Des mycorhizes pour améliorer les rendements des cultures de saules sur des sites marginaux à l’agriculture : une bonne idée? Michel Labrecque 1 et Marc St-Arnaud1 809252 10/2009 – 01/2013 FAITS SAILLANTS Les cultures de saules pour des fins énergétiques ont connu un réel essor au cours des dernières années au Québec. Ainsi, on estime qu’il y aurait maintenant près de 400 hectares de terre qui seraient cultivés pour produire de la biomasse à partir de saule. Toutefois, l’idée d'utiliser les meilleures terres agricoles pour produire des biocarburants demeure discutable et il est d’opinion générale qu’il serait plus approprié d’utiliser des terres marginales pour la production de plantes énergétiques. Cependant dans de telles conditions les rendements seraient assurément moins importants, compromettant la rentabilité économique de ces systèmes de production. Par ce projet, nous avons voulu vérifier si en inoculant des saules avec des souches de champignons mycorhiziens, il serait possible d’accroître les rendements lorsque ceux-ci seraient produits dans de moins bonnes conditions de culture. Ainsi, deux espèces de saules ont été inoculées avec un mélange de champignons mycrophizien arbusculaire(CMA) et de champignons ectomycorhiziens fourni par la firme BioSyneterra Solutions Inc. et mis en production sur deux sites marginaux (un site sablonneux, un site pierreux). Un troisième site aux conditions de fertilité normale a servi de témoin. Après trois saisons de culture, nous n’avons pu mettre en évidence l’effet positif de cette mycorhization contrôlée. Si ce résultat est décevant, le travail a quand même permis d’améliorer les connaissances quant aux possibilités de culture des saules sur des terres marginales. En outre, il a été possible de démontrer que dans certaines circonstances, les cultivars testés pouvaient très bien pousser sur des sols sablonneux. Ce travail a aussi permis d'améliorer nos connaissances quant aux conséquences d’une inoculation contrôlée sur la microflore des sols ainsi que sur la diversité fongique des sols agricoles marginaux. OBJECTIFS ET MÉTHODOLOGIE Ce projet comportait trois objectifs principaux : 1) Comparer les performances de deux espèces de saule en culture intensive sur courtes rotations (CICR) sur des sites marginaux et aux conditions de fertilité différentes; 2) Juger de l’effet de l’application d’un inoculum mycorhizien sur l’établissement et les performances de ces espèces de saule et selon les conditions de sol; 3) Identifier et comparer les communautés mycorhiziennes qui colonisent les racines des saules inoculés ou non et juger de la persistance de l’inoculum utilisé au fil du temps. RÉSULTATS SIGNIFICATIFS POUR L’INDUSTRIE Le tableau ci-dessous compare les résultats de biomasse sèche mesurée en fin de saison 2012, alors que les tiges des saules avaient deux ans de croissance sur des racines de trois ans. 1 Institut de recherche en biologie végétale Comparaison du poids sec moyen (g) des plantes des deux espèces de saules mesurées en fin de saison 2012 sur chacun des trois sites expérimentaux. Site témoin S. miyabeana S. sacchalinensis Site pierreux S. miyabeana S. sacchalinensis Site sablonneux S. miyabeana S. sacchalinensis Non Fertilisées Non inoc. Inoc. 722 546 702 973 Non inoc. 748 916 Fertilisées Inoc. 773 868 534 373 492 345 566 419 555 424 984 784 786 814 987 819 866 838 Tant le tableau ci-dessus que les analyses statistiques ont montré que les saules ont bien performé sur le site sablonneux en dépit du fait que ces conditions ne leur conviennent normalement pas. On a expliqué ce résultat par le fait que, sur le site sablonneux, l’eau était très disponible vu la hauteur de la nappe phréatique et que le site était particulièrement riche en phosphore. Sur ce site sablonneux, des rendements équivalents à 15,6 t.ha-1 ont pu être obtenus, ce qui est appréciable et correspond grossièrement aux rendements normalement obtenus dans des conditions normales de culture dans le sud du Québec (Guidi et al. 2012). Les études de la diversité fongique ont montré que la structure des communautés des champignons mycorhiziens à arbuscules différait considérablement selon le type de sol. En sol témoin, on détecte une majorité de taxons homologues au genre Diversispora ainsi qu’au genre Glomus, alors que le sol pierreux ne montre que des taxons homologues aux Glomus spp. D’autre part, le sol sablonneux montre exclusivement des taxons homologues au genre Ambispora. Le traitement d’inoculation semble avoir eu un effet appréciable sur la structure de la communauté de CMA dans la rhizosphère des saules en sols normal et sablonneux, mais moins en le sol pierreux. D’autre part, aucun taxon mycorhizien arbusculaire n’a été détecté dans la rhizosphère des plantes non inoculées en sol sablonneux alors que des taxons homologues aux Ambispora ont été détectés en abondance dans la rhizosphère des plantes inoculées. Le traitement d’inoculation a aussi fortement diminué la diversité, ce qui suggère un déplacement de la microflore indigène par les champignons mycorhiziens inoculés. RÉSULTATS ET APPLICATIONS POSSIBLES POUR L’INDUSTRIE Ce travail nous permet de voir que la production de saules pourrait bien se faire sur des sols marginaux et que même les sols sablonneux pouvaient entraîner de bons rendements. Dans les conditions de cette expérience, l’inoculum utilisé n’a pas entraîné d’effet significatif sur les rendements des saules. Cependant, l’inoculation a affecté la structure de la communauté de CMA dans la rhizosphère des saules, mais moins les communautés des champignons totaux. POINT DE CONTACT Michel Labrecque http://www.irbv.umontreal.ca/chercheurs/michel-labrecque Marc St-Arnaud http://www.irbv.umontreal.ca/chercheurs/marc-st-arnaud PARTENAIRES FINANCIERS Cette étude a été rendue possible grâce au Programme de soutien à l'innovation en agroalimentaire du ministère de l’Agriculture, Pêcheries et Alimentation. Nous remercions également AgroÉnergie pour leur précieuse collaboration.