RDC / Monnaie Des nouveaux billets de banque en RD-Congo (MFI / 03.07.12) Dès ce 2 juillet, la RD-Congo met en circulation des coupures de 1 000, 5 000 et 10 000 francs congolais en plus de celles de 50, 100, 200 et 500 existantes. Selon la Banque centrale, elles seront émises dans les principaux pôles d’activité économique, les grandes villes, et progressivement étendues au reste du pays. « Pour 100 dollars, combien faut-il de billets de 500 ou 200 francs congolais ? » Le président de la commission économique, financière et de bonne gouvernance du Sénat pose le problème avec le sourire. Mais Evariste Mabi Mulumba, également exprésident de la Cour des comptes, se garde bien de résoudre l’équation. Pas que le calcul lui échappe : avec un taux de 1 dollar pour environ 920 francs congolais (CDF), 100 billets verts valent 184 coupures de 500 CDF, et 460 de 200 CDF. Mais son silence souligne plutôt que de nombreux Congolais doivent transporter des liasses de billets pour accomplir de simples transactions, comme le règlement de leurs factures. Contre la dollarisation de l’économie L’environnement macroéconomique de la RDC est « au beau fixe », a expliqué le gouverneur de la Banque centrale, Jean-Claude Masangu, dans un discours. Sa croissance est globalement comprise « entre 5 et 7 % » depuis cinq ans et le taux de change reste « remarquablement stable ». Hormis la facilitation des transactions, l’exZaïre espère ainsi « réduire les coûts de production, de stockage, de transport et de distribution des billets de banque que supporte l’Institut d’émission ». Autre priorité : la lutte contre la dollarisation de l’économie pour que la monnaie nationale ne soit plus « reléguée au rang de sous-multiple du dollar américain ». « C’est une bonne idée en principe mais, actuellement, si vous avez une facture de 1 275 francs, vous allez en payer 1 300 parce qu’on ne pourra pas vous rendre la monnaie. Vous laissez les 25 francs-là », fulmine Christophe Tshibumbu wa Katanda, président du Collectif des défenseurs des consommateurs de la RDC. « En Europe, où les gens touchent un salaire viable, on ne laisse pas un centime à la caisse. Alors pourquoi ici, où les gens touchent un salaire faible, doivent-ils laisser 25 francs ? On est en train de faire faire une épargne forcée au consommateur, mais malheureusement cette épargne n’est pas exploitée » pour améliorer le bien-être des quelque 70 millions de Congolais, dont deux tiers vivent avec 1,25 dollar par jour, poursuit le militant. « Un taux d’inflation de 23 000 % » La Banque centrale promet que les coupures de 50, 100 et 200 CDF vont disparaître au profit de pièces de même valeur. Mais pour Godefroid Kabengele Dibwe, professeur d’économie internationale à l’Université de Kinshasa, « la sortie des nouveaux billets doit s’accompagner de pièces de 1, 5, 10 ou 20 francs pour rendre les transactions plus fluides. » Mais si le gouverneur et le gouvernement multiplient les messages pour sensibiliser et rassurer la population, Jonas Tshiombela, président de la Nouvelle société civile congolaise, met en garde : « Il y a toujours des dérapages, des spéculateurs qui en profitent pour perturber le système tel qu’il est équilibré maintenant ». Cette crainte résulte entre autres de la terrible année 1993 où « la RDC a enregistré un taux d’inflation de 23 000 %, des intérêts très hauts, la cessation des intermédiations bancaires et des investissements en déclin dans tous les secteurs de l’économie », résume un rapport de la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC) dont l’ex-colonie belge est membre. « Le contexte est tout à fait différent de 1993 où la RDC ne disposait presque pas de devises. La Banque centrale dispose à l’heure actuelle d’un peu plus de 1,2 million de réserves de change. Si jamais sous l’effet psychologique il y avait une tendance à hausser les prix, elle pourrait intervenir rapidement », assuree le sénateur Mabi Mulumba. Habibou Bangré