Les troubles psychotiques : de la théorie à la pratique Laurentautel

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Les troubles psychotiques : de la théorie à la pratique
Introduction :
o La démarche diagnostique en psychiatrie, à l’inverse d’autres disciplines médicales, est
purement clinique. Les rares examens complémentaires prescrits ne servent qu’à
éliminer une pathologie organique susceptible de s’exprimer sur un mode psychiatrique.
o Le cheminement vers le diagnostic peut être très long, très complexe car il existe une
importante variabilité intra et inter-individuelle des symptômes psychiatriques.
o La pose du diagnostic repose sur une double approche :
Symptomatique, analyse sémiologique de l’épisode en cours.
Structurale : basée sur le contact, l’analyse du transfert, contre-transfert, des
mécanismes de défense, beaucoup plus longue, mais aussi beaucoup plus stable
dans le temps.
o Il faut distinguer trois grands types de structure psychique :
La névrose
La psychose
Une « astructuration » intermédiaire que sont les états limites.
La structure psychotique et ses modes de décompensation :
o Une structure et pas une pathologie.
o Structure stable, à l’inverse des états limites, néanmoins plus fragile que la structure
névrotique.
o Individu en proie à de terribles angoisses de morcellement voire de mort.
o Utilisation de mécanismes de défense peu élaborés, moins efficaces dans la résolution
des conflits intra-psychiques que les réactions de défense névrotique : le déni, la
forclusion. Quête de réassurance dans la recherche de repères fixes, donc rigidité et
rituels.
o Reconstruction par le délire d’une néoréalité moins angoissante et plus accepable par le
sujet, comblant le vide laissé dans la vie psychique par le déni d’une partie de la réalité
trop anxiogène pour être affrontée.
o Une certaine bizarrerie : sentiment d’étrangeté du monde, distorsion du rapport à la
réalité, rupture de l’épreuve de réalité. Hermétisme.
o Théorie de la relation d’objet : « le nouveau né naît avec des défenses psychotiques. »
o Fusion avec le mère qui est un prolongement du corps de l’enfant : des limites
corporelles floues, perméables.
o Vécu traumatique de la séparation d’avec la mère, comme un morcellement du corps,
une dispersion, sentiment de persécution.
o Mais également vécu sur un monde angoissant de persécution d’une trop promixité et à
fortiorié du contact physique d’autrui (perçu comme risque d’effraction des limites du
corps). D’où une tendance au repli, une froideur du contact, une distance, une pauvreté
des affects.
o Expérience unique et fugace de satisfaction immédiate de la pulsion (succion du sein
maternel) : fonctionnement selon le principe de plaisir, incapacité à différer ou modifier
ses désirs, quête de satisfaction immédiate et intolérance aux frustrations.
o La forclusion (du nom du père) : Jacques Lacan :
Retour via le réel, sous forme hallucinatoire d’un signifiant trop angoissant pour
avoir sa place dans la vie psychique, y compris inconsciente et donc rejeté à
l’extérieur sans possibilité d’intériorisation, même partielle.
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Typiquement la figure paternelle qui incarne la loi, l’autorité et vient faire tiers
en rompant la fusion mère-enfant.
o Exposition précoce et durable à une communication familiale en double-lien (ou double-
contrainte).
o Caricaturalement : mère fusionnelle, père absent
o Différents types de décompensation des structures psychotiques, qui ont en commun de
s’effectuer sur un mode délirant.
o Son pathognomoniques de psychose les hallucinations acoustico-verbales, a fortiori
isolées de l’automatisme mental.
o Fonction du symptôme : rôle « anxiolytique » du délire qui permet de construire une
autre réalité plus supportable.
o Distorsion du schéma corporel, perturbation des représentations corporelles avec une
interprétation parfois singulière des problèmes somatiques, souvent moins déniés soit
rationalités. Difficultés +++ de l’approche pour l’examen et les soins somatiques :
sentiment d’effraction des limites corporelles.
o Spécificité de la dépression psychotique par rapport à la dépression « névrotique »
Dépression névrotique plutôt associée à un effondrement narcissique, à une
perte de l’estime de soi. Souvent réactionnelle (perte).
o Analyse sémiologique d’un délire (TOMATE):
Thème
Organisation
La classification des psychoses :
o Modélisation classique dans les classifications internationales (DSM-IV, CIM 10) :
Schizophrénie et autres troubles psychotiques
Schizophrénie et troubles apparentés
Troubles psychotiques bref
Troubles psychotiques NS
Troubles bipolaires de l’humeur
Troubles liés à une substance
o Psychose :
Schizophrénie
La psychose ordinaire (pour les Lacaniens)
Episodes délirants aigus isolés
Délires chroniques non dissociatifs
Psychose maniaco-dépressive
o Les délires aigus :
Bouffée délirante aigue
Pharmacopsychose
Psychose puerpérale
Productions délirantes d’origine toxique
A la marge de la psychose :
Ruptures transitoires de l’épreuve de réalité et défenses archaïques
d’allure psychotiques chez les personnalités « états-limites »
Expérience hallucinatoire ou psychotique transitoire
o Schizophrénie et « spectre schizophrénique » :
Les schizophrénies :
Les troubles schizo-affectifs
Les personnalités prémorbides
o Les délires chroniques non dissociatifs :
Généralement absence de dissociation et meilleure systématisation.
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Rares : environ 1% de la population
Donc peu d’études spécifiques et tendance à les faire disparaître des
classifications modernes en les regroupant dans une grande catégorie « fourre-
tout », d’autant plus que leur description il y a environ 1 siècle, souvent par des
médecins germanophobes ou français, peut apparaître aujourd’hui désuète.
Classification selon le mécanisme délirant : …
o Les délires paranoïaques
o Délire sensitif de la relation
o Délires passionnels :
Délire de jalousie
Erotomanie
Délires de revendication
Délires de la filiation
Inventeurs méconnus
Idéalistes passionnés
Quérulents processifs
o Les psychoses maniaco-dépressive :
Encore appelée trouble bipolaire de l’humeur
Forme typique : alternance d’accès maniaques, d’épisodes
mélancoliques et de périodes asymptomatiques.
Formes « atténuées » avec hypomanie, dépressions bipolaires, états
mixtes, cycles rapides, cyclothymie.
On parle aujourd’hui de spectre bipolaire : un concept à la mode, qui
recouvre un champ clinique de plus en plus vaste (ex : personnalités
émotionnellement labiles, certaines formes d’états-limites) et va s’élargir
avec la parution en 2012 du DSM-V.
Troubles bipolaires de l’humeur :
De type I : au moins un accès maniaque vrai
De type II : dépression et hypomanie
De type III : virage maniaque iatrogène (antidépresseur)
Trouble unipolaire de l’humeur : succession d’épisodes dépressifs sans
phase maniaque.
2 à 3% de la population générale
Une forme « atténué » de schizophrénie ?
o La psychose ordinaire :
Une entité qui n’existe que chez les psychanalystes lacaniens.
Une psychose sans délire, aux symptômes atténués, qui ne s’intègre pas dans les
tableaux psychotiques usuels, qui décompense en situation de régression
comme celle induite par la cure analytique.
Correspondant en fait aux « états-limites » (ou personnalités « borderline ») qui
n’existent pas chez les lacaniens, pour lesquels il n’y a que deux structures
psychiques, deux voies possibles : névrose, psychose
Sémiologie clinique :
o Bouffée délirante aigue (BDA) :
Eclosion souvent brutale (« un coup de tonnerre dans un ciel serein »), en
particulier quand il s’agit d’un premier épisode.
Touche généralement un adulte jeune (18 à 35 ans), parfois sans antécédent ou
avec antécédent de BDA ou de dépression atypique.
Poser la question d’une affectionsomatique chez le sujet plus âgé (notamment
chez les patients de plus de 60 ans ou avec pathologie somatique grave) ; on
n’entre pas dans la psychose au troisième âge.
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Dans tous les cas, cela reste un diagnostic d’élmination qui suppose de s’assurer
de l’absence de pathologie organique notamment neurologique (hémorragie,
tumeur, forme particulière d’épilepsie) et de l’absence étiologique toxique.
Expression clinique particulièrement variable d’une personne à l’autre.
Un délire :
Aigu : début brutal récent, évolution de moins de 6 mois.
Souvent mal ou non systématisé
Souvent polymorphe : association de mécanismes hallucinatoires,
interprétatif, intuitif, automatisme mental, idées de référence.
Polythématique : associe plusieurs thèmes, tout est possible (thème de
persécution, mégalomaniaque, messianique, mystique…)
Souvent associé à une labilité thymique et émotionnelle importante.
Participation anxieuse (faible avec émoussement des affects ou forte, ce
qui peut alors faciliter le prise en conscience d’un trouble égodystonique
et donc l’alliance thérapeutique).
Adhésion généralement forte voire totale, pas de critique.
Retentissement somatique essentiellement lié à l’éventuelle incurie et
aux représentations délirantes de l’image corporelle et de pathologies
organiques intercurrentes.
Dissociation possible et même assez fréquente.
Diagnostics différentiels :
Pharmacopsychose (expression clinique et évolution font la part des
choses).
o NB : la BDA peut être favorisée par des crises de toxiques
Episode thymique aigu (diagnostic différentiel très difficile voire
impossible sur un premier épisode devant la forte participation
thymique, se faisant sur l’évolution à long terme)
Episode dépressif atypique
Accès maniaque
Hystérie
Pathologie somatique (DT, lésions encéphaliques, épilepsie, confusion,
maladie systémique)
Evolution :
Eclosion souvent favorisée par un évènement de vie stressant +/- récent,
parfois assimilable à une rupture ou une perte.
Phase floride, productive de quelques semaines avec ensuite rémission
spontanée mais le plus souvent favorisée par un traitement
antipsychotique.
Au long cours :
o Restitution ad integrum (à l’état de base) avec risque
imprévisible de récidive, très variable d’une personne à l’autre.
o Chronicisation : un des modes d’entrée dans la schizophrénie ou
un trouble psychotique chronique.
Pharmacopsychose :
o Concept ambigu recouvrant plusieurs entités cliniques :
Etat psychotique aigu ou chronique semblant en lien (crée, révélé ou aggravé)
avec une consommation de substance psychoactive)
Etat psychotique déclenché par une prise de toxique et se prolongeant au-delà
de l’action pharmacologique, semblant évoluer pour son propre compte.
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o Evolution variable entre rémission complète et évolution vers la chronicité
(schizophrénie, avec difficultés alors à faire la part des choses quant à l’imputabilité des
toxiques).
o Principaux pourvoyeurs : amphétamines, hallucinogènes (LSS).
Psychose puerpérale :
o Episode psychotique aigu déclenché pendant une grossesse (et qui ne serait pas
survenue en l’absence de celle-ci ?)
o Clinique proche de la BDA mais contexte gravidique.
o Très rare en pratique quotidienne
o Evolution selon deux modalités principales :
Rémission et restitution ad integrum avec un risque majeur de récidive lors d’une
grossesse ultérieure.
Chronicisation, épisode en fait inaugural d’un délire chronique souvent de type
schizophrénie, révélé ou aggravé par la grossesse.
o Pose la question délicate de l’investissement, souvent délirant, de l’enfant à naître :
intrus, étranger, avec vécu de persécution, rejet distorsion majeures de l’image
corporelle, déni de la grossesse.
o Problème de l’accouchement, surtout si l’état de santé de la mère ne lui permet pas de
s’occuper de l’enfant (sentiment de vol du bébé s’il est placé, amnésie voire déni de
l’accouchement.
o Risque auto-agressif ou suicidaire élevé : le trouble psychique peuerpéral le plus
pourvoyeur de suicides.
Schizophrénie :
o 1% de la population générale quelque soit l’endroit du monde.
o Début :
Fin de l’adolescence / début de l’âge adulte
Classiquement 15 à 35 ans. 5 ans plus tard chez les femmes
Brutal : BDA, dépression atypique
Prorgressif : repli d’installation insidieuse, avec décrochage scolaire, rupture des
relations extérieures, … ou modification du comportement, du caractère.
Sex ration : 1 mais tableau clinique et pronostic plus sévère chez les hommes.
o Trépied diagnostic :
Délire paranoïde
Dissociation
Repli autistique évoluant depuis au moins 6 mois
o Délire paranoïde :
Délire polythématique : souvent persécution, messianique, mystique, parfois
mégalomanie.
Dépersonnalisation (morcellement, décorporalisation), déréalisation (bizarrerie,
étrangeté de l’être au monde)
Délire non systématisé
Adhésion totale, aucune critique
o Secondaire à la dissociation, c'est-à-dire la rupture de contact avec la réalité
o Délire polymorphe ;
Souvent hallucination acoustico-verbales, parfois aussi visuelles (associées dans
30% des cas aux hallucinations acoustico-verbales)
Automatisme mental :
Petit : commentaire des actes
Grand : actes ordonnés par les voix
Syndrome d’influence ou syndrome de Clérambault : vis psychique et
actions entièrement sous le contrôle de forces externes
1 / 12 100%

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