Qui peut observer les entreprises? Les Juristes disent que c`est une

Qui peut observer les entreprises? Les Juristes disent que c'est une «fiction légale» qui n'existe
qu'au travers de contrats qu'elle a noue avec des partenaires économiques. Si elle n'a pas de
contrats, pas de clients, elle cesse d'exister.
Les sociologues disent qu'elle est «un champs de revendications»: lieu de conflit où
s’opposent des intérêts privés.
Les économistes.
Les politiques disent que l'entreprise c'est d'abord un vecteur de progrès puisque l'on qualifie
le niveau de développement économiques d'un pays au travers de ses capacités productives (et
contributives).
Les représentations de l'entreprise sont circonstanciées dans le temps (dépend de l'époque) et
sont singulières compte tenu de l'analyste (de l'observateur).
A. QU'EST CE QU'UNE ENTREPRISE?
1. Cartographie des représentations de l'entreprise
L'entreprise est considérée comme un citoyen dont les frontières évoluent. Il y a quatre cartes
possibles pour lire une entreprise:
On parle d'une entreprise qui serait un point ou un terrain: Pour les auteurs de la pensée
Classique, l'entreprise est considérée comme un moyen rhétorique pour faciliter la discussion
autour du système de prix, qui permet un ajustement parfaitement décentralise. Ces auteurs
considèrent l'entreprise comme un point, ce qui renvoie à l'idée que l'entreprise n'a pas
d'autonomie d'action, elle est complètement dépendante du marché, lequel marché fixe un prix
de marché qui s'impose à l'ensemble des entités économiques : théorie de l'équilibre de
marché. Les entreprises ont une taille qui ne leur permettent pas d'infléchir les conditions de
marché à leur avantage. Elles dépendent complètement de l'état de la concurrence,
l'entrepreneur se soumet aux conditions du marché. Elle n'est pas acteur de l'économie, elle
est un agent passif sans influence. Le marché a trois qualités : il est omniprésent (qui s'impose
à tout moment quelques soit le lieu), omniscient (qui s'impose aux agents passifs que
constituent les entreprises, il impose sa loi, ses règles à l'ensemble des acteurs économiques),
omnipotent (il est tout puissant, il n'est pas possible de contredire le marché).
Auteurs de la pensée Classique: Smith, Ricardo, Malthus, JB Say.
Les grands auteurs de la pensée économique de Catherine Mills collection AES Montchretien
L'entreprise peut être un terrain: une nouvelle génération de micro économistes neo
classiques considère que l'entreprise évolue dans un univers imparfait contredisant la pensée
classique en disant que le marché est imparfait. Les informations entre les acteurs ne
s'échangent pas spontanément dans une transparence postulée par les classiques. Les neo
classiques arrivent fin du 19em. Des mécanismes d'incitation seront mis en place pour faciliter
la révélation du niveau d'information pertinent (notamment l'Etat), en effet puisque l'accès à
l'information est distribue de façon asymétrique (symétrie d'information) parmi les acteurs,
plusieurs d'entre eux vont adopter des comportements stratégiques pour occuper sur le marché
une position satisfaisante qu'on qualifie d'opportuniste.
Pour les sociologues, l'entreprise n'existe pas davantage que ce que démontrait les classiques,
mais pas parce qu'elle est un agent passif, pour d'autres raisons très différentes. Si l'entreprise
des classiques est à la fois détachée de la société (ne joue pas de rôle dans la société, agent
passif) et vide de substance sociale, pour les sociologues c'est une toute autre présentation qui
prévaut: l'entreprise est représentée comme un lieu de travail où s'affrontent des catégories
sociales. Elle a un rôle de loupe sociale où des catégories sociales qui se forment ne sont
finalement que la reproduction de ce qu'il s'est déjà forme à l'extérieur de l'entreprise. C'est un
modèle de phénomène de société pour lequel elle n'a pas fait acte de création particulière, elle
est un double de la société. Le fait de savoir sil existe un Dehors ou un Dedans (notion de
frontières) n'a pas de sens pour les sociologues qui ne pensent pas l'entreprise comme une
entité sociale ayant une autonomie. L'entreprise est un support concret (substrat) pour
comprendre l'impact du système productif dans les rapports sociaux du travail.
Pour l'ensemble de ces représentations, la question des frontières de l'entreprise est écartée
(soit elle est un point, soit elle est un terrain).
L'entreprise est une organisation où la notion de hiérarchie est cardinale, fondamentale:
l'entreprise est définie à l'intérieur de frontières déterminables (on peut dire où elles se
positionnent) et elle est en mesure d'affronter le marché, elle est capable de s'organiser, de
mener des stratégies.
L'ouvrage fondateur c'est The modern corporation and private property de Berle et de Means
datant de 1932.
Les uns détiennent un pouvoir de gestion dans l'entreprise, les autres détiennent un pouvoir de
propriété sur l'entreprise. Les propriétaires observent à l'extérieur de l'entreprise celle-ci
comme un objet de rentabilité.
Capital social: apports des associes dans les sociétés. Ils constituent un engagement à
rembourser cet apport au moment de la dissolution de l'entreprise. Le capital social est parmi
le passif.
Il y a donc bien une coupure, un écart qui se fait entre une logique du Dehors (celle des
actionnaires qui ne sont pas forcément d'accord entre eux) et une logique du Dedans (celles
des directeurs, dirigeants et celles des salaries)
En 1937 Ronald Coase explique l'existence de la firme par le biais d'un concept qu'il introduit,
qu'il construit, celui de « coût de transaction »: l'existence de l'entreprise s'explique comme
une réponse au marché. L'entrepris permet de minimiser les coûts du recours au marché en
assurant du Dedans (intérieur des frontières) une coordination de toutes les activités qui
auraient dues, ou auraient pu être contractées au Dehors. (ça coûte moins cher d'acheter un
produit fabrique par une entreprise que d'avoir à le fabriquer soi-même).
L'entreprise-organisation: elle prend du volume, cette entreprise est capable d'un
comportement (réponse adaptée à des contraintes d'environnement). Elle est capable de
s'organiser et cette organisation l'autorise à adopter une stratégie en réponse aux opportunités
(aux risques) laissées par le marché (années 1950-1960). Au tournant du XXème siècle
arrivent ceux que l'on appelle «les comportementalistes», ils définissent l'entreprise à
l'intérieur de frontières spécifiques; elle est identifiable par un Dedans et un Dehors. A
l'intérieur de l'entreprise ce sont les insiders (ce qui ont volontairement investi l'entreprise et
sont en relation contractuelle avec celle-ci). A l'extérieur on trouve les outsiders au premier
rang desquels on trouve les actionnaires, les associes ou les bailleurs de fond, tout ceux qui
ont apporté les fonds nécessaires dans un premier temps à la constitution de l'entreprise ou au
moment d'une augmentation du capital social. Ils n'ont pas du tout l'idée d'une logique du
Dedans ou du Dehors.
Logique du Dedans: logique d'affiliation (je suis affiliée à mon entreprise parce qu'elle m'a
recruté et je lui dois deux choses: une loyauté vis à vis des objectifs qui définissent mon poste,
et de l'efficacité). On rémunère cette loyauté et cette efficacité = rémunération de l'effort
Personne qui s'investit dans l'entreprise. Certaine inertie
Logique du Dehors: logique de recherche de rémunération des apports en société.
Capitaux, volatilité, problème de la rentabilité
Le problème qui se pose avec l'entreprise est «à qui appartient l'entreprise?». Réponse
possible: le deuxième rang est occupé par les cadres/dirigeants. N'est-elle pas finalement
pérenne car elle est notablement bien dirigée?
OU aux salaries (ceux qui permettent le dégagement d'une valeur ajoutée).
En tant qu'organisation, elle présente plusieurs caractéristiques:
Elle est motivée par la recherche d'un surplus financier (profit quand on marxiste, bénéfice
quand on est comptable, capacité d'autofinancement quand on est financier). Elle est dans un
processus de création de richesse.
Elle est un système de transformation. Cette transformation est assez nette puisqu'elle
transforme trois fois différents éléments: transformation de monnaie qu'elle détient au
moment de l'acquisition de matières premières. Elle a des matériaux, des matières ou des
biens (on transforme des valeurs monétaires en valeur physique). Puis la transformation des
matières, des matériaux ou utilisation des biens pour créer de nouvelles ressources (des
produits). Et enfin les valeurs monétaires nouvellement créées sont soient réinvesties dans le
système (mais faire confiance à ceux qui gèrent le système) soit on décide d'en donner une
partie à ceux au-dehors du système qui veulent être rémunérés sur la richesse créées (à ce
moment- ce n'est pas un investissement mais une redistribution de la richesse créée).
Elle est considérée comme pérenne, c'est à dire qu'elle est dans une logique de continuité
d'exploitation: elle n'est pas soumise au marché et elle tente même d'avoir une position de
marché plus satisfaisante que ses concurrents. Elle essaye d'avoir une compétitivité
satisfaisante par rapport à des concurrents.
La nature de l'organisation-entreprise ne se confond pas avec la nature des individus qui la
composent. La nature de l'organisation est d'ordre social, économique, elle a été décidée par
des associes c'est donc une construction, elle est d'ailleurs dotée d'une personnalité juridique.
Tandis que la nature des individus est d'ordre psychologique; leurs intérêts personnels ne se
confondent pas avec les objectifs de l'entreprise. C'est ce qui fait également l'épaisseur de
l'entreprise.
L'entreprise comme un nœud de contrat, le point de vu des juristes:
C'est une « fiction légale ». Au moment de la première crise pétrolière de 74, ces juristes sont
d'abord américains. Les juristes vont jusqu'au bout du raisonnement des économistes néo-
classiques dans la mesure où ils en donnent une représentation spécifique: elle est un nœud de
contrats, menée par des acteurs opportunistes qui décident de rentrer en affaire avec d'autres
acteurs économiques. Ownership, control and the firm: « L'entreprise se représente comme
une combinaison non hiérarchisée de rapport bi-contractuels assurée par des individus
indépendants». La confiance que l'on met dans les affaires participe à l'idée que l'entreprise
est un nœud de contrat. A ce titre, il n'y a pas lieu de distinguer l'entreprise du marché
(l'entreprise fiction légale), l'entreprise est un « quasi-marché », autrement dit, c'est à
l'intérieur du marché que se noue des relations contractuelles, qui si elles disparaissent, font
disparaître de fait l'entreprise. La question des frontières de l'entreprise pour les juristes ne se
pose pas.
Ils insistent sur le rôle joue par les droits de propriété : usus (droit de disposer du bien) abusus
(droit de céder, transmettre, détruire ce bien) et fructus (droit sur les fruits que produit ce
bien).
C'est par la contractualisation que l'entreprise a le droit de cite, par le contrat elle devient elle-
même un mécanisme de coordination du marché (elle est un quasi-marché) ce qui fait
disparaître la notion de frontières.
L'entreprise-citoyenne ou l'entreprise-institution
On considère l'entreprise comme partenaire actif de la société dans lequel elle joue plusieurs
rôles. Elle a d'abord un rôle de contributeur (elle paye l'impôt), elle est un formateur, elle est
un vecteur de croissance, elle est un facteur de progrès parce qu'elle développe des
technologies nouvelles qui permettent de participer au progrès technologique du territoire sur
lequel elle est implantée. Selon cette représentation elle est un « fait social total » elle est une
entité à part entière, c'est à dire un fait qui met en mouvement la totalité de la société et de ses
institutions. C'est une totalité qui s'inscrit dans un contexte à la fois stable (l'ancrage dans une
société) et instable (elle est soumise aux conjonctures politiques sociales etc).
Rappel sur les formes juridiques des entreprises de forme entrepreneuriale
Au XVIIIe siècle il y a des ateliers ou des fabriques. Les ateliers sont en zone rurale il est
propriétaire des outils, l'hiver il donne ses marchandises à des fauconneries.
Les fabriques sont des rassemblements d'ouvriers sous la tutelle de contremaitres dans un
endroit (ferme) pour le compte d'un contremaitre, d'un patron.
Il y avait donc un entrepreneur dirigeant qui est propriétaire, c'est lui qui a apporté les fonds.
Au XIXe siècle, apparaît en 1804 le code civil et en 1807 le code du commerce. A cette
époque il y a des sociétés en nom collectif, des commandites simples et des sociétés de
personne à capital ferme (opposées à des sociétés de capitaux à capital ouvert). La cession
n'est pas libre, tous les associes sont solidairement et indéfiniment responsables (responsables
des risques économiques de l'entreprise à la fois sur le capital de l'entreprise et sur leur capital
propre). Ils ont donc tous le statut de commerçant dans les entreprises à capital ferme.
L'entreprise n'est pas librement cessible, pas librement transmissible, sauf unanimité des
associes. Il faut que tous les associes soient d'accord pour que l'héritier rentre au capital
social.
Ces formes la perdurent encore aujourd'hui. Ces formes juridiques provoquent un ensemble
de conséquences économiques très importantes puisque le dirigeant de l'entreprise en est le
propriétaire, son efficacité, sa performance se mesure uniquement à sa capacité à dégager du
bénéfice (profitabilité): capacité à faire du bénéfice sur les fonds apportes. On raisonne en
termes de direction patronale coercitive mais aussi relativement protectrice dans les grands
entités (pas de protection sociale à cette époque). La protection se fait via le patron sous la
forme de logements (HBM: habitations à bon marché) de crèches, d'écoles de formation, et
des jardins (jardins ouvriers): un terrain est mis à disposition par les patrons pour ses ouvriers
de sorte qu'ils cultivent afin de développer l'autoconsommation.
Les syndicats ouvriers n'existent pas encore (apparition en 1874). le patron protège et fait
travailler l'ouvrier; il assume la fonction d'assomption du risque et il est considère comme le
seul détenteur de l'autorité sur l'entreprise et sur ses ouvriers. Si l'entreprise ne parvient pas à
honorer ses dettes, elle est déclarée en situation de faillite.
La déconfiture c'est la faillite civile, si la banqueroute est simple si il n'y a pas volonté de
tromperies (pas de falsification des comptes, pas de dissimulation d'un passif ou pas volonté
de tromper le créancier), elle est punie par la prison pour dette (saisie par corps).
Si c'est la banqueroute frauduleuse il y a dissimulation, volonté de nuire etc. c'est puni par le
bagne (on est exile définitivement dans les bagnes).
Faire faillite c'est de ne pas honorer la signature qu'on a appose sur un effet de commerce. Le
failli est définitivement déshonoré, il a perdu tout crédit auprès de l'ensemble des acteurs
économiques (lui sa femme et sa descendance).
Le dirigeant est omniprésent. L'interdiction du travail des enfants à partir de 14 ans: 1851.
Deuxième représentation: l'entreprise-organisation:
Elle apparaît au moment où l'entreprise a évolué en termes de taille et de structure juridique.
Le changement de structure juridique apparaît sous l'influence des Etats-Unis qui adoptent
une firme de type managériale, c'est à dire dirigée par des salaries managers qui rendent
compte au propriétaire de l'entreprise de leurs actions sur l'entreprise. Ces managers vont
s'appeler des agents des propriétaires de l'entreprise (associes). Ils sont les représentants
propriétaire de cette forme juridique qui est la forme SA. Elle va donc faire une césure entre
deux fonctions principales: la fonction de gestion de l'entreprise et la fonction d'assomption
du risque. Ceux qui sont les propriétaires vont être appelés les «principaux»: les bailleurs de
fond, ils apportent les fonds nécessaires à la constitution d'une société. Ils donnent mandat aux
managers pour diriger leurs entreprises. Ces managers sont salaries mais pour qu'ils soient
loyaux vis à vis des salaries, on adjoint au salaire un «stock option». Ils sont donc associes
aux bénéfices par la distribution de stock option.
Il y a donc une division qui se met en place puisque la propriété du patrimoine est distincte de
la gestion du patrimoine. Le manager se substitue à l'entrepreneur (il prend sa place) d'où la
notion de firme managériale. Le fondateur propriétaire prend la casquette des associes.
Cette division va conduire à plusieurs effets économiques: elle produit tout d'abord de la
stabilité, puisque les choix décisionnels sont assumes par des professionnels de la gestion (au
19em il n'y a que deux écoles qui forment au commerce) cela produit également de la
prévision, on implante des procédures (l'organisation scientifique du travail), l'objectif c'est
d'allouer le plus efficacement possible des ressources (humaines techniques financières) en
fonction d'objectifs clairement définis = l'allocation optimale des ressources.
L'important est de constituer une structure de rôle: une structure qui définit à chacun des
individus un rôle associe au statut et une autorité d'où la notion de hiérarchie des rôles dans
l'entreprise. C'est donc une entreprise organisée et finalisée car elle poursuit des objectifs.
Cette hiérarchie provoque par nature des conflits d'intérêts entre les représentants du monde
du travail et les représentants de la direction.
Dans la mesure où les dirigeants (managers) sont eux-mêmes dans une situation de contrat
moral vis-à-vis des associes ils doivent démontrer de leur loyauté à leur égard ce qui les rends
captifs des intérêts des associes. Les managers visent en général le développement, la
croissance de l'entreprise, ils vont donc engager des investissements et vont donc rentrer en
conflit avec les associes qui visent la rémunération de leurs apports: il y a une dispersion des
intérêts et de fait, une opposition structurelle entre les intérêts des associes propriétaires et les
objectifs des dirigeants managers.
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