LES PARALYSIES OCULOMOTRICES
DOSSIER
126Pratiques en Ophtalmologie • Mai 2011 • vol. 5 • numéro 44
Les paralysies congénitales du VI
sont rares. Il existe une forme bé-
nigne du nourrisson, unilatérale,
le plus souvent spontanément
résolutive dans les six premiers
mois de vie. Les formes bilaté-
rales s’intègrent le plus souvent
dans des formes syndromiques
complexes. Les deux formes les
plus classiques sont le syndrome
de Möbius et le syndrome de
Stilling-Duane.
LE SYNDROME DE MÖBIUS
Le syndrome de Möbius associe
une diplégie faciale, une para-
lysie bilatérale de l’abduction
et souvent des anomalies géné-
rales (malformations des extré-
mités, atteintes des dernières
paires crâniennes, retard men-
tal). Dans la majorité des cas,
le syndrome de Möbius résulte
d’anomalies vasculaires préna-
tales du tronc cérébral (1).
LE SYNDROME
DE STILLING-DUANE
Celui-ci est une atteinte congé-
nitale du VI, liée à une agénésie
complète ou partielle du noyau
et du tronc du VI, associée à une
innervation aberrante du droit
latéral par des fibres destinées
au droit médial. Le tableau cli-
nique comporte du même côté
une paralysie de l’abduction et
une rétraction du globe lors de
l’adduction. La fente palpébrale
s’élargit lors de l’abduction en
raison de la contraction des
obliques. Elle se rétrécit en ad-
duction par une rétraction du
globe dans l’orbite liée à l’asso-
ciation de la co-contraction des
deux droits horizontaux et de
l’effet "corde de rappel" du droit
latéral fibrosé (2).
Le syndrome de Stilling-Duane
est habituellement décrit
comme un syndrome de restric-
tion et un diagnostic différentiel
des paralysies du VI, mais il est
en fait une atteinte congénitale
du VI. Il atteint plus souvent les
filles et l’œil gauche. La majorité
des cas sont sporadiques, mais
des formes héréditaires sont
rapportées dans la littérature et
plusieurs mutations sont impli-
quées. Des anomalies associées
sont présentes chez un quart des
patients environ.
ETIOLOGIES DES
PARALYSIES DU VI
Chez l’enfant, on évoquera prin-
cipalement les étiologies congé-
nitales, traumatiques et tumo-
rales (4).
Les principales causes chez
l’adulte comprennent les ma-
ladies vasculaires, les trauma-
tismes et les tumeurs cérébrales
(1, 3, 5).
Des atteintes isolées transitoires
sont retrouvées aussi au cours
des maladies infectieuses, fé-
briles et après vaccinations. Les
HTIC primaires ou secondaires
sont souvent responsables d’une
paralysie du VI bilatérale car ce
nerf présente un trajet long à
la base du crâne, donc sensible
aux variations de pression céré-
brale. D’autres signes cliniques
comme un œdème papillaire de
stase bilatéral, des acouphènes
et des éclipses visuelles sont
alors souvent retrouvés.
Dans les atteintes nucléaires,
on retrouve souvent une at-
teinte d’une ou plusieurs autres
paires crâniennes et une para-
lysie de la latéralité du regard.
Les causes sont principalement
ischémiques, tumorales ou par
démyélinisation.
L’atteinte du VI dans l’espace
sous-arachnoïdien est dite "non
localisatrice". Des étiologies va-
riées sont évoquées : inflamma-
toires (SEP, lupus ou sarcoïdose),
tumorales, traumatiques et in-
fectieuses (maladie de Lyme, sy-
philis…).
Dans le sinus caverneux, la sé-
miologie est souvent plus riche
avec des associations à un syn-
drome de Claude-Bernard Hor-
ner homolatéral, une paralysie
du III et/ou du IV ou une atteinte
du trijumeau. Les étiologies sont
diverses : tumorales, vasculaires
(thromboses et anévrismes de la
carotide interne, fistules caroti-
do-caverneuses), ischémiques
(maladie de Horton et diabète),
inflammatoires (sarcoïdose, tu-
berculose et syndrome de Tolo-
sa-Hunt), infectieuses et trauma-
tiques (1, 6).
DIAGNOSTICS
DIFFÉRENTIELS
Le principal diagnostic différen-
tiel est représenté par l’atteinte
myogène du muscle droit latéral
dont les principales étiologies
sont la myasthénie, les myosites,
rarement les myopathies dysthy-
roïdiennes. Les traumatismes,
par lésion directe du muscle et/
ou incarcération musculaire
et les spasmes en convergence
peuvent poser aussi le problème
du diagnostic différentiel (1, 5).
CONDUITE À TENIR
DEVANT UNE PARALYSIE
ACQUISE DU VI
CHEZ L’ENFANT
Les examens complémentaires
doivent avant tout éliminer une
tumeur intracrânienne. Une IRM
cérébrale, ou à défaut un scan-
ner, doit être pratiquée dans les
meilleurs délais. Si l’imagerie cé-
rébrale est normale, une ponc-
tion lombaire, à la recherche
d’une cause infectieuse ou in-
flammatoire, sera indiquée (4).