UE11 – Parcours 3– Signalisation Cellulaire – Cours n° 5 23/03/2016 Pr Vincent Goffin [email protected] RT : Jérôme Langlois RL : Alexandre Meunier Récepteurs prolactine, hormone de croissance et récepteurs cytokines Plan : 1. Aspects moléculaires A- Présentation des acteurs en présence (ligands, récepteurs) B- Interaction ligand-récepteur : la première étape C- Transmission du signal intracellulaire 2. Aspects physiopathologiques A- Pathologies liées à des anomalies (génétiques) de signalisation 1. Défaut de signalisation 2. Excès de signalisation B- Approches thérapeutiques Abréviations : Hormone de croissance : GH Récepteur de l’hormone de croissance : GHR Prolactine : PRL Récepteur de la prolactine : PRLR Lactogène placentaire : PL Récepteur de cytokines hématopoïétiques de classe I : RCHCI Facteur de croissance : GF Mots du RT et du RL Faites bien attention aux abréviations employées : elles peuvent être source de confusion. Ce sont celles utilisées par le professeur pendant son cours ; il faut donc se familiariser avec ! I. Aspects moléculaires A- Présentation des acteurs en présence (ligands, récepteurs) L’hormone de croissance (GH) et la prolactine (PRL) sont des hormones hypophysaires. Ces deux hormones sont produites dans l’anté-hypophyse. La GH est produite par les cellules somatotropes et la PRL est produite par les cellules lactotropes. Ces deux hormones sont sous contrôle de multiples facteurs régulateurs, dont les principaux sont : La dopamine qui inhibe la production de prolactine. La somatostatine qui inhibe la production de GH. La dopamine et la somatotropine sont produites dans l’hypothalamus. La GH possède différentes fonctions : Elle est impliquée dans la croissance et la morphogénèse des os et des tissus mous. Elle est impliquée dans le métabolisme notamment à travers la lipolyse et la synthèse protéique. La prolactine est impliquée dans : La lactation et la reproduction chez les mammaifères. Le comportement et l’immunomodulation chez l’ensemble des vertébrés. La balance eau-électrolytes surtout chez les poissons. Les récepteurs de la GH et de la PRL sont largement exprimés dans un grand nombre de tissus différents. Cela explique que ces hormones aient de nombreuses fonctions à travers tout l’organisme. La GH et la prolactine font partie d’une même famille, comprenant également le lactogène placentaire (ou placental lactogen, PL). Le PL est une hormone ayant un rôle dans la reproduction, comme la prolactine, à la différence près qu’il s’agit d’une hormone produite par le placenta. Elle est de ce fait exclusive aux mammifères. Son rôle exact reste mal connu. La GH et la PRL sont des hormones anciennes et conservées dans l’évolution. Il n’y avait à l’origine qu’un seul gène ancestral, avant la divergence avant l’apparition des poissons qui ont déjà deux gènes distincts PRL et GH. De même, s’est mis en place, avec le temps, au sein des mammifères, deux types de PL : Le PL des primates est issu du gène de la GH ; Le PL des non-primates est issu du gène de la PRL. Ces deux hormones ont a priori des fonctions similaires, mais possèdent un parcours d’évolution différent. Ce phénomène s’appelle une convergence fonctionnelle. La PRL et de la GH ont tous les deux une structure 3D qui leur est propre. Elles sont structurées en faisceaux de 4 hélices α. Il s’agit de la signature structurale de la famille des cytokines hématopoïétiques. Les deux hormones sont virtuellement identiques et possèdent une structure similaire ; elles comprennent ~200 acides aminés. Ces hormones peuvent subir des modifications posttraductionnelles, à savoir phosphorylation, glycosylation, agrégation et protéolyse, lesquelles ont un impact sur les propriétés biologiques des hormones. On distingue des cytokines hématopoïétiques à longues chaînes et à courte chaîne : Longues chaînes : GH, PRL, interférons… Courtes chaînes : IL-2, IL-4, IL-5… Il existe près d’une cinquantaine de membres dans la superfamille des récepteurs de cytokines hématopoïétiques, répartis en deux classes : Les récepteurs de classe I (GH/PRL). Les récepteurs de classe II (interférons). Les récepteurs de cytokines hématopoïétiques de classe I ont certaines caractéristiques particulières, à savoir : Leur partie N-ter est extracellulaire ; leur partie C-ter est intracellulaire. Le domaine extracellulaire contient 4 Cystéines formant 2 ponts disulfures intramoléculaires. Ces deux paires de cystéines sont primordiales pour maintenir la structure de la partie extracellulaire du récepteur et ainsi assurer la liaison du récepteur à l’hormone (ou cytokine). Toujours dans le domaine extracellulaire du récepteur mais plus proche de la membrane, se trouve un motif WS jouant un rôle dans l’adressage du récepteur à la membrane plasmique. Ces motifs présentent des différences en fonction du ligand. - Motif du récepteur de la PRL : Trp - Ser - X - Trp - Ser. - Motif du récepteur de la GH : Tyr - Gly - X - Phe - Ser. Du côté intracellulaire et proche de la membrane plasmique se situe une région riche en proline, qui se nomme, la Boîte 1. Cette région est indispensable pour la transduction du signal. Toujours du côté intracellulaire, on trouve des motifs qui sont importants pour l’internalisation du récepteur après exposition à la membrane afin d’être recyclé ou dégradé. On trouve un motif d’interaction avec le système ubiquitine-protéasome, et un motif leucine-leucine. Cystéines Motifs WS Boîte 1 La signature structurale des récepteurs de de cytokines hématopoïétiques de classe I est caractérisée par la présence au niveau extracellulaire de deux feuillets β constitués chacun de 7 brins β. Il est important de préciser que chaque type de récepteur est codé par un seul gène. En revanche, un même gène peut donner plusieurs isoformes de ce même récepteur, notamment à travers l’épissage alternatif. Ainsi, dans le cas de PRLR, on distingue 5 isoformes avec une pertinence physiologique, qui vont moduler l’activité de la protéine. La possibilité de création des isoformes est permise par l’épissage alternatif des différents exons du gène de la PRLR. Pour ΔS1, forme où les 2 PDS sont absents, on a une baisse de l’affinité pour la protéine. Pour les formes S1a, S1b, ou encore intermédiaire, on a une baisse de la transmission du signal du fait de la troncation de la partie C-terminale. Enfin, pour la forme soluble, la partie intracellulaire est absente, le récepteur n’est pas ancré dans la membrane plasmique. Il a été identifié dans le lait et le sérum et peut fixer la PRL. Ainsi, il augmente la demi-vie de cette dernière, ce qui a fortiori, permet une durée d’action plus longue. B- Interaction ligand-récepteur : la première étape. Il est important de préciser qu’il existe une spécificité de liaison des récepteurs aux hormones : Le GHR ne fixe que la GH. Il est néanmoins possible de créer une PRL mutée liant le PRLR, en mutant 6 acides aminés. Le PRLR fixe la GH, le PL, la PRL. Il est néanmoins possible de créer une GH sans affinité pour le PRLR en mutant 8 acides aminés. Cette spécificité est donc due à une structure très localisée du récepteur. Concernant le GHR, ses formes activables et activées sont des homodimères de récepteurs simples, il est alors nécessaire de faire un regroupement des récepteurs. Les homodimères sont inertes à la surface de la cellule et s’activent lors de la liaison à la GH. On distingue trois sites d’interaction inter-moléculaires dans leur partie extracellulaire: un site 1 entre une molécule de GHR et une face de la GH, site de haute affinité; un site 2 entre l’autre molécule de GHR et la face opposée de la GH, site de de basse affinité ; on appelle site 3 le site d’interaction entre les deux molécules de récepteurs. La GH induit un changement de conformation. On observe une rotation relative d’une des deux chaînes de GHR par rapport à l’autre, ce qui va alors entraîner l’activation des voies de signalisation. Le GHR est constitué d’un seul type de chaînes (le GHR, homodimérisé), alors que d’autres récepteurs de cytokines sont plus complexes. Il est possible de trouver des hétérodimères, des hétérotrimères et d’autres choses encore. Il existe au sein de la superfamille des RCHCI des sousgroupes dans lesquels on trouve une chaîne commune représentative du sous-groupe, et d’autres chaînes spécifiques pour chaque membre du sous-groupe. On retrouve ce type d’homodimérisation du récepteur pour les hormones suivantes : la GH, la PRL, l’EPO, et le G-CSF (un GF spécifique des polynucléaires neutrophiles). C- Transmission du signal intracellulaire Le domaine cytoplasmique des récepteurs cytokines ne comporte pas d’activité tyrosinekinase. C’est pourquoi il va activer les voies de signlisation grâce à de nombreuses kinases associées au récepteur. Les kinases phosphorylent les acides aminés Tyr, Ser, Thr. La phosphorylation est une action qui permet d’activer certaines enzymes et de créer des interactions protéine-protéine. Il est important de rappeler que les tyrosines phosphorylées sont reconnues spécifiquement par des domaines consensus tels que SH2 et PTB. Les cascades de signalisations des RCHCI rend compte finalement de l’activation des multiples fonctions de chaque récepteur à l’échelle cellulaire, comme par exemple la migration, la prolifération, la survie, la différenciation cellulaire (liste non exhaustive). La principale voie de signalisation des récepteurs de cytokines est la voie JAK/STAT. Les JAK (Janus kinases) sont des tyrosines-kinases. Il en existe 4 membres. Celle qui nous intéresse principalement pour les hormones PRL/GH est la JAK-2. Les JAK-2 sont liés avec le récepteur via la boîte 1. Le ligand se fixe au récepteur homodimérisé. La rotation relative des chaînes du récepteur entraîne une mise en contact des JAK-2. À leurs contact Les JAK se transphosphorylent. Une fois les JAK phosphorylées, elles phosphorylent le récepteur à sa partie C-terminale (intracellulaire). Or, il se trouve que, dans le cytoplasme, il existe des facteurs de transcription nommés STAT (Signal Transducers and Activators of Transcription). Ces STAT possèdent un domaine SH2 qui reconnaît les tyrosines phosphorylées. Les STAT et notamment les STAT 5 viennent fixer aux phosphotyrosines du récepteur (on a déjà été remarqué que les STAT pouvaient venir fixer les JAKs, mais c’est beaucoup moins fréquent et pas vraiment un cas d’école). Pendant ce temps, les JAK viennent phosphoryler les STAT sur une tyrosine C-terminale. Cette tyrosine est capitale au bon fonctionnement de la voie de signalisation. Une mutation de cet acide aminé résulte en une STAT inactive qui va se comporter comme un dominant négatif, bloquant la voie JAK/STAT. Les STAT, après avoir été phosphorylées par les JAK, se détachent du récepteur et se dimérisent. Le SH2 de l’une lie la phosphotyrosine de l’autre, et vice versa. Ce dimère entre dans le noyau et vient se fixer au promoteur des gènes cibles, induisant ainsi leur transcriprtion. Cela va déclencher les réponses cellulaires (ex : prolifération, différenciation, apoptose, etc). Il existe néanmoins un rétrocontrôle négatif à ce phénomène. En effet, les dimères de STATs viennent aussi fixer les promoteurs de gènes cibles appelés SOCS (Suppressor Of Cytokine Signaling). Ces gènes vont supprimer la transmission du signal par cette voie via différents mécanismes : SOCS1 se lie sur la phosphotyrosine de JAK2 et empêche la phosphorylation du récepteur et de ses substrats. CIS se lie sur les phosphotyrosines du récepteur et empêche la phosphorylation de STAT 5. SOCS3 se lie sur les phosphotyrosines du récepteur et interfère avec l’activation de JAK2. En plus des SOCS diverses phosphatases (ex SHP-2) activées par la signalisation GHR/JAK vont déphosphoryler le récepteur ou d’autres acteurs de la signalisation. Comme vu précédemment, il existe des formes longues et des formes courtes de RHCHI. Pour les PRLR et GHR : Les formes longues sont phosphorylées sur les tyrosines C-terminales et peuvent activer les STATs. Les formes courtes ne possèdent pas les tyrosines C-terminales phosphorylables et ne peuvent pas activer les STATs. Une récente étude a montré qu’un l’augmentation du ratio PRLR court/PRLR long réduisait de manière graduelle l’activation de la voie STAT 5 par la PRLZ. On en déduit que les formes courtes jouent un rôle de dominant négatif sur la voie JAK/STAT. Elles peuvent néanmoins activer d’autres voies (MAPK par exemple). Un des problèmes actuel est qu’il existe dans cette voie JAK/STAT, seulement 4 JAK, 7 STAT, et bon nombre d’effets biologiques. On ne sait pas encore bien expliquer ce phénomène. Le GHR, le PRLR, l’EPOR, sont des récepteurs qui activent tous JAK2 puis STAT5 et ,pourtant, ils entraînent des effets différents. Pour tenter de saisir l’importance de ces différents acteurs, des chercheurs, ont mis en place des stratégies d’invalidation KO : Un profil JAK2-KO est létal pour l’embryon à cause d’un défaut de l’érythropoïèse. Un profil STAT5A-KO empêche le développement de la glande mammaire. STAT5A est plutôt "PRL". Un profil STAT5B-KO, estompe les éléments de dimorphismes sexuels (mâle plus grand…). STAT5B est plutôt "GH". Un profil SOCS2-KO, empêche le rétrocontrôle de GH, ce qui cause une sécrétion non régulée de GH et ainsi un gigantisme. La GH a pour fonctions : la croissance et la morphogénèse des os et des tissus mous. le métabolisme à travers la lipolyse et la synthèse protéique. Le GHR active la voie JAK2/STAT5, la voie des MAP kinases, la voie PI3K/AKT. Les effets métaboliques de la GH passent par la voie PI3K/AKT. La GH a des effets directs et indirects : L’effet direct consiste en l’action de la GH sur une cellule qui va par exemple proliférer. L’effet indirect consiste en la libération d’IGF-1 du foie sous l’action de la GH. C’est alors l’IGF-1 qui va aller stimuler d’autres cellules, via le récepteur de l’IGF-1. Une équipe de chercheurs, pour préciser le fonctionnement du récepteur en détail a décidé de faire exprimer chez les souris des formes tronquées de récepteurs (souris transgéniques). Le GHR WT comporte 620aa. Les chercheurs ont réalisé trois mutants : Le cas m569, avec les 51 aa retirés en C-terminal, et les deux Tyr C-ter mutées en Phe. Le cas m391, avec les 229 aa retirés en C-terminal. Le cas GHR -/-, qui est un cas GHR-KO. Il y a un effet de gradation dans la réduction de la taille, depuis le WT jusqu’au KO. Les chercheurs pour en savoir plus ont donc décidé de réaliser des mesures concernant : L’activation des MAPK dans le foie. L’activation des STAT5 dans le foie. La concentration circulante d’IGF-1. La croissance corporelle. On remarque que : Les MAPK fonctionnent aussi bien dans les mutants m569 et m391 que dans le WT. La voie des MAPK ne semble donc pas jouer un rôle fondamental dans la croissance. L’activation STAT5, la concentration en IGF-1, et la croissance corporelle chez m391 sont fortement altérés, et significativement altérés chez m569. On en déduit que les éléments d’interaction du récepteur pour STAT5 se situent en majorité dans la région 569-620, et de manière plus clairsemée dans la région 391-569. En effet, les STAT5 se fixent sur les 5 phosphotyrosines les plus C-terminales du récepteur. On remarque par la même occasion que les STAT5 servent de facteurs de transcriptions pour IGF-1. II. Aspects physiopathologiques A- Pathologies liées à des anomalies (génétiques) de signalisation Il existe deux types de pathologies qui vont être liées soit à un excès soit à un défaut de signalisation. A- Défaut de signalisation Tout d’abord, concernant le défaut de la signalisation de la GH, on remarque des cas de nanisme. On distingue : Le syndrome de Laron, caractérisé par une concentration en GH élevée et une concentration d’IGF-1 basse. On en déduit qu’il s’agit d’une déficience du GHR. Pour traiter un patient atteint du syndrome de Laron, on administre de l’IGF-1, qui ne pourra néanmoins traiter que les effets indirects de la GH (les effets directs, médiés par le GHR dans la cellule cible, ne peuvent être restaurés). On remarque sur une cohorte équatorienne de patients atteints du syndrome de Laron différentes choses. Le reste de leurs familles (non atteintes) constitue les sujets contrôles. Tout d’abord ces patients semblent vivre plus longtemps. On ne trouve chez eux, aucun cas de cancer ou de diabète. Mais en contrepartie, on remarque beaucoup d’accidents chez ces patients. Il est important de rappeler que la voie GH/IGF-1 est une voie très conservée dans l’évolution. On peut donc utiliser des modèles de vers, de mouches, de levures, de souris. On inhibe cette voie et on remarque des organismes qui sont de tailles réduites mais qui en contrepartie vivent plus longtemps. Le GHR tronqué (1-277), qui est dû à une mutation germinale dominante. Ce profil de récepteur ne présente quasiment pas de domaine cytoplasmique, avec une absence de boîte 1. Du fait de l’absence des motifs d’internalisation du récepteur (UbE et Leu-Leu), les GHR tronqués vont alors s’accumuler à la surface de la cellule et inhiber l’action du récepteur non muté via un phénomène dominant-négatif. Des mutations de STAT5 peuvent expliquer certains cas de nanisme. En effet, des patients en pédiatrie ont été décrits comme ayant une petite taille, associé à un taux d’IGF-1 bas. En revanche ces patients ne présentaient pas de mutation du GHR, et étaient en même temps atteints de multiples déficits immunitaires. Or, il se trouve que STAT5 était connue comme agissant au sein de la signalisation de nombreuses cytokines régulant l’immunité. Les chercheurs ont donc décidé de vérifier les STAT, et ont retrouvé des mutations chez la STAT5B. Ces protéines exprimées chez les patients étaient donc incomplètes, mal repliées ou encore rapidement dégradées, ce qui explique le nanisme et les troubles immunitaires. Concernant le défaut de signalisation de la PRL, la situation est plus complexe. Une récente étude a porté sur un récepteur mutant dans le cadre d’une hyperprolactinémie familiale. Trois sœurs sont étudiées. Elles présentent un taux de prolactine anormalement élevée, associé à des troubles de la fertilité (des menstruations), voire une infertilité pour l’une d’entre elles. Une des patientes a malgré tout eu 4 enfants et une galactorrhée post-partum. Les chercheurs ont fini par mettre en évidence une mutation hétérozygote du gène codant le PRLR. Les chercheurs ont mis en évidence la mutation His188Arg. Cette mutation empêche la phosphorylation de STAT5. Pourtant une mutation à l’état hétérozygote n’a pas d’impact de manière significative sur la voie STAT5. L’acide aminé His188 semble jouer un rôle fondamental dans la pHdépendance et dans la médiation ion zinc avec la PRL. La corrélation entre la mutation et les phénotypes des patientes reste très débattue. Ils ont remarqué que la mutation n’a pas d’impact, ou du moins pas encore, chez une jeune fille de 13 ans. Ils ont donc supputé une pénétrance de la mutation liée à l’âge. De plus, malgré l’hyperprolactinémie évidente de ces patientes, ils n’ont détecté aucun adénome hypophysaire qui est pourtant la cause la plus fréquente de cette pathologie. La prolactine a plusieurs effets sur l’hypophyse : Elle effectue un rétrocontrôle négatif hypothalamique sur la production de dopamine, et inhibe donc sa propre synthèse. Elle régule l’homéostasie hypophysaire, en induisant l’apoptose des cellules lactotropes et en réduisant leur prolifération. Si le récepteur n’est plus fonctionnel, on risque d’une part une hyperprolactinémie et, d’autre part, un adénome hypophysaire. Sur un modèle de souris PRLR-KO, on remarque que le poids de l’hypophyse est multiplié par 40. Dès lors comment expliquer que les patients supposées exprimer un PRLR perte-de-fonction n’ont pas d’adénome hypophysaire ? Cette étude a néanmoins fait l’objet de commentaires éditoriaux (des scientifiques et médecins ont fait part à l’éditeur par écrit de leur profond désaccord). 1) Une des patientes a eu une galactorrhée post-partum. Cela n’est possible que s’il existe au moins dans la glande mammaire un PRLR fonctionnel. 2) Une patiente atteinte d’ « infertilité » a tout de même eu 4 enfants. De plus, une hyperprolactinémie est certes réputée pour être une cause d’infertilité, mais cela ne se peut que s’il existe un RPLR fonctionnel, sinon l’hyperprolactinémie reste sans effets. 2. Excès de signalisation Un excès de signalisation peut être lié à une surproduction de l’hormone. Concernant l’excès de GH et de PRL, on utilise le terme d’acromégalie pour la GH et d’hyperprolactinémie pour la PRL. Des patients ont un adénome hypophysaire avec une sécrétion non régulée d’hormones hypophysaires. Concernant l’acromégalie, il s’agit d’un excès de GH qui va conduire à des manifestations de croissance exacerbées. L’acromégalie entraîne des risques cardiovasculaires et de cancers colorectaux majorés, avec des maux de tête et des troubles de la vision du fait de la croissance de l’adénome hypophysaire. Concernant l’hyperprolactinémie, on retrouve les maux de têtes et les troubles de la vision liés à l’adénome hypophysaire, mais aussi des problèmes de fertilités et un risque majoré de cancer (gastro-intestinal et leucémie). Il est à noter qu’un taux ‘normal-haut’ de prolactine (= toujours situé dans la normale), constitue un facteur de risque de développement de cancer du sein par rapport à un taux ‘normal-bas’ de prolactine. Des chercheurs ont identifié des SNP non codants du PRLR en lien potentiel avec le cancer du sein, mais aucune donnée fonctionnelle ne peut le confirmer à ce jour. La polyadénomatose mammaire est une maladie rare entraînant l’apparition de multiples fibromes mammaires. L’analyse du PRLR dans une cohorte de cette maladie a suggéré une association avec la mutation I146L au niveau du récepteur. Le résidu I146 est proche du site 3. Cette mutation induit une activité constitutive du récepteur sans ajout de prolactine. Des changements microstructuraux mettent en contact les deux chaînes du récepteur et l’activent en l’absence de prolactine. Ceci a pu être démontré par une étude structure-fonction en générant d’autres mutants artificiels à la position 146. On distingue des mutants qui répondent à la prolactine (I146A, et I146V), et ceux qui ont une activité basale constitutive (I146N, I146D, I146R). Pourtant, lorsqu’on exprime dans des cellules tumorales mammaires un récepteur muté à forte activité constitutive (I146D), il y a une diminution de la prolifération tumorale. Après une restructuration de l’étude (ajout de sujets contrôle, inclusion de patientes atteintes de cancers), on s’aperçoit que le PRLRI146L est un variant ethnique et donc non pathologique. La GH et la PRL sont synthétisés par l’anté-hypophyse (partie endocrine de la glande), qui les déverse dans le sang qui amène les hormones vers les tissus périphériques de l’organisme. Il s’agit là du mode d’action ‘endocrine’. Mais ces hormones sont aussi produites en petites quantités au sein d’autres tissus, où elles vont agir localement par la voie dite autorcine/paracrine. L’hormone produite localement dans ces tissus est non mesurable, et ne peut donc être appréhendé dans le domaine de la clinique. Elle peut néanmoins être à l’origine de tumeurs. Un modèle de souris transgénique est mis en place. On fait, pour cela, produire de la PRL dans la prostate d’une souris (la prostate humaine produit physiologiquement de la prolactine). On fait une transfection d’un gène codant la prolactine, fusionné avec le promoteur du gène de la probasine (une protéine exprimée uniquement dans la prostate). On remarque une hypertrophie prostatique, des néoplasies intra-épithéliales, une suractivation de STAT5, une hyperpolifération épithéliale, une altération du compartiment des cellules souches supposées être initiatrices de tumeurs. B- Approches thérapeutiques En cas d’excès, en présence d’adénomes hypophysaires, il est nécessaire de freiner la production d’hormones hypophysaires. On utilise donc pour l’hyperprolactinémie des analogues de la dopamine, et pour l’acromégalie, des analogues de la somatostatine. Il est également possible de recourir à la chirurgie ou à la radiothérapie. En revanche, il n’apparaitrait pas pertinent d’inhiber la synthèse de ces mêmes hormones chez les patients présentant des variants de gain de fonction de récepteurs (puisqu’ils fonctionnent sans ligands) – à noter cependant que de tels variants ne sont pas validés comme ayant une pertinence physiopathologique à ce jour (voir PRLR-I146L plus haut). Enfin, dopamine et somatostatine ne semblent pas réguler la production d’hormones dans les tissus extrahypophysaires (qui agissent par boucle autocrine/paracrine). Une autre réflexion se base donc sur l’usage d’antagoniste des récepteurs. Dans le site 2, il y sur la GH a une cavité avec une glycine 120. Cette cavité permet à un Trp du récepteur qui va rentrer dans la GH. Si on effectue la mutation Gly120Arg, la cavité se remplit et le Trp du récepteur ne peut pas se placer dans la GH. Le récepteur ne peut donc pas être activé (pas de transmission du signal). Un médicament se base sur ce principe : le pegvisomant. Ainsi, cet antagoniste du GHR inhibe la fonction de GH sur différents tissus comme, par exemple, le foie. On remarque une baisse d’IGF-1 qui est normalement induit par la GH. On se sert de l’IGF-1 comme marqueur biochimique de l’activité GH. Il existe néanmoins une grande variabilité intra-individuelle à ce traitement. L’effet du traitement se mesure tant bien par la concentration d’IGF que par le diamètre de la taille des doigts. En revanche, il existe difficulté d’usage liée à ce traitement. En effet, si le pegvisomant inhibe l’effet de la GH, il existe une baisse de la production d’IGF-1. De ce fait, le rétrocontrôle négatif sera réduit, et il y aura une production augmentée de GH. Ce qui risque d’augmenter le volume tumoral de l’adénome hypophysaire. Pour les antagonistes de la prolactine, des mutations, ont été mis en place de la manière suivante : Mutation G129R. Suppression de la partie N-terminale, qui est un des éléments du site 2 de la PRL. Une vérification in vivo après une conclusion satisfaisante dans un cadre in vitro s’est mise en place. Pour cela, on a croisé une souris transgénique avec une prostate fabriquant de la prolactine, et une souris transgénique contenant l’antagoniste de la prolactine, afin d’obtenir une souris contenant les deux caractéristiques. On a ensuite mesuré les poids prostatiques des souris. Le test a révélé que la souris ayant à la fois une expression ectopique de prolactine et d’antagoniste avait un poids normal. L’antagoniste semble donc fonctionner in vivo. Son développement préclinique est toujours en cours. POINTS CLEFS Similarités structurales / fonctionnelles Ligands PRL / GH : deux sites de liaisons à leur récepteur homodimérisé Similarités structurales / fonctionnelles Aspects moléculaires Récepteurs Activent de multiples voies de signalisation (PRL/GH : rôle essentiel de Jak2 / STAT5) Expression quasi-ubiquiste : beaucoup de tissus cibles potentiels Génétique GHR, PRLR (?), STAT5B Tumeurs Prostate, glande mammaire Pathologies Mécanismes Autocrine / paracrine et non seulement endocrine Antagonistes Une nouvelle classe de molécules thérapeutiques Mots du RL - Dans la fiche récapitulative, j’ai insisté sur les aspects de définition et la voie de signalisation Jak/STAT. Cette dernière est d’ailleurs présentée sous la forme d’un schéma représentant la voie de signalisation. Le détail vous est donné dans la partie 1C. Le détail des aspects physio-pathologiques n’est enfin pas développé dans la fiche : référez-vous aux détails dans la partie II. Abréviations utilisées dans la fiche récapitulative : - PRL : prolactine - PRLR : récepteur de la prolactine - GH : hormone de croissance - GHR : récepteur de l’hormone de croissance - MEC : milieu extracellulaire - MIC : milieu intracellulaire - PAM : polyadénomatose mammaire FICHE RÉCAPITULATIVE Aspects généraux - Tableau récapitulatif : PRL GH Cellules hypophysaires Lactotropes Somatotropes Inhibiteur de la synthèse Dopamine Somatostatine Fonction physiologique Lactation, reproduction, balance eau-électrolytes, comportement, immunorégulation Croissance et morphogenèse, métabolisme des lipides et des protéines Récepteurs Largement distribués dans l’organisme Structure 4 hélices α antiparallèles (signature structurale des cytokines hématopoïétiques) Site de liaison 2 feuillets de 7 brins ß (signature structurale des récepteurs des cytokines hématopoïétiques) - Ces hormones appartiennent à une famille qui contient également l’hormone lactogène placentaire PL. Cytokines et récepteurs de cytokines hématopoïétiques - La superfamille des récepteurs de cytokines hématopoïétiques est composée de deux classes. PRLR et GHR appartiennent à la classe 1. Le prototype d’un récepteur de cytokine hématopoïétique de classe 1 est représenté ci-dessous. - Il existe un gène par récepteur de cytokine. Ces récepteurs ne sont pas identiques pour autant : il en existe de très nombreuses isoformes du fait d’un épissage alternatif. Il existe ainsi onze isoformes décrites du PRLR, plus ou moins longues. Ces différentes formes permettent de moduler l’affinité avec le ligand ou la transmission du signal. Parmi les isoformes, on distingue les protéines de liaison solubles (binding proteins) qui ne disposent pas de domaine intracellulaire. Leur liaison au ligand permet d’augmenter la demi-vie de ce dernier. - Interaction hormone-récepteur : un « + » signale que la liaison est physiologiquement possible et transmet un signal hGH hPL hPRL GHR + – – PRLR + + + - Le récepteur activé par son ligand est un homodimère. Modèle de transduction du signal (exemple de GH) - On décrit trois sites d’interaction au niveau du récepteur GH : site 1, avec la GH, de haute affinité ; site 2, avec la GH, de faible affinité ; site 3 de liaison des monomères du récepteur, impliqué dans l’homodimérisation. - La liaison de GH à son récepteur entraîne un changement de forme de l’homodimère : l’un des monomères « remonte » un peu, permettant une activation réciproque au niveau intracellulaire. - Le domaine cytoplasmique de GHR n’est pas enzymatique. Ce sont des kinases associées qui permettent l’activation et l’interaction entre les protéines. - Les réponses cellulaires sont diverses : survie, prolifération, différenciation, apoptose, migration… Voie de signalisation JAK / STAT Aspects physiopathologiques GH Excès Acromégalie (croissance exacerbée avec augmentation de la morbi-mortalité associée) PRL Hyperprolactinémie : adénome hypophysaire Variants gain de fonction : rôle réel ? Boucle autocrine / paracrine : expression parallèle extrahypophysaire physiologique ⇒ expression locale Défaut Nanisme : syndrome de Laron, isoformes courtes, mutation de STAT5, mutation du gène IGF-1. PRLR perte-de-fonction -> Hyperprolactinémie familiale (?) – très controversé. - Thérapeutique adénome hypophysaire : inhibition de la synthèse de l’hormone hypophysaire (analogues de la dopamine ou de la somatostatine) ; inhibition de l’activation du récepteur par l’hormone au niveau des tissus-cibles par antagoniste du récepteurs (hormone mutée dans le site 2 de liaison au récepteur).