LES INTERACTIONS MEDICAMENTEUSES EN PHASE PHARMACOCINETIQUE TYPES D’INTERACTIONS : _INTERACTIONS PHARMACEUTIQUES _INTERACTIONS PHARMACOCINETIQUES _INTERACTIONS PHARMACODYNAMIQUES INTERACTIONS PHARMACEUTIQUES (incompatibilité médicamenteuse) : Interactions physicochimiques entre les PA ou entre PA et excipients. Observées lors du mélange de deux solutions médicamenteuses dans une même seringue. INTERACTIONS PHARMACODYNAMIQUES : Résulte de l’interaction entre deux médicaments (ou leurs métabolites) au niveau des récepteurs, des systèmes effecteurs ou des fonctions physiologiques sans modification des concentrations plasmatiques.. INTERACTIONS PHARMACOCINETIQUES : •Le devenir du médicament dans l’organisme est modifié par celui qui lui est associé. •Entrainent une variation des concentrations sanguines du médicament. •L’interaction implique une (parfois plusieurs) étape pharmacocinétique: ADME •Il n’y a pas d’étude pharmacocinétique sur l’association de plus de deux médicaments. LES INTERACTIONS PHARMACOCINETIQUES : Une interaction pharmacocinétique est définie par une modification de la réponse pharmacologique entrainée par une modification des concentrations plasmatiques de l’un des deux médicaments. Elle peut avoir lieu à toutes les étapes du devenir du médicament dans l’organisme (ADME). Modification de l’étape d’ABSORPTION : Les médicaments administrés par voie orale doivent se dissoudre dans le contenu gastrointestinal. Le passage à travers l’épithélium met en jeu la diffusion passive et la diffusion facilitée et parfois la diffusion active Pour un médicament ionisable: la fraction ionisée (faible liposolubilité) ne traverse pas les membranes biologiques, et la fraction non ionisée (plus liposoluble) passe facilement la barrière épithéliale (influence du pka de la molécule et pH du milieu). MECANISMES DE MODIFICATION DE L’ABSORPTION D’UN MEDICAMENT PAR UN AUTRE : A. VARIATION DE LA FORME DIFFUSIBLE DU MEDICAMENT DANS LA LUMIERE INTESTINALE : Les mécanismes sont surtout de nature physico-chimiques : 1.Formation de complexes non résorbés 2.Adsorption 3.Solubilisation d’un composé diffusible dans un liquide non résorbable 4.Variation de l’ionisation d’un médicament par modification du pH gastro-intestinal 1.Formation de complexes non résorbés Exemples: TETRACYCLINES avec dérivés cationiques divalents ou trivalents (Ca2+, hydroxyde d’aluminium /magnésium, Fe2+). COLESTYRAMINE peut constituer des complexes avec des acides faibles (anticoagulants oraux, digitaliques, hormones thyroïdiennes) 2.Adsorption Adsorption d’un médicament destiné à être résorbé par un autre non résorbable. Les agents insolubles sont : des antiacides insolubles (Kaolin, Phosphate de Ca2+…), le charbon actif et les résines échangeuses d’ions (cholestyramine). Exemples d’interaction: KAOLIN + DIGOXINE /RIFAMPICINE + BENTONITE (excipient) 3.Solubilisation d’un composé diffusible dans un liquide non résorbable Exemple d’interaction: Lorsqu’on associe un médicament liposoluble ( Vitamines A, D, E, K) + Huile minérale utilisée comme laxative (huile de Paraffine) 4.Variation de l’ionisation d’un médicament par modification du pH gastrointestinal : Exp: les alcalinisants (protecteurs gastriques) s’opposent à la résorption des médicaments acides faibles (anticoagulants oraux, AINS, barbituriques…) et facilitent celle des bases faibles. Toutefois, le pH influence la dissolution des formes solides: les alcalinisants facilitent la mise en solution des acides faibles (acide acétyl salycilique) de sorte qu’ils accélèrent la résorption bien qu’ils favorisent leur ionisation. B. VARIATION DES FONCTIONS DU TRACTUS GASTRO-INTESTINAL : 1.Vidange gastrique 2.Péristaltisme intestinal 3.Compétition entre deux médicaments au niveau du même système de transport 1.Vidange gastrique : Un médicament retardant la vidange gastrique va différer la résorption d’un autre médicament associé, alors qu’un accélérateur de vidange gastrique va favoriser la résorption. Exemple d’association: le MÉTOCLOPRAMIDE facilite la résorption du PARACÉTAMOL, du DIAZÉPAM, du LITHIUM. Par contre la résorption de la DIGOXINE en comprimé est abaissée, ce qui est lié au fait que l’accélération de la vidange gastrique s’oppose à la dissolution du PA. 2.Péristaltisme intestinal : Les substances qui dépriment le péristaltisme prolongent le temps de séjour des médicaments qui leur sont associés et facilitent leur résorption Les agents accélérant le transit (laxatifs) diminuent la résorption d’un PA associé Exp: les anticholinergiques (antidépresseurs tricycliques) augmentent la résorption du dicoumarol ou de la digoxine. 3.Compétition entre deux médicaments au niveau du même système de transport : Certains médicaments traversent la barrière intestinale grâce à un ou plusieurs systèmes de transport situés dans l’épithélium (analogues des purines, pyrimidines, sucres, AA…) Si on associe 2 pris en charge par le même système, ils entrent en compétition, d’où le ralentissement réciproque de leur absorption. Exemple: PHENYLALANINE alimentaire ralentit l’absorption de la L-DOPA chez les patients soumis à un régime hyperprotidique. Inhibition de la résorption de l’acide folique par la phénytoïne. Modification de l’étape de: DISTRIBUTION : Dès son passage dans le sang, le médicament circule sous forme libre et/ou liée réversiblement à certaines protéines plasmatiques et éléments figurés. Seule la forme libre est capable de diffuser hors du compartiment vasculaire et de gagner les tissus pour se fixer de façon réversible aux sites d’action (récepteurs) et à des sites de stockage. Les interactions médicamenteuses par modification de la distribution mettent en jeu , soit un déplacement du médicament de ses liaisons aux protéines plasmatiques, soit sa libération de ses sites de stockage tissulaires. L’interaction ne se manifeste que si les deux médicaments ont une forte affinité pour les protéines plasmatiques (liaison > 90%) ou tissulaires. Mécanisme : Surtout pour les médicaments acides faibles, qui se lient à l’Alb plasmatique au niveau d’un nombre restreint de sites. L’agent dont l’affinité pour la protéine ou la concentration est la plus élevée, déplace l’autre agent, ce qui augmente la concentration libre circulante de celuici. Cette élévation est d’autant plus marquée que le volume de distribution des médicaments acides faibles est bas. AINS, anticoagulants coumariniques, sulfamides antidiabétiques, sulfamides antibactériens, les fibrates, Pénicillines, acide nalidixique, méthotrexate, phénytoïne, thiopental.. EXEMPLE D’INTERACTION AU NIVEAU PLASMATIQUE : Accidents hémorragiques chez des sujets équilibrés/une dose correcte d’un coumarinique (Warfarine, dicoumarol…) à qui on administre des anti-inflammatoires non stéroïdiens EXEMPLES D’INTERACTION AU NIVEAU TISSULAIRE : Peu étudiée par difficulté expérimentale. Exp: déplacement de la DIGOXINE tissulaire par la quinidine, le Verapamil, la Nifédipine, l’Amiodarone → augmentation de la concentration de la digoxine plasmatique. Modification de l’étape du: METABOLISME : La plupart des médicaments sont l’objet de biotransformation (foie++) en 1 ou plusieurs métabolites moins actifs (inactivation) et parfois plus actifs (activation) Les réactions de phaseI de mono-oxygénation sont catalysées par un système enzymatique complexe: cytochrome P450 La plupart des interactions cliniquement significatives sont liées à l’induction ou l’inhibition d’un ou plusieurs isoenzymes du cytochrome P450. Seules les familles CYP1, CYP2 et CYP3 et leurs sous-familles CYP1A2, CYP2D6, CYP2C9, CYP2C19 et CYP3A4, présentent un intérêt clinique dans le métabolisme des médicaments. Le CYP3A4 est le plus présent dans le foie, il intervient dans le métabolisme de nombreux médicaments et son activité peut être inhibée ou augmentée par nombre d’entre eux. Inhibition enzymatique : CONSEQUENCES CLINIQUES : Exemples de conséquences par classe thérapeutique: L’absorption d’un inhibiteur du CYP3A4 avec: •des benzodiazépines va engendrer une somnolence et des troubles de la vigilance. •Des antiarythmiques va donner des torsades de pointe avec risque de mort subite. •Des statines (sauf fluvastatine et rosuvastatine métabolisés par le CYP2C9) induit des myalgies et rhabdomyolyse. STIMULATION (INDUCTION) ENZYMATIQUE : Mécanisme : Augmentation de la synthèse des enzymes microsomales hépatiques (CYP) par un médicament, conduisant à l’augmentation du métabolisme de l’autre médicament et donc une baisse de son efficacité. Le phénomène est progressif, s’installe après quelques jours et subsiste plus ou moins longtemps après arrêt de l’inducteur. INDUCTEURS ENZYMATIQUES : Exemples : Anticoagulants oraux + phénobarbital/phénytoïne/rifampicine. Contraceptifs oestroprogestatifs + Rifampicine (antituberculeux) Phénobarbital + Phénytoïne (2 antiépileptiques inducteurs): on constate une augmentation du métabolisme de phénytoïne. Anesthésiques généraux halogénés + inducteurs (↑hépatotoxicité ↑ néphrotoxicité) Isoniazide + inducteurs (↑ hépatotoxicité/métabolite toxique). Modification de l’étape d’EXCRETION : L’excrétion des médicaments et de leurs métabolites est réalisée par le rein et par le tube digestif (excrétion biliaire). EXCRETION RENALE : 1.Filtration glomérulaire : Les substances non liées aux PP (si la forme liée est déplacée par un autre médicament, la forme libérée est soumise à la filtration glomérulaire = augmentation de l’excrétion). 2.Réabsorption tubulaire: processus passif (formes liposolubles non ionisées) dépend du pka de la molécule et du pH de l’urine intratubulaire. Tout médicament capable de modifier le pH urinaire peut influencer la réabsorption tubulaire d’un médicament ionisable. Exp: Amphétamines (bases faibles)→ effet ↑ par alcalinisation des urines Barbituriques et salicylés (acides faibles) → excrétion facilitée par alcalinisation dans le traitement des intoxications. 3.Sécrétion tubulaire: met en jeu 2 systèmes de transport au niveau du tube proximal (l’un pour les acides faibles, l’autre pour les bases faibles) Lorsqu’on associe 2 médicaments du même groupe → compétition au niveau du même système de transport → ↓de leur excrétion. Exp: le probénécide a été utilisé pour prolonger la demi-vie d’élimination et donc l’effet de la péniG . EXCRETION BILIAIRE : Met en jeu des systèmes de transport prenant en charge des acides faibles, des bases faibles ou des substances non ionisables. Des phénomènes de compétition ont été décrits. Exp: Probénécide ↓ l’excrétion de la Rifampicine. La perturbation du cycle entéro-hépatique: les conjugués excrétés par la bile sont hydrolysés dans le duodénum par des enzyme d’origine bactérienne, le médicament libéré est alors réabsorbé. L’emploi d’ATB (NEOMYCINE) interrompt le cycle. Les interactions sont classées selon la gravité et la fréquence (par ordre décroissant): 1.Association contre-indiquée: il s’agit de contre-indication absolue 2.Association déconseillée: il s’agit d’une contre-indication relative. Doit être de préférence évitée, sauf en cas de mise en oeuvre de mesures adaptées dans les situations particulières. 3.Association nécessitant précautions d’emploi: il s’agit du cas le plus général, l’association est possible, en respectant les recommandations décrites. 4.Association à prendre en compte: pour attirer l’attention sur le risque de l’interaction. Aucune conduite à suivre n’est préconisée. CONCLUSION : EN PRATIQUE, QUE FAIRE PHARMACOCINETIQUES ? POUR LIMITER LES RISQUES DES INTERACTIONS Penser à poser quelques questions à propos du médicaments prescrit: → si le médicament modifie le pH gastrique ou la motilité gastro-intestinale: l’administrer à l’écart des autres médicaments. → si le médicament se fixe à l’ALB plasmatique, vérifier si le patient prend un autre médicament susceptible de s’y fixer. → le médicament est-t-il un inhibiteur ou un inducteur enzymatique? Y-t-il un autre médicament co-prescrit métabolisé par le foie? → y a t-il des modifications du pH urinaire? Le médicament prescrit est-t-il sécrété par les cellules tubulaires et sous sa forme active? Si les réponses sont négatives à toutes ces questions, le risque d’interaction prévisible en phase pharmacocinétique est faible (mais il existe des interactions imprévisibles)