LE CONSEIL DE L’EUROPE Historique Mai 1948 : Le Congrès de la Haye rassemble tous les mouvements promouvant l’idée d’unité européenne. Né alors l’idée de la plus ancienne organisation politique du continent, le Conseil de l’Europe, enceinte de dialogue, de coopération et d’élaboration de normes communes. Adoptée en mai 1949, cette institution est un compromis des différents courants d’idée au sujet de la construction européenne, à savoir : le courant fédéraliste visant à une unité transcendant les Nations, faisant d’eux des entités fédérées (Belgique, France) ; et le courant intergouvernemental optant pour une Europe unie dont les bases reposeraient sur la coopération entre Etats (Grande-Bretagne). Ainsi, il existe un paradoxe entre les compétences et objectifs très larges de cet organe et ses moyens relativement restreints. Ainsi, le pouvoir de décision est confié à l’instance intergouvernemental du Conseil de l’Europe : le comité des Ministres. C’est donc la conception britannique d’une Europe intergouvernementale qui prévalu. Ce mode d’organisation a-t-il empêché le Conseil de l’Europe de jouer un rôle dans la construction de l’Europe ? En effet, les résultats spectaculaires obtenus par les Communautés européennes résultent de la dynamique communautaire fondée sur les abandons successifs de souveraineté. Mode de fonctionnement Le Conseil de l'Europe a pour principaux organes: • Un Comité des Ministres, l’organe de décision du Conseil. Composition : des 46 Ministres des Affaires étrangères ou de leurs Délégués siégeant à Strasbourg (Ambassadeurs/Représentants Permanents). Un système de rotation désigne le président du Comité. Compétences : elles sont considérables, le Comité étant chargé de prendre toutes les mesures propres à réaliser une union entre les peuples (art 13 du statut du Conseil). Limite : En tant que conférence diplomatique, le pouvoir de décision est en réalité retenu par les Etats, prévaut donc la règle de l’unanimité. • Une Assemblée parlementaire, réelle instance fédérale du Conseil de l’Europe. Composition : regroupe 630 membres (315 titulaires et 315 suppléants) issus des 46 parlements nationaux (donc ils sont issus indirectement du suffrage universel). Règle de la proportionnalité par rapport aux nombres d’habitants des Etats. La durée du mandat est inégale puisque celui-ci dépend dès règles parlementaires nationales. Le Président en exercice est René van der Linden (Pays-Bas, PPE/DC). Fonctionnement : les parlementaires se rassemblent par affinités politiques dans des groupes. Ainsi, le parlement se dénationalise. Compétences : organe délibérant du Conseil de l’Europe. Compétences en théorie illimitées. Limites : l’Assemblée du Conseil ne possède pas de pouvoir législatif, elle demeure une assemblée consultative. Cependant il y eut une certaine évolution dans le sens d’un parlementarisme plus développé : session tout au long de l’année, questions écrites et orales aux ministres… De plus, elle s’impose comme autorité morale. C’est une puissance tribunicienne ou les principaux hommes politiques européens ou non européens s’expriment. • Un Congrès des pouvoirs locaux et régionaux composé d'une Chambre des pouvoirs locaux et d'une Chambre des régions. Le Congrès est présidé par Giovanni Di Stasi (SOC, Italie). • Un Secrétariat Général composé de quelque 1800 fonctionnaires et dirigé depuis septembre 2004 par le Secrétaire Général Terry Davis (SOC, Royaume-Uni), ancien vicePrésident de l'Assemblée parlementaire et ancien Président du groupe socialiste à l'Assemblée. D’un rôle au départ strictement administratif, le rôle du secrétaire a évolué. Aujourd’hui c’est lui qui, en partie, oriente et établit la politique générale du Conseil. • Le Conseil s’est enrichi de nombreux organes, tels que : 1 - les organes subsidiaires: Comité mixte, organe de contact et de concertation entre le Comité et l’Assemblée. – les organes de suppléance et de consultation du Comité. – les organes crées par l’Assemblée : commissions parlementaires, commissions permanentes. – les organes juridictionnels : cour européenne des droits de l’homme. – les organes spécialisés : comité d’experts et représentant spécial aux réfugiés… Objectifs et compétences Les statuts du Conseil prévoient une action commune dans les domaines économiques, sociaux, culturels, scientifiques, juridiques, administratifs ainsi que pour la sauvegarde et le développement des droits de l’homme. Le seul domaine réellement exclu est celui de la défense, du fait de la participation d’Etats neutres, ainsi que de la volonté des Etats de préserver cette sphère de souveraineté. Ces compétences vont se réduire au fur et à mesure que les communautés européennes s’attribuent les objectifs d’une unification économique et monétaire de l’Union. Budget ordinaire 186.012.700 d'euros pour 2005. Réalisations concrètes • L’œuvre principale du Conseil de l’Europe : La défense des droits de l'homme et de la démocratie parlementaire. Le Conseil de l’Europe assure également la primauté du Droit. Ont été adoptés 196 conventions ou traités européens ayant force de loi et dont beaucoup sont ouverts aux Etats non membres, sur des questions allant des droits de l'homme à la lutte contre le crime organisé et de la prévention de la torture à la protection des données. Le texte le plus important reste la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme (1950). Ainsi, le Conseil a réussi, sur ce point, à dépasser le stade de la simple coopération intergouvernementale et a fondé par la même une communauté supranationale : celles des droits de l’homme. En effet, la CEDH juge souverainement en dernier ressort. Autres domaines : • La coopération juridique et judiciaire. Domaine ou le Conseil a le plus œuvré. Adoption de conventions pour harmoniser les législations pénales, civiles et commerciales des Etats membres. • La coopération en matière d’économique. Thèmes des projets du Conseil de l’Europe : les problèmes énergétiques, la participation des travailleurs aux entreprises… De plus, l’Assemblée entretient des relations privilégiées avec l’OCDE dont elle est parfois considérée comme l’organe parlementaire officieux. Des délégations des pays de l’OCDE participent une fois dans l’année aux débats économiques du Conseil. • La coopération en matière de politique sociale. Les actes du Conseil ont longtemps précédés dans ce domaine les décisions des Communautés, aujourd’hui ils les prolongent. Conclusion d’accords à l'échelle du continent pour harmoniser les pratiques sociales et juridiques des Etats membres (Code européen de sécurité sociale, Charte sociale européenne en 1963). Le Conseil peut également faire des recommandations aux gouvernements (mesures prévues par l’article 23 du statut du Conseil) définissant des principes directeurs en matière de droit, de santé, de médias, d'éducation, de culture, de sport. Celles-ci n’ont cependant aucun effet juridique. • La coopération culturelle. Le seul domaine ou le Conseil n’a aucune concurrence de la part des autres institutions européennes. Il favorise la prise de conscience de l'identité européenne fondée sur des valeurs partagées et transcendant les différences de culture. Les projets se concentrent plus particulièrement sur l’éducation (équivalence des diplômes et des qualifications universitaires) et sur la culture en général (protection du patrimoine culturelle européen, coopération audiovisuelle…). 2 Dimension paneuropéenne, et plus encore… : 46 Etats membres : pays membres de l’UE (date d’adhésion à l’UE), pays candidats à l’UE. Les pays fondateurs : Luxembourg (5.1949, 4.1951) - Royaume Uni (5.1949, 1.1972) Belgique (5.1949, 4.1951) - Danemark (5.1949, 1.1972) - France (5.1949, 4.1951) - Grèce (8.1949, 1.1981) - Irlande (5.1949, 1.1972) - Italie (5.1949, 4.1951) - Norvège (5.1949) Pays-Bas (5.1949, 4.1951) - Suède (5.1949, 1.1995) Procédure d’admission : Cooptation des Etats membres au sein du Comité des ministres. Seule condition : être un Etat démocratique. Turquie (8.1949) - Islande (3.1950) - Allemagne (7.1950, 4.1951) - Autriche (4.1956, 1.1995) - Chypre (5.1961, 5.2003) - Suisse (5.1963) - Malte (4.1965, 5.2003) - Portugal (9.1976, 1.1986) - Espagne (11.1977, 1.1986) - Liechtenstein (23.11.1978) - Finlande (5.1989, 1.1995) - Hongrie (11.1990, 5.2003) - Pologne (11.1991, 5.2003) - Bulgarie (5.1992) - Estonie (5.1993, 5.2003) - Lituanie (5.1993, 5.2003) - Slovénie (5.1993, 5.2003) - République tchèque (6.1993, 5.2003) - Slovaquie (6.1993, 5.2003) - Roumanie (10.1993) - Andorre (11.1994) - Lettonie (2.1995, 5.2003) - Moldova (7.1995) - Albanie (07.1995) - '' L’exRépublique yougoslave de Macédoine'' (11.1995) - Fédération de Russie (2.1996) - Saint Marin (11.1988) - Ukraine (11.1995) - Croatie (11.1996) - Georgie (4.1999) - Arménie (1.2001) Azerbaïdjan (1.2001) - Bosnie-Herzégovine (04.2002) - Serbie-Monténégro (4.2003) - Monaco (10.2004). Pays candidat à l’adhésion Bélarus (3.1993) Les observateurs au Comité des Ministres Saint Siège (3.1970) - Etats Unis d'Amérique (01.1996) - Canada (5.1996) - Japon (11.1996) Mexique (12.1999) Les Parlements nationaux observateurs à l'Assemblée parlementaire Israël (12.1957) - Canada (5.1997) - Mexique (11.1999) Des interrogations subsistent : Le Conseil de l’Europe ne se détourne-t-il pas de sa vocation européenne en acceptant dans ses rangs des pays à la limite des frontières de l’Europe (Etats du Caucase et d’Asie centrale) ? Ou se fait-il par la même une instance de dialogue privilégiée entre l’Europe et le reste du monde ? L’antichambre de l’UE Le Conseil de l’Europe est distinct de l'Union européenne des "25", mais jamais aucun pays n'a adhéré à l'Union sans appartenir d'abord au Conseil de l'Europe. Il joue un rôle pionner dans l’intégration européenne, en préparant les pays à une adhésion ultérieure à l’UE. Ainsi, à partir de 1989, il a eu pour mission particulière: • d'être un point d'ancrage politique et le gardien des droits de l'homme pour les démocraties post-communistes de l'Europe, • d'aider les pays d'Europe centrale et orientale à mettre en oeuvre et à consolider les réformes politiques, législatives et constitutionnelles parallèlement aux réformes économiques, • de fournir un savoir-faire dans des domaines tels que les droits de l'homme, la démocratie locale, l'éducation, la culture, l'environnement. Cette mission découle de la vocation démocratique que s’est donné le Conseil. La vocation démocratique Article 3 du statut du Conseil : « tout membre du Conseil de l’Europe reconnaît le principe de prééminence du droit et du principe en vertu duquel toute personne placée sous sa juridiction doit jouir des droits de l’homme et des libertés fondamentales ». L’existence d’un Etat démocratique est donc l’impératif idéologique primordial pour une adhésion au Conseil. Ainsi, le Conseil de l’Europe s’élargit à chaque avancée de la démocratie pluraliste (Portugal, Espagne en 1970, PECO en 1990…). De même, il exclut les pays ne répondant plus aux critères démocratiques : en 1969, la Grèce des colonels quitta le Conseil (et ce jusqu’en 1973) afin d’éviter condamnation et exclusion. 3 Cependant le Conseil de l’Europe ne remit-il pas en cause sa vocation démocratique lorsqu’en 1993 il accepta l’adhésion de la Russie, pays alors en pleine guerre de Tchétchénie ? Bibliographie : J-L BURBAN, Le Conseil de l’Europe, 2e édition, Que sais-je ?, PUF, Paris, 1993, 125p. P MOREAU DEFARGES, Les institutions européennes, Armand Colin, Paris, 1993, 165p. D HUBER, Une décennie pour l’histoire, le Conseil de l’Europe 1989-1999, Edition du Conseil de l’Europe, Allemagne, 1999, 314p. Site du Conseil de l’Europe : www.coe.int 4