un mur ; chez nous les expo d’art brut rendaient les patients fous, le club ne tournait pas et
devenait un lieu d’appropriation de certains patients qui en excluaient les autres etc…
Il n’y avait pas que le talent et le savoir-faire qui nous manquaient mais bien plutôt l’analyse
institutionnelle rigoureuse de notre réalité concrète et puis aussi et surtout le temps
d’élaboration nécessaire pour forger nos propres outils.
Certes l’horizontalité absolue n’était qu’un leurre mais il nous fallait le découvrir avec notre
tempo ; il nous aura fallu plusieurs années pour trouver une juste proportion, celle que nous
pouvions supporter, entre la mise entre parenthèses des différences soignant/soigné –la
structure même du club- et un champ d’activités thérapeutiques structuré par les soignants.
Felix Guattari parle avec bonheur de transversalité à propos de cette dialectique permanente,
ou plutôt de cette tension qui traverse l’institution, faite de ces jeux d’oppositions,
confrontations, articulations, passages et traversées dans les meilleurs moments.
Nous avons donc construit au fil du temps une série de dispositifs qui sont venus se
superposer, se stratifier, et que nous nous efforçons d’articuler.
L’histoire a donc voulu que je privilégie dans un premier temps l’extra –hospitalier pour y
construire un lieu d’accueil le Centre de jour Antonin Artaud polarisé par les enjeux de la
clinique des psychoses mais recevant bien sûr toutes les demandes de soins du secteur.
Plus de 90 % des patients y sont pris en charge mais l’expérience nous a aussi montré la
nécessité impérieuse d’une hospitalisation de qualité et d’une articulation la meilleure
possible entre les différents pôles. Ce qui n’est pas une sinécure dans la mesure où si nous
avons eu longtemps les coudées franches à Artaud et qu’une équipe a pu se coopter autour
d’un projet de travail, il n’en est pas de même à l’hôpital où les infirmiers se retrouvent
propulsés par l’infirmier général sans savoir bien souvent où ils mettent les pieds.
De même, la rigidité des protocoles et procédures qui s’imposent aux soignants et les
dispensent de penser leur travail et un formatage hospitalier extrêmement pesant exercent une
emprise insidieuse.Vous rajoutez le manque chronique de lits et le manque d’effectifs et vous
agitez bien fort !
Et pourtant nous avons pu construire au fil du temps des réunions régulières : de l’équipe
( et ça inclut les ASH ) ; soignants /soignés et surtout la réunion du club qui structure la vie
quotidienne. Plusieurs groupes et activités thérapeutiques sont également tenus par les
soignants mais ce qui me parait l’élément essentiel et d’ailleurs difficile à tenir c’est
l’attention portée à l’ambiance ainsi d’ailleurs qu’à la parole des patients. Ceux-ci étant
d’ailleurs les plus sensibles aux modifications et altérations de l’ambiance en raison de la
fragilité de leur « bouclier pare-excitations » pour reprendre une notion freudienne. Il s’agit
donc de privilégier une clinique des « entours », de l’ambiance si nous voulons entrer en
contact avec le patient, ce qui est préliminaire à toute possibilité de mise au travail du transfert
et en particulier du transfert psychotique.
Quelques mots au passage sur le transfert que Freud croyait impossible dans la psychose,
alors qu’il y est au contraire très fréquent mais aussi très renversant ; car comme vous
l’entendrez dans les exposés cliniques c’est le soignant qui se trouve exposé au transfert selon
une disposition inverse de la névrose ; c’est lui qui va se sentir bien souvent analysé, deviné
par le patient ; c’est dans son espace psychique que surgiront des formations de l’inconscient :
rêves et cauchemars, lapsus et actes manqués, angoisse et éprouvés corporels.
De plus confirmant le constat de Jean Oury le transfert sera dissocié, le schizo projetant des
parties éclatées sur les différents protagonistes de la constellation.
Encore un concept essentiel de la PI, qui recoupe à bien des égards la notion de « corps à
plusieurs » de F.Davoine : il s’agit de prendre acte de tous ceux qui gravitent autour d’un
patient et de pouvoir les rassembler à des moments cruciaux de la prise en charge ; et c’est là
qu’on s’aperçoit que le transfert va ignorer les titres et catégories statutaires pour atteindre
ceux qui sont entrés réellement en contact avec le patient ; d’où aussi la nécessité de se