Rapport de stage de validation en vue de l’obtention du titre de psychologue Stimulation cognitive chez les personnes âgées dépendantes, un exemple d’atelier de mémoire autobiographique Marion Chastagnier Sous la direction de Christian Marendaz1 & Béatrice Ferroum2 1) Laboratoire de Psychologie & NeuroCognition, UMR CNRS 5105. 2) Neuropsychologue à l’hôpital local de Joyeuse (07260). Je remercie Béatrice Ferroum pour ses explications, sa clarté, et sa gentillesse durant ce stage. Je remercie Christian Marendaz pour son accompagnement ces trois dernières années, et ses conversations enrichissantes. Je remercie les patients de l’accueil de jour pour leur sourire et leur espoir. Je remercie Sabine, Marie-Anne et Jean-Noël pour le partage de leur expérience. Je remercie Bertrand d’être là. Je remercie mes parents pour leur soutien et leur relecture. 1 Contexte du projet Ma formation reflète mon intérêt pour les sciences du comportement. J’ai suivi une formation de recherche car je souhaitais approfondir mes connaissances théoriques, dans la lignée de mes recherches en épistémologie. Je souhaitais acquérir la méthode et les connaissances des modèles de la psychologie cognitive et de la neuropsychologie. Je me suis ensuite dirigée vers un stage professionnalisant car je souhaitais être plus en contact avec les patients. Issue d’une formation de recherche, ce stage m’a donc permis d’enrichir mes connaissances par une pratique professionnelle. L’hôpital de Joyeuse étant une structure relativement petite et indépendante d’autres centres, le travail du neuropsychologue y est très polyvalent. Béatrice Ferroum a accepté ma candidature de stage et m’a permis de travailler dans une structure qui correspondait parfaitement à mon projet professionnel. J’ai ainsi pu développer les compétences pour pratiquer des évaluations cognitives, mais aussi pratiquer la stimulation cognitive individuelle et de groupe et élaborer des exercices et des ateliers de stimulation. J’y ai rencontré de nombreux patients, observant ainsi une grande diversité dans les pathologies et leur degré de gravité. J’ai également pu collaborer avec les équipes soignantes, apprenant les caractéristiques de leur travail et répondant à leur demande. C’est dans ce cadre que j’ai développé l’atelier de stimulation de mémoire autobiographique. Ce projet s’inscrit dans une collaboration avec l’équipe de l’accueil de jour. Il s’agissait de constituer un recueil de souvenirs des patients, ce recueil s’inscrivant dans un double objectif : d’une part conserver la richesse que sont ces souvenirs et les faire partager, d’autre part stimuler les facultés mnésiques des patients. 2 Sommaire Contexte du projet __________________________________________________________ 2 Sommaire _________________________________________________________________ 3 I. Présentation du lieu de stage ______________________________________________ 4 A. L’hôpital de Joyeuse________________________________________________________ 4 B. L’accueil de jour ___________________________________________________________ 4 II. Activité de stage ______________________________________________________ 6 A. Formation et collaboration __________________________________________________ 6 1. 2. B. Evaluation cognitive ________________________________________________________ 8 1. 2. 3. 4. C. Evaluation cognitive _____________________________________________________________ Bilan de suivi ___________________________________________________________________ Elaboration de projet de stimulation personnalisé _______________________________________ Approfondissement de bilan _______________________________________________________ 8 8 9 9 Stimulation cognitive ______________________________________________________ 11 1. 2. 3. 4. III. Elaboration d’exercices __________________________________________________________ Elaboration d’ateliers de stimulation ________________________________________________ Stimulation individuelle __________________________________________________________ Objectif du projet « atelier de mémoire autobiographique » ______________________________ 11 11 13 14 Atelier de mémoire autobiographique ____________________________________ 16 A. Bases théoriques __________________________________________________________ 16 1. 2. 3. B. Formation ______________________________________________________________________ 6 Collaboration ___________________________________________________________________ 7 Modèle classique des fonctions mnésiques (Tulving) ___________________________________ 16 Fonctions mnésiques, vieillissement normal et pathologique _____________________________ 17 Mémoire autobiographique _______________________________________________________ 18 Atelier de mémoire autobiographique ________________________________________ 20 Conclusion _______________________________________________________________ 22 Annexe 1 _________________________________________________________________ 23 Annexe 2 _________________________________________________________________ 24 Annexe 3 _________________________________________________________________ 25 Annexe 4 _________________________________________________________________ 26 3 I. Présentation du lieu de stage A. L’hôpital de Joyeuse L’hôpital local de Joyeuse est situé à Joyeuse, en Ardèche Méridionale. C’est un hôpital gériatrique regroupant plusieurs services. L’EPHAD (établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) accueille des personnes âgées dépendantes qui peuvent ainsi bénéficier des services de l’hôpital, suivi médical, prise en charge par l’équipe soignante pour les gestes quotidiens (hygiène, médication, repas). Cette équipe leur propose également une stimulation via des activités et des animations. Les patients peuvent bénéficier, selon leur demande et leur besoin, d’un suivi par une ergothérapeute, une kinésithérapeute, une psychologue clinicienne et une neuropsychologue. Pour les patients dépendants psychiquement et souffrant de troubles du comportement (fugue, déambulation...), une prise en charge en UPG (unité psycho-gériatrique) est possible. L'équipe pluridisciplinaire, les locaux et la vie au sein de l'unité sont conçus pour répondre aux besoins spécifiques des personnes atteintes de la maladie d'Alzheimer ou de troubles apparentés. Enfin une unité de soin prend en charge les patients qui nécessitent une hospitalisation avec des soins médicaux plus lourds. B. L’accueil de jour L’hôpital comprend également un accueil de jour. Les personnes prises en charge dans ce cadre sont des patients souffrant de maladie d’Alzheimer ou maladies apparentées, à des stades léger, modéré et sévère, préalablement diagnostiquées par le médecin coordinateur. La prise en charge est de 1 à 3 jours par semaine, à la journée ou à la demi-journée, et est assurée 4 par une aide soignante, une infirmière coordinatrice, un stagiaire et une neuropsychologue. Une consultation avec une psychologue clinicienne est possible à la demande. Une stimulation cognitive individuelle est proposée selon le profil du patient, d’une durée moyenne d’une heure chaque semaine ou toutes les deux semaines. Une stimulation cognitive en groupe a lieu le matin, avec des exercices adaptés selon les spécificités du groupe. Des activités manuelles (peinture, couture…) et intellectuelles (lecture, jeux de société) sont organisées l’après midi, alternant certains après-midi avec des activités physiques (gymnastique, relaxation) ou en extérieur (courses au supermarché, promenade). Cette prise en charge a deux objectifs principaux : Tout d’abord un objectif thérapeutique pour le patient, en maintenant ses capacités préservées par une stimulation cognitive et des activités, ce qui permet d’éviter une aggravation de la perte d’autonomie. Ensuite un objectif d’aide à l’aidant, en lui permettant d’aménager un temps pour lui et en lui apportant une aide psychologique. Des synthèses avec les médecins traitants et un bilan de suivi neuropsychologique ont lieu régulièrement afin de maintenir la pertinence du projet thérapeutique pour le patient. 5 II. Activité de stage A. Formation et collaboration 1. Formation Ma formation initiale est un Master 1 de philosophie. Cette formation m’a apporté un enrichissement culturel majeur, et des connaissances qui m’ont donné une base d’analyse et une méthode de raisonnement. Mes connaissances en épistémologie m’ont permis de développer une réflexion sur la pratique des sciences, et d’en comprendre la méthode. De plus, en étudiant plus précisément l’épistémologie des sciences du comportement, j’ai ainsi pu mettre en perspective, tant historiques que théoriques, les connaissances que j’ai acquises ultérieurement. C’est ainsi que j’ai pu profiter pleinement de ma formation en psychologie. Celle-ci m’a apporté des connaissances de base sur la psychologie clinique, sociale et expérimentale. Je me suis spécialisée en psychologie cognitive par un Master 1 parcours Neurocognition et cognition sociale. J’ai ainsi appris la méthode expérimentale des recherches en psychologie cognitive et appréhendé les moyens comme l’imagerie. J’ai acquis une compréhension des modèles théoriques des fonctions cognitives et une bonne connaissance en neuroanatomie. J’ai ensuite effectué un stage d’observation en neuropsychologie au CHU de Grenoble, au cours duquel j’ai pu apprendre la passation des tests utilisés dans un bilan classique. J’ai pu consolider mes connaissances en neuropsychologie dispensées en Master 1 par l’observation concrète des cas. Je me suis alors dirigée vers le Master 2 recherche de neuropsychologie. J’ai approfondi mes connaissances des modèles théoriques du fonctionnement normal et lésé du cerveau, d’une part par les enseignements prodigués dans la formation, d’autre part par mon travail de recherche, enfin en rencontrant des étudiants travaillant sur d’autres spécialités. J’ai ainsi appris à utiliser d’autres tests de neuropsychologie, et à en comprendre mieux les 6 spécificités et leurs implications, et à les mettre en rapport avec des modèles explicatifs. Cette réflexion sur le fonctionnement cognitif et les tests neuropsychologiques m’a permis d’apporter ma contribution dans le stage effectué à l’hôpital de Joyeuse. 2. Collaboration Ma collaboration avec les équipes soignantes a été enrichissante. Tout d’abord en récoltant leurs observations à propos du patient avant la passation des bilans, afin d’être vigilante à propos de causes possibles de trouble de comportement évoqué. De la même manière, j’ai eu des entretiens avec l’ergothérapeute et la psychologue clinicienne lorsqu’elles suivaient le patient. J’ai pu aussi les rencontrer après les passations, afin de leur présenter le compte rendu, soulever les difficultés rencontrées par le patient, discuter avec elle des conséquences de ces difficultés dans la vie quotidienne et leur prise en charge. Il m’est arrivé, suite à ces entretiens, de développer des exercices spécifiques afin de permettre à l’équipe soignante de proposer aux patients une stimulation cognitive adaptée à leur profil cognitif. Indépendamment des bilans, j’ai également rencontré les équipes soignantes pour les aider à développer des projets de stimulation cognitive. J’ai créé des exercices spécifiques correspondant à leur demande, adaptés et repris des exercices utilisés à l’accueil de jour. Nous avons pu parler des difficultés des patients et élaborer des stratégies pour leur prise en charge. 7 B. Evaluation cognitive 1. Evaluation cognitive Connaissant par ma formation les épreuves des bilans classiques, j’ai pu faire des évaluations cognitives de patients de l’EPHAD et de l’UPG. J’ai acquis une bonne maîtrise de la passation des tests, tant pour les évaluations cognitives complètes que pour les bilans préliminaires, selon la gravité de la pathologie du patient, ou de son niveau de coopération. J’ai utilisé des tests de fonctions mnésiques (RI RL 16, test des portes, DSM 48, BEM 144…), des tests de fonctions exécutives (TMT A et B, test de Hayling, Fluences verbales…), des tests de fonctions instrumentales (VOSP, Dénomination de Bachy et Langedock, DO 80…). J’ai appris à faire la synthèse et l’interprétation des résultats, des comptes rendus clairs destinés au médecin traitant et à utiliser le logiciel de gestion des dossiers médicaux et de soins Osiris. J’ai également appris à m’adapter au rythme des patients et à leur profil, appliquant ainsi mon empathie. 2. Bilan de suivi Dans le cadre de l’accueil de jour, j’ai effectué des bilans de suivi, c’est-à-dire des évaluations cognitives à six mois ou an après leur première évaluation lors de leur entrée à l’accueil de jour. Ces bilans permettent de suivre l’évolution de la pathologie des patients, et de noter les aggravations de disfonctionnement ou les stabilisations de fonctions affaiblies. On peut ainsi suivre l’évolution du profil cognitif du patient, et réévaluer sa prise en charge. Ces bilans sont de même type que les bilans d’entrée en accueil de jour, mais le travail de compte rendu est différent, puisqu’il faut comparer les résultats avec ceux des bilans précédents, prendre en compte les éléments nouveaux (par exemple, l’humeur et la coopération du patient, les observations de l’équipe soignante, les examens médicaux type imagerie qui ont pu être réalisés entre temps). 8 3. Elaboration de projet de stimulation personnalisé Après chaque bilan, que ce soit des évaluations ponctuelles, sur demande du médecin, ou des évaluations de suivi dans le cadre de l’accueil de jour, un projet de stimulation cognitive est élaboré. J’ai donc appris à développer et formuler ces projets de stimulation. L’intérêt de procéder ainsi est de créer pour chaque patient un récapitulatif clair des fonctions préservées et des fonctions déficitaires. En regard de ce descriptif, des exercices adaptés sont proposés, ce qui permet à l’équipe soignante d’avoir une idée précise des besoins et des limites de chaque patient, et de leur offrir ainsi une stimulation adaptée. Ces projets tiennent évidemment compte des préférences des patients, et de leur goût. Ainsi, l’atelier théâtre est tout à fait indiqué pour un patient souffrant d’une maladie d’Alzheimer, facilement expressif, qui aime faire rire les autres personnes et communiquer, mais pas pour un patient souffrant d’une maladie d’Alzheimer présentant une apathie et préférant rester isolé. Là encore, il s’agit d’une collaboration étroite avec l’équipe soignante, puisqu’elle connaît bien les préférences des patients et peut donner son avis sur les exercices qu’ils accepteraient ou non, et que ces projets seront réalisés par elle pour les stimulations de groupe. Afin de permettre une meilleure communication, j’ai élaboré à leur demande un lexique des différentes fonctions cognitives et de leur déficit, accompagné d’exemples d’exercices adaptés à chaque fonction. Cela leur permet d’être plus libre dans le choix des exercices, puisqu’elles ont les éléments nécessaires pour juger de la pertinence des exercices qui s’inscrivent dans la continuité des modèles proposés et des explications de la fonction cognitive. 4. Approfondissement de bilan Dans certains cas, le bilan classique pointe une problématique dans l’une des fonctions cognitives qu’il convient d’approfondir. Il arrive aussi pour certains patients que ce soit le personnel soignant ou l’ergothérapeute qui signale une difficulté particulière pour un patient. En ce cas, un bilan d’approfondissement est réalisé. A la différence des autres bilans, celui ci va être focalisé sur une fonction cognitive en particulier, afin d’établir précisément où se situe le problème. Ma connaissance des modèles théoriques du fonctionnement cérébral et 9 des pathologies associées m’a beaucoup aidé dans ce type de travail, tout comme l’analyse des tests dans leurs composantes. En effet, il s’agit alors de trouver des tests pertinents pour faire l’investigation d’une fonction, et parfois d’improviser des exercices qui donneront un aperçu qualitatif du déficit. Il est donc essentiel de pouvoir se baser sur un modèle de fonctionnement cérébral pour pouvoir choisir les tests et les exercices qui permettront de mettre en exergue le déficit précisément, en évitant les tests composites, ou en les doublant d’exercices ciblés. Par exemple Madame R. présentait lors du bilan un très léger déficit visuo-spatial. L’ergothérapeute qui la prenait en charge chaque semaine nous a signalé une incapacité à identifier certaines images, et une difficulté à se positionner dans l’espace. J’ai donc préparé une évaluation approfondie des fonctions visuo-spatiales de la patiente. En demandant à l’ergothérapeute de préciser quel type d’image la patiente n’arrivait pas à percevoir et lequel elle identifiait sans souci, il est apparu que Mme R. avait des difficultés pour les images non canoniques. Suivant le modèle des agnosies exploré par Annick Charnallet1, j’ai exploré les différents niveaux de perception visuo-spatiale en utilisant des épreuves de dénomination, d’appariement de forme, de décision d’objet et d’identification d’objet dégradés. J’ai également exploré la piste des images présentées en vue non canonique en lui faisant reconnaître puis classer des objets pris sous des angles différents. Ces exercices ont permis de montrer que les difficultés de la patiente pouvaient entrer dans le cadre d’une agnosie de transformation, c’est-à-dire une difficulté à imaginer un objet en trois dimensions à partir de la perception en deux dimensions. Ce type d’évaluation demande une bonne connaissance des tests et des modèles de fonctionnement cognitif, afin de pouvoir proposer au patient des exercices qui peuvent isoler le déficit. 1 Neuropsychologue au CMRR & Neuropsychologie. Pôle de psychiatrie et Neurologie, CHU de Grenoble. 10 C. Stimulation cognitive 1. Elaboration d’exercices Une autre mission pour laquelle la rencontre entre théorie et pratique est importante est la création d’exercices de stimulation pour répondre à la demande de l’équipe soignante. Dans le cadre de l’accueil de jour, l’équipe soignante a parfois des groupes hétérogènes, aussi lui fallait-il des exercices adaptés à plusieurs niveaux de pathologie en même temps. C’est ainsi que j’ai élaboré des exercices adaptés aux demandes spécifiques de l’équipe soignante, afin de permettre une pertinence de la stimulation pour chaque patient. Les exercices de recherche de différence entre deux images étant trop difficiles pour certains patients, j’en ai créé de nouveaux avec des images2 modifiées grâce au logiciel de manipulation d’image gimp (voir annexe 1). Afin de résoudre le problème des groupes homogènes, j’ai développé des exercices de dénomination à plusieurs niveaux (voir annexe 2). Ces exercices permettent en formant des équipes, l’une désignant la couleur, l’autre l’animal, d’intégrer des patients à différents degrés de pathologie pour le même exercice. J’ai pu aussi apporter de nouveaux types d’exercice, comme l’identification d’expression émotionnelle, sachant que mon mémoire de Master 1 portait sur cette question. 2. Elaboration d’ateliers de stimulation J’ai également développé des ateliers de stimulation cognitive de groupe. J’ai continué un atelier d’orientation temporelle qui comprend pour chaque mois de l’année des questions simples à double choix à propos de ce mois, avec des images et des photographies pour permettre soit une réponse verbale, soit une réponse par désignation. Cet atelier fait travailler plusieurs fonctions. Tout d’abord, cela permet de travailler les repères temporels tels que le climat selon les saisons, les évènements liés à chaque mois (nouvel an, fête du travail, fête des mères…), les proverbes et les coutumes associées (en avril, ne te découvre pas d’un fil). Afin de faire travailler le réseau sémantique, il se trouve également des 2 images issues du Grand monde du préscolaire (http://recitpresco.qc.ca/), sous contrat creative common 11 évènements historiques célèbres (découverte de l’Amérique, construction de la tour Eiffel), soit en question à choix multiple, soit en question ouverte, lorsque l’événement peut avoir été vécu par les patients, faisant alors intervenir la mémoire autobiographique (libération de Paris, mai 68) (voir annexe 3). J’ai conçu un atelier théâtre, aidée par ma formation de baccalauréat option théâtre. J’ai repris des exercices classiques, principalement d’improvisation afin de ne pas pénaliser les patients qui ne peuvent retenir un texte, et des exercices muets afin de permettre aux patients souffrant de troubles de langage de ne pas être pénalisés. Cet atelier avait plusieurs objectifs. Tout d’abord développer sa confiance en soi, en favorisant l’expression des patients. Puis travailler l’expression corporelle, ce qui contribue à exercer la motricité, s’entraîner à exécuter des gestes et mimer des situations, ce qui permet de stimuler les praxies, mémoriser de courts textes, ce qui permet de travailler la mémoire épisodique ; et enfin se remémorer de courts textes appris dans le passé, ce qui permet de travailler la mémoire autobiographique sémantique. Voici des exemples d’exercice de l’atelier théâtre : le mime muet fait travailler les praxies et la flexibilité mentale, puisqu’il faut d’une part trouver le geste adéquat illustrant une situation, et d’autre part s’adapter à la contrainte du muet. Les mimes d’animaux font en plus intervenir la mémoire sémantique. Le mime d’expression émotionnelle fait intervenir la représentation mentale des émotions. L’improvisation de groupe est l’exercice le plus difficile, qui fait intervenir à la fois la flexibilité mentale, l’attention sur ce que font les autres, et la représentation mentale de la scène dans son ensemble. A la demande de l’équipe soignante de l’EPHAD, j’ai développé un atelier de stimulation haptique avec l’aide du professeur Edouard Gentaz3. Le besoin de ce type de stimulation est venue d’une patiente qui, bien que conservant la plupart de ses capacités cognitives, présentait des déficits sensoriels au niveau visuel et auditif. Il fallait donc trouver des exercices utilisant la modalité haptique afin de pouvoir la faire participer, et que ces exercices puissent convenir aux autres patients également. Les exercices de motricité ont pour but de permettre au sujet de travailler sa motricité, d’explorer son environnement et d’agrandir son espace de travail. Par exemple, en prenant la 3 Laboratoire de Psychologie & NeuroCognition, UMR CNRS 5105 12 main du patient, on lui fait suivre sur la table une ligne prédéterminée. Il doit ensuite refaire le chemin tout seul. Le principe des exercices de représentation mentale est que le patient doit former une image mentale de ce qu’il perçoit tactilement afin de le décrire ou de le reproduire. Cela exerce la perception haptique, fait travailler la capacité de transfert d’information, inter ou intra modal (c’est-à-dire d’une main à l’autre). La mémoire sémantique est également sollicitée dans certaines tâches. Les exercices de catégorisation font travailler la capacité de catégorisation, la mémoire sémantique et la flexibilité mentale. Le sujet doit trier les objets selon des catégories, par exemple, par forme ou par lieu où l’objet peut être utilisé. Le changement de critère de classement fait travailler la flexibilité mentale, et permet d’adapter la difficulté de l’exercice au profil cognitif du patient. Le type de tâche et le type d’objet présentés au patient pour les exercices de représentation ou de catégorisation permettent de graduer la difficulté de l’exercice et de l’adapter aux caractéristiques du patient. Par exemple, l’identification d’une texture simple est plus facile que la représentation d’un objet quotidien, elle même plus facile que la représentation d’une figurine. Enfin, des exercices de traitement séquentiel exercent le traitement de données séquentielles. Il s’agit de reproduire un tempo donné tactilement. Le rythme est tapoté sur le dos ou la main de la personne, et celle-ci doit le reproduire sur la table ou son accoudoir. L’avantage de cette activité est qu’elle peut s’exercer en groupe, ou s’intégrer à des activités de chant. 3. Stimulation individuelle J’ai également eu l’occasion de pratiquer de la stimulation cognitive individuelle. L’intérêt de ce type de stimulation est de pouvoir prévoir un programme parfaitement adapté au patient, de pouvoir travailler avec lui des points précis et avoir un meilleur suivi de l’évolution du patient au fil des séances. Il est également possible de mieux cerner les difficultés du patient, en adaptant des exercices précis. Par exemple, pour des difficultés de mémoire de travail, il m’est arrivé de reprendre des exercices discriminant la boucle phonologique de l’administrateur central, me basant sur 13 le modèle de mémoire de travail de Baddeley4 afin de pouvoir situer plus précisément d’où venait la difficulté du patient. Ces séances durant généralement une heure, il est possible d’en contrôler le déroulement, et donc de programmer des exercices de mémoire épisodique en contrôlant la nature et la durée des tâches interférentes. Ceci permet de s’adapter aux capacités du patient, et donc de trouver une stimulation qui le fait travailler sans être hors de sa portée. De plus, le format hebdomadaire ou bimensuel offre la possibilité de donner des exercices à faire d’une séance à l’autre au domicile du patient, ce qui lui donne un lien entre les séances et inscrit le travail de stimulation cognitive dans une problématique quotidienne. Il était nécessaire de proposer aux patients une diversité, un rythme dans les exercices et un aspect parfois ludique afin de garder intact leur capacité de concentration. J’ai pu ici utiliser mes connaissances en littérature, pour choisir des textes intéressants et plaisants, qui étaient adaptés pour travailler l’imagerie mentale comme stratégie d’encodage et de récupération mnésique. Le travail d’imagerie mentale pouvait s’accompagner d’activité de dessin, soit que le patient dessine ce qu’il se représentait, soit qu’il me le décrive et que je le dessine pour lui pour qu’il précise son imagerie. J’ai également utilisé les outils informatiques à ma disposition, en utilisant par exemple des exercices du logiciel de stimulation cognitive Presco. Ce support, généralement inhabituel pour les patients, et son interactivité maintenaient leur capacité de concentration et permettaient un plus grand choix d’items pour le même exercice. 4. Objectif du projet « atelier de mémoire autobiographique » L’atelier de mémoire autobiographique s’est déroulé dans le cadre de la stimulation cognitive à l’accueil de jour. Il a été divisé en stimulation individuelle et en stimulation de groupe. Plusieurs objectifs on été poursuivis. Tout d’abord, un objectif de stimulation : les patients présent à l’accueil de jour souffrent majoritairement de maladie de type Alzheimer, une patiente présente une aphasie progressive, deux une démence vasculaire, et enfin une a subi un accident vasculaire cérébral. Il était donc pertinent d’explorer leur mémoire autobiographique, afin de stimuler les fonctions préservées. De plus, les passations en groupe 4 Baddeley, A.D. (1986). Working Memory. Oxford: Clarendon Press. 14 permettent une émulation entre les patients, soit parce qu’ils osent parler au vu de ce que les autres disent, soit en trouvant dans leur propre passé des échos à ce qu’évoquent les autres. La passation individuelle permet de travailler les fonctions mnésiques en donnant un cadre à la remémoration, afin d’orienter les souvenirs dans une chronologie et travailler aussi bien la mémoire épisodique que sémantique. Enfin, nous voulions faire un recueil de ces souvenirs afin de permettre aux familles et aux amis de conserver cette mémoire. 15 III. Atelier de mémoire autobiographique A. Bases théoriques 1. Modèle classique des fonctions mnésiques (Tulving) Le modèle classique de la mémoire est un modèle multisystème. Des dissociations ont pu être observées dans le comportement mnésique de patient, c’est-à-dire qu’un patient présente un déficit aux tests évaluant un type ou système de mémoire tandis que ses performances aux tests évaluant un autre type de mémoire sont préservées, alors qu’un autre patient présente un profil de performance inversé. Ces doubles dissociations sont à l’origine de la modélisation du système de mémoire élaboré par Tulving. Le modèle fait état de trois systèmes de mémoire qui rendent possible l’acquisition, la rétention et l’utilisation de connaissances. Il s’agit des systèmes de mémoire procédural, sémantique et épisodique. A chacun de ces systèmes est associé un niveau de conscience5. Ces systèmes ainsi que les niveaux de conscience sont hiérarchisés, sur la base d’arguments ontogénétiques et phylogénétiques. La mémoire procédurale concerne les apprentissages et les comportements mnésiques de procédures comportementales ou sensori-motrices (savoir-faire), et est associée à un niveau de conscience dit anoétique, c’est-à-dire une absence de conscience. Ainsi, le sujet est capable de réaliser une action sans pouvoir expliquer quand et comment il a appris cette habileté, par exemple faire du vélo ou savoir jouer au piano. La mémoire sémantique concerne un contenu propositionnel, des connaissances générales indépendantes de leur contexte d’acquisition. Ce système est associé à un niveau de conscience dit noétique, puisque le sujet est conscient de posséder ces connaissances concernant des objets, des évènements, et des liens qui les agencent. Néanmoins, le sujet n’a pas besoin d’avoir une conscience de lui-même en lien avec ces connaissances pour faire appel à elle. On ne peut guère se situer par rapport à l’histoire de l’Egypte antique ou à une 5 Tulving, E. (1985). Memory and consciousness. Canadian Psychology, 26, 1-12 16 règle de grammaire. Ce système de mémoire se réfère au savoir abstrait, le « know » pour Tulving. La mémoire épisodique est le système qui permet la remémoration consciente des souvenirs autobiographiques, accompagnée des caractéristiques phénoménologiques (perceptions, pensées, sentiments) présentes lors de l’expérience vécue, et contextualisée dans l’espace et le temps. Ce système est associé à un niveau de conscience autonoétique, puisque le sujet a conscience de lui-même comme acteur du souvenir. Et c’est cette conscience de soi qui permet un contexte phénoménologique riche au souvenir. Ce système de mémoire se réfère à la remémoration consciente, le « remember » pour Tulving. Afin d’évaluer le niveau de conscience associé à un souvenir, Tulving a mis au point un paradigme dans lequel le sujet juge la nature de son expérience, distinguant les réponses « know » ( je sais) et « remember » (je me souviens). Il est ainsi possible de distinguer les souvenirs issus du système épisodique des souvenirs issus du système sémantique. La mémoire autobiographique concerne les souvenirs du passé du sujet. Ici, la mémoire sémantique et la mémoire épisodique peuvent intervenir. Nous avons des connaissances sur notre propre vie qui ne sont pas associées à un niveau de conscience autonoétique. On peut très bien savoir que l’on a habité dans cette ville sans pour autant avoir un souvenir contextualisé avec soi comme acteur de cet événement. Le patient KC étudié par Tulving présente d’ailleurs un profil mnésique caractérisé par une incapacité à récupérer des souvenirs autobiographiques épisodiques, mais une capacité préservée à partager des connaissances personnelles passées. Tulving qualifie cette mémoire de « mémoire sémantique personnelle ». Par ailleurs, la mémoire autobiographique peut être épisodique. Elle constitue alors un voyage dans le temps où le sujet peut mentalement revivre les évènements passés, étant acteur de son souvenir phénoménologiquement contextualisé. 2. Fonctions mnésiques, vieillissement normal et pathologique Tulving a développé un modèle descriptif de l’implication du cortex pré-frontal dans les comportements de mémoire épisodique chez les patients jeunes, le modèle HERA (Hemispheric Encoding Retrieval Asymmetry). Basé sur des données d’imagerie durant des tâches mnésiques, le modèle décrit une asymétrie de l’activation pré-frontale selon que la tâche est de l’encodage ou de la récupération de souvenirs épisodiques. Le cortex pré-frontal 17 droit est plus particulièrement activé lors de tâche de récupération, tandis que le cortex préfrontal gauche serait plus dévolu à l’encodage (bien que cette dernière affirmation soit dépendante du matériel utilisé). Chez les sujets âgés, on observe un déclin cognitif, et les performances mnésiques sont affaiblies. Mais la dissociation entre une altération frontale et une préservation hippocampique expliquerait le profil des comportements mnésiques des sujets sains âgés. Le modèle HAROLD (hemispheric asymmetry reduction in old adults), formulé par Cabeza en 2002, fait état d’une réduction de la latéralisation des comportements mnésiques, ce qui expliquerait la dégradation des stratégies d’encodage et de récupération. Les performances sont donc améliorées par une aide à l’encodage, ou dans le cas qui nous intéresse, c’est-à-dire la récupération de souvenirs autobiographiques, par des indices et des évocations fortes. Dans la maladie d’Alzheimer, les structures les plus précocement atteintes sont l’hippocampe, puis le lobe pariétal. Des études ont montré que l’activité du cortex préfrontal en revanche semblait augmenter. Il n’est pas possible de dire si cette hyper activation résulte d’un mécanisme de compensation, puisqu’aucun lien n’a pu être établi entre les performances des patients et cette hyper activation. On observe une amnésie antérograde, c’est-à-dire une incapacité à former de nouveaux souvenirs et des apprentissages. On observe également une amnésie rétrograde, c’est-à-dire une incapacité à récupérer les souvenirs d’évènements ayant eu lieu avant le début de la pathologie. Cette amnésie se présente avec un gradient temporel, les souvenirs anciens étant mieux conservés que les souvenirs plus récents. Les patients souffrant d’une maladie d’Alzheimer conservent donc, selon le stade d’évolution de leur pathologie, une mémoire autobiographique qui peut être interrogée. 3. Mémoire autobiographique Conway et Pleydell-Pearce6 ont élaboré un modèle explicatif de la mémoire autobiographique. Les souvenirs autobiographiques correspondent pour eux à des représentations combinant trois types d’informations, organisées hiérarchiquement en 6 Conway, M.A., & Pleydell-Pearce, C.W. (2000). The construction of autobiographical memories in the selfmemory system. Psychological Review, 107, 261-288. 18 fonction de leur degré d’abstraction et de leur spécificité temporelle : les périodes de vie (lifetime period), les événements généraux (general events) et les événements spécifiques (event specific knowledge). Les périodes de vie sont les éléments les plus généraux, qui se mesurent sur de longues durées. Elles permettent une segmentation et une chronologie dans le déroulement de la vie. Elles sont le résultat d’une structuration abstraite de connaissances, qui qualifient chaque période de vie. Elles permettent d’accéder aux connaissances plus spécifiques des évènements généraux. Les évènements généraux regroupent les connaissances liées à des évènements répétés, supérieurs à une journée ou liés entre eux par un thème. Ces connaissances sont des index généraux d’évènements spécifiques, car si ils sont caractérisés par une conscience du sujet comme acteur, ils ne sont pas phénoménologiquement contextualisés. Les évènements spécifiques constituent les souvenirs autobiographiques épisodiques, uniques, riches d’un contexte phénoménologique précis. Pour Conway, la hiérarchisation de ces éléments mnésiques permet leur récupération. Les connaissances stockées en termes de périodes de vie constituent un index des événements généraux relatifs à une période de vie précise. A leur tour, les connaissances issues du niveau des événements généraux facilitent l’accès aux événements spécifiques. Cette récupération suivrait alors un processus réitératif, constitué de trois étapes, une phase d’élaboration d’indices, une phase de recherche d’informations et une phase d’évaluation et de vérification du résultat de la recherche. C’est sur cette base qu’ont été développés les paradigmes de mémoire autobiographique basés sur un mot indice. Conway7 propose une illustration de la mise en œuvre du processus génératif de récupération à partir du mot cinéma : « Quand suis-je allé souvent au cinéma ? » (= phase d’élaboration d’indice) ; « quand j’étais étudiant » (= accès à une période de vie) ; « j’habitais un foyer d’étudiants près de Russel square » (= information relative à cette période) ; « nous avions l’habitude d’aller au cinéma d’art » (= accès à un événement général) ; « je me revois être assis dans un fauteuil rouge spacieux en train de regarder the spirit of Behave » (= accès aux détails spécifiques, notamment sensori-perceptifs). 7 Conway, M.A., Turk, J., Miller, S., Logan, J., Nebes, R., Meltzer, C., & Becker, J. (1999). The neuroanatomical basis of autobiographical memory. Memory, 5, 1-25. 19 Ce processus de récupération appelé génératif n’est pas le seul possible. Un processus direct de récupération peut aussi être mis en jeu. En ce cas, la hiérarchie est suivie dans le sens inverse, puisqu’il s’agit d’une formation automatique, d’un réseau de représentations autobiographiques à partir d’indices directement fournis par l’environnement externe, qui suit alors un schéma allant du détail spécifique aux connaissances générales et aux périodes de vie. B. Atelier de mémoire autobiographique Sur la base de ces considérations théoriques, j’ai élaboré avec l’équipe soignante de l’accueil de jour un atelier de mémoire autobiographique pour les patients. Une personne souffrait d’aphasie progressive primaire, une autre présentait des séquelles d’un accident vasculaire cérébral, les autres avaient une maladie de type d’Alzheimer allant d’un stade léger à un stade sévère. Seuls deux patients ont refusé de participer. La passation s’est déroulée en deux parties, l’une étant un entretien individuel, l’autre une séance en groupe. J’ai utilisé pour les entretiens individuels le questionnaire de mémoire 8 autobiographique du professeur Liliane Manning , l’AMI (Autobiographical Memory Inventory). Ce questionnaire est découpé en période de vie (enfance, jeune adulte, période récente), et regroupe des questions sur des connaissances générales (à quelle école alliez vous ?) et des questions sur des évènements spécifiques (avez-vous un souvenir particulier lors de cette période ?). Afin d’aider les patients les plus gênés par la chronologie, je leur dessinais une frise et la complétais avec eux. Les passations duraient entre une et deux heures, selon l’humeur du patient. Ce format permettait au patient d’avoir le temps de se replonger dans ses souvenirs, et de rester concentré sur le voyage dans le temps qui lui était demandé. De plus, l’évocation des souvenirs était cadrée par l’entretien, ce qui d’une part permettait de contrôler la nature des souvenirs, d’autre part facilitait leur évocation par un amorçage. A partir des réponses des sujets, j’ai observé pour chacun le gradient temporel qui caractérisait leurs souvenirs, et noté les évènements généraux qui leur évoquaient le plus de souvenirs. Ainsi, le déclenchement du processus de recherche de souvenirs et la mise en 8 Laboratoire d’Imagerie et de Neurosciences Cognitives (LINC), UMR 7191 20 œuvre du processus génératif de récupération a permis de stimuler les fonctions mnésiques préservées des patients. Le travail sur la chronologie a permis à certains, en ordonnant leurs souvenirs en période de vie, de retrouver des souvenirs enfouis, auxquels ils n’avaient pas repensé depuis longtemps, recréant en quelque sorte la fonction d’index des périodes de vie. Grâce à cela nous avons préparé les entretiens de groupe. Les séances se sont déroulées sur deux semaines. Lors de la première semaine, nous avons interrogé les patients sur la période de vie correspondant à l’enfance et la vie de jeune adulte allant jusqu’au mariage. La seconde semaine, nous les avons interrogés sur la période allant du mariage à l’époque actuelle, sachant que leur gradient temporel les empêchait pour la plupart d’évoquer des souvenirs de la période récente. L’aide soignante amenait un thème de discussion, sur lequel les patients évoquaient leurs souvenirs, soit en réponse au thème, soit en écho à des souvenirs évoqués par d’autres. Les processus génératifs et directs ont donc été exploités pour stimuler au maximum les patients. L’émulation a été très efficace dans cet exercice, que ce soit dans l’évocation du même type d’évènements, ou même dans l’utilisation d’expression (« pas vu, pas pris » « mais vu, rousti »). Les personnes les plus atteintes par la maladie d’Alzheimer ont d’ailleurs réussi à évoquer plus de souvenirs en groupe qu’en passation individuelle. D’après mes notes et les enregistrements effectués lors des entretiens, j’ai retranscrit les souvenirs évoqués pour chaque patient. Ces retranscriptions seront utilisées pour l’élaboration d’un recueil qui est encore en préparation. Les familles et les amis des patients pourront ainsi garder une trace de la vie de leurs aînés. 21 Conclusion Mon stage à l’hôpital local de Joyeuse sous la direction de Béatrice Ferroum m’a été très bénéfique. De par sa polyvalence, il m’a permis d’élargir mon expérience et d’appliquer de manière pratique mes connaissances acquises durant ma formation universitaire. Ma formation de recherche m’a fait acquérir de solides bases sur les modèles du fonctionnement cérébral et les méthodes de son étude. J’ai ainsi pu mettre en relation ces connaissances avec ma pratique professionnelle. J’ai pu donner un cadre théorique à mes évaluations cognitives, et élaborer des approfondissements d’évaluation en regard des modèles cognitifs étudiés lors de mon Master. Ma collaboration avec les équipes soignantes m’a appris à connaître les exigences de leur métier et le quotidien des patients. J’ai également pu créer des exercices de stimulation en me basant à la fois sur les besoins exprimés par l’équipe soignante en fonction des patients, et à la fois sur mes acquis théoriques concernant les comportements liés au fonctionnement normal et pathologique du cerveau humain. L’atelier de mémoire autobiographique m’a permis d’apporter aux patients une stimulation cognitive adaptée, basée sur les modèles du fonctionnement mnésique de Tulving et Conway. Le métier de neuropsychologue me permettra d’associer mes recherches en neuropsychologie et une pratique thérapeutique. Je pourrai grâce à mon savoir universitaire apporter aux patients une prise en charge adaptée. Je compte poursuivre mon projet professionnel dans l’évaluation et la stimulation cognitive des personnes âgées souffrant de pathologies dégénératives dans des structures de type accueil de jour. 22 Annexe 1 Exemple d’exercice visuo-spatial (images issues du Grand monde du préscolaire (http ://recitpresco.qc.ca/), sous contrat creative common) 23 Annexe 2 Exemple d’exercice de dénomination à plusieurs niveaux (images issues du Grand monde du préscolaire (http ://recitpresco.qc.ca/), sous contrat creative common) Eléphant orange Kangourou vert 24 Annexe 3 Exemple d’exercice de l’atelier d’orientation temporelle. 25 Annexe 4 Exemple d’exercice de mémoire de travail (boucle phonologique) verbale en modalité auditive. Répéter les mots dans l’ordre alphabétique Normal Chat, Vie, Tôt Bougie, wagon, kilo Tapis, vélo, doré Effet de longueur de mot Pantalon, cheminée, écurie Animal, élégant, arrosoir Cinéma, torturé, abricot Effet de similarité phonologique Sapin, savon, matin Bateau, carreau, château Chariot, sabot, hameau 26