La connotation Les mots possèdent un double pouvoir: un pouvoir de représentation et un pouvoir d'évocation. A ces deux notions de représentation et d'évocation correspondent les notions de dénotation et de connotation. La dénotation définit la simple relation qui existe entre le mot et sa définition. Ainsi les mots bazou, automobile, bagnole, tacot dénotent tous la même chose: ils représentent tous des voitures automobiles; mais chacun d'eux connote différemment. La connotation, c'est l'ensemble des évocations, des suggestions, des associations que véhicule un mot dans son contexte. Les connotations reliées au vocabulaire sont multiples. On peut distinguer trois types de connotations: affectives, socioculturelles et littéraires. Ainsi, quand nous communiquons, nous n'émettons pas uniquement des idées relatives à la nature du référent, mais nous exprimons notre attitude psychologique ou morale à son égard. L'emploi de tel mot, de telle structure de phrase, de tel son, révèle souvent nos origines sociales, nos sentiments, nos tendances profondes. Dans ce document, nous nous attarderons aux sentiments que véhiculent les mots. En ce sens, nous parlerons de connotations affectives des mots. Nous aborderons, dans un autre document, les connotations socioculturelles. Les connotations affectives Le langage, comme système de communication, n'est pas neutre: à la plupart des mots, par exemple, est associé un sentiment agréable ou désagréable, appréciatif ou dépréciatif, etc., soit par effet de sens ou par évocation. Un mot aussi court que faim représente malgré tout pour toi une valeur positive dans la mesure où tu l'associes à un bon plat que ta mère va te préparer pour assouvir ton appétit, alors que dans les pays du SAHEL ce même mot est empreint de valeur négative, parce que, souvent, c'est la mort qui y est associée. Tout mot a une définition. Ainsi, le mot joli est défini ainsi dans le petit Robert: Qui est très agréable à voir. Sur le plan de la dénotation, j'affirmerai que mon intelligence perçoit une information, à savoir le plaisir de voir. Or l'acte de communication ne se résume pas à un échange d'information entre deux intelligences, il engage tout l'être. Et, quand j'entends le mot joli, je ne peux vraiment affirmer qu'il ne s'agit que d'une activité de l'esprit. Je sens un bouleversement au niveau des émotions. Les mots comme magnifique, succès,savoureux ne s'adressentils pas autant aux sentiments qu'à l'intelligence? Le plus souvent même, ils engendrent d'abord un état affectif agréable avant même que l'intelligence ne dégage les éléments définitionnels. C'est que le choix du vocabulaire, surtout dans les textes littéraires, repose autant sur la sensibilité que sur l'intelligence: l'individu, quand il veut communiquer, essaie de traduire non seulement sa pensée, mais aussi ses émotions. On appellera connotations affectives lexicales l'ensemble des sentiments que véhicule un mot en plus de sa définition. 1- Sources de la connotation affective Certains mots sont toujours chargés de connotations affectives. On dira que la connotation affective est inhérente à la définition même du mot. C'est le cas pour les mots magnifique, joli, succès. D'autres mots connotent par évocation, parce qu'ils évoquent quelque chose d'agréable ou de désagréable. Le mot "plage" n'est qu'une étendue de sable sur le bord de l'eau. Ce mot peut connoter affectivement dans la mesure où on associe à ce mot des activités de natation, de bain de soleil, toutes aussi agréables les unes que les autres. D'autres mots auront un pouvoir de connotation selon le sens contextuel. C'est le cas du mot "décor". La charge connotative est peu perceptible dans ce mot quand il désigne le lieu où se passe l'action théâtrale. Mais le mot est très connoté quand il désigne ce qui sert à décorer un intérieur. Enfin, le mot "maison" peut prendre une connotation positive ou négative, selon la description que l'auteur lui donne. 2- Nature des sentiments Parler de connotation affective, c'est nécessairement faire l'étude des valeurs affectives des mots. Il serait difficile d'établir une liste exhaustive des divers sentiments reliés à tels ou tels mots. Je ne ferai qu'en ouvrir la liste. Tantôt le mot ou la locution véhicule une valeur comique: Mon ami est un véritable panier percé. ou solennelle: L'enfant rendit l'âme dans les bras de sa mère. Tantôt, la valeur pourra être agréable: Ce monsieur est l'élégance même. ou désagréable: Ne devraiton pas ramasser les détritus qui traînent? Tantôt au mot se rattache une valeur péjorative: De nos jours, les idéologies foisonnent. ou méliorative: Cette femme est une femme d'honneur. Le mot peut traduire tantôt une valeur appréciative: Cet animal est intelligent. ou dépréciative: C'est un personnage imbécile. La valeur peut être favorable: Ce cheval est racé. Ou défavorable: La voiture que tu t'es achetée est un vrai tacot. Enfin, puisqu'il faut bien terminer, le mot peut s'accompagner d'une valeur esthétique: C'est la plus jolie maison que j'aie vue. Ou inesthétique: Une balafre lui traversait le visage. Comme tu vois, je pourrais continuer ainsi longtemps (bien que je commence à être à bout de souffle) sans oublier les valeurs laudatives, etc. Toi, tu es l'héroïne de cette aventure, moi, le lâche. À l'intérieur d'une série de mots synonymes, l'auteur choisit souvent le mot selon la charge de connotation affective qu'il veut donner à son texte. Il va sans dire qu'un même mot peut véhiculer une valeur esthétique et une valeur agréable en même temps. Une "balafre"est à la fois inesthétique et désagréable; c'est le contexte (ou ta propre lecture, pourquoi pas) qui fait en sorte que l'accent va être mis sur l'un ou l'autre. Les mots ne sont pas le seul véhicule des sentiments, la structure même de la phrase en est porteuse; ce que nous verrons au moment opportun. Si les mots nous révèlent des réalités, ils en cachent encore plus. D'où l'importance d'analyser le choix des mots par rapport à d'autres possibles d'une même série synonymique ou des autres mots du texte. Il faut aussi tenir compte du contexte social et politique d'où le texte est issu. Certains mots peuvent ne pas avoir de pouvoir d'évocation mais, lorsqu'ils font partie d'un réseau de mots, ils peuvent se charger de connotation. D'où l'importance de considérer le champ lexical auquel appartient un mot. Lycée: jabber bnou hayan student: youssef ZIANE