de l’ivermectine (+ 24% par an). Ces estimations ont permis de calculer l’incidence de la gale en France, située dans une fourchette de 330 à 352 cas et contacts pour 100000 habitants par an, soit une moyenne de 220000 nouveaux cas par an. Cette maladie contagieuse revêt un caractère ubiquitaire : elle atteint les personnes des deux sexes et de tout âge. Longtemps considérée comme affection des personnes à mauvaise hygiène, la gale touche actuellement tous les milieux sociaux. Les conditions de promiscuité et les collectivités restent des facteurs favorisants à la propagation. La transmission du parasite (Sarcoptes scabiei) se fait généralement de façon directe (peau à peau) et indirecte par le linge et la literie infestés. Un signe spécifique : le sillon scabieux, localisé généralement au niveau des mains, poignets et coudes et à l’origine d’un intense prurit nocturne. L’absence de lésions spécifiques et de prurit peut rendre le diagnostic clinique difficile, comme chez les jeunes enfants. La dermatose se présente alors comme une pustulose palmoplantaire atteignant le dos des mains et des pieds, le dos, les aisselles et même le visage et le cuir chevelu, ces deux zones restant indemnes chez l’adulte. Une confirmation par examen parasitologique est ainsi indiquée. ÉVITER LA TRANSMISSION Linge et literie lavés à plus de 60°C. Objets non lavables isolés dans un sac plastique fermé pendant 4 jours. Acaride de type A-PAR® pulvérisé sur la literie et les textiles non lavables à haute température. Le Haut Conseil de Santé Publique privilégie deux formes de traitements : un traitement local, associé ou non à un traitement systématique, renouvelable entre J8 et J15 (tableau 1). Parmi les topiques scabicides, l’ASCABIOL® est aujourd’hui indisponible, en raison de l’arrêt de fabrication du sulfiram. L’ANSM recommande l’utilisation de la spécialité SPREGAL®, associant l’esphallédrine et le butoxyde de pipéronile. Cette lotion est à pulvériser sur tout le corps, excepté le visage et le cuir chevelu. Une seconde application est conseillée si les signes cliniques sont toujours présents au bout de 15 jours. L’absence de données expérimentales et cliniques en cas de grossesse et d’allaitement restreint l’utilisation du produit qu’en cas de nécessité. D’autres traitements topiques à base de malathion, crotamiton ou soufre sont jugés peu efficaces, voire toxiques comme le lindane. L’ivermectine est le seul traitement oral ayant une AMM pour la gale. Il s’agit d’une molécule non ovicide, provoquant la mort des parasites par paralysie neuromusculaire. Une seconde administration, 8 à 15 jours après la première dose, est conseillée. Bien tolérée, les effets indésirables retrouvés sont bénins et peu fréquents (céphalées, vertiges, vomissements, diarrhées…). Depuis le début de l’année 2014, le CRPV de Nantes a recueilli trois déclarations d’effets indésirables. L’ivermectine était suspecte pour deux réactions d’hypersensibilité et une réaction de gynécomastie. Malgré l’arsenal thérapeutique disponible, des échecs de traitements surviennent lorsque la gale est compliquée (gale crouteuse ou gale profuse). DE LA NÉCESSITÉ DE TRAITER Il n’existe aucune guérison spontanée de la gale. Seule une prise en charge efficace permet de détruire le parasite et de limiter le risque de transmission. En 24 heures, le sujet traité n’est plus contaminant pour son entourage. Traiter pour freiner le regain de la maladie scabieuse, cela commence par le diagnostic précoce de la maladie. La prise en charge doit ensuite être adaptée au malade et à son entourage proche, sans omettre les mesures obligatoires pour l’environnement. Tableau 1 : Les traitements de la gale disponibles en France SPECIALITE COMPOSITION AMM PER OS STROMECTOL® Ivermectine LOCAL SPREGAL® Esdépalléthrine / butoxyde de pipéronyle PERMETHRIN 5%® ANTISCABIOSUM ® Perméthrine 5% Benzoate de benzyle Adulte, enfant, nourrisson de plus de 15 kg (CI : femmes enceintes, allaitantes) Adulte, enfant, nourrisson (CI : asthmatiques) Adulte, enfant, nourrisson de plus de 2 mois Adulte, enfant, nourrisson de plus de 1 an ASCABIOL® Benzoate de benzyle / sulfiram Adulte, enfant, nourrisson DISPONIBLE EN Officine Officine Hôpital avec demande d’ATU Hôpital (importation d’Allemagne) Non disponible VigiNantes 2014 (17) – p4 Informations ANSM Dr Caroline JOYAU En cliquant sur le nom du médicament, vous serez automatiquement dirigés vers la page du site ANSM concernée avec toutes les informations. 07/05/2014 : PRAZINIL® 50 mg (carpipramine), comprimé pelliculé : retrait de son autorisation sur le marché à compter du 02/09/14 22/04/2014 : Actualisation du rapport sur les anticoagulants en France : état des lieux en 2014 et recommandations de surveillance 02/04/2014 : Spécialités contenant du thiocolchicoside administrées par voie générale : information importante relative aux indications, modalités de traitement, contreindications et mise en garde 03/04/2014 : VERCYTE® 25 mg, comprimé (pipobroman) : restriction de l'indication, information sur la sécurité et arrêt de commercialisation fin 2014 03/04/2014 : PIXUVRI® (pixantrone) 29 mg, poudre à diluer pour solution de perfusion : risque d'erreur de posologie 01/04/2014 : FURADANTINE® 50 mg gélule (nitrofurantoïne) : Rappels sur le bon usage (indications et durée de traitement) 12/02/2014 : Contraceptifs hormonaux combinés : rester conscient des différences entre les spécialités face au risque thromboembolique, de l'importance des facteurs de risque individuels et être attentif aux manifestations cliniques 08/04/2014 : Attention aux risques d'erreurs médicamenteuses : mise à disposition d'un nouveau dispositif d'administration de la spécialité KANEURON® 5,4 %, solution buvable en gouttes (phénobarbital) 03/04/2014 : L'ANSM publie une recommandation temporaire d'utilisation (RTU) concernant la spécialité ROACTEMRA® (tocilizumab) dans la maladie de Castleman 10/04/2014 : GARDASIL® : actualisation des données de sécurité sur le vaccin contre les papillomavirus humains 27/03/2014 : L'ANSM rappelle le risque d'entéropathies graves chez certains patients traités par l'olmésartan 17/02/2014 : PERIOLIMEL N4E / OLIMEL N7, N7E, N9 et N9E (produits pour nutrition parentérale) - Réduction du débit maximal de perfusion par heure chez les enfants âgés de 2 à 11 ans 24/03/2014 : PROTELOS® (ranélate de strontium) : nouvelles restrictions d'indication et recommandations concernant la surveillance du traitement 28/03/2014 : Risque de fuite capillaire associé au lenograstim (GRANOCYTE®) chez les patients atteints d'un cancer et chez les donneurs sains 14/03/2014 : Une recommandation temporaire d'utilisation (RTU) est accordée pour le baclofène 26/02/2014 : SORIATANE® (acitrétine) : Informations importantes sur le bon usage et sa sécurité d'emploi 04/03/2014 : Spécialité à base de métoclopramide : actualisation des indications et de la posologie pour diminuer le risque (principalement neurologique) d’effets indésirables 28/02/2014 : Insuline glargine et risque de cancer : conclusion de l'évaluation des nouvelles données de sécurité VigiNantes 2014 (17) – p5 Réévaluation du bénéfice/risque par l’EMA Dr Caroline JOYAU Le Comité pour l’évaluation des risques en matière de pharmacovigilance (PRAC) de l’Agence européenne des médicaments (EMA) évalue les risques liés à l’utilisation des médicaments ainsi que les mesures de suivi et de gestion de ces risques. Il se réunit une fois par mois et chaque Etat Membre y est représenté par un ou deux délégués. Les recommandations du PRAC sont examinées par le Comité des médicaments à usage humain (CHMP) lors de l'adoption des avis de l’EMA sur toutes les questions concernant les médicaments à usage humain. Voici les avis de décisions sur certains dossiers en cours de réévaluation du rapport bénéfice/risque : - En mars 2013, le PRAC a initié une réévaluation du rapport bénéfice/risque des médicaments à base de dompéridone en raison de son profil de sécurité cardiovasculaire. En mars 2014, au vu des données analysées, le PRAC confirme l’existence d’un risque cardiaque, notamment plus élevé chez les patients de plus de 60 ans, les patients traités par des doses journalières de plus de 30 mg ou les patients traités de façon concomitante par des médicaments pouvant eux-mêmes induire des effets cardiaques. Le PRAC conclut que la balance bénéfice/risque reste favorable chez l’enfant et chez l’adulte sous réserve de restreindre l’indication au traitement symptomatique des nausées et vomissements, de limiter la dose et la durée du traitement à une semaine. De plus l’introduction de nouvelles contre-indications, concernant les situations à risque cardiaque, contribue à minimiser ce risque. Pour les formes orales, le PRAC recommande de ne pas dépasser 10 mg par prise jusqu’à 3 fois par jour chez les adultes et les adolescents de 35 kg ou plus et de ne pas dépasser 0,25 mg/kg par prise jusqu’à 3 fois par prise. En outre, les formes orales les plus fortement dosées (20 mg) seront retirées du marché européen ainsi que les suppositoires pédiatriques (10 mg) et adultes (60 mg). L’ANSM recommande d’ores et déjà de prendre en compte ces restrictions d’utilisation en termes d’indication, de posologie et de durée de traitement. Il est conseillé d’utiliser ce médicament à dose minimale efficace pour la durée la plus courte possible. L’ANSM rappelle que la dompéridone est déjà connue pour entraîner des troubles cardiaques et qu’il est donc important de l’utiliser avec précaution chez les patients présentant des facteurs de risque cardiaque. - Le CHMP a confirmé l’avis du Comité pour l’évaluation des risques en matière de pharmacovigilance (PRAC) rendu en avril 2014, concernant les restrictions d’indication du traitement par double blocage du système rénine-angiotensine : - contre-indication de l’utilisation concomitante de l’aliskiren avec un inhibiteur de l’enzyme de conversion ou un antagoniste des récepteurs de l’angiotensine II en cas d’insuffisance rénale ou de diabète. - forte recommandation de ne pas utiliser l’association d’un inhibiteur de l’enzyme de conversion et un antagoniste des récepteurs de l’angiotensine II chez des patients atteints de néphropathie diabétique. - utilisation déconseillée du double blocage chez tous les autres patients. Dans les situations exceptionnelles où le double blocage doit être réalisé, il est nécessaire qu’il soit mis en place par un spécialiste et nécessaire de renforcer la surveillance biologique (kaliémie et créatininémie) et clinique (tension artérielle). Enfin, des libellés spécifiques ont été proposés pour le candésartan et le valsartan dans le contexte de leur utilisation dans l’insuffisance cardiaque. Vaccins anti-HPV : A la suite de la déclaration de cas de douleur persistante après injection dont des cas de syndrome régional douloureux complexe (SRDC) après vaccination, les autorités japonaises ont informé en juin 2013 de leur décision de suspendre temporairement leur recommandation de vaccination. Le PRAC a conclu qu’aucun lien de causalité ne pouvait être établi entre la vaccination HPV et la survenue de syndrome régional douloureux complexe. Dans ce contexte, l’ANSM considère, que ce signal ne remet pas en cause le rapport bénéfice/risque favorable des vaccins anti-HPV. Les vaccinations par GARDASIL® et CERVARIX® peuvent être poursuivies conformément au calendrier vaccinal défini par le Haut Conseil de la Santé Publique. Les autres réévaluations en cours : ICLUSIG® (ponatinib) et risque thrombogène artériel et veineux. Discussions prévues pour le PRAC en juillet 2014. ATARAX® (hydroxyzine) et allongement de l’intervalle QT. Discussions prévues pour le PRAC en novembre 2014. Dans l’attente, l’ANSM rappelle de prendre en compte ce risque et de respecter les recommandations du RCP. PROCORALAN® et CORLENTOR® (ivabradine) et résultat d’une étude randomisée, contrôlée contre placebo montrant une augmentation statistiquement significative du risque combiné de décès cardiovasculaire et d’infarctus du myocarde non fatal dans un sous-groupe de patients présentant un angor symptomatique et traité par ivabradine, comparativement au groupe placebo. Les discussions sont prévues pour juillet 2014. Médicaments à base d’ambroxol et de bromhexine et risque de réactions d’hypersensibilité immédiates potentiellement graves. Premières discussions au PRAC en septembre 2014. DEPAKINE® et génériques (valproate) et troubles psychomoteurs, incluant l’autisme, pouvant survenir et persister chez les enfants exposés pendant la grossesse. Discussion prévue en juillet 2014. VigiNantes 2014 (17) – p6 Sélection de nouveaux ASMR et SMR des médicaments Nicolas SERANDOUR (Interne) La Commission de la Transparence (CT) de la Haute Autorité de Santé (HAS) évalue les médicaments ayant obtenu une Autorisation de Mise sur le Marché (AMM) lorsque les laboratoires souhaitent obtenir leur inscription sur la liste des médicaments remboursables. Elle donne au Ministre de la santé des avis sur la prise en charge des médicaments par l’Assurance Maladie et/ou pour leur utilisation à l’hôpital. L’avis de cette Commission porte sur l’appréciation du bien-fondé de l’inscription du médicament sur la liste des médicaments remboursables formulée en fonction du service médical rendu (SMR). La CT évalue aussi l’amélioration du service médical rendu (ASMR) apportée par le médicament par rapport aux médicaments disponibles. Les avis sont disponibles sur le site de la HAS (http://www.has-sante.fr). Voici une sélection d’avis émis depuis Mars 2014. Nouveaux médicaments Changement de SMR TRESIBA® insuline dégludec Spécialités à base de diclofenac Cette nouvelle insuline basale, analogue de l’insuline d’action lente, est indiquée dans le traitement du diabète de l’adulte. Elle n’apporte pas d’amélioration du service médical rendu (ASMR V : inexistante) dans la prise en charge des patients adultes atteints de diabète de type 1 ou de type 2 par rapport aux analogues lents de l’insuline (LANTUS® et LEVEMIR®). Une réévaluation de la CT a montré que le risque cardiovasculaire du diclofénac par voie systémique est du même ordre que celui observé avec les coxibs lorsque ce traitement est prescrit au long cours, à dose maximale, et en particulier chez les patients à risque cardiovasculaire. Son rapport bénéfice/risque est donc inférieur à celui des autres AINS dans cette situation. •ARTOTEC® : faible. •FLECTOR, VOLTARENE® (voie orale) : modéré dans les rhumatismes abarticulaires et les lombalgies ; important dans les autres indications. •VOLTARENDOLO® : important. •VOLTARENE® (voie rectale) : modéré. •VOLTARENE® (voie injectable) : modéré dans les rhumatismes inflammatoires en poussée, les lombalgies aiguës, les radiculalgies ; important dans les coliques néphrétiques. FORXIGA® dapagliflozine La dapagliflozine est le premier représentant d’une nouvelle classe thérapeutique, les inhibiteurs du transporteur sodium/glucose de type 2 du rein (SGLT2). Elle réduit la réabsorption rénale du glucose et favorise ainsi son excrétion urinaire. Elle présente la particularité d’agir de façon indépendante de la sécrétion et de l’action de l’insuline. Elle est indiquée chez des patients diabétiques de type 2, en association à des antidiabétiques oraux (ADO) et/ou en association à une insuline basale. La CT considère que ce médicament n’apporte pas d’amélioration du service médical rendu (ASMR V, inexistante). KADCYLA ® trastuzumab emtansine Cet anticorps conjugué ciblant le récepteur HER2, est la combinaison du trastuzumab (anticorps monoclonal humanisé ciblant le récepteur HER2) et du DM1 (chimiothérapie cytotoxique, dérivé de la maytansine, inhibiteur de microtubules). Il est indiqué pour des patients adultes atteints d’un cancer du sein HER2 positif métastatique ou localement avancé non résécable, ayant reçu au préalable du trastuzumab et un taxane, séparément ou en association. Il est aussi indiqué si le cancer a progressé pendant un traitement adjuvant ou dans les six mois suivant sa fin. Compte tenu de l’amélioration observée par le trastuzumab emtansine (KADCYLA®) en monothérapie par rapport à l’association lapatinib (TYVERB®) + capécitabine (XELODA®) en termes de survie sans progression et de survie globale et d’un profil de tolérance acceptable, la CT considère qu’il apporte une amélioration du service médical rendu importante (ASMR II). PROTOPIC® tacrolimus en pommade Son SMR a été réévalué de modéré à faible chez l’adulte et l’adolescent (16 ans et plus) et de faible à insuffisant chez l’enfant (2 ans et plus) dans les poussées de dermatites atopiques sévères en échec aux dermocorticoïdes. Son remboursement est ainsi restreint dans cette indication à l’adulte et à l’adolescent. Qu’est-ce que le Service Médical Rendu (SMR) ? L’attribution d’un niveau de SMR permet de déterminer si le médicament présente un intérêt clinique pour être pris en charge par la solidarité nationale. - L’attribution d’un SMR insuffisant implique un avis défavorable à l’inscription sur la liste des médicaments remboursables - L’attribution d’un SMR suffisant (c.a.d. important, modéré ou faible) implique un avis favorable à l’inscription sur la liste des médicaments remboursables et suivant le niveau attribué un taux de remboursement par l’Assurance Maladie (15%, 35% , 65% ou 100%). Qu’est-ce que l’Amélioration du (ASMR) ? Service Médical Rendu L’attribution d’un niveau d’ASMR permet de déterminer si le médicament apporte un progrès par rapport aux traitements disponibles, et, si oui, à quelle hauteur. Le progrès thérapeutique est coté par la Commission de la Transparence en ASMR de I à V. Principale conséquence d’une ASMR V : un médicament qui n’apporte pas de progrès (ASMR V) ne peut être inscrit au remboursement que s’il apporte une économie dans les coûts de traitement. Le niveau d'ASMR figure sur les avis de la Commission de la transparence qui doivent notamment être remis par les visiteurs médicaux lors de toute présentation verbale d'un médicament. (Décret du 16 juin 1996 - article R.5047-3 du Code de la Santé publique) VigiNantes 2014 (17) – p7 Revue de la Littérature Rôle du CRPV Dr Anne-Lise RUELLAN Identification d’un facteur déterminant l’efficacité de l’aspirine en prévention du cancer colorectal Fink SP et al. Aspirin and the risk of colorectal cancer in relation to the expression of 15-hydroxyprostaglandin dehydrogenase (HPGD). Science Transl ational Medicine. 2014; 6 (233). L’aspirine exerce son action par inhibition du système enzymatique PTGS2 - COX2 (prostaglandin-endoperoxide synthase 2 cyclooxygenase 2). L’hydroxyprostaglandine deshydrogenase 15nicotinamide adénine dinucléotide (15-PGDH, HPGD) est contrôlé de façon négative dans les cancers colorectaux et joue également le rôle d ’antagoniste du système PTGS2. Les auteurs se sont intéressés à la prise d’aspirine au long cours et l’expression de l’HPGD au sein de la muqueuse colique de femmes incluses dans deux études prospectives de cohorte, comparant celles ayant développé un cancer colorectal versus témoin. Les résultats obtenus permettent de démontrer que chez les femmes présentant un niveau élevé d’expression de l’HPGD, la prise d’aspirine divisait par deux le risque de cancer colorectal. A l’inverse, chez les femmes dont le niveau d’expression d’HPGD était faible, l’aspirine n’a été associée qu’à une baisse de 10% du risque du cancer colorectal, non statiquement significative. L’estimation du niveau d’expression de cette enzyme au niveau du colon sain permettrait donc d’envisager la mise en place d’une chimioprévention par aspirine. Utilisation du bevacizumab dans le traitement du glioblastome Mark R. Gilbert et al. A randomized trial of bevacizumab for newly diagnosed glioblastoma. NEJM. 2014, 370 (8) Les auteurs ont réalisé une étude randomisée de phase 3 en doubleaveugle versus placebo chez 621 patients atteints d’un glioblastome traité par radiothérapie (60 Gy) et temozolomide quotidiennement. Le traitement par bevacizumab ou le placebo a été administré 4 semaines après le début de la radiothérapie. L’utilisation en première ligne du bévacizumab n’a pas augmenté la survie médiane des patients : 15,7 mois dans le groupe traité contre 16,1 mois dans le groupe placebo. La durée de vie sans progression de la maladie était plus longue dans le groupe bévacizumab (10,7 mois contre 7,3 mois) mais cette amélioration n’atteignait pas l’objectif de 30 % fixé par les auteurs de l’étude. Dans le groupe de patients traités par bevacizumab, une fréquence plus élevée des cas d’hypertension, d’évènements thromboemboliques, de perforation intestinale et de neutropénie a été constatée ainsi qu’une diminution de la qualité de vie et des fonctions neurocognitives à plus long terme. Du recueil de l’observation à la prévention du risque. Le Centre Régional de Pharmacovigilance a pour mission de répondre à vos questions sur les médicaments (bon usage, effets indésirables, modifications de posologies ou d’indications, interactions, risques pendant la grossesse, l’allaitement ou selon d’autres terrains particuliers) et de recueillir et d’analyser vos notifications d’effets indésirables médicamenteux. Nous vous rappelons que « les professionnels de santé déclarent tout effet indésirable suspecté d'être dû à un médicament ou produit mentionnés à l'article L. 5121-1 dont ils ont connaissance. Les autres professionnels de santé, les patients et les associations agréées de patients peuvent signaler tout effet indésirable suspecté d'être dû à un médicament ou produit mentionnés au même article L. 5121-1 dont ils ont connaissance. » (Loi du 29 Décembre 2011) Notre objectif est d’améliorer la connaissance du risque lié au médicament et ainsi de favoriser une meilleure utilisation en optimisant la balance bénéfice/risque. Vos déclarations peuvent être faites par téléphone, par courrier ou par fiche de déclaration disponible sur le site officiel de l’ANSM Ce bulletin est également diffusé gratuitement par courriel. Merci de signaler vos adresses électroniques à l’adresse suivante : [email protected] Sites utiles : ANSM : HAS : EMA : FDA : http://www.ansm.sante.fr http://www.has-sante.fr http://www.ema.europa.eu/ http://www.fda.gov Le bulletin VigiNantes est rédigé et diffusé par le CRPV sans aide de l’industrie pharmaceutique VigiNantes 2014 (17) – p8