La représentation de la pauvreté chez Victor Hugo et ses

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La représentation de la pauvreté chez Victor Hugo et ses contemporains Séquence 1re
Par Florence Renner
Présentation du contexte culturel
Après le devoir chrétien de charité dominant le XVIIe siècle, après le Discours sur l’origine et
les fondements de l’inégalité parmi les hommes ayant marqué le XVIIIe siècle, la Révolution
française vient mettre fin à l’ancienne société d’ordres et aux formes traditionnelles de
solidarité collective qui l’accompagnaient (usages communaux, corporations, confréries). La
nouvelle société promeut des rapports entre des hommes « libres et égaux », ne pouvant
compter que sur eux-mêmes, y compris lorsqu’ils sont dans le besoin. Dès lors, la
représentation sociale de la pauvreté change au début du XIXe siècle, pour devenir une
question avant tout économique. C’est à cette époque que l’industrialisation se développe,
particulièrement dans le Nord de la France, ce qui entraîne, sous la Monarchie de Juillet
(1830-1848), la multiplication des « prolétaires » et la création d’un terme pour qualifier un
nouveau phénomène : la paupérisation.
Au XIXe siècle, la question des pauvres devient omniprésente dans la vie intellectuelle et
culturelle française. Évoquant l’Ancien Régime, Hyppolite Taine affirmait dans Les Origines
de la France contemporaine (1875-1893) que « le peuple ressemble à un homme qui
marcherait dans un étang, ayant de l’eau jusqu’à la bouche ; à la moindre dépression du sol,
[…] il perd pied, enfonce et suffoque ». Jusqu’au milieu du siècle au moins, cette description
reste malheureusement trop fidèle à la réalité, et la précarité demeure la condition dominante
des classes populaires. De nombreux auteurs s’emparent alors de la question de la pauvreté et,
dans des œuvres argumentatives, se lancent dans la condamnation plus ou moins explicite de
cette condition, exploitant un domaine peu fréquenté par la littérature dans les siècles
précédents. Si Les Misérables de Victor Hugo restent l’emblème de cette préoccupation
générale, on pourrait citer aussi Balzac, Sue, Zola en France, Dickens et Andersen à
l’étranger. Avec eux, les pauvres occupent le devant de la scène littéraire, et les lecteurs
découvrent que la pauvreté est avant tout une question économique la morale, la politique
et la charité occupent trop peu de place.
Avec l’évolution des mœurs qui suivent l’évolution des avancées sociales et industrielles,
l’image même du pauvre évolue : ainsi, le pauvre n’est plus, comme c’était le cas au XVIIe
siècle par exemple (que l’on se souvienne de la scène du pauvre dans Dom Juan de Molière)
l’image du Christ souffrant. Il devient en partie responsable de sa propre condition, et les
conduites individuelles revêtent dès lors une nouvelle importance. Ce n’est pas un hasard si
c’est au XIXe siècle que se consolide la distinction traditionnelle entre « bons » et
« mauvais » pauvres : pauvres méritants et pauvres coupables. Les premiers ne sont pas
responsables de leur condition, ils sont les pauvres victimes de la maladie ou de l’âge. Ces
pauvres- sont dignes de recevoir de l’aide, et Benjamin Delessert, libéral convaincu et
fondateur en 1818 de la Caisse d’Épargne de Paris, vante dans son Guide du bonheur (1839),
« la plus belle vertu du vrai chrétien : la charité ». Les seconds en revanche, les pauvres
valides, sont responsables de leur condition par leur refus de travailler. En 1790 déjà, le duc
de La Rochefoucauld-Liancourt, président du Comité de Mendicité de l’Assemblée
Constituante, faisait une distinction fondamentale à ses yeux entre « les véritables pauvres,
c'est-à-dire ceux qui, sans propriété et sans ressources, veulent acquérir leur subsistance par
le travail ; [et] les mauvais pauvres, c'est-à-dire ceux qui, connus sous le nom de mendiants
et de vagabonds, se refusent à tout travail, troublent l’ordre public, sont un fléau dans la
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société et appellent sa juste sévérité » (cité dans J. Imbert (dir.), La Protection sociale sous la
Révolution française, Paris, Comité d’histoire de la Sécurité sociale, 1990). Cette distinction
est toujours d’actualité de nos jours.
Petite bibliographie
Jérôme Lallement, Pauvreté et économie au XIXe siècle, Cahiers d'économie Politique
/ Papers in Political Economy 2/2010 (n° 59), p. 119-140, L’Harmattan, 2010.
J. Imbert (dir.), La Protection sociale sous la Révolution française, Paris, Comi
d’histoire de la Sécurité sociale, 1990.
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