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experts en biologie ou en médecine ont-ils parfois des idées précises sur les solutions qu’il
convient d’apporter au problème posé, mais ce n’est pas en tant que biologistes ou médecins
mais plutôt en tant que citoyens éclairés qu’ils sont alors incités à se prononcer sur le bien-
fondé, du point de vue éthique, de telle ou telle solution. Bref, un biologiste peut, sans nuire le
moindrement à sa réputation de chercheur, reconnaître n’avoir aucune compétence pour
résoudre les graves problèmes éthiques qui peuvent découler des résultats scientifiques issus
de ses recherches. S’il laisse ainsi à d’autres le soin de remédier à ces problèmes, il peut être
blâmé moralement par certains individus hostiles à toute recherche de ce type, mais sa
compétence de biologiste ne sera, en aucune façon, mise en cause. Rien n’interdirait de lui
accorder le prix Nobel de médecine et on serait mal venu, à une telle occasion, d’objecter que
ce biologiste n’a même pas su proposer une réponse satisfaisante aux questions éthiques que
ses recherches ont contribué à engendrer. De même, un physicien n’est pas jugé moins bon
physicien parce que ses travaux ont pu faciliter la mise au point d’engins nucléaires, bien au
contraire. En ce sens, on peut dire que les problèmes éthiques de ce genre et leurs solutions
sont externes à la pratique de ces sciences.
Or, en architecture, les choses se présentent tout autrement. L’activité des architectes
génère aussi de sérieux problèmes éthiques. Que de fois n’a-t-on pas blâmé les architectes
d’avoir planifié et construit des bâtiments qui ont pour effet de déshumaniser la vie de leurs
usagers. On a même tenu certains architectes responsables, ou presque, d’avoir conçu, par
manque d’attention aux véritables besoins humains, des immeubles froids et monotones qui
sont perçus comme des lieux oppressants et déprimants par la majorité de leurs habitants et
qui, dans les pires cas, favorisent le vandalisme et la criminalité. Sans doute, les architectes
sont-ils souvent liés par des contraintes que leur imposent les promoteurs des projets, mais il
suffit de savoir que certains d’entre eux ont pris sur eux d’atténuer le plus possible les